République et canton de Genève

Grand Conseil

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RD 1237-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier le rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil communiquant l'opposition formée le 14 mars 2018 par la commune de Versoix au projet de plan localisé de quartier n° 29780-541, situé entre la route de Suisse, le chemin Isaac-Machard et le chemin du Vieux-Port
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 29 et 30 août 2019.
Rapport de majorité de Mme Céline Zuber-Roy (PLR)
Rapport de minorité de Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S)
R 855-A
Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier la proposition de résolution du Conseil d'Etat concernant l'opposition formée le 14 mars 2018 par la commune de Versoix au projet de plan localisé de quartier n° 29780-541, situé entre la route de Suisse, le chemin Isaac-Machard et le chemin du Vieux-Port
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 29 et 30 août 2019.
Rapport de majorité de Mme Céline Zuber-Roy (PLR)
Rapport de minorité de Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S)

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle le traitement du RD 1237-A et de la R 855-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et la parole échoit à Mme Céline Zuber-Roy.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Déposés le 20 juin 2018, le RD 1237 et la R 855 ont été traités par la commission d'aménagement du canton au cours de deux séances en février 2019. L'objectif de cette proposition de résolution du Conseil d'Etat est de lever l'opposition de la commune de Versoix contre le PLQ «Les Buissonnets».

La parcelle faisant l'objet du plan localisé de quartier est située entre la route de Suisse, le chemin Isaac-Machard et le chemin du Vieux-Port. Sa surface de 3236 mètres carrés consiste en une bande de 25 mètres de large sur environ 130 mètres de long. Elle est propriété d'une fondation communale et se trouve en zone de développement 4A depuis son déclassement en 2014 par notre parlement. En substance, le PLQ prévoit la construction de deux bâtiments de deux étages avec attique destinés à des activités au rez-de-chaussée et à des logements dans les étages, la création d'un garage souterrain avec un accès perpendiculaire au chemin du Vieux-Port ainsi que le maintien dans son gabarit d'origine du mur se situant le long de la route de Suisse.

La commune de Versoix a fait opposition au projet, car elle souhaite un PLQ élargi à la parcelle voisine, la place Bordier, dont elle est propriétaire et qui faisait partie intégrante du périmètre déclassé en 2014. Pour elle, le PLQ actuel figera une situation alors qu'elle était en phase avec le département pour une réflexion plus large. Versoix a connu une période d'importants travaux sur la route de Suisse, il y a donc une volonté de porter de petits PLQ à une échelle plus importante. Par ailleurs, une étude complémentaire a montré que l'élargissement de la zone à la parcelle Bordier permettrait de construire 35 à 40 logements plutôt que les 21 prévus actuellement. La qualité du projet serait en outre meilleure, car la limitation à un seul terrain donne un demi-attique peu fonctionnel avec un rez-de-chaussée caché par le mur patrimonial.

Les autorités communales ayant fait opposition au PLQ, c'est à nous, Grand Conseil, de nous prononcer: soit nous acceptons la proposition de résolution et le Conseil d'Etat ainsi que la justice pourront aller de l'avant dans le traitement des oppositions, soit nous la refusons et le plan localisé de quartier ne pourra pas être adopté. La commune a demandé à M. Hodgers de surseoir à ce PLQ afin de relancer une opération avec concertation sur le périmètre élargi. Le conseiller d'Etat a trouvé cela logique sur le principe, mais n'a pas interrompu la procédure, envisageant que ce PLQ se fasse au travers d'un concours. C'est la raison pour laquelle Versoix a fait opposition.

Pour la commission d'aménagement, les arguments de la commune font sens. Outre la quinzaine de logements qui pourront être ajoutés, il est préférable de ne pas limiter un PLQ à une seule parcelle, car cela pourrait réduire les possibilités d'aménagement de l'espace public communal par la suite. Le refus de la commission vise à permettre à terme la réalisation d'un meilleur projet et n'a en aucun cas pour but d'éviter le développement du terrain concerné. Ainsi, la majorité encourage la commune et le DT à reprendre langue et à élaborer un nouveau projet incluant les deux parcelles.

A ce propos, il est regrettable que les dernières discussions entre la commune et le canton sur ce sujet datent de 2015 et que rien n'ait avancé depuis. Pour ces raisons, la majorité de la commission d'aménagement vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à rejeter la R 855 tout en prenant acte du RD 1237.

Le président. Je vous remercie. Ne vous inquiétez pas, Mesdames et Messieurs: le chronomètre fonctionne, même s'il y a un problème avec l'affichage. La parole va maintenant à Mme Nicole Valiquer Grecuccio.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, tous les ingrédients sont réunis pour que ce projet fonctionne - sur le long terme, évidemment, comme chaque fois qu'on veut réaliser un plan localisé de quartier en faveur du logement dans ce canton: une parcelle acquise dans les années 60 par l'Etat en vue d'y construire des appartements, le Conseil municipal de la commune de Versoix qui vote en 2008 l'achat de cette parcelle en faveur de sa fondation communale, un projet de modification de zone en développement 4A adopté par ce Grand Conseil en 2014, les louanges de la commission d'urbanisme quant à ce PLQ, c'est-à-dire une procédure normale pour créer de nouveaux logements.

Or que se passe-t-il ? La majorité, contre toute attente, au lieu d'appuyer dix ans de travail de la Fondation communale de Versoix Samuel May, à l'origine de ce projet visant la construction d'une trentaine d'habitations, refuse la proposition de résolution du Conseil d'Etat concernant l'opposition au PLQ formée par la commune de Versoix; commune qui se retourne contre ses propres intérêts, qui dessert les intérêts de sa propre fondation communale, qui renie son propre vote de 2008 en faveur du projet.

Mesdames et Messieurs les députés, si on veut parvenir à offrir du logement dans ce canton et sachant qu'on a ici tous les éléments à disposition - un plan localisé de quartier, une fondation communale -, alors il faut dire oui à cette proposition de résolution du Conseil d'Etat, très clairement s'engager en faveur de la réalisation d'appartements et arrêter de toujours prétendre vouloir réviser les PLQ alors qu'on ne fait que se cacher pour ne pas construire. Face au manque de logements à Genève, il est impératif d'accepter cette proposition de résolution et de soutenir la fondation communale. Merci beaucoup.

M. Stéphane Florey (UDC). Bon, sur le principe, on refusera de toute façon la proposition de résolution, il n'y a aucun problème à ce niveau-là. Quant au RD, la logique aurait voulu qu'on le rejette aussi, mais ça ne changera pas grand-chose d'en prendre acte étant donné que la proposition de résolution sera refusée.

Néanmoins, j'ai une question à poser au Conseil d'Etat, alors j'espère que le conseiller d'Etat ici présent pourra y répondre, puisque M. Hodgers n'est pas là: dans la mesure où ça fait déjà plus de quatre ans, bientôt cinq, que cette histoire dure, est-ce que le gouvernement pourrait nous dire si les choses ont quelque peu évolué ? Est-ce qu'il peut nous résumer en deux mots la situation ?

Parce que pour nous, si l'affaire est toujours bloquée à l'heure actuelle, il vaut mieux aller dans le sens de la commune afin qu'elle apporte la meilleure solution. En effet, elle est la seule à même de proposer quelque chose d'intéressant et de viable de façon à lever les oppositions. Je vous remercie.

M. Jacques Blondin (PDC). Dans ce dossier, il est de bon aloi de suivre les recommandations de la commune. La proposition qui a été discutée et à laquelle le département n'a malheureusement pas donné suite dans les délais, à savoir adjoindre la place Bordier à l'ensemble du PLQ, permet de densifier des parcelles à la demande de la commune dans des délais qui correspondent à sa planification. Il ne s'agit en aucun cas de freiner le projet et de perdre encore du temps; comme cela vient d'être souligné, voilà déjà quatre à cinq ans que cette affaire traîne. Le parti démocrate-chrétien va suivre l'avis de la majorité de la commission, c'est-à-dire que nous allons refuser la R 855 et prendre acte du RD 1237. Merci.

M. François Baertschi (MCG). Il y a un véritable problème de dialogue entre la commune et le canton, et pour le Mouvement Citoyens Genevois, cela n'est pas acceptable. On ne peut pas passer en force sans véritable concertation avec les habitants, on ne peut pas imposer des changements au forcing, il faut que l'affaire soit traitée beaucoup mieux qu'elle ne l'a été. C'est la raison pour laquelle le groupe MCG rejettera la proposition de résolution, et comme nous n'acceptons pas ces procédés, nous refuserons également de prendre acte du RD. Merci.

M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, en quelques mots, le groupe des Verts s'aligne parfaitement sur les propos de la rapportrice de minorité. Le projet a un historique et répond à une demande de la Fondation communale de Versoix, qui l'a développé, qui a investi dans ce dossier.

M. Baertschi a parlé d'une mésentente entre le canton et la commune, mais je pense qu'il s'agit surtout d'un problème entre la commune et sa propre fondation, ce qui est très étonnant. Il y a une rupture assez incompréhensible dans le cadre de ce projet, lequel est pourtant plein de bon sens, permet de construire des logements, vise à redynamiser un endroit qui est actuellement un parking et qui est censé devenir une place. Je pense qu'avant d'évoquer des désaccords entre l'Etat et la commune de Versoix, il faudrait que celle-ci règle ses histoires.

Cela dit, il est très surprenant de constater que cette affaire n'a pas bougé pendant pratiquement quatre ans. Ce qui me semble essentiel, c'est que nous prenions position d'une façon ou d'une autre ce soir afin que les choses aillent de l'avant. Pour leur part, les Verts vous encouragent à voter en faveur de la proposition de résolution. Je vous remercie.

M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, pour nous, cette situation est étonnante. Voilà quatre ans que ça dure, et on pourrait encore prolonger l'affaire... Une fondation communale veut construire des logements sur son terrain, et tout à coup, certains font du lobbyisme, notamment parmi les conseillers municipaux, pour ne rien développer. Ils mettent en route un autre projet en disant: «Hé, attendez, on veut faire quelque chose !» C'est l'essentiel de ce que nous avons compris lors des discussions de commission, et maintenant une majorité se dégage pour aller dans leur sens.

Ainsi, Mesdames et Messieurs de la majorité, vous n'allez pas créer d'habitations, et c'est bien ce qu'il y a de terrible dans ces communes qui veulent rester dans l'entre-soi, qui n'offrent pas d'appartements à leurs communiers ! On parle de leurs communiers, Mesdames et Messieurs, pas de gens étrangers au territoire ! Malheureusement, il faut le constater et je l'ai déjà signalé dans d'autres contextes, ce sont des dortoirs pour riches, personne ne veut accepter d'autres logements, en particulier des logements locatifs.

En l'occurrence, ce qui nous est proposé ce soir, c'est de repartir quasiment à zéro, et peut-être qu'on aura quelque chose dans six, sept, huit ans, voire neuf ans - et encore ! Encore faut-il que la commune de Versoix, avec tous les ennuis qu'elle connaît par ailleurs, se décide enfin à créer du logement social, parce que c'est de ça qu'il est question ici, Mesdames et Messieurs. Une fois de plus, nous regrettons que la majorité soutienne ce type de pratique, parce que tout le monde, y compris les locataires avec de bas revenus, a le droit de résider dans des communes - notamment à Versoix, notamment près du lac - qui sont aujourd'hui destinées aux plus riches d'entre nous, à la prétendue classe moyenne qui n'est plus du tout moyenne dans notre canton, qui est une classe sociale élevée et qui peut, elle, acheter des villas ou d'anciennes fermes pour les transformer. Je vous remercie de votre attention.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de minorité. Je suis obligée de relever qu'il y a une incompréhension totale de ce projet. Il ne s'agit absolument pas d'une opposition du canton à la commune, bien au contraire, il s'agit du soutien de l'Etat au projet d'une fondation communale, comme l'a rappelé David Martin, sur une parcelle acquise par la commune de Versoix pour sa fondation communale. Alors on peut se perdre en arguties, mais très clairement, dire non à cette proposition de résolution revient à repartir de zéro, à refuser la construction d'appartements par une fondation communale dans l'intérêt de la population, ce n'est pas autre chose.

Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, je vous demande de revenir sur votre position, d'appuyer le travail de la fondation communale et surtout de soutenir la construction de logements dont les citoyens ont cruellement besoin. Le vote sera bien sûr nominal, et je me réjouis de voir qui s'engagera aujourd'hui en faveur de la réalisation de logements dans le cadre d'une opération concrète qui a passé toutes les étapes et qui, par ailleurs, a obtenu un préavis positif de la commission d'urbanisme de ce canton. Je vous remercie.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse de majorité. Je le souligne encore une fois au nom de la majorité: l'idée n'est absolument pas de s'opposer à la densification, au contraire, nous soutenons un projet qui permettra d'obtenir plus de logements. La majorité a très bien compris l'objectif de cette proposition de résolution, qui vise à lever l'opposition de la commune de Versoix. Les minoritaires estiment apparemment mieux savoir que la commune ce qui est dans son intérêt, mais jusqu'à preuve du contraire, ce sont les autorités communales qui sont censées exprimer la volonté d'une municipalité; en l'occurrence, nous les avons auditionnées et elles nous ont clairement indiqué leur souhait qui est de discuter d'un PLQ plus large.

Ce qui est complètement incompréhensible, Mesdames et Messieurs... J'ai entendu certains d'entre vous parler de quatre ans, mais le Conseil d'Etat n'a pas évoqué ce sujet avec la commune de Versoix depuis 2015 ! 2015 ! Ça fait sept ans. Plutôt que de s'entêter et de porter devant ce Grand Conseil une proposition de résolution pour lever son opposition, il aurait été beaucoup plus simple de revenir vers la commune, de discuter avec elle, et à mon avis, en 2022, un nouveau PLQ aurait pu être adopté. Mais non, rien ne bouge depuis 2015.

J'ai repris contact avec la commune pour être sûre que le Conseil d'Etat n'ait rien entrepris dans l'intervalle. Il y avait de l'espoir, n'est-ce pas, puisque le vote en commission a eu lieu en 2019, nous nous sommes dit que l'exécutif pourrait venir en plénière nous annoncer: «Cet objet est caduc, nous avons trouvé un accord durant les trois ans que vous nous avez gentiment laissés en raison de votre ordre du jour surchargé.» Eh bien non, malheureusement, rien ne s'est passé en trois ans. Nous attendons dès lors que le Grand Conseil confirme notre volonté de ne pas passer en force pour enfin, nous l'espérons, pouvoir reprendre langue avec la commune quant à l'opportunité de construire ces 35 à 40 logements, qui auront une cohérence à cet endroit-là. Alors oui, en effet, beaucoup de regrets face à ce projet, mais nous espérons que dès que nous aurons refusé la levée de l'opposition, le gouvernement retournera négocier avec les autorités de Versoix. Je vous remercie.

M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, j'excuse tout d'abord l'absence de notre collègue Antonio Hodgers, qui ne peut pas être parmi nous ce soir pour évoquer le sujet. Le Conseil d'Etat prend acte des positions issues des débats à la commission d'aménagement, il regrette la situation. Pour dire la vérité, je ne suis personnellement pas en mesure - mais Mme la rapporteure de majorité a pris, semble-t-il, des renseignements - d'apporter une réponse à votre question, Monsieur le député, à savoir pour quelle raison il n'y aurait pas eu - j'utilise le conditionnel - de discussions à ce propos.

Toujours est-il que le Conseil d'Etat partage l'avis de la minorité de la commission: ce projet a suivi toutes les procédures habituelles depuis de nombreuses années - plus de dix ans -, il y a même eu un déclassement auparavant, auquel la commune était favorable. Nous nous trouvons vraiment dans une situation particulière où le bénéficiaire de l'acquisition de ce terrain, une fondation communale destinée à construire du logement, est visiblement en opposition avec les autorités de la commune. Il s'agit d'un contexte pour le moins inédit et, pour être tout à fait sincère, cela nous interroge. Le requérant, c'est-à-dire celui qui doit concrétiser l'opération, n'est pas un promoteur privé quelconque, c'est une fondation communale qui est bien décidée à créer ces appartements. Au demeurant, la qualité du projet en tant que tel a été largement relevée par toutes les instances qui ont été amenées à l'examiner.

Ainsi, par ma voix, le Conseil d'Etat constate une situation quelque peu étrange. Je peux comprendre la volonté de la majorité qui consiste à rejeter la proposition de résolution, à refuser de lever l'opposition de la commune afin d'obliger le Conseil d'Etat à discuter avec celle-ci, éventuellement à négocier avec la fondation - laquelle ne sera peut-être pas d'accord avec la commune - ou que sais-je encore. Cependant, Mesdames et Messieurs, le résultat de tout cela, ce sont des années de travail qui n'auront servi à rien, nous devrons relancer un processus. Tout le monde est apparemment d'accord de construire des logements, voire plus de logements, mais ceux-ci ne verront pas le jour à brève échéance, il se passera encore de nombreuses années avant qu'on voie quelque chose sortir de terre dans ce secteur si la majorité de ce parlement suit la majorité de la commission. Voilà ce que je voulais vous dire au nom du Conseil d'Etat. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote.

Mise aux voix, la proposition de résolution 855 est rejetée par 48 non contre 40 oui et 1 abstention (vote nominal).

Vote nominal

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1237.