République et canton de Genève

Grand Conseil

IU 156
12. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de Mme Alexandra Gobet : PLQ chemin Rieu. ( ) IU156
Mémorial 1996 : Développée, 56.

M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Vous demandez, Madame la députée, en quoi l'extension à deux étages du bâtiment de M. Saadi - dont les plans pourront être consultés à la fin de notre séance - permettrait de loger, sous le même toit, cent cinquante employés supplémentaires de Reynolds, si le projet initial sur deux étages ne pouvait en accueillir que soixante à quatre-vingts.

Reynolds Tobacco occupe actuellement plus de trois cents personnes, travaillant en majorité dans le bâtiment du chemin Rieu 12-14, bâtiment totalisant une surface de bureaux de 1 400 m2.

Reynolds détient déjà des contrats de location dans le voisinage, à la rue Pedro-Meylan, au 53 de la route de Malagnou, au chemin des Vergers et, Madame la députée, à l'ancienne piscine de Rieu, objet d'un contrat qui sera signé en location pour le début de février.

Cette société ne veut pas se disperser davantage. Il est exclu qu'elle multiplie les satellites. Elle veut à tout prix rassembler ses activités dans son centre nerveux, quitte à n'augmenter que peu ce dernier.

Reynolds installera son siège mondial à Genève - ce qui signifie l'engagement de cent employés supplémentaires - et agrandira son centre logistique. La société a déjà investi 7 millions pour des rénovations, dont un demi-million, en 1995, pour développer son centre informatique.

Votre deuxième question est, Madame la députée : «Si le PLQ que vous proposez d'adopter n'apporte ni une solution véritable ni même une solution immédiate aux besoins incontestables de l'extension de Reynolds - puisqu'il faudrait trois ans pour que les bureaux soient construits, même sans les oppositions - quel est l'intérêt privé ou public prépondérant qui vous amène à vouloir néanmoins imposer ce PLQ ?».

Ce PLQ a été élaboré après une année de discussions. Il apporte une solution raisonnable et immédiatement réalisable, contrairement à ce que vous supposez. Les services de mon département, notamment celui de l'architecte cantonal, avec l'aide des commissions, de M. Ruffieux, de Mme Burnand et de la Ville de Genève, ont recherché d'autres solutions.

La première était la surélévation du bâtiment existant. Elle a été refusée pour des questions légales de distance. La deuxième est un bâtiment bas, comportant un rez-de-chaussée et trois étages d'une super-structure, avec une importante emprise au sol, puisque parvenant à six mètres du bord de la parcelle. La troisième est celle qui vous est proposée, avec une emprise minimum au sol et un gabarit identique à celui du bâtiment existant. Mise à l'enquête publique, cette solution a été considérée comme étant la moins dommageable pour le quartier : le nouveau bâtiment se branche sur la structure actuelle, par l'intermédiaire de la cage d'escalier, l'ascenseur, le bloc sanitaire, etc.

Les nouvelles surfaces sont, de ce fait, entièrement affectées aux bureaux. Ce bâtiment, probablement à structures métalliques préfabriquées, pourrait être construit en moins d'un an, de façon esthétique et sans trop de gêne pour les voisins.

Vous demandez encore pourquoi l'Etat fait le choix d'un nouvel affrontement avec la Ville de Genève, plutôt que de favoriser une prise en compte des surfaces de l'ancienne piscine Rieu pour lesquelles Reynolds négocie, ou les bureaux actuellement libres. Vous parlez de Florissant, Magnin-Jacquet, Eugène-Pittard, SPG, etc.

Mon département ne recherche aucun affrontement avec qui que ce soit. J'ai prévu l'organisation d'une séance de discussion, réunissant tous les intéressés, à savoir l'Etat, la Ville de Genève, Reynolds et Me Bellanger, le conseil des opposants, afin d'aplanir les divergences. J'ai fait modifier le projet mis à l'enquête, avec la diminution des deux étages supérieurs, pour rejoindre la moyenne, forcément insatisfaisante, des avis exprimés.

Ce projet ne fait pas l'objet de l'approbation d'un plan de quartier, mais de l'ouverture de la procédure d'opposition usuelle, du mercredi 31 janvier au jeudi 29 février.

Quant aux surfaces de bureaux, soi-disant libres à proximité, elles sont à vendre, d'une part, ou ne sont pas disponibles, d'autre part.

Je vous rappelle que Reynolds souhaite regrouper un maximum de collaborateurs chemin Rieu 12-14. Cette situation lui convient parfaitement et il n'est pas question que cette société se disperse davantage.

Quelques points restent à relever :

1. Il y a un intérêt public prépondérant à se décider rapidement, intérêt que j'ai essayé de respecter lors des discussions avec les entreprises. Nous ne pouvons plus «balader» les gens comme nous l'avons fait.

2. L'audition de M. Petruzzello, directeur de Reynolds, par la commission du Conseil municipal, s'est - du point de vue de cette société - extrêmement mal passée. M. Petruzzello a été accueilli à cette séance, de laquelle j'étais absent, comme un chien dans un jeu de quilles, ce qui n'étonne pas les parlementaires, mais ébahit les particuliers. Pendant deux minutes, ce fut un silence de mort, puis, d'après ce que m'a rapporté M. Petruzzello, il lui a été demandé : «Si on vous interdit cette construction, partirez-vous, oui ou non ?». M. Petruzzello a répondu, bien sûr, par la négative et ce dernier m'a confié que même si on empêchait la réalisation du projet Reynolds ne partirait pas en raison des investissements déjà faits.

Il s'agit là d'une problématique, soulevée par M. Ferrazino, à savoir la marge de liberté dont dispose un conseiller municipal quand, saisi en queue de procédure, il doit dire si, oui ou non, il approuve un projet. Plus d'une fois, les conseillers municipaux doivent préaviser des projets trop tardivement et ils éprouvent le sentiment qu'on leur force la main. C'est ce qui arrive avec la plupart des PLQ, et cela biaise complètement les discussions avec l'exécutif communal ou municipal, pour la bonne raison que celui-ci entend, à juste titre, garder son indépendance. Il aimerait donner son préavis, mais, en fait, il intervient trop tard.

«Promener» une société n'encourage pas les investisseurs à venir s'installer chez nous !

Le dernier projet fait l'objet de la procédure d'opposition usuelle qui sera ouverte, comme je vous l'ai dit, du mercredi 31 janvier au jeudi 29 février. Ce délai nous permettra de rencontrer tous les intéressés.

Bien que conscient de marcher sur des oeufs, je ne puis m'empêcher de vous dire que les quatre personnes qui, à Pedro-Meylan, font opposition, émargent largement aux bénéfices de la Genève internationale. Suivant une pratique de M. le député Grobet, qui avait toujours le «Savoir» sur son pupitre, je me suis informé de qui habitait dans le bâtiment. J'ai appris qu'une société d'import-export de peaux de reptiles y résidait, et que ses reptiles ne venaient certainement pas du canton de Fribourg ! Il y a aussi la fiduciaire Fidufirst, dont la clientèle ne se limite certainement pas aux associations religieuses et au couvent d'Einsiedeln. J'ai repéré encore une personne d'origine orientale, administrateur-délégué d'une société marchande.

Sans vouloir vexer les honorables opposants, qui conservent tous leurs droits, je me dis que nous nous trouvons dans la situation classique du conseil municipal qui dit : «Bienvenue à vous, Reynolds ! Il y a plus d'une année que vous essayez de venir. On va réunir une commission, siéger et conclure : on vous veut partout à Genève, sauf ici !».

Cette interpellation urgente est close.