République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1327
15. Proposition de motion de MM. Alberto Velasco, Christian Brunier et Pierre-Alain Cristin pour une évaluation de l'impact de la libéralisation du marché de l'électricité sur l'économie genevoise et l'Etat. ( )M1327

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :

invite le Conseil d'Etat

EXPOSÉ DES MOTIFS

La loi fédérale sur la libéralisation du marché de l'électricité (LME) a pour objectif, selon le désir du Conseil fédéral, de libéraliser le marché de l'électricité afin de le rendre compatible avec les règles de l'Union européenne, de garantir la concurrence et l'approvisionnement en courant de manière efficace par l'ouverture à de nouveaux producteurs ainsi que le libre choix des fournisseurs par les consommateurs.

L'intention est d'ouvrir le marché de l'électricité en prévoyant l'accès réglementé au réseau sur la base d'un accord. Les exploitants des réseaux, tels que les SIG, seront contraints d'acheminer, sans discrimination et sur une base contractuelle, le courant de leurs clients éligibles moyennant un dédommagement calculé en fonction des coûts nécessaires à l'exploitation.

A l'heure actuelle, nul ne sait le sort qui sera réservé au réseau de très haute tension. Il semble que le réseau de distribution, pour des raisons ayant trait à l'économie, à l'environnement, à la protection des sites et donc à la multiplication possible de ceux-ci, sera géré sous forme de monopole.

Il est admis que cette loi aura des effets financiers indirects sur les cantons et les communes. En effet, 75 % des entreprises de distribution et de production sont propriété des collectivités publiques. Or, cette libéralisation du marché de l'électricité entraînera un processus de concentration de sociétés avec à la clé, des fusions, des faillites, des pertes d'emploi, et une incidence sur la politique écologique et énergétique adoptée au niveau communal, cantonal et fédéral.

A la différence de la directive de l'Union européenne, qui prévoit son ouverture en trois étapes échelonnées sur 7 ans avec une pause lui permettant d'examiner l'opportunité de poursuivre l'ouverture, il est probable, vu le déroulement des travaux aux Chambres fédérales, que la loi prévoyant l'ouverture (libéralisation globale en 3 ou 6 ans) du marché entre en vigueur en 2001!

Le calendrier pourrait être le suivant :

fin 1999   → débats en commission du national

1er semestre 2000  → débats aux Chambres fédérales

délai référendaire → 3 mois

mise en vigueur → 2001

Domaines affectés par la libéralisation

La compétitivité qui sera instaurée dans ce secteur économique, par exemple la dénonciation anticipée de contrats, risque d'alourdir la charge que représentent les investissements non amortissables qui se chiffrent par milliards. Le renouvellement des équipements hydroélectriques, la question de l'abaissement de la redevance hydraulique, la garantie du service public et la réglementation des rapports internationaux sur le marché de l'électricité seront aussi affectés par cette libéralisation. A Genève, certaines communes estiment que la perte des recettes provenant des redevances pourrait avoir une incidence sur leurs finances. La perte des redevances actuellement versées aux communes pourrait causer une perte fiscale de 1 à 3 sur les centimes additionnels!

Marché suisse de l'électricité

Alors que la loi sur la LME n'est pas encore sortie des Chambres fédérales, le marché a déjà anticipé la tendance à la baisse des prix par l'obtention de rabais par les gros consommateurs. Ces rabais, il est vrai, ont été obtenus en engageant un combat politique avec la menace de conclure des contrats avec d'autres producteurs et de recourir à la commission de la concurrence. C'est ainsi que la Migros a conclu en 1999 un accord avec Watt Suisse (filiale du groupe germano-suisse) portant sur l'alimentation en énergie électrique de ses vingt-six fabriques helvétiques. Le rabais s'est chiffré à plusieurs millions. Malgré le refus des Entreprises Electriques Fribourgeoises d'ouvrir leur réseau à Watt Suisse, cette dernière a été mise sous pression et a dû consentir d'importants rabais. Le même scénario s'est produit avec le groupe Swissmétal et les Forces motrices bernoises.

Accentuation des disparités régionales

Selon l'Office fédéral de l'énergie et sur la base d'une étude d'Ecoplan, la libéralisation de l'électricité risque d'accentuer les disparités régionales. L'origine du problème viendrait du principe du consommateur-payeur qui introduira une dose d'inégalité entre les régions. En effet, les communes ne peuvent pas recevoir et payer le même service au même coût quand les densités de population et les tailles sont différentes. C'est ainsi que les coûts moyens par entreprise d'approvisionnement en électricité pour la distribution régionale et locale se situent entre 4,5 et 13 ct/kWh. Les distances et la topographie ayant une influence sur le coût de l'entretien et de l'acheminement, le coût peut osciller entre 4,8 et 23,1 ct/kWh selon la commune, soit des différences qui pourraient aller du simple au quadruple ! L'étude montre qu'en cas de grande consommation les coûts fixes seront d'autant mieux amortis. Cette économie d'échelle, si elle tire les prix vers le bas, incite néanmoins à une plus grande consommation et pourrait aller à l'encontre des principes défendus par toutes les collectivités publiques sur l'utilisation rationnelle de l'énergie. Dans ces conditions et afin d'éviter une forte disparité des prix d'utilisation du réseau, la loi sur la libéralisation doit intégrer une composante de solidarité. Dans le cas contraire, les entreprises industrielles et de services bénéficieraient d'un rééquilibrage en leur faveur, alors que les ménages risqueraient de passer, une fois de plus, à la caisse.

Risques pour les SIG

Si cette libéralisation devait se produire dans un délai tel que les petits consommateurs pourraient être éligibles, il est possible d'imaginer que les habitants, d'un quartier, d'une rue, les membres d'un groupement professionnel, d'une association, d'un syndicat ou d'un club se réunissent en groupement d'achat afin de négocier des prix plus avantageux. Ce cas de figure, pour les SIG, pourrait représenter non seulement une baisse sur son chiffre d'affaires, mais encore une remise en question de ses engagements à l'encontre d'EOS. Dans ce contexte, les SIG seront-ils contraints d'acheter le courant des auto-producteurs à 16 ct/kWh ?

Risques sur la qualité de l'approvisionnement

Cette même compétitivité, à l'heure actuelle, induit les sociétés productrices et distributrices à diminuer, de manière drastique, leurs investissements sur les équipements et les charges liées à l'emploi. Cette politique aura comme conséquence non seulement une augmentation des risques de pannes mais une diminution de la fiabilité de l'approvisionnement, et par conséquent de la qualité de la prestation qui était l'un des principes d'un service public fournisseur d'énergie.

Risques sociaux

Au sujet des conditions de travail, celles-ci risquent de se dégrader. On estime que les emplois de la branche devraient diminuer de 20 à 30 % par rapport aux effectifs actuels. Déjà, les SIG ont procédé à une réduction d'environ 10 % ces dernières années. Ces réductions d'emploi seront imposées soit au travers de fusions (rationalisation des activités) soit par une diminution drastique des coûts.

Les autres pays européens : exemples des conséquences de la libéralisation

Comme nous l'avons évoqué, la libéralisation du marché de l'électricité pourrait avoir un impact majeur sur les producteurs, les consommateurs, les collectivités genevoises et les employés de la branche. Les différents pays qui ont entamé ce processus en ont fait d'ailleurs l'expérience, comme vous pouvez le constater par ce bref tour d'horizon.

Pays-Bas

Un grand chambardement a eu lieu dans ce pays. Fusion ou disparition de la majorité des entreprises du pays. Le nombre des acteurs de la scène énergétique du pays pourrait être rapidement ramené à cinq ou six, contre une vingtaine de compagnies aujourd'hui. Une des conséquences étant la mainmise de groupes étrangers sur le secteur de la distribution électrique et gazière.

Allemagne

Les monopoles régionaux ont disparu depuis vingt et un mois, et 150 entreprises de trading ont fait leur apparition. Le marché a enregistré des baisses de tarif allant jusqu'à 50 % aux dépens d'exploitants d'ouvrages de production privés ou municipaux. Ce sont principalement les entreprises vouées exclusivement à la distribution qui ont bénéficié de ces baisses. Des magazines destinés au grand public n'hésitent pas à appâter leurs lecteurs en leur proposant de réduire la facture de 30 %. Pour la première entreprise électrique, cette politique de baisse de tarif s'est traduite par une chute des bénéfices d'environ 11 % et un recul du chiffre d'affaire de 15,5 %. Les fusions en cours vont entraîner la perte de 12'500 emplois !

Suède

Pas moins de 160 sociétés rivalisent pour vendre du courant aux particuliers. A l'image de ce qui s'est produit dans les télécommunications, les boîtes aux lettres débordent d'offres de promotion qui déboussolent les consommateurs.

Espagne

Marché libéralisé à concurrence de 50 % d'ici la fin de l'an 2000. La concurrence qui s'en est suivi a entraîné une baisse des coûts de production de l'ordre de 25 %. L'exigence d'une rétribution de la part du gouvernement des grandes entreprises du secteur de production d'énergie électrique, afin de faire face aux investissements non amortissables INA, pose non seulement un problème à celui-ci mais freine la cadence de la libéralisation.

Grande-Bretagne

Privatisée dès 1990, la distribution a fait l'objet dès 1995 d'une série d'offres publiques d'achats (OPA) de la part d'opérateurs américains et français. Le marché de la production est dominé par deux acteurs privés. L'électricité britannique vit actuellement un mouvement de rerégulation. Objectif : mieux répartir les bénéfices de la concurrence au profit des petits consommateurs, pour l'instant grands perdants de la dérégulation.

Norvège et Finlande

Dérégulé depuis la fin de 1998, ce marché totalement intégré s'est regroupé au sein de l'une des toutes premières bourses d'électricité européenne et a servi de laboratoire européen. A la baisse des tarifs dans un premier temps a succédé une augmentation. 30 % des emplois de la branche ont disparu en Norvège. Le niveau de sécurité des installations a fortement baissé.

France

Version minimale de l'ouverture, la France adopte le 1er février 2000, avec un an de retard sur ses partenaires, le projet « relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ». Le marché sera ouvert à concurrence de 30 % et 34 % en 2003. Les particuliers seront exclus de cette ouverture.

Principales compagnies européennes du marché de l'électricité.

Au niveau des entreprises, le paysage européen des principales sociétés présentes sur le marché de l'électricité a subi de grands changements. Le phénomène de concentration que l'on observe, puisque la plupart de ces sociétés résultent de fusions, pourrait avoir des conséquences directes sur la Suisse. Actuellement, les grandes compagnies européennes s'intéressent de près au marché suisse de production et de distribution de l'électricité.

La lecture de ces chiffres donne une idée des regroupements intervenus dans le marché de l'électricité et permet de comparer nos entreprises locales avec les principaux acteurs du marché européen. On peut se poser des questions lorsque l'on sait que certaines sociétés européennes s'intéressent au marché romand et en particulier très concrètement à l'hydroélectricité d'Energie Ouest Suisse.

La libéralisation du marché de l'électricité en Suisse pourrait donc avoir des conséquences importantes sur les différents acteurs de notre République et Confédération. Dans ce cadre, nous pensons qu'il est important que le Conseil d'Etat face preuve d'anticipation et procède à une évaluation des impacts économiques, sociaux et environnementaux de ce changement probable.

C'est dans cet esprit que nous vous prions, Mesdames et Messieurs les député-e-s, de renvoyer la présente motion au Conseil d'Etat.

Débat

M. Alberto Velasco (S). Quand on sait ce qui s'est passé dans certains pays où la libéralisation du marché de l'électricité a été mise en place, il y a lieu de se poser un certain nombre de questions sur les conséquences que cette libéralisation pourrait avoir chez nous.

Il a été dit ce soir que gouverner, c'est prévoir et je dis que prévoir implique aussi de connaître l'impact qu'aura cette libéralisation sur notre économie, sur l'Etat et aussi, pourquoi pas, sur la politique environnementale et le respect de notre constitution. Ce d'autant plus que le marché, aujourd'hui, non seulement s'accommode déjà de cette libéralisation mais la devance, en obligeant les Services industriels à pratiquer déjà des baisses de tarif assez conséquentes. Ceci ne se fera pas sans conséquences, puisque nous avons tous pu lire dans les journaux, ces derniers jours, qu'on prévoit environ 4000 pertes d'emplois dans ce secteur. Les intérêts des entreprises publiques seront aussi affectés et bien des services publics seront tentés de jouer la baisse des tarifs, ignorant les intérêts à moyen et long terme.

On connaît aujourd'hui la tendance qui se dessine aux Chambres pour une libéralisation douce. Nous pensons donc que ces études d'impact - qui au demeurant pourraient se faire en collaboration avec une série d'entités à Genève, comme le COPE, les SIG, l'OCEN, etc. - pourraient par la suite être bénéfiques à ces dernières. Tenant compte de ces considérations, nous vous demandons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de faire bon accueil à cette motion.

Mme Janine Berberat (L). Messieurs les motionnaires, vous demandez au Conseil d'Etat une étude d'impact qui devra porter autant sur l'entreprise des Services industriels et tous ses clients - privés comme publics - que sur l'environnement, le social, l'emploi et j'en passe. Vous faites, au niveau des considérants, un amalgame où vous juxtaposez intérêts économiques et contraintes de la politique énergétique et environnementale, et vous ignorez sans doute à dessein que la libéralisation a commencé, que les producteurs comme les exploitants s'organisent déjà en conséquence.

Le champ d'analyse que vous proposez pour cette étude est immense et les influences entre les secteurs concernés ne font qu'augmenter la difficulté d'approche. C'est un travail de longue haleine, qui coûtera cher, si on ne veut pas se limiter à une compilation de textes existants, et pour aboutir à quoi ? Vous êtes absolument muets sur le sujet ! Votre proposition de motion est non seulement frileuse, parce qu'elle cherche une forme de protectionnisme illusoire, mais aussi rétrograde, car, à travers l'exposé des motifs où vous affichez les résultats que vous craignez, vous évitez tout simplement de préparer l'avenir pour faire face aux difficultés qui doivent être affrontées.

Mesdames et Messieurs les députés, le train est déjà parti et c'est se leurrer de croire qu'une étude de plus va le stopper ou le freiner. Il est certain que cette libéralisation aura des conséquences de tous ordres et risque d'entraîner des clivages locaux. Elle va générer des restructurations importantes, engendrer, c'est vrai, des pertes d'emplois. Mais, sur ce point, permettez-moi de vous rappeler que nous avons pu lire dans la presse que les Services industriels entendaient passer le cap sans diminuer les emplois, ce qui ne peut que nous réjouir et qui pondère quelque peu les propos de M. Leuenberger.

Cette ouverture de marché va surtout - et c'est peut-être là que le bât blesse le plus - obliger à des modifications de comportement, qui était jusque-là plus proche du monopole que de la concurrence. Sans aucun doute, ces changements sont très importants, mais nous pouvons nous y préparer et il nous semble, à nous libéraux, que la priorité aujourd'hui est d'intervenir sur le terrain, plutôt que de peindre le diable sur la muraille. Par exemple, en mettant sur pied une structure d'information qui ne se limite pas à une bourse de données de prix, mais qui offre des programmes et des actions d'aide à la décision ; en sensibilisant les preneurs éligibles, comme le veut la conception que nous avons adoptée, à la qualité de l'énergie, à sa provenance et pas seulement à son coût ; en donnant aux Services industriels, par des décisions politiques courageuses et non partisanes, les moyens de réaliser une politique compétitive ; en valorisant les actions faites en faveur de l'environnement et des économies d'énergie par les entreprises privées, qui sont des acteurs importants dans cette libéralisation.

En résumé, il nous paraît, à nous libéraux, plus important d'investir pour construire ensemble un vrai partenariat entre fournisseurs, clients et instances politiques, au lieu de demander à l'Etat de payer une étude de marché pour le compte d'une entreprise, les Services industriels, qui a les moyens et surtout la volonté de la faire. C'est pourquoi le groupe libéral ne soutiendra pas cette motion.

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Le groupe des Verts ne peut soutenir cette motion, pour des raisons un peu différentes de celles du groupe libéral.

Cette motion demande une étude d'impact. Cette étude, fort évidemment, ne pourrait pas être réalisée par le Conseil d'Etat ni par les services de l'administration ; elle devrait être réalisée par des chercheurs, scientifiques, universitaires, à des coûts probablement fort élevés. Ces frais seraient naturellement tout à fait justifiés, s'il s'agissait d'une nécessité pour se faire une opinion en matière de libéralisation. Or, j'aimerais quand même rappeler à MM. les motionnaires que le Grand Conseil ne découvre pas réellement ce sujet, puisqu'il a notamment déjà voté deux résolutions contre la libéralisation du marché de l'électricité. J'ai suffisamment de respect pour les députés de ce Grand Conseil pour penser qu'ils votent en toute connaissance de cause et qu'ils n'ont pas déjà oublié les raisons pour lesquelles ils ont voté ces deux résolutions : en l'occurrence, cette proposition de motion est, à mon sens, un recul vis-à-vis de la position que le Grand Conseil a déjà prise en matière de libéralisation. D'ailleurs, si vous ne connaissez pas les arguments qui nous ont poussés à voter ces deux résolutions contre la libéralisation, je vous suggère de consulter la presse syndicale, où l'on trouve parfois des articles fort intéressants, écrits par les mêmes motionnaires !

C'est pourquoi les Verts ne soutiendront pas cette motion : ils savent d'ores et déjà pourquoi ils sont contre la libéralisation du marché de l'électricité.

M. Pierre Vanek (AdG). Trois mots sur cette question, qui a effectivement déjà fait l'objet de débats et de résolutions dans ce Grand Conseil. Madame Berberat, vous nous la jouez sur l'air : «La libéralisation est déjà en marche, c'est un bulldozer sur lequel on n'a guère prise - ce qui est largement vrai - mais les motionnaires ne le savent pas !» Or, au contraire, ils le savent et le dénoncent précisément, en citant par exemple les agissements de l'entreprise Watt, la spéculation sur le marché virtuel de l'électricité... On sait qu'aujourd'hui, bien que le marché ne soit pas encore ouvert, les entreprises vendent de l'électricité à terme en quelque sorte, en spéculant sur cette libéralisation, ce qui est parfaitement détestable et scandaleux. Vous ne pouvez donc pas nous la jouer comme cela, en disant simplement qu'il y aura des pertes d'emploi, mais qu'on n'y peut rien, qu'il faut faire ce qu'on peut pour un partenariat, et d'autres choses de ce type qui sont d'ailleurs en contradiction complète avec l'idée fondamentale, l'idée force de cette libéralisation. Cette idée force, c'est celle de la concurrence axée exclusivement sur l'aspect économique : que le plus fort gagne, que celui qui a les reins les plus solides fasse du dumping, reconstitue des monopoles privés, vende de l'électricité de qualité tout à fait discutable, sale, en provenance de Dieu sait quelle centrale nucléaire et de Dieu sait où !

Nous avons déjà entendu tout cela, nous avons débattu dans ce Conseil de la libéralisation. Pour ma part, je m'affiche franchement contre cette libéralisation et je considère que la bataille n'est pas perdue - si elle l'était, ce ne serait qu'une bataille, pas la guerre - et que nous devons donc la mener et ne pas nous accommoder des conséquences prétendument fatales et absolument nécessaires de la mondialisation et de la déréglementation, telles que vous les prônez. Conformément au petit échange que j'avais eu avec le conseiller d'Etat Robert Cramer suite à une interpellation sur la libéralisation, je pense toujours que celle-ci sape les bases d'une politique publique et démocratique de l'énergie, qu'elle sape la mise en oeuvre, par exemple, de la conception cantonale de l'énergie que nous avons votée récemment. Preuve en est qu'aujourd'hui - là, vous avez raison, Madame Berberat - cette libéralisation du marché de l'électricité est en route, alors qu'à ce stade aucune loi sur l'ouverture des marchés de l'électricité n'a encore été votée par un quelconque parlement. Les Chambres y travaillent, le délai référendaire n'est pas échu, c'est dire que ce fatalisme est inacceptable et même antidémocratique.

Dans ce sens, je salue le travail sérieux que les motionnaires ont fourni dans l'exposé des motifs, qui est d'une qualité supérieure à ceux des premières résolutions que nous avons votées ensemble, Mesdames et Messieurs, bien au-delà des bancs stricts de l'Alternative, d'ailleurs.

Maintenant, la motion invite le Conseil d'Etat à réaliser une étude d'impact sur cette question de la libéralisation. On trouve, dans l'exposé des motifs, toute une série d'éléments s'agissant de l'impact de cette libéralisation. On sait - je le lis en page 3 - que cela va affecter le renouvellement des équipements hydroélectriques. On sait ce que cela représente comme possibilités de rabais pour les gros consommateurs et de risques de pénalisation d'une politique d'utilisation rationnelle de l'énergie. On sait ce que cela représente - je trouve cela dans votre motion - en termes d'accentuation potentielle des disparités régionales. On sait qu'il y aura une incitation - je lis encore cela en page 4 de l'exposé des motifs - à une plus grande consommation, ce qui va à l'encontre des principes défendus par toutes les collectivités publiques et singulièrement par la nôtre. On sait qu'il y a des risques à tous les niveaux pour l'entreprise Services industriels de Genève, entreprise que nous détenons non pas pour faire de l'argent, mais pour assurer un service public pour tous. On sait que cela représente des risques pour la qualité de l'approvisionnement - je le lis toujours dans votre exposé des motifs. On sait aussi les risques sociaux en termes de suppression d'emplois, que Mme Berberat a eu la grâce de reconnaître tout à l'heure.

Par conséquent, à ce stade, inviter le Conseil d'Etat à préparer une étude d'impact, dans l'espoir de pouvoir nous déterminer d'après cette étude d'impact, c'est peut-être une étape un peu dépassée : vous savez, et vous les avez citées, toutes les conséquences de cette libéralisation. C'est aussi peut-être faire preuve d'angélisme : le Conseil d'Etat, qui serait, par hypothèse, mandaté pour faire cette étude d'impact, ne partage pas forcément les sensibilités en la matière de la majorité de cette assemblée.

Je ne sais donc pas si cette étude d'impact, telle que vous la demandez, est une bonne idée. En revanche, je salue le travail de préparation qui a été fait et je souscris non pas à chaque virgule, mais à l'orientation exposée dans l'exposé des motifs. Par rapport à cette question, qui est effectivement d'une actualité urgente, nous ne pouvons pas nous contenter des deux résolutions que nous avons votées il y a quelques mois et nous endormir sur nos lauriers. Aussi, pour en discuter, je vous propose, Mesdames et Messieurs les motionnaires, comme à l'ensemble de cette assemblée, non pas de voter cette motion sur le siège, mais de la renvoyer à la commission de l'énergie et des Services industriels pour faire le point sur cette question.

M. John Dupraz (R). Les gens qui ont déposé cette proposition de motion sont peu ou prou des employés ou des proches des Services industriels et je comprends qu'ils s'inquiètent quant à leur avenir. Cela dit, je crois qu'il faut situer le problème dans son contexte. Etre contre la libéralisation du marché de l'électricité, refuser que cela soit un fait inéluctable, etc., ce ne sont que des fables. Il y a une directive européenne qui règle la libéralisation du marché de l'électricité, dont les dispositions sont entrées en vigueur en 1999 et, en 2009, le marché européen sera libéralisé. Or, la Suisse est géographiquement au centre de l'Europe et son réseau de transport d'électricité est interconnecté avec l'Union européenne. Par conséquent, soit on prend des dispositions pour que cette libéralisation se passe le moins mal possible - c'est ce qu'essaient de faire les Chambres fédérales : la loi sur le marché de l'électricité a été votée par le Conseil national en mars dernier - soit on se déclare contre la libéralisation, on refuse tout, on lance un référendum contre la loi et on verra alors une libéralisation sauvage, bien pire que celle que nous essayons d'organiser pour qu'elle se passe le moins mal possible.

Je rappelle, s'agissant de libéralisation, que c'est la production qui est libéralisée... Vous pouvez hocher la tête, Monsieur Vanek, mais c'est ainsi, les faits sont têtus, comme disait un de vos anciens collègues ! Les faits sont têtus : c'est la production qui est libéralisée, le transport et la distribution restent des monopoles naturels. Il n'est pas question, par exemple, de construire deux lignes à haute tension à travers la Suisse. Voyez-vous une entreprise, si libérale soit-elle, venir concurrencer les Services industriels dans la distribution ? (L'orateur est interpellé.) Non, Monsieur Cristin, vous êtes complètement à côté de vos pompes ! Il n'est pas question de libéraliser le transport et la distribution, encore une fois ce sont des monopoles naturels !

Maintenant, je dirai que cette motion enfonce des portes ouvertes. L'impact de la libéralisation sur les consommateurs, les petits consommateurs, sera quasi nul. Il n'y aura qu'une légère baisse du prix de l'électricité, parce que ce qui revient cher, sur la facture des consommateurs, c'est le transport et la distribution. Concernant les effets sur les entreprises privées et publiques, les grosses entreprises auront des gros rabais, les moyennes des rabais moyens et les petites pratiquement rien. C'est ainsi, ce sont les règles du marché !

Quant aux effets sur l'Etat, comme consommateur, on peut estimer que l'Etat va payer son électricité un peu moins cher. En revanche, comme actionnaire des Services industriels, là il y a un problème. En effet, le gros problème de la libéralisation du marché de l'électricité, ce sont les investissements non amortissables. Or, EOS est une entreprise dont les Services industriels sont actionnaire à 25% et qui est menacée. Au niveau fédéral, nous avons donc proposé des mesures d'accompagnement - et celui qui vous parle a été un des artisans de ces mesures, contestées du reste par les milieux économiques, ce que je regrette beaucoup - à savoir une taxe sur les énergies non renouvelables, dont une partie servirait à financer ces investissements non amortissables, puisqu'on change les règles du jeu et qu'on doit amortir plus vite les investissements qu'il était prévu d'amortir sur cinquante ou soixante ans. Comme l'Europe est momentanément en surproduction d'énergie électrique, on peut s'attendre à une baisse de prix dans les cinq à dix premières années suivant l'ouverture du marché, mais à terme il remontera. Il faut donc passer ce cap et pour ce faire, nous prévoyons des mesures d'accompagnement, à savoir cette taxe sur les énergies non renouvelables, pour financer notamment ces investissements non amortissables. Quand je dis financer, il s'agit de prêts qui seraient accordés et que les entreprises, une fois revenues à meilleure fortune, devraient rembourser, selon des conditions qui seront fixées entre la Confédération, les cantons et les entreprises concernées. En l'occurrence, ce n'est donc pas une libéralisation sauvage, des mesures sont prises, même si l'Etat de Genève et les Services industriels ont, c'est vrai, quelques soucis à se faire.

S'agissant des communes, la redevance hydroélectrique n'est pas touchée. Dans cette libéralisation du marché, il n'est pas question pour les Chambres fédérales de toucher aux redevances hydroélectriques, qui se montent, si j'ai bonne mémoire, à environ 2 milliards et qui servent notamment à financer les budgets des collectivités publiques, des communes des régions périphériques et des régions de montagne. Cas échéant, si pour des raisons de compétitivité on devait décider de réduire, voire de supprimer ces redevances hydroélectriques, il s'agirait alors, dans un esprit confédéral bien compris, de pallier ces diminutions de ressources pour les collectivités publiques concernées par d'autres ressources que l'Etat central devrait fournir. En effet, pour moi comme pour beaucoup de parlementaires fédéraux, il n'est pas question de pénaliser encore plus les régions périphériques, sachant que la mondialisation - dont on a souvent parlé et dont je ne suis pas un sympathisant telle qu'elle se réalise actuellement - pénalise surtout ces régions périphériques. Il ne s'agit donc pas de s'attaquer à la redevance hydroélectrique et, à mon avis, il ne devrait pas y avoir de conséquences négatives pour les communes et l'environnement.

En revanche, concernant le volet social et l'emploi, il est vrai qu'en période de restructuration il y a des difficultés. On a vu ce qui s'est passé dans le bâtiment ces dernières années à Genève. Cependant, je vous rappellerai que nous avons voté une libéralisation sur six ans, alors que certains socialistes la voulaient sur trois ans ! Alors, Mesdames et Messieurs les socialistes, arrangez-vous avec vos petits copains de Suisse alémanique, qui voulaient une libéralisation sur trois ans ! En tout cas, nous les radicaux, nous la voulons sur six ans. Nous pensons qu'à vue humaine la loi n'entrera pas en vigueur avant 2002, que 2002 plus six ans, cela fait 2008 : nous sommes dans le rythme européen et ce délai permettra de donner du temps au temps pour trouver des solutions pour l'emploi. M. Leuenberger l'a dit : il ne s'agit pas de mettre les gens à la porte, n'importe comment. Il conviendra de trouver des mesures d'accompagnement pour amortir les effets néfastes de cette libéralisation sur l'emploi.

Cela dit, je doute que les Services industriels soient beaucoup touchés au niveau des emplois liés à la production de l'électricité. En effet, ils ne sont qu'un petit producteur d'électricité et sont surtout un distributeur et un fournisseur de prestations. Je dirai d'ailleurs que la chance des Services industriels, c'est d'être - comme l'agriculture, si je puis me permettre - multifonctionnels, d'avoir plusieurs cordes à leur arc. C'est une chance pour les Services industriels. Leur faiblesse, c'est d'être un gros actionnaire d'EOS, car EOS est menacé, et nous essayons, au niveau fédéral, de prendre des mesures pour amortir le choc de la libéralisation.

En l'état, Mesdames et Messieurs, je me demande si cette motion est vraiment utile, car au niveau local les conséquences seront vraiment minimes. A Berne, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que les choses se passent le moins mal possible. Mais que vous le vouliez ou non, cette libéralisation aura lieu ; il s'agit de la réaliser dans les meilleures conditions possibles, soit pour nos entreprises hydroélectriques qui sont une chance pour l'avenir de notre pays, soit pour l'emploi, soit pour notre rapprochement avec l'Europe que nous voterons le 21 mai.

M. Christian Brunier (S). J'aimerais tout d'abord dire que Mme Caroline Dallèves-Romaneschi, si elle en a certainement fait une très bonne lecture, n'a pas compris l'objectif de la motion. Le but de cette étude n'est pas de préparer le terrain pour que nous décidions ce qu'il convient de penser de la libéralisation. Sur ce point, nous avons une position très nette : philosophiquement, les socialistes genevois - je dis bien «genevois» - sont opposés à la libéralisation des marchés de l'énergie, car on ne doit pas considérer l'énergie comme un simple produit de consommation et la vendre comme une vulgaire lessive. Voilà pour l'aspect philosophique.

Maintenant, il faut parler du concret. Je suis d'accord avec M. Dupraz : qu'on le veuille ou non, la libéralisation du marché est malheureusement à nos portes et elle arrive d'ailleurs plus vite que ne le dit M. Dupraz. Celui-ci est très optimiste aujourd'hui, mais la libéralisation a déjà des effets très concrets sur la politique énergétique de ce pays et sur la politique des Services industriels en particulier. Ce défi, ou cette menace, suivant comment on ressent la libéralisation, va apporter, il faut le reconnaître, quelques infimes avantages. Il est vrai qu'il y a eu un culte peut-être excessif du monopole et que la libéralisation permet de le remettre en question. Mais, avant tout, la libéralisation des marchés va engendrer de nombreux risques et je crois qu'il faut le dire clairement aujourd'hui.

Face à ces risques, il y a trois manières d'agir. Il y a la manière de M. Dupraz, qui a fait un travail remarquable aux Chambres fédérales, mais qui est aujourd'hui tombé dans l'angélisme en disant que, oui, il y a des risques, mais qu'à Genève nous sommes meilleurs que tous les pays européens, que nous avons une entreprise énergétique fabuleuse et que nous allons finalement gérer les risques sans problème. Ce n'est en tout cas pas ma vision des choses.

La deuxième manière est celle de certains députés qui font en quelque sorte de la réactivité. Face aux risques, ils disent qu'il convient d'attendre, qu'il ne faut pas imaginer le pire tout de suite et qu'au moment où surgiront des problèmes on tentera d'agir au mieux. Ces députés n'ont pas compris, je crois, l'avertissement que nous avons reçu à travers Swisscom. Concernant Swisscom, un bon nombre de politiques de ce pays, y compris dans mon parti, ont joué le jeu de la réactivité, en disant qu'il convenait de laisser venir les risques et d'agir ensuite pour les contrer. On voit le résultat ! Aujourd'hui, s'agissant de Swisscom, on court après les risques et il y a des gens qui passent à la trappe quotidiennement !

La troisième solution est celle que nous préconisons ce soir. Cela s'appelle la proactivité : avant de subir les risques de la libéralisation, nous voulons essayer de les évaluer, de les étudier pour mieux les connaître, pour tenter d'anticiper et de trouver des garde-fous et des solutions imaginatives pour réagir au mieux. M. Velasco disait que gouverner, c'est prévoir. A cet égard, il me semble que, dans cette enceinte, certains sont plutôt des adeptes du rétroviseur !

D'autres se sont inquiétés qu'on fasse des études sur tout et n'importe quoi. Ils ont raison et nous ne demandons pas des études sur tout et n'importe quoi : l'étude que nous demandons aujourd'hui porte sur un thème qui va toucher et qui touche déjà plusieurs activités du canton. De plus, nous ne demandons ni une méga-étude à 200 000 ou 300 000 F qui durerait une année ou deux ans, ni une sculpture sur nuages que personne ne pourrait utiliser. Nous demandons une étude pragmatique pour répondre à des questions très réelles. J'ai entendu, parmi les différentes explications qui ont été données, des gens qui ont l'air de tout savoir. Quant à moi, je ne crois pas être le plus ignare sur ce sujet, mais j'ai pourtant de nombreuses questions sur cette libéralisation. Je prends quelques exemples.

Notre constitution comporte un certain nombre de dispositions qui prônent une utilisation rationnelle de l'énergie et qui exigent qu'on utilise une énergie propre. Nous sommes un certain nombre ici à soutenir ces dispositions et le peuple a voté de manière très claire en faveur de cette politique énergétique. Or, un marché totalement libéralisé risque d'avoir des conséquences au niveau de la constitution. Même si cette libéralisation ne concerne que la production, il ne faut pas rêver, il y aura aussi des conséquences sur le transport de l'énergie et sur la distribution. On le voit déjà : aujourd'hui, des gens sont prêts à brader notre réseau de transport à certains privés, à certains banquiers zurichois proches de M. Blocher. Ces conséquences, du point de vue de la constitution, on ne les connaît pas ou mal aujourd'hui et, rien que pour cela, il vaut la peine de faire une étude.

Autres questions : l'Etat est-il un client éligible ou pas ? Quelle va être la conséquence de notre éventuelle éligibilité ? Est-ce que ceci va réduire notre facture énergétique ? Est-ce que ceci va être compensé, par exemple, par des prises de participation très fortes dans l'énergie solaire ? Ce sont des questions qu'il faut se poser.

Au niveau des redevances, M. Dupraz prétend détenir la vérité. Pourtant, j'ai entendu le président des communes genevoises dire, cette semaine même, qu'il avait des craintes et qu'à son avis, dans un marché complètement libéralisé, les redevances ne tiendront pas la route à terme, ni d'ailleurs les rabais. Un certain nombre de rabais accordés aux collectivités publiques sont en train d'être diminués, voire complètement supprimés et cela aura une conséquence notamment fiscale pour les communes, évaluée entre 1 à 3 centimes additionnels pour certaines communes. On ne peut donc pas dire, sous prétexte que M. Dupraz nous rassure, que tout est réglé et qu'on n'a plus besoin de réfléchir sur le sujet.

Il y aura, bien sûr, des conséquences sur l'emploi, dont je ne parlerai pas pour ne pas être accusé de contrevenir à l'article 24 de notre règlement. Je soulèverai en revanche la question des tarifs. Il y a actuellement des tarifs très rigides qui assurent une équité entre les différents consommateurs et qui permettent d'assurer le service public. Aujourd'hui, personne n'a mesuré les conséquences sur l'équité entre les clients et sur la notion de service public.

Je crois que tout cela mérite donc une étude, pragmatique et simple, sur des questions très précises. Lorsque Mme Berberat nous dit que cette étude ne servirait à rien, j'ai l'impression qu'elle la redoute un peu et je la comprends ! En effet, les résultats de cette étude démontreront, une fois de plus, que la libéralisation des marchés est nocive pour la société et pour la majorité de nos concitoyens, comme l'ont été les libéralisations de marchés que nous avons connues ces dernières années. Par contre, vous avez raison, Madame Berberat, sur un point, c'est que notre motion est peut-être trop large, qu'elle concerne un spectre peut-être trop étendu pour être traitée de manière pragmatique et rapide.

Aussi, je suis d'accord avec M. Vanek qui proposait d'envoyer cette motion en commission, non pas pour faire un grand débat sur la libéralisation - car on sait que ce qui nous sépare, ce sont des valeurs et on ne pourra pas se mettre d'accord sur des valeurs - mais pour inventorier un certain nombre de questions cruciales à propos desquelles, pour le moment, nous n'avons aucune réponse, ou seulement des prémices de réponses. Rien que pour cela, le sujet mérite une discussion en commission et une étude pragmatique et peu coûteuse.

M. Alberto Velasco (S). Je voudrais juste dire à Mme Berberat que nous ne demandons pas du tout une étude de marché. Entendons-nous bien : ce que nous voulons, c'est une étude d'impact. Concernant l'étude de marché, je suis d'accord avec elle, ce sont les entreprises privées qui doivent la faire. Il n'est donc pas du tout question de demander une telle étude.

D'autre part, Monsieur Dupraz, la libéralisation est effectivement en route, mais il faudrait peut-être la réguler et, pour la réguler, il faut connaître les paramètres. En l'occurrence, je doute que beaucoup dans cette salle les connaissent. Vous les connaissez peut-être globalement et assez pour dire que vous n'êtes pas d'accord avec ce qui va se passer, mais quant à savoir ce qui va réellement se passer dans les divers secteurs, y compris au niveau de l'agriculture, vous n'en savez rien et moi non plus. C'est la raison pour laquelle nous voudrions étudier ce qui va se passer au niveau cantonal. C'est tout !

M. Pierre-Alain Cristin (S). Sans ignorer les effets socio-économiques de la libéralisation des marchés électriques, je soulignerai ses effets environnementaux. Partant du fait que l'électricité est un élément vital dans notre quotidien, on ne peut la considérer comme une marchandise comme les autres. Par conséquent, les entreprises qui la produisent et la distribuent assument un rôle d'intérêt public et ont donc à respecter les principes du développement durable, car les effets de la libéralisation des marchés seront multiples sur l'environnement.

1. La baisse des prix va induire une augmentation de la consommation d'électricité.

2. Des raisons économiques, car d'énormes investissements ont été consentis ces dernières années dans le domaine de l'énergie d'origine hydroélectrique, conduiront certains producteurs à préférer des installations moins gourmandes en investissements et plus rapidement réalisables, alimentées avec des combustibles fossiles et il faudra prévoir une augmentation considérable des émissions de Co2.

3. Comme nous le voyons avec la libéralisation des télécommunications, il y aura un effet de concurrence accrue entre fournisseurs, ce qui poussera les entreprises de distribution à vouloir s'approvisionner là où le courant est le moins cher et donc à occulter la provenance du courant électrique, ce qui nous promet des scénarios catastrophes, puisque les usines nucléaires de certains pays, notamment de l'Est, qui ne sont pas les plus fiables, devront tourner à plein régime pour nous fournir du courant bon marché.

Mesdames et Messieurs les députés, pour les générations à venir, il est de notre devoir aujourd'hui d'être attentifs à cette libéralisation des marchés électriques et aux conséquences qu'elle aura sur l'environnement en Suisse et dans le reste de l'Europe. C'est pourquoi le groupe socialiste vous demande de soutenir cette motion et, comme l'a proposé le député Vanek, de la renvoyer en commission de l'énergie.

M. Pierre Vanek (AdG). Monsieur Brunier, vous avez dit en substance : il y a la philosophie d'un côté, nous sommes contre la libéralisation, nous ne nous mettrons pas d'accord avec les autres ; il faut donc maintenant faire une étude pragmatique, avec des spécialistes, sur un certain nombre de questions précises.

Pour ce qui est de définir des questions plus précises, c'est un des débats que nous pourrons avoir en commission. En revanche, pour ce qui est d'être pragmatiques, revenons sur le cas de Swisscom que vous avez évoqué et sur celui de la Poste aussi, qu'on oublie et dont nous avons débattu abondamment dans cette enceinte. A l'époque, éclairés par une philosophie de défense du service public et une méfiance, qui s'est avérée fondée, face aux méfaits du libéralisme, les référendaires de 1997 avaient, dans leur argumentaire, décrit de manière pragmatique et assez précisément ce qui est en train de se passer. Or, à la même époque, d'autres experts ont pondu des centaines de pages pour expliquer qu'il n'y avait aucun danger pour l'emploi, que cette libéralisation allait bénéficier aux consommateurs, à l'ensemble de l'économie, de la société, et qu'on raserait pratiquement gratis en matière de poste et télécommunications.

Pourquoi ces experts ont-ils tenu ces propos ? C'est là qu'il y a un peu d'angélisme dans votre démarche : on sait que, dans les débats sur l'énergie, il n'y a pas simplement des experts qui savent et qu'il suffit d'interroger, avant de faire comme ils disent. On sait - nous avons souvent eu ces échanges en matière nucléaire - que les experts sont plus ou moins d'un côté ou de l'autre, sont plus ou moins informés par une «philosophie» ou une autre. Et, dans ce sens, je renverrai avec plus de sérénité une demande d'expertise ou d'étude d'impact au Conseil d'Etat, ou au conseiller d'Etat encore présent sur les bancs du Conseil d'Etat, si celui-ci pouvait nous affirmer que sa philosophie en matière de libéralisation est celle de la majorité de ce Conseil. Or, ce n'est pas tout à fait le cas. Quelle que soit la bonne volonté de M. Cramer, que je ne mets pas en doute, je ne crois pas qu'il puisse faire une déclaration de ce type. En conséquence, je crains, Monsieur Brunier, que l'étude qui pourrait être faite par le Conseil d'Etat ne soit pas forcément la plus objective et donc la plus à gauche, ou réciproquement !

Maintenant, un mot pour M. Dupraz. Monsieur Dupraz, vous avez embouché les mêmes trompettes fatalistes que Mme Berberat, à quelques nuances près. Pour vous, la libéralisation est là, elle est incontournable, elle se fait à l'échelle européenne et il s'agit maintenant de prendre toutes les mesures d'accompagnement possibles pour limiter la casse. Vous me dites que les gouvernements en Europe sont de gauche, mais vous savez bien que ce n'est pas vrai, nous le savons tous dans cette salle. Personne ne pense à Genève que M. Tony Blair, par exemple, est de gauche ! Mme Françoise Buffat l'encensait, pas parce qu'il est de gauche, mais parce qu'il est un bon libéral, comme elle les aime ! Voilà pour la parenthèse.

Sur le fond, il y a quelque chose de grave dans vos propos. Je suis pour l'adhésion à l'Union européenne, mais si vous présentez aujourd'hui l'Europe comme un rouleau compresseur, une fatalité par rapport à laquelle on ne peut que s'adapter, vous lui rendez un bien mauvais service. Y compris à l'échelle européenne - certes, les institutions aujourd'hui ne le permettent guère, mais il y a une bataille à mener pour que ce soit le cas - il faut qu'on défende des idées de service public, des idées écologiques. Il faut qu'elles puissent passer, ou du moins être reçues comme faisant partie d'un débat possible et ce débat existe, du reste, à l'échelle européenne, vous le savez bien. Il y a des forces qui s'opposent à ce processus de libéralisation. Alors, vous rendez un bien mauvais service à cette Europe que vous prétendez défendre, en la présentant comme l'incarnation d'une fatalité économique sur laquelle les citoyens de notre modeste République n'auraient aucune prise. La prise est sans doute difficile, mais c'est un combat essentiel pour la démocratie et c'est dans cet esprit-là que je me battrai, y compris jusqu'au référendum, contre ce projet de loi sur la libéralisation.

Vous avez dit encore, Monsieur Dupraz, que seule la production était libéralisée et que la distribution restait un monopole. Soyons sérieux ! En l'état de ce que vous avez voté à Berne, le Réseau reste une société de droit privé qui est simplement le lieu de cette concurrence acharnée. Vous avez parlé de monopoles naturels : quant à moi, je pense qu'effectivement il y a lieu d'instituer un monopole en la matière, mais un monopole qui soit contrôlé démocratiquement - ce qui ne sera pas le cas - un monopole qui ne soit pas au service de la maximisation des bénéfices des marchands d'électricité. Or, si on va dans le sens que vous prêchez, on retrouvera des monopoles à l'échelle européenne, dans cinq, dix ou quinze ans. Trois ou quatre compagnies dirigeront tout en matière d'énergie et les débats, y compris contradictoires, que nous aurons pu avoir dans cette enceinte sur la politique de l'énergie apparaîtront vraiment comme quelque chose relevant du passé. Quant à moi, je me bats pour maintenir cet espace démocratique-là et c'est dans ce sens que je m'oppose à cette libéralisation.

M. Jean Spielmann (AdG). Par rapport à ce qui vient d'être dit, je crois qu'un élément fondamental a été complètement occulté ou oublié, c'est qu'il y a dans l'organisation d'une société un certain nombre d'activités qui ne peuvent pas être soumises purement et simplement au marché, parce qu'il s'agit d'activités d'intérêt général.

Le problème de l'énergie est un problème fondamental pour nos sociétés. On a beaucoup parlé du nucléaire, on a parlé de la nécessité d'économiser l'énergie, de la mise en place d'une politique alternative pour sortir du nucléaire et mettre à disposition de la population d'autres systèmes de production d'énergie. Partant de là, au moment où certains décident, sous l'impulsion du libéralisme, de tout confier au marché, cela pose un problème de fond, qui n'a pas été abordé et qu'on devrait examiner. Je parle de la maîtrise des collectivités publiques sur les modes de production de l'énergie et sur l'avenir d'une société qui, se basant uniquement sur le marché, laisserait la liberté aux producteurs d'électricité de proposer les meilleurs prix, alors qu'en définitive le meilleur marché n'est pas toujours ce qui est le mieux pour l'ensemble de la société, même si pour certains cela peut être favorable.

Je suis de ceux qui sont contre cette privatisation et qui dénoncent le pari complètement fou que font un certain nombre d'antinucléaires et de responsables socialistes de Suisse alémanique : ils considèrent que la réalité des prix va pousser les nucléaires à abandonner le marché, qu'on pourra démontrer que le nucléaire est plus cher que les autres productions et qu'ainsi on sortira du cycle nucléaire. Donc, choisissons le libéralisme, disent-ils, privatisons les marchés de l'électricité, quelles que soient les conséquences sociales, politiques, écologiques ! A cet égard, je trouve qu'il y a une part d'irresponsabilité à suivre les radicaux dans la voie qu'ils préconisent. Comme l'a dit justement M. Dupraz tout à l'heure, les radicaux veulent libéraliser en six ans et certains veulent le faire en trois ans. Mais le problème n'est pas de savoir si on va libéraliser en trois ans ou en six ans, le problème est de savoir si c'est intelligent de le faire.

Quant à moi, je considère qu'il y a des priorités dans une société et qu'on ne peut pas laisser le marché dicter sa loi dans un domaine aussi important que celui de la production d'énergie et de l'abandon du nucléaire. On doit garder en mains publiques la possibilité d'intervenir dans ce dossier ; il est faux de le soumettre purement et simplement aux lois du marché, qui en définitive vont conduire à une politique qui ira à l'encontre des intérêts de la population, pour les seuls intérêts privés et pour l'argent.

M. Jean Rémy Roulet (L). Je voudrais adresser quelques remerciements à ma collègue Janine Berberat, bien sûr, pour son excellente présentation, remerciements aussi, pour leur prise de position courageuse, aux Verts qui demandent le renvoi de cette motion en commission, et remerciements surtout à M. Vanek, qui nous épargne une étude, fort onéreuse au demeurant, sur les bienfaits ou les méfaits de cette ouverture des marchés de l'électricité. Je crois que celle-ci est en marche, qu'il n'y a plus grand-chose à dire et qu'il y a plutôt des choses à faire.

Quand on lit l'exposé des motifs des motionnaires, on reste un peu perplexe, d'autant plus que ces motionnaires travaillent aux Services industriels. Je lis en page 4 : «Risques pour les SIG», alors qu'on pourrait dire «chance» pour les SIG ! «Il est possible d'imaginer, écrivent les motionnaires, que les habitants d'un quartier, d'une rue, les membres d'un groupement professionnel, d'une association, d'un syndicat ou d'un club se réunissent en groupement d'achat afin de négocier des prix plus avantageux.» Oui, Mesdames et Messieurs, il est clair que c'est vers cette voie-là que nous allons tendre enfin, après un monopole de fait qui date de quarante, cinquante, voire soixante ans dans certaines régions de ce pays. Nous vivons en effet la fin d'un monopole et la fin d'un monopole, qu'il soit privé ou public, entraîne évidemment des modifications structurelles.

Vous avez cité, Monsieur Brunier, l'exemple de Swisscom. Pour l'entreprise Swisscom, cette libéralisation, certes, pose problème, mais pour l'ensemble du marché, combien d'emplois ont-ils été créés à Genève dans le secteur des télécommunications, ces derniers mois ? Ces emplois se comptent par centaines, Mesdames et Messieurs ! Imaginez un instant que, dans le secteur de l'énergie, un tel phénomène peut se produire, que de nouveaux métiers vont apparaître dans ce processus de libéralisation. Or, plutôt que de parler de chance, vous parlez de risques. En tant qu'employés des Services industriels de Genève, vous devriez au moins avoir l'audace de prendre parti pour cette libéralisation et non contre elle.

Du reste, un des éléments qui explique la position musclée des libéraux par rapport à cette motion concerne justement l'employeur des trois motionnaires : comme par hasard, il s'agit des Services industriels ! Messieurs, un peu de bon sens : si vous voulez que votre motion ait une certaine crédibilité aux yeux de certains députés dans ce Grand Conseil, aux yeux du public et des gens qui votent pour vous, il s'agit clairement de séparer vos fonctions. Il y a là un problème : vous ne pouvez pas, en tant qu'employés des SIG, demander une étude de marché pour les SIG au sein de cette enceinte. Voilà pourquoi le groupe libéral a décidé de ne pas soutenir votre motion.

M. Christian Brunier (S). Très brièvement, car le débat a suffisamment duré, je voudrais expliquer deux choses à M. Roulet. Premièrement, concernant la séparation des fonctions, je dirai que nous n'avons aucun intérêt direct dans la réalisation de cette étude. Les milieux économiques ont vraisemblablement plus d'intérêt à shooter cette motion que nous n'en avons, en tant qu'employés des SI, à la soutenir.

Deuxième chose, vous comparez les marchés de l'énergie et des télécom, mais il n'y a aucune comparaison possible ! Le marché des télécom a créé un grand nombre d'emplois, dites-vous, mais il faudrait faire la balance des emplois, parce que nous ne sommes pas sûrs qu'elle soit positive. Je vous rappelle que, pour maintenir les emplois, un certain nombre de travailleurs ont vu leurs conditions de travail se dégrader sensiblement. D'autre part, la libéralisation des télécom a été couplée à une augmentation sensible de la demande. La plupart des gens ont aujourd'hui un portable, des connections Internet ; il y a donc une augmentation de la demande. S'agissant de l'énergie, pouvez-vous me répondre : quelle va être l'augmentation de la demande en électricité ? Rêvez-vous d'une société qui consomme deux fois plus d'électricité ? J'espère que vous vous êtes mal exprimé et que ce n'est pas le choix de société que vous avez fait.

On ne peut donc pas comparer ces libéralisations. Le produit télécom est de plus en plus utilisé dans le monde. La consommation d'énergie, au contraire et heureusement, stagne dans notre canton. Elle a augmenté de 1% à 1,5%, et ce sans tenir compte de l'augmentation de la population. Ce sont donc des prestations totalement différentes et les lois du marché ne sont pas applicables à un produit aussi stratégique que l'énergie. Je le rappelle : on ne vend pas de l'énergie comme on vend une vulgaire lessive !

Le président. Je donne la parole à M. Robert Cramer, conseiller d'Etat... (Protestations de M. John Dupraz.)

S'il vous plaît, Monsieur, je ne vous ai pas vu lever la main ! Je donne la parole à M. Cramer !

M. Robert Cramer. Je tiens tout d'abord à rendre hommage à M. Dupraz pour son intervention de tout à l'heure... (Rires et exclamations.) ...ainsi bien sûr qu'aux autres intervenants qui se sont exprimés. Au fond, ces interventions montrent qu'il y a, sur ces bancs, une somme impressionnante de connaissances et de compétences sur le sujet dont traite cette motion. A tel point que l'on peut se demander si ce parlement a réellement besoin d'un rapport supplémentaire... (Applaudissements.)

J'ai éprouvé un second sentiment en vous écoutant, Mesdames et Messieurs les députés : je ne vous cacherai pas que j'ai été soulagé de voir que le chemin que vous étiez en train de prendre était à tout le moins celui d'un renvoi en commission. En effet, j'ai fait chiffrer ce que cette motion représenterait, si l'on voulait répondre sérieusement à la volonté des motionnaires, en faisant toutes les études qui sont demandées. Si nous voulons traiter cette motion comme elle doit l'être, cela va tout d'abord prendre du temps ; les mandataires que nous avons pressentis ont parlé d'une durée d'une année. Quant au coût, on m'a parlé d'un coût de 150 000 à 200 000 F. C'est le prix pour que le Conseil d'Etat ne vous réponde pas en exprimant ses opinions quant à la libéralisation - d'ailleurs, comme M. Vanek m'y a invité, je me garderai bien de faire une déclaration du Conseil d'Etat sur ce point ! - mais réponde simplement, de façon technique, aux invites de la motion.

Un renvoi en commission, en revanche, permettrait également d'aborder quelques autres questions qui ont été posées. Par exemple, qu'en est-il des rapports entre la libéralisation du marché et les exigences de notre constitution ? Nous pourrons peut-être découvrir ensemble que, depuis le 1er janvier 1999, il existe une loi fédérale sur l'énergie dont les dispositions, ma foi, ne sont pas si différentes de celles contenues dans notre constitution. La Berne fédérale, treize ans après Genève - mais il est vrai que les Bernois ont la réputation d'être parfois un peu lents ! - s'est mise au diapason de ce que doit être une vraie et une bonne politique de l'énergie.

Ce renvoi nous permettra peut-être aussi de répondre à quelques interrogations concernant le statut des clients éligibles : jusqu'où l'Etat est-il concerné, car il est bien sûr concerné ? Comment l'Etat doit-il réagir à cette nouvelle opportunité qui lui est offerte par le biais de ce statut de client éligible ?

Nous pourrons discuter de tout cela et si, après cette discussion, il apparaît encore à la commission qu'il convient d'aller de l'avant et qu'une étude est indiquée, nous arriverons au moins à la cerner. Nous arriverons à faire qu'elle soit suffisamment modeste pour être menée en interne par l'administration, pour qu'elle paraisse rapidement, non pas après que la messe fut dite, mais à temps pour être utile au débat qui s'engage. Etant précisé que celui-ci n'est pas seulement, comme plusieurs d'entre vous l'ont signalé, un débat sur la libéralisation ; il est aussi, et peut-être surtout, un débat sur la façon dont notre collectivité publique et les Services industriels vont s'organiser pour pouvoir répondre à cette perspective.

Le président. Je fais voter la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'énergie.

La proposition de renvoi est mise aux voix.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève par 39 oui contre 33 non.