République et canton de Genève

Grand Conseil

No 18/III

Jeudi 23 mai 1996,

soir

Présidence :

M. Jean-Luc Ducret,président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance : MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, Jean-Philippe Maitre, Claude Haegi, Olivier Vodoz, Gérard Ramseyer et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Philippe Joye, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Luc Barthassat, Anita Cuénod, Pierre Ducrest, Marlène Dupraz, Catherine Fatio, Vesca Olsommer et Jean Spielmann, députés.

3. Procès-verbal des précédentes séances.

M. Dominique Hausser (S). J'aimerais apporter une correction au procès-verbal des séances précédentes : à la page 15, point 75 de l'ordre du jour, article 2 du projet de loi mentionné à ce point, cinquième ligne, il faut remplacer «alinéa 2» par «alinéa 3».

Le président. Nous allons voter sur cette modification et cette approbation de modification du procès-verbal. (Brouhaha.) Monsieur Hausser, pouvez-vous ajouter quelques explications ?

M. Dominique Hausser (S). A la suite de la séance sur le stade des Charmilles et de l'énumération compliquée des amendements, il s'agit de remettre en forme les précisions mises à jour lors des débats et dans le rapport de minorité.

M. Claude Blanc (PDC). A la suite de la confusion suscitée par ce débat, alimentée entre autres par M. Hausser, j'avais dit - à juste titre - que la nouvelle formulation de cette loi ressemblait à du «petit nègre», mais vous ne vous en êtes pas rendu compte ! Afin de connaître l'objet exact de ce vote, le texte doit être relu in extenso.

Le président. Le texte de l'article ?

M. Claude Blanc. En effet !

M. Dominique Hausser (S). Je répète donc l'alinéa 1 de l'article 2 :

«1Une première tranche de crédit de 2 000 000 F au maximum est octroyée à une fondation d'économie mixte, créée ou en formation, où les collectivités publiques sont majoritaires, pour l'étude de la reconstruction et de la rénovation du Stade des Charmilles, conformément aux dispositions de l'article 51, alinéa 3, de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, et du Centre sportif de Balexert, et de l'exécution des travaux d'urgence.»

Le président. Etes-vous satisfait, Monsieur Blanc ?

M. Claude Blanc. Non !

Le président. Nous allons donc voter sur la modification du procès-verbal.

Mise aux voix, cette modification du procès-verbal est adoptée.

Le procès-verbal des séances des 25-26 avril et 9 mai 1996, ainsi modifié, est adopté.

4. Discussion et approbation de l'ordre du jour.

M. René Koechlin (L). Compte tenu de la similitude des sujets, nous pourrions traiter en un seul premier débat les points 14, 15 et 16 de notre ordre du jour, pour les reprendre séparément lors des seconds et troisièmes débats seulement.

Le président. Comment justifiez-vous votre proposition, Monsieur le député ?

M. René Koechlin. Il s'agit d'éviter les redites. Ces trois points étant semblables, nous pouvons les traiter simultanément en premier débat, si l'ensemble du Grand Conseil est d'accord.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée.

5. Déclarations du Conseil d'Etat et communications.

Le président. Nous avons appris que notre collègue, M. Luc Barthassat, a dû être hospitalisé à la suite d'une fracture. Nous lui avons fait adresser des fleurs ainsi que nos voeux de prompt rétablissement.

Par ailleurs, vous avez trouvé sur vos places le programme de la cérémonie du 1er juin au Port-Noir qui aura lieu cette année le 31 mai en raison de la prestation de serment des magistrats du pouvoir judiciaire à la cathédrale.

6. Correspondance.

Le président. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :

C 432
Le Département fédéral de justice et police nous communique des informations sur la résolution 312 (concernant le renvoi de la famille Hosseini Madani en Iran). ( )C432

Il en est pris acte. 

C 433
Le Parlement de la République et canton du Jura nous transmet sa résolution de soutien sur l'aéroport de Cointrin et sur Swissair. ( )C433

Il en est pris acte. 

C 434
L'Association Groupement de protection de la famille et de l'individu nous précise que le titre de la pétition 1027 demandant des mesures contre la scientologie devrait s'intituler «visant à prendre toutes mesures légales et autres pour protéger, porter assistance à toutes familles ou individus victimes de sectes poursuivant le culte de l'argent par la pratique de manipulations mentales de ses adeptes». ( )C434

Cette lettre sera traitée au point 87 de notre ordre du jour. 

C 435
M. Bernhard Altmann nous communique ses suggestions concernant la parcelle sur laquelle est sise l'Organisation des Nations Unies. ( )C435

Ce courrier sera renvoyé au Conseil d'Etat pour raison de compétence. 

C 436
M. Jean-Pierre Schaerrer nous fait part de sa demande d'annuler la votation concernant la traversée de la rade. ( )C436

Il en est pris acte. Ce courrier a été remis à tous les chefs de groupe. 

C 437
Le Syndicat SEV/TPG pour la section technique et installations fait état de sa position concernant les projets de lois 7386 (sur les Transports publics genevois) et 7387 (contrat de prestations 1996-98 entre l'Etat de Genève et l'entreprise des TPG). ( )  C437
C 438
Le Syndicat SEV/TPG pour les sections Exploitation, cordialité et AEAC du syndicat des Transports publics des TPG fait état de sa position concernant les projets de lois 7386 (sur les Transports publics genevois) et 7387 (contrat de prestations 1996-98 entre l'Etat de Genève et l'entreprise des TPG). ( )C438

Ces courriers seront traités au point 82 de notre ordre du jour. 

Par ailleurs, les pétitions suivantes sont parvenues à la présidence :

P 1115
Aménagement immédiat et définitif du chemin Vert à Veyrier. ( )  P1115
P 1117
Opposition à l'horaire scolaire romand. ( )  P1117

Ces pétitions sont renvoyées à la commission des pétitions.

Est également parvenue à la présidence la pétition suivante :

P 1116
Affaire de Mme Rinaldi. ( )   P1116

Cette pétition est renvoyée à la commission des affaires sociales.

D'autre part, la commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer les pétitions suivantes :

P 1111
Maturité artistique ( ), à la commission de l'enseignement et de l'éducation.P1111
P 1112
Association suisse d'étiopathie ( ), à la commission de la santé.P1112

Il en sera fait ainsi.

Enfin, la pétition suivante est retirée par ses signataires :

P 959
Sauvons nos parcs. ( )  P959

Il en est pris acte.

7. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Le président. Le projet de loi suivant est parvenu à la présidence :

PL 7464
de MM. Bernard Lescaze (R), Claude Lacour (L) et Christian Grobet (AG) modifiant la loi de procédure civile (E 2 3). ( )  PL7464

M. Bernard Lescaze (R). Mmes et MM. les députés ont trouvé sur leur banc un projet de loi numéroté 7464. Je remercie M. Halpérin d'avoir fait un rapport oral qui rend le délai encore plus rapide que nous ne l'espérions à la commission judiciaire. J'en fait l'annonce aujourd'hui avec les signatures de MM. Lacour, Fontanet et de moi-même.

C'est une omission lors de la révision de la loi sur la justice de paix - nous avions en effet oublié d'indiquer le délai du recours instauré - qui nécessite ce projet de loi déjà étudié à la commission judiciaire. Si nous arrivons, vendredi soir, à la fin de l'ordre du jour du département de M. le conseiller d'Etat Ramseyer, nous l'examinerons, sinon nous le repousserons à la séance du mois de juin, afin de respecter la procédure.

Le président. Il en sera donc fait ainsi.  

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Le président. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence :

I 1968
de M. Jacques Boesch (AG) : Projet de construction à la Grand-Cour de Troinex : une atteinte irrémédiable à notre patrimoine cantonal. ( )   I1968

Cosignataires : Yves Zehfus, Laurette Dupuis, Jean-Pierre Rigotti, Pierre Vanek, Pierre Meyll.

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

M. Laurent Moutinot(S). Je regrette de me voir contraint de retirer l'interpellation que j'avais déposée au sujet de la Maison Europa, car le retard accumulé rend le développement de cette interpellation manifestement hors sujet.

Le président. L'interpellation suivante :

I 1962
de M. Laurent Moutinot : Maison Europa : qui prend ses désirs pour des réalités ? ( ) est donc retirée.I1962

Le Grand Conseil prend acte du retrait de l'interpellation 1962. 

e) de questions écrites.

Le président. Le Conseil d'Etat nous a transmis réponse à la question écrite suivante :

Q 3467
de M. Hervé Burdet : De l'énergie renouvelable ou des alluvions : il faut choisir ! ( )  Q3467

Q 3467

de M. Hervé Burdet (L)

Dépôt: 11 janvier 1993

De l'énergie renouvelable ou des alluvions: il faut choisir!

Le 28 octobre 1992, le Conseil fédéral, sur la base de l'article 18 A, 1er et 3e alinéas, de la loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage (LPN), a approuvé l'ordonnance sur la protection des zones alluviales d'importance nationale, qui est entrée en vigueur le 15 novembre 1992. Conformément à ses articles 1 et 2, cette ordonnance dresse l'inventaire (Annexe 1) et brosse la description (Annexe 2) des objets retenus en tant que zones alluviales d'importance nationale.

Parmi les cinq objets inscrits à l'inventaire, pour le canton de Genève, figure le N° 218 Vers-Vaux, sur la commune de Chancy.

Le but visé par l'ordonnance de protection des zones alluviales est la conservation intacte des objets désignés, notamment la conservation ou le rétablissement de la dynamique naturelle du régime des eaux et du charriage (Art. 4, al. 1). L'ordonnance stipule encore que les cantons veillent à ce que les exploitations existantes ou futures, notamment l'utilisation des forces hydrauliques soient en accord avec le but visé par la protection (Art. 5, al. 2, lettre c).

Par ailleurs, les Services industriels de Genève (SIG) énumèrent, dans les observations d'ordre général qui assortissent la présentation de leur budget pour 1993, au nombre des études importantes à engager ou à poursuivre: le nouvel aménagement hydroélectrique de Conflan. Cependant les SIG ne font figurer sous la rubrique (0320.0800) de leur budget d'investissements pour 1993, que des crédits accordés avant fin 1992 pour un montant de 2 000 000 F, sans prévoir aucune attribution budgétaire 1993 pour l'engagement ou la poursuite, par le service de l'électricité, de l'étude préliminaire du nouvel aménagement hydroélectrique de Conflan.

Le Conseil d'Etat qui a été consulté à propos de l'Ordonnance sur les zones alluviales par l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage d'une part et qui, d'autre part est l'organe de tutelle des Services industriels de Genève, peut-il dire:

- si c'est par inadvertance qu'il a demandé ou approuvé l'inscription à l'inventaire selon l'Ordonnance sur les zones alluviales de l'objet 218 Vers-Vaux?

- s'il ignore que l'objet 218 Vers-Vaux, avec les zones-tampons qui ne manqueront pas de le compléter forme avec le palier de Conflan un seul et même site géographique?

- s'il a une recette miraculeuse et des plans pour réussir à construire une installation hydroélectrique sur un site qui doit être conservé intact au sens de l'ordonnance sur les zones alluviales?

- s'il a d'ores et déjà renoncé à capter un appoint bienvenu d'énergie électrique renouvelable à Conflan, malgré les 2 000 000 prévus et peut-être engagés pour étudier cette solution?

- si au cas où il aurait renoncé à l'installation hydroélectrique de Conflan, il ne vaut pas mieux économiser, par les temps qui courent, des études désormais inutiles et du même coup 2 000 000?

- s'il ne pense pas qu'en définitive le courage politique consiste à savoir choisir entre la «domestication de la chèvre et la culture du chou», soit en l'occurrence, entre la production d'un appoint non négligeable d'énergie électrique indigène renouvelable et la protection de 16 hectares d'alluvions sur les 210 qui figurent à l'inventaire de protection prévu dans l'Ordonnance sur les zones alluviales, sans parler de tous les hectares de zones alluviales qui sont d'ores et déjà protégées, ailleurs dans le canton par d'autres législations, règlements et arrêtés?

RÉPONSE DU CONSEIL D'ÉTAT

du 8 mai 1996

Nous référant à la réponse de notre Conseil à une autre question (N° 3468) posée par M. Burdet, qui se demandait pourquoi les Teppes de Biolay n'avaient pas été prises en considération pour une protection fédérale, nous observons qu'à l'initiative du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, eut lieu, en date du 31 août 1990, une réunion en présence des experts fédéraux compétents qui devait notamment avoir pour conséquence l'inscription du site de Vers-Vaux dans l'inventaire des zones alluviales d'importance nationale.

Développement des ressources indigènes et protection de l'environnement

Comme indiqué dans le rapport de politique énergétique du Conseil d'Etat répondant à 5 démarches parlementaires liées à l'approvisionnement énergétique du canton, dont le Grand Conseil a pris acte lors de sa séance du 9 avril 1992, tout est mis en oeuvre pour rendre la valorisation de nos ressources hydrauliques conciliables avec les impératifs liés au respect des équilibres naturels des biotopes concernés. L'aménagement hydroélectrique de Conflan ne ferait pas exception à la règle, les études préliminaires entreprises jusqu'ici permettant de conclure que ce projet répondrait entièrement aux exigences liées à la protection du milieu naturel dans lequel il s'inscrit.

D'une puissance disponible et d'une production prévisible correspondant approximativement au tiers de l'usine hydroélectrique de Verbois, l'aménagement précité fait toujours partie des projets visant à répondre aux objectifs du droit fédéral et cantonal dans le domaine de l'énergie. Il aurait notamment pour effets favorables:

- d'accroître nos ressources d'énergie locales et renouvelables;

- d'élever le taux de couverture des besoins du réseau genevois, qui ne dépasse pas actuellement 30%, par la production d'électricité sur le territoire cantonal.

La réalisation de l'ouvrage de Conflan, qui représenterait un complément idéal à la revalorisation de Chancy-Pougny, optimaliserait ainsi l'utilisation de l'énergie hydraulique du Rhône genevois, tout en permettant d'atténuer les difficultés de nature géologique rencontrées dans cette région (glissement des berges et érosion du lit du Rhône).

Projet Conflan - Les démarches

Dans cette optique, les Services industriels de Genève (ci-après SIG) ont engagé, en 1984, une étude préliminaire destinée à la préparation d'un dossier de demande de concession. Cette étude a démontré que la réalisation d'un ouvrage hydroélectrique à Conflan était techniquement réalisable et économiquement intéressante, compte tenu du niveau du prix de l'énergie électrique à cette époque.

L'ouvrage étant situé sur la frontière franco-suisse, des négociations avec les autorités françaises devait alors être entreprises. C'est ainsi que, le 18 février 1987, le Conseil d'Etat a décidé de:

- confirmer son accord de principe quant à la réalisation de l'aménagement de Conflan;

- intervenir auprès de la Confédération pour que des négociations soient entreprises afin que l'Etat français renonce à sa part d'énergie;

- désigner le président des Services industriels de Genève (SIG) comme représentant du canton pour participer à la première phase des négociations précitées.

Dans la foulée, le chef du département de l'économie publique, alors chargé de la politique cantonale en matière d'énergie, s'est adressé le 7 avril 1987 à l'Office fédéral de l'énergie pour:

- lui communiquer la décision du Conseil d'Etat;

- l'inviter à ouvrir des négociations avec la France en vue d'obtenir de cet Etat une renonciation à sa part d'énergie sur l'aménagement de Conflan, précisant que la contrepartie de cette cession de droit pouvait être une participation substantielle de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) à la réalisation de cet ouvrage.

L'objectif de cette démarche a été de définir les conditions préalables permettant aux deux partenaires, soit les SIG et la CNR, de poursuivre l'étude du projet en vue de:

- choisir une des deux variantes retenues (barrage et usine accolés dans le lit du fleuve, nécessitant l'exécution de l'ouvrage en deux phases, à l'abri d'enceintes, ou barrage et usine accolés en rive française, permettant la réalisation de l'ouvrage entier en terre ferme);

- préparer un dossier de demande de concession.

En 1987 et 1988, le président des SIG, conformément à la décision du Conseil d'Etat du 18 février 1987, a participé à deux séances réunissant les partenaires compétents de part et d'autres de la frontière, soit:

- pour la Suisse, l'office fédéral de l'économie des eaux;

- pour la France, la direction du gaz, de l'électricité et du charbon (DIGEC) du Ministère de l'industrie, des P & T et du tourisme.

Si la France n'a pas manifesté, dans ces discussions, d'opposition au principe d'une cession de sa part d'énergie, en revanche, certaines exigences formulées en contrepartie de cette session se sont avérées exagérées, aucun accord n'ayant pu être obtenu à l'issue de ces négociations qui, par conséquent, ont été interrompues.

En mars 1990, l'office fédéral de l'économie des eaux a fait savoir qu'il n'était pas exclu que la France soit prête à reconsidérer sa position. Avec l'accord des SIG, l'office susmentionné a donc indiqué à la DIGEC, en date du 2 mai 1990, que le canton de Genève était toujours intéressé par l'aménagement de Conflan, pour autant que la partie française réexamine, tout au moins en partie, les exigences formulées en 1988.

Il y a lieu de rappeler que la sécurité de l'approvisionnement énergétique constitue le principal objectif de politique énergétique tant à l'échelon cantonal que fédéral. Or, nul ne peut contester que la situation de Genève en matière d'approvisionnement électrique doit être qualifiée de précaire. En effet,

- la production locale (Verbois, Chancy-Pougny, Cheneviers) est inférieure au tiers de l'électricité consommée chaque année par les usagers du réseau exploité par les SIG;

- le réseau acheminant le courant apporté, qui repose sur la ligne à deux ternes 220 kV Romanel-Verbois, édifiée en 1967, fonctionne à la limite supérieure de sa capacité de transport. Sa marge de sécurité étant fortement réduite, d'importantes pannes peuvent survenir et affecter gravement la collectivité genevoise.

Enfin, du point de vue de la protection de l'environnement, il convient encore de souligner que le projet du barrage à Conflan est obligatoirement soumis à une étude d'impact.

Celle-ci permettra, en particulier, de fournir une appréciation précise sur la valeur écologique du Rhône dans ce secteur.

Si la pesée des intérêts entre la sauvegarde du site dans son état actuel et son exploitation à des fins de production d'énergie électrique, devait pencher en faveur de cette dernière, l'étude d'impact devra proposer des mesures de minimisation et de compensation dont les coûts seront intégrés au projet.

Conclusions

Au vu des considérations qui précèdent, Conflan constitue un ouvrage d'intérêt public prépondérant; son emplacement ne devrait pas empiéter sur le périmètre de la zone alluviale d'importance nationale de Vers-Vaux. Il devrait même être possible d'aller dans le sens d'une amélioration du but visé par la protection de cette dernière en réalimentant le bras de Vers-Vaux, comme prévu dans le «Livre Vert» du DIER - 1981.

Compte tenu de la prise de participation majoritaire des SIG dans la Sociétés des Forces Motrices de Chancy-Pougny (SFMCP) et du fait que la CNR est l'un des actionnaires de ladite société, les négociations avec la France doivent être reprises sous la conduite de la SFMCP en tant que futur maître de l'ouvrage et exploitant de l'aménagement, conformément aux voeux exprimés aussi bien par le Conseil de direction des SIG que par le Conseil d'administration de la SFMCP en date du 21 décembre 1994.

Le Conseil d'Etat estime enfin indispensable que la procédure relative au projet de Conflan se déroule en parallèle avec celle du renouvellement de la concession pour l'usine de Chancy-Pougny, en raison des délais de procédure extrêmement longs qui affecteront le projet binational de Conflan. 

GR 128-1
a) M. Z. H.( -)GR128
Rapport de Mme Janine Berberat (L), commission de grâce
GR 129-1
b) M. H. B.( -)GR129
Rapport de M. René Longet (S), commission de grâce
GR 130-1
c) M. M. C.( -)GR130
Rapport de Mme Michèle Wavre (R), commission de grâce
GR 131-1
d) M. R. D.( -)GR131
Rapport de M. Michel Balestra (L), commission de grâce

8. Rapports de la commission de grâce chargée d'étudier les dossiers des personnes suivantes :

M. Z. H. , 1965, Maroc, sans profession, recourt contre le solde de la peine d'expulsion qui prendra fin en 2004.

Mme Janine Berberat (L), rapporteuse. M. Z. H. est âgé de 31 ans. Originaire du Maroc, il habite à Casablanca. Il est célibataire et sans profession. Par arrêt du 22 février 1993 de la Chambre pénale de la Cour de justice, il a été condamné pour infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants avec circonstances aggravantes, pour trafic d'héroïne et pour infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, pour vol, faux et usage de faux dans les certificats et titres.

Il a été condamné à 24 mois d'emprisonnement - peine subie aux deux tiers - et à dix ans d'expulsion du territoire suisse. Il ne se trouve pas sous le coup d'une expulsion administrative.

Aujourd'hui, il recourt contre le solde de sa peine d'expulsion, qui prendra fin en 2004, invoquant ses liens affectifs avec une Suissesse et son désir de l'épouser.

Expulsé de France après plusieurs condamnations pour extorsions de fonds, vols avec effraction et tentative d'évasion, M. Z. H. a séjourné en Allemagne où il a déposé une demande d'asile.

En février 1991, il est venu en Suisse où il a également déposé une demande d'asile. C'est à Estavayer-le-Lac, où il a été placé, qu'il a rencontré Mme A. B..

Suite au rejet de sa demande d'asile, une décision d'expulsion administrative a été prise à son encontre. Pour s'y soustraire, il s'est installé à Genève, dans un studio loué par les soins de son amie et sous son nom.

En situation illégale, il a utilisé une fausse identité, de même qu'il a volé et fourni un faux passeport à un ami libanais.

C'est à Genève également que M. Z. H. est entré en contact avec des trafiquants de drogue. Il n'est pas consommateur lui-même, mais, pour son commerce, il engageait des revendeurs parmi ses clients.

Lors de son arrestation, le 27 août 1992, il a été trouvé à son domicile un pistolet 22 long rifle chargé. L'enquête a établi qu'Z. H. avait écoulé, aux mois de juillet et août 1992, une quantité de 130 grammes d'héroïne pour un bénéfice de 11 000 F, selon les propres déclarations du requérant.

Libéré en mars 1993, M. Z. H. revient à Genève le 9 mai 1994. Et c'est pour rupture de ban et, plus grave, pour trafic de drogue, qu'il se retrouve aussitôt à Champ-Dollon pour un séjour de trois mois.

On retrouve Mme B. tout au long du parcours helvétique de M. Z. H., que ce soit à Estavayer-le-Lac ou à Genève, pour la location du studio, les demandes de visites à la prison et, aujourd'hui, pour devenir Mme Z..

Par une lettre, adressée à la commission de grâce en date du 8 mai 1996, Mme B. appuie le recours d'Z. H. et demande de leur permettre de «recommencer une nouvelle vie sur des bases saines».

Compte tenu des antécédents de M. Z. H. et de sa récidive, en mai 1994, la commission a considéré que le choix du gain facile est déterminant. En effet, électricien de formation, M. Z. H. aurait pu se procurer un emploi et, vu les liens affectifs qu'il fait valoir aujourd'hui, mieux s'insérer dans notre pays.

C'est donc à l'unanimité que la commission vous recommande le rejet de ce recours. L'avis du procureur général est également négatif.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.

M. H. B. , 1961, Yougoslavie, sans profession, ne recourt que contre le solde de la peine d'emprisonnement.

M. René Longet (S), rapporteur. M. H. B., âgé de 35 ans, marié et père de trois enfants, a été condamné, en date du 25 janvier 1995, à trois ans d'emprisonnement pour infractions graves à la loi fédérale sur les stupéfiants.

Membre d'un réseau de trafiquants de drogue, il a été arrêté, en avril 1993, avec une dizaine d'autres personnes. Sur ces trois ans d'emprisonnement, il faut déduire dix mois et demi de préventive. Suite au versement d'une caution de 5 000 F, M. H. B. a été relâché. Après cette condamnation, le requérant a été arrêté en Allemagne, en août 1995, est entré en détention à Champ-Dollon, en octobre 1995, et transféré, en novembre de la même année, à la prison de Lenzbourg, en Argovie, où il se trouve depuis six mois. C'est de cette prison qu'il nous a adressé son recours.

La femme et les enfants de M. H. B., au bénéfice d'un statut de réfugiés, sont actuellement en Allemagne; le recours est motivé par le désir de les rejoindre.

Le directeur de la prison de Lenzbourg, dans la communication qu'il nous a adressée en avril de cette année, signale que le prisonnier a une bonne conduite, ce qui nous laisse supposer qu'il bénéficiera de la remise de la peine aux deux tiers de celle-ci, à savoir le 11 octobre 1996.

La commission a considéré qu'il s'agissait d'un délit grave, que la peine était modérée et qu'il n'y avait pas de véritable motif pour accéder à la demande en grâce formulée.

C'est pourquoi la commission a donné un préavis négatif.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.

M. M. C. , 1967, France, cuisinier, recourt contre le solde de la peine d'expulsion judiciaire dont l'échéance est fixée en 2002.

Troisième recours en grâce.

Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. M. M. C. a 29 ans. De nationalité française, il est cuisinier et habite actuellement à Annemasse.

Pour vols d'une voiture et d'objets divers, il a été condamné par la Cour correctionnelle, le 20 janvier 1992, à quinze mois d'emprisonnement. Il a accompli trois mois et quatorze jours jusqu'à sa libération conditionnelle. Il a été également condamné à dix ans d'expulsion du territoire suisse.

Il est également sous le coup d'une interdiction d'entrée en Suisse valable jusqu'en 2007.

M. M. C. a déjà déposé deux recours en grâce, rejetés par le Grand Conseil respectivement les 16 février et 14 septembre 1995.

M. M. C. recourt contre le solde de la peine d'expulsion judiciaire, dont l'échéance est fixée à 2002 pour Genève et à 2007 pour la Suisse. Il désire revenir à Genève quand bon lui semble.

En l'absence de faits nouveaux, la commission de grâce vous recommande de rejeter ce troisième recours.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.

M. R. D. , 1941, Italie, avocat, ne recourt que contre la peine d'expulsion judiciaire qui prendra effet en août 1998 et prendra fin en 2013.

M. Michel Balestra (L), rapporteur. M. R. D., né le 15 septembre 1941, est avocat et citoyen des USA.

Il a été condamné à quinze ans de réclusion et quinze ans d'expulsion pour un important trafic international de cocaïne.

Le recours porte sur la peine d'expulsion, motivée par le fait que M. R. D. n'avait aucun lien avec la Suisse. Il a rencontré Mme D. G. un an et demi après sa condamnation, c'est-à-dire à fin mai 1991. Depuis, Mme G. a toujours visité son ami, et ils se sont mariés en 1994.

Le recours porte donc sur la peine d'expulsion, puisque aujourd'hui M. R. D. a des liens avec notre pays.

Bien que manifestant de la compréhension pour l'objet du recours, le Parquet nous donne un préavis négatif, car l'expulsion judiciaire pourra être différée, à titre d'essai, par la commission de libération conditionnelle, pour autant que le comportement de M. R. D. ne s'oppose pas à une telle mesure, quand celle-ci pourra être prononcée.

Le recours en grâce est jugé prématuré, parce que la commission de grâce pense qu'il faut laisser la commission de libération conditionnelle décider, le moment venu.

C'est pourquoi la commission de grâce vous propose, à l'unanimité, de rejeter ce recours.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté. 

E 799
9. Election de la ou du président de la Cour de Justice. (Durée du mandat, un an : du 1er juin 1996 au 31 mai 1997). ( )E799

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Pierre Heyer, présentée par le parti socialiste. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Pierre Heyer est élu tacitement

E 800
10. Election de la ou du vice-président de la Cour de justice. (Durée du mandat, un an : du 1er juin 1996 au 31 mai 1997). ( )E800

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Richard Barbey, présentée par le parti libéral. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Richard Barbey est élu tacitement.  

E 801
11. Election de la ou du président de la Cour de cassation (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E801

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Jacques Droin, présentée par le parti libéral. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Jacques Droin est élu tacitement

E 802
12. Election de la ou du vice-président de la Cour de cassation. (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E802

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Robert Roth (HP). Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Robert Roth est élu tacitement

E 803
13. Election de la ou du président du Tribunal administratif. (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E803

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Laure Bovy, présentée par le parti démocrate-chrétien. Il n'y a pas d'autre candidature.

Mme Laure Bovy est élue tacitement

E 804
14. Election de la ou du vice-président du Tribunal administratif. (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E804

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Dominique Schucani, présentée par le parti libéral. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Dominique Schucani est élu tacitement

E 805
15. Election de la ou du président du Tribunal de première instance. (Durée du mandat, un an : du 1er juin 1996 au 31 mai 1997). ( )E805

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. René Rey, présentée par le parti socialiste. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. René Rey est élu tacitement

E 806
16. Election de la ou du vice-président du Tribunal de première instance. (Durée du mandat, un an : du 1er juin 1996 au 31 mai 1997). ( )E806

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Christian Murbach, présentée par le parti démocrate-chrétien. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Christian Murbach est élu tacitement

E 807
17. Election de la ou du président du collège des juges d'instruction. (Durée du mandat, six ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 2002. ( )E807

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Christine Junod, présentée par le parti libéral. Il n'y a pas d'autre candidature.

Mme Christine Junod est élue tacitement

E 808
18. Election de la ou du vice-président du collège des juges d'instruction. (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E808

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Daniel Dumartheray, présentée par le parti socialiste. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Daniel Dumartheray est élu tacitement

E 809
19. Election de la ou du président du Tribunal tutélaire - Justice de paix. (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E809

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de M. Thierry Luscher, présentée par le parti radical. Il n'y a pas d'autre candidature.

M. Thierry Luscher est élu tacitement

E 810
20. Election de la ou du vice-président du Tribunal tutélaire - Justice de paix. (Durée du mandat, deux ans : du 1er juin 1996 au 31 mai 1998). ( )E810

Le président. Est parvenue à la présidence la candidature de Mme Fabienne Proz Jeanneret, présentée par le parti radical. Il n'y a pas d'autre candidature.

Mme Fabienne Proz Jeanneret est élue tacitement

IU 186
21. Interpellation urgente de M. Olivier Lorenzini : Personnel des restaurants. ( )IU186

M. Olivier Lorenzini (PDC). Mon interpellation urgente s'adresse à M. Jean-Philippe Maitre, chef du département de l'économie publique.

Comme nous avons encore pu le constater ce matin, à la lecture d'un de nos quotidiens, la situation se détériore entre les différents acteurs de la branche des cafetiers-restaurateurs du canton de Genève.

Je vous rappelle que tout est parti de la décision prise par l'Union Helvetia, syndicat du personnel de la branche de l'hôtellerie et de la restauration, de dénoncer la convention collective nationale de travail pour le 30 juin 1996.

Le syndicat patronal, à Genève, qui n'a pas formellement congédié des employés, aurait fourni à des patrons de bistrot des procédures à suivre pour licencier le personnel qui se verrait proposer de nouveaux contrats de travail, conformes au code des obligations et à la loi sur le travail.

Voici quelques exemples illustrant les différences existant entre les conventions auxquelles serait soumis le personnel des restaurants :

- L'horaire, actuellement de 42 heures pour les cuisiniers, passerait à 51 heures;

-  Les vacances, actuellement de cinq semaines, seraient réduites à quatre semaines;

-  Actuellement, six jours fériés sont payés. On passerait à neuf jours fériés, dont huit non payés. Seul le 1er août serait compensé.

Forts de cette décision et conseillés par le syndicat patronal des cafetiers et restaurateurs du canton de Genève, certains employeurs ont licencié, avec effet au 30 juin 1996, plus de trois mille employés du secteur de la restauration qui en compte près de dix mille au total.

Vu les informations, souvent contradictoires, véhiculées par divers milieux, notamment par la presse locale, au sujet du sort des travailleurs de ce secteur, le Conseil d'Etat peut-il répondre aux questions suivantes :

1. Comment évoluera, à Genève, la situation dans ce secteur économique, en l'absence d'une convention collective à partir du 1er juillet 1996 ?

2. Quelles seront les mesures de sauvegarde ou de protection prises par les autorités compétentes pour combler le vide juridique qui apparaîtra, sans doute, en raison de la disparition de cette convention ?

Il est en effet de première importance que les travailleurs de cette branche puissent conserver un statut contractuel suffisant et des conditions de travail acceptables, malgré l'absence d'une convention collective de travail.

Si tel ne devait pas être le cas, nous risquerions d'assister à une grave détérioration du climat social dont ne pâtiraient pas seulement les travailleurs concernés mais également l'ensemble de la population genevoise.

Il est opportun de rappeler que dans le secteur d'activité de l'hôtellerie, également lié par cette convention, la démarche est toute autre. Des négociations sont en cours, entre employeurs et employés, dans le but de disposer d'une convention provisoire dès le mois de juillet 1996, et cela ne peut que nous réjouir.

La situation vécue actuellement par une partie des employés du secteur de la restauration est inacceptable, tant du point de vue humain que du rayonnement de notre République. Il n'est pas souhaitable que des établissements publics deviennent des lieux de conflit et non plus des lieux de convivialité. (Applaudissements.)

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 77 bis de notre ordre du jour.  

IU 187
22. Interpellation urgente de M. Pierre Meyll : Regroupement de projets pendant les débats. ( )IU187

M. Pierre Meyll (AdG). Mon interpellation s'adresse à vous-même, Monsieur le président.

Lors de la dernière séance de ce Grand Conseil, vous m'avez empêché d'intervenir, bien que j'aie attendu la fin des interventions de chaque représentant des partis et des groupes dans le tour de préconsultation.

Mon intervention était due au fait que nous avons traité, en commission des travaux, le projet de loi 7293 portant sur les accords intercantonaux. Ce projet avait un pendant, le projet de loi 7416, qui pouvait être traité en parallèle. Aussi je désirais qu'il soit traité dans le cadre de la commission des travaux.

Or, lorsque j'ai demandé à ce que ce projet de loi soit traité pendant la discussion sur les accords intercantonaux, il m'a été répondu que le tour de préconsultation n'avait pas eu lieu au Grand Conseil et que le règlement interdisait une telle pratique. C'est vrai ! Mais il n'en a pas été de même pour deux points, traités par la commission des travaux, qui n'avaient pas fait l'objet d'une préconsultation devant ce Grand Conseil : la maternité et la place des Nations. Dès lors, nous étions en totale contradiction avec le règlement.

Je souhaite que l'on veille à une égalité de traitement et que l'on profite de l'occasion pour traiter simultanément un projet de loi parallèle au précédent.

C'est l'unique raison de mon insistance, et je regrette que vous n'ayez pas voulu m'écouter. Cela a été dû, sans doute, au grand retard pris sur l'ordre du jour. J'espère donc que vous m'avez entendu maintenant.

Le président. C'est une véritable motion de censure, Monsieur le député ! Je vous rappelle qu'une interpellation urgente s'adresse au Conseil d'Etat et non au président du Grand Conseil. Néanmoins, je vous répondrai volontiers, soit à la buvette soit à la salle des Pas-Perdus ! 

IU 188
23. Interpellation urgente de M. Jacques Boesch : Attribution de travaux. ( )IU188

M. Jacques Boesch (AdG). Mon interpellation urgente s'adresse à M. le conseiller d'Etat Joye qui, désormais, retient toute l'attention de l'Alliance de gauche.

L'an dernier, le Grand Conseil a approuvé un crédit pour la construction de l'extension de la rue Lect, à Meyrin. Récemment, les travaux ont été mis en soumission.

M. Joye peut-il m'indiquer si l'autorisation de construction de cette route a été délivrée sous forme d'approbation LER et publiée, à ce titre, dans la «Feuille d'avis officielle» ? Dans l'affirmative, quelle est la date de publication de cette approbation ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 57 bis de notre ordre du jour. 

IU 189
24. Interpellation urgente de M. Gilles Godinat : Traversée de la rade. ( )IU189

M. Gilles Godinat (AdG). Mon interpellation urgente s'adresse au Conseil d'Etat in corpore, mais plus particulièrement à MM. Segond, Vodoz et Ramseyer.

Elle porte sur l'utilisation du dirigeable de l'Association «Trajets» à des fins politiques.

Nous avons appris que cette association a été achetée, à coups de chèques, pour la campagne des partisans de la traversée de la rade.

«Trajets» est une association d'aide aux personnes handicapées. Notre Grand Conseil la soutient par voie de subvention. La charte de cette association, constituée de neuf points, a été violée sur huit points ! Je vous épargne la lecture de cette charte, mais je vous prie d'en prendre connaissance.

En effet, l'éthique professionnelle en la matière n'a pas été respectée. Je suis indigné du fait qu'une telle association puisse se prêter à une pareille opération, d'autant qu'elle est subventionnée par le canton, l'Office fédéral des assurances sociales, la Ville de Genève et d'autres communes.

Par conséquent, je vous demande quelles mesures le Conseil d'Etat entend prendre à l'égard d'une telle association qui viole les règles élémentaires de l'éthique professionnelle. De plus, je souhaite savoir si des clients de «Trajets» ont participé à cette opération.

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 72 bis de notre ordre du jour. 

IU 190
25. Interpellation urgente de M. Christian Ferrazino : Traversée de la rade. ( )IU190

M. Christian Ferrazino (AdG). Mon interpellation s'adresse à M. Segond, président du Conseil d'Etat.

Elle fait suite à vos déclarations de ce matin à la radio, Monsieur le président. Je vous ai entendu faire la leçon à la Ville de Genève qui, selon vous, ferait de la propagande et non de l'information à propos de la traversée de la rade.

Si vous considérez que l'information très pertinente donnée aux citoyens par la Ville de Genève est de la propagande, il m'intéresserait de savoir comment vous qualifiez les démarches de votre collègue, M. Joye, qui a déjà dépassé de plusieurs centaines de milliers de francs le crédit voté par ce Grand Conseil. Sur ce crédit de 8 millions, 600 000 F avaient été débloqués pour la visualisation du projet. M. Joye a reconnu, à l'occasion d'une interpellation que j'avais développée, il y a un mois, qu'il en était à l,2 million. Selon ses dernières déclarations, il en serait maintenant à 1,4 million.

Comme je vous sais soucieux de ces problèmes, Monsieur le président, je vous demande sur quelle rubrique ces montants ont été prélevés ou sur quelle rubrique vous entendez les prélever.

M'étant rendu hier à la commission de l'aménagement, au département des travaux publics, j'ai failli être renversé par des gens qui portaient des cartons remplis de cassettes sur la traversée de la rade, objet qui semble préoccuper beaucoup les fonctionnaires du lieu. Je vous demande s'il s'agit des cassettes données à leur clientèle respective par la Pharmacie principale et le TCS. Ces cassettes sont-elles facturées par le département et, le cas échéant, à qui ?

Je souhaite également savoir si c'est le département qui acquitte la facture de l 700 F par soirée, selon mes renseignements, à l'entreprise privée Ageda ou si le coût en est à la charge des organisateurs des différentes assemblées publiques qui accueillent l'exposition du département et projettent le film vidéo; vous me direz qu'il s'agit d'information, mais en regardant ce film, on s'imagine plutôt aux îles Borromées qu'à Genève !

Enfin, je vous demande comment vous qualifiez le message que vous avez vous-même rédigé et qui indique aux citoyens qu'ils ne peuvent s'exprimer, le 9 juin prochain, qu'en disant oui-oui ou non-non, alors qu'ils peuvent dire oui-non ou non-oui. En effet, comment pouvez-vous expliquer le fait que vous avez donné des consignes de vote trompeuses aux électeurs, puisque vous leur laissez croire qu'ils ne peuvent voter qu'avec un double oui ou un double non, alors qu'ils peuvent le faire de quatre manières différentes en disant également oui-non ou non-oui ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 72 ter de notre ordre du jour. 

IU 191
26. Interpellation urgente de Mme Elisabeth Reusse-Decrey : Traversée de la rade. ( )IU191

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). J'aimerais revenir sur la publicité faite par le dirigeable appartenant à «Trajets» et poser une question supplémentaire.

M. Godinat vient de le dire, et je tiens à appuyer ses propos, le comportement de l'Association «Trajets» est inadmissible, en tant qu'association engagée aux côtés des plus faibles et subventionnée par des collectivités publiques.

Visiblement, l'éthique et la déontologie ne figurent plus dans ses statuts.

Reste une question sur laquelle je voudrais encore intervenir. Elle s'adresse à M. Ramseyer, chef du département de justice et police. Mais comme j'estime qu'il y a urgence, comme pour l'interpellation de M. Ferrazino, et que le département de M. Ramseyer ne les traitera probablement pas durant ces deux jours, je demanderai à ce que le Conseil d'Etat me réponde d'ici demain, étant donné que cela concerne les votations du 9 juin.

Il existe un règlement, le F 3 4, qui dit, en son article 6 a), que l'utilisation du lac, des eaux cantonales et de l'espace aérien, à des fins publicitaires, est interdite. L'article 6 b) précise qu'à l'occasion de manifestations d'intérêt général, de manifestations sportives internationales ou en faveur d'oeuvres de bienfaisance, il peut y avoir des dérogations.

La publicité figurant sur le dirigeable n'appartient et ne correspond à aucun de ces cas de figure. L'utilisation du dirigeable, aux fins d'un vote sur la rade, devrait donc être immédiatement interrompue.

A titre de comparaison, c'est ce même article qui avait été invoqué pour interdire aux voiliers portant le slogan «anti-armée» de naviguer au large du quai, durant le défilé militaire.

Il ne devrait donc pas y avoir deux poids, deux mesures.

Je pose les questions suivantes :

Les sorties du dirigeable de «Trajets», dans l'espace aérien, ont-elles fait l'objet d'une demande d'autorisation ? Si elle a été accordée par le Conseil d'Etat, à quel titre l'a-t-elle été puisque, visiblement, elle contrevient aux dispositions réglementaires ?

Enfin, le Conseil d'Etat entend-il, puisqu'il semble qu'il y ait violation du règlement, faire cesser immédiatement ces vols publicitaires ?

Le président. Je suggère qu'il soit répondu à votre interpellation urgente dans le cadre de l'interpellation de M. le député Godinat, soit au point 72 bis de notre ordre du jour. 

IU 192
27. Interpellation urgente de M. Matthias Butikofer : Fonctionnement du SCARPA. ( )IU192

M. Matthias Butikofer (AdG). Mon interpellation urgente s'adresse à Mme Brunschwig Graf, conseillère d'Etat.

Elle concerne le fonctionnement du service sur l'avance et le recouvrement des pensions alimentaires SCARPA.

En effet, le nombre de personnes obligées de recourir au SCARPA évolue constamment. Le nombre des dossiers est passé de deux mille cent, en 1993, à deux mille quatre cents, en 1994, et à deux mille cinq cent trente-deux en 1995. Nous nous attendons, cette année, à une augmentation considérable des nécessiteux.

Face à cette situation, il semble que le SCARPA ne parvient plus à traiter les cas dans des délais convenables. La signature de la convention entre ledit service et le créancier, dont dépend l'octroi d'une avance, intervient trop tard. Le délai d'attente beaucoup trop long - entre la violation de l'obligation d'entretien par le débiteur et le droit à l'avance - crée, pour les concernés, une insécurité financière inacceptable.

Mes questions sont dont les suivantes :

Le nombre de personnel engagé au SCARPA est-il en rapport avec l'augmentation croissante des dossiers ? Si tel n'est pas le cas, quelles mesures entend prendre le Conseil d'Etat pour raccourcir le délai d'attente ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 87 bis de notre ordre du jour. 

IU 193
28. Interpellation urgente de Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus : Traversée de la rade. ( )IU193

Mme Gabrielle Maulini-Dreyfus (Ve). Mon interpellation complète celle de M. Ferrazino, qui s'est exprimé avant moi.

Je ne reprendrai pas tous les points qu'il a soulevés. Néanmoins, pour ce qui est des comptes 1995, je voudrais connaître le décompte précis des dépenses liées à la loi ad hoc des 8 millions pour études et information concernant la traversée de la rade et du Petit Lac.

Tout en prenant en considération la loi générale de 3 millions de crédit pour des études d'avant-projets, je voudrais savoir à quel montant se monte le compte actuel des études et informations concernant la traversée de la rade. En effet, les documents du département, que nous avons obtenus peu à peu, font apparaître une somme de 10 088 000 F plus 200 000 F dépensés par le prédécesseur, M. Grobet, lesquels n'ont toujours pas été votés par le Grand Conseil.

Nous sommes donc au-delà du budget des 8 millions votés, et je voudrais savoir sur quel compte le supplément des dépenses est prélevé. Autre question : ce mode de faire est-il compatible avec notre détermination de ne plus avoir de dépassement de crédit ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente dans le cadre de celle présentée par M. le député Ferrazino, au point 72 ter de notre ordre du jour. 

IU 194
29. Interpellation urgente de Mme Fabienne Bugnon : Pollution de l'air. ( )IU194

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Mon interpellation s'adresse au Conseil d'Etat dans son ensemble.

Sous le titre «La pollution de l'air nous tue lentement mais sûrement», la presse a présenté brièvement, mardi dernier, le rapport d'experts de l'Institut de médecine sociale et préventive de l'université de Bâle, de l'Institut d'hygiène et de physiologie du travail du Poly de Zurich et du Bureau Ecoplan de Berne.

Ce rapport a été présenté et commenté par le conseiller fédéral Moritz Leuenberger. Il est admis, dans ledit rapport, que les transports sont responsables de la pollution de l'air à hauteur de 40%. Il y est également admis que les atteintes à la santé sont importantes et que 3,6% de la totalité des décès, en Suisse, sont imputables à la pollution de l'air causée par les transports.

M. Leuenberger a prévenu que, suite à ces chiffres effrayants, les fauteurs passeront à la caisse, ce qui nous conforte, en tant qu'écologistes, dans le principe du pollueur payeur que nous avons toujours défendu.

Depuis des années, les écologistes tirent la sonnette d'alarme pour attirer l'attention sur la pollution de l'air due aux transports. Nous sommes rarement écoutés et jamais entendus. Nous espérons que les informations de ces experts auront plus d'effet. Je demande au Conseil d'Etat de vouloir bien commander ce rapport en nombre et de le mettre à disposition des députés.

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 57 ter de notre ordre du jour. 

IU 195
30. Interpellation urgente de M. Bernard Annen : Manifestation à la bourse. ( )IU195

M. Bernard Annen (L). Le droit de manifestation est un droit démocratique à respecter, mais toute manifestation a des limites qu'il convient de ne pas dépasser. Celle qui s'est déroulée hier, devant la Bourse, a dépassé les limites. Des employés ont été maculés par des projections de viande et de sang; certains ont été blessés.

Plainte a été déposée, et je ne veux pas m'immiscer dans le travail de la justice.

Néanmoins, il semblerait qu'un fonctionnaire de l'Etat ait été l'un des principaux meneurs. Il s'agit de M. de Marcellus. Je ne l'accuse pas sans preuve, mais je demande au Conseil d'Etat si réellement il faisait partie de cette manifestation et s'il travaille à l'Etat, plus précisément au département de l'instruction publique.

Dans l'affirmative, quelle sanction entend prendre le département à l'égard d'un enseignant qui se permet de tels excès ? Et, plus généralement, pouvons-nous encore tolérer de tels comportements ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 87 ter de notre ordre du jour. 

IU 196
31. Interpellation urgente de M. René Longet : Traversée de la rade. ( )IU196

M. René Longet (S). Mon interpellation va dans le sens de celle de M. Ferrazino. J'aimerais aussi marquer mon grand étonnement en entendant le président du Conseil d'Etat s'indigner, au nom de celui-ci, que la Ville de Genève fasse connaître sa prise de position aux électrices et électeurs - du fait qu'elle n'a pas été correctement associée à la procédure - alors que le Conseil d'Etat, lui, a disposé de dix, voire quinze fois plus de moyens pour mener une action qu'il prétend, lui, être «d'information».

Je voudrais connaître la subtile distinction qu'établit le Conseil d'Etat entre information et publicité, l'une étant dite «de qualité» pour faire passer le message que l'on souhaite et l'autre étant dite «à la limite de la légalité», comme l'a déclaré M. Segond, ce matin même, sur les ondes de la Radio romande.

Personnellement, je n'accepte pas ces deux poids deux mesures. Nous aurons probablement à tirer la leçon de ce fait, en précisant davantage les responsabilités des pouvoirs publics, par le biais de la loi sur les droits politiques. Il faut vraiment savoir ce que l'exécutif cantonal et l'exécutif communal sont en droit de dire, lorsqu'ils engagent leur opinion devant l'électorat.

Le président. Il sera répondu à votre intervention urgente au point 72 ter de notre ordre du jour, dans le cadre de celles présentées par Mme Maulini-Dreyfus et M. Ferrazino.

IU 197
32. Interpellation urgente de M. Jean-Philippe de Tolédo : Dépenses pour les votations. ( )IU197

M. Jean-Philippe de Tolédo (R). J'adresse mon interpellation urgente à M. Claude Haegi, responsable des votations et de la surveillance de leur bon déroulement.

Monsieur Haegi, comme Mme Maulini-Dreyfus, MM. Ferrazino et Longet avant moi, j'aimerais avoir quelques précisions sur les crédits qui seront votés et les dépenses entraînées par les projets soumis au peuple, dans le cadre de la votation du 9 juin sur la traversée de la rade.

Il me semble urgent d'éclaircir les choses et de sortir de la confusion qui semble frapper certains, dans ce parlement, notamment M. Saurer, qui n'est pas là ce soir. En effet, pas plus tard qu'hier, je l'ai entendu annoncer des dépenses se chiffrant à un milliard, un milliard et demi, dont cent millions pour l'environnement, quatre cents millions pour un hypothétique renchérissement. Tout cela me semble extrêmement confus.

Cette abondance de chiffres farfelus et contradictoires a probablement suscité des doutes chez nos concitoyens, doutes qu'il faut impérativement dissiper.

En parcourant la presse, comme tout un chacun, ainsi que les publications de la Société d'Art Public, de l'association «Sauvons la rade», la lettre de la Ville de Genève, j'ai constaté qu'au fil des jours les opposants à la traversée de la rade se livrent à une véritable surenchère, puisque certains n'hésitent pas à parler d'un milliard, d'un milliard et demi, voire davantage. Pendant qu'on y est, pourquoi pas ? Jongler avec les millions des contribuables est l'habitude des opposants.

Que faut-il en penser ? Le bulletin officiel, adressé à tous les citoyens pour le vote du 9 juin, fait état d'un montant de 490 millions pour le tunnel et de 430 millions pour le pont. Aussi la population est-elle en droit de se demander si ces chiffres sont corrects ou si ce sont les milliards, cités quotidiennement dans la presse, qui doivent être pris en considération.

Y a-t-il des éléments objectifs, des études sérieuses, des projets concrets permettant aux opposants d'affirmer que la traversée de la rade coûtera un, voire deux milliards ? Ou ne s'agit-il là que d'une campagne de désinformation dont ils ont le secret, une campagne mensongère et trompeuse ?

Je vous cite un exemple. La Société d'Art Public se bat contre un projet connu de tous. Ce projet est-il concerné par le vote du 9 juin, oui ou non ? La question étant posée, l'on peut se demander s'il ne s'agit pas d'une élucubration de plus des opposants à la traversée de la rade.

Au moment où la population s'apprête à voter - alors que nous traversons une situation économique délicate - il est essentiel que l'on cesse de la tromper et qu'on l'informe exactement des engagements financiers que prendront celles et ceux qui diront oui le 9 juin.

Si M. Claude Haegi nous confirme ce soir que le coût de la traversée de la rade, que nous voterons le 9 juin, est effectivement de 490 millions pour le tunnel et de 430 millions pour le pont, et qu'il sera payé, sur trente ans, par les 195 744 automobilistes du canton, cela correspond, pour chaque automobiliste, à un montant de 6,95 F par mois pour le tunnel et de 6,10 F par mois pour le pont.

En d'autres termes, ceux qui décideront de voter deux fois oui pour un des deux objets prendront un engagement financier équivalant à deux cafés par mois, il est vrai, pendant trente ans...

Nul doute qu'à ce prix la traversée de la rade sera votée à une écrasante majorité.

D'autre part, pourriez-vous nous confirmer, Monsieur Haegi, si un éventuel prolongement sur Frontenex fera partie, oui ou non, du vote du 9 juin ? J'avais cru comprendre que c'était au Grand Conseil de se prononcer sur l'opportunité d'un tel prolongement après l'acceptation, par la population, d'une traversée, pont ou tunnel, de quai à quai. Si le Grand Conseil vote un tel prolongement jusqu'à Frontenex, au lendemain du scrutin du 9 juin, des coûts supplémentaires s'ensuivront.

Par conséquent, je souhaite savoir si la population pourra lancer un référendum contre cette dépense additionnelle...

Le président. Terminez, Monsieur le député !

M. Jean-Philippe de Tolédo. ...si elle juge ce prolongement superflu ou inopportun.

Compte tenu de l'importance et de la complexité du projet, il me semble raisonnable de demander l'avis des Genevois aussi souvent que possible et d'obtenir du Conseil d'Etat les précisions qui permettront à chaque citoyen de voter en toute connaissance de cause.

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 57 quater de notre ordre du jour. 

IU 198
33. Interpellation urgente de M. Jean-Claude Vaudroz : Traversée de la rade. ( )IU198

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC). Mon interpellation urgente s'adresse au Conseil d'Etat, plus particulièrement à M. Claude Haegi.

Certains, dans ce Grand Conseil, se sont inquiétés de savoir, à tort d'ailleurs, jusqu'où le Conseil d'Etat pouvait aller en fait d'information. Ils ne se sont pas gênés pour critiquer des documents, prétextant le devoir de réserve de l'exécutif d'un canton ou d'une commune.

Aujourd'hui, force est de constater que la Ville de Genève ne fait pas beaucoup de différence entre information et propagande et qu'elle ne respecte pas son devoir de réserve.

Nous savons que les communes ont un devoir d'information vis-à-vis de leurs administrés. Ce faisant, elles doivent être objectives.

Dans le cas de la Ville de Genève, nous constatons qu'il s'agit d'une propagande partisane.

Il y a quelques semaines, nous avons lu dans la presse que le Conseil d'Etat, par l'intermédiaire de M. Claude Haegi, avait attiré l'attention de la Ville de Genève sur les limites à ne pas franchir en matière d'information.

Considérant inacceptable toute cette campagne de dénigrement, j'aimerais, Monsieur le conseiller d'Etat, vous poser trois questions.

1. Est-il normal que la Ville de Genève fasse sa propagande et sa campagne d'affichage, en arborant les armoiries de la Ville, considérant qu'en 1988 la majorité de la population genevoise a voté pour une traversée de la rade à plus de 63% ? Ce vote avait donné mission à l'exécutif de la Ville de Genève de tout mettre en oeuvre pour réaliser une traversée de la rade. Non seulement l'exécutif de la Ville de Genève ne tient pas cet engagement mais il réalise une campagne de dénigrement.

2. Pouvez-vous nous assurer qu'avec cette campagne d'affichage la Ville de Genève ne dépasse pas les limites de son territoire ?

3. Le Conseil d'Etat envisage-t-il de prendre des mesures pour contrecarrer cette propagande mensongère et partisane, ordonnée par la Ville de Genève ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 72 ter de notre ordre du jour, dans le cadre de celles déposées par vos collègues.  

IU 199
34. Interpellation urgente de M. Pierre Froidevaux : Station-service à Thônex. ( )IU199

M. Pierre Froidevaux (R). Mon interpellation s'adresse à M. Joye. Elle ne concerne pas la rade, mais une station-service qui sera située au coeur de Thônex.

Le chef du département a accordé, récemment, l'autorisation de construire une station-service, en complément de la rénovation d'une surface commerciale. Chacun peut comprendre l'intérêt à favoriser le maintien ou le développement de places de travail, y compris sur le territoire d'une commune que l'on peut considérer comme une commune-dortoir. C'est le cas de la commune de Thônex.

Mais où se situe l'intérêt général ? Réduire le problème des banlieues en créant des postes de travail sur le site ou faire de ce dernier le lieu d'intérêt privilégié de l'ensemble des communiers ?

Aussi je vous demande, Monsieur le conseiller d'Etat, quels sont les éléments qui vous ont permis de passer outre aux objections du conseil administratif de la commune de Thônex ? Comment a-t-il été tenu compte de l'avis des cinq municipalités qui se sont exprimées dans le cadre de leur charte «Espace rue» ? Quelle place accordez-vous à l'avis de la commune, lorsque celui-ci est encore renforcé par une pétition comportant cinq cents signatures ? Quel fut l'ensemble des préavis qui ont conduit à cette décision ?

La vie sociale s'organise, depuis la nuit des temps, autour d'un lieu rassembleur : la place. Et c'est la volonté de la commune d'en faire une sur cette parcelle. Dans le passé, la place d'une commune s'appelait «forum». Aujourd'hui ce mot n'est plus que le synonyme de «colloque», lieu de réunion de gens invités.

Faut-il craindre que le mot «place» ne devienne bientôt le synonyme de «parking» : lieu de réunion de voitures désormais humanisées ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente, à la fin du département des travaux publics, c'est-à-dire au point 27 bis de notre ordre du jour. 

IU 200
35. Interpellation urgente de M. Olivier Vaucher : Irrégularités pour les votations. ( )IU200

M. Olivier Vaucher (L). Mon interpellation urgente s'adresse à M. le président Haegi.

Il semblerait que des irrégularités, au niveau des envois pour le vote du 9 juin, se produisent déjà, car certaines communes ont reçu le matériel de vote sans la petite enveloppe destinée au bulletin de vote.

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 55 quinquiès. 

IU 201
36. Interpellation urgente de Mme Elisabeth Reusse-Decrey : Traversée de la rade. ( )IU201

Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Mon interpellation urgente s'adresse encore à M. Haegi.

Cette interpellation s'impose d'autant plus, que M. de Tolédo a accusé les opposants à la traversée de la rade... (Contestations.)

Le président. Développez votre interpellation, Madame la députée !

Mme Elisabeth Reusse-Decrey. ...d'informations mensongères. Je serai très brève, contrairement à M. de Tolédo, et ne profiterai pas de mon interpellation urgente pour faire connaître mon credo.

Je demande à M. Haegi s'il est prêt à nous confirmer que ce qui est imprimé dans le dépliant du «Groupe transports et économie» est faux, à savoir que l'ouvrage qui aboutira à Frontenex, je cite : «...coûtera de 45 à 55 millions répartis sur cinq à six ans», alors qu'il s'agit de : «45 à 55 millions par an, durant cinq à six ans».

A mensonge, mensonge et demi, Monsieur de Tolédo !

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 57 quater de notre ordre du jour. 

IU 202
37. Interpellation urgente de M. Gilles Godinat : Classes d'encouragement professionnel. ( )IU202

M. Gilles Godinat (AdG). Mon interpellation urgente s'adresse à la présidente du DIP, Mme Brunschwig Graf.

Les élèves en fin de scolarité obligatoire pour qui sont prévues des classes d'encouragement à une formation professionnelle - c'est-à-dire des classes de rattrapage avec un mi-temps en entreprise et un mi-temps scolaire - étaient censés être aidés, pour trouver leur stage, par le service de classes d'accueil et d'insertion, ainsi que par l'office d'orientation et de formation professionnelle.

A l'inscription, une circulaire les informe que ce n'est plus le cas et qu'ils devront se débrouiller tout seuls.

Par conséquent, mes questions sont les suivantes :

Quelles mesures seront prises par le département pour aider les cent quinze élèves concernés, puisque l'OOFP ne trouve plus de places de stage ?

Quelle est la garantie donnée pour la poursuite de l'encadrement scolaire des vingt élèves sans statut de l'école des métiers et du CEPIA en particulier ?

Un délai de départ a été imparti par Berne aux permis F, notamment aux Bosniaques. Ces jeunes pourront-ils bénéficier des classes d'encouragement à une formation professionnelle, avec un module annuel ?

Le président. Il sera répondu à votre interpellation urgente au point 87 quater de notre ordre du jour. 

IU 203
38. Interpellation urgente de M. Christian Ferrazino : Traversée de la rade. ( )IU203

M. Christian Ferrazino (AdG). J'étais sur le point de renoncer à mon interpellation urgente, croyant que M. Longet vous avait convaincus. Comme cela n'a pas été le cas, je la développe très rapidement.

Mon interpellation urgente s'adresse à M. Haegi; elle est la même que celle que j'ai développée à l'intention de M. Segond. Mais comme vous m'avez dit que M. Segond me répondrait au point 78, c'est-à-dire après la votation, et que M. de Tolédo reçoit sa réponse au point 57, j'espère qu'il me sera également répondu au point 57, mes questions se rapportant au même objet !

Par conséquent, je me permets de compléter mon interpellation urgente à l'intention de M. Haegi.

Je vous demande, Monsieur Haegi - et je remercie M. de Tolédo de m'y avoir fait penser, car je l'avais oublié dans mon interpellation à M. Segond - pour quelle raison vous avez omis de mentionner dans l'exposé des motifs, joint aux documents que les citoyens reçoivent, que le Grand Conseil avait voté, en deuxième débat, les liaisons avec le plateau de Frontenex pour 250 millions et que cette dépense réelle va être ratifiée par un troisième vote du Grand Conseil, pour lequel vous vous êtes engagés, si la votation du 9 juin est positive.

Pour quelle raison, Monsieur Haegi, n'avez-vous pas indiqué dans l'exposé des motifs que cette dépense serait additionnée aux 500 millions de la traversée de la rade ?

Voilà l'interpellation que je complète à votre intention.

Le Le président. Je suggère, avec l'accord du Conseil d'Etat et particulièrement de son président, qu'il soit répondu par M. le conseiller d'Etat Claude Haegi à toutes les interpellations urgentes concernant la rade demain, à la séance de 17 h. 

PL 7409
39. Projet de loi de Mmes et MM. Sylvia Leuenberger, Max Schneider, René Longet, Florian Barro, Marie-Françoise de Tassigny, Roger Beer, Hervé Burdet, Philippe Schaller, Evelyne Strubin, Pierre Vanek, Sylvie Châtelain et Luc Gilly modifiant la loi sur les eaux (L 2 0,5). ( )PL7409

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi sur les eaux, du 5 juillet 1961, est modifiée comme suit:

Art. 6, al. 2 (nouveau)

2 Seules sont admises, sauf exception dûment motivée, des méthodes naturelles de régulation des eaux.

Art. 22, al. 3 (nouveau)

3 Les travaux d'entretien seront réalisés de façon à maintenir au maximum le caractère naturel des cours d'eau.

Art. 26, al. 5 (nouveau, l'al. 5 ancien devenant l'al. 6)

5 Les surfaces non constructibles définies par le présent article constituent une zone à protéger au sens de l'article 17 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 22 juin 1979 (RS 700).

TITRE IVa

Protection et renaturation des cours d'eau et des rives

(nouveau)

Art. 107 (nouveau)

Principes

1 Le présent titre vise à:

a) protéger les secteurs des cours d'eau dont le tracé est encore naturel;

b) reconstituer les conditions permettant aux cours d'eau de s'écouler dans un tracé naturel et à retrouver une vie biologique proche de l'état naturel, chaque fois que cela est possible;

c) réaménager les rives afin qu'elles puissent, chaque fois que cela est possible, retrouver leurs fonctions naturelles.

2 Les dispositions du présent titre s'appliquent par analogie au lac.

Art. 108 (nouveau)

Cours d'eau au tracé libre

En principe, les cours d'eau dont le tracé est encore naturel ou proche de l'état naturel doivent demeurer libres d'interventions; sous réserve de l'article 110, seules peuvent s'envisager des interventions à titre exceptionnel, et respectueuses de la spécificité du cours d'eau et de ses écosystèmes.

Art. 109 (nouveau)

Zones alluviales

1 Dans les zones alluviales mentionnées par l'ordonnance sur la protection des zones alluviales d'importance nationale, du 28 octobre 1992 (RS 451.31), les cours d'eau peuvent divaguer librement; des dérogations ne peuvent être accordées que lorsque des ouvrages d'utilité publique dont l'emplacement est imposé par la destination sont concernés.

2 Le canton définit d'autres zones alluviales dignes de protection, protégées selon le droit cantonal.

Art. 110 (nouveau)

Méthodes de lutte contre l'érosion

1 En zone constructible, la lutte contre l'érosion et les glissements de terrain doit faire appel aux techniques de stabilisation végétale, sauf exception, lorsque l'emploi de telles méthodes ne suffit pas à assurer la protection d'ouvrages existants et d'une certaine importance.

2 En zone non constructible, la lutte contre l'érosion et les glissements de terrain doit faire appel aux techniques de stabilisation végétale, sauf exception, lorsque l'emploi de telles méthodes ne suffit pas à assurer la protection d'ouvrages d'utilité publique dont l'emplacement est imposé par la destination, ou de milieux de haute valeur écologique.

3 Les travaux tels que l'entretien ou le renouvellement de la végétation des rives et l'élimination des bois morts et des corps flottants ne sont pas considérés comme des aménagements.

Art. 111 (nouveau)

Renaturation

1 L'autorité établit un programme de renaturation des cours d'eau du canton. Elle définit un ordre de priorités déterminé notamment en fonction de la biodiversité potentielle des milieux concernés, et une programmation à long, à moyen et à court terme.

2 Cette programmation est soumise au Grand Conseil pour approbation.

3 La renaturation comprend le cours d'eau, ses berges, son environnement immédiat et, lorsque c'est nécessaire, la maîtrise de l'hydrologie de son bassin versant. Elle consiste en des travaux permettant au cours d'eau de retrouver:

a) une vie biologique naturelle;

b) un tracé naturel;

c) des berges proches de l'état naturel.

Les lits doivent permettre au cours d'eau de valoriser son potentiel d'auto-épuration.

4 Pour chaque cours d'eau, le périmètre concerné par les mesures de renaturation sera défini.

5 Le programme doit être achevé dans les 10 ans à partir de l'adoption de la présente disposition.

6 Par ailleurs, l'autorité compétente peut subordonner la délivrance de toute autorisation telle que: adoption d'un plan d'affectation du sol, octroi d'une autorisation de construire, approbation d'un projet d'amélioration foncière ou d'un remembrement parcellaire à des conditions visant au respect du présent titre de la loi.

Art. 112 (nouveau)

Frais

1 Au cas où la divagation d'un cours d'eau porte une atteinte prouvée et importante à un bien-fonds, le propriétaire de ce dernier peut demander à l'Etat d'acquérir la partie de la parcelle menacée par le cours d'eau, aux conditions définies par la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933.

2 Un riverain contraint d'engager des travaux de réfection ou de protection en raison de la divagation des cours d'eau peut demander à l'Etat de réaliser les travaux nécessaires.

3 Au cas où une reconstitution de tracé naturel d'un cours d'eau porterait une atteinte notable au droit de propriété d'un riverain, celui-ci peut demander à l'Etat d'acquérir la partie de la parcelle menacée par le cours d'eau, aux conditions définies par la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933. Il peut également conclure avec l'Etat un contrat fixant les modalités d'affectation et de gestion de la surface concernée par la reconstitution.

Art. 113 (nouveau)

Fonds

1 Afin de financer le programme de renaturation, les travaux incombant à l'Etat en tant que propriétaire du cours d'eau, les indemnités accordées à des privés, les frais relatifs à des rachats de terrains selon l'article 112, il est constitué un fonds de protection et de renaturation des cours d'eau.

2 Ce fonds est alimenté par un prélèvement de 0,80 F par m3 d'eau pompée dans le canton.

3 Le Conseil d'Etat rend compte annuellement, dans le cadre de son rapport de gestion, sur l'évolution du fonds.

Art. 114 (nouveau)

Rives et zones tampon

1 Les rives, dans les périmètres définis par l'article 26 de la présente loi, seront entretenues, exploitées et aménagées de façon à pouvoir servir de biotope pour une faune et à une flore indigène diversifiée et à assurer les interactions entre eaux superficielles et eaux souterraines.

2 Les programmes de renaturation entrepris au titre de l'article 111 veilleront à comprendre cet objectif; pour les portions de rives non intégrées dans un tel programme, l'autorité compétente définira les mesures à prendre.

Art. 2

Modification à une autre loi

(L 5 1)

La loi sur les constructions et les installations diverses, du 14 avril 1988, est modifiée comme suit:

TITRE IIIa (nouveau)

Eaux de ruissellement

Art. 118A (nouveau)

Eaux de ruissellement

1 Les constructions doivent être conçues de manière à ce que le ruissellement des eaux de surface soit maîtrisé.

2 Lors de nouvelles constructions, des mesures sont prises afin de permettre l'infiltration dans le sol ou la rétention des eaux pluviales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La protection des eaux est un sujet de préoccupation constant depuis une quinzaine d'années au sein du Grand Conseil et du Conseil d'Etat (voir déclaration de M. Haegi, chef du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIEAR) lors de la Foire de Genève en 1995). Les historiens de nos débats pourront reconstituer de longues listes de motions, interpellations, questions écrites ou orales sur ces thèmes. Les réponses engageantes et les promesses du Conseil d'Etat sont elles aussi nombreuses.

Malheureusement, l'état de nos cours d'eau nous met en face de la réalité: les discours ne leur ont pas encore rendu la santé. Aucun cours d'eaufranco-genevois n'a vu sa qualité biologique s'améliorer depuis 1980, malgré des investissements importants consentis par le canton et les communes.

Dans le projet de Concept de la protection de l'environnement établi par le DIEAR en mai 1995, on peut lire en page 18 les questions suivantes:

«Les perceptions diverses des uns et des autres à propos de notre environnement ne nous permettent de trouver un consensus qu'à la condition de définir le niveau de protection souhaité. Ainsi pour la réhabilitation des cours d'eau, devrons-nous choisir un niveau:

- Voulons-nous de l'eau  ?

- Voulons-nous de l'eau propre ?

- Voulons-nous de l'eau propre et des paysages naturels ?

- Voulons-nous de l'eau propre, des paysages naturels et des poissons ? Et si oui lesquels ? Chacun de ces niveaux induit un coût, ce dernier étant le facteur limitant.»

La réponse que nous donnons est que nous avons non seulement le droit à de l'eau propre, à des paysages naturels et à des eaux connaissant une vraie vie biologique, mais que nous avons le devoir, en tant qu'élus politiques, d'y veiller.

Il est temps de reprendre la réflexion sur une politique globale de l'eau, considérant tous les aspects de cette ressource existentielle. En effet, sur le plan juridique et conceptuel, la protection des eaux repose sur trois piliers:

- La lutte contre la pollution. Sur ce thème, la première loi fédérale, de 1955, puis la 2e, de 1972, ont conduit au raccordement de pratiquement toute la population aux stations d'épuration, et à la mise en place de mesures de lutte à la source, quoique dans une mesure moindre (lessives sans phosphates, etc.).

- La protection quantitative. Cette question est plus récente, et il a fallu attendre la loi fédérale de 1991, contreprojet indirect de l'initiative «Sauvons nos eaux» lancée en 1983, pour que des exigences concernant les débits minimums soient ancrées dans le droit. Cette loi parle aussi de la protection hydrologique.

- Enfin, la protection des berges et des lits. Ce thème est abordé pour la première fois dans la loi fédérale sur la protection de la nature et des paysages (LPN), de 1966 (RS 451). Mais c'est véritablement le parent pauvre de la protection des eaux.

Il est important, à l'égard de ces trois dimensions du problème, de bien comprendre qu'elles sont étroitement liées. Un cours d'eau naturel est un élément essentiel de la biodiversité, et offre des biotopes de transition très riches; il a un pouvoir d'auto-épuration accru; il peut remplir les attentes piscicoles placées en lui. Or, d'une manière générale, les cours d'eau de notre canton ont subi une très grande artificialisation: mise sous tuyau pour plusieurs d'entre eux, canalisation pour d'autres, réductions importantes de débit, dans le cadre d'une artificialisation générale du régime hydrologique en raison de l'imperméabilisation des sols.

L'objectif général en matière d'eau, dans la région, pour nous, est de gérer les eaux du bassin lémanique pour préserver la ressource, quantitativement et qualitativement, et de viser à reconstituer le fonc-tionnement des écosystèmes en vue de retrouver une régulation naturelle des flux. L'atteindre aura un coût, il convient d'évaluer les différentes façons de faire possibles, et d'en mesurer les impacts. Relevons que les ouvrages de drainage, mise sous tuyau, rectification et endiguement des cours d'eau faits sur le territoire ont représenté des sommes très importantes, dont il serait intéressant de faire une fois le compte. La réhabilitation de certaines zones humides aura un impact favorable sur la régulation des cours d'eau et une influence bénéfique sur l'alimentation des nappes phréatiques qui voient baisser leur niveau.

Il serait faux d'aborder la gestion de l'eau du seul point de vue genevois; en effet, la plupart de nos cours d'eau ont leur source en France voisine. C'est une politique transfrontalière que nous devons développer. Lors du dernier colloque du comité franco-genevois, qui s'est réuni au CERN, en décembre 1995, un accueil favorable a été donné à l'idée de la perception d'une taxe de pompage des eaux de la région franco-suisse dans le but d'alimenter un fonds destiné à la renaturation des cours d'eau de la région. Citons encore que, pour certains cours d'eau, les études franco-suisses pour la renaturation de ceux-ci sont terminées. Il s'agit maintenant de financer les travaux sans plus attendre.

La législation fédérale

Ces dernières années, la législation fédérale a été nettement renforcée dans le sens de la prise en considération des préoccupations susmentionnées.

- La loi sur la protection des eaux (RS 814.20) a fait l'objet d'une révision complète et a été adoptée le 24 janvier 1991. Elle est entrée en vigueur le 1er novembre 1992. Dans son article 1, il est dit qu'elle «vise notamment à (...) assurer le fonctionnement naturel du régime hydrologique». Elle s'applique aux eaux superficielles et souterraines, les premières comprenant les eaux de surface, les lits, les fonds, les berges, de même que la flore et la faune qui y vivent.

- La loi sur la pêche (RS 923.0), dès le 1er janvier 1994, a également été adoptée en 1991. Elle s'applique aux eaux publiques et privées, vise à protéger les espèces indigènes et leur exploitation à long terme, ainsi qu'à «protéger, améliorer ou, si possible, reconstituer leurs biotopes» (art. 1). On notera en particulier que les cantons doivent édicter des prescriptions sur les zones de protection, là où la protection des peuplements l'exige (art. 4). L'article 7 demande que les cantons assurent la préservation des ruisseaux, des rives naturelles et de la végétation aquatique servant de frayères aux poissons ou d'habitat à leur progéniture. Ils prennent si possible des mesures pour améliorer les conditions de vie de la faune aquatique et pour reconstituer localement les biotopes détruits.

On notera également le renforcement de l'article 21 de la LPN, dès le1er novembre 1992, dont l'alinéa 2 dit désormais: «Dans la mesure du possible, les cantons veillent à ce que les rives soient couvertes d'une végétation suffisante ou du moins à ce que soient réalisées les conditions nécessaires à son développement.»

Enfin, en 1992, a été édictée l'ordonnance sur les zones alluviales d'importance fédérale: l'inventaire fédéral comprend 5 sites sur Genève.

La législation cantonale

Divers textes cantonaux reprennent, dans une mesure non exhaustive, les thèmes du droit fédéral. Ainsi, la révision totale de la loi fédérale sur la pêche a entraîné la réécriture de la loi cantonale (M 7 10), donnant la loi cantonale du 20 octobre 1994. S'agissant des biotopes en général, on citera la loi sur la protection de la nature, M 8 1, et la loi sur la faune et son article 11 sur la protection des biotopes. La loi de base concernant notre domaine est naturellement la loi sur les eaux, L 2 0,5, du 5 juillet 1961. Elle règle tout ce qui concerne l'usage de l'eau et sa protection contre la pollution. S'agissant des travaux entrepris sur les eaux, la seule disposition inspirée de considérations relatives aux biotopes est l'article 6, dont la formulation est cependant trop faible («Les projets de travaux doivent tenir compte de la protection des sites, de la faune et de la flore. Les boisements et le couvert des berges des cours d'eau doivent notamment être préservés»).

Commentaire article par article

Article 6, alinéa 2

Ce nouvel alinéa rappelle que des mesures de régulation des eaux ne peuvent intervenir que lorsque les conditions posées par l'article 37 de la loi fédérale sur la protection des eaux, du 24 janvier 1991 (RS 814.20) sont réalisées.

Par ailleurs, en indiquant que, en principe, il convient d'avoir recours à des «méthodes naturelles de régularisation des eaux», la disposition nouvelle renvoie aux objectifs figurant aux articles 107 et suivants de la loi, objectifs qui devront toutefois être encore précisés, pour disposer d'un inventaire clair des méthodes compatibles avec la loi.

Article 2, alinéa 3

Cette disposition qui constitue une précision de la même nature que celle figurant à l'article 6, alinéa 2, indique que, dans le cadre des travaux d'entretien, les propriétaires riverains doivent mettre en oeuvre les principes figurant aux articles 107 et suivants de la loi.

Article 26, alinéa 5

En définissant, aux alinéas 1 à 4 de l'article 26, une zone non constructible, la loi tient compte d'ores et déjà d'un objectif de protection des rives, lesquelles sont, par ailleurs, déjà considérées comme une zone à protéger par l'article 29, lettre a, de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 17).

De façon qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur la notion de «rive», l'article 26, alinéa 5, précise qu'il s'agit des surfaces non constructibles mentionnées par l'article 26.

C'est dire que dans ces périmètres l'on ne devra pas se borner à éviter d'édifier de nouvelles constructions, mais, comme l'exige le droit fédéral, qu'il conviendra de s'abstenir de toute intervention pouvant porter atteinte au caractère naturel des rives et des cours d'eau.

Les rives sont des zones tampons d'une très grande importance biologique et constamment menacées; la présente disposition permet de leur accorder la protection efficace dont ils ont besoin.

Article 107

Cette disposition, sous le titre «Protection et renaturation des cours d'eau et des rives», fixe les principes qui sont concrétisés par les articles 108 à 114.

Il s'agit, d'une part, de protéger les cours d'eau et les rives, comme l'exigent les articles 1 et 37 de la loi fédérale sur la protection des eaux.

Il s'agit, d'autre part, de reconstituer, dans la mesure du possible, les biotopes détruits, préoccupation que l'on retrouve à l'article 7 de la loi fédérale sur la pêche, du 21 juin 1991 (RS 923.0).

Concernant le canton de Genève, où, en raison de l'exiguïté du territoire et de son urbanisation, l'atteinte portée aux cours d'eau n'a aucun équivalent en Suisse, l'objectif de reconstitution des cours d'eau est énoncé avec une certaine prudence.

Article 108

Cette disposition fixe le principe que les rares cours d'eau dont le tracé est encore naturel doivent être préservés.

Des interventions sur ces cours d'eau sont cependant possibles aux conditions restrictives énumérées à l'article 110.

Article 109

Cette disposition concernant les zones alluviales constitue un renvoi au droit fédéral, lequel protège strictement les zones alluviales, qui sont au nombre de cinq dans le canton de Genève (Vallon de la Laire, Vallon de l'Allondon, Moulin de Vert, Les Gravines et Vers Vaux). Elle demande que cette protection de droit fédéral, dont on sait qu'elle n'est accordée que d'une manière très restrictive, soit complétée par une protection de droit cantonal, fondée sur un inventaire complémentaire.

Article 110

L'article 37 de la loi fédérale sur la protection des eaux prévoit que des travaux d'endiguement ou de correction des cours d'eau ne peuvent être effectués que si l'une des trois conditions suivantes est réalisée: les travaux s'imposent pour protéger des personnes ou des biens importants, ils sont nécessaires à l'aménagement de voies navigables ou à l'utilisation de forces hydrauliques dans l'intérêt public, ils permettent d'améliorer l'état d'un cours d'eau déjà endigué ou corrigé.

En s'inspirant de cette disposition, l'article 110 - qui traite des interventions sur les cours d'eau dont le tracé est encore naturel - établit une distinction entre les zones constructibles et les zones non constructibles.

En zone constructible, l'on pourra utiliser, à titre exceptionnel, des techniques d'endiguement allant au-delà de la stabilisation végétale, pour protéger des ouvrages ou bâtiments existants d'une certaine importance.

En zone non constructible, de telles techniques ne pourront être employées que lorsqu'il s'agira de protéger des ouvrages d'utilité publique dont l'emplacement est imposé par la destination ou des milieux de haute valeur écologique.

Il va de soi que lors de ces interventions le tracé naturel des cours d'eau devra être autant que possible respecté ou rétabli et que les eaux et les rives devront être aménagées de façon adéquate, comme l'exige l'article 37,alinéa 2, de la loi fédérale sur la protection des eaux et l'article 4, alinéa 2, de la loi fédérale sur l'aménagement des cours d'eau, du 21 juin 1991 (RS 721.100).

Article 111

Alors que les articles 108 à 110 visent à protéger les cours d'eau dont le tracé est encore naturel, conformément à l'objectif figurant à l'article 107, lettre a, l'article 111 a pour objet de concrétiser le deuxième objectif du projet de loi, soit celui de renaturation des cours d'eau.

Vu l'état des cours d'eau à Genève, il faut d'emblée s'attendre à ce que les travaux de renaturation prennent un certain temps. C'est la raison pour laquelle l'article 11, alinéa 5, prévoit que le programme des travaux de renaturation peut être conduit sur une période de 10 ans.

Toutefois, la période de 10 ans fixée à l'article 111, alinéa 5, ne doit pas constituer un oreiller de paresse. L'article 111, alinéa 1, indique donc qu'un ordre de priorité doit être fixé avec des objectifs non seulement à 10 ans mais, également, à court et à moyen terme. Le texte donne aussi un critère pour orienter le démarrage du programme, puisqu'il indique que l'on déterminera les priorités notamment en fonction de la richesse biologique des cours d'eau.

Vu l'importance des moyens qui devront être engagés pour renaturer les cours d'eau, il apparaît nécessaire que le programme établi par le Conseil d'Etat soit soumis au Grand Conseil pour approbation. C'est ce que propose l'article 107, alinéa 2.

Les travaux de renaturation doivent permettre aux cours d'eau de retrouver un tracé naturel et des eaux et des rives accueillant une faune et une flore diversifiées. Ces objectifs fixés par l'article 37, alinéa 2, de la loi fédérale sur la protection des eaux sont rappelés à l'article 11, alinéa 3. De même, cette disposition précise la portée des travaux de renaturation. Il peut s'agir d'interventions sur le cours d'eau et ses berges, lesquelles peuvent constituer en le démantèlement des ouvrages de protection tels que gabion, palplanche, cunette, etc., ou en la mise à l'air libre de cours d'eau enterrés, comme le veut l'article 38 de la loi fédérale sur la protection des eaux. La renaturation comprend également celle des rives et, lorsque c'est nécessaire, la maîtrise de l'hydrologie du bassin versant.

Dans la mesure où chaque cours d'eau devra faire l'objet d'une intervention spécifique, l'article 111, alinéa 4, indique qu'un périmètre concerné par un travail de renaturation devra être défini de cas en cas.

Enfin, de façon à accélérer la mise en oeuvre du programme de renaturation, l'article 111, alinéa 6, permet à l'autorité compétente, chaque fois qu'elle a à délivrer une autorisation pour un projet où un cours d'eau est concerné, de conditionner la réalisation du projet à des mesures de renaturation.

Article 112

L'article 108 posant le principe que les cours d'eau au tracé libre ne doivent pas être endigués, il est possible que la divagation du cours d'eau puisse porter atteinte à certaines parcelles. Dans un tel cas, si cette atteinte est d'une certaine importance, le riverain peut demander à l'Etat d'acquérir la partie de la parcelle menacée par le cours d'eau en application de l'article 112, alinéa 1. Au cas où des travaux visant à lutter contre l'érosion devraient être entrepris de façon impérative, c'est-à-dire dans les cas prévus par l'article 110 de la loi, le riverain peut demander à l'Etat de réaliser les ouvrages de pro-tection nécessaires. La question de la répartition entre l'Etat et le riverain du coût de l'ouvrage et l'entretien de celui-ci est réservée. L'article 112, alinéa 2, ne mentionne pas cette question qui devra être réglée de cas en cas.

L'article 112, alinéa 3, précise que les principes fixés par l'article 112, alinéa 1, s'appliquent également en cas de renaturation d'un cours d'eau. Cette disposition précise, notamment pour les cours d'eau situés en zone agricole, que le programme de renaturation du cours d'eau peut être accompagné d'un contrat conclu avec le riverain fixant les modalités d'affectation et de gestion de la surface concernées par la renaturation.

Article 113

La mise en oeuvre d'une politique visant à protéger et à renaturer les cours d'eau entraîne des frais importants. D'après certaines évaluations faites par le DIEAR, le coût des mesures nécessaires serait de l'ordre de 600 millions de francs.

Si l'on considère que, dans le canton de Genève, près de 65 millions de m3 d'eau ont été pompés en 1994 par les seuls Services industriels de Genève, sans compter les pompages privés, tous cependant soumis à autorisation, un prélèvement de 0,80 F par m3 d'eau pompée, tel que le propose le DIEAR, devrait permettre de réaliser l'essentiel du programme décennal prévu par l'article 111.

Les montants ainsi prélevés seront versés à un fonds, comparable à celui qui existe en matière de pêche. Le Grand Conseil sera informé, une fois par année, de l'évolution du fonds dans le cadre du rapport de gestion du Conseil d'Etat.

Article 114

Cette disposition concrétise l'objectif de protection des rives énoncé à l'article 107, lettre c.

L'article 114, alinéa 1, rappelle les objectifs poursuivis, en matière de protection des rives, par la législation fédérale. Celles-ci doivent être aménagées de façon qu'elles puissent accueillir une faune et une flore diversifiées, que les interactions entre eaux superficielles et eaux souterraines soient maintenues autant que possible et qu'une végétation adaptée à la station puisse croître sur les rives (voir article 37, alinéa 2, de la loi fédérale sur la protection des eaux).

L'article 114, alinéa 2, précise que les prescriptions relatives à la protection des rives seront soit prises dans le cadre des programmes de renaturation soit, en l'absence de tels programmes, édictées par l'autorité compétente en fonction des caractéristiques de chaque cours d'eau.

Article 119A LCI

De façon à préserver la qualité des eaux et l'état des cours d'eau, il est nécessaire que des mesures de prévention soient adoptées. Parmi les mesures à prendre en amont figure la lutte contre les dérèglements du régime hydrologique. Suite à l'imperméabilisation des sols dans les bassins versants, les débits sont devenus nettement plus erratiques et il est ainsi nécessaire que cette question soit prise en compte au niveau des constructions.

Conclusion

Après les nombreuses interventions parlementaires sur l'état des eaux, et les déclarations de conseillers d'Etat dans le même sens, il nous semble maintenant nécessaire que des objectifs plus fermes soient définis dans la loi, et un programme ainsi que des moyens définis. Pour la plupart des rivières, les diagnostics et études ont été établis, ce qui manque est le passage à l'action. On peut faire le parallèle avec le développement des transports publics: la loi sur le réseau des transports publics, H 1 10,8, définit de même un état cible, un programme, un financement, et des délais. Sans cela, les beaux principes sont destinés à demeurer lettre morte.

Tout récemment, reprenant une proposition formulée en juin 1992 par la «Coordination rivières», le chef du DIEAR a annoncé la création d'un fonds «rivières-nature» en complément du fonds cantonal d'assainissement des eaux. Les coûts de l'assainissement sont estimés à 400 millions de francs pour des travaux de remodelage des cours d'eau, de plantation des berges, de protection contre l'érosion et de remise à ciel ouvert, et à 200 millions pour des mesures complémentaires en matière de débit; 45 km de rivières seraient concernés par ce programme. Ce dernier serait de dix ans et serait financé partiellement par une taxe sur le prélèvement de l'eau, passant de 8 c par m3 en 1997 à 80 c en 2007. Nous applaudissons naturellement à de tels projets. L'expérience a cependant montré que souvent des effets d'annonce au dépôt effectif d'un projet il se passait de longs mois. L'objet du présent projet est ainsi, à la fois, de développer une conception sur le fond, à savoir définir des objectifs et des modalités de la renaturation à entreprendre, et de contribuer à ce que l'action souhaitée se mette le plus rapidement en oeuvre.

Préconsultation

M. Bernard Lescaze (R). Voilà un projet intéressant - du moins si on l'examine superficiellement - et qui ne manquera pas de retenir, je l'espère, l'attention de la commission de l'environnement, si ce projet lui est renvoyé. Il pose en effet, un certain nombre de questions importantes. Nous avons reçu récemment une invitation à participer à une table ronde sur le thème : «La bataille pour l'eau». Les auteurs de ce projet n'imaginaient pas si bien dire !

Actuellement, la protection de l'eau n'a pas de prix, mais elle a un coût. Les auteurs du projet l'ont sans doute oublié ! Je ne vais pas faire l'apologie des dispositions - louables, au demeurant - de ce projet de loi. Elles semblent politiquement correctes, comme il est de mise dans nos assemblées. Il est bon et sain de protéger la qualité de l'eau, mais il s'agit également de défendre, à Genève en particulier, les intérêts des gros consommateurs d'eau : les industriels, les agriculteurs, les administrations publiques.

Or ce projet prévoit le prélèvement d'une taxe, certes progressive, qui s'élèverait à 80 centimes le m3. Cette somme peut sembler très modique aux personnes ignorant qu'un ménage consomme quotidiennement des centaines de litres d'eau, potable ou non potable, et une entreprise, des dizaines de milliers de m3. Cette taxe financerait, dans son ensemble, un projet de renaturation de l'eau s'élevant à 900 millions.

Avant de préciser la charge que cela représenterait pour certaines entreprises, notons que cette renaturation semble défaire le travail des générations précédentes : en enlevant notamment le béton de la Seymaz, afin de créer des réserves pour moustiques ou pour grenouilles, que des pétitions de riverains s'efforceront de faire taire !

La situation des agriculteurs, d'une part, est suffisamment difficile pour qu'on n'alourdisse pas leurs charges et, d'autre part, l'on n'imagine pas encore combien cela va coûter aux administrations et aux entreprises. La Chambre de commerce a demandé à quelques-unes de réaliser une étude, afin d'en évaluer le montant : plus de 4 millions pour l'Union de banques suisses, 4,5 millions pour Givaudan, 629 000 F pour les Papeteries de Versoix. Et pour les seules administrations publiques de la Ville de Genève, les parcs et promenades, la voirie, les coûts s'élèvent à plus de 2 millions, sans compter les charges supplémentaires imposées aux locataires et aux propriétaires.

Malgré ses mérites, ce projet doit être examiné avec la plus grande prudence. Je ne suggère pas de «tirer la chasse d'eau», même s'il le mérite peut-être ! (Rires.) Mais lorsque nous aurons les résultats des travaux de commission proposant un plan de financement éventuellement beaucoup plus doux, nous pourrons en reparler. Ces 80 centimes par m3, affectés exclusivement à la renaturation des cours d'eau, représentent une augmentation de 100% de la taxe actuelle. Le prix de l'eau est d'environ 1 F le m3, et il existe déjà une taxe de 72 ou 74 centimes. L'ensemble de la population - y compris les 43% de la ville de Genève - devra payer.

Veut-on réellement rouvrir les nants de Traînant, de l'Amandolier ou de Sécheron, en pleine ville, pour prétendument répondre aux exigences de la législation fédérale à coups de centaines de millions ? Je réponds fermement : non, car l'économie genevoise a besoin de projets dynamiques, et non d'une «pierre au cou» !

Le président. Comme nous sommes en procédure de préconsultation, un seul député par groupe peut s'exprimer pendant cinq minutes.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je vais essentiellement vous parler de l'écologie, qui fut notre motivation première pour jeter les bases de ce projet de loi en 1991, avec - entre autres - MM. Vaissade, Cramer, Rebeaud et Meylan.

La présentation de M. Haegi, l'automne passé, du concept intitulé «Dix ans pour sauver nos rivières» nous a encouragés à le ressortir. Nous remercions les députés cosignataires qui ont manifesté ainsi leur intérêt. Notre projet de loi servirait donc de base légale à l'application de ce concept.

Il est grand temps de se préoccuper des rivières, car les cours d'eau naturels sont devenus rares en Suisse. Pour de multiples raisons, les rivières naturelles sont des écosystèmes très dynamiques, en perpétuelle transformation. En transportant du gravier et du sable, l'eau forme de nouvelles rives, où poussent des arbrisseaux qui se transforment en bois et en luxuriantes forêts de feuillus. Cette «colonisation» est soumise à un perpétuel recommencement depuis des millions d'années, car l'eau inonde sans cesse les berges. Le cours d'eau naturel est un agent important du cycle de l'eau : il alimente les eaux souterraines et influence les microclimats. En favorisant par ailleurs la diversification de la faune et de la flore aquatiques, il est vital pour l'équilibre biologique.

Et c'est justement cette liberté fondamentale de «divaguer» que nous voulons redonner aux cours d'eau. Les rivières genevoises sont gravement détériorées par les innombrables canalisations, par les endiguements excessifs, par la croissante imperméabilisation des sols bétonnés. Les rivières, éléments indispensables à la qualité de nos eaux potables, ont été malmenées ! Les sauvegarder et tenter de les renaturaliser - à long terme - voilà le but de notre projet de loi ! A l'article 111, alinéa 3, il est stipulé que : «Le lit des rivières doit permettre au cours d'eau de valoriser son potentiel d'auto-épuration.»

Je souhaiterais que M. Lescaze soit attentif à ce point essentiel : c'est à ce niveau que le travail doit se faire en partie, et non uniquement en aval, à grands frais d'épuration, au moyen de techniques artificielles.

Nous ne sommes pas les seuls à nous soucier de ce problème : la Confédération a promulgué des lois, afin que les cantons agissent. Mais ces derniers ne disposent que d'articles de lois dispersés et insuffisamment contraignants pour régler la protection des rives et des cours d'eau. Notre projet va dans le sens de l'application des lois fédérales.

Ce Grand Conseil a souvent eu l'occasion, au cours des dix dernières années, de s'exprimer sur la protection des eaux. De même, la Commission parlementaire du Léman a été créée, en 1981, pour étudier le rapport rédigé par le Conseil d'Etat sur la pollution du Léman, et de nombreuses motions émanant de tous les partis furent renvoyées à cette commission.

Genève compte cent septante-huit rivières et nants, c'est une véritable cuvette recevant les eaux des crêtes avoisinantes ! Mais seule une vingtaine est susceptible d'abriter une faune et une flore intéressantes. Les autres sont soit enterrés soit à sec la plus grande partie de l'année. La réduction des variétés d'organismes vivants et la diminution de la productivité des diversités piscicoles témoignent depuis plus de vingt ans de la dégradation de nos rivières.

La plupart de nos cours d'eau ont leur source en France, où les équipements d'assainissement sont inexistants ou peu efficaces, les eaux sont ainsi souillées dès le départ. Sur le sol genevois, seuls 70% des eaux polluées sont traités par la STEP d'Aïre; le reste se déverse directement dans les rivières. Comme la perturbation des régimes hydrauliques représente le problème principal, il est indispensable d'améliorer le lit des rivières et de lutter contre le bétonnage : l'excès d'imperméabilisation et la période de sécheresse rendent le débit des rivières quasiment nul en été, provoquant ainsi la mort de la faune, et des inondations lors d'importantes pluies.

En résumé, le but de notre projet est donc d'améliorer l'épuration naturelle de l'eau des rivières, de lutter contre l'excès de bétonnage en protégeant les secteurs des cours d'eau au tracé naturel - ou d'en reconstituer les conditions - et de réaménager les rives pour faire revivre toutes les fonctions écologiques naturelles.

Le dernier point à examiner est de taille : il s'agit, en effet, du financement qui préoccupe le parti radical, et M. Lescaze en particulier. La proposition de prélever une taxe de 80 centimes sur le pompage devra être examinée, affinée et modulée en concertation avec certains milieux, tel celui des agriculteurs, où l'eau est indispensable à la production.

La population doit savoir que l'eau potable est notre plus grande richesse. Participer à sa conservation à la source, l'économiser grâce à l'augmentation des taxes, améliorer le lit des rivières : voilà les actions les moins onéreuses à long terme. Et je défie qui que ce soit - même M. Lescaze, qui ne m'écoute pas - de prouver le contraire ! Le problème est comparable à celui de la vache folle : pour augmenter la quantité de viande, on n'a pas hésité à modifier le cycle alimentaire des bovins...

Le président. Concluez, Madame la députée, voilà six minutes que vous parlez !

Mme Sylvia Leuenberger. Je ne dispose donc pas de dix minutes ? Je suis pourtant l'auteur du projet !

Le président. Non, nous sommes en préconsultation !

Mme Sylvia Leuenberger. Si l'on refuse de payer un peu plus cher pour conserver la qualité de l'eau à la source, on court tôt ou tard à la catastrophe, car l'eau pourrait manquer. Et nous retrouvons, à ce point précis, le fondement de l'écologie : le rendement à court terme, au détriment de l'équilibre biologique à long terme, coûtera toujours plus cher. Et toute production ou utilisation des énergies de base devraient être pensées en termes d'équilibre à respecter. Pour toutes ces bonnes raisons, nous vous prions de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'environnement. Et pour conclure, Monsieur Lescaze, vous pouvez tirer la chasse d'eau, mais ajoutez une brique, vous économiserez ainsi un tiers d'eau potable et un tiers de la taxe ! (Applaudissements.)

M. Hervé Burdet (L). Nous nous acheminons vers un renvoi en commission quasi automatique selon notre règlement. Je ne répéterai donc pas l'excellent exposé de Mme Leuenberger. J'aimerais vous rappeler - et je m'en excuse - une notion scolaire : nous sommes constitués d'eau à 85% pour les plus denses, à 95% pour les plus dissipés ! L'eau, c'est la vie, c'est un truisme. Rapprocher la bourse de la vie en évoquant ces fameux 80 centimes, c'est une histoire de brigands : «La bourse ou la vie !».

La Chambre de commerce, malgré une connaissance approfondie du sujet, insinue qu'on cherche à imposer une nouvelle taxe pour récupérer des millions. Personne n'a compris que la renaturation des rivières offre également la possibilité de créer des emplois et de développer des entreprises; c'est pourtant un aspect essentiel de ce dossier.

Mon excellent collègue Beer, malmené par M. Lescaze, n'a pas pu préciser qu'il ne s'agissait pas d'une tactique coutumière des députés libéraux, généralement assez rigoureux. Si on approuve l'idée de ce projet de loi, on le signe ou on en est le cosignataire, on le développe dans la mesure du possible, on se rend en commission, on corrige, on auditionne, on adapte et on revient devant le Grand Conseil avec un projet affiné qui sera probablement voté par une majorité.

Le projet a donc été rédigé à la diable, j'en conviens. Lorsqu'on parle de 80 centimes, il s'agit d'une progression de 8 à 80 centimes au cours d'une dizaine d'années au minimum. Avant le renvoi en commission de ce projet, il n'est absolument pas question d'imposer des taxes sur l'eau aux agriculteurs. Ils font circuler l'eau, et le seul fonctionnement de l'agriculture assure à lui seul un recyclage et une renaturation de l'eau, dont ces gens sont responsables et usagers. Cette taxe serait un non-sens, contre laquelle je me battrai en commission...

M. Claude Blanc. Vous avez pourtant signé le projet de loi !

M. Hervé Burdet. Je l'ai signé, Monsieur Blanc, car l'idée est excellente.

M. Claude Blanc. Même si le texte est mauvais ?

Le président. Je vous en prie, Monsieur Blanc !

M. Hervé Burdet. Le texte n'est certes pas parfait, mais l'idée, elle, est impérative. Il s'agit d'une question vitale. Vous-même qui consommez toutes sortes de...

Le président. Monsieur l'ancien président, adressez-vous au parlement, s'il vous plaît !

M. Hervé Burdet. Monsieur le président, je vous présente mes excuses ! Il ne s'agit pas de taxer les agriculteurs et les établissements publics évoqués par M. Lescaze, ni l'industrie qui n'emploie pas l'eau potable, précieuse et coûteuse du réseau des Services industriels, mais l'eau de pompage d'une rivière ou du lac pour refroidir ou conditionner des locaux. Mais une grande injustice frappe les propriétaires de villa ou d'immeuble qui paient l'eau, alors que les locataires, eux, ne la paient pas. Il y a matière à réflexion en commission. Malgré les ricanements de M. Blanc et d'autres députés, il s'agit bien d'une question vitale. Un parlement cantonal n'est pas seulement une enceinte dans laquelle on approuve des comptes, où on vote des budgets, où on gracie des condamnés, où on accomplit quelques actes purement formels. Il faudrait également s'y livrer à des réflexions approfondies : le futur et la qualité de l'environnement sont en jeu.

M. Pierre Vanek (AdG). Je ne prolongerai pas longuement ce débat qui doit évidemment se poursuivre en commission. Notre groupe soutient, bien sûr, ce projet de loi dont il est signataire. Comme mes deux préopinants l'exprimaient, des questions de détails pourront être modifiées lors des travaux de commission. Quant au problème fondamental, on ne saurait se contenter des réponses apportées par M. Lescaze, qui se livre à de l'humour facile en évoquant le coassement des grenouilles et qui s'agite maintenant sur son banc au sujet d'un hypothétique référendum avant même tout débat de fond. Selon lui, nous n'aurions pas considéré les coûts. Il y a précisément des dispositions permettant de prélever des sommes, afin d'atteindre ces objectifs.

J'approuve les propos de ma préopinante écologiste : ces dispositions sont absolument indispensables à long terme. L'idée d'élever le coût de l'eau pour une catégorie d'usagers doit être suivie, afin de réaliser simultanément des économies radicales d'eau et d'énergie pour le pompage, ce qui rejoint les objectifs cantonaux en matière d'énergie définis dans l'article 160 C de notre constitution.

Nous soutenons donc fermement ce projet de loi.

M. René Longet (S). Avec une rare élégance, vous nous avez privés de la position du groupe radical, Monsieur Lescaze ! Nous devrons donc attendre les travaux en commission pour la connaître. J'excuserai vos égarements aquatiques en les mettant sur le compte de votre manifeste méconnaissance du sujet.

Lorsqu'on connaît l'histoire comme vous, on ne peut pas escamoter tout un pan de la réalité. L'économie hydrologique est un fondement naturel et vital de notre existence, comme le soulignait M. Burdet. Vous avez peut-être étudié certaines tranches de notre passé, mais vous avez omis de considérer les efforts des députés pour la progression de ce dossier. Si vous aviez examiné avec la minutie requise l'histoire récente des travaux de ce Grand Conseil, vous auriez compris que ce projet est le résultat d'une certaine lassitude, due à l'approche au coup par coup, aux plaintes auxquelles nous étions réduits et aux interventions sectorielles qui ont marqué les débats sur l'eau, lors de ces quinze dernières années. Le Mémorial indique clairement le mode sur lequel s'est exprimée la préoccupation aquatique du Grand Conseil : avec des pétitions, des motions, des discours au cas par cas, et surtout beaucoup de frustration, car nous ne sommes guère avancés, et c'est une litote !

Le Grand Conseil n'a cessé de se plaindre, mais aujourd'hui on change de discours : on ne se plaint plus par le biais des motions, on propose des solutions en usant du pouvoir législatif. Ce projet de loi nous permet de prendre des décisions. Il est conçu très simplement sur quatre axes. Nous avons tout d'abord un objectif, qui plaît ou non, très clairement inscrit dans un certain nombre de lois fédérales tout récemment révisées, et qui s'imposent dans tous les cantons également.

Nous avons ensuite un programme de renaturation très concrètement fondé sur le potentiel biologique de nos cours d'eau et qui sera soumis à ce Grand Conseil. Un contrôle parlementaire est donc prévu.

Le troisième point concerne la façon dont se déclinent ces objectifs et ce programme, par rapport à un délai. Toute intention reste vaine sans horizon temporel. C'est ainsi qu'un délai de dix ans a été fixé.

Il s'agit, finalement, d'établir un plan financier. On ne peut pas appliquer le principe de causalité ni rectifier le prix d'une ressource sans prendre en compte sa vraie valeur. Mais alors, Messieurs  Lescaze et les autres, quelle alternative ? Soit on ne fait rien, mais cela nous l'excluons absolument, soit on charge le budget d'investissement de l'Etat. Je vous laisse le choix ! Pour nous, il n'y a qu'une solution, c'est celle que M. le conseiller d'Etat Haegi a lui-même proposée il y a quelques mois. C'est la plus cohérente et la plus logique.

Naturellement, la répercussion et la quotité de cette hausse doivent encore être débattues. M. Haegi avait prévu un échelonnement des délais. Il faut envisager les répercussions effectives et non mythiques : il ne s'agit pas d'attiser les peurs. Nous allons examiner ce projet de loi en commission avec toute l'attention et l'efficacité nécessaires, et, afin d'aboutir à une solution équitable, l'ensemble des milieux concernés sera entendu. Il est parfaitement possible de rediscuter du prix de l'eau, de façon à concilier équité et efficacité. Vous n'allez tout de même pas prétendre, Monsieur Lescaze, que le prix de l'eau est tel que d'aucuns en seraient privés en cas de hausse. Ce qui est possible dans le projet du département, le sera également dans la loi que nous allons préparer en commission, d'une façon constructive et sereine en n'évoquant pas en priorité les obstacles, mais les nécessités qui s'imposent pour les franchir.

M. Claude Blanc (PDC). Il va de soi que le groupe démocrate-chrétien ne s'oppose pas au renvoi de ce projet de loi en commission qui contient un certain nombre de propositions. Les auteurs de ce projet ont fait l'inventaire de toutes les possibilités que le droit fédéral, entre autres, offre pour préparer un programme cantonal de restructuration des cours d'eau. Après avoir fait un inventaire total, ils ont choisi de proposer le maximum possible. Cela dit en d'autres termes : c'est la totale ! Ils n'ont pas de place pour les demi-mesures et demandent à l'Etat de nettoyer toutes les rivières du canton en dix ans. Je doute que cela soit possible, mais, enfin, c'est tout de même dans le projet de loi. Ce genre de projet est tellement excessif qu'il me fait penser à ceux qui confondent la loi coranique avec le code pénal. (Brouhaha.)

Disons que ce projet de loi vise à l'amélioration des eaux de nos rivières. Mais, en réalité, il vise à un aménagement différent du territoire.

J'en viens au coût de ce projet. M. Haegi, qui a un projet à peu près semblable dans ses tiroirs, avait laissé entendre qu'une telle opération pourrait coûter environ 900 millions de francs, si j'ai bien compris.

Une voix. Ce n'est pas vrai !

M. Claude Blanc. C'est quelque chose d'approchant.

Une voix. On n'en sait rien !

M. Claude Blanc. 900 millions de francs, cela fait environ 100 millions par année. Alors, je me demande comment financer une telle somme ? Vous savez probablement que les consommateurs d'eau paient une taxe qui sert à régler les frais de l'épuration des eaux usées. Cela est parfaitement légitime. L'eau qui nous est livrée est potable, et nous la renvoyons usée. Par conséquent, il est juste que nous payons les frais nécessaires à la purification de cette eau, afin qu'elle redevienne potable. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute.

Mais vous allez beaucoup plus loin, car vous nous proposez une mesure d'aménagement du territoire qui n'a pas, contrairement à ce que vous dites, de conséquences directes sur la purification de l'eau, car la pollution de quelques-unes de nos rivières ne vient pas de nos propres déchets, mais de ce que les gens situés en amont ont rejeté, sur lesquels vous n'avez aucun pouvoir, car vous n'irez pas prélever chez eux des taxes sur le pompage.

Ce projet de loi, que je considère comme un projet d'aménagement du territoire, doit être payé comme tel, soit par l'impôt, car ceux qui consomment l'eau sont déjà suffisamment taxés.

Je vous conseille, Mesdames et Messieurs les députés, de prévoir dans les travaux de la commission que si nous dépensons 100 millions par année pour ce travail, nous augmenterons l'impôt de 7 centimes additionnels supplémentaires par année, pendant dix ans, afin de couvrir les frais entraînés par ce travail.

En effet, il faut savoir que, premièrement, l'élément eau est indispensable à notre survie, ensuite à l'agriculture, et puis à l'industrie. Je vous prie de croire que certaines industries du secteur secondaire consomment énormément d'eau.

Or, ces temps, on entend dire que l'Etat doit venir au secours du secteur secondaire en difficulté. Pourquoi ce secteur a-t-il des difficultés ? Parce que nous sommes dans un pays qui produit cher. Aujourd'hui, après avoir pleuré pour que l'on aide ces entreprises, vous voulez les taxer sur l'utilisation de l'eau pour les rendre encore moins concurrentielles, ceci sans compter l'agriculture qui vous intéresse peu. D'ailleurs, si les salades produites à Genève sont trop coûteuses, vous irez les acheter à Ambilly ou à Thoiry; voilà bien votre politique !

Je conseille vivement à la commission qui sera chargée de ce projet de loi de l'étudier avec attention, de le rendre plus modeste et de trouver des sources de financement qui ne contribuent pas à la destruction du milieu économique et agricole. Faute de quoi, je vous avise ici, puisque M. Lescaze y a fait allusion tout à l'heure, que le comité référendaire est en voie de constitution. Comprenne qui pourra !

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. En juin 1993, a été publié dans le cadre des cahiers de la santé un document intitulé : «Rivières et lac, la santé des eaux genevoises». A l'époque, ce document a été publié sous la responsabilité du département de la santé et de la prévoyance sociale, puisqu'à ce moment-là le service de l'écotoxicologue cantonal y était encore rattaché. Quelques mois après, en septembre 1993, un autre cahier était publié : «La santé de l'environnement genevois». Personne n'a contesté ces documents. Ils présentaient une radiographie de la situation dans notre canton et laissaient bien entendre - les choses me semblaient claires - que nous ne pouvions nous contenter d'un constat, mais que ce constat devait précéder une action.

Lorsque, au début de cette législature, je me suis vu confier la responsabilité de l'environnement dans notre canton, il me paraissait être dans l'ordre des choses de poursuivre ce qui avait été engagé. Or, cela m'a conduit à faire un relevé précis de l'état des rivières. Alors, j'ai demandé à mes collaborateurs de mettre à jour cette fameuse radiographie, pour - en effet, Monsieur Blanc - idéaliser, en quelque sorte, la situation et prendre ensuite des décisions dans les meilleures conditions.

En idéalisant la situation et en dégageant des chiffres qui demandent à être précisés, nous sommes arrivés à un total de dépenses - y compris la station d'Aïre qui représente une pièce majeure de ce programme - d'environ 300 à 350 millions concernant l'assainissement des rivières. Mais nous savions bien que nous ne pouvions pas éviter de répondre à ceux qui avaient posé des questions concernant la nature. Il était donc dans l'ordre des choses de passer au programme dit «de renaturation».

Chacun a sa sensibilité sur ce sujet, mais, dans le fonctionnement de nos institutions, certaines choses doivent être respectées. C'est pourquoi nous avons évalué une nouvelle somme s'élevant à environ 600 millions pour les dépenses liées aux travaux d'aménagement, d'où les chiffres articulés de 900 à 950 millions.

J'ai pris la responsabilité de dire que, dans dix ans, nous aurions sauvé nos rivières. Au mois de novembre dernier, j'ai présenté ce constat dans le but d'ouvrir un débat, de manière que nous puissions prendre les bonnes décisions à partir de l'estimation que nous avions faite.

Toutefois, Mesdames et Messieurs les députés, si vous jugez que ce programme est trop ambitieux, vous aurez tout le loisir de réduire les dépenses. Si vous considérez que cette période de dix ans est trop courte, vous n'aurez qu'à la prolonger de deux ou de cinq ans, voire plus.

Par contre, nous n'avons pas le droit de banaliser ni de refuser de traiter les problèmes. Je ne vous cache pas ma lassitude en entendant certaines déclarations sur ce qu'il faudrait faire et tout de suite, sans évaluer les conséquences financières. Je n'ai pas articulé ces chiffres pour provoquer un découragement, mais simplement pour pouvoir travailler dans de bonnes conditions.

Lorsqu'on nous a annoncé la présentation d'un projet de loi, j'ai été plutôt agacé par cette démarche, car les auteurs savaient très bien que nous étions dans une phase de dialogue. Ils ont décidé d'accélérer le processus et de rédiger ce projet de loi. Or, s'ils ne l'avaient pas fait, je me demande, de manière objective, à quel moment nous aurions pu avoir ce débat au Grand Conseil.

Compte tenu des engagements du Conseil d'Etat dans le domaine de l'environnement au début de la législature, nous devons parler de ces choses avant la fin de la législature. Si l'on prend des engagements et que l'on signe des contrats, on doit reprendre ses engagements sur tous les points. Je ne saurais minimiser un point sur lequel nos sensibilités ne sont pas exactement les mêmes dans ce parlement. Pour cela, je souhaitais un dialogue.

En effet, le projet de loi contient un certain nombre d'inconvénients majeurs, voire des propositions tout à fait inacceptables. Tout à l'heure, Monsieur Lescaze, vous avez évoqué les réactions de certains milieux économiques. Voyez-vous le document de la Chambre de commerce et de l'industrie, auquel vous vous référez, n'est pas un document qui a été étudié et présenté spontanément; il a été préparé à mon intention, en réponse à ma demande. Compte tenu de cette situation difficile, j'ai voulu un dialogue constant avec les milieux économiques pour que l'on puisse voir comment le couple économie-environnement pouvait fonctionner.

Nous ne pouvons pas continuer à opposer systématiquement tous les projets environnementaux à l'économie sous prétexte qu'ils représentent une charge pour cette dernière. D'ailleurs, cette idée est fausse si l'on connaît la situation au plan international ou au plan européen. En effet, si vous lisiez ce petit bouquin : «Politique de l'environnement en Allemagne», vous verriez comment l'Allemagne, à travers une politique environnementale ambitieuse, a su dynamiser ses activités économiques. Ces choses doivent être étudiées sereinement. Il me déplairait que nous ayons des a priori et que nous rejetions, sans autre, ce type de proposition.

J'ai eu l'occasion de dire, depuis que le projet de loi a été présenté, que je n'ai jamais imaginé, au moment où on lançait le dialogue sur le projet «Dix ans pour sauver nos rivières», que nous allions frapper ceux-là mêmes dont nous attendons qu'ils favorisent l'emploi et soutenir d'éventuelles délocalisations d'entreprise. On a raison d'en tenir compte. J'ai dit très clairement au président de la Chambre genevoise d'agriculture qu'il n'était pas question que les agriculteurs soient touchés par cette taxe.

Une voix. C'est le projet de loi !

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Oui, c'est le projet de loi, mais je me réfère à ce que j'ai dit, et je l'assume !

D'ailleurs, vous avez entendu, tout à l'heure, les auteurs du projet de loi dire leur ouverture au dialogue. Lorsque je leur ai demandé d'où ils avaient sorti cette idée des 80 centimes, ils m'ont répondu l'avoir trouvée dans mon projet. La seule différence est que, lorsque j'ai parlé de cette taxe de 80 centimes comme une nécessité pour couvrir le montant des dépenses prévues dans mon projet, j'ai envisagé que si nous options pour ce système l'augmentation soit progressive.

Je souhaite que ce projet de loi contribue à alimenter l'indispensable dialogue que nous devons avoir et je me permets d'insister pour que vous l'étudiez en tenant compte de ce que je vous ai dit tout à l'heure. Le domaine de l'environnement est aujourd'hui un des secteurs les plus porteurs en termes d'économie et d'emplois.

Le projet «Dix ans pour sauver nos rivières» est peut-être excessif, mais, lorsque vous le regardez de près, vous vous rendez compte qu'il est générateur d'emplois pour les entreprises genevoises. Je vous le démontrerai en commission, car j'ai demandé une étude économique. Tout à l'heure, je me référais à l'Allemagne qui n'est pas un pays à économie faible, mais bien la première puissance industrielle européenne et la troisième puissance industrielle mondiale. Ces gens-là ne sont pas inconscients lorsqu'ils suggèrent des plans. Puissions-nous prendre conscience de cela et rétablir le dialogue !

Faisons-le pour Genève. Soyons cohérents, car on ne peut pas courir à travers le monde, proposer aux gens de venir à Genève pour parler des problèmes de l'environnement au plan mondial, et rejeter l'idée d'un dialogue constructif sur ce thème. Si nous ne sommes pas capables d'en parler, il vaut mieux alors que les acteurs de ces sujets les débattent ailleurs qu'à Genève ! (Bravos et applaudissements.)

Ce projet est renvoyé à la commission de l'environnement et de l'agriculture.

PL 7411
40. Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit pour l'acquisition d'un véhicule supplémentaire pour le service du traitement des eaux. ( )PL7411

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Crédit d'investissement

Un crédit de 285 000 F est ouvert en 1996 au Conseil d'Etat pour l'achat d'un véhicule supplémentaire, pour le service du traitement des eaux.

Art. 2

Budget d'investissement

Ce crédit est inscrit au budget d'investissement 1996, sous la rubrique 69.60.00-546.09.

Art. 3

Couverture financière

La couverture financière de ce crédit est assurée par le fonds cantonal d'assainissement des eaux.

Art. 4

Amortissement

L'investissement est amorti chaque année d'un montant calculé sur sa valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'objectif

Actuellement, en plus de la station d'épuration d'Aïre, les 14 autres stations d'épuration cantonales produisent environ 37 500 m3 par an de boues liquides, dont 26 000 m3 sont transportés au moyen de 3 camions-citernes jusqu'à la station d'épuration d'Aïre pour leur traitement.

Le solde, soit 11 500 m3 de boues, est traité dans une installation de déshydratation à la station d'épuration de Villette.

Les boues partiellement déshydratées sont acheminées par des camions-bennes du service voirie et nettoiement du canton, à la décharge cantonale de Châtillon.

Dès 1996, la station d'épuration d'Aïre sera en mesure de traiter la totalité des boues produites par les stations dans une nouvelle installation de séchage thermique, produisant des granulés qui seront incinérés à l'usine des Cheneviers, ceci conformément aux dispositions de l'ordonnance sur le traitement des déchets, du 10 décembre 1990 (OTD).

Dès lors, l'exploitation de l'installation de déshydratation de Villette sera abandonnée, et les 11 500 m3 de boues liquides traités précédemment par cette installation seront transportés à Aïre, en vue de leur séchage thermique dans la nouvelle installation précitée.

Le besoin

Compte tenu de ce qui précède, la capacité de transport des boues de stations d'épuration doit être complétée par :

 1 camion 8 3 4, avec citerne de 18 m3, au prix de 285 000 F

Les impacts à attendre

En ce qui concerne le personnel, le poste de chauffeur pour ce véhicule supplémentaire sera compensé par la suppression du poste occupé actuellement pour l'exploitation de l'installation de déshydratation de la station d'épuration de Villette.

Budget prévisionnel d'exploitation

Du point de vue financier, il faut noter qu'en contrepartie des frais d'exploitation de ce véhicule, des économies seront réalisées suite à l'abandon de l'exploitation de la déshydratation de Villette et à l'arrêt du transport des boues solides entre Villette et la décharge.

Quant à la charge financière annuelle comprenant les intérêts au taux de 5,75% et l'amortissement au moyen de 8 annuités, elle se montera à 43 820 F.

Couverture financière

La charge financière estimée à 43 820 F sera portée au financement spécial relatif au service du traitement des eaux et couverte par le produit de la taxe annuelle d'épuration perçue sur la consommation d'eau potable (voir annexe).

Au bénéfice des explications ci-dessus, le Conseil d'Etat vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir réserver un accueil favorable au présent projet de loi.

ANNEXE

ANNEXE

Préconsultation

M. Roger Beer (R). Merci, Monsieur le président, d'avoir la gentillesse et l'amabilité de me passer la parole. Je la prends à la place de mon collègue Dupraz qui, ne pouvant savoir qu'une fois de plus vous alliez changer l'ordre du jour, n'est pas là en ce moment. Ensuite, je vous fais part de mon étonnement en constatant que vous passez la parole à un député qui n'est pas auteur d'un projet de loi, alors que son auteur ne l'a pas. Mais c'est peut-être votre façon de faire qui nous force...

Le président. Je passe la parole à ceux qui me la demandent, Monsieur le député !

M. Roger Beer. ...à nous demander comment nous allons nous en sortir avec cet ordre du jour !

Le parti radical accueille favorablement l'idée d'avoir un véhicule supplémentaire pour le service du traitement des eaux. Il approuve le fait que ce projet passe à la commission des finances. Et figurez-vous que cette idée s'inscrit parfaitement dans le projet de loi précédent, pour lequel je voulais intervenir, alors que vous avez omis de me passer la parole ! (Rires.) Nonobstant ce que pense la personne qui est derrière moi, même si tout a été dit sur le projet de loi précédent, des choses ont été oubliées.

Vous avez oublié que nous votons des dizaines de projets de lois qui comportent des dépassements de crédits. Lorsque nous votons ces dépassements de crédits, vous trouvez cela antipathique et vous critiquez cette manière de procéder.

Le conseiller d'Etat Haegi a présenté un projet de loi avec un programme, un financement et un délai. Je comprends que certaines personnes soient énervées à la demande de voter 800 millions d'investissement en dix ans. Mais ce soir, alors que l'on n'a même pas voté de crédit, on entend déjà parler d'une association de locataires, d'agriculteurs et d'industriels pour s'opposer à ce projet de protection des eaux. Mais cela est un autre débat. A part M. Longet, personne n'a dit que ce projet de loi est inspiré de délibérations...

Le président. De quel projet de loi parlez-vous, Monsieur le député ?

M. Roger Beer. De celui dont je parle !

Le président. Et de quel projet de loi parlez-vous ? (Rires.)

Une voix. Y sait même plus !

M. Roger Beer. ...au sein du département de l'intérieur. Et, finalement, le Conseil d'Etat n'ayant pas été d'accord, un projet de loi aurait été déposé par des députés. C'est pourquoi nous en discutons aujourd'hui.

Mais, comme ce projet a été renvoyé en commission...

Le président. Il n'a pas encore été renvoyé ! (Rires.)

M. Roger Beer. Non, mais le projet de loi dont je parle, le précédent, a été renvoyé, Monsieur le président !

Le président. Vous parlez du projet de loi 7411 ?

M. Roger Beer. Mais, comme vous ne m'avez pas passé la parole et que maintenant j'ai le droit de parler, j'aimerais encore dire au sujet du précédent projet de loi...

Le président. Je ne peux pas vous autoriser à parler d'un projet de loi qui a déjà été renvoyé, Monsieur le député !

M. Roger Beer. Cela m'est complètement égal ! D'ailleurs, en tant que président de la commission de l'énergie, cette dernière m'avait chargé de vous demander de renvoyer la motion 627 - cela fait partie de votre fonction - sur la gestion de l'eau, qui «goge» à la commission de l'énergie...

Le président. Eh bien, c'est une sacrée salade votre intervention !

M. Roger Beer. Si vous me laissiez terminer, ce serait tout de même plus simple. Je vous demande de jouer votre rôle de président - une fois n'est pas coutume ! - et de renvoyer cette motion avec le projet de loi précédent à la commission de l'environnement afin qu'ils soient traités en même temps, car c'est le même sujet, même s'il s'agit d'une motion ancienne. Ainsi la commission de l'énergie n'aura pas besoin de refaire le travail de la commission de l'environnement.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.

PL 7437
41. Projet de loi de MM. Jean Opériol, Jean-Pierre Gardiol, Thomas Büchi et David Hiler sur l'aide à la propriété individuelle (I 5 24). ( )PL7437

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Chapitre I

Principe

Article 1

But

1 L'Etat encourage la construction et l'acquisition de logements destinés à la propriété individuelle par des personnes qui, faute de fortune personnelle suffisante, ne sont pas en mesure d'investir les fonds propres nécessaires.

2 L'aide s'étend à d'autres droits réels ou personnels qui confèrent des prétentions semblables à celles qui découlent du droit de propriété, ainsi qu'à la propriété collective.

3 La présente loi, sous réserve des articles 4 et 12, peut être appliquée par analogie par les communes qui en émettent la volonté lorsque les logements à construire ou à acquérir sont situés sur leur territoire.

Art. 2

Nature de l'aide

L'Etat cautionne et accorde des prêts et consent des avances aux propriétaires aux conditions fixées par la présente loi.

Art. 3

Cumul d'aides

Les aides instituées par la présente loi sont cumulables avec les aides prévues par la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, et la loi fédérale encourageant la construction et l'accession à la propriété de logements, du 4 octobre 1974, ainsi qu'avec toute autre aide que l'Etat ou la Confédération octroie dans le but de favoriser l'accès à la propriété.

Art. 4

Autorité compétente

L'autorité compétente pour l'application de la présente loi est le département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (ci-après: le département).

Chapitre II

Conditions relatives aux logements

Art. 5

Conditions

Pour bénéficier de l'aide de l'Etat instituée par la présente loi, le requérant doit construire ou acquérir un logement répondant aux conditions suivantes:

a) être édifié sur le territoire du canton;

b) être destiné à servir effectivement d'habitation principale au propriétaire du logement, sauf circonstances particulières fixées par le règlement;

c) être au bénéfice d'une autorisation de construire délivrée par le département compétent;

d) être acquis selon un plan financier agréé par le département.

Art. 6

Aliénation ou opérations analogues

1 Le bénéficiaire doit se libérer du cautionnement et rembourser les avances fournies par l'Etat en capital et en intérêts si:

a) le logement en propriété est vendu;

b) des droits équivalant économiquement à une aliénation sont concédés sur le logement en propriété.

2 Pendant la durée de l'aide et du remboursement à l'Etat, un logement acquis avec l'aide de l'Etat ne peut être vendu avec bénéfice sans l'accord du département. L'aliénation est autorisée aux conditions prévues à l'alinéa 1.

3 Une restriction d'aliéner fondée sur la présente loi est inscrite au registre foncier.

CHAPITRE III

Aides

SECTION I

Financement

Art. 7

Financement

1 Pour la construction ou l'acquisition d'un logement en propriété, l'Etat cautionne des prêts hypothécaires jusqu'à 90% du coût de revient (terrain et construction) ou du coût d'acquisition du logement. Il peut aussi accorder lui-même des prêts lorsqu'un resserrement du marché des capitaux rend le financement difficile, à un taux d'intérêts ne pouvant être inférieur au taux d'intérêts pratiqué par la Banque cantonale de Genève pour des prêts hypothécaires sur des immeubles locatifs.

2 Le bénéficiaire de l'aide peut en tout temps se libérer du cautionnement et rembourser un éventuel prêt, en capital et en intérêts.

Art. 8

Garantie

Une telle aide de l'Etat est subordonnée à la condition que le propriétaire garantisse le service des intérêts et l'amortissement des hypothèques de rangs inférieurs en fournissant des sûretés convenables.

SECTION II

Abaissement des charges

Art. 9

Avances remboursables

1 Afin d'abaisser les charges du propriétaire pendant les années qui suivent la construction du logement ou son acquisition, l'Etat offre des avances remboursables en capital et en intérêts, à un taux ne pouvant être inférieur au taux d'intérêts pratiqué par la Banque cantonale de Genève pour des prêts hypothécaires en premier rang sur des immeubles locatifs.

2 Les charges du propriétaire sont constituées par les intérêts des capitaux empruntés, les frais d'entretien et d'administration et les prestations permettant l'amortissement des dettes hypothécaires en 25 ans à 60% du coût de revient.

3 Le bénéficiaire de l'aide peut en tout temps rembourser les avances fournies par l'Etat, en capital et en intérêts.

Art. 10

Conditions

1 L'aide octroyée en vue de l'abaissement des charges est accordée au propriétaire qui s'engage à rembourser les avances selon un plan financier accepté par le département.

2 Les charges du propriétaire doivent s'inscrire dans un rapport raisonnable avec ses revenus.

CHAPITRE IV

Dispositions financières et finales

Art. 11

Hypothèque légale

Les créances de l'Etat découlant de la présente loi sont au bénéfice d'une hypothèque légale assimilée à celle prévue à l'article 80, alinéa 1, lettre d, de la loi d'application du code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981.

Art. 12

Engagements de l'Etat

Lorsque les conditions de l'octroi de l'aide de l'Etat fondée sur la présente loi sont remplies, le requérant est en droit de l'obtenir, à concurrence d'un montant total annuel de montants cautionnés de 100 000 000 F et d'avances de 5 000 000 F.

Art. 13

Règlement d'application

Le Conseil d'Etat édicte le règlement d'application de la présente loi.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Avec une proportion de 30% de citoyens propriétaires de leur propre logement, la Suisse se situe, en matière d'accession à la propriété, au dernier rang des Etats européens. Le canton de Genève comporte lui-même le plus faible taux de propriétaires de Suisse avec 13,8%.

Or, l'article 34 sexies de la constitution fédérale vise notamment à encourager «l'accès à la propriété d'un logement ou d'une maison».

Par ailleurs, le peuple genevois s'est prononcé, le 16 février 1992, en faveur de l'inscription, dans la constitution cantonale, d'un article 10 A garantissant le droit au logement, que ce soit sous forme de location ou de propriété.

L'accession à la propriété de son logement constitue donc un objectif social de première importance.

Pourquoi l'accession à la propriété doit-elle être promue?

Devenir propriétaire, c'est acquérir la maîtrise économique et juridique du bien de première nécessité par excellence: son logement.

C'est aussi assurer la sécurité d'une famille. C'est également une forme de prévoyance. Par rapport au loyer payé pour la location d'un appartement, l'argent investi pour l'acquisition d'un logement demeurera toujours dans le patrimoine de l'accédant et ne l'aura donc jamais été «à fonds perdus».

L'idée de propriété induit une certaine permanence. Le propriétaire de son logement y est lié de manière plus forte que le locataire. Cette permanence et l'intangibilité qui l'accompagne sont l'expression même du droit garanti au logement auquel chacun peut prétendre. Devenir propriétaire, c'est enfin être chez soi.

A une époque où la mobilité des individus tend à s'accroître, notamment en raison de la situation du marché de l'emploi, au moment où la fiscalité intercantonale reste disparate, des mesures tendant à retenir la population à Genève ne doivent pas être négligées.

Au vu de toutes ces raisons, il convient de favoriser l'accession à la propriété de son logement.

A l'heure actuelle, l'accession à la propriété est encouragée par diverses mesures, tant sur le plan fédéral que dans notre canton.

Sur le plan fédéral:

1. La possibilité d'utiliser les fonds du deuxième pilier à titre de fonds propres ou pour garantir un prêt, en application de la loi fédérale sur l'encouragement à la propriété du logement au moyen de la prévoyance professionnelle entrée en vigueur le 1er janvier 1995.

2. L'aide fédérale, instituée par la loi fédérale encourageant la construction et l'accession à la propriété de logements, du 4 octobre 1974 (LCAP). En application de cette loi, la Confédération procure, cautionne ou accorde des prêts au candidat à l'accession à la propriété. Par ailleurs, afin d'abaisser les charges initiales du nouveau propriétaire à 5,3% (taux en vigueur aujourd'hui) du prix de revient ou d'acquisition du logement, elle lui procure des avances remboursables, appelées abaissement de base. En vue d'abaisser encore les charges du propriétaire, la Confédération peut verser, à certaines conditions, des abaissements supplémentaires. Ces avances-là ne sont remboursables que si le propriétaire revend l'objet dans les 25 ans en réalisant un bénéfice.

A Genève:

1. Le subventionnement de type HLM/PPE, introduit dans la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977 (LGL), permet de mettre l'acquéreur d'un appartement construit en propriété par étages au bénéfice d'une subvention fondée sur les normes HLM.

 Il est à relever que les abaissements supplémentaires prévus par la LCAP (voir ci-dessus) peuvent, à certaines conditions, être cumulés avec un subventionnement HLM/PPE.

2. La loi encourageant l'accession à la propriété par l'épargne-logement, du 26 septembre 1969, qui a pour but d'aider les candidats à la propriété individuelle à constituer un livret d'épargne-logement auprès d'un établissement agréé en leur ouvrant un compte de primes auprès de la caisse de l'Etat et en leur accordant des facilités fiscales, sous forme d'exonération de l'impôt sur le revenu net et la fortune nette afférente au logement acquis au bénéfice de cette loi, ainsi que de l'impôt immobilier complémentaire.

 Cette loi autorise également l'Etat à se porter caution simple pour une durée maximum de 10 ans et jusqu'à concurrence de 20% de la valeur de gage du logement.

Au vu de l'existence de toutes ces aides, l'on pourrait être tenté de penser qu'il n'est pas nécessaire de compléter le système par une nouvelle forme d'encouragement à l'accession à la propriété. Tel est pourtant bien le cas. En effet, le bilan de la mise en oeuvre des aides présentées ci-dessus démontre leur insuffisance.

Il a été constaté que les fonds du deuxième pilier gérés à Genève étaient trop souvent mis à contribution par des frontaliers pour acquérir leur logement en France voisine. Par ailleurs, les montants disponibles pour les jeunes couples de la classe moyenne intéressés par l'acquisition de leur logement lorsqu'ils envisagent d'avoir des enfants est généralement insuffisant pour leur permettre d'atteindre les 20% de fonds propres exigés par les établissements bancaires.

Les effets de l'aide fédérale sont limités puisque seuls 59 propriétaires individuels en bénéficient actuellement. Cela est probablement dû à la méconnaissance de cette loi fédérale par les accédants potentiels genevois et par le peu d'information promotionnelle qui en a été faite dans notre canton.

Quant aux HLM/PPE, il n'en a été construit que très peu (environ 90 logements). Le nombre de ménages qui peuvent bénéficier de ce régime est réduit, puisqu'il ne faut pas que leur revenu dépasse un certain niveau mais qu'il faut malgré tout que ces ménages disposent de fonds propres suffisants.

Enfin, la loi encourageant l'accession à la propriété par l'épargne-logement est pratiquement restée lettre morte. Le nombre de logements au bénéfice de cette loi s'élevait à 38 en 1989, 43 en 1990, 35 en 1991, 20 en 1992 et 16 en 1993. Les raisons de cette situation résident principalement dans une information inexistante, dans une participation insuffisante de l'Etat (600 F et 300 F par an respectivement pour un titulaire du compte majeur ou mineur) et dans le montant annuel maximum des versements autorisés, de 6 000 F, respectivement 3 000 F, beaucoup trop bas par rapport au niveau des prix actuels.

Il découle de ce qui précède que la création d'un nouvel instrument réellement incitatif est nécessaire. Celui qui fait l'objet du présent projet de loi, soit l'aide à la propriété individuelle ou aide cantonale, s'inspire largement de l'aide fédérale instituée par la LCAP et est adapté à la réalité économique genevoise.

Par rapport aux aides au logement traditionnellement pratiquées à Genève, l'aide à la propriété individuelle instituée par le présent projet de loi est entièrement originale dans la mesure où l'Etat en demandera le remboursement à ses bénéficiaires.

L'objectif visé est de permettre l'acquisition, par 250 personnes par année si possible, de logements d'un prix moyen d'environ 500 000 F. C'est en fonction de ce chiffre que les montants cautionnés (100 000 000 F) ou avancés (5 000 000 F) par l'Etat ont été déterminés.

Voici un bref commentaire article par article du projet.

Article 1

L'aide cantonale instituée par la présente loi est destinée à ceux qui n'ont pas de fortune personnelle leur permettant d'investir les fonds propres généralement exigés par les banques au moment de l'octroi d'un prêt hypothécaire, soit, généralement, 20% du montant total du prix. Le projet ne pose en revanche aucune limite de revenu maximum.

L'Etat de Genève n'est pas seul mis à contribution par le projet de loi. Celui-ci prévoit expressément l'intervention des communes. En effet, il est souhaitable de permettre aux communes qui en ont les moyens et qui le désirent d'encourager l'accession à la propriété de ménages sur leur territoire. Cela leur permettra de sédentariser de «bons» contribuables.

Article 3

Le cumul d'aides diverses, de droit cantonal ou fédéral, est autorisé par le projet. En ce qui concerne la LGL, seul serait actuellement possible le cumul avec le système HLM/PPE.

Article 5

Les conditions que le logement mis au bénéfice de la loi doit remplir sont calquées sur celles de la loi encourageant l'accession à la propriété par l'épargne-logement. L'exigence de l'occupation effective du logement par le bénéficiaire de l'aide n'est toutefois pas limitée à 5 ans. Des motifs de dérogation à l'exigence de l'occupation effective pourront être prévus par le règlement. L'on pense en particulier à des motifs liés à une absence temporaire de Genève, pour des raisons professionnelles ou de santé.

Le logement ne doit répondre à aucune norme technique particulière. Il suffit qu'il soit au bénéfice d'une autorisation de construire. Il peut s'agir d'un logement neuf ou d'occasion.

Article 6

Cette disposition est inspirée de la LCAP. Il s'agit de garantir, autant que faire se peut, que le logement mis au bénéfice de l'aide cantonale demeure affecté à l'habitation principale du bénéficiaire et de déterminer à quelles conditions le logement en question peut être aliéné.

Article 7

L'aide au financement de l'investissement initial prend deux formes. D'une part, l'Etat et les communes qui le veulent, comme la Confédération, cautionnent des prêts hypothécaires à concurrence de 90% du coût de revient du logement. D'autre part, ils peuvent accorder eux-mêmes des prêts lorsqu'un resserrement du marché des capitaux rend le financement difficile, soit lorsque le taux de l'intérêt hypothécaire devient prohibitif ou que le crédit bancaire devient insuffisant.

Article 8

Le propriétaire mis au bénéfice d'un cautionnement ou d'un prêt de l'Etat ou d'une commune doit fournir des sûretés convenables permettant de garantir le payement des intérêts hypothécaires et l'amortissement des hypothèques de rang inférieur (art. 9, al. 2) dans un délai de 25 ans. Sauf circonstances particulières, le logement ou les droits cités à l'article 1, alinéa 2, constituent de telles garanties lorsqu'ils sont correctement gagés.

Article 9

Il appartiendra au règlement de déterminer la quotité de l'aide. A titre d'élément de référence, indiquons que l'aide fédérale, actuellement, allège de 22% environ le budget de l'accédant, pendant sa première année de propriété. Elle abaisse ainsi de 6,8% à 5,3% du prix d'acquisition du logement les intérêts et amortissements hypothécaires ainsi que les charges d'exploitation du logement.

C'est précisément cet abaissement (abaissement de base en aide fédérale) qui devra être remboursé en capital et en intérêts à la collectivité publique qui l'aura octroyé. Le taux d'intérêt sur les avances ne devrait pas être inférieur à celui pratiqué par la Banque cantonale de Genève en matière d'hypothèques de 1er rang sur les immeubles locatifs.

Article 10

L'article 5, lettre d, prévoit l'obligation de faire agréer un plan financier d'acquisition par l'autorité compétente. Les remboursements fixés dans ce plan constituent un minimum. Le propriétaire devra être autorisé à effectuer librement un remboursement anticipé en tout temps, sans pénalités (art. 7,al. 2 et 9, al. 3).

Si le projet de loi ne prévoit pas de limites de revenu maximum (voir commentaire ad art. 1), l'autorité doit s'assurer que le candidat à la propriété individuelle dispose de revenus suffisants pour assumer ses charges initiales.

Article 12

Les aides prévues par le présent projet de loi n'impliquent pas de dépenses, mais seulement des avances de trésorerie. Ainsi, l'article 12 instaure une obligation de l'Etat d'accorder son cautionnement et des avances remboursables lorsque les montants qui y figurent ne sont pas atteints et lorsque les dispositions de la loi et de son règlement sont respectées. Le pouvoir discrétionnaire dont l'Etat dispose dans le cadre de l'application de la LGL pour l'octroi de subventions à fonds perdus n'a ici pas de justification.

Cette disposition n'est pas applicable aux communes qui décideraient de faire usage de la présente loi. Les communes détermineront, dans le cadre de leur budget, les moyens financiers qu'elles entendent allouer à l'aide à l'accession à la propriété.

Article 13

La présente loi se veut être une loi-cadre. De larges compétences sont laissées au Conseil d'Etat pour réglementer en détail la mise en oeuvre de la loi.

L'aide cantonale à la propriété individuelle constitue un nouvel élément de l'édifice légal destiné à favoriser l'accession à la propriété. Comme les autres aides existantes et citées ci-avant, elle vise à faciliter le financement de l'acquisition d'un logement. Elle est toutefois adaptée à la réalité économique de notre canton et aux besoins des Genevois. Elle devrait constituer un instrument de nature à porter à Genève, dans les meilleurs délais, le taux de propriétaires à 20%.

C'est pour les raisons qui précèdent que nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir réserver un bon accueil à l'aide à la propriété individuelle.

Préconsultation

M. Thomas Büchi (R). L'accession à la propriété à Genève n'est plus valorisée depuis de nombreuses années. Pour preuve 30% des Suisses sont propriétaires de leur logement contre 13,8% des Genevois seulement. L'un des fondements de base d'une société qui se veut libre est que les hommes puissent disposer et gérer leur logement comme ils l'entendent.

L'article 34 de notre Constitution fédérale le prévoit d'ailleurs, puisqu'il encourage l'accès à la propriété individuelle. Le groupe radical pense qu'il est urgent de rétablir un équilibre plus sain entre ces pourcentages dans notre canton et de se rapprocher de la moyenne suisse.

Ce projet de loi qui s'inspire beaucoup des critères établis par l'aide fédérale devrait avoir un caractère incitatif pour que les Genevois osent à nouveau se lancer dans l'acquisition d'un logement qui - je le rappelle - doit être un droit fondamental.

Certains aspects doivent encore être examinés et approfondis. Il faut donc renvoyer le projet de loi 7437 à la commission du logement. Une fois voté, il sera très profitable à la population, puisqu'il permettra à beaucoup de gens d'être moins dépendants des autres.

M. Laurent Moutinot (S). Le parti socialiste n'est pas opposé à l'accession à la propriété, et, donc, il approuve le fait que des mesures soient prises pour favoriser cette accession. Cependant, en période de difficultés financières, l'Etat doit respecter des priorités et ne dépenser les deniers publics qu'en faveur de ceux qui en ont manifestement le plus besoin.

Je ferai quelques brèves remarques sur le projet qui nous est soumis. Le premier point - positif - de ce projet de loi est qu'il évite le système des avances à fonds perdu, puisqu'il prévoit un système d'avances remboursables et de cautionnements. Toutefois, on ne parle pas du coût de ce projet pour la collectivité publique. En l'état, il demeure plein d'imprécisions.

Dans la loi, on ne trouve aucune définition des conditions relatives aux bénéficiaires de ladite loi - quelle devra être leur situation de fortune ou de revenu ? - ni aucune définition du plan financier des bénéficiaires - dans quelle mesure pourront-ils bénéficier de l'aide ? - pas plus qu'une évaluation de l'impact qu'auront ces mesures.

Je ne suis pas convaincu que l'adoption d'une loi transforme la population genevoise, en admettant que ce soit souhaitable, en propriétaires. L'impact sera forcément limité. D'ailleurs, j'observe avec une certaine ironie la contradiction existant entre le fait d'affirmer que le statut de propriétaire est un statut responsable et que, parallèlement, on entoure le malheureux propriétaire de tout un arsenal législatif destiné à l'aider ! De deux choses l'une, soit le propriétaire est responsable soit il ne l'est pas. Comment peut-on vouloir, à la fois, sa liberté et une loi de plus en la matière ?

Le projet de loi dont on nous dit qu'il s'harmonise fort bien avec les dispositions fédérales en la matière posera des problèmes, malgré tout, car pour une seule opération celui qui entendra bénéficier de l'ensemble des dispositions se trouvera face à un arsenal législatif incroyable. La complexité du sujet fait que l'on court le risque, une fois de plus, que ce projet de loi ne serve à rien.

Nous reprendrons tout cela en commission. Vous l'avez compris, nous sommes peu enthousiastes face à ce projet de loi, mais ne formulons pas d'objection quant à son étude.

M. Jean Opériol (PDC). Notre groupe souhaite le renvoi de ce projet de loi à la commission du logement. L'originalité de ce projet se situe sur le plan cantonal, car, comme vient de le dire M. Moutinot, il reprend l'esprit de la loi sur l'aide fédérale à la propriété. Je rappelle que cette loi, en vigueur depuis 1974 dans tous les cantons, sauf le nôtre, rencontre un vif succès.

A l'heure où les finances de l'Etat sont ce qu'elles sont, ce projet est un pari sur le fait de concilier l'accession à la propriété au moment où l'Etat n'en a théoriquement pas les moyens. Ce projet de loi appelle donc une contribution de l'Etat qui n'est pas à fonds perdu, mais remboursable avec intérêt.

Il s'adresse principalement à de jeunes couples dont les revenus sont établis et en rapport avec le prix de leur appartement, mais dont les fonds propres seront jugés insuffisants pour l'accession à la propriété. L'Etat leur apportera une aide en cautionnant leur emprunt hypothécaire.

Ce projet est original dans le sens où il propose que les communes soient associées à l'aide que l'Etat apportera aux candidats à la propriété. J'ai pu vérifier que bien des communes sont intéressées à garder, en tant qu'«accédants» à la propriété, des catégories d'habitants fiscalement intéressants.

Enfin, on peut faire confiance à ce qui s'est passé sur le plan national. L'aide fédérale fonctionne parfaitement bien depuis 1974, avec beaucoup de succès et de satisfaction pour ceux qui en bénéficient, et on ne voit vraiment pas les raisons pour lesquelles - étant reprise aux plans cantonal et communal - cette loi n'aurait pas le même succès chez nous. Je vous remercie de renvoyer ce projet de loi à la commission du logement.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Il est exact que nous nous trouvons dans le pays qui a le moins de propriétaires, notre canton étant le dernier de Suisse avec un taux de 13,8%.

Si nous pouvions arriver au taux de 20% et réaliser ce changement sur une dizaine d'années, cela représenterait environ 700 millions injectés dans l'économie de ce canton, grâce aux décisions de ceux qui entendent accéder à la propriété. Je songe, en particulier, à l'accès à la propriété pour la classe moyenne. Il s'agit d'un acte social, comme dans les pays nordiques où l'on a bien compris et agi pour créer le cadre le plus approprié à sa réalisation.

Le département fera un certain nombre de propositions allant dans ce sens. Toutefois, nous avons à disposition des instruments que nous n'utilisons pas suffisamment, comme l'épargne-logement qui a été oubliée et n'a pas été adaptée depuis un certain nombre d'années, alors que cette proposition n'était pas inintéressante. La PPE/HLM est plus limitée, compte tenu des modifications sur les barèmes, mais, là encore, j'espère que nous aurons quelque succès, même si vous avez dit ne pas imaginer que la PPE/HCM puisse être envisagée.

Nous avons besoin de quelques grands projets, quelques grands axes sur lesquels nous mènerons des actions qui modifieront la situation économique de ce canton. En ce sens, ce projet est intéressant. Les investissements de ce type ne nous laissent pas indifférents. Ce projet est donc accueilli avec intérêt. Nous pourrons le compléter et l'adapter en commission pour lui donner sa pleine efficacité tout en ménageant les deniers de l'Etat.

M. Christian Ferrazino (AdG). Permettez-moi de vous dire, Monsieur Haegi, que cette loi ne transformera pas la population genevoise en un peuple de propriétaires. Si, pour reprendre vos propos, l'accès à la propriété constitue un acte social majeur cela ne doit pas vous faire oublier que la pénurie de logements à Genève, malgré la détente relative que l'on connaît pour les petits logements à loyer abordable, existe toujours.

A Genève, on constate que les loyers sont les plus chers de Suisse. Par conséquent, la charge que représente le loyer pour les familles est de plus en plus lourde et devient insupportable pour les revenus les plus modestes.

Vous savez mieux que quiconque, Monsieur Haegi, que les montants de l'allocation-logement ont explosé ces dernières années portant la somme à environ 20 millions par année. Il ne s'agit pas d'un hasard si la liste des personnes inscrites à l'office du logement social, la plupart du temps à la recherche d'un logement meilleur marché, s'élève encore à presque quatre mille personnes après l'épuration des fichiers de cet office.

Trouver un logement à Genève est un exercice des plus difficiles, surtout s'il s'agit d'un logement à loyer abordable. Cette difficulté va encore s'accroître avec l'augmentation de notre population et le manque de nouveaux logements mis sur le marché. Si un effort tout particulier n'est pas fait pour la construction de logements sociaux, la situation de pénurie que nous connaissons aujourd'hui s'accentuera pour devenir une situation de crise.

Nous savons que les finances publiques limitées exigent que l'on cible au mieux l'effort de l'Etat en matière de politique sociale du logement. On pourrait s'attendre à ce que cet effort intervienne avant tout en faveur de celles et ceux qui sont les moins bien lotis, et non en faveur des nantis.

Monsieur Haegi, vous aviez déjà déposé un projet de loi, dont vous avez brièvement rappelé l'existence, sur l'accession à la propriété HCM. Ce projet de loi a été considéré comme une provocation par de nombreux députés et de nombreuses associations. J'avais cru comprendre, suite aux observations qui avaient été formulées, que vous y aviez renoncé. Votre intervention me fait penser le contraire, car vous n'êtes plus aussi catégorique à ce sujet. Votre projet de loi, sauf erreur, dort dans les tiroirs de la commission du logement. Il faut dire que celui de l'Entente et de M. Hiler est moins provocateur que le vôtre, puisque, comme l'a rappelé M. Moutinot tout à l'heure, il est basé sur le modèle de l'aide fédérale de la loi de 1974.

Toutefois, ce projet de loi pourrait avoir des effets pervers et conduire à aider des nantis au détriment de familles défavorisées, puisqu'il permettra de supprimer des logements bon marché destinés à des familles aux revenus modestes du parc locatif actuel pour les vendre, avec l'aide de l'Etat, à des familles qui auront les moyens de les acheter.

L'aide cantonale, sous quelque forme que ce soit, ne doit pas être utilisée pour déloger des locataires, mais devrait être destinée à l'acquisition de nouveaux logements. Et cela créerait des emplois. Comme l'a relevé M. Moutinot, les dispositions sont tellement générales et vagues qu'elles permettent de faire un peu tout et n'importe quoi, pour n'importe qui. Ces dispositions ne fixent pas de limites de revenus.

Les auteurs de ce projet de loi se sont interrogés sur le fait qu'il ne fallait pas accorder d'aide à des gens qui auraient de trop faibles revenus car, bien entendu, ces derniers ne pourront plus faire face à la charge financière que représente pour eux l'acquisition d'un logement. C'est dire, Monsieur Haegi, qu'en relevant cela vous convenez que ce n'est pas avec une loi que vous ferez des Genevois un peuple de propriétaires.

Mais encore faut-il avoir les moyens d'acquérir son logement. Vous souriez en disant : «Très bien !». Vous connaissez le nombre de chômeurs ? Quand vous parliez de 13,8% à 20%, je me demandais si vous faisiez allusion au nombre des chômeurs à Genève. Avec la politique que vous menez, on y arrivera très rapidement ! (Brouhaha.) Cela m'étonne que M. Vaucher ne soit pas encore intervenu !

Ce projet cantonal étant, en quelque sorte, calqué sur la loi fédérale de 1974, n'oubliez pas que l'Etat peut être appelé en garantie, puisqu'il donne sa caution. La presse alémanique a révélé une trentaine de cas litigieux en Suisse allemande, cas représentant des dizaines de millions pour lesquels la garantie de la Confédération pourrait être demandée. Ce risque serait réel à Genève si l'Etat devait accorder des aides remboursables à des gens qui, par la suite, ne pourraient plus les rembourser. Sa garantie serait alors requise. L'expérience précitée devrait nous rendre plus prudents et, par conséquent, nous amener à nuancer les déclarations de M. Haegi.

M. David Hiler (Ve). Je désire situer ce projet à partir de trois points de vue différents. Le premier est celui des bénéficiaires. Soyons tout à fait précis : ces bénéficiaires sont plus ou moins les mêmes, socialement parlant, que ceux qui peuvent, aujourd'hui, retirer leur deuxième pilier pour financer un accès à la propriété. Le problème est que, bien souvent - et je me permets de trouver cela navrant pour les jeunes couples - la LPP devient suffisante lorsque les enfants ont déjà grandi. A ce moment-là, l'envie de devenir propriétaire diminue. Or, ce type de projet vise des gens jeunes qui n'ont pas pu accumuler les fonds nécessaires. Il contient une restriction très nette. Si M. Ferrazino ne l'a pas vue, c'est qu'il n'a pas voulu la voir. Cette aide s'adresse aux personnes n'ayant pas les fonds propres nécessaires, c'est-à-dire sans fortune. C'est sur ce point précis que nous aimerions les aider. Ce sont des couples ayant des revenus à terme qui suffisent à payer un loyer d'achat de 2 000 à 2 500 F par mois.

Le deuxième point de vue est celui des investisseurs. Actuellement, on entend partout cette litanie : «Il n'y a pas d'investisseurs à Genève !». Nous considérons que c'est une grande chance, car cela peut favoriser deux choses : d'une part, l'accès à la propriété pour ceux qui le souhaitent et, d'autre part, l'encouragement au développement des coopératives où nous avons pris un retard affligeant par rapport à la Suisse alémanique.

De ce point de vue, ce projet de loi, qui a une portée limitée, apporte une contribution.

Le troisième point de vue est celui des locataires, dont la protection est passée pour l'essentiel, à Genève, par des mesures juridiques. Il s'agissait donc de rétablir l'équilibre d'un marché, injuste par définition, au moyen de mesures légales. Ailleurs, en Europe du Nord et en Suisse alémanique, on a procédé différemment, en encourageant simultanément les coopératives d'habitation et l'accès à la propriété qui sont deux manières de rendre aux gens ce qu'ils utilisent journellement : leur logement. La solution genevoise d'un très fort subventionnement, lié à des mesures législatives extrêmement sévères, est dangereuse à long terme. On le voit déjà aujourd'hui, car on n'arrive plus à maintenir artificiellement une demande solvable pour les logements construits.

De ce point de vue, il nous paraît tout à fait clair que la priorité d'une politique du logement doit passer par les HBM, par la coopérative d'habitation, et aussi par l'accès à la propriété pour une part assez importante de la classe moyenne. C'est seulement de cette manière que le logement changera de main et qu'il ne sera plus concentré dans les mains de quelques privilégiés. Je rappelle à M. Ferrazino que la notion de capitalisme signifie simplement qu'un certain nombre de gens concentrent des capitaux et que le but d'une loi sur l'accession à la propriété est, en principe, de déconcentrer cette dernière.

Ce projet de loi est loin d'être parfait, et j'en suis conscient. A mon avis, il valait la peine de le signer, et c'est pour cela que je l'ai fait, engageant mon groupe par cet acte. Il me semblait nécessaire d'aller de l'avant en matière d'aides remboursables. Mais d'ores et déjà j'avise l'Entente et M. Haegi que si le projet HCM/PPE devait ressortir du tiroir, nous nous joindrions au référendum pour le combattre.

M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Concernant la PPE/HCM, je désire relever qu'il s'agit d'octroyer une aide à des gens de la même catégorie sociale que ceux pouvant en bénéficier lorsqu'ils sont locataires. Je n'arrive pas à comprendre comment vous pouvez accepter que l'on accorde une aide à une personne qui a choisi un statut de locataire et qu'on prive une autre personne, dont le revenu est le même, de cette aide parce qu'elle choisit d'investir dans un logement, alors que, ce faisant, elle apporte une contribution à l'économie dans son ensemble. Il faudrait relever cette injustice, si l'on est tant soit peu équitable, ou alors limiter l'aide et supprimer la catégorie HCM. On s'est rendu compte de l'erreur que nous aurions commise en le faisant.

Messieurs Hiler et Ferrazino, j'ai bien compris votre signe politique. Monsieur Hiler, vous m'avez dit une fois que je devais mieux cultiver le dialogue pour arriver à des consensus qui nous permettent de progresser et m'inspirer de certaines méthodes que vous m'aviez citées en commission. Je vous ai écouté, et c'est la raison pour laquelle j'ai «levé le pied» sur la PPE/HCM, si vous me passez l'expression, en attendant avec intérêt les propositions telles celles soumises ce soir pour parvenir à un consensus qui nous permette d'imaginer une propriété accessible à une certaine catégorie sociale.

M. Ferrazino a dit que l'Etat courrait des risques s'il donnait des garanties. Il faudra mesurer ces risques, et, pour m'être déjà livré à cet exercice, je pense qu'ils sont raisonnables et qu'ils nous permettront d'atteindre les objectifs intéressants soulignés par M. Hiler. De toute façon, d'après ce qui s'est dit ce soir, je note qu'à travers et grâce à ce projet de loi nous sommes parvenus tout de même à dialoguer un peu différemment sur le sujet.

En continuant à construire si peu, nous aurons de grandes difficultés dans les années à venir. Reconnaissez que ces difficultés ne concernent pas une catégorie mais plusieurs. Votre collègue a donc raison de dire que nous devons nous occuper de l'ensemble de ces catégories.

Aujourd'hui, nous prenons du retard dans le domaine de la construction. C'est préoccupant pour une des catégories sociales que vous avez évoquées, mais aussi d'une manière plus globale. En ce qui concerne les coopératives, je note, Monsieur Hiler, un regain d'intérêt et des proposition intéressantes. Des projets démarrent dans le domaine coopératif, en liaison avec la LGL. Ainsi parvient-on à concrétiser un certain nombre de projets dans le sens que vous souhaitez.

Ce projet est renvoyé à la commission du logement. 

La séance est levée à 19 h 15.