République et canton de Genève

Grand Conseil

No 52

Vendredi 1er décembre 1995,

soir

Présidence :

M. Jean-Luc Ducret,président

La séance est ouverte à 17 h.

Assistent à la séance : MM. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Jean-Philippe Maitre, Claude Haegi et Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Philippe Joye, Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Claire Chalut, Sylvie Châtelain, Jean-François Courvoisier, Hervé Dessimoz, Luc Gilly, Michel Halpérin, David Hiler, Alain-Dominique Mauris, Barbara Polla, Jean-Pierre Rigotti, Andreas Saurer et Jean Spielmann, députés.

3. Déclarations du Conseil d'Etat et communications.

Le président. En ce 1er décembre, Journée mondiale contre le sida, vous avez trouvé, dans la salle des Pas-Perdus, des rubans rouges que je vous invite à porter.

Vous marquerez ainsi votre solidarité avec les personnes concernées.

Le Bureau vous propose de verser dans les urnes qui sont disposées sur les tables dans la salle des Pas-Perdus ce que vous jugerez utile pour marquer votre solidarité avec les personnes qui souffrent de cette terrible maladie.

Le Bureau a proposé de verser une somme de 5 000 F, à prendre sur la caisse du Grand Conseil. Il complétera, à due concurrence, ce que vous aurez versé.

M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, vu la générosité de votre geste et le nombre de députés absents, voudrez-vous répéter votre message après la pause ?

Le président. D'autre part, grâce à la diligence de l'imprimerie, aux efforts de M. Rosé, de ses collaborateurs et de nos huissiers, la totalité des textes et l'ordre du jour de nos séances des 14 et 15 décembre prochain vous ont été adressés ce jour en deux expéditions. Les délais voulus par la loi, que nous avons votée en septembre, seront donc respectés. Les remerciements s'adressent surtout à nos huissiers.

4. Correspondance.

Le président. La pétition suivante est parvenue à la présidence :

P 1093
«Pour un quartier des Eaux-Vives plus convivial». ( )P1093

Cette pétition est renvoyée à la commission des pétitions. 

5. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

RD 252-1
6. Rapport oral de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil sur une éventuelle incompatibilité de Mme Alexandra Gobet, nouvelle députée, remplaçant Mme Liliane Maury Pasquier, démissionnaire. ( )RD252-1

Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. La commission des droits politiques s'est réunie, le 29 novembre, pour examiner la compatibilité de la candidature de Mme Alexandra Gobet avec la fonction de députée. Elle l'a déclarée parfaitement compatible et lui souhaite la bienvenue.

 

E 792-1
7. Prestation de serment de Mme Alexandra Gobet, nouvelle députée, remplaçant Mme Liliane Maury Pasquier. ( )E792-1

Mme Alexandra Gobet est assermentée. (Applaudissements.) 

PL 7301
8. Projet de loi de Mmes et M. Pierre-Alain Champod, Micheline Calmy-Rey et Fabienne Blanc-Kühn modifiant la loi en matière de chômage (J 4 5). ( )PL7301

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

La loi en matière de chômage, du 10 novembre 1983, est modifiée comme suit :

Art. 9, lettre b (nouvelle teneur)

b) les chômeurs confédérés ainsi que les chômeurs étrangers domiciliés sans interruption depuis une année au moins dans le canton de Genève, à dater du jour de l'introduction de la demande et qui sont indemnisés par une caisse d'assurance-chômage.

Art. 23, lettre b (nouvelle teneur)

b)  les Confédérés ainsi que les étrangers, domiciliés sans interruption depuis une année au moins dans le canton de Genève au moment de l'ouverture du droit à l'occupation temporaire.

Art. 24, lettre c (nouvelle teneur)

c) ne pas avoir subi pendant le délai-cadre d'indemnisation fédérale de suspension du droit à l'indemnité de plus de30 jours pour refus d'acceptation d'un emploi convenable proposé par l'autorité compétente ou pour manque de recherches personnelles d'emploi.

Art. 25, al. 1 (nouvelle teneur)

 al. 2 et 3 (abrogés)

1 La durée de l'occupation temporaire est fixée à12 mois.

Art. 26 (abrogé)

Art. 2

Modification à une autre loi   (D 3 1)

La loi générale sur les contributions publiques, du9 novembre 1887, est modifiée comme suit:

QUATRIÈME PARTIE

Autres impôts cantonaux

TITRE II (nouveau)

Contributions sociales généralisées

Art. 379 (nouveau)

Principe

1 En cas de chômage important et persistant, les Genevois domiciliés dans le canton, les Confédérés et les étrangers au bénéfice d'un permis de séjour ou d'établis-sement sont soumis au paiement d'une contribution sociale généralisée.

2 La contribution sociale généralisée est perçue sur tous les revenus bruts des contribuables domiciliés dans le canton.

Art. 380 (nouveau)

Taux

Le taux est fixé par le Conseil d'Etat en fonction des besoins. Il ne peut dépasser 0,3%.

Art. 381 (nouveau)

Destination

Le produit de la contribution sociale généralisée est destiné exclusivement à couvrir l'augmentation des charges liées aux occupations temporaires accordées aux chômeurs en fin de droit.

Art. 382 (nouveau)

Recouvrement

La contribution sociale généralisée est recouvrée selon le mode usité pour les contributions directes.

Art. 3

Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Introduction

Le chômage continue d'être le problème le plus important auquel notre pays doit faire face. Nous pensons que le chômage n'est pas une fatalité et que l'on peut développer des politiques permettant de diminuer son importance et ses conséquences. Nous pensons que l'augmentation du chômage n'est pas liée uniquement à la récession mais également à des modifications de l'économie (délocalisation, automatisation, mondialisation des marchés, etc.). Il ne s'agit pas seulement d'une récession momentanée de l'économie mais d'une transformation de celle-ci. C'est la raison pour laquelle les solutions au chômage doivent, à notre avis, être basées sur les trois axes suivants :

1. Le traitement social du chômage (amélioration de la législation sur le chômage, création d'emplois temporaires pour les chômeurs, revenu minimum pour les chômeurs en fin de droit).

2. La relance de l'économie par des projets d'utilité publique (pas seulement dans le domaine des grands travaux de construction mais également dans le secteur tertiaire) et par le développement d'une politique économique active.

3. Le développement du partage du travail sous toutes ces formes (travail à temps partiel, diminution de la durée hebdomadaire du travail, congés de formation). A noter que le chômage est une forme de partage du travail particulièrement injuste entre ceux qui ont un emploi généralement à plein temps et ceux qui chôment généralement à plein temps aussi.

Le présent projet concerne le premier de ces trois axes, puisqu'il propose de modifier la loi cantonale en matière de chômage qui est en vigueur depuis 1984. Cette dernière contient essentiellement deux mesures :

1. Une assurance perte de gain en cas de maladie ou de maternité (PCMM). Cette assurance est facultative. Elle verse des indemnitéspour perte de gain aux chômeurs malades. Elle intervient après les30 premiers jours de maladie, qui eux sont couverts par la loi fédérale sur le chômage. Les indemnités genevoises peuvent aller jusqu'à concurrence de 270 indemnités. Cette assurance est financée pour 1/3 par des cotisations prélevées sur les indemnités de chômage et pour les 2/3 restants par l'Etat.

2. Les occupations temporaires (OT): de 3 à 12 mois selon l'âge du chômeur et la durée de son chômage. Dans ce cadre, les chômeurs sont engagés à l'Etat (ou dans une association sans but lucratif). Pendant la période de l'occupation temporaire, la personne touche un salaire et paye des cotisations sociales, ce qui signifie que, dans de nombreux cas, elle se crée un nouveau droit à des prestations fédérales de chômage. Le parcours normal d'un chômeur est donc le suivant: il bénéficie de ses indemnités de l'assurance fédérale, puis travaille à l'Etat en occupation temporaire, puis est indemnisé, à nouveau, par l'assurance-chômage et c'est seulement là qu'il arrive en fin de droit.

Cette législation a fait ses preuves, elle a montré notamment que les occupations temporaires qui permettent aux chômeurs de renouer avec le monde du travail sont extrêmement utiles. Cette mesure augmente l'aptitude au placement de la personne au chômage tout en évitant sa marginalisation. Tous les témoignages des personnes ayant bénéficié d'une occupation temporaire confirment les effets bénéfiques de cette mesure.

La nouvelle législation fédérale nécessite une adaptation de la présente loi pour qu'elle conserve toute son efficacité. Nous proposons donc de modifier une partie des articles concernant les occupations temporaires et nous reformulons également quelques articles dont l'application pose des problèmes. Enfin, nos propositions entraînant une dépense supplémentaire pour l'Etat, nous proposons un financement par une contribution sociale généralisée.

Notre projet de loi concrétise une partie importante du chapitre 6 de l'initiative «Pour l'emploi, contre l'exclusion» (IN 105), le financement est également repris des propositions faites par les syndicats dans cette initiative. Notre projet montre que, malgré les modifications de la loi fédérale, l'initiative 105 est réaliste et réalisable.

2. Adaptation des occupations temporairesà la nouvelle législation fédérale

2.1. Les nouvelles dispositions de la LACI

La nouvelle loi fédérale adoptée en juin dernier et qui entrera en vigueur pour partie le 1er janvier l996 et dans sa totalité le 1er janvier 1997 comporte de nombreuses modifications. Certaines pénalisent lourdement les chômeurs (délai de carence de 5 jours, augmentation des pénalités, etc.), d'autres proposent des améliorations (mesures actives, indemnisation pendant deux ans, etc.). Nous ne présenterons ici que celles qui influencent les occupations temporaires découlant de la législation genevoise.

Le parlement fédéral et les partenaires sociaux ont estimé qu'une législation moderne sur le chômage ne devait pas seulement verser un revenu de substitution mais également favoriser la réinsertion des chômeurs sur le marché de l'emploi. Dans cette perspective, le législateur fédéral a mis en place «les mesures actives». Ces dernières obligent le chômeur à exécuter un travail dans l'administration ou de suivre un cours pour continuer de bénéficier des indemnités de chômage. La dynamique introduite par ces mesures doit permettre aux chômeurs d'améliorer leurs connaissances professionnelles et /ou de garder un contact avec le monde du travail et par conséquent d'améliorer leurs chances de retrouver un emploi.

Actuellement un chômeur peut bénéficier au maximum de 400 in-demnités journalières (soit un peu plus de 18 mois)  pendant un «délai-cadre» de deux ans. Pour avoir droit à des prestations de chômage, la personne doit avoir cotisé au moins durant 6 mois dans les deux ans précédant le début du chômage.

La nouvelle loi prévoit les dispositions suivantes:

«Article 27, alinéa 2 (de la LACI)

L'assuré a droit à :

a) 150 indemnités journalières au plus jusqu'à 50 ans;

 250 indemnités journalières au plus à partir de 50 ans;

 400 indemnités journalières au plus à partir de 60 ans;

 520 indemnités journalières au plus s'il touche une rente de l'assurance-invalidité ou de l'assurance-accident obligatoire, ou s'il en a demandé une et que sa demande ne semble pas vouée à l'échec.

b) Des indemnités journalières spécifiques selon l'article 59b dans les limites du délai-cadre d'indemnisation de deux ans, sauf disposition contraire de la présente loi.»

Les articles 59 et suivants décrivent les mesures actives qui permettent de toucher des indemnités journalières spécifiques au-delà des limites fixées à l'article 27, alinéa 1. En d'autres termes, un chômeur de moins de 50 ans touchera, dans un premier temps, 150 indemnités de chômage aux mêmes conditions que celles en vigueur aujourd'hui. Ensuite, pour continuer de bénéficier du chômage, il devra suivre une formation ou accepter un emploi temporaire proposé par les services du chômage. S'il satisfait à cette exigence, il pourra bénéficier de 370 indemnités supplémentaires. La durée totale de son chômage sera donc de 520 indemnités (150 +370), soit 2 ans.

A la demande des cantons fortement touchés par le chômage, le nombre total des places pour des mesures actives est limité à 25 000. Pour Genève, on parle d'un nombre avoisinant les 2000. Les chômeurs qui ne pourront pas bénéficier d'une mesure active en raison de cette limitation toucheront quand même un total de 520 indemnités.

Les personnes qui bénéficieront d'un emploi temporaire dans le cadre des mesures actives ne cotiseront pas à l'assurance-chômage puisqu'elles ne toucheront pas un salaire, mais des indemnités de chômage.

Enfin, une personne qui a déjà bénéficié du chômage devra cotiser pendant 12 mois à l'assurance-chômage pour ouvrir un nouveau droit à des prestations (actuellement cette durée est de 6 mois).

2.2. Les raisons pour lesquelles la loi genevoise doit être modifiée

Aujourd'hui le parcours type d'un chômeur ayant travaillé plus de18 mois avant de perdre son emploi, est le suivant :

Il bénéfice tout d'abord de 400 indemnités journalières (selon la loi fédérale), soit 18 mois. Ensuite, il a droit à 6 mois d'occupation temporaire (selon la loi genevoise). Ces 6 mois de travail lui donnent droit (selon la loi fédérale) à 170 nouvelles indemnités journalières. A ce moment-là, il est en fin de droit et, s'il n'a pas d'autre revenu, il peut bénéficier du RMCAS.

Si la loi genevoise n'était pas modifiée, en fonction de la nouvelle LACI, le parcours de notre chômeur serait le suivant:

Il bénéficierait tout d'abord de 150 indemnités journalières (selon le droit fédéral 18 mois). Ensuite, il aurait droit à 370 indemnités à condition qu'il accepte un emploi temporaire (dans le cadre des mesures actives de la LACI) Puis, de 6 mois d'occupation temporaire (selon la loi genevoise). Ces 6 mois de travail ne lui donneraient pas droit à de nouvelles indemnités journalières; il serait en fin de droit et pourrait bénéficier du RMCAS.

Nous constatons que les occupations temporaires de 6 mois prévues par la loi genevoise n'ouvriraient plus un nouveau droit à des indemnités fédérales et perdraient de ce fait une partie importante de leur efficacité.

A relever aussi que l'assurance-chômage finançant les mesures actives, la confédération ne subventionnera plus les occupations temporaires genevoises (actuellement les subventions fédérales représentent les 9% de la dépense globale).

2.3. Nos propositions

Nous avons adapté la législation genevoise pour tenir compte à la fois des modifications intervenues dans la LACI et des propositions contenues dans l'initiative des syndicats «Pour l'emploi, contre l'exclusion».

L'idée de base est qu'il faut dans toute la mesure du possible maintenir les gens dans le circuit de l'emploi pour éviter la perte des compétences et la marginalisation.

Pour atteindre cet objectif, nous avons prolongé de 6 à 12 mois la durée des occupations temporaires pour qu'elles continuent de redonner un droit à des prestations fédérales. Nous avons également abrogé l'article limitant à une occupation tous les 2 délais-cadre.

Avec notre proposition, une personne au chômage serait indemnisée pendant 2 ans par la législation fédérale (indemnité et mesures actives), puis travaillerait une année dans le cadre des occupations temporaires cantonales. Si elle est toujours sans emploi elle pourrait recommencer à toucher des prestations fédérales pendant 2 ans puis une année d'occupation temporaire, etc. Théoriquement une personne de devrait pas arriver en fin de droit.

Nous pensons que la situation du chômeur perpétuel est une hypothèse théorique. En effet, les mesures actives, l'amélioration des offices de placement et la dynamique engendrée par les occupations temporaires devraient permettre à la grande majorité des chômeurs de retrouver un emploi dans un délai inférieur à 3 ans. A notre avis, les seules personnes susceptibles d'avoir plusieurs occupations temporaires entrecoupées par des périodes de chômage sont celles qui, en raison de leur âge, posent un problème de réinsertion professionnelle important. A ce sujet, rappelons que, pour elles, un arrêté du Conseil d'Etat prévoit déjà aujourd'hui d'avoir deux occupations temporaires de suite.

En cas d'aggravation de la situation économique accompagnée d'une augmentation massive du chômage, les solutions devront être trouvées en amont du chômage (partage du travail, projet de relance, etc.) et non dans le traitement social du chômage. L'expérience des pays voisins qui connaissent un fort taux de chômage depuis de nombreuses années montrent les limites d'une politique basée uniquement sur le traitement social du chômage: frac-ture sociale, augmentation de la délinquance, etc. Il faut donc tirer les conclu-sions de ce constat et réserver les mesures que nous proposons pour traverser une période difficile. En temps normal, elles ne doivent bénéficier qu'aux personnes qui ont le plus de peine à s'insérer dans le monde du travail.

Enfin, nous avons adapté un article aux modifications fédérales et deux articles à des décisions de la commission cantonale de recours en matière de chômage (voir dans le commentaire article par article)

3. Financement

Il est difficile d'évaluer avec précision le coût de nos propositions, dans la mesure où il est directement lié à une variable que nous ne maîtrisons pas: l'évolution de la conjoncture. Il est évident que si le nombre de chômeurs de longue durée devait diminuer, en raison d'une reprise de l'activité économique ou d'un meilleur partage du travail, le nombre de bénéficiaires des occu-pations temporaires diminuerait aussi.

Nous avons évaluer le coût de nos propositions à partir des données à notre disposition et en faisant un certain nombre d'hypothèses. Nous avons également mis en place un financement des modifications légales proposées.

3.1. Evaluation des coûts de nos propositions

Le budget 1995 prévoyait pour le financement des occupations temporaires un montant total de 55 000 000 F. Pour l996, le Conseil d'Etat propose une somme de 69 500 000 F. A relever que les 9% de ces dépenses sont remboursées par la Confédération sous la forme de subventions (qui disparaîtront avec la nouvelle LACI).

Pour le RMCAS versé aux chômeurs en fin de droit, le budget 1995 prévoyait un montant total de 12 248 000 F; pour l996 le Conseil d'Etat propose une somme de 27 048 000 F.

La nouvelle LACI et nos propositions vont modifier ces chiffres, certains à la hausse, d'autres à la baisse.

Le doublement de la durée des occupations temporaires multiplierait par deux le montant des prestations de l'Etat si le nombre des chômeurs en fin de droit restait constant.

Les nouvelles dispositions de la LACI allongeront le délai entre le début du chômage et le début des occupations temporaires. Actuellement ce délai varie entre 8 mois et 18 mois; avec la nouvelle LACI, il sera dans tous les cas de 2 ans. Cette augmentation devrait largement compenser les coûts de la répétition des occupations temporaires et, en plus, faire diminuer de l'ordre de 5% le nombre des personnes en occupation temporaire (l'augmentation de la période d'indemnisation est multipliée par un 1,3 pour ceux qui ont 18 mois aujourd'hui et 3 pour ceux qui n'ont que 8 mois).

Sans faire preuve d'un optimisme excessif, nous estimons que les mesures actives permettront de faire diminuer d'au mois 20% le nombre des personnes en fin de droit.

L'augmentation de la durée des prestations fédérales et des occupations temporaires et le fait que ces dernières peuvent être accordées plusieurs fois de suite vont faire chuter de manière drastique le coût du RMCAS. Nous estimons que les prestations du RMCAS ne devraient plus que concerner des dossiers en cours ne pouvant pas bénéficier des nouvelles dispositions. Nous estimons que le coût du RMCAS ne devrait pas dépasser une somme annuelle de 10 000 000 F, soit une économie de l'ordre de 17 000 000 F par rapport au montant budgétisé pour l996.

A partir de ces éléments, si nous raisonnons à partir des chiffres de 1995, nous obtenons les résultats suivants (en millions de francs):

Doublement des OT

0155 x 2 =

110,25

Suppression de la subvention fédérale

+6,25

Augmentation des prestations de la LACI

0-110 x 5%

-5,55

25% de fin de droit en moins

-110 x 20%

-22,25

Diminution du RMCAS

-2,22

Coût total

86,.33

Augmentation des coûts

186,8 - 55 =

31,33

Si nous raisonnons maintenant à partir des chiffres de 1996, nous obtenons les résultats suivants (en millions de francs):

Doublement des OT

169, 5 x 2 =

139,25

Suppression de la subvention fédérale

+6,25

Augmentation des prestations de la LACI

0-139 x 5 %

-6,95

25% de fin de droit en moins

0-139 x 20%

-27,80

Diminution du RMCAS

-17,20

Coût total

93,30

Augmentation des coûts

93,3 - 69,5 =

23,80

Nous constatons que le coût supplémentaire pour l'Etat serait de l'ordre de 30 000 000 F.

3.2. la Contribution sociale généralisée (CSG)

Nous pensons tout d'abord que l'effort de l'Etat en faveur des personnes qui ont épuisé leurs prestations fédérales ne doit pas diminuer. Par conséquent, nous ne faisons des propositions que pour l'augmentation des coûts liée à nos propositions.

Nous pensons ensuite que le financement pourrait se faire avec l'augmentation des ressources de l'Etat en cas d'acceptation des initiatives fiscales 101 et 102. Ces initiatives prévoient d'affecter les nouvelles ressources qu'elles génèrent à améliorer les prestations sociales, notamment dans le domaine du chômage.

Si ces deux modes de financement sont insuffisants, de nouvelles ressources sont proposées. Nous avons repris la proposition contenue dans l'initiative «pour l'emploi, contre l'exclusion» au point 8:

«Pour financer le nouveau programme d'OT, complémentaire à celui prévu aujourd'hui par la loi, et le fonds cantonal de chômage, une contribution sociale généralisée est instituée. Elle est prélevée en pour-cent, sans plafond, sur tous les revenus du capital, du travail et des transferts. Son montant est fixé au vu de l'estimation du coût des mesures envisagées et a un caractère temporaire dépendant des résultats de la lutte contre le chômage.»

Nous avons formulé en article de loi, les propositions des syndicats. La contribution sociale généralisée est une forme de financement des pro-grammes sociaux déjà en vigueur dans certains pays voisins, notamment la France. Contrairement à l'impôt, le taux n'est pas progressif et contrairement à la taxe, elle est proportionnelle aux revenus du contribuable. Elle ressemble donc aux cotisations de l'AVS dont le taux est le même pour l'ensemble des personnes assujetties.

Un des avantages de la contribution sociale généralisée est de toucher de la même manière l'ensemble des revenus (du travail, du capital et des transferts) et pas seulement ceux du travail comme c'est le cas pour de nombreuses cotisations sociales. Il ne serait pas judicieux de financer par les seuls revenus du travail des mesures destinées à venir en aide à des chômeurs.

Nous avons également repris l'idée des syndicats de soumettre tous les revenus sans plancher et sans plafond. S'agissant d'une mesure de solidarité il est juste que tout le monde y participe. Les chômeurs participent aujourd'hui au financement de l'AVS, il ne nous semble pas choquant que des retraités participent au financement d'un programme d'aide aux chômeurs. D'autant plus que la population retraitée n'est pas homogène quant à ses capacités financières. De plus, il nous semble préférable d'appliquer un taux extrêmement bas à l'ensemble de la population plutôt que d'appliquer un taux moyen à une partie seulement de la population.

Nous pensons que, puisqu'il s'agit d'une mesure limitée dans le temps, il est judicieux de l'affecter. Dans le même état esprit, les Neuchâtelois ont créé un impôt de crise limité dans le temps et destiné à financer des programmes de lutte contre le chômage.

L'ensemble des revenus bruts à Genève est de l'ordre de 15 milliards de francs selon les déclarations de l'administration fiscale. Une contribution sociale généralisée à un taux de 1% rapporterait donc environ 150 000 000 F, soit 15 millions de francs pour 0,1%.

L'estimation que nous avons faite au chapitre précédent met en évidence une augmentation des dépenses de l'ordre de 30 000 000 F. Nous avons prévu un taux maximum de 0,3%, ce qui permettrait de rapporter 45 000 000 F. Nous avons volontairement laissé une marge en raison de l'évolution de la conjoncture et d'erreurs liées aux évaluations que nous avons dû faire dans nos calculs. En cas d'acceptation des initiatives fiscales, ce taux devrait être revu à la baisse.

4. Commentaires article par article

4.1. De la modification de loi cantonale sur le chômage

Article 9, lettre b (nouvelle teneur), article. 23, lettre b (nouvelle teneur)

Ces articles fixent les conditions de domicile que le chômeur doit remplir pour bénéficier des prestations cantonales. La lettre a concerne les Genevois et ne pose pas de problème. Pour les étrangers et les Confédérés, il est prévu une durée de domiciliation dans le canton d'une année. Nous ne proposons pas de modifier ce principe, mais de modifier la rédaction. La version actuelle précise que le chômeur étranger doit être en possession d'un permis B ou C. Or, depuis l'entrée en vigueur de cette législation, de nombreux permis ont vu le jour, notamment les permis F destinés aux personnes qui ne peuvent pas être rapatriées et qui ne remplissent pas les conditions pour obtenir l'asile politique (les réfugiés de la violence par exemple) . Normalement ces permis devraient être de courte durée. Or, les cas de personnes au bénéfice d'un permis F depuis plusieurs années sont de plus en plus fréquents. La commission cantonale de recours en matière de chômage a admis, en raison du principe de l'égalité de traitement, qu'un détenteur d'un permis F avait droit à une occupation temporaire s'il remplissait toutes les autres conditions. La nouvelle rédaction de cet article prend en compte les considérants de la commission cantonale de recours en matière de chômage. Cette modification ne concernera que quelques personnes par année.

Article 24, lettre c (nouvelle teneur)

Actuellement la durée maximum des pénalités de la LACI est de40 indemnités journalières. La loi cantonale prévoit de refuser une OT à un chômeur qui aurait une pénalité de plus 20 jours pour refus d'acceptation d'un emploi convenable ou pour manque de recherches personnelles d'emploi. Dans la nouvelle LACI la pénalité maximum passe de 40 à 60 jours, c'est pourquoi nous proposons d'augmenter dans la même proportion le nombre de jours qui justifie un refus d'une OT. Ce dernier passera de 20 à 30 jours.

Article 25, alinéa 1 (nouvelle teneur)

alinéas 2 et 3 (abrogé)

Voir les explications données ci-dessus dans le chapitre intitulé «Adaptation des occupations temporaires à la nouvelle législation fédérale».

Article 26 (abrogé)

Voir les explications données ci-dessus dans le chapitre intitulé: «Adaptation des occupations temporaires à la nouvelle législation fédérale».

4.2. De la loi fiscale

Article 379 (nouveau)

Cet article précise le cercle des personnes soumises à la contribution sociale généralisée. Cette dernière concerne l'ensemble des revenus (du travail, du capital et des rentes). Elle n'est réclamée que si le chômage est important et persistant, c'est-à-dire si les améliorations de la loi engendrent des coûts supérieurs à ceux prévus pour 1996.

Article 380 (nouveau)

Un taux maximum est inscrit dans la loi. Chaque année, le Conseil d'Etat fixe le taux en fonction des besoins. En cas de diminution importante du chômage le taux serait égal à 0. La contribution sociale généralisée doit être considéré comme une mesure de solidarité limitée aux périodes de crise.

Article 381 (nouveau)

La contribution sociale généralisée est destinée à ne financer que les frais supplémentaires résultant du projet de loi et non à se substituer au financement actuel des occupations temporaires qui se fait par la fiscalité. Ce dernier mode étant plus social.

S'agissant d'une mesure de crise, donc limitée dans le temps, il nous semble logique d'affecter son produit.

Article 382 (nouveau)

La contribution sociale généralisée est encaissée par l'administration fiscale de la même manière que les impôts communaux et cantonaux.

Article 3

L'entrée en vigueur des mesures «actives» de la nouvelle LACI est fixée au 1er janvier l997. En fonction des dispositions transitoires du droit fédéral, il sera probablement nécessaire de modifier la loi genevoise, dans le courant de l'année 1996. La totalité des dispositions transitoires n'étant pas encore connues nous laissons au Conseil d'Etat le soin de fixer l'entrée en vigueur des modifications qui vous sont proposées.

5. Conclusions

Compte tenu de l'importance du problème du chômage et des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement ce projet de loi.

Préconsultation

Mme Liliane Johner (AdG). Monsieur le président, vous avez reçu une lettre que vous a adressée le Syndicat du livre et du papier et l'Association de défense des chômeurs. Pourrions-nous en avoir la lecture ?

Le président. Bien sûr, je demande à Madame la secrétaire de bien vouloir procéder à cette lecture.

Annexe lettre lue

M. Pierre-Alain Champod (S). Le chômage est le problème social numéro un dans notre canton. Nous devons lutter contre ce fléau par différents moyens, dont le partage du travail et les mesures actives pour favoriser la réinsertion des personnes dans le circuit du travail.

Un certain nombre de ces mesures demanderont du temps pour être mises en place, et nous devons, en attendant, aider les chômeurs à traverser le moins mal possible cette période. Nous devons, en particulier, éviter le chômage de longue durée et c'est pour les personnes concernées que nous avons rédigé ce projet de loi, en nous inspirant, il est vrai, de l'initiative des syndicats «Pour l'emploi contre l'exclusion». Afin de compléter l'exposé que vous avez sous les yeux, je ferai quatre remarques :

La première concerne les occupations temporaires. La législation genevoise connaît un système d'occupation temporaire, depuis 1984, qui a fait ses preuves, puisqu'il permet de remettre les chômeurs dans le circuit du travail et évite ainsi leur marginalisation. Nous reconnaissons l'efficacité du modèle genevois, et c'est la raison pour laquelle nous souhaitons l'appliquer à la nouvelle législation fédérale.

Ma deuxième remarque concerne la nécessité de modifier la loi genevoise pour l'appliquer aux nouvelles dispositions fédérales. Je n'entrerai pas, ici, dans tous les aspects de la modification de la loi sur le chômage, et ne me bornerai qu'à évoquer ceux qui ont des incidences sur la loi genevoise.

La durée des prestations s'étendra sur vingt-quatre mois, alors qu'actuellement elle varie entre huit et dix-huit mois, selon la durée de travail - donc de cotisations - précédant le chômage.

Les chômeurs ne toucheront plus simplement des indemnités, comme c'est le cas actuellement, mais, en fonction de leur âge, ils devront, après avoir bénéficié d'un certain nombre d'indemnités, entrer dans les programmes de mesures actives, c'est-à-dire de formation ou d'emploi temporaire, pour pouvoir continuer à les percevoir. Durant la période d'emploi temporaire, ils ne recevront pas de salaire, mais des indemnités de chômage, ce qui signifie que les cotisations de chômage ne seront pas prélevées sur ces gains.

L'augmentation de la durée de période d'indemnisation, associée aux mesures actives, devrait provoquer une diminution du nombre des chômeurs de longue durée.

Mais la personne qui aura déjà été une première fois au chômage devra cotiser durant douze mois, pour ouvrir une deuxième période cadre donnant droit à de nouvelles indemnités - actuellement six mois suffisent. Cette augmentation de six à douze mois nous oblige à modifier la loi cantonale, si nous souhaitons que le chômeur puisse bénéficier des prestations fédérales, après avoir bénéficié d'une occupation temporaire, selon la loi genevoise.

Les prestations fédérales, après une période d'occupation temporaire cantonale, permettent une péréquation sur l'ensemble de la Suisse - entre les régions plus ou moins touchées par le chômage - alors que, dans le système actuel, les chômeurs arrivant en fin de droit sont entièrement à la charge du canton.

La troisième remarque concerne les réactions de la presse après la présentation de notre projet de loi. Beaucoup de journaux ont insisté sur le fait que certaines personnes pourraient rester très longtemps dans le circuit du chômage. Nous tenons à dire ici qu'il s'agit d'une simple hypothèse. A notre avis, les seules personnes qui pourraient rester relativement longtemps dans cette situation sont celles qui sont proches de la retraite, car la reprise d'un emploi est plus problématique pour elles. Le canton de Genève en est d'ailleurs conscient puisque, par un arrêté, le Conseil d'Etat a modifié la loi actuelle, pour permettre à ces personnes, proches de l'âge de la retraite d'avoir deux occupations temporaires de suite, alors que la loi n'en prévoit qu'une.

D'autre part, on a souvent dit que cette loi, qui permet théoriquement une longue période de chômage, est une incitation à la paresse. Il n'en est rien. Prenons l'exemple d'un chômeur âgé de trente ans qui recevrait des indemnités fédérales pendant huit mois. Du huitième au vingt-quatrième mois, il devra soit être en formation, soit avoir une occupation temporaire organisée par la Confédération. Puis il bénéficiera d'une occupation temporaire genevoise d'une durée d'une année. Cette personne sera donc active et continuera de l'être, selon ce projet de loi. Si elle n'a toujours pas retrouvé un emploi, elle aura à nouveau droit à cent septante indemnités et se retrouvera à nouveau dans le cycle des mesures actives de la Confédération.

Pour répondre à l'hypothèse selon laquelle un chômeur resterait longtemps dans le circuit du chômage, je reconnais que nous avons souvent été critiques par rapport aux services de l'office cantonal de l'emploi, mais il faut avouer que nous ne pouvons imaginer qu'une personne puisse rester cinq ans au chômage, sans que les services de cet office ne lui retrouvent un travail. J'imagine que personne dans cette enceinte ne pense que les services de M. Maitre soient si peu efficaces !

Quatrièmement, le financement. Nous avons repris l'idée d'une contribution sociale généralisée, telle qu'elle a été mise en place par le gouvernement Rocard et maintenue par les gouvernements de droite qui lui ont succédé, ce qui prouve qu'elle a une chance de susciter un certain consensus. La contribution sociale généralisée consisterait à imposer l'ensemble des revenus du travail, du capital et des transferts. Contrairement à l'impôt, cette contribution n'est pas progressive, mais proportionnelle aux revenus. Elle ressemble un peu au système des cotisations AVS : chacun paie le même taux, quel que soit son salaire.

Il s'agit d'une mesure de solidarité, et c'est la raison pour laquelle nous n'avons prévu ni plafond ni plancher dans notre projet de loi. Il convient, à ce propos, de rappeler que même les chômeurs qui touchent les indemnités les plus basses paient des cotisations à l'AVS.

Le financement que nous proposons ne doit pas couvrir l'ensemble des dépenses des occupations temporaires, mais uniquement l'augmentation qui résulte de notre projet de loi. La part que le canton assume aujourd'hui devra être maintenue. De plus, si les initiatives fiscales, à propos desquelles nous voterons en février, sont acceptées, une partie de leur produit pourrait être affectée au paiement de ces occupations temporaires.

Nous avons laissé le soin au Conseil d'Etat d'en adapter le taux en fonction des besoins, mais avons cependant fixé un taux maximum. En effet, si l'augmentation du chômage devait se poursuivre en Suisse et à Genève, ce ne sont pas des mesures semblables à celles que nous proposons qui devraient être développées. En effet, nous devrions agir en amont du chômage, en développant notamment le concept de partage du travail.

Le chômage est un problème important. Notre responsabilité, en tant que parlementaires, consiste à trouver des solutions pour lutter contre ses causes et aider ceux et celles qui en sont victimes. C'est dans cet esprit que nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer ce projet à la commission de l'économie, où nous aurons l'occasion d'en discuter les différents détails.

M. Nicolas Brunschwig (L). Le projet de loi 7301 a le mérite de poser la question fondamentale du futur de l'occupation temporaire, par rapport à la nouvelle loi fédérale. De plus, il la pose de manière plus concrète que les précédentes motions ou pétitions qui avaient été déposées sur ce sujet, car son exposé des motifs en développe les différents aspects, en particulier le financement. C'est donc avec intérêt que nous étudierons les différents problèmes que soulève ce projet de loi en commission. Cependant, un certain nombre de questions de principe, fort difficiles, doivent être soulevées aujourd'hui, dans le cadre de ce débat en préconsultation.

Un des premiers points à discuter - il a été évoqué par M. Champod - est le statut de «chômeur permanent» qui résulterait de l'adoption de ce projet. Après deux ans de prestations fédérales de chômage, le chômeur serait au bénéfice d'une année d'occupation temporaire, suivie de deux ans de prestations fédérales, et ainsi de suite, théoriquement indéfiniment. Cela pose des questions essentielles, même si le nombre de cas de personnes qui pourraient tomber dans ce cycle infernal est limité. Au niveau philosophique et politique, nous devons réfléchir à la voie à envisager, et je ne suis pas sûr que celle-ci soit la bonne.

La deuxième question essentielle a trait à l'impôt supplémentaire que vous souhaitez instaurer, soit la contribution sociale généralisée. Quels qu'en soient les modalités et le taux, c'est un impôt supplémentaire. Nous ne pensons pas qu'une telle mesure réduirait le chômage. Le remède envisagé pour enrayer les causes du chômage irait à contresens d'une diminution du taux de chômage, ce qui est parfaitement illogique.

La troisième question essentielle porte sur le coût. Vous avez fait des estimations partant de certaines hypothèses que l'on pourrait discuter à l'infini. Si ces hypothèses sont très difficiles à formuler dans la situation actuelle, le coût supplémentaire engendré est d'une certaine importance. Il faudra voir s'il est supportable, en tenant compte de l'effort important que consent actuellement le canton de Genève.

Je constate, avec intérêt, que vous reconnaissez que le système genevois des occupations temporaires est performant, efficace et social. Je regrette que vous ne nous donniez pas les moyens de le financer dans le cadre des votes du budget, car il est toujours facile de proposer de nouveaux systèmes sociaux mobilisant des fonds nouveaux sans, pour autant, voter le budget général de l'Etat.

A propos du nombre d'occupations temporaires que notre canton devra assurer, je vous rappelle que la nouvelle loi sur le chômage impose aux cantons, avec des pénalités pécuniaires, d'adopter des programmes de formation et d'occupation temporaire, déjà dans le délai-cadre des prestations fédérales, ce qui est une nouveauté. De plus, il faudra créer le nombre de postes suffisants pour assurer ces occupations temporaires qui seront sans doute plus nombreuses, compte tenu de la durée possible du chômage.

Par ailleurs, je vous rappelle que nous venons de voter une loi sur le revenu minimum d'aide sociale, qui prévoit des contre-prestations. C'est dire qu'il va falloir trouver un nombre extrêmement important d'activités compensatoires sous une forme ou une autre, ce qui ne se fera pas sans poser un certain nombre de problèmes d'ordre financier et pratique.

Ces quelques questions doivent mettre quelques bémols à votre réflexion par rapport à la nouvelle loi fédérale. C'est donc avec intérêt, mais surtout avec perplexité, que nous étudierons ce projet de loi en commission de l'économie.

M. Pierre Kunz (R). L'Alliance de gauche a déposé, il y a quelque temps, une motion réclamant un accroissement des dépenses de l'Etat en faveur des occupations temporaires. Il n'est donc pas vraiment étonnant que le parti socialiste suive, avec des exigences similaires. Pour faire bonne mesure, nos collègues socialistes déposent carrément un projet de loi, assorti d'un nouvel impôt : «La contribution sociale généralisée» !

Les radicaux, lors du débat préliminaire sur la motion de l'Alliance de gauche, avaient pris position en déclarant que le moment était effectivement venu de décider des modifications à apporter à la loi sur les occupations temporaires. Ils l'ont renvoyée à la commission de l'économie, sans en partager le contenu, du fait que celle-ci avait au moins l'avantage de poser la question : faut-il maintenir, réduire et mieux cibler les occupations temporaires ? Elle se pose à plus forte raison que Genève fait déjà beaucoup pour ses chômeurs.

S'agissant de ce projet de loi, les radicaux adopteront la même attitude et demanderont son renvoi à la commission de l'économie. Il pourra y être traité simultanément avec la motion. D'ores et déjà, les radicaux tiennent à exprimer leur ferme opposition à l'augmentation de la charge fiscale, que ce projet de loi entend introduire sur les revenus. Cette opposition se fonde aussi bien sur des motifs sociaux qu'économiques et politiques.

M. Bénédict Fontanet. Le mieux est l'ennemi du bien. Tout le monde est conscient que le chômage est un drame dont la Suisse et Genève n'ont malheureusement pas l'exclusivité. Le chômage peut être traité par la promotion économique, le maintien des emplois existants, la création d'entreprises, ainsi que le traitement social du chômage auquel se rapporte plus précisément ce projet de loi.

Le système suisse, sans vouloir revenir sur ce qui a été dit par mes préopinants, est sans doute l'un des plus complets sur le plan européen. Et, par rapport à ce système suisse, compte tenu du montant des indemnités, de leur nombre et leur durée, Genève fait mieux encore.

A le lire, on a le sentiment que c'est le projet de loi d'un «doux rêveur» ! Mais quel est le projet de société offert aux jeunes, si ce n'est celui du chômage perpétuel ? Une société ainsi définie ne me plaît pas. Il faut certes protéger les personnes en fin de droit. Nous l'avons fait l'hiver dernier, dans cette enceinte, en votant le revenu minimum d'aide sociale, destiné aux personnes parvenues au terme de leurs indemnités de chômage, mais je n'accepte pas un projet de société dans lequel des personnes, se trouvant au chômage, seraient considérées comme des assistées, jusqu'à ce qu'elles puissent percevoir leurs prestations AVS. Ce n'est pas satisfaisant, même si votre projet soulève, par ailleurs, quelques questions justifiées.

Battons-nous pour créer des entreprises ou pour en maintenir ! J'ai le plaisir de constater, Monsieur Champod, que vous voulez lutter contre les conséquences du chômage. Mais nous préférerions voir votre groupe soutenir activement des projets permettant de développer et de maintenir l'emploi, comme, par exemple, certains projets immobiliers que vous combattez souvent avec énergie. Traitons le problème du chômage, mais soyons également actifs lorsqu'il s'agit de promouvoir notre économie ou les grands projets porteurs pour notre canton.

S'agissant de notre canton, nous devons vous rendre grâce d'avoir eu le courage de prévoir un nouveau type d'impôt qui n'existe pas encore, celui d'une cotisation sociale généralisée. Mais une telle cotisation généralisée ne doit pas se limiter au seul problème du chômage; elle devrait être envisagée pour financer les transports, l'aide aux personnes âgées, etc. On ne peut pas l'envisager pour financer tout et n'importe quoi, car la charge fiscale a une limite et, selon le dicton «trop d'impôt tue l'impôt», il ne sert à rien d'imposer trop lourdement les contribuables; cela les incite à fuir notre canton.

Nous examinerons bien volontiers ce projet en commission, comme nous en avons le devoir, s'agissant du chômage et des chômeurs en fin de droit, mais nous ne souscrivons pas au projet de société que sous-tend votre projet.

M. Bernard Clerc (AdG). Nous accueillons favorablement ce projet de loi, pour sa partie concernant l'amélioration des prestations en faveur des chômeurs, notamment les propositions permettant, si elles sont acceptées, d'ouvrir un nouveau droit aux indemnités, par l'allongement de la durée des emplois temporaires.

Le terme d'occupation temporaire est, à mon avis, désobligeant à l'égard des chômeurs. Il donne la fausse impression qu'on fait une charité aux chômeurs, en leur procurant un emploi, alors qu'en réalité il s'agit d'emplois, comme nous avons vu dans l'examen du budget 1996, nécessaires au fonctionnement d'un certain nombre de services de l'Etat.

Les mesures liées au traitement social du chômage sont indispensables, mais la meilleure concerne, bien évidemment, la défense des emplois existants et la création de nouveaux emplois. Dans ce sens, j'aimerais rappeler l'initiative en faveur de la création d'emplois d'utilité publique et écologique, qui est une réponse appropriée, puisqu'elle permettra la création de cinq cents postes de travail et allégera le coût du traitement social du chômage.

Les remarques de MM. Brunschwig et Fontanet, concernant le chômage perpétuel, ou les chômeurs permanents, sont particulièrement désobligeantes et inadmissibles. Apparemment, vous n'avez jamais rencontré de chômeurs ! Vous insinuez que le seul objectif de ces personnes est de percevoir des indemnités et non pas de retrouver un emploi.

Par rapport à ce projet de loi, nous avons, par contre, une réserve importante à formuler au sujet du financement, non pas parce que «trop d'impôt tue l'impôt» mais parce que nous sommes perplexes quant à l'introduction d'une contribution sociale généralisée. En effet, cette taxe touche, avec son taux unique, davantage les bas revenus, à l'instar de la TVA.

L'étude menée par le professeur Hugouneng démontre que ceux qui supportent le plus le poids d'une contribution sociale généralisée sont les chômeurs, les retraités et les ménages aisés de petite taille. Une telle contribution mérite un débat de fond, et il n'est pas heureux de vouloir l'introduire par la «petite porte», à l'occasion d'un débat sur le chômage. Compte tenu de l'ensemble des éléments de ce projet de loi, nous sommes favorables à son renvoi en commission.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Le vote, au mois de juin dernier, sur la nouvelle loi sur l'assurance-chômage ou sur sa révision importante entraîne, effectivement, un certain nombre d'adaptations des textes genevois concernant les emplois temporaires.

Mais nous avons du temps pour cela. En effet, la partie de la loi se rapportant au financement des mesures actives, aux mesures actives elles-mêmes et à leur application, de même qu'aux conséquences des emplois temporaires et des mécanismes qui permettent de bénéficier d'un nouveau délai-cadre d'indemnisation, entrera en vigueur au 1er janvier 1997. Il est même possible, à entendre ce qui se dit du côté de l'OFIAMT, qu'elle entre en vigueur au 1er janvier 1997, avec une remise - si vous me permettez l'expression - des compteurs à zéro, ce qui signifie que tout le monde entamerait un nouveau délai-cadre à ce moment-là. Cela reporterait d'autant la problématique des emplois temporaires pour ce qui concerne les chômeurs en fin de droit.

Il faudra donc travailler de manière attentive et concertée à l'adaptation du système genevois au nouveau cadre prévu par le droit fédéral - et nous nous y sommes déjà engagés. Un certain nombre d'orientations ont d'ailleurs déjà été préconisées au sein de l'office cantonal de l'emploi. Elles feront l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux. Tous ces travaux doivent tenir compte du nouvel objectif de la loi sur le chômage.

J'ai le sentiment, à cet égard, que le projet de loi socialiste traduit - ou trahit - une sorte de pessimisme fondamental, s'agissant du changement de philosophie de la loi sur le chômage, qui consiste à vouloir privilégier les mesures actives et non plus les seules indemnisations.

La nouvelle loi fédérale sur le chômage, avec les mesures actives qui interviennent en cours d'indemnisation, y compris les emplois temporaires, induit une nouvelle dynamique qui devrait réduire la problématique des chômeurs en fin de droit. Je ne puis donc partager le pessimisme sous-jacent du projet de loi socialiste.

Qu'il me soit ici permis de vous dire que le canton de Genève a restructuré en profondeur l'office cantonal de l'emploi en anticipant la révision de la loi sur l'assurance-chômage. Je puis vous annoncer, avec beaucoup de plaisir, que l'OFIAMT nous a confirmé, il y a une dizaine de jours, que la réorganisation de l'office cantonal de l'emploi entrait pleinement dans la cible de la nouvelle LACI. Nous sommes le premier et, en l'état, le seul canton prêt à appliquer ces nouvelles dispositions.

Dans le projet socialiste, même s'il faut l'exprimer avec mesure - et je partage à ce point de vue le souci de M. Clerc - nous ne pouvons pas voir, a priori, derrière le visage d'un chômeur, celui d'une personne qui cherche avant tout à profiter de la situation dans laquelle elle se trouve. Je suis convaincu que l'écrasante majorité des chômeurs sont des personnes qui ne demandent qu'à retrouver un travail qui leur convienne, dans les délais les plus rapides. Mais on ne peut cependant pas sous-estimer le fait que quelques chômeurs sont tentés de tirer le maximum d'avantages du système, de même que quelques employeurs peuvent être tentés - et dans certains cas passer à l'acte - de tirer parti des avantages d'un système. Il y a parfois une symétrie des abus...

Objectivement et techniquement, le système que vous proposez pourrait, dans le cas d'un chômeur qui ne serait pas motivé par un retour à l'emploi, lui permettre d'en bénéficier exagérément. Nous devons en parler sérieusement et sans a priori.

En ce qui concerne les coûts, il faudra bien qu'on s'en s'explique et qu'on fasse une évaluation approfondie en commission. Vous avez évoqué, dans le cadre de votre projet de loi et dans les motifs qui l'accompagnent, une hypothèse de coûts à hauteur de 30 millions par année. Sur la base des estimations qui ont été faites, par l'office cantonal, en prenant les mêmes scénarios que les vôtres, nous atteignons des chiffres annuels de 135 à 138 millions, et cela dès la première année. Il faut tenir compte d'un effet cumulatif, du fait que des chômeurs pourraient amorcer successivement plusieurs délais-cadres.

Nous nous trouvons donc face à un problème tout à fait sérieux que nous devons aborder de manière objective, sereine. Quel délai convenable faudra-t-il fixer dans le cas de chômeurs en fin de droit, approchant de l'âge de la retraite, et qui ont un droit évident à bénéficier de dispositions leur permettant de réamorcer des délais-cadres d'indemnisation ? Des évaluations sont en cours, car il y a d'autres situations où cela peut également être envisagé.

Ce qui me frappe également dans votre proposition, c'est qu'elle aurait pour effet de passer par pertes et profits le revenu minimum cantonal d'aide sociale et l'allocation d'insertion. Si votre proposition était admise, le système mis en place, qui répondait à vos voeux et dont Genève a lieu d'être fière - environ huit cent trente personnes en bénéficient - ne servirait pratiquement plus à rien, puisque nous aurions des délais-cadres d'indemnisation qui se réamorceraient à l'issue de chaque période d'emploi temporaire de douze mois au minimum. Cela n'est pas concevable. Nous devons continuer à agir avec le revenu minimum cantonal d'aide sociale, qui est allié à une contre-prestation et permet, par l'allocation d'insertion, le démarrage d'un certain nombre de projets professionnels qui sont utiles.

Nous débattrons en commission et aurons des discussions avec nos partenaires sociaux. Je puis, à cet égard, vous donner une bonne nouvelle : la tension qui existait avec ces partenaires, à la suite de la décision d'invalidation de l'initiative 105, devrait trouver un terme. J'ai pris la responsabilité, la semaine dernière, de convoquer le responsable de la CGAS et un secrétaire permanent de l'UAPG pour leur faire un certain nombre de propositions et tenter de retrouver le chemin du dialogue. Ces propositions ont été admises. Les groupes de travail, qui ont été constitués, peuvent démarrer leurs activités cette année déjà; une réunion d'un groupe de travail chargé de la problématique chômage et emploi temporaire est prévue la semaine prochaine. L'autre groupe de travail sur la politique économique est également constitué. Nous avons réamorcé les conditions d'un dialogue qui, je l'espère, sera serein et fructueux pour notre canton.

Ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.

 

M 1028
9. Proposition de motion de MM. Christian Grobet, Christian Ferrazino, Pierre Vanek et Jean Spielmann visant à promouvoir une stratégie industrielle à Genève. ( )M1028

LE GRAND CONSEIL,

vu les graves difficultés rencontrées par les activités industrielles à Genève, qui constituent un secteur important de notre économie;

vu la mise en faillite de l'entreprise Tavaro, la demande d'ajournement de faillite de la SIP, dont la situation paraît désespérée;

vu la fermeture intervenue ces dernières années de diverses entreprises industrielles telles que Tarex, Hispano Suiza, Motosacoche, Technicair, Cuenodtherm, Sarcem, ainsi que les diminutions d'activités d'autres entreprises telles que Les Ateliers des Charmilles, ABB Sécheron, Gardy, Kugler, etc.;

vu la nécessité de mener une politique active pour préserver l'industrie genevoise et l'importance que revêt à cette fin le maintien des zones industrielles et artisanales,

invite le Conseil d'Etat

- à lui présenter un rapport sur sa stratégie de préservation et de développement du secteur industriel à Genève et des moyens mis en oeuvre à cet effet;

- à lui présenter un rapport sur sa politique de préservation et de valorisation des zones industrielles et artisanales avec un inventaire des terrains de réserve destinés à des activités industrielles et artisanales ainsi que la liste des entreprises industrielles et artisanales à la recherche de terrains ou de locaux et l'inventaire des locaux commerciaux et administratifs inoccupés, en cours de construction ou susceptibles d'être construits sur des terrains destinés à cet effet;

- à encourager, notamment par une intervention active de la FIPA et en recherchant une collaboration avec les communes, la construction et l'aménagement de locaux industriels et artisanaux bon marché pour des petites et moyennes entreprises;

- à créer un fonds pour le développement de l'industrie genevoise, financé par l'Etat, les communes et la Banque cantonale.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'industrie genevoise est en péril. L'une après l'autre, un certain nombre de grosses entreprises traditionnelles de la métallurgie ont cessé ou fortement diminué leurs activités. Indépendamment des actions qui auraient pu être menées pour sauver tout ou partie de leurs activités, il est primordial - tout en restant dans un cadre raisonnable - de mener une politique active permettant le maintien - et si possible le développement - du secteur secondaire à Genève, afin de bénéficier d'une économie aussi diversifiée que possible.

Face à cette situation et à l'importante mutation que connaît l'industrie genevoise, aux restructurations des entreprises, il convient que l'Etat mène une politique active dans le cadre d'une stratégie industrielle qui ait des objectifs clairs, connue par les principaux intéressés et par la population. L'Etat doit aussi se doter des moyens permettant de mener une telle politique et favorisant les reconversions.

A cet égard, la création de nouvelles entreprises, notamment de petites entreprises qui résistent mieux à l'évolution du secteur industriel dans notre pays, ainsi que le développement des petites entreprises existantes constituent une priorité. Une des conditions essentielles, c'est que ces entreprises puissent bénéficier de terrains et de locaux bon marché ainsi que d'un appui en matière d'investissements.

Or, un des obstacles majeurs auxquels se heurte toute nouvelle industrie ou entreprise qui a besoin de locaux supplémentaires, c'est précisément de trouver des locaux ou des terrains bon marché. A ce sujet, les zones industrielles et artisanales jouent un rôle déterminant grâce à un prix du terrain qui reste bas comparé à celui des autres zones, pour autant que ces zones restent effectivement affectées à des activités industrielles ou artisanales. Dès que des terrains situés dans une telle zone - du moins s'ils sont en mains privées - peuvent être affectés à d'autres activités, telles que des activités commerciales ou administratives, le prix du terrain dans ces zones connaît de fortes hausses et devient incompatible avec des activités industrielles ou artisanales, comme on l'a vu, par exemple, dans les zones industrielles des Acacias ou de la Susette, au Grand-Saconnex, ce qui a, du reste, amené le découpage de cette dernière zone en différents secteurs affectés à des activités différentes afin de réserver un secteur aux seules activités industrielles et artisanales. Ces expériences malheureuses ont démontré le leurre que constitue la mixité, préconisée par d'aucuns, dans des zones industrielles et artisanales, les activités dégageant la plus forte rentabilité fixant le prix du terrain pour toute la zone, avec les conséquences désastreuses qui en résultent pour les activités industrielles et artisanales.

C'est dire l'importance de veiller au respect des normes applicables aux zones industrielles et artisanales et de conserver des terrains de réserve dans ces zones pour permettre de répondre aux besoins de nouvelles entreprises.

C'est pour cette raison que le déclassement de terrains industriels au profit d'autres types d'activités est préjudiciable à l'avenir de notre industrie et il convient de veiller à la conservation de ce patrimoine industriel. Souvent, ces modifications de zones résultent du désir de tirer profit de terrains acquis bon marché ou ayant fait l'objet d'opérations spéculatives, à savoir leur achat à des prix incompatibles avec des activités industrielles ou artisanales, ce qui amène leur propriétaire à rechercher d'autres activités commerciales ou administratives susceptibles de payer une rente foncière plus élevée, comme cela a été mis en évidence dans le cadre de la procédure de déclassement d'une zone artisanale à Thônex (route de Jussy) au profit d'activités administratives ou commerciales (PL 7250), laquelle constitue un «cas d'école».

Le département des travaux publics et de l'énergie a mis à l'enquête publique trois autres projets de déclassement de terrains industriels, à savoir:

- un terrain de plus de 10 000 m2 au chemin de l'Etang, commune de Vernier, en bordure de la route de Meyrin, dans le but d'y construire un bâtiment administratif et commercial ayant une surface de 18 000 m2 de plancher;

- un terrain de 16 000 m2, situé dans la zone industrielle de Meyrin (ZODIM) entre le chemin du Grand-Puits et la route de Meyrin, dans le but d'y réaliser un centre commercial et des locaux administratifs;

- un terrain à la rampe du Pont-Rouge à Lancy, afin de réaliser un bâtiment administratif et commercial.

Dans chaque cas, l'exposé des motifs des projets mis à l'enquête publique indique que la zone industrielle est maintenue, mais qu'elle est également destinée à des activités commerciales et industrielles. Il est évident, comme l'examen du projet de déclassement à Thônex l'a démontré, que les bâtiments futurs serviront exclusivement à des activités commerciales et administratives et que le prétendu maintien de la zone industrielle est une pure fiction. Les bâtiments sont conçus pour des locaux commerciaux et des bureaux et les loyers seront fixés en conséquence.

De fait, il s'agit de la perte de terrains non bâtis, équipés, d'une surface importante et d'un seul tenant, qui sont idéaux pour l'industrie et l'artisanat. Cette perte serait très grave pour le secteur secondaire, surtout que les terrains de Vernier et Meyrin devraient être bon marché, le premier ayant été hérité en 1950 par les propriétaires actuels et le second ayant été acquis par la multinationale Fiat il y a plus de 25 ans. On peut aisément imaginer à quel prix ils seront vendus en cas de déclassement et la plus-value qu'en retireront leurs propriétaires, plus-value qui ne sera même pas taxée à la suite de la récente réforme fiscale votée par la majorité du Grand Conseil !

Le déclassement de terrains industriels pour la construction de bureaux n'est pas admissible. Il y a actuellement pléthore de bureaux vides, de bâtiments administratifs en cours de construction (Charmilles, Minoteries, etc.) et de nombreux terrains destinées à des activités administratives. Il en est de même pour les locaux commerciaux. En ce qui concerne tout particulièrement le secteur de Cointrin, il y a plusieurs terrains de réserve qui permettraient d'accueillir les surfaces d'exposition des meubles Pfister qu'il est question de réaliser dans la partie inférieure du bâtiment de 7 étages projeté au chemin de l'Etang ou le centre commercial Jumbo projeté dans la zone industrielle de Meyrin. Nous pensons notamment:

- au périmètre de Blandonnet, juste au sud de l'actuel centre commercial Jumbo, dont le potentiel à bâtir porte sur 60 000 m2 de plancher affecté à des activités administratives et commerciales selon le plan localisé de quartier en force et dont seule une partie va être réalisée pour le futur centre TCS, ce plan pouvant être adapté pour permettre la réalisation de galettes commerciales au rez-de-chaussée des futurs immeubles;

- aux terrains non bâtis situés entre l'autoroute et la route de Pré-Bois, à l'est de la route de Meyrin, situés dans une 3e zone de développement inapte au logement, terrains que les propriétaires souhaitent valoriser depuis plusieurs années;

- aux terrains formant la pointe prolongeant le centre commercial de Balexert entre la route de Meyrin et l'avenue Louis-Casaï;

- aux terrains situés à la Renfile entre la route du Nant-d'Avril et les voies de chemin de fer, dont le projet de construction est en attente depuis plusieurs années.

Dans la mesure où des terrains existent dans une zone appropriée pour les deux projets de construction invoqués à l'appui des projets de déclassements de zones industrielles précités, que des projets de construction comme ceux de Blandonnet sont en souffrance, que des locaux administratifs en cours de construction risquent de ne pas trouver preneurs, avec les conséquences économiques qui en résultent, il est incohérent de procéder à des déclassements pour le seul motif que des propriétaires cherchent à valoriser leurs terrains de la manière la plus favorable et cela au détriment d'une politique cohérente d'aménagement du territoire.

De telles opérations, ainsi que les dérogations aux effets encore plus pervers consenties dans les zones industrielles (telles que la construction d'un restaurant drive-in McDonald dans une zone artisanale à Vernier, selon la récente publication de l'autorisation dans la Feuille d'avis officielle, ou l'affectation (autorisée?) d'un bâtiment industriel à Office World SA pour la vente de matériel de bureau dans la zone industrielle de La Praille-Acacias gérée par la FIPA) ont pour conséquence, outre de provoquer une distorsion dans la concurrence, de créer une pénurie de terrains industriels et artisanaux et surtout de faire augmenter le prix de tels terrains, de sorte qu'il faut ensuite déclasser des terrains agricoles, comme cela est proposé à La Pallanterie (encore 55 000 m2!), qui devront être équipés aux frais de la collectivité.

Afin que le Grand Conseil puisse mener une politique d'aménagement du territoire qui soit cohérente et non menée au coup par coup, sans vision d'ensemble et dictée par la facilité et le désir de valoriser certains terrains au lieu de rechercher d'autres solutions permettant d'éviter une politique menée au détriment de l'intérêt général et des besoins réels de l'industrie, il convient que le Conseil d'Etat rende publics l'inventaire des locaux commerciaux et administratifs vides et en cours de construction ainsi que l'inventaire des terrains aptes à accueillir de telles activités. Il importe également de connaître la liste des entreprises industrielles et artisanales à la recherche d'un terrain ou de locaux ainsi que l'inventaire des terrains industriels et artisanaux de réserve pouvant être affectés à des constructions nouvelles.

Quant au soutien des petites et moyennes entreprises, il conviendrait que la FIPA, s'inspirant de la réalisation exemplaire de la commune de Bernex dans la zone artisanale de Saint-Mathieu en bordure de la route de Chancy sur des terrains propriété de l'Etat, réalise, en utilisant à cette fin une partie de son bénéfice d'exploitation (8,5 millions de francs en 1994), des petits bâtiments légers et bon marché, d'un ou deux niveaux seulement, destinés à de telles entreprises et à des loyers avantageux, ce qui exige des terrains industriels ou artisanaux en suffisance. La mise à disposition de tels locaux, au lieu de bâtiments industriels sur plusieurs niveaux d'un coût de construction élevé, souvent inabordable pour les petites entreprises, constituerait un facteur non négligeable favorisant le développement de telles entreprises, tout en donnant du travail à l'industrie de la construction.

Le Conseil d'Etat devrait rechercher une association avec des communes dont certaines seraient prêtes à faire un effort financier dans ce domaine. Cette collaboration pourrait également porter sur le rachat et la transformation de certaines grandes halles industrielles désaffectées pour les adapter à bon compte pour les besoins de petites entreprises, comme une société industrielle l'a fait avec succès dans l'ancien bâtiment Tarex à Lancy.

Enfin, face aux graves problèmes d'investissements auxquels les entreprises industrielles et artisanales sont confrontées, il serait souhaitable que les pouvoirs publics, en cette période de crise, apportent - moyennant des garanties - un appui financier aux investissements requis par ces activités, comme ils le font déjà dans d'autres secteurs de l'économie, tels que l'agriculture, le tourisme (notamment avec Palexpo), les transports, la construction de logements sociaux et de bâtiments pour les organisations internationales, etc. Un tel fonds pourrait être alimenté par des contributions annuelles provenant de l'Etat, des communes et de la Banque cantonale, qui sont directement concernés par la prospérité de notre économie, et jouerait certainement un rôle très positif à cet égard.

Pour toutes ces raisons, les motionnaires vous prient, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir accueillir favorablement la présente proposition.

Débat

M. Christian Ferrazino (AdG). Cette motion fait suite au débat avorté, lors de notre dernière séance, M. Joye ayant pris l'initiative de retirer, au dernier moment, le projet de loi relatif au projet de mixité de la zone industrielle sise à Thônex. Le fait de retirer ce projet de loi après que la commission l'eut étudié durant plusieurs séances, en raison des problèmes importants et controversés qu'il soulevait, a eu pour conséquence d'éluder le débat. Or, ce débat doit avoir lieu, vu la portée desdits problèmes visés par notre motion.

Au passage et en aparté, je relève que le président Joye a fustigé l'attitude de l'Alliance de gauche dans cette affaire. Aussi je rappelle que si nous n'étions pas intervenus, avec d'autres députés, pour démontrer ce qui justifiait réellement ce projet de déclassement à Thônex, il aurait été certainement voté par la majorité de ce Grand Conseil.

Que voyons-nous aujourd'hui ? Grâce à l'intervention de certains députés qui ont poussé le Conseil d'Etat à retirer le projet de déclassement qu'il proposait, une activité industrielle pourra se déployer dans cette zone industrielle de Thônex. C'est dire que notre intervention était tout sauf inutile !

Néanmoins, le problème demeure, ce Grand Conseil étant saisi, de temps à autre, de projets de déclassement. Nous nous inquiétons de voir les zones industrielles disparaître les unes après les autres et de la tendance du Conseil d'Etat à vouloir nous proposer des déclassements de zones industrielles ou des mixités, sous couvert d'une prétendue souplesse dans l'aménagement desdites zones, ce qui revient à peu près au même. En effet, nous avons vu que dans plusieurs cas, dont celui de Thônex, la mixité, en tant que telle, n'est pas réalisable, car, lorsqu'on veut affecter des zones industrielles à une activité commerciale, le projet commercial est souvent d'un seul tenant et se développe sur l'ensemble de la surface concernée.

Pendant longtemps, le gouvernement a voulu conserver ces zones dont notre industrie avait grand besoin, et agissait dans ce sens. Maintenant, nous avons la nette impression que ce n'est plus cas, comme le démontre plusieurs projets, dont celui de Thônex.

Un autre aspect de la question est celui des dérogations abusivement accordées dans les zones industrielles. Il est vrai que le Conseil d'Etat a élargi la notion - ce que nous pouvons comprendre - de l'activité industrielle, qui n'est plus uniquement de production ou de valeur ajoutée à un produit. Mais nous n'admettons pas que l'on accorde des autorisations en zones industrielles pour des activités purement commerciales et administratives. Pour illustrer mon propos, je vous donne deux exemples pris dans la zone des activités de La Praille-Acacias :

Le premier concerne un bâtiment datant, sauf erreur, d'une dizaine d'années. Ce bâtiment, à plusieurs niveaux, a été construit sur la route des Acacias pour densifier cette zone industrielle. Or, aujourd'hui, nous trouvons dans ce bâtiment les bureaux de la compagnie d'assurance Sécura. Il s'agit donc d'une activité typiquement administrative, qui n'a rien à voir avec une activité industrielle ou commerciale. Ce changement d'affectation ne correspond pas du tout aux normes de la zone concernée et il aurait fallu une double autorisation pour y procéder, puisqu'il s'agit d'une zone sise aux Acacias et gérée par la FIPA, que vous présidez, Monsieur le conseiller d'Etat. Il aurait fallu, premièrement, l'autorisation de la FIPA et, deuxièmement, celle du département en vertu de la loi concernant le changement d'affectation de l'utilisation de la zone.

Le deuxième exemple concerne les halles industrielles qui ont été converties en bureaux de vente de matériel de bureau. Là encore, il n'y a plus de similitude entre cette activité typiquement commerciale et une activité industrielle.

Ce genre de situation entraîne une double conséquence : les halles pourraient bien être utilisées à des fins industrielles et remplir ainsi le rôle pour lequel elles ont été créées. En lieu et place, on autorise une multinationale à pratiquer une activité typiquement commerciale. Cela n'est pas acceptable.

L'autre conséquence, qui n'est pas des moindres, est que ces dérogations n'interviennent pas seulement au détriment de l'industrie mais créent une inégalité de traitement entre les entreprises d'une même branche, ce que les commerçants n'ont pas manqué de relever dans un article de presse que j'ai lu au début du mois. Il s'agit bel et bien d'une concurrence déloyale dans le sens que le gouvernement autorise une activité commerciale sur un terrain industriel où les locaux sont loués meilleur marché que ceux situés dans une zone destinée à des activités commerciales. Ce faisant, on aboutit à une inégalité de traitement pour des commerçants d'une même branche. Voilà la double conséquence néfaste créée par cette situation !

Je me suis borné à citer ces deux exemples suffisamment éloquents, mais il y en a d'autres ! D'une part, nous avons une compagnie d'assurances qui a les reins suffisamment solides pour occuper des locaux dans une zone destinée à l'activité qui est la sienne. D'autre part, nous avons une multinationale qui se porte plutôt bien. Dès lors, on ne voit pas comment légitimer ces privilèges accordés par le biais de dérogations parfaitement injustifiées.

Notre motion pose ces problèmes. Nous espérons pouvoir y répondre dans le cadre des travaux de la commission. A titre préventif, dirais-je, nous nous sommes demandé quelle commission serait la mieux à même de traiter les sujets abordés par la motion, certains étant liés à l'économie et d'autres relevant de l'aménagement du territoire.

En relation avec les discussions que nous avons déjà eues en son sein, il nous semble préférable de transmettre cette motion à la commission d'aménagement qui pourra, le cas échéant et dans un deuxième temps, l'adresser à la commission de l'économie.

M. Armand Lombard (L). Cette motion pour une stratégie industrielle à Genève ne nous a pas paru d'une absolue nécessité, du fait de nos nombreuses discussions préalables à la commission d'aménagement, comme l'a dit M. Ferrazino, et à la commission de l'économie.

Il est vrai que nous assistons au jeu du chat et de la souris entre le parti socialiste et l'Alliance de gauche. Le premier dépose, le deuxième suit ! Cela a été le cas pour les occupations temporaires, avec une motion de l'Alliance de gauche, suivie d'un projet de loi socialiste. Maintenant, on discute, depuis plusieurs semaines, d'une motion socialiste... et, paf, voilà que l'Alliance de gauche, vaguement dépassée, fait surface !

Les discussions ayant eu lieu, le plus simple serait de rejeter cette motion. Mais ce serait aller trop loin, et l'on peut, effectivement, en rediscuter, ces deux partis n'ayant pu s'entendre pour présenter un projet commun.

M. Ferrazino a parlé plus de zones que de stratégie industrielle. Il a traité le sujet en juriste chevronné qu'il est, arguant de concurrence déloyale, d'inégalité de traitement, de sociétés qui devraient se trouver ailleurs, etc. Il s'agit de faits dont il est bon que les juristes s'occupent, mais, en l'occurrence, ce genre de développement ne crée ni emplois, ni industries à Genève. Ce n'est donc pas véritablement le problème dont nous avons à débattre ce soir.

Par contre, la première invite de la motion me semble intéressante, puisqu'elle traite de stratégie de préservation et de développement du secteur industriel. Messieurs les motionnaires, votre question a été posée, voici trois semaines, à la commission de l'économie. Nous sommes en passe d'y répondre, de la discuter, de procéder à des auditions. Je vous rappelle que nous ne sommes pas totalement «dans le bleu» et que vous n'avez pas inventé les termes de «stratégie industrielle». A plusieurs reprises déjà, le Conseil d'Etat vous l'a expliquée, à savoir que la stratégie d'un développement genevois passe par les forces reconnues du canton : Genève, place internationale; Genève, place de formation; Genève, place financière; Genève, place de technologies de pointe. En fait de stratégie industrielle, nous sommes déjà dans les grands axes du développement genevois.

De plus, dans le domaine des technologies de pointe, le Conseil d'Etat a fait quatre choix particuliers pour lesquels il entend consacrer toute son énergie, sans prétériter, bien sûr, les autres branches. Il s'agit de la santé, des télécommunications, de l'informatique et de la recherche et du développement.

Par conséquent, stratégie industrielle, il y a ! Je crois savoir que les discussions à la commission de l'économie ne sont pas terminées, mais je puis vous affirmer qu'elles sont bien parties et qu'elles sont très intéressantes.

Je relève encore que la première invite de la motion cite simultanément la préservation et le développement, que la deuxième parle en même temps de préservation et de valorisation. Cela me semble un peu contradictoire, car je ne crois pas que la stratégie industrielle est, a priori, une stratégie de préservation. A l'évidence, les entreprises existantes doivent poursuivre leur vie, sinon elles tomberaient du fait d'un mûrissement prématuré. Il leur faut donc des structures de soutien. Mais l'obligation absolue, à la fois majeure et parallèle, est d'investir dans la création innovatrice, laquelle sera suivie de la création d'emplois. C'est à cette obligation que nous nous attacherons le plus. Nous en discutons à la commission de l'économie pour voir dans quelle mesure nous pouvons soutenir la création d'emplois, l'innovation dans son intégralité, c'est-à-dire de la recherche fondamentale aux frais de l'entreprise : achat des brevets, capital de départ, suivi de l'entreprise, puis, après quatre ans, suivi de son financement.

La discussion doit porter principalement sur ces points, et je me retrouve, tout en concédant que c'est ennuyeux, Monsieur Ferrazino, à proposer le contraire de ce que vous préconisez. En tant que commissaire à la commission de l'économie, je vous suggère de renvoyer cette motion à la commission de l'économie pour le rapport principal ou à la commission d'aménagement pour le traitement des invites 2 et 3. C'est une alternative dont je privilégie le premier terme, du fait des discussions en cours, au climat nettement plus positif et créatif que celui d'échanges juridiques sur les zones industrielles.

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Le groupe radical a pris connaissance, avec intérêt, de la motion 1028, car il est très soucieux des problèmes économiques de notre République.

Néanmoins, il relève que ses invites sont sensiblement proches de la motion 1006, qui a été soumise à notre parlement par le groupe socialiste. Cette dernière motion, traitée par la commission de l'économie, pose non seulement les problèmes des zones industrielles mais évoque aussi les différents soutiens nécessaires à la reprise économique. Cette approche plus en profondeur nous paraît plus conséquente et réaliste.

Pour la petite histoire, nous avons constaté, avec une très grande satisfaction, que l'Alliance de gauche soulignait la qualité de réalisation dans la zone artisanale de Saint-Mathieu, conçue par des radicaux, en l'occurrence nos collègues Daniel Ducommun, comme initiateur financier, et Hervé Dessimoz, comme architecte. Un très grand merci pour ce coup de chapeau !

Pour conclure, le groupe radical vous propose de renvoyer à la commission de l'économie cette motion 1028, en espérant très vivement qu'une passerelle se mettra en place avec la commission d'aménagement pour l'invite qui la concerne.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Notre groupe est intéressé par cette motion, parce que les problèmes qu'elle soulève sont très importants. Les Verts ont toujours été pour une vision globale et à long terme. Et, tout comme les motionnaires, nous sommes d'avis que l'aménagement du territoire ne peut se faire au coup par coup.

S'il est essentiel de venir en aide à une industrie malade, il l'est tout autant de prendre, en même temps, les mesures permettant de conserver les zones industrielles et artisanales existantes, cela pour plusieurs raisons :

D'abord, parce qu'il est difficile d'admettre des déclassements de terrains industriels au profit d'activités commerciales ou administratives, alors qu'il existe, à Genève, des dizaines de milliers de mètres carrés de locaux commerciaux inoccupés.

Ensuite, parce qu'il existe encore des terrains situés en zones à bâtir, susceptibles d'accueillir de nouvelles constructions de commerces. A cet égard, la proposition contenue dans la deuxième invite nous paraît être un outil de travail indispensable.

Le fait, également, que les terrains industriels permettent, grâce à leur prix, de répondre à une demande bien ciblée de notre économie, devrait aussi nous amener à ne pas sacrifier ces zones au profit de déclassements.

Une autre raison, peut-être la plus importante, qui nous amène à reconnaître la nécessité de conserver l'affectation des zones industrielles et artisanales existantes est notre crainte que l'on s'attaque, dans un deuxième temps, à la zone agricole. Il n'est pas difficile d'imaginer, en effet, qu'un jour viendra où, après avoir déclassé trop de zones industrielles, il nous sera proposé de déclasser la zone agricole pour créer les nouvelles zones industrielles qui feraient alors défaut. Et cela, nous ne le voulons pas !

La politique actuellement menée dans ce domaine ne nous satisfait pas, vous le savez. Nous aurons, sans doute, le loisir d'en reparler dans le cadre de la motion 1027.

Pour en revenir à la motion 1028 et à la discussion concernant son renvoi à telle ou telle commission, je sais, pour avoir récemment participé à ses travaux, que la commission d'aménagement a déjà engagé un débat sur diverses questions et, plus précisément, sur le devenir des zones industrielles.

Dans cette mesure, cette motion vient à point, et nous sommes favorables à son renvoi à la commission d'aménagement, même si nous sommes conscients qu'elle comprend également une problématique économique et qu'il est difficile de séparer ces deux aspects.

Cela dit, la commission d'aménagement pourra toujours, le moment venu - et c'est l'inverse de ce que propose M. Lombard - transmettre le résultat de ses cogitations à la commission de l'économie, laquelle traitera alors cet aspect spécifique du problème.

Quoi qu'il en soit, cela ne devrait pas empêcher le Conseil d'Etat de s'appliquer, d'ores et déjà, à répondre aux deux premières invites de la motion concernant les inventaires demandés, ce qui permettra de mieux cerner la réalité des problèmes posés.

Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Malgré quelques inexactitudes figurant dans les considérants, dont celle, regrettable, de faire passer Sarcem pour une entreprise morte, alors qu'elle a été reprise par le collectif des ouvriers sous le nom de Probotech SA, la motion 1028 présente l'intérêt de rappeler la nécessité de développer une politique industrielle offensive.

Reste à savoir si la FIPA, dans sa forme actuelle, constitue le moyen idéal pour mener une «intervention active», selon les termes des motionnaires.

Contrairement à l'Alliance de gauche, le groupe socialiste ne considère pas le secteur industriel comme un Jurassic Park. Il estime que Genève possède des atouts qui peuvent davantage être exploités. D'ailleurs, le groupe socialiste a fait des propositions concrètes, dans le cadre de la motion 1006, dont on a longuement parlé ce soir. Comme vous le savez maintenant, elle se trouve en examen à la commission de l'économie, et nous avons bon espoir de présenter des travaux constructifs au Grand Conseil. En conclusion, le groupe socialiste ne peut que soutenir une motion qui s'inscrit très largement dans la sienne.

Pour ce qui est de la mixité, l'Alliance de gauche postule le renvoi de la motion 1028 à la commission d'aménagement. Nous la suivrons, étant donné que les propositions économiques présentées dans sa motion sont déjà traitées dans la commission de l'économie.

M. Christian Grobet (AdG). Vous aurez remarqué, Madame de Tassigny, que nous ne sommes pas sectaires. Aussi, permettez-moi de vous dire que la réalisation, certes exemplaire, des bâtiments industriels sur les terrains de Saint-Mathieu, à Bernex, n'est pas le fait unique de deux personnes ou d'un parti. C'est la commune qui a décidé de cette politique, et l'on peut ajouter qu'elle s'est bien rachetée, puisqu'elle avait, en son temps, vendu le terrain adjacent à l'Etat qui, je crois, a aussi joué un rôle dans la réalisation que nous avons citée. Mais l'essentiel est de réaliser, et, sur ce point, nous saluons effectivement le fait qu'une commune ait décidé d'investir dans le tissu industriel.

Monsieur Lombard, rassurez-vous ! Nous n'avons aucune difficulté à nous accorder avec nos collègues socialistes pour rédiger des projets de motions. Cependant, dans le cas présent, nous ne les avons pas contactés.

Je m'étonne des propos de Mme Blanc-Kühn, et j'en profite pour dire à mes préopinants des bancs de l'Entente que l'approche de la motion 1006 diffère fondamentalement de la nôtre. Il suffit de comparer les textes pour s'en convaincre. Peut-être, Mme Blanc-Kühn n'a-t-elle pas relu sa propre motion ? Madame, si vous nous dites aimablement que nous tenons à conserver un Jurassic Park, nous éprouvons, nous, à la lecture de votre motion, le sentiment que vous êtes prête à brader les terrains industriels...

Des voix. Mais non... Arrête !

M. Christian Grobet. C'est notre sentiment, et nous souhaiterions vivement être détrompés ! Il n'en demeure pas moins que nous constatons dans votre métier un langage commun avec celui du département des travaux publics, quant à l'utilisation des terrains non bâtis dans les zones industrielles. Or, la préservation des terrains en zones industrielles, comme réserves pour les besoins industriels, est, de notre avis, un élément fondamental d'une stratégie industrielle. C'est pour cela que cette motion, qui propose des solutions concrètes, est avant tout axée sur les problèmes d'aménagement du territoire, parce que - M. Maitre le dira mieux que moi - il ne saurait y avoir d'industries sans mise à leur disposition de terrains bon marché.

Il est vrai que nous avons mené à Genève une politique que l'on pourrait qualifier d'exemplaire, dans ce domaine, et nous nous inquiétons, aujourd'hui, de ce qui paraît être un changement de politique. J'ignore la position de M. le chef du département de l'économie publique qui a sans cesse, et récemment encore, défendu la pérennité des zones industrielles et les affectations industrielles. Toujours est-il que le Conseil d'Etat - ou le département des travaux publics ? - a mis successivement à l'enquête publique des projets de modification de zones portant sur des terrains en zone industrielle. Ces opérations ont toutes l'air d'être inspirées par une politique du coup par coup, et nous pensons, aujourd'hui, que nous devons être parfaitement clairs sur la vocation des zones industrielles et la préservation des terrains industriels.

Pour nous, il n'est point de jachères en zones industrielles, pour reprendre les termes utilisés par certaines personnes, mais il y a des terrains à préserver pour assurer, à moyen et long termes, les possibilités constructives des entreprises industrielles.

En relation avec la zone industrielle de Sécheron, M. Maitre a déclaré récemment, au nom du Conseil d'Etat, que Sécheron SA allait chercher un autre site pour y construire des bâtiments de production. Je ne sais si ce site a été trouvé, mais cet exemple démontre la nécessité de conserver des terrains industriels.

Nous partageons la préoccupation des écologistes quant au déclassement possible de terrains en zones agricoles du fait de surfaces insuffisantes dans les zones industrielles existantes.

Dès lors, je ne sais pas s'il appartient, Monsieur le résident, aux deux commissions de se mettre d'accord quant au mode de traitement de notre motion qui comporte des propositions concrètes au niveau de la stratégie industrielle, notamment en ce qui concerne la création d'un fonds qui pourrait être alimenté par la Banque cantonale et diverses collectivités publiques, pour favoriser et aider de petites et moyennes entreprises dans le domaine de leurs investissements. Mais le volet de l'aménagement du territoire est aussi extrêmement important.

Certes, l'on n'apprécie guère de renvoyer des motions à deux commissions, bien que fréquemment des projets de lois, relevant de la commission des travaux, soient simultanément renvoyés à une commission ad hoc, s'agissant d'un bâtiment hospitalier, d'un bâtiment universitaire. Néanmoins, il nous semble logique que le volet «aménagement du territoire» soit traité par la commission d'aménagement et les autres volets par la commission de l'économie.

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC). J'ai été surpris par les considérants de cette proposition de motion, qui révèlent une totale méconnaissance du tissu industriel genevois. En effet, dans ces considérants, on associe ce patrimoine industriel à des sociétés telles que la SIP, Tavaro, en oubliant, évidemment, quelques centaines d'entreprises de type industriel en pleine évolution, parfois positive, parfois négative, ou en phase de création ou vivant encore la cruelle expérience d'un dépôt de bilan ou d'une cessation d'activité.

Vous évoquez aussi la fermeture d'un certain nombre d'entreprises, durant ces dernières années. Vous mentionnez Tarex, Hispano Suiza, etc. L'on pourrait aussi parler de l'entreprise Picard et Pictet qui, au début du siècle, lança la «Pic-Pic», à l'époque où Genève représentait la capitale de l'automobile.

Vous évoquez encore la quasi-disparition de sociétés comme Les Ateliers des Charmilles qui sont devenus, aujourd'hui, Charmilles-Technologies, ou la société Sarcem, comme l'a relevé Mme Blanc-Kühn, qui, bien au contraire, est en pleine évolution. A titre d'information, sachez que Charmilles-Technologies, en 1995, a créé pas moins de cent nouveaux emplois à Genève.

Je relève dans votre exposé des motifs, je cite : «L'industrie genevoise est en péril. [...] Indépendamment des actions qui auraient pu être menées pour sauver tout ou partie de leurs activités, il est primordial [...] de mener une politique active permettant le maintien du secteur secondaire à Genève...», etc. Il est à noter que si l'industrie genevoise a subi de grandes mutations, celles-ci sont en cours depuis les années septante. Il est important de souligner que le département de l'économie publique n'ait pas attendu jusqu'à aujourd'hui pour mener une politique active ! Sinon, l'industrie aurait totalement disparu de Genève !

Je crois aussi que notre industrie subit les mêmes pressions que l'ensemble de notre économie, les effets d'une concurrence extrêmement difficile et ceux d'un franc suisse particulièrement lourd en ce moment. Sachez encore que nous avons le deuxième plus haut niveau de salaires au monde, ainsi que le deuxième plus haut niveau de prix au monde, juste derrière le Japon.

Mme Fabienne Bugnon ainsi que les motionnaires se plaignent d'une mixité qui pourrait constituer un risque pour les zones industrielles. Pour avoir travaillé dans ces dernières, durant une dizaine d'années, je puis vous dire la nécessité d'y inclure une certaine vie sociale. Le secteur industriel devrait pouvoir s'exprimer à ce sujet. Vous déplorez l'existence d'un «drive in» McDonald dans lesdites zones. En ce qui me concerne, je crois à l'utilité de construire plus de restaurants, une crèche, un tea-room. Je pense aussi à un kiosque où, chaque matin ou plus rarement, il serait possible de consulter la presse et prendre un café avant de remonter dans nos bureaux.

Mesdames et Messieurs les députés, si vous voulez réellement aider les entreprises - je l'affirme sans parti pris : je pense au commerce de détail, à l'ensemble des entreprises de la construction, aux entreprises industrielles, mais surtout à la création d'emplois - il vous faudra éviter l'installation de minorités de blocage, quand il s'agira d'oeuvrer rapidement aux réformes nécessaires de notre tissu économique.

M. Jean Opériol (PDC). Il n'est pas douteux que cette motion 1028 trouve une bonne partie de son origine dans le projet de loi 7250, retiré par le Conseil d'Etat, et qui avait trait à la diversification des activités admissibles dans la zone industrielle et artisanale de Thônex.

En tant que rapporteur de majorité de ce projet de loi, j'avais souligné le souci de la commission d'aménagement. Face à l'évolution socio-démographique de certains quartiers, face à l'évolution économique générale de ce canton, et tout spécialement de son économie industrielle, face à l'influence exercée sur Genève par des facteurs économiques non domestiques et, enfin, face aux besoins exprimés en termes de mixité par les industriels eux-mêmes, la commission se proposait d'approfondir son analyse, pour ne pas dire sa doctrine, en matière d'aménagement du territoire rapportée à la gestion des zones industrielles et artisanales.

Cette réflexion reste à faire, car elle revêt le double caractère de l'actualité et de l'urgence.

Notre groupe est donc d'avis que cette motion soit renvoyée à la commission d'aménagement qui aura ainsi l'excellent motif de se pencher attentivement sur les problèmes qu'elle rappelle et qui méritent réponse.

Il a paru à notre groupe que la commission d'aménagement était bien la destinataire de la motion. En effet, la «promotion d'une stratégie industrielle» ne peut être définie sans qu'au préalable les conditions-cadres les plus appropriées soient elles-mêmes déterminées. Au sein de ces conditions, l'aménagement du territoire, la gestion des zones et leur vocation figurent, à notre avis, en première place.

En fait, la tâche de la commission d'aménagement ne devrait pas être trop compliquée si ses travaux et sa réflexion se fondent sur les données objectives du problème posé. En l'état, il faut reconnaître que Genève dispose déjà d'une solide stratégie industrielle, entièrement tournée vers la recherche, l'accueil et le maintien de toutes les sociétés et entreprises qui honorent notre canton de leur présence.

En faveur et pour la promotion de cet accueil, Genève dispose de zones industrielles déclassées, dont l'occupation est loin d'être complète. C'est dans ces zones que l'emploi pourra être maintenu et développé, que la natalité industrielle pourra être favorisée. En matière d'aménagement de territoire, notre canton est en mesure de pratiquer une stratégie industrielle dynamique, ce à quoi il n'a jamais rechigné.

Cela acquis, la commission d'aménagement aura pour tâche essentielle de préciser la nature exacte de l'accueil industriel que notre canton doit désormais pratiquer, accueil qui comportera nécessairement le volet d'une certaine mixité. A ce sujet, il faut relever que la FIPA a déjà abordé ce chapitre en ouvrant les zones industrielles à des activités jugées non seulement compatibles mais surtout cohérentes avec la promotion industrielle que tout le monde appelle de ses voeux. Sur le plan de la gestion économique de terrains industriels, cette politique d'accueil et de promotion ne sera nullement aventureuse, contrairement à ce que craignent les motionnaires. En effet, la quasi-totalité des terres industrielles constructibles se situe à Plan-les-Ouates, à Meyrin-Satigny et à Mouille-Galland. Ces trois zones sont des zones industrielles de développement, et la loi du 13 décembre 1984, dans ses articles 10 à 12, ouvre à l'Etat un droit de préemption qu'il exercera en cas de spéculation ou d'affectation intempestive.

Enfin, il sera bon que la commission d'aménagement prenne en compte, dans son analyse, l'opinion et les besoins des industriels eux-mêmes qui déplorent, bien souvent, être trop seuls dans leur zone, désespérant d'y voir venir les activités dont ils ont besoin pour fonctionner, s'administrer et se développer, cela dans un environnement à composantes multiples mais homogènes, néanmoins.

Comme déjà dit, notre groupe accepte que cette motion parte à la commission d'aménagement.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Cette proposition de motion, comme de nombreuses interventions de même nature devant ce parlement, pose le problème de la stratégie de préservation et de développement du secteur industriel, en relation avec un certain nombre de leviers, tels que le rôle de la FIPA et, surtout, la gestion des zones industrielles : le principal ancrage de cette motion.

Je confirme ici ce que nous avons eu l'occasion de dire à plusieurs reprises : les zones industrielles représentent un des éléments absolument déterminants de la stratégie de développement industriel du canton, ce pour deux raisons majeures :

1. Les zones industrielles de développement sont les seules à l'intérieur desquelles, s'agissant du prix des terrains, les charges foncières sont compatibles avec l'exercice de l'activité industrielle.

2. Ces zones industrielles bénéficient d'équipements. Par conséquent, les industries peuvent y être accueillies sans avoir à y réaliser de gigantesques travaux, dont le coût serait prohibitif pour elles en termes d'aménagement, de dévestiture, de jonction à des fluides - l'eau par exemple - ainsi que de raccordements électriques, si importants pour l'industrie.

On voit donc bien que ces zones industrielles de développement ont une mission spécifique qu'il serait extrêmement dangereux, pour ne pas dire coupable, de dénaturer. Car dénaturer la vocation des zones industrielles de développement, y compris la zone industrielle Praille-Acacias, c'est porter, d'ores et déjà, les germes d'une impossibilité, pour des industries nouvelles, de s'établir et de se développer valablement dans les secteurs de notre canton prévus à cet effet.

Quand on tient de grands discours sur la mixité, il faut ramener le canton à ce qu'il est, en fait de territoire. Nous avons un petit canton et pas une seule de ses zones industrielles n'est située à moins d'un quart d'heure de zones de services, de formation, de détente et de loisirs. Si nous comparons notre canton aux grands technopôles que nous connaissons dans le monde, nous constatons que Genève est quasiment un parc technologique avec un nombre d'emplois inférieur, bien entendu, à celui du domaine des services.

Je suis convaincu que la stratégie industrielle, pour ce canton, implique la définition la plus claire possible des zones de développement industriel. J'ai également la conviction que l'on se fourvoie en voulant promouvoir, pour ces zones, des concepts de mixité dont certains prévoient des logements - reste à savoir qui souhaiterait y habiter ? - et qu'à terme c'est un manque d'ambition pour notre industrie.

Contrairement à ce que l'on croit, nous avons, dans les zones de développement industriel, un certain nombre de mètres carrés de plancher à offrir, s'agissant de centres déjà construits, et c'est tant mieux, car nous pouvons proposer des mètres carrés disponibles dans le cadre de la promotion économique. Cela exerce également une pression, à la baisse, sur les prix. Mais si ces surfaces sont suffisamment dimensionnées, la demande étant aujourd'hui en dessous de l'offre, celle-ci, s'agissant des mètres carrés au sol, n'est pas hyper abondante, en l'état. Pourtant, les mètres carrés au sol sont parfois nécessaires à une entreprise qui, en raison des contraintes liées à sa production, ne peut pas travailler à l'étage d'un centre technologique, artisanal ou industriel déjà bâti. Cela dit, il est heureux que l'on puisse enfin valoriser la zone de développement industriel de Plan-les-Ouates dans son extension.

Je maintiens qu'il est nécessaire de développer des zones industrielles aux concepts clairs. Toutefois, nous devons admettre que nous avons un certain nombre de problèmes, s'agissant d'anciennes zones industrielles ou de zones industrielles portant toujours ce nom, mais situées dans un contexte urbain où les charges foncières se sont considérablement accrues. Il faut voir la vérité en face : à terme, nous aurons des problèmes pour maintenir un profil clair, industriellement parlant, à des zones telles que celles de Sécheron, d'Hispano ou - en dépit d'une situation totalement gelée pour des motifs que j'ai exposés ici - de Tavaro. Nous devrons nous poser la question de savoir s'il ne s'agit pas de zones appelées à davantage de mixité. En l'occurrence, le débat sur la mixité se justifie. D'ailleurs, il est déjà engagé à propos de Sécheron.

En revanche, il est indispensable de maintenir le profil le plus clair possible pour les zones de développement industriel Meyrin-Satigny, Mouille-Galland, FIPA et Plan-les-Ouates.

Bien entendu, il y aura toujours quelques exceptions. Nous avons cherché à ouvrir le jeu, de manière compatible avec le profil des zones industrielles, en adoptant, durant la précédente législature, des directives d'application aux dispositions de la loi générale sur les zones de développement industriel et aux dispositions de la loi d'application de l'aménagement du territoire, qui permettent d'accueillir, désormais, en zones industrielles des activités qui n'y étaient pas admises jusque-là. Ce sont les activités liées à l'informatique, dans la production de logiciels; les activités liées à la formation dans les métiers proches de l'industrie, en raison de synergies évidentes; enfin, les activités nécessaires à la vie même des zones industrielles, qu'il s'agisse de restaurants, de guichets de poste, de banque, etc.

Il y a encore quelques exceptions ponctuelles. Monsieur Ferrazino, vous avez cité deux exemples. L'un m'étonne, et nous allons vérifier ce qu'il en est. Une compagnie d'assurance ne devrait évidemment pas se trouver en zone industrielle. Vous avez cité le cas d'Office World, une entreprise spécialisée dans les aménagements de bureautique. Je revendique la responsabilité de l'installation de cette entreprise, à la rue Marziano, dans un bâtiment appartenant à Gardy. Cette entreprise, pour partie, exerce des activités qui ont leur place dans les zones industrielles, en ce sens qu'elle fait de la maintenance et de l'entretien. Ce sont des activités techniques d'appareils de bureau. J'admets que c'est une partie mineure de son travail qui, à elle seule, ne justifiait pas une exception.

Devant quel problème concret étions-nous placés ? Quand Gardy était à la veille de devoir déposer son bilan, nous étions en négociation avec des repreneurs, et c'est ABB qui a repris les activités de Gardy. Ainsi, Gardy va pouvoir redémarrer, certes, sur une base réduite, mais néanmoins assainie. Dans ce contexte, des surfaces, dans le bâtiment Gardy, devaient impérativement trouver preneur, dans des délais très courts. C'était une question de survie pour Gardy du point de vue de son aptitude à ne pas déposer immédiatement son bilan. Des locataires qui se proposaient, aucun n'avait le profil industriel pour être admis rapidement. Certains candidats étaient typiquement tertiaires. Et il s'est trouvé qu'Office World, avec une petite activité admissible en zone industrielle, offrait, de surcroît, des conditions locatives favorables à Gardy. Nous avons donc pris la responsabilité de consentir une exception, et j'insiste sur le terme, car nous n'entendons pas dénaturer la véritable vocation des zones industrielles.

J'en termine avec les commissions. Pour moi, il n'y a pas de problème, les deux commissions étant appelées à se prononcer sur ce type de motion.

La motion contient des invites politiques et économiques incontestablement ciblées, par exemple pour ce qui est d'un fonds pour le développement de l'industrie genevoise, etc., qui relève de la commission de l'économie. La gestion des zones industrielles, elle, est de la compétence de la commission d'aménagement. Je souhaiterais, cependant, que l'on distingue les objectifs des moyens. Les premiers visent à avoir une stratégie industrielle qui est un problème de politique économique. Les zones industrielles, elles, sont un moyen au service de cette politique économique.

Par conséquent, je trouverais judicieux que votre parlement renvoie cette motion, dans un premier temps, à la commission de l'économie pour qu'elle boucle ses travaux simultanément avec ceux induits par la motion socialiste. Ainsi, dans un deuxième temps, les travaux de la commission de l'économie permettraient que la commission d'aménagement soit immédiatement saisie, et le rapport final parviendrait à votre Conseil, avec la conjugaison des deux visions.

A mon avis, il faut d'abord avoir la vision d'ensemble, politique et économique, de la commission de l'économie, puis la vision ciblée de la commission d'aménagement sur ce levier indispensable qu'est l'aménagement du territoire, en l'occurrence celui des zones industrielles, au service de cette stratégie de l'économie.

Je propose donc le renvoi de la motion à la commission de l'économie, à charge pour celle-ci de transmettre son rapport à la commission d'aménagement. Ensuite, les deux commissions rapporteront devant le Grand Conseil.

M. Christian Grobet (AdG), conseiller d'Etat. Je remercie M. le conseiller d'Etat Maitre de son discours clair et engagé sur la pérennité des zones industrielles. Son discours est de nature à nous rassurer. Monsieur le conseiller d'Etat, vous aurez aussi compris, je pense, nos préoccupations face à un certain nombre de projets visant à supprimer des zones industrielles, dont celui de Thônex qui s'est avéré totalement infondé.

Notre motion ne vise pas au maintien d'un Jurassic Park, mais à celui de parcs technologiques. Elle répond à une politique industrielle qui devrait être renforcée par la commission de l'économie.

Nous nous rallions donc à votre proposition, tout en demandant que la commission d'aménagement soit associée, dans un deuxième temps, à l'examen de notre mission, parce que nous éprouvons véritablement le sentiment qu'au niveau de l'aménagement du territoire il y a actuellement une certaine incohérence. Par conséquent, il faut que la commission d'aménagement soit aussi saisie de cette affaire.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'économie.

Le président. Ainsi que je vous l'avais annoncé en début de séance, le Bureau de votre Grand Conseil a pris l'initiative de verser une somme forfaitaire de 5 000 F à la Chaîne du Bonheur, à l'occasion de la Journée mondiale de Sida-Coeur. Sur les tables de la salle des Pas-Perdus, j'ai fait déposer des urnes où chacun et chacune pourra verser son obole par solidarité. Le Bureau prélèvera sur sa caisse de quoi compléter vos dons, à concurrence de 5 000 F. Merci à toutes et à tous !

 

I 1941
10. Réplique de M. Bernard Clerc à la suite de la réponse du Conseil d'Etat à son interpellation : Magasins Weber : A quoi joue le département de l'économie publique ? ( ) I1941
Mémorial 1995 : Développée, 5073. Réponse, 5075.

M. Bernard Clerc (AdG). Suite à la réponse apportée par M. Jean-Philippe Maitre à mon interpellation, je souligne que je ne suis pas d'accord avec son interprétation des événements survenus dans les magasins «Jouets Weber».

Vous aviez dit, Monsieur Maitre, que la modification des horaires de travail avait eu lieu avant l'entrée en vigueur de la loi. Or, je vous rappelle que la loi sur les heures de fermeture des magasins avait été votée par le Grand Conseil le 16 septembre 1994. (Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence ! Regagnez vos places !

M. Bernard Clerc. Une votation populaire sur cet objet a eu lieu le 4 décembre 1994 et la loi est entrée en vigueur le 1er janvier 1995.

En ce qui concerne les magasins «Jouets Weber», je remarque que les travailleurs ont reçu le nouveau règlement prévoyant le changement d'horaire en décembre 1994, soit après la votation populaire, par lettre datée du 29 décembre 1994.

Je ne peux donc que constater que les nouvelles mesures ont été prises juste avant l'entrée en vigueur des modifications législatives. Il y a donc concomitance entre la loi sur les heures de fermeture des magasins et l'allongement de l'horaire de travail des employés.

C'est pourquoi je pense que le département ne devait pas donner l'autorisation d'ouvrir jusqu'à 20 h, étant donné que cette mesure était bien une dégradation des conditions de travail du personnel des «Jouets Weber».

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, Monsieur le député Clerc, si la modification de l'horaire de travail n'avait concerné que Genève, nous nous serions trouvés dans une situation permettant de donner crédit à votre interprétation des faits.

Il se trouve que cette modification a été décidée avant l'entrée en vigueur de la loi : ce seul point n'était pas de nature à nous rassurer. Or, cette mesure a été prise et appliquée à la totalité des magasins de ce groupe dans toute la Suisse. Ceci a été déterminant, car il n'existait pas alors de relation de cause à effet entre l'adaptation de la LHFM à Genève et un changement de l'horaire de travail des employés de ce groupe.

Cette constatation a donc conduit logiquement les services compétents à dire que l'heure de fermeture retardée ne pouvait pas être refusée à ce magasin.

Cette interpellation est close.

IU 124
11. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Pierre Vanek : Ouverture des commerces le dimanche. ( ) IU124
Mémorial 1995 : Développée, 5399.

M. Jean-Philippe Maitre, conseiller d'Etat. Je crois que M. Vanek connaît déjà la réponse, puisque la décision a été prise et communiquée. Je n'ai pas autorisé l'ouverture des magasins le dimanche, respectivement les 17, 24 et 31 décembre, comme l'avaient demandé diverses organisations de commerçants, petits ou grands.

Nous avons dû régler le problème des heures de fermeture des magasins et des traditionnelles nocturnes de décembre dans un contexte difficile, puisque, malheureusement, les partenaires sociaux de la branche n'étaient pas parvenus à un accord. Il y avait divergence d'approche entre les organisations syndicales et les associations représentant les commerçants. Concernant les dimanches, cette divergence a même surgi à l'intérieur des associations de commerçants. Cette question était très controversée.

Toujours est-il que nous avons pris une décision claire, que j'avais déjà pratiquement annoncée devant votre Grand Conseil, c'est-à-dire que nous n'autoriserions pas l'ouverture des magasins le dimanche.

Cette interpellation urgente est close.

PL 7306
12. Projet de loi du Conseil d'Etat instituant une garantie en cas de déficit pour le 12e Congrès international sur le sida en 1998 à Genève. ( )PL7306

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Garantie

Le Conseil d'Etat est autorisé à octroyer une garantie en cas de déficit à l'Association pour le Congrès international du Sida 1998, en vue d'assurer l'organisation dudit congrès à Genève.

Art. 2

Montant et modalités

1 Le montant de la garantie n'excède pas 2,5 millions de francs.

2 Elle sert à garantir soit une partie des avances de la Banque cantonale de Genève aux organisateurs, soit à couvrir le déficit à hauteur d'un quart des dépenses totales qui devraient s'élever à 10 millions de francs, couverture considérée en l'état comme intégralement assurée par les recettes et les dons prévus au budget établis par l'office du tourisme de Genève.

Art. 3

Surveillance

L'inspection cantonale des finances est chargée de veiller au respect des conditions stipulées dans la présente loi.

Art. 4

Couverture financière

En cas d'appel de la garantie, le montant correspondant est prélevé sur la rubrique budgétaire 85.11.00.365 du budget de la République et canton de Genève pour 1998.

Art. 5

Loi sur la gestion administrative et financière del'Etat

Pour le surplus, les dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993, sont applicables.

 EXPOSÉ DES MOTIFS

Depuis 1985, les congrès internationaux sur le Sida réunissent, chaque année, un nombre toujours croissant de participants: personnes touchées par le virus en tant qu'individus concernés ou en tant que représentants d'organisations d'entraide, chercheurs de laboratoires, médecins, spécialistes en santé publique, représentants d'associations engagées dans la lutte contre le Sida, représentants de maisons pharmaceutiques, politiciens, et autres. Ils étaient ainsi plus de 10 000 à se réunir en 1993 à Berlin et en 1994 à Yokohama, près de Tokyo, pour faire le point de l'épidémie du Sida et les progrès de la science qui permettront de la combattre.

Genève a posé sa candidature pour l'organisation de ce congrès en 1998. Les arguments présentés dans un dossier préparé par l'office du tourisme de Genève, avec l'aide d'un comité d'organisation présidé par le professeur B. Hirschel, de l'Hôpital cantonal universitaire de Genève, et avec le soutien du Conseil d'Etat (annexe 1) ont convaincu le comité de sélection du site de la Société internationale du Sida (International Aids Society) qui s'est réuni le 7 août 1994 à Yokohama. Les membres du jury ont notamment été impressionnés par la qualité de la recherche sur le Sida en Suisse et plus particulièrement à Genève, d'une part, et les facilités que notre ville pourra offrir pour l'organisation d'un tel congrès après la construction de la salle Arena et des nouvelles ailes de Palexpo, d'autre part. Ils ont également apprécié les idées innovatrices des organisateurs.

Un tel congrès répond à la vocation internationale de Genève qui est, notamment, le siège de l'Organisation mondiale de la Santé. En outre, les retombées économiques sont considérables. Pour le congrès lui-même,les prévisions de l'office du tourisme de Genève estiment que le budget (an-nexe 2) s'équilibre sur la base de 8 000 participants, chiffre qui a été dépassé pour les congrès précédents qui ont eu lieu en Europe. Toutefois, une garantie de l'Etat sera nécessaire, raison du présent projet de loi.

Le 13 mars 1995, le comité d'organisation s'est constitué en Association pour le Congrès mondial sur le Sida 1998 (annexe 3). L'article 4 des statuts stipule notamment:

● que les ressources de l'association sont constituées notamment par:

- les cotisations des membres;

- les dons et legs;

- les subventions;

- le produit des manifestations en rapport avec le but de l'association;

● que le Conseil d'Etat de la République et canton de Genève octroie sa garantie pour une partie des avances de la Banque cantonale de Genève aux organisateurs. Cette garantie sera soumise à la ratification du Grand Conseil par un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat de Genève;

● que le montant ne dépassera pas 2,5 millions de francs, servant à garantir une partie des avances de la Banque cantonale de Genève aux organisateurs, soit à couvrir le déficit à hauteur d'un quart des dépenses totales qui devraient s'élever à 10 millions de francs, couverture considérée en l'état comme intégralement assurée par les recettes et les dons prévus au budget établi par l'office du tourisme de Genève;

● que le contrôle financier cantonal est chargé de veiller à ce que les conditions stipulées dans la loi soient respectées.

Par contrat signé entre le département de l'action sociale et de la santé et l'International Aids Society (annexe 4) les droits et devoirs des deux parties ont été fixés de manière précise, étant entendu que ce contrat ne déploiera ses effets qu'à condition que la garantie soit acceptée par le Grand Conseil (voir point 6.2 du contrat).

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.

ANNEXE 1

page 6

ANNEXE 2

ANNEXE 3

9

10

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12

13

ANNEXE 4

15

16

17

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission des finances. 

PL 7383
13. Projet de loi de MM. Christian Ferrazino, Christian Grobet, Gilles Godinat et Jean-Pierre Rigotti d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie. ( )PL7383

LE GRAND CONSEIL,

vu l'article 97 de la loi fédérale sur l'assurance-maladie,

Décrète ce qui suit:

Article 1

Autorité compétente

Le département de l'action sociale et de la santé (ci-après le département), soit pour lui le service chargé de l'assurance-maladie, est l'autorité compétente pour l'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (ci-après loi fédérale).

Art. 2

Contrôle de l'obligation de s'assurer

1 En application de l'article 6 de la loi fédérale, le service de l'assurance-maladie veille au respect de l'obligation pour toute personne domiciliée dans le canton de s'assurer pour les soins en cas de maladie auprès de l'un des assureurs agréés en vertu de l'article 11 de la loi fédérale.

2 A cet effet, il reçoit sans frais:

a) de l'office de la population chargé du contrôle de la population copie du registre des habitants du canton ainsi que copie de toutes les mises à jour de ce registre;

b) des assureurs agréés la liste de leurs assurés.

3 Le service de l'assurance-maladie adresse un avis, suivi le cas échéant d'une sommation, enjoignant toute personne, ou son ayant droit, tenue de s'assurer en vertu de l'article 3 de la loi fédérale et n'ayant pas respecté cette obligation, de s'assurer auprès d'un assureur agréé en le menaçant de procéder, si nécessaire, à son affiliation d'office à une caisse-maladie agréée.

4 Le service de l'assurance-maladie procède à l'affiliation d'office à une caisse-maladie agréée de toute personne assujettie à l'assurance-maladie, qui n'a pas donné suite à la sommation notifiée en vertu de l'alinéa 3. Le Conseil d'Etat fixe la clé de répartition des affiliés d'office entre les diverses caisses-maladie agréées.

Art. 3

Assurés de condition économique modeste

1 Les assurés de condition modeste au sens de l'article 65 de la loi fédérale bénéficiant de réduction de leurs primes d'assurance grâce aux subsides accordés par le canton sont:

a) les bénéficiaires des prestations complémentaires à l'AVS/AI ou des prestations accordées par l'office cantonal des personnes âgées (OCPA);

b) les bénéficiaires des prestations d'assistance ou d'aide sociale de l'Hospice général;

c) les personnes seules, sans charge légale, dont le revenu déterminant ne dépasse pas 30 000 F;

d) les couples, sans charge légale, dont le revenu déterminant ne dépasse pas 42 000 F.

2 Les limites de revenus fixés à l'alinéa 1, lettres c et d, sont majorées de 6 000 F par charge légale. Une personne seule assumant une charge légale est assimilée à un couple.

3 Le revenu déterminant au sens de l'alinéa 1, lettres c et d, est égal au revenu annuel net, augmenté d'un quinzième de la fortune nette, en Suisse et à l'étranger. Sont considérés comme revenu annuel net et fortune nette, le revenu total et la fortune totale qui servent à déterminer le taux d'imposition cantonale.

4 Le droit aux subsides s'étend au conjoint et aux enfants à charge de l'ayant droit.

5 La loi générale sur les contributions publiques, du 9  novembre 1887, est applicable pour le surplus à l'interprétation du présent article.

6 Le service de l'assurance-maladie détermine, sur la base des renseignements communiqués par l'administration fiscale cantonale et les autres services publics ou institutions concernés, quels sont les assurés faisant partie du cercle des assurés de condition économique modeste. Les assurés concernés en sont avisés chaque année par l'envoi d'une attestation qu'ils sont tenus de remettre à leur assureur pour bénéficier de la réduction de leur prime d'assurance.

Art. 4

Montant des subsides

1 Le montant des subsides varie en fonction du revenu déterminant des ayants droit, une fois déduit le montant admis pour les charges légales tel que fixé à l'article 3, alinéa 2, soit :

a) 150 F par mois et par assuré dont le revenu déterminant ne dépasse pas 15 000 F pour les personnes seules et 21 000 F pour les couples;

b) 120 F par mois et par assuré dont le revenu déterminant ne dépasse pas 18 000 F pour les personnes seules et 25 200 F pour les couples;

c) 90 F par mois et par assuré dont le revenu déterminant ne dépasse pas 21 000 F pour les personnes seules et 29 400 F pour les couples;

d) 70 F par mois et par assuré dont le revenu déterminant ne dépasse pas 24 000 F pour les personnes seules et 33 600 F pour les couples;

e) 50 F par mois et par assuré dont le revenu déterminant ne dépasse pas 27 000 F pour les personnes seules et 37 800 F pour les couples;

f) 30 F par mois et par assuré dont le revenu déterminant ne dépasse pas 30 000 F pour les personnes seules et 42 000 F pour les couples.

2 Pour chaque enfant mineur à charge d'un ayant droit, le subside couvre la prime d'assurance obligatoire, mais au maximum 87,50 F par mois.

3 Les bénéficiaires des prestations complémentaires à l'AVS/AI et des prestations accordées par l'OCPA reçoivent un subside égal au montant de leur prime d'assurance obligatoire. Il en est de même pour les bénéficiaires des prestations d'assurance ou d'aide sociale de l'Hospice général.

4 Le montant des subsides ne peut être supérieur aux primes de l'assurance obligatoire.

5 Le Conseil d'Etat veille à ce que la participation cantonale à ces subsides soit fixée de manière à obtenir la totalité des subsides susceptibles d'être alloués par la Confédération au canton et propose, le cas échéant, les modifications nécessaires à la présente loi.

6 Un crédit est inscrit chaque année au budget de l'Etat correspondant au montant total des subsides cantonaux, comprenant également les subventions éventuelles aux caisses-maladie versées dans le cadre d'accords conclus avec ces dernières notamment en vue de favoriser des actions de médecine préventive.

Art. 5

Absence de convention tarifaire

Le département intervient auprès des différentes catégories de fournisseurs de prestations au sens de la loi fédérale et auprès des assureurs pour favoriser la conclusion de conventions tarifaires au sens de l'article 46 de la loi fédérale. A défaut d'accord entre les intéressés, le Conseil d'Etat, conformément à l'article 47 de la loi fédérale, fixe par voie réglementaire les tarifs après avoir consulté les milieux concernés.

Art. 6

Obligation de renseigner

1 Afin de s'assurer que les subventions cantonales versées aux caisses-maladie soient utilisées à bon escient, de favoriser une saine répartition des affiliés d'office entre les caisses-maladie, de déterminer une clé de répartition équitable des subsides versés aux caisses-maladie, de lutter contre une politique de sous-enchère des primes ne couvrant pas les frais des assureurs, de veiller à ce que les subsides versés aux assureurs ne dépassent pas le montant des primes dues ou leurs besoins réels et afin de fixer des tarifs cadre tenant compte aussi bien de la situation financière des fournisseurs de prestations que de celle des assureurs, le département est en droit de demander la communication, sans frais, des éléments de calcul des tarifs, ainsi que la production des comptes et bilans des fournisseurs de prestations et des caisses-maladie. Il peut demander à consulter les pièces justificatives et solliciter les informations nécessaires auprès de tiers, comme les départements et services concernés ainsi que les ayants droit, dont le concours ne peut lui être refusé.

2 Afin que le Conseil d'Etat puisse dans le cadre de l'élaboration du budget de l'Etat estimer le montant des subsides nécessaires aux assurés de condition économique modeste, les assureurs sont tenus d'aviser le service de l'assurance-maladie le 30 juin de chaque année au plus tard des augmentations de primes qu'ils envisagent d'appliquer l'année suivante et d'en justifier le bien-fondé.

3 Si le département constate des primes et des tarifs excessifs ou d'autres anomalies, il est tenu d'intervenir auprès des institutions concernées et d'en aviser l'autorité fédérale compétente, si ceux-ci ne sont pas modifiés à satisfaction. Il peut, le cas échéant, retenir le versement de tout ou partie des subsides jusqu'à décision rendue par l'autorité fédérale.

Art. 7

Information des assurés

Afin de répondre notamment aux exigences de l'article 10 de l'ordonnance fédérale sur l'assurance-maladie, le service de l'assurance-maladie adresse à toutes les personnes tenues de s'assurer en vertu de la loi fédérale une notice les informant du nouveau régime de l'assurance-maladie obligatoire, des prestations offertes, des droits et obligations qui en résultent ainsi que des conditions à remplir pour bénéficier de réductions de primes.

Art. 8

Voies de droit

1 Toute décision prise par une autorité chargée d'appliquer la présente loi ou ses dispositions d'exécution peut faire l'objet d'une réclamation auprès de l'autorité qui la prise dans le délai de 30 jours dès sa notification.

2 Les décisions rendues sur réclamation peuvent faire l'objet d'un recours auprès du Tribunal administratif dans les 30 jours dès leur notification. Il en est de même des décisions rendues sur opposition par les assureurs en vertu des arti-cles 85 et suivants de la loi fédérale.

3 Les procédures de réclamation et de recours sont simples, sans formalisme et gratuites. Le Tribunal administratif applique la maxime d'office. Les assurés peuvent recourir à un mandataire de leur choix.

4 Le Tribunal administratif est également compétent pour statuer, comme Tribunal arbitral cantonal, sur les litiges entre assureurs et fournisseurs de prestations soumis à la procédure prévue par l'article 89 de la loi fédérale. Dans ce cas, le Tribunal administratif siège à trois magistrats avec un représentant désigné par chacune des deux parties précitées.

Art. 9

Révision périodique de la loi

Le montant des revenus déterminants au sens de l'article 3 et le montant des subsides alloués en vertu de l'article 4 sont revus tous les deux ans en fonction de l'évolution de la coût de la vie, de la situation économique et du montant des subsides versés par la Confédération.

EXPOSÉ DES MOTIFS

La nouvelle loi sur l'assurance-maladie approuvée par le peuple suisse le 4 décembre 1994 va entrer en vigueur le 1er janvier 1996. Bien que l'ap-plication de cette nouvelle loi soit pour l'essentiel de la compétence des autorités fédérales, un certain nombre de tâches importantes sont confiées aux cantons qui sont tenus d'adopter une loi d'application conformément à l'article 97 de la loi fédérale. Certaines dispositions d'exécution à charge des cantons doivent être édictées avant le 1er janvier 1996, conformément à l'article 97 précité et à l'article 2 de l'ordonnance fédérale concernant l'en-trée en vigueur de la loi fédérale. Les gouvernements cantonaux peuvent arrêter à cette fin une réglementation provisoire. C'est ce qu'a fait le Conseil d'Etat en approuvant le 18 octobre 1995 le règlement relatif aux subsides accordés à certains assurés des caisses-maladie, lequel ne traite, toutefois, que l'une des tâches confiées aux cantons en vertu de la nouvelle loi fédérale.

Il devient donc urgent que notre canton adopte les dispositions d'exé-cution de la loi fédérale portant sur les tâches qui lui sont dévolues et vu l'importance des questions en jeu, il paraît normal que ces dispositions soient arrêtées par le Grand Conseil et non par le Conseil d'Etat , même si c'est à titre provisoire. Tel est l'objet du présent projet de loi.

L'adoption d'une loi cantonale d'application est d'autant plus urgente qu'elle permettrait de régler les questions principales en suspens et de pré-voir l'obligation au Conseil d'Etat d'adresser à toutes les personnes assujet-ties à l'assurance obligatoire une notice les informant du nouveau régime de l'assurance-maladie obligatoire, des prestations offertes, des droits et obliga-tions qui en résultent ainsi que des conditions à remplir pour bénéficier de réductions de primes (voir article 7 du projet de loi).

Cette information, qui répond notamment aux exigences de l'article 10 de l'ordonnance fédérale sur l'assurance-maladie, constitue une démarche élémentaire de la part des autorités, en raison de l'importance de la nouvelle loi pour nos concitoyens qui sont tous directement concernés. Elle répond surtout à une nécessité évidente, vu les nombreuses questions que se posent nos concitoyens en relation avec la nouvelle loi fédérale et les inquiétudes provoquées par les importantes augmentations de primes annoncées par certaines caisses-maladie, qui ne correspondent pas aux indications données en son temps par les autorités.

Le présent projet de loi vise également à instituer un régime plus équi-table d'allocation des subsides des pouvoirs publics au profit des assurés de condition économique modeste au sens de l'article 65 de la loi fédérale. En effet, le Conseil d'Etat a prévu dans son règlement provisoire que les ayants droit bénéficieraient d'une diminution de leurs primes d'assurance obliga-toire de 60 F par mois, quel que soit le montant de leurs revenus. Le présent projet de loi s'inspire du système mis en place par le canton de Vaud, qui prévoit des subsides modulés en fonction de l'importance des revenus des ayants droit, ce qui tient mieux compte de la situation individuelle de cha-cune des personnes concernées (voir article 4 du projet de loi).

Les auteurs du projet de loi ne disposant pas des statistiques relatives aux nombres de personnes concernées par catégorie de revenus, n'ont donc pas pu vérifier si le total des subsides alloués selon le système proposé correspond au total des subsides que le Conseil d'Etat propose de verser en vertu de son règlement du 18 octobre 1995. Les montants figurant dans le projet de loi pourront être adaptés sur la base des indications détenues à ce sujet par le Conseil d'Etat, ce projet ayant pour but premier de fixer le principe de subsides proportionnels aux revenus des ayants droit. Les barèmes devront être revus, le cas échéant adaptés, tous les deux ans, conformément à l'article 9 du projet de loi.

Le projet de loi prévoit de maintenir des subventions cantonales aux caisses-maladie pour leurs prestations d'intérêt général et notamment pour assurer, dans le cadre de conventions à conclure avec ces caisses, la prise en charge d'actions préventives, telles que celle destinée à l'examen mammaire à laquelle le Conseil d'Etat a malheureusement dû renoncer.

Le versement de ces subventions donne droit à l'Etat de contrôler les comptes et bilans des caisses-maladie et de se prononcer sur le bien-fondé notamment d'augmentations des primes de l'assurance obligatoire. Pour les motifs invoqués à l'article 6 du projet de loi, les auteurs de ce dernier sont convaincus que l'Etat est en droit de demander les informations nécessaires à cet effet auprès des assureurs pour se prononcer sur l'augmentation de leurs primes, ce qui permettra au département chargé de l'application de la loi d'intervenir le cas échéant auprès de ceux-ci comme des fournisseurs de prestations au sens de la loi fédérale lorsqu'il constate des abus et, si néces-saire, de dénoncer ces abus auprès de l'autorité fédérale compétente pour prendre les décisions qui pourraient s'imposer.

Il est évident que les autorités cantonales peuvent jouer un rôle très important pour lutter contre les hausses de coûts abusives dans le domaine de la santé lorsqu'elles sont en possession des informations dans ce domaine, même si le pouvoir de décision leur échappe. Vu les abus constatés à Genève, il est indispensable de donner au Conseil d'Etat les moyens d'être correctement informé pour qu'il puisse intervenir efficacement selon les intentions qu'il a exprimées lors de la séance du Grand Conseil du 10 no-vembre 1995.

Une des autres tâches importantes confiées aux cantons est le contrôle de l'obligation de s'assurer des personnes assujetties à l'assurance obliga-toire domiciliées dans le canton et la désignation des personnes de condition économique modeste pouvant bénéficier des réductions des primes d'assu-rance prévues par la loi fédérale. Les articles 2 et 3 du projet de loi prévoient que le service chargé de l'application de la loi doit aviser personnellement toutes les personnes tenues de s'assurer et tous les ayants droit aux subsides (et non uniquement une partie d'entre elles) de cette obligation de s'assurer et de ce droit aux subsides.

Enfin, l'article 8 prévoit les voies de droit qui doivent être créées par les cantons et la mise en place d'une procédure simple et gratuite, conformément aux exigences de la loi fédérale.

Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver un bon accueil au présent projet de loi.

Préconsultation

M. Pierre Froidevaux (R). Notre groupe salue la force de la proposition de nos collègues députés de l'Alliance de gauche, qui se sont attelés à un sujet délicat. Nous partageons pleinement leur souci de garantir à toute notre population le meilleur accès possible aux soins.

Ce projet de loi est sincère et cherche à améliorer très visiblement la manière dont les subsides fédéraux pourraient être versés aux ayants droit. Il mérite donc un excellent travail de commission. Nous espérons que cet examen amènera une loi genevoise d'application de la LAMAL possédant les qualités suivantes : on la veut juste, efficace et moderne.

Pour être juste, la loi doit répartir les subsides en ciblant la population qui en a réellement besoin. Or, les auteurs du projet de loi ont bien prévu des montants progressifs selon le revenu déterminant, mais ils n'évitent pas l'arrosage automatique.

Tel quel, ce projet comprendrait notamment un subventionnement de la plupart de nos jeunes dès leur majorité civile, soit dès dix-huit ans bientôt, sans qu'il soit tenu compte du revenu familial. Nous pensons qu'il faudrait, au contraire, le prendre en compte, afin que seules les personnes qui en ont vraiment besoin touchent ces subsides.

Pour que la loi soit juste, il faudrait encore que le montant de ces subventions soit identique pour une même population cible. Or, tel n'est pas le cas. Lorsque les auteurs prévoient pour tous les bénéficiaires des prestations complémentaires - AVS et OCPA - un subside égal au montant de la prime d'assurance obligatoire, ils ne tiennent pas compte du fait que celle-ci présente d'importantes variations selon les caisses. Faut-il choisir la meilleur marché qui deviendra rapidement la plus chère en fonction des risques véhiculés précisément par cette population ? C'est un problème technique très difficile.

Ces difficultés nous conduisent à discuter de l'efficacité, la seconde qualité souhaitée pour cette loi.

De son efficacité dépend son application et, de cette application, le maintien de la garantie constitutionnelle de l'égalité des soins. Au vu de sa complexité, il faudra s'assurer d'un nombre correspondant de fonctionnaires pour garantir cette nouvelle loi, qui pourrait se compliquer encore en commission. Nous nous heurterons alors à d'autres dysfonctionnements liés aux contraintes budgétaires de l'Etat.

D'où la troisième interrogation : cette loi est-elle moderne ? Correspond-elle à notre temps ? Je suis toujours frappé par cette création éperdue de textes sur le même mode. Le monde politique, qu'il soit de gauche, du centre ou de droite, protège sa population en établissant des règles si complexes qu'on en perd le goût de l'individu solidaire au profit d'une politique élitaire.

Je conçois que notre collègue Grobet ait beaucoup d'expérience, du fait que, depuis plus d'un quart de siècle - et il n'est pas le seul dans cette salle - il applique toujours les mêmes schémas.

Durant ce quart de siècle, la vie quotidienne a pourtant beaucoup changé. Les outils de gestion se sont notamment simplifiés au prix de réformes continuelles. Ici, ce n'est pas une réforme qu'on entreprend, mais une construction supplémentaire dans une cité administrative toujours plus éloignée de l'individu. En effet, ce projet de loi arrive même à faire référence à une loi plus que centenaire, puisqu'elle remonterait au 9 novembre 1887.

Dans ce magma de prestations, de subventions, de subsides, d'allocations, que l'Etat accorde à un titre où à un autre, ne pourrions-nous pas disposer, un jour, d'une loi unifiée et simple pour tous ? Par exemple, une loi fiscale qui proposerait un barème négatif pour les bas revenus, puis nul, et enfin positif pour les hauts revenus ?

L'étude, par ce parlement, de cette seule échelle nous permettrait, annuellement, d'adapter l'aide et les prélèvements avec une seule loi et en un seul vote, ce qui réduirait considérablement les coûts de notre administration sans parler de la longueur de nos propres séances.

Nous avons à faire face à de graves problèmes et nous nous devons d'y trouver des solutions nouvelles. C'est cette force-ci de proposition que je souhaite à notre gouvernement.

M. Christian Grobet (AdG). La nouvelle loi fédérale sur l'assurance-maladie délègue un certain nombre de tâches, bien que peu nombreuses, aux autorités cantonales. Le canton de Genève a donc l'obligation de prendre des dispositions d'application de la loi fédérale. Elles peuvent être prises, à titre provisoire, par des décrets du Conseil d'Etat, sous forme de règlements, mais elles devront, par la suite, dans des délais que l'autorité fédérale fixera, être reprises dans des lois d'application, Monsieur Froidevaux.

Ce qui m'amène à dire que notre démarche n'est pas due au seul plaisir d'une «légiférite», comme vos propos pourraient le laisser croire, mais répond à une obligation qui nous est fixée par la loi fédérale.

Contrairement aux textes que l'on voit d'habitude sur cette question, il me semble que notre projet de loi est relativement succinct. Il pourrait constituer un modèle du genre. Si l'on compare avec les textes fédéraux, lois et ordonnances, nous proposons un texte de loi cantonale concis, et peut-être même trop, comme vous l'avez dit.

Il est vrai que nous ne disposons pas, contrairement à l'administration, des personnes compétentes qui pourraient rédiger l'ensemble des dispositions d'application de la législation fédérale. Dès lors, nous n'avons pas traité certaines questions.

Le but premier de notre projet de loi est d'aborder un problème qui nous paraît absolument fondamental : l'information de nos concitoyens sur le nouveau régime d'assurance-maladie, très différent du régime précédent.

A cet égard, nous déposerons également une proposition de motion, lors de la prochaine séance du Grand Conseil. Comme cela, certains députés des bancs d'en face ne pourront plus dire que nous présentons volontairement une motion et un projet de loi, conjointement sur le même sujet, afin d'allonger notre temps de parole.

Malgré toute la peine que se donne la presse pour relayer les conférences de presse du Conseil d'Etat et celles d'autres milieux, comme les médecins ou les caisses maladie, il faut reconnaître que l'information diffusée n'est pas suffisante. Aujourd'hui, le public est mal informé, d'une part, sur les nouveautés de la loi et, d'autre part, sur ses droits et obligations.

C'est la raison pour laquelle nous vous demandons instamment, Messieurs les conseillers d'Etat, de faire une notice pour l'ensemble des assurés, soit l'ensemble de la population genevoise. Je ne veux pas, par avance, répéter ce qui figure dans notre motion, mais nous relevons que vous aviez effectué un excellent travail - remarquez que nous ne critiquons pas toujours votre action ! - lors de l'entrée en vigueur de la loi sur les droits politiques, à l'occasion de laquelle une notice explicative, joliment illustrée, avait été envoyée à toute la population. Nous pensons que l'assurance-maladie est le type même d'innovation législative où cette information doit être donnée. Elle pourrait être jointe, Monsieur Vodoz - ce serait une petite note agréable - à la déclaration d'impôts pour faire des économies d'affranchissement.

L'autre point important a été souligné par M. Froidevaux : ce sont les modalités de répartition des subsides fédéraux, cumulés avec les subsides cantonaux pour les assurés de condition modeste. Alors que vous nous dites que nous suivons des références appartenant désormais au passé, je pense, au contraire, que nous avançons résolument dans le même sens que les autorités, à savoir éviter un arrosage général et n'allouer un subside qu'à ceux qui en ont vraiment besoin. Je conviens avec vous que cet exercice est périlleux.

On peut effectivement se poser la question - et je vous rejoins à cet égard - de savoir si l'on doit prendre en charge intégralement les primes de tous les bénéficiaires des prestations complémentaires, parce qu'il est vrai que certains se trouvent probablement en meilleure position que d'autres citoyens n'ayant pas encore atteint l'âge de la retraite et vivant avec des revenus plus modestes.

Comme on l'a dit dans l'exposé des motifs, nous avons d'abord souhaité poser le problème d'une distribution progressive des subsides plutôt qu'un montant égal pour tous les bénéficiaires. J'ai lu avec intérêt les déclarations de M. Segond - qui, du reste, ne m'ont pas étonné - dans lesquelles il se disait ouvert à un autre mode de répartition. Nous avons étudié l'exemple vaudois qui veut uniformiser les primes, mais nous avons opté pour un système de primes différent. Je ne suis pas convaincu que le système vaudois est meilleur parce que c'est peut-être une manière de fabriquer un oreiller de paresse pour certaines caisses maladie qui tirent les primes vers le haut.

En commission, les députés pourront faire des propositions que nous ne pourrons de toute façon pas chiffrer, car, si l'on veut faire quelque chose de sérieux, on ne peut le faire qu'avec les moyens financiers de l'Etat.

Enfin, vous constaterez que nous demandons instamment au canton de pouvoir intervenir. Il ne pourra pas fixer les primes, Monsieur le conseiller fédéral... Pardon, Monsieur le conseiller d'Etat Segond ! (Rires.)

Une voix. Monsieur le conseiller national !

M. Christian Grobet. Je confonds les sessions !

Monsieur le conseiller d'Etat, connaissant les humeurs de la Confédération, je doute qu'elle veuille accorder une délégation de compétence au canton, ce qui nécessiterait encore une modification de la loi. Mais je crois que nous avons imaginé un système qui permettrait néanmoins au Conseil d'Etat d'intervenir de manière efficace et, le cas échéant, de transférer le «bébé» - si je peux m'exprimer ainsi - à Berne. Merci de votre accueil à notre projet de loi !

M. Pierre-Alain Champod (S). Le parti socialiste accueille favorablement ce projet de loi.

Indiscutablement, le problème de l'assurance-maladie est au coeur de l'actualité. La population est inquiète par rapport à l'augmentation des primes et désorientée par les diverses propositions des caisses maladie, qu'il s'agisse des franchises, des systèmes HMO ou des réseaux de santé.

De plus, les subsides accordés aux assurés les plus modestes ne correspondent pas aux attentes que les modifications de la loi fédérale permettaient d'envisager. Cette distribution de subsides résout moins bien le problème de l'inégalité des revenus face aux cotisations des assurances-maladie que les propositions de l'initiative lancée par le PS et l'USS, qui prévoyaient des cotisations calculées en fonction du revenu des assurés. Malheureusement, ce projet a été refusé par le peuple. Cependant, suite à l'augmentation des cotisations, peut-être une partie de la population regrette-t-elle ce vote !

On constate aussi que, malheureusement, le budget social de l'Etat n'a pas augmenté autant que le mécanisme des subventions fédérales pouvait le laisser espérer. A Genève, une partie des montants déjà assumés par l'Etat pour les bénéficiaires de l'OCPA a passé, dans le budget, de la rubrique «OCPA» à la rubrique «Subventions aux assurances-maladie», ce qui a permis d'obtenir le maximum de subventions de la Confédération mais n'a pas augmenté le budget social.

Concernant les subsides, par voie réglementaire, le Conseil d'Etat a accordé un montant unique de 60 F à toutes les personnes n'étant pas bénéficiaires de l'OAPA, ce qui pose un certain nombre de problèmes, notamment quant à l'effet de seuil, que le projet de loi de l'Alliance de gauche se propose de corriger.

Je rappelle qu'auparavant les assurés modestes recevaient un subside s'élevant à 30, 45 ou 65 F. Celui qui touchait, l'année dernière, un subside de 30 F, recevra, cette année, 60 F, mais cette augmentation ne compensera pas la hausse de sa cotisation d'assurance-maladie qui grèvera d'autant son budget.

Pour ce qui est des propositions chiffrées de l'Alliance de gauche, nous aurons l'occasion de discuter en commission du nombre de paliers nécessaires ou du revenu déterminant pour bénéficier d'un subside, ainsi que du montant de celui-ci. Ce sont des questions techniques sur lesquelles je n'entrerai pas en matière aujourd'hui.

Enfin, ce projet de loi sur l'assurance-maladie est le bienvenu dans la mesure où la loi cantonale, que nous avons votée il y a déjà quelques années, est devenue caduque pour bon nombre de ses articles, en vertu de l'entrée en vigueur de la nouvelle LAMAL.

Pour l'ensemble de ces raisons, nous souhaitons que ce projet soit renvoyé en commission afin que nous puissions le discuter en détail.

Ce projet est renvoyé à la commission des affaires sociales.

IU 135
14. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation urgente de M. Andreas Saurer : Aide à domicile. ( ) IU135
Mémorial 1995 : Développée, 5782.

M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat. Je réponds au nom du Conseil d'Etat, mais sous la surveillance de M. Vodoz, notre président pour quelques jours encore !

Chaque année, le Conseil d'Etat rend un rapport sur le développement de l'aide à domicile, qui se trouve dans l'exposé des motifs du projet de budget ou dans le rapport de gestion de l'Etat pour l'année écoulée.

Le dernier texte publié figure dans l'exposé des motifs du projet de budget 1996, aux pages 299, 300, 301 et 302. (M. Saurer proteste.)

Ce texte - écoutez d'abord la réponse que je vous donne, vous la contesterez ensuite ! - porte sur la nouvelle législation et son application, les activités de la commission cantonale de l'aide à domicile, les études en cours, les comptes et les crédits, et sur l'effet de transfert des soins hospitaliers aux soins à domicile.

Vous avez raison sur un point : il est vrai que ce rapport ne donne pas les statistiques d'activités des services d'aide à domicile. Cela s'explique par le fait qu'ils n'appartiennent pas à l'Etat : ce sont des services privés dépendant d'associations privées, subventionnées.

Ces statistiques sont disponibles dans les rapports d'activité de la Croix-Rouge, du SASCOM, de l'Association genevoise d'aide à domicile, du Service d'aide familiale et de la Fédération genevoise des services d'aide à domicile.

Cela étant, je vous préparerai volontiers une addition des chiffres contenus dans ces rapports, mais nous ne pouvons pas commencer à publier des statistiques sur les activités des services privés que nous subventionnons, car nous devrions alors le faire pour toutes les associations privées au bénéfice de subventions !

Cette interpellation urgente est close.

La séance est levée à 19 h.