République et canton de Genève

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PL 12970-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Stéphane Florey, Christo Ivanov, Eric Leyvraz, Patrick Lussi, André Pfeffer, Patrick Hulliger, Eliane Michaud Ansermet, Thomas Bläsi, Cyril Aellen, Virna Conti, Murat-Julian Alder, Helena Rigotti, Fabienne Monbaron, Philippe Morel modifiant la loi pour une mobilité cohérente et équilibrée (LMCE) (H 1 21) (Prioriser le phonoabsorbant avant les 30 km/h)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 23 et 24 juin 2022.
Rapport de majorité de Mme Marjorie de Chastonay (Ve)
Rapport de première minorité de M. Christo Ivanov (UDC)
Rapport de deuxième minorité de M. Philippe Morel (PLR)
Rapport de troisième minorité de M. Patrick Dimier (MCG)

Premier débat

Le président. Nous traitons maintenant le PL 12970-A, classé en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole à Mme Marjorie de Chastonay, rapporteure de majorité.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des transports a étudié ce projet de loi durant trois séances. Il propose de prioriser le phonoabsorbant avant la mesure de limitation de vitesse à 30 km/h. La commission a auditionné, bien évidemment, le département, puis il y a eu une discussion interne, qui a abouti au vote d'entrée en matière. La commission des transports vous invite à refuser ce projet de loi pour de nombreuses raisons.

La première, c'est qu'il faut laisser une marge de manoeuvre au département dans la réponse à la problématique des nuisances sonores. Le fait de conditionner la limitation à 30 km/h sur les routes au fait qu'il y ait un revêtement phonoabsorbant semble trop lier les mains de l'Etat. Toutes les villes, en Europe et en Suisse, passent à une limitation à 30 km/h, d'abord la nuit, puis en journée. Ce sont des mesures complémentaires. La politique du département est de prioriser le phonoabsorbant avant d'imposer les 30 km/h, mais il ne souhaite pas avoir une obligation, sachant que, dans certaines situations, le phonoabsorbant n'aurait pas beaucoup d'efficacité et qu'il faudrait plutôt passer aux 30 km/h sans prioriser le phonoabsorbant.

Une deuxième raison invoquée pendant les discussions, c'est que le canton n'applique pas le phonoabsorbant partout, parce que justement, il applique la loi 8644 ouvrant un crédit d'investissement pour assainir le bruit routier. Du point de vue légal, le reste du réseau ne nécessite pas de diminution des nuisances sonores. Par ailleurs, les revêtements phonoabsorbants sont légèrement plus fragiles et ont une durée de vie réduite. Si on les posait partout, on devrait les renouveler de manière plus fréquente, avec les conséquences financières que cela suppose en raison des chantiers. Ce sont évidemment des interventions qui impacteraient la circulation et qui créeraient des nuisances pour les riverains. C'est pour cette raison que le département agit principalement sur le revêtement phonoabsorbant dans les secteurs à assainir mais pas forcément partout, et qu'il n'est pas exclu de mettre aussi du phonoabsorbant à un endroit sensible, si cela est nécessaire. En fait, c'est étudié au cas par cas. C'était la deuxième raison invoquée.

La troisième, c'est qu'il existe plusieurs manières d'agir sur le bruit: par exemple en limitant la vitesse à 30 km/h; en posant du revêtement phonoabsorbant; en utilisant ces deux méthodes de manière complémentaire; ou encore en réduisant le trafic, et bien d'autres. Quatrièmement, ce projet de loi mélange les mesures de prévention du bruit et des accidents. On ne peut pas conditionner l'une à l'autre: ce sont des mesures complémentaires, elles ne doivent pas être subordonnées l'une à l'autre. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas de phonoabsorbant qu'on ne peut pas limiter la vitesse à 30 km/h - ce point est important - dans certains quartiers, alors que cela pourrait être nécessaire pour des raisons de sécurité, de trafic ou d'assainissement du bruit.

Cinquième raison: cette disposition ne doit pas être inscrite dans la LMCE. Cette dernière ne parle justement pas de protection contre le bruit et concerne par ailleurs les zones I et II. La sixième raison de l'opposition de la commission des transports invoquée pendant nos débats était relative à la baisse de vitesse; or à travers la loi qui est proposée, on pourrait avoir des contraintes difficiles à mettre en place d'un point de vue technique. Septièmement, au niveau fédéral, avec l'OPB, il y a une nécessité de prioriser les mesures à la source, et l'OPB met au même niveau ces deux mesures.

Enfin, huitième raison: pour préserver l'avenir, si à un moment donné la question du phonoabsorbant devait évoluer différemment, il ne faudrait pas que cette contrainte-là empêche le canton d'assurer une protection efficace des habitantes et des habitants soumis à des nuisances excessives.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission des transports vous recommande de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi, qui a été déposé il y a un peu plus d'une d'année, demandait qu'on trouve une solution pour la mise en oeuvre rapide d'un revêtement phonoabsorbant. J'aimerais quand même rappeler ici que ce projet de loi était couplé avec le PL 12971, avec lequel il a été traité conjointement - et qui est d'ailleurs, je crois, le point suivant de l'ordre du jour; ce dernier projet de loi demandait l'ouverture d'un crédit d'investissement de 100 millions de francs pour la mise en oeuvre rapide d'un revêtement phonoabsorbant sur l'ensemble du réseau routier cantonal.

Le PL 12970 propose que la limitation à 30 km/h ne soit possible que si la pose d'un revêtement phonoabsorbant n'a pas été suffisante pour diminuer les nuisances liées au bruit routier dépassant les valeurs limites d'exposition, qui se situent, d'après l'ordonnance fédérale, à 60 ou 65 décibels de jour et à 50 ou 55 décibels de nuit.

Trois thèmes d'une étude de l'OFEV datant de 2016 ont été utilisés dans l'exposé des motifs. Cette étude est intitulée «Revêtements de routes peu bruyants. L'asphalte phonoabsorbant: un fort potentiel». D'après l'OFEV, l'asphalte phonoabsorbant a un fort potentiel, c'est d'une rare évidence.

Le bruit de roulement des pneus dérange effectivement aussi beaucoup et, aujourd'hui, le phonoabsorbant est certainement le seul moyen de diminuer l'impact des pneus sur la voirie. Je reviendrai plus tard sur la suite de l'argumentation. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Jean Romain (PLR), rapporteur de deuxième minorité ad interim. La rédactrice du rapporteur de majorité a dit que trois séances avaient suffi; trois séances avaient suffi, évidemment, selon elle, pour refuser ce projet de loi. Il nous en faudra peut-être beaucoup moins, et ce que j'aimerais, c'est que vous acceptiez cet excellent projet de loi qui vise à prioriser les méthodes de diminution du bruit routier que sont soit la pose d'un revêtement phonoabsorbant, soit une limitation de vitesse à 30 km/h. Rappelons que l'impératif reste la préservation d'un trafic fluide ainsi que le fait de permettre aux personnes de continuer de pouvoir choisir librement leur mode de transport, ainsi que cela est garanti par notre constitution. (Remarque.)

L'OPB avait fixé un délai au 31 mars 2018 pour que les tronçons routiers cantonaux - environ 140 kilomètres pour le canton de Genève - et communaux à assainir le soient. Le canton de Genève a, à ce jour, accompli des travaux sur plus de 90% de ce réseau, un travail qui a commencé en 1998 déjà et qui nécessite une dépense de 5,4 millions par année pour la période 2020-2024, date de la fin de ces travaux d'assainissement.

Nul doute, l'excès de bruit est une nuisance qui porte à conséquence sur notre santé. Il faut cependant souligner en préambule que depuis des années, des efforts importants ont déjà été consentis. Les constructeurs automobiles fabriquent des véhicules moins bruyants et moins polluants. Les émissions sonores des moteurs ont fait l'objet d'une attention particulière, de même que celles des pots d'échappement. Les pneumatiques contribuent largement aux émissions sonores. A des vitesses de 25 à 35 km/h, le bruit émis par le moteur et le pot d'échappement est pratiquement égal à celui produit par les pneus. Les voitures fabriquées depuis l'an 2000 environ sont équipées de moteurs à tel point silencieux que le bruit du roulement des pneus l'emporte à partir de 15 à 25 km/h selon le type de véhicule. La nature du pneu est un élément important dans cette chasse au bruit. Une voiture équipée de pneumatiques silencieux permet de réduire de moitié ces émissions sonores - environ de 3 décibels.

Le revêtement routier est un deuxième facteur important générateur du bruit du roulement des véhicules. Une étude de l'OFEV montre que les revêtements phonoabsorbants les plus efficaces entraînent une réduction du bruit routier qui équivaut à une diminution de 85% du trafic. D'ailleurs, un représentant du département nous a même affirmé: «Le revêtement phonoabsorbant est la mesure la plus efficace aujourd'hui pour lutter contre le bruit routier.» Et il a même ajouté: «Au niveau des entités publiques, on pose du phonoabsorbant dans un premier temps et on complète ces mesures avec d'autres mesures. On y est contraint par l'OPB, parce que si on ne le fait pas, la justice pourrait l'ordonner par la suite.» Donc, on commence par le phonoabsorbant ! Chers collègues, c'est l'objet même de ce projet de loi. Ce revêtement est beaucoup moins bruyant, grâce à sa structure superficielle fine, d'une granulométrie maximale de 4 millimètres et très poreuse, avec une teneur en vide d'au moins 12%.

Dans la chasse au bruit routier, il apparaît donc rationnel et simplement logique de considérer en priorité la pose d'un pareil revêtement, ainsi que ce projet de loi le propose, avant de vouloir systématiquement imposer une limite drastique de vitesse qui apparaît bien plus comme une nouvelle contrainte aux automobilistes que l'on veut voir disparaître des routes.

Pour les raisons évoquées, chers collègues, Monsieur le président, et avec une volonté affirmée de réduction efficace du bruit routier, le PLR soutiendra ce projet de loi et vous demande évidemment d'en faire autant.

M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de troisième minorité. Mes deux préopinants ont tellement bien couvert ce sujet que je vais prendre peu de temps, si ce n'est pour dire deux choses.

Aujourd'hui, cela vient d'être dit par le rapporteur de deuxième minorité, les pneumatiques ont fait d'énormes progrès. Il faut savoir que - cela a été dit en commission par le fonctionnaire qui s'occupe des questions relatives au bruit - il n'y a pas si longtemps que ça, un pneu ordinaire émettait 71 décibels. Aujourd'hui, et à moindres coûts - ce n'est donc pas une question d'être en faveur des riches, je le précise pour leur éviter la remarque de certains -, on trouve des pneus qui émettent 68 décibels.

Qu'est-ce que cela veut dire ? Vous savez tous comme moi que les décibels, c'est une exponentielle. Par conséquent, de 71 à 68, c'est plus de la moitié du bruit de roulage qui disparaît ! Cela signifie que la limite à 30 km/h est de nouveau une mesure tout à fait wokiste et dans l'air: on veut tous attaquer tout ce qui est bien établi, qui fonctionne. On préfère la marche des gens à la marche des affaires; c'est une manière de voir les choses. Ce n'est pas la nôtre. Ce que je veux dire, c'est: oui, mettons l'effort sur le phonoabsorbant, oui, mettons l'effort sur... Je crois même qu'il a été dit en commission qu'on pouvait envisager éventuellement des grâces fiscales sur les impôts des autos, si les voitures sont équipées de pneumatiques efficaces en matière de bruit.

Une fois encore, c'est comme tout à l'heure, sur la largeur des pistes cyclables: ce n'est pas le bruit qu'on soutient. Evidemment pas. Personne n'aime le bruit ! A commencer par moi-même. Mais trouvons pour le faire baisser des moyens techniques autres que de toucher par la petite porte, celle que préfèrent certains, les libertés des gens. On est de nouveau ici dans un combat et un débat qui touchent aux libertés individuelles. Alors, évidemment, se déplacer à pied, c'est le pied pour certains, mais il faut comprendre que pour d'autres, le caoutchouc des pneus est tout aussi bien. Merci.

M. Murat-Julian Alder (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens à commencer par rassurer M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco: je ne vais pas parler des pistes cyclables ni du covid ! (Commentaires.) Mais je vais dire à M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat chargé du département des infrastructures, que les Genevois sont très reconnaissants envers le Conseil d'Etat en ce qui concerne la politique qui a été menée ces dernières années, avec la pose de ces surfaces phonoabsorbantes, puisqu'elles sont efficaces. Elles fonctionnent. Et, en politique, c'est important aussi de dire quand quelque chose fonctionne et de ne pas toujours dénoncer ce qui dysfonctionne.

La grande question qui se pose aujourd'hui, c'est: quelle interprétation donnons-nous au principe de proportionnalité ? Le principe de proportionnalité, c'est celui qui veut que, lorsqu'on a une palette de mesures à disposition pour atteindre un objectif déterminé, on commence par les mesures les plus douces pour atteindre l'objectif en question et qu'on utilise les mesures les plus dures seulement s'il n'est pas possible de faire autrement. Pour ma part, contrairement à la «marjorité»... (Rires. Commentaires.) ...de la commission des transports, je pense que la limitation à 30 km/h, ce n'est pas la mesure la plus douce, mais bien au contraire, c'est la mesure la plus dure. Cela devrait donc être l'ultima ratio, le dernier recours. Et on ne doit pas oublier une chose: on vit à une époque où on a énormément d'autres moyens de réduire le bruit que ces surfaces phonoabsorbantes, on a aussi l'isolation des bâtiments contre le bruit, qui a aussi connu des développements importants ces dernières années. Alors certes, on peut toujours s'améliorer, mais on ne doit pas oublier cette mesure qui est essentielle.

Je dois dire qu'il y a quand même quelque chose de très curieux dans ce débat: au fond, on sait que les nouvelles technologies nous permettent d'entrevoir le développement rapide de véhicules qui fonctionnent autrement qu'avec du carburant, qui fonctionnent par exemple à l'électrique. Or que reproche-t-on aujourd'hui aux véhicules électriques ? Justement de ne pas faire assez de bruit ! Il y a même des spécialistes qui préconisent de doter ces véhicules de dispositifs qui génèrent un bruit artificiel pour alerter les piétons et les cyclistes ! C'est là qu'on en est aujourd'hui ! Par conséquent, si on adopte une vision véritablement progressiste et tournée vers l'avenir, le bon sens commande de partir du principe que dans quelques années, les véhicules, par la force des choses, vont faire moins de bruit, parce que c'est le type de véhicule qui va changer, parce qu'on va utiliser de moins en moins de véhicules qui tournent à la benzine et parce que, on l'espère, les nouveaux véhicules que nous aurons à l'avenir pourront faire des économies d'énergie.

Pour l'ensemble de ces raisons, Mesdames et Messieurs, je vous invite à soutenir ce projet de loi qui n'est rien d'autre que la retranscription dans la loi du principe de proportionnalité. Merci de votre attention.

Une voix. Bravo !

M. Philippe de Rougemont (Ve). Les auteurs de ce projet de loi auraient parfaitement raison de vouloir prioriser le phonoabsorbant, à condition d'éviter des éléments de la réalité que je vais devoir rappeler ici.

D'abord, le phonoabsorbant, c'est une méthode que l'on compte en centaines de millions et non pas en centaines de milliers. Il s'agit d'une technique qui perd ses effets au bout de trois à quatre ans. (Remarque.) La moitié de l'effet phonoabsorbant part au bout de trois à quatre ans après la pose... (Commentaires.) ...ce qui nécessite d'en remettre.

Autre élément de réalité: de toute façon, un tel réseau de chaleur va être - heureusement - installé à travers le canton que, par renouvellement naturel, chaque fois qu'il y a des travaux, c'est du phonoabsorbant qu'on pose. Donc, de toute façon, c'est dans le pipeline pour toutes les routes; on mettra du phonoabsorbant partout, parce que c'est devenu le nouveau standard.

Ensuite, prioriser les 30 km/h plutôt que le phonoabsorbant - c'est-à-dire l'inverse de ce qui est proposé ici - permet de réaliser d'abord une économie substantielle. Cela permet également des gains de sécurité: quand vous roulez à 50 km/h et que vous voulez vous arrêter, il faut 27 mètres; quand vous roulez à 30 km/h, c'est 13 mètres, parce qu'un véhicule, aujourd'hui, pèse 2 tonnes; or faire freiner 2 tonnes nécessite une longue distance. Et la différence entre 27 et 13 mètres peut sauver des vies.

Ensuite, demandez aux voisins, aux riverains, aux usagers des rues équipées de phonoabsorbant ce qu'ils en pensent lorsque passe un camion, lorsque démarre un scooter, lorsque passe une grosse moto: sont-ils contents ou pas contents de l'effet du phonoabsorbant à ce moment-là ? A mon avis, cela ne change rien du tout, parce que, quelle que soit la technique du pneu, quelle que soit la technique de la voiture, ces véhicules-là - et ils sont nombreux - effacent tous les effets du phonoabsorbant.

Dernier élément qui tient à coeur aux Verts: la première chose à faire lorsque l'on fait face à un problème, c'est de mettre en oeuvre la sobriété; mettre en oeuvre, comme on dit, les fruits les plus proches de la main. (L'orateur est interpellé. Remarque.) Ce qui coûte le moins cher, qu'on peut mettre en oeuvre immédiatement, ce sont les panneaux 30 km/h, c'est ce qu'il y a de plus intelligent. Il y a un effet sur la sécurité, il y a un effet sur le bruit, à moindre coût, et ensuite, on procède à ce qui est le plus cher. Et, comme je le rappelais tout à l'heure, cela va se faire de toute façon.

Ce projet de loi représente donc une mauvaise idée. C'est pour cela que les Verts vous invitent à refuser l'entrée en matière. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Vous transmettrez à M. de Rougemont que je le remercie d'avoir osé dire la vérité sur les objectifs des opposants à ce projet de loi. Je crois que M. de Rougemont a été clair: aujourd'hui, ils vont voter clairement contre la mobilité motorisée et ce sont clairement des mesures anti-voitures qui marquent de telles oppositions. Au moins, vous avez eu le courage de le reconnaître, de le dire très franchement, et je ne peux que le saluer.

Pour les mêmes raisons, et on l'a déjà dit à plusieurs reprises, le Conseil d'Etat en fait et en a toujours fait sa feuille de route - et il l'a lui-même rappelé tout à l'heure -, depuis le fameux dimanche noir où plus de 58% de la population a été trompée, où elle a accepté cette LMCE qui devait prétendument pacifier la mobilité... (Commentaires.) ...alors que, depuis ce fameux dimanche, cela n'a jamais été le cas. Non, le Conseil d'Etat a clairement pris le pari de mener une politique anti-voitures. Et on est convaincus que si la population devait revoter la LMCE aujourd'hui, les résultats ne seraient clairement plus les mêmes. (Commentaires.) Même si elle était acceptée une deuxième fois, le résultat serait beaucoup plus serré, parce que, quand on voit les oppositions aux mesures, ne serait-ce qu'à celles qui ont été prises dernièrement consistant à mettre quatre cents routes à 30 km/h, quand on voit tous les recours qui ont été déposés, on constate que la population n'est pas satisfaite de voir toutes ces rues mises à 30 km/h et on va plus vers un blocage qu'autre chose.

Reste la question de la jurisprudence; M. Murat Alder l'a très bien rappelé, il y a cette proportionnalité, mais il y a aussi ce que dit cette jurisprudence. Il me semble que la Confédération a été claire: on doit d'abord prendre des mesures telles que le phonoabsorbant, et après, si ces mesures ne suffisent pas, effectivement, on en vient à réduire la vitesse. Mais cela reste de toute façon une mauvaise solution, parce qu'aujourd'hui, l'Etat lui-même pousse à l'électrification des véhicules, mais il reste les pneus: si vous roulez avec un véhicule électrique qui est beaucoup plus lourd et qui a donc plus de frottement sur du phonoabsorbant, cela fait de toute façon davantage de bruit. (Commentaires.) Par conséquent, vous avez un revêtement phonoabsorbant, vous avez un véhicule électrique qui fait moins de bruit, mais il y a quand même ces histoires de frottement, d'où l'utilité du phonoabsorbant. Vous pourrez tourner les chiffres comme vous voulez...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Stéphane Florey. ...il n'empêche que nous vous recommandons fortement d'accepter ce projet de loi pour les raisons qui ont été évoquées...

Le président. Merci.

M. Stéphane Florey. ...notamment par les trois rapporteurs de minorité. Je vous remercie.

M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, cette fin de soirée est assez sympathique. Cette opposition que l'on fait entre les véhicules et les vélos est regrettable, mais elle est malheureusement nécessaire pour les débats. Le Centre est parfaitement conscient que les nuisances sonores ont un impact majeur sur la santé de la population, et tout ce qui peut être fait pour épargner la population doit être réalisé.

Il se trouve qu'en commission, nous avons appris que «fin 2020, la pose des revêtements phonoabsorbants réalisée à ce jour» - en 2020, donc - «est de 92%. En 2024, 100% des revêtements phonoabsorbants seront posés sur les routes cantonales». Même ainsi, il se trouve que ce n'est pas suffisant pour un certain nombre d'habitants de cette ville.

Le Centre, futur ex-PDC, sous l'impulsion de son magistrat, a fait beaucoup de bruit autour de la lutte contre le bruit... (Remarque. Rires.) ...et c'est à toute vitesse - et pas à 30 km/h ! - que l'arrêté déposé le 11 octobre par le Conseil d'Etat a scellé le sort de ce projet de loi, levant tout suspense quant au résultat du vote ou même de son application. Pour cette raison, le PDC a participé au résultat de la «marjorité» et a choisi de refuser ce projet de loi. (Rires. L'orateur rit.)

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Pablo Cruchon (EAG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, évidemment qu'il est intéressant de favoriser le phonoabsorbant, bien qu'il y ait un certain nombre de cautèles qui doivent être posées, et je crois que M. de Rougemont les a rappelées, par rapport à la perte d'efficacité.

Par contre, le problème de ce projet de loi est le fait de conditionner la mesure des 30 km/h à une pose préalable de phonoabsorbant, bien sûr, parce que la limitation à 30 km/h a d'infinis avantages sur le phonoabsorbant ! D'abord, elle fluidifie le trafic, et si les commissaires avaient écouté les auditions qui ont eu lieu à la commission des transports - vous savez que je ne suis pas un des plus assidus, et pourtant, je l'ai entendu, c'est donc la preuve qu'on pouvait l'entendre, si on écoutait !... Tout le monde le dit, l'Office fédéral de l'environnement l'a dit, un certain nombre d'associations l'ont dit: la limitation à 30 km/h fluidifie le trafic... (Exclamation.) ...en raison de la diminution des temps de freinage...

Une voix. Bien sûr ! (Commentaires.)

M. Pablo Cruchon. Bien sûr, évidemment ! ...et ce, études à l'appui. Deuxième avantage non négligeable: cela réduit l'ensemble du bruit, pas seulement celui du frottement, mais aussi celui des moteurs, et cela évite en partie en tout cas les pétarades, qui sont liées aux scooters, aux voitures à grosses cylindrées; je peux vous dire, habitant sur un axe fréquenté, sans phonoabsorbant, que les moteurs sont autant une nuisance que le roulement.

Troisième avantage, bien sûr, et pas des moindres: la sécurité. Une sécurité nécessaire, je l'ai rappelé dans le cadre du point précédent. Notre hypercentre et notre centre sont particulièrement hostiles pour les personnes âgées, pour les personnes à mobilité réduite, pour les enfants, pour les personnes qui ont des poussettes. C'est un environnement hostile, et nous avons bien entendu tout intérêt à réduire la vitesse, surtout que nous avons affaire à des voitures de plus en plus grosses, de plus en plus imposantes - des deux-tonnes, des gros SUV -, qui sont particulièrement dangereuses pour nos enfants. Par ailleurs, toujours du point de vue de la sécurité, on diminue la gravité des accidents qui pourraient survenir, puisqu'on a une vitesse d'impact beaucoup moins élevée.

Dernier avantage des 30 km/h par rapport au phonoabsorbant, c'est bien entendu l'immédiateté ! On peut décréter demain que toutes les rues de l'hypercentre sont limitées à 30 km/h, réduisant d'un coup massivement les nuisances sonores. Or, pour atteindre l'objectif de la pose du phonoabsorbant sur toutes les routes du canton, il faudra quelque temps. Et là, j'ai une critique à adresser au collègue Murat Alder, qui disait que la question de la proportionnalité était importante. Oui, elle est extrêmement importante ! Et comment appliquer cette proportionnalité, quand il s'agit d'un côté de vies humaines - je rappelle que les nuisances liées au bruit génèrent plus de cinq cents décès en Suisse et un grand nombre à Genève ? Comment mettre cela en proportionnalité avec le fait de pouvoir tranquillement rouler dans son SUV parce qu'on a la flemme de prendre un vélo ou de se déplacer à pied ? Ça n'a aucun sens ! Ce n'est pas proportionnel ! C'est au contraire, à tous les points de vue, criminel: criminel du point de vue de la santé publique, criminel du point de vue de l'urgence climatique. Il ne faut donc pas traiter ce problème dans ce sens-là.

Bien sûr, Ensemble à Gauche ne s'oppose pas à la pose de phonoabsorbant, mais on ne doit en aucun cas conditionner le développement de zones 30 km/h à cela. Par ailleurs, ce projet est particulièrement malhonnête, je tiens à le dire, parce qu'il a été déposé uniquement pour attaquer le plan du département sur la limitation à 30 km/h et non pas pour réellement gérer une problématique qui est importante pour nos concitoyennes et concitoyens. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'ai donné le chiffre avant, je le répète: 120 000 personnes aujourd'hui...

Une voix. Roooh !

M. Thomas Wenger. ...120 000 habitantes et habitants du canton de Genève souffrent du bruit routier, souffrent d'une pollution sonore qui est trop élevée aujourd'hui, et non pas trop élevée au sens que ce seraient des personnes qui souffrent parce qu'elles seraient un petit peu sensibles au bruit. Non: elles habitent dans des endroits où les normes en la matière, selon l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit, sont dépassées. Il s'agit donc de quelque chose d'objectif, ces 120 000 personnes souffrent et c'est une souffrance tout à fait objective.

Pour cela, il faut agir. M. le conseiller d'Etat Dal Busco prend des mesures, avec le canton et avec nous, au Grand Conseil, qui sont des mesures simultanées. On ne peut pas en prendre une seule, on doit prendre un paquet de mesures. Dans celui-ci, il y a bien entendu la pose de phonoabsorbant - j'y reviendrai; il y a la réduction de vitesse à 30 km/h; il y a le fait de créer, notamment dans les quartiers, des zones 30 ou des zones dites de rencontre à 20 km/h; il y a bien sûr le fait de réaliser des travaux d'isolation des bâtiments, et notamment de finir d'installer du double vitrage dans les bâtiments. Il faut agir simultanément. Il ne faut pas prioriser une de ces mesures, et c'est ce que le canton, l'Etat essaie de faire aujourd'hui.

Par rapport à la pose du phonoabsorbant, cela a été dit, 92% du réseau cantonal routier à assainir bénéficie aujourd'hui de revêtement phonoabsorbant. Ce serait donc faux de dire que rien ne se fait en la matière. C'est fait par le canton; c'est fait de manière importante, mais ce n'est pas la seule mesure.

Par rapport à la réduction de vitesse à 30 km/h, alors oui, ça vous a énervé - certains et certaines dans cette salle. Mais il y a beaucoup de villes qui vont dans ce sens-là aujourd'hui ! On peut citer Lausanne, qui est en train de prendre des mesures ambitieuses à ce titre; au niveau européen, on peut citer Paris, Grenoble, Lille, Nantes; en Autriche, Graz, par exemple; Bilbao, Madrid, Bruxelles... Toutes ces villes prennent des mesures de réduction généralisée à 30 km/h ! Alors vous transmettrez, Monsieur le président, quand j'entends M. Florey, UDC, nous dire: «Il y a eu des recours contre les arrêtés du 30 km/h, on voit bien que la population est contre !» (Rire.) Non, mais c'est absolument incroyable ! Vous avez l'UDC, le PLR, le TCS - donc, excusez-moi du raccourci, les «Neinsager» de la mobilité durable ! - qui déposent des recours contre les pistes cyclables, contre la limitation à 30 km/h, et qui osent nous dire: «Vous voyez, la population est contre !» Mais c'est vous qui êtes contre ! (Rires.) Et vous êtes complètement déconnectés de la majorité de la population par rapport à ça !

Il faut réduire la vitesse à 30 km/h, à part sur certains axes structurants, je vous l'accorde; il faut créer des zones 30; il faut créer des zones de rencontre; il faut, de manière générale, apaiser le trafic, réduire le trafic motorisé. Les gens le demandent, les 120 000 personnes qui souffrent du bruit routier nous le demandent, c'est également une question de santé publique avant d'être une question de mobilité. Je vous demande donc, une fois de plus, dans ce Grand Conseil, de prendre vos responsabilités. Le parti socialiste ne veut pas prioriser une mesure par rapport à une autre, mais veut agir avec un paquet de mesures, et nous irons dans ce sens-là. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ah, quel débat passionné ! C'est intéressant ! Ecoutez, moi je constate quand même une chose depuis que cette LMCE a été votée: au lieu de calmer le débat sur les transports, ça l'a ravivé, puissance dix ! Et d'ailleurs, qui a rallumé la mèche ? C'est les Verts ! (Exclamations. Commentaires.) Les Verts, parce qu'à peine elle était votée qu'ils ont déposé un projet d'amendement pour aller encore plus loin ! Donc en fait, ils ne voulaient rien pacifier ! Ils voulaient mettre le feu à la maison, et ils ont réussi, avec la complicité du conseiller d'Etat chargé de l'immobilité généralisée aujourd'hui ! (Commentaires.)

On peut interpréter tout ce qu'on veut, mais aujourd'hui, on voit tous les jours des travaux, sans qu'ils soient présentés dans un quelconque parlement - ni au municipal, ni ici -, où on supprime les places de parking - on ne sait pas comment elles sont compensées, on ne sait pas comment la loi est appliquée -, on élargit les trottoirs... Voilà !

Et est-ce que, vraiment, on a la preuve que les 30 km/h, ça fait moins de bruit ? Pas sûr du tout ! (Commentaires.) Ouais, ben on ne l'a pas vu ! (Vifs commentaires.) Tout ça fait que quand il y a eu sur la route du pont Butin l'essai d'abaissement de la vitesse à 50 km/h pour voir si ça faisait moins de bruit pour les immeubles d'à côté, ça a été un échec ! Ça n'a pas fait moins de bruit, puisque la vitesse est ensuite revenue à 60 km/h !

Une voix. C'est pas vrai !

Une autre voix. Si, c'est vrai ! (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Daniel Sormanni. Taisez-vous ! Chacun son tour ! (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît ! On se tait ! Laissez parler l'orateur !

M. Daniel Sormanni. Et puis alors, allons encore un peu plus loin ! Vous prétendez que les 30 km/h fluidifient le trafic ? Non ! La ville est complètement engorgée et bouchée, alors si vous voulez vraiment fluidifier le trafic, mettez-le à 0 km/h ! Alors là, c'est vraiment fluidifié, il n'y a plus rien qui bouge ! (Commentaires.) Et voyez-vous, il y a même des experts qui viennent nous raconter... Et c'est toujours les mêmes ! Notamment M. Kaufmann, de l'EPFL, qui vient toujours nous raconter la même chose ! Je ne le crois pas, je ne le crois plus ! Qu'il vienne aussi prétendre que pour fluidifier le trafic sur l'autoroute, il faut mettre une limitation à 60 km/h ! Non, mais on marche sur la tête ! Vous vous trompez complètement et je pense que... (Commentaires.) Oui ! Il faut contester cette mesure, et d'ailleurs, le MCG l'a aussi contestée - vous transmettrez à M. Wenger, parce qu'apparemment il n'a pas compris que le MCG a aussi contesté devant les tribunaux cette mesure généralisée des 30 km/h en ville ! C'est une erreur, ça n'améliorera pas la santé des gens ! (Commentaires.) Il faut voter ce projet de loi. Merci.

Une voix. Bravo, Daniel ! (Commentaires.)

Le président. Merci. Je passe la parole au rapporteur de deuxième minorité, M. Jean Romain.

M. Jean Romain (PLR), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Merci, Monsieur le président.

Le président. Pour vingt-cinq secondes.

M. Jean Romain. Oh là là ! Ecoutez, la réduction de vitesse ne peut à elle seule être une simple alternative aux autres mesures de diminution du bruit, parce qu'en fait, l'effet espéré de réduction du bruit, avec une limitation à 30 km/h, va être réduit par tout ce que l'on va faire pour justement un peu forcer les 30 km/h, à savoir les coussins berlinois, à savoir...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Jean Romain. ...les rehaussements, et le bruit qu'on prétendait supprimer...

Le président. C'est terminé.

M. Jean Romain. ...risque d'être augmenté par toutes ces mesures inutiles. Mettons d'abord le phonoabsorbant...

Le président. Merci.

M. Jean Romain. ...et ensuite, voyons ce qu'il faut faire...

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur.

M. Jean Romain. ...pour continuer dans le même sens. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Merci beaucoup. Je passe maintenant la parole au rapporteur de troisième minorité, M. Patrick Dimier.

M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de troisième minorité. Déjà ? (L'orateur rit.) Merci, Monsieur le président. Dans ce débat, on a entendu tout et un peu n'importe quoi. Je veux dire...

Une voix. Il est bien placé ! (Commentaires.)

M. Patrick Dimier. Je suis bien placé, Monsieur Guinchard, vous avez raison, mais attendez, vous allez en prendre une ! (Rires. Sifflements. Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît !

M. Patrick Dimier. Moi je ne fais que dans la parole, hein, je ne suis pas du tout quelqu'un de violent ! (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, laissez parler le rapporteur !

M. Patrick Dimier. Quand on vient nous dire que - je ne sais pas si vous avez capté cette phrase - «c'est les gens avec leur SUV», on cherche, on cible des catégories sociales pour un débat général. (Remarque.) Mais j'ai l'impression que Joseph est revenu parmi nous ! (Rire.) Que le père des peuples est là ! Il est dans cette salle ! (Rire.)

Une voix. Communiste !

Une autre voix. Staline, ouais... (Commentaires.)

M. Patrick Dimier. Tout ce qui est excessif est insignifiant. Mettons l'effort sur la diminution des bruits de roulement et on aura résolu notre problème; la question de la vitesse telle qu'elle a été exposée n'a rien à voir avec le bruit. C'est un combat social, wokiste et inacceptable ! On est dans une démocratie ! (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole va maintenant au rapporteur de première minorité, M. Christo Ivanov.

M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de première minorité. Pour deux minutes !

Le président. Tout à fait !

M. Christo Ivanov. Merci, Monsieur le président. Ce sera amplement suffisant. Cela a été dit par mon préopinant, un des gros enjeux sera toute la question du bruit, du développement des pneus sur le plan technologique, avec - on le voit - les améliorations qui ont été apportées, qui sont absolument incroyables - d'ailleurs, des tests se font dans le cadre des grandes compétitions internationales, de la formule 1, de la formule électrique qui se développe énormément dans le monde entier. Tôt ou tard, ils répondront à nos besoins en matière de réduction du bruit routier.

Pour répondre à notre collègue Philippe de Rougemont - vous transmettrez, Monsieur le président -, le phonoabsorbant, c'est huit à dix ans et non quatre à six ans. Ensuite, je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit par mon préopinant Daniel Sormanni: la gauche rouvre la guerre des transports, et je pense que ce n'est pas demain la veille qu'elle va se calmer !

En ce qui concerne les revêtements usuels, qui ont une granulométrie beaucoup plus grossière, ils sont tellement compactés lors de leur pose qu'ils ne comprennent presque plus de vide susceptible d'absorber une partie des bruits. Des recherches récentes montrent que les revêtements les plus silencieux génèrent 9 décibels de moins à l'état neuf, ce qui correspond, quant à la perception sonore, à l'élimination de six véhicules sur sept. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On voit donc bien que l'industrie fait un maximum pour améliorer et atténuer le bruit, qui, effectivement...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Christo Ivanov. Oui, je vais conclure. La minorité vous demande donc d'accepter cet excellent projet de loi. J'ai dit. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rends la parole au rapporteur de troisième minorité.

M. Patrick Dimier (MCG), rapporteur de troisième minorité. Oui, merci, Monsieur le président. C'est juste pour redire ce qui vient d'être dit par mon préopinant et souligner l'essentiel des efforts consentis par l'industrie d'une manière générale. Je comprends que des gens n'aiment pas les automobiles, je l'accepte, aucun problème ! Mais qu'on ne dise pas, s'il vous plaît, et de grâce, n'importe quoi ! Les efforts qui ont été faits, comme dans tous les domaines qui touchent la mobilité, ont été énormes ! Enormes ! Ce soir, j'ai l'impression qu'on est un peu shakespearien et qu'on fait «Beaucoup de bruit pour rien». (Exclamations.) Merci.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole. Il vous reste une minute treize.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. J'ai entendu des mots comme «wokisme», «Shakespeare», «pneus», «efforts de l'industrie»... (Remarque.) Bon, on peut expliquer la vie avec ce projet de loi, mais je pense que le but de ce texte, c'est vraiment toute cette question de conditionnalité; et nous, nous nous opposons très fermement à cette conditionnalité, parce que si on acceptait ce projet de loi, cela bloquerait la possibilité...

Une voix. Pas du tout !

Mme Marjorie de Chastonay. ...de limiter à 30 km/h...

Une voix. Pas du tout !

Mme Marjorie de Chastonay. ...s'il n'y avait pas de phonoabsorbant ! (Remarque.) Il s'agit de questions de bruit ou de sécurité. Ce sont deux sujets différents, il y a eu un mélange, une confusion. (Remarque.) Là, je parle du bruit. Cela a été évoqué, 120 000 personnes à Genève en souffrent. C'est un véritable fléau, c'est une question de santé publique. Il ne faut donc pas qu'il y ait cette conditionnalité, mais il faut laisser cette marge de manoeuvre au Conseil d'Etat pour justement évaluer quelles sont les mesures nécessaires et à quel endroit. Je conclurai sur ceci: la majorité de la commission des transports, je le redis, refuse ce projet de loi. Merci.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce projet de loi, à l'instar d'autres dont vous avez débattu précédemment, donne évidemment la désagréable impression - mais ce sentiment désagréable, on l'a assez souvent au sein du Conseil d'Etat par rapport à des objets (L'orateur rit.) - d'être en quelque sorte une réaction à l'action du gouvernement. Pourtant, l'action du gouvernement, dans ce domaine comme dans d'autres, n'est pas là pour chicaner les gens. (Remarque.) Elle est là en premier lieu pour faire respecter la loi - nous sommes le pouvoir exécutif -, et en particulier des lois qui ne sont même pas genevoises, mais fédérales: ici, l'ordonnance sur la protection contre le bruit.

Cela a été dit par plusieurs d'entre vous, il y a, dans ce canton, plus de 120 000 personnes, nos concitoyens... qui ne sont certainement pas tous devant leur écran de TV, mais je peux m'imaginer que ceux qui le sont, pour autant que le bruit dans l'endroit où ils se trouvent ne soit pas excessif - ou en tout cas pas trop important -, ont pu s'étonner des propos tenus ici. On a oublié cette réalité ! On nous a parlé de développement technologique, de ceci, de cela. La réalité, c'est qu'une bonne partie de nos concitoyennes et concitoyens se trouvent dans des endroits où les normes sont allégrement dépassées.

Le Conseil d'Etat ne veut pas rester inactif. Il n'est pas resté inactif, et ce depuis de très nombreuses années, puisque, comme cela a été très justement rappelé, il a fait ce qu'il pouvait faire, ce qu'il devait faire, en utilisant les outils à disposition, en particulier la pose de revêtement phonoabsorbant: plus de 90% du réseau cantonal est équipé - bientôt, ce sera la totalité, il faudra d'ailleurs renouveler tout cela -, mais ça ne suffit pas ! Ça ne suffit pas ! Et si, à certains endroits, des essais ont été menés - on a parlé de la route du pont Butin, d'ailleurs un endroit où il n'est pas question d'abaisser à 30 km/h. (Remarque.) Il s'agit de la ceinture urbaine, la vitesse y sera de 50 km/h d'après la stratégie vitesse. (Remarque.) A d'autres endroits, comme le boulevard du Pont-d'Arve ou le boulevard de la Tour, des essais qui nous ont été imposés par la justice, suite à des recours des habitants, et qui ont été menés de manière scientifique, ont démontré que, malgré le revêtement... (Remarque.) ...l'abaissement de la vitesse à 30 km/h réduisait le bruit de moitié. (Remarque.) C'est la réalité ! Et le Conseil d'Etat ne peut pas ignorer cette réalité et ne peut surtout pas ignorer le fait que, désormais, l'abaissement de la vitesse est reconnu comme étant un moyen, comme le phonoabsorbant, d'atteindre les objectifs et de permettre à nos concitoyennes et concitoyens d'habiter dans un environnement un peu plus calme. C'est ça, la question.

Avec cette loi, vous établissez un lien qui n'a pas lieu d'être, parce que nous faisons déjà cela. Alors vous allez me dire que ça ne nous coûte rien de l'inscrire dans la loi si on le fait déjà. Non, cela pose un problème: cela rigidifie la manière dont on pourra agir. C'est totalement préjudiciable, la rapporteuse de majorité a donné des exemples précis expliquant pourquoi il n'est pas souhaitable de le faire. Mais je voudrais juste rappeler encore une fois que la quintessence et le fond du problème, c'est la situation que vivent 120 000 habitantes et habitants de ce canton; je pense que si on a une petite pensée pour ces personnes-là, on doit refuser ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je mets aux voix l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12970 est rejeté en premier débat par 47 non contre 43 oui.  (Applaudissements à l'annonce du résultat.)