République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1182-A
24. a) Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier la pétition de la Conférence universitaire des associations d'étudiants (CUAE) demandant la création de 100 postes d'assistants et une augmentation de l'enveloppe budgétaire allouée à l'université de 8 millions. ( -) P1182
Rapport de Mme Liliane Charrière Debelle (S), commission de l'université
M 1224
b) Proposition de motion de Mmes et MM. Liliane Charrière Debelle, Erica Deuber-Pauli, Caroline Dallèves-Romaneschi, Marie-Thérèse Engelberts, Jeannine de Haller, Marie-Françoise de Tassigny, Nelly Guichard, Janine Hagmann, Antonio Hodgers, Bernard Lescaze, Armand Lombard, René Longet, Barbara Polla, Véronique Pürro et Salika Wenger concernant l'université. ( )M1224

P 1182-A

En janvier 1998, la CUAE adressait au Grand Conseil une pétition concernant la demande des étudiants pour une amélioration de l'encadrement des étudiants avec pour corollaire, une augmentation de l'enveloppe budgétaire attribuée à l'Université. Ce texte est joint au présent rapport.

En date des 5, 12 et 26 mars, 2 et 23 avril 1998, la Commission de l'Université a étudié cette pétition et auditionné les diverses parties concernées. Les travaux ont été conduits par M. Bernard Lescaze, président, tandis que le Département de l'instruction était représenté par M. Eric Baier, secrétaire adjoint.

Audition de la Conférence universitaire des associations d'étudiants (CUAE)

En un mot comme en cent, les représentants de la CUAE relèvent le malaise, l'inquiétude et le désappointement qui règnent à l'Université, sentiments qui se sont traduits par des manifestations, dans et hors de l'alma mater (notamment dans la cour de l'Hôtel de ville le 19 décembre 1997 au moment du vote du budget) et par le lancement de la pétition 1182. En quoi consiste cette amertume ?

On se souviendra qu'en 1995 les étudiants et la CUAE en particulier, s'étaient fortement inquiétés et opposés à l'introduction de la taxe universitaire pour chacun, acceptée ultérieurement en votation populaire. La justification avancée, qui devait en quelque sorte faire passer la pilule, était que ces recettes supplémentaires devaient notamment servir à financer l'engagement de nouveaux assistants (cf. de moniteurs), afin d'améliorer l'encadrement des étudiants, besoin reconnu de toutes parts. On parlait alors d'environ 8 millions, soit une centaine de postes d'assistants.

L'exercice grandeur nature révèle un gain bien plus modeste puisqu'il n'est finalement que de vingt postes. Inventaire d'ailleurs assez difficile à établir de manière claire et précise, compte tenu des diverses implications. Par exemple :

- L'objectif de 8 millions a été surévalué. La taxe universitaire n'a finalement rapporté que 6,2 millions, entre autres raisons parce que le nombre des exonérations fut plus élevé que prévu. Déception. 

- La ventilation des rémunérations des assistants est subtile : une partie de ce personnel est payée par le DIP, l'autre par diverses instances, dont le FNRS, et/ou d'autres mandants publics ou privés parrainant une recherche. Certains assistants émargent à plusieurs de ces budgets. Labyrinthe.

- A la rentrée 1997, la Faculté des sciences apprenait qu'elle "; allait perdre 50 assistants " ; il fallut l'intervention de la présidente du DIP pour redresser les choses. Un début de panique est passé par là.

- Au cours de l'audition du 5 mars 1998 où la CUAE déplore le peu d'impact de la taxe : gain de 20 postes sur les 100 escomptés, elle apprend (comme les commissaires) le transfert dans des services hors de l'Université, de 30 postes d'assistants en médecine. Précision utile qui, certes, relativise l'écart entre prévisions et réalité mais ne fait que renforcer le sentiment de flou de la situation.

- Autre point d'interrogation : les objectifs, la mission de l'assistanat. L'art. 57B de la loi sur l'Université (C 1 30) dispose que sous la direction d'un professeur ordinaire, d'école ou adjoint, l'assistant exerce des activités d'enseignement et de recherche. ...... (il) consacre au moins 40 % de son temps à la préparation d'une thèse de doctorat ou d'autres publications scientifiques. Il est nommé après une année d'essai, pour une période de 2 ans, renouvelable une fois. (Ce poste, souvent octroyé à temps partiel, est rémunéré en classe 8)

- L'assistanat fait donc partie intégrante des mesures visant à assurer la relève, la première étape à franchir étant celle du doctorat. Dans les faits, les étudiants constatent qu'en première année, non seulement l'assistant anime des séminaires, encadre les étudiants mais souvent (trop !) assume les cours dont le professeur se décharge. Il ne lui reste guère de temps pour ses propres travaux de recherche. Comment s'étonner dès lors que nombre d'assistants (65,80 % dans certaines facultés ?) ne parviennent pas à terminer leur thèse dans le laps imparti et renoncent. Dommage pour eux, pour la relève et pour l'investissement consenti par l'Université.

- La CUAE estime donc indispensable et urgent qu'un cahier des charges, incluant un plan de carrière, soit établi pour les assistants. Quant aux moniteurs, ces étudiants porteurs d'une demi-licence qui aident leurs collègues de première année à raison de 2/10 de temps, une clarification de leurs attributions ne pourrait être que judicieuse.

- D'une manière générale, la CUAE constate un manque de communication, de lisibilité, au sein de l'Université. Même si les situations d'une faculté à l'autre ne sont pas toujours comparables : (le taux d'encadrement nécessaire en sciences n'est pas à mettre sur le même pied qu'en lettres ou en droit), les conditions d'engagement divergent, les données générales ne circulent pas ou mal, etc. Quant aux comparaisons aux plans suisse et international, pour être crédibles, il faudrait pouvoir les établir sur des données de bases communes et à ce moment-là comparables.

Audition du rectorat

M. M. B. Fulpius, recteur, est accompagné de ses 3 vice-recteurs. En ce qui concerne l'encadrement financé par les taxes, ils précisent que l'enveloppe est globale et couvre aussi bien les postes d'assistants que ceux de moniteurs. Le rectorat confirme un gain de 20 postes au lieu des 100 prévus. Cette différence s'explique par :

- l'encaissement effectivement réalisé est de 6,2 mio, donc inférieur de 1,8 mio à la recette projetée, et ce du fait des exonérations octroyées. Une Commission ad hoc a examiné un millier de demandes, dont 700 ont été acceptées. A ces dossiers il faut ajouter le cas des étudiants automatiquement exonérés : les assistants doctorants, les personnes au bénéfice d'une allocation d'études. Au total 35 % des étudiants ;

- une enveloppe budgétaire resserrée ;

- une anticipation sur l'application du nouvel article de loi sur les taxes : en effet le précédent rectorat avait supputé que les taxes universitaires seraient acceptées (!) et dégagé par avance un montant correspondant à l'ouverture d'une trentaine de postes d'assistants. Ces trente postes sont donc à déduire du gain escompté. Peau de chagrin !

 Pour ce qui est de l'assistanat, le rectorat est conscient que les conditions de travail, le plan de carrière quasi inexistant des assistants laissent à désirer. Il entend clarifier la situation et travaille déjà à l'élaboration d'un cahier des charges. Dans quelques facultés il existe un comité des thèses, pratique qu'on ne peut appliquer partout. Au plan de l'enseignement, le rectorat souligne combien il estime indispensable que les cours de base soient dispensés par les professeurs ordinaires. Mais en première année il y a beaucoup d'étudiants, la masse des travaux est importante et "; les professeurs ne se bousculent pas pour les corriger ! ".

 On parle aussi de revoir le cahier des charges du corps enseignant en général, notamment à propos de la répartition de la charge des professeurs en pourcentage du poste considéré plutôt qu'en heures. Actuellement six heures d'enseignement, recherche et tâches diverses en sus.

Pour améliorer l'encadrement des étudiants, souci prioritaire du rectorat, il compte lui affecter une partie de la recette supplémentaire (environ 20-25 millions pour Genève) qu'apportera l'amélioration de la contribution des cantons non universitaires, acceptée récemment au plan national.

Quant aux prévisions d'effectifs d'étudiants pour les années à venir, de manière à prévoir le nombre nécessaire d'assistants, voilà l'exemple-type d'une comparaison difficilement praticable au niveau suisse. En effet si les autres cantons envisagent qu'un plus grand nombre de jeunes obtiendront une maturité à l'avenir avec une répercussion directe sur les entrées à l'Université, le taux de bacheliers genevois est déjà actuellement plus élevé et ne devrait pas retentir dans les mêmes proportions sur l'effectif de notre Université. Si l'augmentation suisse est chiffrée à 3 %, à Genève elle ne devrait pas dépasser 2 %.

Audition de M. E. Doelker, doyen de la Faculté des sciences

M. Doelker est intervenu dans la presse pour alerter la population quant à l'avenir de sa faculté notamment à propos des assistants, dont une cinquantaine de postes ne devaient pas être repourvus.

Ce point ayant aussi été évoqué lors de l'audition de la CUAE, on sait déjà que la barre a été redressée. Aux dires du doyen Doelker, le rectorat a mis 3,75 mio à disposition de la Faculté des sciences, somme extraite de ce qu'il est convenu d'appeler les "; non-dépensés " soit des postes budgétaires qui, les circonstances aidant (professeur démissionnaire non remplacé dans l'année par exemple) ne sont pas utilisés et sont reportés le plus souvent sur le budget de l'année suivante. Compte tenu d'une nécessaire marge de manoeuvre, il reste à savoir si ces non-dépensés, ne devraient pas être réexaminés périodiquement.

En sciences le taux d'encadrement a passé de 6,1 étudiants par assistant en 1991, à 7,4 actuellement. Comparé à la Sorbonne, ce taux est favorable. Comparé à l'Université de Lausanne, il est médiocre.

Quant à l'évaluation des professeurs, si elle est souhaitable, encore faudra-t-il s'entendre sur les critères : le nombre de publications et la notoriété au plan international (pratique courante du FNRS), ou bien l'enseignement ?

Audition de l'APIUM (association du personnel intermédiaire d'Uni-Mail)

D'emblée l'APIUM confirme son soutien à la pétition des étudiants. Le statut de l'assistant et du corps intermédiaire sont en train de dégénérer, les conditions d'engagement prévues par la loi (40 % recherche personnelle, 40 % enseignement) ne sont pas respectées. Genève ne fait pas exception, c'est la même chose partout en Suisse. Cette situation met en danger la relève universitaire. A noter qu'en matière d'encadrement des assistants, cette fois, la situation est disparate : certains assistants sont très bien suivis par leurs professeurs, d'autres pas du tout. Peu de doctorants terminent leurs thèses en 5 ans. Indépendamment du délai, 20 % d'assistants achèvent leurs thèses en sciences humaines, à la FAPSE le taux est de 17 %. Certains sont passionnés par l'aspect enseignement de l'assistanat et placent la thèse au second plan. D'autres choisissent l'aspect inverse, ils privilégient le doctorat. Et les étudiants se plaignent d'être moins bien encadrés. Quadrature du cercle ou plutôt nécessité évidente de clarifier les choses ?

A titre d'exemple, une des personnes auditionnées précise qu'en 5 ans d'assistanat, elle n'a pas enseigné une heure sur un sujet touchant celui de sa thèse. Résultat après 5 ans, il a fallu qu'elle cherche personnellement un financement pour pouvoir achever ses travaux de doctorat. Et pourtant elle tient à souligner combien enseigner dans un domaine différent de celui de sa recherche est enrichissant. Mais cela a un coût, en temps, en énergie, en espèces. Sans parler des réseaux du domaine concerné auxquels il faudrait pouvoir s'associer, des colloques à suivre pour être au courant de la pointe de la recherche, colloques qui ne sont ni gratuits, ni toujours dans un lieu proche.

Comment l'Université peut-elle gaspiller 80 % de ceux qu'elle a formés, soit les assistants qui ne parviennent pas au doctorat ? Pourquoi l'information sur la possibilité de devenir maître-assistant n'est-elle pas mieux diffusée ? Pourquoi la hiérarchie est-elle si stricte et figée ?

Le climat général de l'institution se dégrade. Pour preuve l'APIUM cite entre autres cette pratique qui consiste maintenant, au moment de l'engagement d'un assistant, à lui faire signer une lettre de démission non datée, ce qui permet au professeur de mettre fin dans les plus brefs délais au contrat d'un collaborateur, sans devoir attendre la fin de la période d'engagement...

L'APIUM est convaincue que la relève est un problème dont les instances politiques devraient se soucier de toute urgence. Les ressources de Genève sont surtout dans les compétences et le niveau de connaissances des gens qu'elle forme et particulièrement à l'Université.

Discussion

Les différentes auditions furent l'occasion d'aborder des sujets qui débordent le cadre précis de la pétition 1182. Les explications des uns et des autres sont à la fois édifiantes et éclairantes sur le fonctionnement administratif et pédagogique de l'Université. Sans plus attendre, il y a nécessité impérieuse de cerner les problèmes et de les sérier. Pour s'en tenir strictement aux demandes de la pétition qui nous occupe relevons :

Sur la première demande (100 assistants supplémentaires)

1. Le problème de l'encadrement des étudiants est sérieux et urgent. Il est lié directement à celui du cahier des charges des assistants.

2. Les prévisions quant aux recettes à recevoir de la taxe universitaire se sont révélées inexactes, entre autres raisons parce qu'il n'a pas été assez tenu compte des exonérations. Vu les compétences élevées des "; pratiquants " de l'Université, était-il si compliqué de faire un sondage préalable avant d'avancer des chiffres ?

3. On s'interroge sur la légitimité d'un système qui consiste à utiliser par anticipation les recettes d'une loi non encore entrée en force, ce qui en l'occurrence n'a fait que brouiller les cartes et fausser les comptes, pour ne citer que cet aspect-là.

 

 Sur la deuxième demande de la pétition 1182 (crédit supplémentaire de 8 millions)

 Bien que consciente de la gravité de la situation, la Commission de l'Université constate qu'elle n'a malheureusement pas compétence pour modifier l'enveloppe budgétaire allouée. Tout au plus peut-elle se contenter de conseiller à cette haute institution de trouver les ressources réclamées à l'intérieur de son budget, moyennant transfert de crédits. Vu les blocages ressentis, autant attendre qu'il pousse des dents dans le bec des poules.

 Mais les instances universitaires, optimistes, comptent déjà sur le supplément de recettes dû aux futures retombées de la redevance des cantons non universitaires. Et s'il s'avérait, comme le craignent quelques députés, que cette manne n'est pas aussi réjouissante qu'on le prétend ?

 Ce qui frappe, c'est le flou, le cloisonnement, le manque de visibilité transversale qui règnent, tant dans l'organisation que le fonctionnement de l'Université. Tout en gardant présente à l'esprit l'autonomie dont jouit l'Université, la commission a tenté de discerner un peu mieux les méandres, pour ne pas dire les diverticules, de la gestion financière et administrative des affaires de cette grande dame si digne. Ardu, et peine presque perdue pour le(la) député(e) non rompu(e) à cette traque minutieuse. Car s'il est vrai, par exemple, que les non-dépensés - ce que le vulgum pecus taxe de "; matelas " - sont probablement une marge d'action indispensable, reste un doute sur l'épaisseur admissible desdits matelas et sur l'opportunité de les reporter d'une année sur l'autre. Voire sur la possibilité de les collationner puis de les plafonner, d'en informer les autres facultés, etc.

 Par ailleurs, si les récentes mesures préconisées par le Conseil d'Etat n'en avaient fait état, qui - parmi les députés - savait qu'à l'Université la progression de certains salaires va par deux échelons chaque année, au lieu d'un seul dans le reste de la fonction publique ?

 Dans le domaine de la relève, dont toutes les parties auditionnées s'accordent à penser qu'il est urgent de le traiter, les commissaires ont tous conclu à la nécessité de transmettre au Grand Conseil et au Conseil d'Etat des propositions même minimales, sous forme de projet de loi et de motion. Il s'agit du projet de loi 7868 et de la motion dont on trouvera le texte séparément.

 Si la majorité de la commission se résigne à voter le dépôt de la pétition 1182 sur le bureau du Grand Conseil, tandis qu'une minorité aurait préféré le renvoi au Conseil d'Etat, ce n'est pas par désintérêt. Au contraire. Car l'ensemble des commissaires est d'avis qu'il faut empoigner les problèmes soulevés par la pétition 1182 et les traiter sans tarder. Ils vous prient donc, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre la proposition de dépôt et dans le même élan :

• d'accepter le projet de loi 7868 ;

• d'envoyer au Conseil d'Etat la motion dont le présent rapport tient lieu d'exposé des motifs.

PÉTITION(1182)

Lettre ouverte aux députés du Canton de Genève

Pour un renforcement de l'encadrement des étudiant(e)s de l'Université de Genève

Depuis 1991, le montant de la subvention cantonale allouée à l'Université (enveloppe budgétaire) a chuté de 10 % (plus de 20 % en valeur réelle), entraînant notamment :

- le non-remplacement de professeurs partis à la retraite ;

- la diminution des achats de matériel ;

- la baisse du budget consacré aux activités para-universitaires (organisation de débats, voyages d'étude, etc.).

Jusqu'à présent, l'Université acceptait ces sacrifices contre une promesse de non-atteinte au corps intermédiaire (assistant(e)s, etc.). Mais...

En juin 1995, la République et canton de Genève a voté l'instauration des taxes universitaires, afin de permettre la création de 100 nouveaux postes d'assistant(e)s, car ceux existants étaient déjà insuffisants pour assurer l'encadrement des étudiant(e)s.

Or, aujourd'hui, nous constatons que la réalité est toute autre :

1. une partie des postes d'assistant(e)s promis ont effectivement été créés, mais, dans le même temps, d'anciens postes, financés par le Département de l'instruction publique, disparaissaient. En fin de compte, entre 1994 et 1997, le solde positif n'est que de 20 postes ;

2. pire : depuis le début de la décennie, l'Université a perdu près de 80 postes d'assistant(e)s (-12 %), alors que le nombres d'étudiant(e)s est resté stable ! De plus, cette rentrée 1997 est marquée par de nouvelles et massives suppressions de postes d'encadrement.

Ce bilan négatif nuit gravement aux conditions d'études des 11 400 étudiant(e)s de l'Université de Genève. Les diverses facultés ne savent pas comment gérer ces diminutions de moyens incessantes. Cette situation n'est plus tolérable.

Le choix est simple, soit nous acceptons une diminution de la qualité de nos établissements supérieurs, soit nous voulons maintenir une Université digne de ce nom, mais, pour ce faire, il faut un financement adéquat.

Le 6 décembre 1997, le Grand Conseil doit se prononcer sur un projet de budget qui entraînera une baisse drastique des effectifs du corps intermédiaire.

Pour que notre formation ne soit pas victime de mauvais choix politiques, nous demandons :

1. la création effective des 100 postes d'assistant(e)s promis ;

2. pour ce faire, une augmentation de l'enveloppe budgétaire allouée à l'Université pour un montant supplémentaire de 8 millions de francs à partir du budget 1996 (1 assistant(e) "; coûte " environ 80 000 F par année).

Veuillez agréer, Mesdames et Messieurs les députés, nos meilleures salutations.

N.B. : 3 379 signatures

CUAE(Conf. univ. assoc. étudiants)

18, rue de Candolle

1211 Genève 4

Proposition de motion(1224)

concernant l'Université

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le rapport P 1182-A constitue l'exposé des motifs ayant conduit les motionnaires à déposer le présent projet de motion.

Débat

Mme Liliane Charrière Debelle (S), rapporteuse. J'aimerais dire que ce rapport a un petit goût de réchauffé puisque, d'après l'avancement des travaux, nous aurions presque pu le traiter au mois de juin. Cela n'a pas été le cas en raison de l'abondance des sujets et de leur importance. Je voudrais rappeler qu'au moment où nous avons parlé des taxes universitaires un des éléments qui a pesé lourd pour accepter ces taxes, et très probablement lors du vote populaire également, était que l'argent qui en sortirait, cette manne serait dévolue spécifiquement à l'engagement d'assistants, voire de moniteurs pour encadrer les étudiants et en particulier ceux de première année.

Je ne vous ferai pas la lecture du rapport. Le fait est que les étudiants ont tout de même été très déçus de voir que, pour toutes sortes de raisons exposées dans le rapport, ces taxes n'avaient pas apporté une amélioration aussi importante qu'ils l'auraient souhaité pour l'encadrement des étudiants de première année, d'où leur pétition qui a été déposée en janvier 1998.

Vous vous souviendrez que, lorsque nous avons parlé du budget en décembre, la cour de cet Hôtel de ville était passablement animée par la présence de nombreux étudiants qui venaient manifester et soutenir leur pétition. Le temps a passé, les comptes ont été faits; vous les connaissez et il est bien évident qu'il y a eu au cours des auditions organisées par la commission de l'université un certain étonnement. Un étonnement sur la manière dont ces taxes avaient été distribuées et le constat qu'elles n'avaient pas rapporté ce qu'on supposait en raison des circonstances. Je voudrais souligner qu'il n'y a pas eu d'erreurs ni de manipulations mais il est vrai que les sommes que devaient rapporter ces taxes universitaires sont inférieures à ce que l'on avait supputé. Bref, il y a eu de nombreuses déceptions.

Nous avons aussi eu le sentiment qu'à l'université où il y a pourtant des gens d'un niveau certain, notamment en mathématique, on avait finalement une façon relativement floue d'organiser les choses, en supputant par exemple sur des rentrées qui vont avoir lieu avant que les choses aient été votées par ce Grand Conseil, voire au plan fédéral. Il nous a semblé qu'il fallait y mettre un peu d'ordre et donner satisfaction aux étudiants. Leur donner satisfaction non pas en tant que personnes mais tout simplement parce que - et vous le savez bien - nos richesses sont principalement intellectuelles. Ce ne sont pas nos gisements qui vont nous rendre riches mais plutôt les efforts et les qualifications des gens qui travaillent chez nous. Il faut donc que les étudiants de première année puissent trouver un encadrement qui leur permette d'entamer leurs études dans des conditions un peu plus agréables et plus normales que ce n'est le cas actuellement.

Pour des raisons de forme, il ne nous était pas possible d'accepter la pétition telle quelle. C'est pourquoi nous décidons de vous transmettre une motion que vous trouverez sous la référence M 1224, qui demande au Conseil d'Etat de prendre en compte les différents problèmes soulevés à différents niveaux, soit auprès des assistants soit auprès des étudiants ou du corps intermédiaire, pour essayer de voir ce qu'il est possible de faire pour aider les étudiants, mais aussi - et j'aimerais insister fortement sur ce point - pour que la situation des assistants soit enfin clarifiée.

En effet, nous avons constaté que finalement très peu d'entre eux allaient au bout de leur projet et faisaient une thèse. On parle de 17% et même si nous allons jusqu'à 20%, c'est vraiment très peu. Une bonne partie des assistants sont engagés à mi-temps, ce qui est probablement possible, mais il faut savoir si ces assistants ont cinq ans ou dix ans pour faire leur thèse. Dix ans, cela paraît long mais, à mi-temps, ne faudrait-il pas au moins prolonger le temps qui leur est imparti pour rendre leur thèse ? (Remarque.) Non, dix ans c'est trop long, mais parfois cinq ans à mi-temps, c'est un peu court et certains nous ont dit être complètement partagés entre le plaisir d'enseigner et de s'occuper des étudiants et leur souci de travailler à leur thèse. Il faut aussi savoir que les assistants enseignent parfois dans des domaines qui ne touchent que de très loin celui de leur thèse.

Bref, nous avons eu le sentiment que l'université n'avait pas non plus tout à fait conscience de ce que signifie une gestion un peu plus sérieuse et un peu moins floue qu'elle ne l'est à l'heure actuelle. C'est pourquoi nous vous proposons d'envisager la possibilité d'avoir un système d'enveloppe budgétaire pour l'université et de compléter l'encadrement des étudiants par l'attribution d'un nombre suffisant d'assistants.

Je terminerai en disant que la question du système d'attribution d'enveloppe budgétaire arrive un peu comme grêle après la vendange car je ne doute pas qu'après tout le «brainstorming» qu'il y a eu à propos du budget vous ayez déjà pensé, au Conseil d'Etat, à en arriver à ce système pour l'université.

M. Bernard Lescaze (R). Je remercie Mme Charrière Debelle de son rapport qui, je crois, présentait bien les problèmes.

Je ne vais donc pas les résumer si ce n'est pour dire qu'il y a notamment un problème d'encadrement. En effet, les étudiants souhaitent davantage d'assistants, ce qui évidemment coûte de l'argent. Le système des taxes universitaires qui devaient être payées pour cet encadrement aurait dû être prévu il y a quelques années. Malheureusement, les 8 millions escomptés ne sont que très partiellement atteints parce que l'université donne probablement trop facilement des exemptions. Par ailleurs - second point qui est traité dans la motion présentée par l'ensemble de la commission de l'enseignement supérieur - il est nécessaire et très important de fournir un cahier des charges aux assistants et d'introduire un système de contrat de prestations.

Je dois dire qu'alors même que certains partis, et notamment le parti socialiste, souhaitaient un encadrement massif grâce aux assistants, on voyait dans le même temps ce parti proposer - heureusement pas formellement par un projet de loi - l'abolition de la taxe universitaire d'ailleurs votée par le peuple et qu'il me paraît difficile de vouloir abolir tout de suite. Parallèlement, les mesures présentées par le département des finances proposent une diminution de 3 millions sur l'enveloppe de l'université parce que celle-ci a effectivement fait une non-dépense de plusieurs millions.

Je pense simplement que la pétition 1182 présente clairement les problèmes mais il faudra qu'à un moment donné les députés soient conséquents; s'ils veulent un encadrement, il faudra réellement fournir les moyens financiers et ne pas essayer de dire qu'il faut plus d'argent et enlever les recettes potentielles.

Les radicaux seront pour leur part très attentifs à ce sujet. Je pense que nous pouvons accepter le rapport présenté par Mme Charrière Debelle ainsi que la motion qui, à notre avis, sera renvoyée au Conseil d'Etat.

M. Antonio Hodgers (Ve). Je ne veux pas revenir sur la qualité du rapport de Mme Charrière Debelle qui a effectivement présenté un excellent travail contenant toutes les discussions que nous avons eues à ce sujet.

Concernant la dernière remarque de M. Lescaze, j'aimerais tout de même préciser que les invites de cette motion 1224 sont assez claires et ne comportent pas, sauf peut-être la première, de frais supplémentaires pour le département de l'instruction publique. D'une manière générale, les deux autres n'entraînent pas de frais. Au contraire, je pense notamment que la proposition du contrat de prestation que pourrait réaliser le Conseil d'Etat est maintenant une proposition urgente. On a vu tous les problèmes que l'on rencontre pour pouvoir maîtriser ce budget puisqu'il est du ressort du rectorat.

En ce qui concerne l'encadrement, je crois que les étudiants avaient spécialement insisté sur le fait que les assistants étaient une chose promise par ceux qui avaient proposé cette taxe universitaire. Il serait bien pour l'université que ceux qui avaient promis ces cent postes supplémentaires tiennent plus ou moins leurs promesses.

Effectivement, la taxe n'a pas rapporté autant que prévu mais je crois que les postes d'assistants finalement créés ne sont de loin pas ceux qui pourraient être créés avec l'argent qu'on a gagné avec cette taxe.

J'invite le Conseil d'Etat, notamment Mme Brunschwig Graf, à mettre en oeuvre dans les meilleurs délais les différentes propositions présentées aujourd'hui par la commission de l'université.

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je profite du dernier rapport de Mme Charrière Debelle pour lui dire combien le Conseil d'Etat a apprécié son engagement en faveur de la formation, qu'elle soit de niveau universitaire ou de tout autre niveau, et combien j'ai eu plaisir, même dans les divergences que nous pouvions parfois avoir, à discuter avec elle de questions qui nous intéressaient mutuellement.

Monsieur le député Hodgers, j'aimerais vous dire ainsi qu'à l'ensemble des députés que nous avons eu, en matière de gestion des taxes universitaires, un rectorat particulièrement prêt à montrer de la transparence. Comme vous le savez, il a, avec les étudiants qui siègent au conseil censé gérer ces taxes sur un compte spécial, donné la possibilité de vérifier toute l'affectation - et rien que l'affectation - de ces taxes universitaires et je crois que personne ici dans cette enceinte ne peut dire que le gain des taxes a été affecté à autre chose que ce que la loi prévoyait.

Il faut aussi savoir ce que les facultés font en matière d'engagement des assistants et je crois que le recteur a été très clair sur cette question, à savoir que par la volonté du Grand Conseil, exprimée à la commission des finances, exprimée dans ce Grand Conseil, il était indispensable que dans l'organisation budgétaire et les affectations budgétaires, la priorité à l'encadrement soit aussi respectée dans l'utilisation des crédits ordinaires et pas seulement des crédits produits par les taxes. C'est là une partie du problème !

Pour vous rassurer tous et parce que vous êtes en droit de le demander, nous avons d'ores et déjà donné le mandat à l'université, qui est au travail, s'agissant du contrat de prestation qui devrait permettre - et c'est à juste titre que vous le demandez - aux députés de connaître en matière de contrôle et, sur la base d'indicateurs sur lesquels, je l'espère, nous serons tous d'accord, de pouvoir vérifier l'activité de l'université et être à égalité entre l'enveloppe que l'on confie et le contrôle que vous exercez.

Aussi, Madame Charrière Debelle, c'est en concluant sur une acceptation tout à fait ouverte et volontaire de cette motion que le Conseil d'Etat vous souhaite bon vent.

Le président. Je mets aux voix les conclusions du rapport de Mme Charrière Debelle, à savoir le dépôt sur le bureau de la pétition 1182-A, et la proposition de motion 1224 qui émane des membres de la commission.

P 1182-A

Mises aux voix, les conclusions de la commission de l'enseignement supérieur (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

M 1224

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

Motion(1224)

concernant l'Université

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant d'une part :

la nécessité reconnue par toutes les parties concernées d'améliorer et élargir l'encadrement des étudiants, particulièrement durant les premières années de leurs études :

- les problèmes soulevés par la pétition 1182, qui dénonce entre autres difficultés le manque chronique d'assistants, cf. de moniteurs, comme aussi le statut peu clair des assistants ;

- les engagements pris lors de l'introduction des taxes universitaires, lesquelles devaient apporter une manne substantielle (l'équivalent d'une centaine de postes) destinée à l'encadrement ;

- les résultats décevants enregistrés à ce propos ;

d'autre part :

- le système de l'enveloppe budgétaire attribuée à l'Université ;

- le flou pour ne pas dire les dysfonctionnements apparus lors des diverses auditions relatives à la pétition 1182 (voir rapport) ;

- l'impérative nécessité pour l'Université de trouver à l'intérieur de son enveloppe, les moyens de résoudre notamment la question de l'encadrement des étudiants et des assistants ;

invite le Conseil d'Etat

à entreprendre toutes démarches utiles auprès du rectorat pour :

d'une part :

- compléter l'encadrement des étudiants par l'attribution d'un nombre suffisant d'assistants, cf. de moniteurs, notamment par l'application rigoureuse de l'art. 63 de la loi sur l'Université (taxes universitaires) mais aussi par l'affectation de toutes autres recettes qu'elle pourrait envisager ;

- préciser le statut des assistants en lui adjoignant un cahier des charges comprenant un plan de carrière ;

d'autre part :

- accompagner le système d'attribution de l'enveloppe budgétaire à l'Université par l'introduction d'un contrat de prestation, à l'instar de ce qui est mis en place pour d'autres organismes publics. 

La séance est levée à 0 h.