République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 9041
Projet de loi du Conseil d'Etat autorisant l'aliénation d'un immeuble propriété de l'Etat de Genève, sis sur la commune de Veyrier

Préconsultation

M. Christian Grobet (AdG). Avec tout le respect dû au Conseil d'Etat, j'imagine qu'il n'arrive pas à lire dans le détail tous les projets de lois avant d'en être saisi... Je dois dire que présenter un projet de loi qui se fonde sur une expertise de 1998 me semble - je ne veux pas porter un jugement trop négatif - tout à fait dépassé !

Le marché immobilier, tout particulièrement dans la zone villas, a beaucoup évolué, et, en lisant cette expertise, on voit d'emblée que les valeurs sont erronées ! Le mètre carré de terrain à moins de 500 F en zone villas, c'est tout simplement introuvable aujourd'hui ! La valeur de 400 F le mètre qui a été donnée à ce terrain n'est - excusez-moi de le dire - plus du tout d'actualité, si tant est qu'elle l'était en 1998 ! Je ne pousse pas à l'augmentation du prix des terrains, au contraire, je souhaiterais qu'il soit le plus bas possible, mais, à partir du moment où les règles du marché s'appliquent, on ne peut pas se fonder sur des valeurs aussi anciennes ! Et le coût de la construction fixé à 400 F le mètre cube - là encore, excusez-moi - ce n'est pas sérieux ! Je veux bien admettre le taux de vétusté de 40%, qui paraît élevé pour une villa construite en 1960, mais construire aujourd'hui une villa de ce type à 400 F le mètre cube me semble ridiculement peu élevé, sachant qu'à cette époque déjà, ce n'était pas possible !

Alors, bien sûr, on se demande qui est à l'origine de cette expertise... On tourne la première page, et l'on voit que le mandant est un avocat ! Cela n'a rien d'inhabituel, je suis moi-même avocat, et les avocats sont là pour représenter des personnes qui le demandent. Toutefois, il serait intéressant de savoir qui cet avocat représente - peut-être pourra-t-on nous le dire... Représente-t-il celui qui veut acheter la propriété ? Ce n'est en tout pas un avocat qui agissait pour le compte de l'Hospice général ou de l'Etat, puisque ce bien n'était pas encore en déshérence... Je suis désolé, mais, la première des choses que le Conseil d'Etat devra faire, c'est de demander une nouvelle expertise pour qu'on ait une valeur qui soit crédible et qui corresponde aux conditions actuelles du marché.

D'autre part, je suis extrêmement gêné qu'on ait décidé d'attribuer cette vente à un citoyen, même s'il a une créance à faire valoir. Sans être, et de loin, un chantre des règles du marché, je pense que la moindre des choses serait de mettre cet objet sur le marché et de voir concrètement si d'autres personnes seraient prêtes à payer un prix supérieur à celui qui a été négocié... On nous a en effet assez dit que, quand le Conseil d'Etat nous présente des projets de lois pour l'aliénation de certains biens immobiliers de l'Etat, sans intérêt particulier pour lui, il fallait d'abord fixer un prix, que l'objet devait être mis sur le marché et qu'ensuite il était vendu au plus offrant !

Or ici, on n'est pas en train de vendre au plus offrant: on est en train de conclure un accord avec une personne qui fait valoir une créance, dont on dit, du reste, qu'elle n'est que partiellement admise ! Il y a des maisons, comme vous le savez, qui font l'objet d'un usufruit - on a traité mercredi devant la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la BCGe une villa dans ce cas... C'est évident que lorsqu'il y a une charge sur un objet immobilier, cela diminue son prix, mais, finalement, l'acquéreur décide du risque qu'il veut prendre en achetant. Et on ne vend pas à celui qui invoque la créance pour faire baisser le prix, à moins que personne ne soit prêt à s'aligner sur le prix du créancier. Pour ma part, je trouve qu'il y a là quelque chose de gênant...

Dernière chose. Je voudrais tout de même souligner - cela ressort implicitement de l'expertise qui comporte une conclusion sur la valorisation possible de cette parcelle - que la parcelle a une surface de 1152 m2, ce qui signifie, en d'autres termes, qu'il est possible, dans le cadre de deux villas contiguës, de réaliser 260 m2 de surface de plancher habitable, alors qu'actuellement elle n'est que de huitante et un mètres carrés...

M. Claude Blanc. Quatre-vingt un !

M. Christian Grobet. A chacun son dialecte cantonal ! (Exclamations.)Je reste attaché, Monsieur Blanc, à mon canton d'origine, comme vous êtes attaché à votre ville d'origine dans laquelle vous avez sévi un certain temps à l'exécutif...

M. Claude Blanc. Ma ville d'origine, c'est Lausanne !

M. Christian Grobet. Ah ! Eh bien, cela me rassure ! Mais alors, vous vous êtes naturalisé genevois entre-temps, si je comprends bien !

Une voix. Encore un étranger !

M. Christian Grobet. Et vous avez oublié votre origine !

Pour terminer, je ne connais pas l'implantation de la villa, parce que, malheureusement, le plan cadastral n'a pas été inséré dans les annexes, mais on peut imaginer qu'une villa contiguë pourrait être construite contre la villa existante, vu le potentiel à bâtir extrêmement important. C'est donc une affaire immobilière très intéressante, puisque la valeur est totalement sous-estimée !

Je demande, après le renvoi en commission, que le Conseil d'Etat demande une expertise, qu'il recherche qui était le mandant dans cette affaire et présente un projet complet devant la commission.

Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente

La présidente. Je prends note, Monsieur Grobet, que vous demandez le renvoi en commission de ce projet de loi.

Je donne la parole à M. Velasco concernant le renvoi en commission.

M. Alberto Velasco (S). Mais, Madame, c'est un projet de loi !

M. Bernard Lescaze. Oui, et alors !

M. Alberto Velasco. Merci, Madame la présidente. Mais on intervient en préconsultation, alors le projet de loi sera automatiquement renvoyé en commission...

Effectivement, comme cela a été répété à plusieurs reprises en commission des finances, notre groupe s'opposera à la réalisation de ce type d'actifs, car nous pensons que l'Etat a aujourd'hui besoin de tels locaux... (Commentaires.)J'ai eu l'occasion de chercher des locaux pour des associations qui en avaient besoin, et le département m'a répondu qu'il n'y en avait pas...

Par conséquent, nous nous opposerons en commission en votant non à la réalisation de cet actif.

M. René Koechlin (L). Je signale d'abord - nous n'avons peut-être pas le même projet sous les yeux - que le nom des experts y est indiqué... (Exclamations.)Du mandant ? Ah, pardon !

Mais les experts figurent tout à fait nommément... Nous avons bien le même texte...

Je voulais simplement dire la chose suivante: il me semble positif qu'on n'ait pas le sentiment que M. Grobet et M. Velasco, de l'Alternative, soient les seuls à estimer que la valeur vénale de cette propriété est sous-estimée... Je le confirme: la lecture de ce projet de loi me conforte dans l'idée que tel est le cas. Cela paraît évident.

Donc, il faut que la commission des finances - j'imagine que c'est là que sera renvoyé ce projet de loi - se penche sur cette question. Cas échéant, elle demandera au Conseil d'Etat de procéder à une nouvelle expertise.

Présidence de M. Pascal Pétroz, président

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Je serai bref. Je ne suis pas, comme M. Grobet ou M. Blanc, originaire de Lausanne... Vous connaissez mon origine ! (Exclamations.)

Je crois pouvoir dire que je connais bien cette région, et j'aimerais très simplement corroborer les propos des préopinants. En effet, ce terrain - ne serait-ce que lui, parce que je connais moins la villa - est très largement sous-estimé. Il y a donc lieu de revoir cette expertise avant de traiter cet objet en commission.

Le président. Merci, Monsieur le député. En ce qui me concerne, sachez que je suis originaire de Lutry, et que c'est là que nous nous rendrons pour la sortie du Grand Conseil, Mesdames et Messieurs les députés ! (Exclamations.)

Monsieur Moutinot, je vous donne la parole.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Si vous êtes unanimes à considérer que la propriété dont il est question dans ce projet de loi est sous-évaluée, je ne saurais vous contredire.

Il va de soi que je donnerai suite à votre demande et que la valeur même de cette propriété sera réévaluée. Mais nous aurons l'occasion d'en débattre en commission.

Monsieur Velasco, j'espère que, lorsque la valeur sera déterminée au goût du jour, vous renoncerez à une opposition purement dogmatique... (Remarques.)

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

(Remarque.)