République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8425-A
9. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Christian Grobet, Luc Gilly, Bernard Clerc, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Salika Wenger, Pierre Meyll, Jeannine de Haller, Rémy Pagani, Jean Spielmann et Pierre Vanek modifiant la loi 8196 du 31 août 2000 ouvrant un crédit d'investissement de 1 284 000 F au titre de subvention cantonale à l'Association Média@muros pour l'élaboration du projet, l'organisation et la réalisation des manifestations liées à la journée genevoise à l'Expo.02. ( -) PL8425
Mémorial 2001 : Projet, 256. Renvoi en commission, 260.
Rapport de majorité de M. Claude Blanc (DC), commission des finances
Rapport de minorité de Mme Salika Wenger (AG), commission des finances

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Rapporteur : M. Claude Blanc

La Commission des finances a examiné le projet de loi 8425 au cours de ses séances des 14 et 21 mars 2001 sous la présidence de M. Dominique Hausser.

En préambule, il faut rappeler que le présent projet de loi, déposé le 14 décembre 2000 par 10 députés de l'Alliance de gauche consiste à interrompre le subventionnement accordé le 30 août 2000 au montant des engagements financiers au 31 décembre 2000.

Lors de sa première séance, la commission a reçu Mme Serdaly, présidente du comité de pilotage chargé de l'organisation du projet dit « De quoi GE me mêle » accompagnée de MM. Gérald Morin, chef de projet, Kanyana Mutambo, rédacteur en chef de la revue « Regard africain » et président de l'Association Média@muros et Philippe Brun, chef de service au DAEL, membre du comité de pilotage, délégué cantonal à Expo.02 et président du projet « Vivre les frontières » projet intercantonal à huit cantons autour de la question de la limite de la frontière en tant que valeur.

M. Morin s'attache à décrire la situation actuelle du projet en rappelant qu'il a comme base, non pas de faire un spectacle d'un jour à Yverdon, mais un travail sur quatre ans avec la création de communautés. Elle est d'ailleurs détaillée dans le document remis aux députés :

14 communautés sont déjà au travail dans des lieux aussi différents que les Pâquis ou Champ-Dollon. L'événement du 12 décembre 2000 qui aurait servi de présentation ayant été annulé, il est remonté d'une autre manière au Salon du Livre, en collaboration avec les archives nationales. Les difficultés rencontrées lors du montage des expositions nationales de 1888, 1896, 1914, 1939 et 1964 y seront décrites, en particulier la difficulté de se présenter comme Suisse, tous les 35 ans, à soi-même et à l'extérieur.

En ce qui concerne la communication, un site Internet relate pour l'instant l'état des travaux. A partir du mois de septembre, un forum réunira les comités qui s'exprimeront directement. Un « Info » mensuel vient d'être diffusé et il paraîtra au Salon du Livre de même que le journal GE.02. Le Salon du Livre sera également l'occasion de débats et de conférences, notamment sur l'article 43 concernant les cas psychiatriques à Champ-Dollon, sur le rapport de l'être humain et de l'animal, de la santé et de la culture. Le groupe pédagogique du projet mène des enquêtes dans les écoles sur la notion de l'étranger qui laissent déjà apparaître qu'elle diffère entre générations, la frontière étant plus floue chez les plus jeunes qui ne le voient pas nécessairement dans le petit noir de la classe.

S'agissant du partenariat, l'abandon de l'inauguration et d'un sponsor le 12 décembre a créé un frein, voire même le projet de loi 8425. Toutefois, la pente est en train de remonter et le Comité de pilotage est à même d'annoncer que la Banque Migros et la Rentenanstalt sont partenaires. D'autres attendent que le navire ait quitté le port et qu'il soit déjà en vitesse de croisière. La situation financière, arrêtée au 28 février 2001, est présentée en détail dans le document remis aux députés.

M. .

En premier lieu, le projet est typiquement genevois et répond à une spécificité de Genève au sein de la Suisse. En effet, il ne pourrait pas avoir lieu dans un autre endroit, une autre ville ou un autre canton dans la mesure où Genève, par sa composition pluriculturelle et le nombre d'étrangers, est la ville la mieux indiquée pour aborder le mythe et la réalité d'une ville et de ses communautés étrangères. Il permet ainsi d'explorer d'autres aspects d'une identité genevoise.

Le deuxième aspect est celui de l'intégration. Le fait de mettre en présence des cultures différentes et de jeter des passerelles entre des personnes de culture différente va beaucoup plus loin qu'un phénomène d'intégration à la mode en ce moment dès l'instant où il s'agit de rencontres de personnes autour de problématiques qui les concernent en vue d'un enrichissement mutuel.

Un troisième aspect est lié au côté social dans la mesure où le travail porte à l'intérieur des communautés genevoises, d'une part, dans le but de les décloisonner et d'autre part, de provoquer des réflexions autour d'une réalité sociale commune, tout cela en vue d'une meilleure prise en compte d'une certaine réalité genevoise.

En conclusion, M. Mutambo dégage cinq caractéristiques qui sont propres au projet, le décloisonnement, la transversalité verticale et horizontale, entre générations et classes sociales différentes, la diversité, la mixité et la durabilité. L'exemple d'une communauté est celle qui a été réalisée au sein du Comité de pilotage. Depuis 26 ans qu'il réside lui-même à Genève et qu'il milite dans l'associatif, c'est la première fois qu'il est inclus d'emblée dans un projet où il se sent dès le départ concerné.

. .

Le Comité de pilotage, issu de quatre départements de l'Etat, a été élargi à une représentante de la BCGe, à M. Mutambo, rédacteur de « Regard africain » et à M. Michel Hug de l'Association des communes genevoises. Il a la charge de suivre et d'actionner la gestion du projet. Il a été demandé à Gérald Morin et à Pierre Olivier de constituer une association dont les statuts sont disponibles et qui a pour but la réalisation de l'événement. Le travail se fait donc dans un cadre légal parfaitement clarifié, voire même extrêmement contraignant. Un contrat avec un cahier des charges, en vigueur depuis mars 2000, est à disposition. Il définit la nature du mandat et des tâches des mandataires mais également tous les instruments de suivi qu'ils se doivent de fournir mensuellement ou trimestriellement. Le suivi porte également sur les contacts avec les communautés, leur formation et les démarches auprès du partenariat privé.

Le Comité de pilotage se réunit une fois par mois. En outre, une réunion d'état-major, une fois par mois également, prépare les réunions et définit les groupes de travail dans lesquels chacun des membres du Comité de pilotage est délégué pour suivre certains aspects particuliers.

L'impression de flou qui s'est dégagée lors des événements du mois de décembre 2000 est certainement due à d'autres concours de circonstances malheureuses et non pas aux outils de suivi mis en place pour le contrôle des mandataires. On a également évoqué le fait que certains d'entre eux se mettraient de l'argent dans les poches grâce au projet. Il est vrai qu'il est difficile, avec une forte composante sociale et du fait qu'il n'est pas aisé de créer 50 communautés, d'abord de les identifier, puis de mobiliser les gens dans un travail bénévole. Il n'est pas non plus simple de mobiliser des partenaires privés. Les mandataires ont une base financière sur laquelle ils travaillent en fonction du cahier des charges et du nombre d'heures effectuées. Ils sont rémunérés à environ 63 F de l'heure ce qui ne paraît pas excessif. La règle générale à la base du projet a été de se référer à un salaire de 10 000 F mensuel pour le management du projet.

En partant de l'idée que la participation de l'Etat ne serve qu'à financer les salaires des mandataires, un budget « corps » a été établi qui sert à assurer la viabilité du projet. Par contre le budget 2e rang représente les actions qui seront développées et enrichies pour autant que des partenariats financiers complémentaires soient trouvés.

M. Brun, responsable des relations entre le canton de Genève et Expo.02, est en contact avec la direction artistique et le secrétaire général d'Expo.02. Le projet genevois est souvent cité comme exemple. D'autre part, les cantons ont des réunions régulières pour la coordination des journées cantonales. Genève a reçu l'an passé la conférence des délégués cantonaux, occasion de présenter le projet qui a suscité beaucoup d'intérêt.

Les travaux sont en bonne voie et ils en sont au stade de l'avant-projet définitif. Le Comité de pilotage a des réunions mensuelles avec les délégués des 8 cantons concernés et, en principe, le projet définitif devrait être achevé en mai/juin. Expo.02 prépare, d'une part, une action de communication importante à partir du mois de mai, ce qui permettra, chacun l'espère, de remonter la pente. Elle prépare, d'autre part, des visites de chantier, au départ pour les personnes qui travaillent directement et qui seront ensuite ouvertes au public.

Questions de la commission : Budget total

Il est observé que le budget de dépenses du projet est de l'ordre de 3,3 millions. Un montant de 635 000 F a été dépensé en 12 mois de travail. Comment le solde sera-t-il obtenu ?

M. Morin fait remarquer que le départ du projet coûte beaucoup moins cher, au niveau de la caisse, que le résultat final. En second lieu, des éléments privés ont été bloqués par l'annulation de la manifestation du 12 décembre, raison pour laquelle un montant de 40 000 F a été rendu à South Investment puisque la société n'a pas été acceptée comme partenaire par l'Etat. A titre de comparaison, le budget de la journée cantonale du canton de Vaud est fixé à 2 millions dont 1,5 million uniquement pour ladite manifestation. Par contre, le projet genevois est censé se terminer en 2003 avec le travail des 600 personnes. Quant au montant de 625 000 F, il s'agit d'une situation comptable et non pas d'un bilan. Par rapport au budget « corps » de 3 545 000, il manque un montant de 540 000 F de la part de partenaires privés, l'Etat, les communes et le DIP, pour certaines opérations, se partageant ledit montant.

Mme Serdaly précise que le budget « corps » est le minimum pour que le projet soit viable, la partie menant au budget final de 3,3 millions étant soumise à la participation de partenaires.

M. Morin indique la situation actuelle, soit 40 000 F, contre 240 000 F avant le refus d'un partenaire de l'Etat. Un autre partenaire qui s'était engagé à hauteur de 40 000 F s'est retiré suite à l'annulation de la manifestation du 12 décembre. La recherche de partenariat privé pourra redémarrer avec un minimum de confiance le jour où le Grand Conseil aura débloqué le projet.

M. Morin explique que les communautés en formation sont celles qui, après avoir rencontré d'autres communautés déjà implantées, doivent décider si elles veulent participer au projet et désigner un responsable. Parmi celles qui ont été dissoutes, celle de l'Usine a donné comme raison qu'elle n'était pas d'accord sur le choix de sponsors, tels Mc Donalds ou Coca-Cola. En ce qui concerne l'Immeuble du Trèfle Blanc, la communauté a été primitivement dissoute en raison de problèmes internes au niveau de l'association qui devait porter le projet. Le projet de M. Mutambo est de repartir sur un lien dudit immeuble, situé sur la commune de Lancy, avec l'immeuble de l'Etoile, sur Plan-les-Ouates, dans le but d'intégrer une réflexion commune sur les difficultés d'intégration liées à l'urbanisme. Le Forum de Meyrin démarre sous une autre forme et il patronnera une communauté autour des aînés et du rapport à l'étranger dans la vieillesse.

Mme Serdaly précise qu'il n'est pas certain que la même proportion de communautés, soit 14 jusqu'à aujourd'hui, pourra être développée d'ici la journée cantonale. D'autre part, il sera fait mention de toutes les communautés, qu'elles aient réussi ou non à se maintenir. L'important est d'avoir des communautés fabriquées dans des secteurs professionnels et socioculturels qui ont un sens par rapport à Genève aujourd'hui. Avoir une communauté autour des professions de la santé et de ce que représente le fait d'être étranger dans le rapport au malade est, par exemple, un thème central dès l'instant où de nombreux étrangers travaillent dans lesdites professions.

Mme Serdaly souligne que les communautés se réunissent autour d'une problématique, qu'elles retravaillent, qu'elles redéfinissent - l'idée est qu'elles puissent avoir, soit quelque chose à réaliser, soit quelque chose à partager, soit une envie de développer une réflexion et de faire des propositions. A partir de là, la communauté autour de la santé, par exemple, pourra déboucher sur une publication sur la place de l'étranger dans ces professions. D'autre part, chaque communauté va créer un objet symbole qui sera présenté à la population genevoise, avant de partir pour Yverdon, puis mis en scénographie, lors de la Journée cantonale. En outre, les communautés seront réunies après le 14 septembre 2002 dans un grand forum à l'ONU.

Mme Serdaly fait part de sa difficulté en tant que présidente du Comité de pilotage de gérer un projet en prévoyant un déficit. Techniquement, elle a de la peine à l'envisager de cette manière. C'est la raison pour laquelle, en fonction de la situation actuelle, chaque objet est examiné pour être assuré qu'il soit financé.

M. Brun signale qu'il a pris contact avec M. Moutinot dès le dépôt du projet de loi de l'Alliance de Gauche. Les directives ont été très claires, à savoir que le travail pouvait être poursuivi mais qu'il ne fallait pas engager l'Etat dans de nouvelles dépenses.

M. Morin précise que le budget est décomposé en premier rang et second rang, le second rang n'étant pas abordé tant que le premier n'est pas couvert. Une liste de quelque 136 partenaires a été soumise à l'Etat et plusieurs d'entre eux attendent le feu vert du Grand Conseil pour démarrer.

La discussion tourne essentiellement autour de la crédibilité et de la viabilité du projet, ainsi que sur le complément de financement à trouver.

Il est vrai que tout cela ne déclenche pas l'enthousiasme, notamment quant à la compréhension des thèmes choisis et des méthodes de travail.

Néanmoins, comme cela avait d'ailleurs déjà été dit lors du débat du 30 août 2000, les personnes chargées de ce projet travaillent avec beaucoup de sérieux et d'acharnement au milieu de beaucoup de difficultés et d'incompréhension. Il serait regrettable de tout plaquer là alors que plus de la moitié de la subvention a déjà été engagée.

C'est pourquoi la Commission des finances vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, par 7 voix (3 L, 2 DC, 1 R, 1 Ve), contre 4 (2 AdG, 2 S) et 1 abstention (S) de refuser le projet de loi 8425.

Projet de loi(8425)

modifiant la loi 8196 du 31 août 2000 ouvrant un crédit d'investissement de 1 284 000 F au titre de subvention cantonale à l'Association Média@muros pour l'élaboration du projet, l'organisation et la réalisation des manifestations liées à la journée genevoise à l'Expo.02

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

La loi 8196 du 31 août 2000 ouvrant un crédit d'investissement de 1 284 000 F au titre de subvention cantonale à l'Association Média@muros pour l'élaboration du projet, l'organisation et la réalisation des manifestations liées à la journée genevoise à l'Expo.02, est modifiée comme suit :

Art. 8 (nouveau)

Le montant du crédit inscrit à l'article 1 est ramené au montant des engagements financiers au 31 décembre 2000.

ANNEXE 1

91011ANNEXE 2

1213141516171819202122

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Rapporteur : Mme Salika Wenger

Lors des discussions et du vote de la loi 8196, ce projet a été voté du bout des lèvres par la droite ; quant à l'AdG elle votait négativement sur ce projet qui lui semblait déjà contestable.

Les remous provoqués par l'inauguration manquée des mini-arteplages le 12 décembre 2000 sont la raison pour laquelle l'AdG a présenté ce projet de loi 8425 mettant fin aux subventions d'un projet dont l'AdG soupçonnait le manque de pertinence et le vide prétentieux.

(Tous les textes en italique qui vont suivre sont des citations des représentants du « comité de pilotage » extraites des différentes auditions)

En relisant attentivement les différents procès-verbaux et documents distribués lors des différentes présentations du projet « Ge.02, de quoi GE me mêle ? » nous aurions enfin dû en comprendre la teneur, c'est loin d'être le cas. Aujourd'hui comme lors de la première présentation ce contenu est loin d'être clair. Si l'idée maîtresse de ce projet est un rapprochement et une compréhension interactive entre les Genevois et « les communautés étrangères » elle est difficilement déchiffrable pour le commun des mortels auquel s'adresse cette initiative et par là même elle rate sa cible.

Aux différentes questions posées sur le fond, les réponses sont des plus vagues : « des projets qui transformeraient des choses par la suite ou créer des objets qui auraient une seconde vie » ? « des représentants de milieux étrangers » ? « articuler le projet de manière transversale et durable, avec quelque chose qui commencerait maintenant, qui aurait un temps fort en 2002 et qui continuerait au-delà » ? « aller au-delà de la communication pour passer à la communion - qui peut être le fait de boire ensemble - ». Trop de « choses » et pas assez de faits.

Mais supposons un instant que nous ayons compris, que font précisément les communautés déjà constituées ?

Mme Serdaly souligne que les communautés se réunissent autour d'une problématique, qu'elles retravaillent, qu'elles redéfinissent. L'idée est qu'elles puissent avoir, soit quelque chose à réaliser, soit quelque chose à partager, soit une envie de développer une réflexion et de faire des propositions. A partir de là, la communauté autour de la santé, par exemple, pourra déboucher sur une publication sur la place de l'étranger dans ces professions. D'autre part, chaque communauté va créer un objet symbole qui sera présenté à la population genevoise, avant de partir pour Yverdon, puis mis en scénographie, lors de la Journée cantonale. En outre, les communautés seront réunies après le 14 septembre 2002 dans un grand forum à l'ONU.

Nous n'avons pas souvenir d'avoir reçu un rapport ou lu un article concernant cette présentation à l'ONU. Pas plus qu'il nous a été présenté quelque « chose » que ce soit au cours de la dernière entrevue avec une partie du « comité de pilotage ».

Si nous en croyons les déclarations de M. Pierre Olivier (directeur de l'Agence Arpège-communication spécialisée dans le développement durable ?) « le dénominateur commun de ces composantes s'appelle le civisme ou la notion de citoyenneté ». Nous sommes totalement d'accord avec ces vecteurs mais ils se réalisent en partie par le biais de la scolarité libre et gratuite et dans le travail. Certes le droit de vote serait un pas de plus vers cette intégration, même si le peuple en a jugé autrement pour le moment. Mettre en exergue les particularités c'est nier le rôle fédérateur de la démocratie et opposer les particularités culturelles aux besoins universels de l'humanité qui sont incrits dans la constitutions. Dans ce genre de pratique les Etats-Unis sont une réussite en ce qui concerne l'identification, la division et l'exclusion des « communautés spécifiques ». Le fait d'envisager les « communautés étrangères » comme extérieures aux « réalités genevoises » pour nous, participe déjà du processus de division.

Le discours post-moderne des diverses présentations ne pallie pas au flou d'un projet qui ne se justifie que par sa propre existence : M. Mutambo dégage cinq caractéristiques qui sont propres au projet, le décloisonnement, la transversalité verticale et horizontale entre générations et classes sociales différentes, la diversité, la mixité et la durabilité. L'exemple d'une communauté est celle qui a été réalisée au sein du Comité de pilotage.

Nous sommes dans la même situation que Expo.02. Une bonne partie de l'argent de la subvention a été dépensée sans visibilité des résultats pour la population à une exception près : l'affaire de l'inauguration dans la rade de mini-arteplages financés de manière tellement contestable qu'elle n'a pas eu lieu. Mais si nous voulons en voir plus c'est comme au poker, il faut payer. L'argument qui dit « une partie de la subvention est déjà dépensée et nous ne pouvons pas nous arrêter en chemin » est le même utilisé par les managers de Expo.02 qui coûte aujourd'hui quasi 1 milliard aux Confédérés et dont on peut prévoir aujourd'hui que cet événement sera un fiasco.

Ce financement est un modèle du genre : « En partant de l'idée que la participation de l'Etat ne serve qu'à financer les salaires des mandataires, un budget « corps » a été établi qui sert à assurer la viabilité du projet. Par contre le budget 2e rang représente les actions qui seront développées et enrichies pour autant que des partenariats financiers complémentaires soient trouvés. ». Or pour l'instant les financements privés tardent à se manifester ; est-ce à dire qu'il n'y aurait pas « d'actions » ? et que nous aurons payé ces salaires pour le plaisir d'offrir à un « Comité de pilotage » la possibilité de : « Dans « l'usine à presse-citron », il y a une phase de recherche et de développement et même là, pour développer le produit adéquat - mais cela, on ne le voit jamais - cela coûte très cher et cela prend beaucoup de temps. C'est aussi une caractéristique de l'expo d'avoir peut-être des « trucs » qui sont périmés mais il y a là une collection d'idées qui sont au stade des concepts, qui sont en travail, dans les étapes de recherches. C'est vrai qu'il y a un côté « intello » et abstrait, on ne voit pas bien où cela va mener mais il est vrai aussi que d'habitude ce travail ne se voit pas. Ce qui est particulier à Expo.02 est que cela a été mis au grand jour. » (Mme Serdaly)

« On a également évoqué le fait que certains d'entre eux (les mandataires) se mettraient de l'argent dans les poches grâce au projet. Il est vrai qu'il est difficile, avec une forte composante sociale et du fait qu'il n'est pas aisé de créer 50 communautés, d'abord de les identifier, puis de mobiliser les gens dans un travail bénévole. Il n'est pas non plus simple de mobiliser des partenaires privés. Les mandataires ont une base financière sur laquelle ils travaillent en fonction du cahier des charges et du nombre d'heures effectuées. Ils sont rémunérés à environ 63 F de l'heure ce qui ne paraît pas excessif. La règle générale à la base du projet a été de se référer à un salaire de 10'000 F mensuel pour le management du projet ». (Mme Serdaly)

Conclusions : les « communautés étrangères » vivent in situ l'intégration : elles travaillent bénévolement (gratuitement) pour des managers aux salaires de ministres, qu'ils prétendent n'être pour eux que des « peanuts », sur un projet qui peut-être ne verra jamais le jour ! C'est à la limite du cynisme.

Dans ces conditions il est aisé de comprendre les difficultés rencontrées par le « Comité de pilotage » pour mener à bien... les choses dont il est fait mention mais dont nous ne savons toujours rien. D'ailleurs il serait intéressant de savoir pourquoi déjà 6 communautés se sont dissoutes notamment celles de l'Usine, du Centre européen de la culture, le Trèfle Blanc, etc. Du projet qui devait comporter une cinquantaine de communautés il n'en reste aujourd'hui que 14 pour le même prix. Mais que l'on se rassure, il sera fait mention de toutes les communautés qu'elles aient réussi ou non à se maintenir ...

Dans le rapport sur l'avancement des travaux il est étonnant de remarquer que sur les 127 partenaires pressentis les 3 qui ont finalisé leur participation sont des institutions publiques qui de toute manière auraient participé à un projet pour Genève : les TPG, le HCR, la Loterie Romande.

D'une part, alors que les montants alloués aux requérants d'asile se montent à des sommes dérisoires qui ne permettent à personne de survivre, il serait indécent de continuer l'hémorragie d'argent dont on pourrait faire un meilleur usage. D'autre part le secteur privé qui devrait être le premier concerné par cet événement démontre assez peu d'intérêt pour ce projet, ce qui nous permet de prévoir d'ores et déjà un dépassement de l'ordre de 500 000 F alors que 600 000 F ont déjà été dépensés sans résultat autre que le fiasco des mini-arteplages dans la rade. Certes la somme n'est pas très importante au regard du budget de l'Etat mais une fois de plus ce n'est pas une raison pour le gaspiller au profit de technocrates qui n'ont même pas réussi à convaincre les néophytes que nous sommes de la validité de leur projet.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les député-e-s, si vous ne voulez pas continuer à financer ce qui nous semble être un projet fumeux, nous vous recommandons de voter ce projet de loi.

Premier débat

M. Laurent Moutinot. La commission des finances m'avait demandé de vous indiquer le montant global qui a été dépensé sur le crédit pour la journée genevoise, crédit qui est donc remis en cause par le projet de loi que vous examinez actuellement.

Je vous informe qu'il a été dépensé 554 000 F pour l'exercice 2000 et 234 000 F pour l'exercice 2001 jusqu'à aujourd'hui, soit, au total, 788 000 F. 

Mme Janine Hagmann (L). Nous avons commencé nos travaux à 8 h ce matin par un projet de loi modifiant un projet de loi qui est entré en vigueur il y a à peine une année...

Dans le cas présent, il s'agit d'un projet de loi qui demande une modification d'un précédent projet de loi qui a été voté en août 2000 par la majorité de ce Grand Conseil, soit il y a moins d'une année... On peut donc à juste titre se demander si les éléments nouveaux qui permettent aux députés de l'Alliance de gauche de proposer une modification de ce projet de loi sont suffisants pour justifier une telle modification. Les gens vont-ils comprendre ? Ces sempiternels allers et retours décisionnels ne vont-ils pas lasser les citoyens ? On entend dire sans cesse qu'en démocratie il faut se plier à la majorité; or, depuis ce matin nous assistons au deuxième aller et retour d'un objet - en effet, cela a déjà été le cas pour une motion traitée à la séance de 10 h !

La seule vraie question à se poser à propos de ce projet de loi est la suivante : faisons-nous confiance au Conseil d'Etat pour mettre sur pied la journée genevoise, de façon à ce que Genève soit fière de sa participation à une expo qui, malgré les critiques formulées de toutes parts, a sa raison d'être ? Il est vrai que si Genève avait obtenu ce que j'aurais tellement désiré : l'expo «Segond» dont le sujet était le cerveau, nous aurions vraiment vu des cerveaux en action... (Exclamations.) Peut-être bien que le projet présenté ici manque un tout petit peu de réflexion... Nous sommes d'accord, Mesdames et Messieurs les députés, mais quand même ! Il ne faut pas toujours réinventer la poudre !

Un des objectifs de cette expo - vous le savez très bien - est de fédérer, d'accélérer, de rendre visibles des idées et des actions existantes. Cela est-il contestable ? Je vous rappelle pour mémoire que toutes les communes se sont prononcées à l'unanimité : l'Association des communes genevoises a publié un communiqué, les communes participent financièrement à la journée genevoise...

M. Christian Grobet. Combien ?

Mme Janine Hagmann. Il s'agit d'une somme fixée au prorata du nombre d'habitants de chaque commune, mais je ne sais plus exactement à combien elle se monte, Monsieur Grobet : il faut que je vérifie !

Hier, vous avez tous vu que Lili, la mascotte d'Expo.02, a été présentée à la presse. Lili va passionner les enfants, et sept autres personnages la rejoindront. Si je cite cet événement, c'est pour montrer qu'un engouement certain se fait jour et qu'à un an de cette exposition Genève doit montrer une solidarité confédérale. Pour cela, je vous propose de soutenir le rapport de majorité très bien défendu par M. Blanc.  

Mme Mariane Grobet-Wellner (S). Le groupe socialiste soutient dans sa majorité ce projet de loi visant à interrompre la subvention accordée le 30 août 2000.

Nous nous posons des questions sur le sérieux du comité de pilotage et sa capacité à mener ce projet à terme. Aucune explication acceptable n'a été donnée au sujet du manque d'intérêt des partenaires pressentis et de l'absence de confirmation de leurs engagements financiers, alors qu'ils sont censés être les premiers intéressés.

Tout en étant peu enthousiastes vis-à-vis de ce projet, une partie des députés socialistes trouvent cependant regrettable de tout arrêter aujourd'hui alors que l'on vient d'avoir les chiffres : 788 000 F ont déjà été dépensés sur 1,284 million. Etant donné que cela correspond à une grande partie de la subvention qui a déjà été engagée, ils s'abstiendront lors du vote. 

Mme Salika Wenger (AdG), rapporteuse de minorité. Mme Hagmann a prononcé un mot extrêmement important dans le dossier qui nous occupe : le mot «comprendre»... Or, pour l'instant, personne ne comprend rien à rien ! C'est un petit peu pour cela que nous voulons alerter tout le monde sur cette journée qui, d'ailleurs, n'en est pas une, puisqu'il s'agit d'un projet sur quatre ans...

Une voix. Trois ans !

Mme Salika Wenger, rapporteuse de minorité. Trois ans, oui ! Mais la demande de cesser le versement de cette subvention n'a rien à voir avec la journée genevoise !

D'autre part, le fait que les deux tiers de cette subvention aient été déjà dépensés ne nous empêche pas de faire l'économie du reste, Madame Hagmann !

Quant à se plier à la majorité... Quand on voit la catastrophe qui s'annonce avec Expo.02, j'aimerais bien que Genève soit le seul canton à ne pas être entré dans cette dynamique consistant à dire que comme nous avons déjà dépensé 350 millions nous sommes obligés de dépenser encore 400 millions. Nous sommes à plus de 700 millions, et nous ne voyons toujours rien venir ! Alors, je dois dire que si nous pouvions être le seul canton à ne pas être entré dans cette dynamique, j'en serais particulièrement fière ! Voilà ce que je voulais vous dire, Madame Hagmann.

Moi, je veux bien me plier à la majorité, et j'imagine que mon groupe le ferait volontiers si nous avions affaire à un groupe qui se montre un peu responsable avec les deniers de l'Etat, qui, par ailleurs, sont distribués de manière extrêmement parcimonieuse à des personnes qui en auraient beaucoup plus besoin, me semble-t-il ! 

M. Bernard Lescaze (R). Au moment de l'adoption du premier projet, la plupart des groupes ont fait part de leurs inquiétudes, de leurs réticences et, malgré tout, de leur volonté de participer au projet qui nous est soumis aujourd'hui.

Je suis étonné de découvrir que Mme Wenger, qui d'habitude comprend vite, n'a encore rien compris et qu'elle cherche à comprendre. Car ce que nous avons retenu de ce projet est quand même une idée généreuse et qui s'inscrit parfaitement dans une perspective genevoise.

Ce qui m'étonne moins, en revanche, c'est la façon quelque peu dédaigneuse dont Mme Wenger nous propose, étant donné que les deux tiers sont déjà dépensés, d'économiser le dernier tiers. En réalité, Madame, vous voulez jeter l'argent au Rhône !

C'est vrai que nous avons été parfois habitués à voir votre groupe faire des dépenses somptuaires en faveur de «nécessiteux», entre guillemets, culturels ou autres. Mais, Madame, dans ce cas-là, je pense qu'il faut aller jusqu'au bout de la démarche. Pour notre part, nous allons jusqu'au bout de la démarche : nous faisons quand même confiance aux organisateurs de cette manifestation genevoise qui sont venus à deux reprises nous présenter leur projet. Peut-être n'avons-nous pas tout compris, mais nous croyons quand même avoir saisi l'intérêt de ce projet.

C'est pourquoi le groupe radical votera ce projet, ou confirmera plus exactement - pour que vous n'ayez pas une fausse joie - le vote que nous avions fait la première fois, de façon que le projet «De quoi GE me mêle» puisse être mené à son terme. 

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. En faisant un petit retour en arrière et en se rapportant à la première séance de la commission des finances qui avait eu à traiter le précédent projet de loi, celui qu'il est question d'abroger aujourd'hui, je me souviens qu'en sortant de la séance avec quelques députés de l'Entente nous devisions d'une manière un peu désabusée en nous disant que nous avions de nouveau affaire à une bande d'intellectuels de gauche... (Rires.) ...qui nous présentaient un projet fumeux, comme à leur habitude, auquel nous ne comprenions a priori pas grand-chose. Nous nous demandions véritablement si nous allions les suivre...

Toutefois, nous nous sommes donné comme ligne de conduite d'écouter les arguments des uns et des autres et nous sommes arrivés à la conclusion que cette démarche valait la peine d'être tentée, même si les théories défendues par les membres du groupe de pilotage peuvent paraître parfois assez difficiles à décrypter, compte tenu de la raison objective qui les anime, c'est-à-dire de mieux faire comprendre comment les habitants de Genève d'où qu'ils viennent se donnent les moyens de vivre ensemble. Et puis, au fil des débats, nous nous sommes rendu compte que les protagonistes du comité de pilotage, même s'ils nous sont apparus comme des intellectuels pas toujours accessibles, avaient eux-mêmes une idée assez précise du but qu'ils voulaient atteindre et qu'il était finalement possible de leur faire confiance.

C'est dans cet état d'esprit que nous avons - avec une partie d'entre vous, Mesdames et Messieurs les députés - voté le 30 août dernier ce projet de loi qui consistait à financer la préparation de ce projet, qui dans le fond se substitue à ce qui était traditionnellement une journée cantonale avec Vieux Grenadiers, musique de Landwehr, etc. - dont vous n'auriez pas voulu d'ailleurs... Nous, nous l'aurions acceptée, mais puisque autre chose nous était présenté qui n'était pas tout à fait dans notre culture, nous avons pensé que cela valait la peine, de temps en temps, de faire un pas à la rencontre de ceux qui pensent différemment. Nous nous sommes donc laissé convaincre et nous avons voté le premier projet.

Alors, depuis, il y a eu les péripéties que vous connaissez : l'affaire Ben Ladin, à propos de laquelle M. Vanek a dit à la télévision l'autre jour tout le mal qu'il fallait penser du Conseil d'Etat dans cette affaire ! Bref, tout ça pour dire que les événements ultérieurs ont été divers : il y a eu des événements négatifs, mais je crois pouvoir dire qu'il y a maintenant des signes positifs qui apparaissent en ce qui concerne l'exposition nationale. Je l'avais dit lors du premier débat et je le répète ici : ces signes positifs me font penser, en bon Vaudois, que je risque d'être déçu en bien par la réalisation de l'exposition nationale et que nous pouvons par conséquent continuer à faire confiance.

Vous dites, Madame Wenger, que si les deux tiers du budget ont déjà été dépensés nous économiserons au moins le tiers restant... C'est un peu facile ! Avoir jeté à la poubelle presque 800 000 F et renoncer au projet pour en économiser un peu plus de 300 000 F, alors que maintenant les affaires avancent au point qu'elles seront de toute manière présentables, cela est bien dommage ! Pour les 300 000 F qui restent, je crois qu'il vaut la peine de voir le résultat du travail que les promoteurs du comité de pilotage accomplissent avec beaucoup de détermination. Il est vrai que jusqu'à présent ils n'ont pas réussi à nous enthousiasmer, mais, en fin de compte, je garde l'espoir de l'être.  

M. Georges Krebs (Ve). Ce projet part d'une idée généreuse et originale et, malgré toutes les difficultés qui ont surgi avec l'équipe en place pour le mener à bien, je pense qu'il faut absolument lui faire confiance pour qu'Expo.02 se réalise. Compte tenu des sommes qui ont déjà été dépensées, il serait ridicule de ne pas aller jusqu'au bout.

C'est pourquoi nous nous opposerons au projet de l'Alliance de gauche pour que ce projet genevois puisse arriver à son terme et que l'Expo.02 soit une réussite. 

Mme Salika Wenger (AdG), rapporteuse de minorité. J'entends bien, Monsieur Blanc : entre la proposition d'une journée avec les Vieux Grenadiers et la proposition qui nous est faite par l'Association Média@muros de nous expliquer comment nous communiquons quand on boit des verres ensemble, je ne suis pas certaine de faire le choix de vouloir payer un million et quelque pour qu'on m'enseigne une chose aussi élémentaire que de boire des coups avec les copains dans un coin ! Alors, je suis désolée, Monsieur Blanc, mais pour moi ce n'est pas un projet !

D'autre part, je vous rappelle que, même si ce projet de loi a été voté au mois d'août par la majorité, l'Alliance de gauche, déjà à l'époque, était plus que critique, puisqu'elle ne l'a pas voté... C'est d'ailleurs pourquoi nous revenons sur ce projet de loi, mais contrairement à ce que Mme Hagmann a dit tout à l'heure, nous ne revenons pas sur un projet que nous avons voté : nous continuons à penser et nous insistons pour dire que ce projet n'est pas un projet porteur et, en tout cas, il n'est visiblement pas porteur pour ceux qui devraient être intéressés par cette journée, puisqu'il semble qu'aucun privé ne se soit manifesté pour y participer et que les seules institutions qui se sont impliquées sont des institutions plus ou moins liées à l'Etat, en dehors du HCR qui, de toute manière, participe à tout ce qui a lieu à Genève. Alors, je ne vois pas très bien comment on va faire, puisque, pour l'instant, seuls l'Etat et des institutions de l'Etat participent au financement et que nous n'avons encore aucun résultat et aucune visibilité du projet qui a démarré il y a deux ans.

Quant à moi, je suis navrée, mais je trouve que l'hémorragie a assez duré ! Même si pour quelques-uns, c'est une petite blessure qui saigne à peine, pour moi, c'est beaucoup d'argent ! 300 000 F, c'est quasiment cinq ans de travail pour une personne qui reçoit un petit salaire ! C'est peut-être effectivement très peu d'argent pour M. Blanc et les députés d'en face, mais pour nous cela représente tout de même beaucoup d'argent dont on pourrait faire autre chose que nous apprendre à boire des coups ensemble ! 

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. J'ai vu avec beaucoup d'intérêt le souffleur s'approcher à deux reprises de Mme Wenger... (Rires.) ...pour lui dicter ce qu'elle avait à répondre, parce que tout le monde sait qui fait la loi en face... (Exclamations.)

Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, Mme Wenger nous dit que le but de ce projet est de nous apprendre à boire des coups ensemble... Je n'ai lu nulle part que les joyeux drilles qui ont imaginé ce travail aient pensé nous apprendre à boire des coups ensemble ! Je crains bien d'ailleurs que nous n'ayons pas souvent l'occasion d'en boire dans cette affaire... Mais, enfin, nous ne sommes pas là pour boire des coups, comme le disait Mme Wenger...

Maintenant, quant à dire qu'on pourrait économiser 300 000 F qui représentent un petit salaire pendant cinq ans... Permettez-moi là encore de vous dire que les travaux engendrés par l'objet en question engendreront aussi des salaires ! Pas rien que des petits, je vous l'accorde ! La plupart des personnes qui y travaillent font partie du personnel de l'Etat et, à l'Etat, les salaires ne sont pas tous petits, et je m'en félicite. Il faut donc prendre en considération le travail que ce projet représente.

Mesdames et Messieurs, l'argument selon lequel ce projet se résume à boire des coups me paraît tout à fait ridicule et ridiculise ceux qui l'avancent !

Mme Salika Wenger (AdG), rapporteuse de minorité. Monsieur Blanc, je commence à comprendre pourquoi vous êtes célibataire depuis si longtemps... (Rires.) Je ne sais pas à quelles femmes vous avez affaire d'habitude, mais je n'ai besoin de personne pour venir me souffler les décisions que je prends ici, et pas même de vous, Monsieur Blanc ! (Rires.)

M. Christian Grobet (AdG). Le pseudo-souffleur allait précisément dire ce que Mme Wenger a excellemment dit, et, la connaissant, je me demande qui dans cette enceinte pourrait dire à Mme Wenger ce qu'elle doit déclarer dans ce Conseil... Monsieur Blanc, je crois que vous projetez sur nous les procédés qui ont, semble-t-il, cours dans votre fraction, puisque vous arrivez déjà à imaginer que l'on puisse dicter aux rapporteurs ce qu'ils doivent dire ! En tout cas, ce que vous pratiquez chez vous n'est pas notre habitude !

Cela étant dit, je profite de l'occasion pour parler du fond de l'affaire. Bien entendu, de l'argent a été dépensé, Monsieur Blanc, mais surtout pour des salaires et des prestations non durables. Et si le projet qui nous a été présenté part effectivement de bons sentiments, nous ne l'avons pas soutenu dès le départ, Madame Hagmann, parce que nous considérions que ce projet n'était pas adapté à une volonté exprimée par Expo.02 - volonté qui, à mon avis, est très mal respectée - à savoir que les participations devaient avoir des effets durables. Or, ici nous avons surtout eu le sentiment, et je dirai même la conviction, que le crédit cantonal a surtout servi à payer des hauts salaires à un certain nombre de personnes.

Effectivement, que cette journée genevoise ait lieu ou pas, tout cet argent est malheureusement perdu. Certains y auront probablement trouvé leur avantage, mais je ne crois pas, Monsieur Blanc, que ce soient les gens de condition modeste auxquels Mme Salika Wenger faisait allusion. D'autre part, il y avait effectivement des prestations complémentaires qui devaient être apportées pour justifier ce projet : il devait être dédoublé par des sommes offertes par des sponsors privés. Or, vous n'avez pas contesté, semble-t-il, Monsieur Blanc, qu'il n'y a pas de partenaires privés sur les rangs. En définitive, tous les compléments à la prestation cantonale seront des prestations d'autres collectivités publiques.

Il faut donc se rendre compte que ce projet était mauvais dès le départ. On peut regretter sincèrement que le Conseil d'Etat n'ait pas suivi cette affaire et qu'il ait laissé la bride sur le cou à deux ou trois personnes qui ont effectivement fait beaucoup d'intellectualisme. Mais je m'abstiendrai, contrairement à vous, de qualifier ce projet d'une idéologie politique quelconque, parce que j'ai justement le sentiment que cette idéologie fait défaut. 

La présidente. Monsieur le député Blanc, vous avez la parole, mais j'aimerais bien que vous ne parliez pas du mari de Mme Wenger ! (Rires.)

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. J'y viendrai, Madame la présidente, j'y viendrai !

Nous avons un dialogue de sourds ! Mesdames et Messieurs, vous dites que l'argent qui a déjà été dépensé représente des salaires : des gros, des petits, on n'en sait rien ! Peut-être que le patron du projet, M. Moutinot, pourra nous dire d'une manière exhaustive à qui les salaires ont été versés...

Vous dites par ailleurs que le privé ne s'intéresse pas à cette affaire. Un certain nombre d'entreprises ont été contactées, et vous admettrez que les événements qui se déroulent depuis le mois de décembre refroidissent quelque peu les éventuelles entreprises intéressées. On nous a dit à plusieurs reprises que tout était bloqué à cause du projet de loi de l'Alliance de gauche, jusqu'à ce que le Grand Conseil se détermine sur celui-ci. En effet, depuis le mois de décembre personne n'a voulu aller plus avant, sans savoir si le Grand Conseil maintiendrait ou non ce projet.

S'il est vrai que, jusqu'à présent, les fonds ont de la peine à être débloqués, vous en êtes responsables ! Et j'espère bien que les affaires pourront reprendre, lorsque le Grand Conseil aura confirmé sa décision du mois d'août.

Je conclus sur la remarque de Mme Wenger en disant que, s'il se trouve que je suis encore célibataire, c'est peut-être parce que j'ai trop souvent rencontré des femmes qui lui ressemblaient ! (Rires.) 

M. Christian Grobet (AdG). Madame Salika Wenger, vous aurez tout loisir tout à l'heure d'entreprendre M. Blanc pour le faire revenir à de meilleurs sentiments ! Et je ne doute pas que vous y arriverez !

Monsieur Blanc, vous avez toujours l'art de faire porter le chapeau aux autres... Nous avons déposé ce projet de loi, sauf erreur de ma part, il y a deux ou trois mois à peine, alors que la subvention est versée depuis deux ans à cette pseudo-association - il faut dire les choses comme elles sont... Cette association est en fait simplement un groupe de gens intéressés à réaliser cette affaire et qui n'a d'association que le nom. Or, ces gens-là avaient deux ans, Monsieur, pour trouver des sponsors. Il ne faut donc pas venir nous dire maintenant, parce que nous venons de déposer un projet de loi il y a deux mois démontrant qu'ils n'avaient rien «foutu», que nous serions responsables du fait qu'ils n'aient pas trouvé de sponsors privés ! C'est quand même, venant d'un PDC, l'hôpital qui se fout de la charité ! 

Mme Salika Wenger (AdG), rapporteuse de minorité. Monsieur Blanc, vous parliez de salaires plus ou moins hauts... Au moment de la présentation du projet, les représentants de cette association, que M. Grobet vient de qualifier parfaitement, nous ont dit très clairement que les salaires étaient calculés sur la base d'un prix de 60 F de l'heure, soit entre 10 000 et 11 000 F, ce qui était considéré par certains comme des peanuts parce qu'ils gagnaient beaucoup plus par ailleurs... Alors, il se peut que des salaires de 10 000 à 11 000 F soient considérés comme modestes par certains, mais ce n'est pas le cas de l'Alliance de gauche, et je ne crois pas que nous soyons là pour verser de tels salaires à des spécialistes en marketing, alors que les associations et les groupes avec lesquels des contacts ont été pris et qui, soi-disant, devaient former les communautés, ne reçoivent quasiment pas un centime. Comme je l'ai dit dans mon rapport, les communautés étrangères qui ont été contactées travaillent in situ, c'est-à-dire qu'elles arrivent à Genève et qu'elles travaillent gratuitement sur un projet pour des directeurs de marketing et des directeurs de publicité qui, eux, reçoivent des salaires de ministre !

Alors, je regrette : nous n'avons pas voté un budget pour verser de tels salaires à des gens qui estiment en outre que ces salaires sont trop modestes. Nous avons voté cette subvention pour un projet qui nous semblait - en tout cas, à une partie des députés - intéressant, mais, pour l'instant, cette subvention n'a servi qu'à payer des salaires, et il n'y a pas une seule action visible de ce projet ! 

M. Claude Blanc (PDC), rapporteur de majorité. Plus on s'énerve et moins on a raison : c'est évident... Plus exactement, moins on a raison et plus on s'énerve... Alors, ne nous énervons pas !

Disons simplement que le premier projet de loi nous avait été présenté il y a environ une année. Nous l'avons étudié sauf erreur avant les vacances d'été de l'année dernière, ce qui a déjà pris un certain temps, et nous l'avons voté le 30 août, sauf erreur. Donc, pendant tout ce temps, les gens qui étaient à l'origine de ce projet étaient dans l'expectative de ce qu'allait faire le Grand Conseil. Ils ont donc pu commencer leurs travaux à partir du vote du Grand Conseil, le 30 août. Mais c'est avant Noël, Monsieur Grobet, et pas il y a deux ou trois mois, que l'Alliance de gauche a déposé son projet de loi demandant que les engagements financiers soient stoppés au 31 décembre ! A partir de ce moment-là, les membres du comité de pilotage ont évidemment commencé à lever le pied, en se disant qu'il ne fallait pas aller trop de l'avant pour le cas où le Grand Conseil leur supprimerait le crédit. Cela fait donc près d'une année qu'ils sont dans l'expectative. Alors, n'allez pas dire maintenant que pendant ce temps ils auraient dû faire tout le travail que vous en attendiez !

Au départ et d'ailleurs encore maintenant, c'est le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement et le département de l'instruction publique qui étaient les promoteurs de ce projet. Ce sont des fonctionnaires de ces deux départements qui ont initié le comité de pilotage. Ce projet est donc bien sorti du service public, que vous vouliez défendre tout à l'heure, et c'est dans cet état d'esprit que les choses ont démarré.

Mesdames et Messieurs les députés, ce serait vraiment un désaveu injustifié et même injuste vis-à-vis non seulement du Conseil d'Etat qui s'est rendu responsable de ce projet - il m'a encore répété il y a peu qu'il continuait à soutenir ce projet - mais aussi pour les personnes qui ont accompli un certain travail. Même si ce travail ne déclenche pas l'enthousiasme, j'insiste, je pense qu'il mérite d'aller à son terme pour nous livrer le fruit de ses discussions. 

M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez émis des propos variés et variables sur ce projet genevois...

Ce qu'il faut en dire, c'est que ce projet est difficile à expliquer, parce qu'il n'est effectivement pas posé dans le béton. Il veut être une rencontre d'un certain nombre de communautés. Le terme de «communauté» est très mal choisi et m'horripile autant que vous, mais ce projet a cette qualité de mettre ensemble des hommes et des femmes de ce canton qui n'ont précisément pas forcément l'habitude de se rencontrer, ce qui, me semble-t-il, est une idée durable. Peut-être même plus durable que le béton qui, lui, se corrode et se carbonate, alors qu'on peut espérer que les liens tissés entre les personnes seront durables.

Dans la situation dans laquelle nous sommes, ce serait effectivement rude pour ces hommes et ces femmes - je ne parle pas des mandataires, même s'ils se trouvent à la tribune, qui savent qu'ils seront payés mais qui prennent des risques de ne pas l'être selon votre décision - qui se sont engagés dans ce projet, basé sur une idée forte de Genève, une idée de liens tissés entre des individus différents, de nationalité différente, de confession différente, de classe sociale différente. Ce projet doit donc être mené à son terme.

En définitive, la démonstration que vous essayez de faire, Madame Wenger, devrait être faite au niveau fédéral. Si de l'argent est gaspillé dans Expo.02, ce n'est pas sur le projet de la journée genevoise, c'est sur toute une série d'autres projets que la Confédération a bien du mal à cadrer. Et je trouverais dommage, par rapport au projet de la journée genevoise, que votre légitime colère condamne un bon projet.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à refuser l'entrée en matière du projet 8425.

Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.