République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10619-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit de 2'055'400F destiné à financer la mise en réseau des équipements de contrôles et le traitement des images numériques liées aux infractions de la circulation routière

Troisième débat

Le président. Le troisième débat, Monsieur le député, n'a pas été demandé, parce que le Conseil d'Etat était dans l'incapacité matérielle de le faire la dernière fois. Il n'est possible que pour autant qu'il y ait unanimité du Bureau; ce n'était pas le cas. Ce point a été reporté à la séance suivante, soit la présente. Le troisième débat est automatique. Vous avez donc laissé le temps à M. le député Stauffer de me saisir de quatre demandes d'amendements, lesquelles ont été distribuées aux chefs de groupe. Je lui passe la parole, de même, ensuite, qu'aux rapporteurs. Je précise néanmoins que le sens de ces amendements n'a à voir que d'une manière extraordinairement éloignée avec le projet de loi 10619. Malheureusement, en l'état, je ne peux pas empêcher un député de faire quelque tartarinade au sujet des amendements. Monsieur le député Stauffer, vous avez la parole.

M. Eric Stauffer (MCG). Monsieur le président, je croyais que j'avais la parole après les rapporteurs, mais peu importe.

Mesdames et Messieurs les députés, nous avons bien étudié ce projet de loi lors de notre dernier caucus au MCG et nous avons pris la décision suivante: il y a un problème dans l'ordre des priorités du gouvernement, du Conseil d'Etat et de Mme la conseillère d'Etat. Donc, nous proposons quelques amendements, puisque, en fait, on veut dépenser 2 millions pour rendre encore plus efficace la répression sur les automobilistes, c'est-à-dire installer de la libre optique pour les radars. Nous, nous pensons qu'il y a d'autres priorités pour la sécurité; pas la sécurité routière, mais la sécurité tout court.

Nous vous proposons un premier amendement qui remplacerait l'article 1. Je vous le lis: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit de fonctionnement. Un crédit global de 10 000 000 F pour l'engagement de nouveaux policiers et de personnel administratif.» Ça, c'est une priorité pour le canton de Genève !

Ou, deuxième amendement: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit d'investissement. Un crédit global de 2 000 000 F y compris TVA est ouvert pour la construction de 50 places de détention administrative.» Vous savez, tous ces pseudoréfugiés qui font des deals de drogue et que nous devrions enfermer.

Ou, troisième amendement: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit d'investissement. Un crédit global de 2 000 000 F y compris TVA est ouvert au Conseil d'Etat pour financer l'achat de GPS (systèmes de guidage) pour les véhicules d'intervention de la police.» Oui, Mesdames et Messieurs les députés, on veut mettre de la fibre optique sur les radars, mais, quand il s'agit d'intervenir en urgence, les policiers ne sont toujours pas tous équipés de GPS dans les voitures de police ! Voilà une autre priorité.

Et, finalement, on n'a pas pu s'empêcher, au MCG, de vous proposer le dernier amendement: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit de fonctionnement. Un crédit global de 3,20 F - en lieu et place des 2 millions ! - y compris TVA est ouvert pour l'achat d'un ticket de bus ou de tram pour Mme Rochat, afin qu'elle puisse se rendre au Victoria Hall, où M. Rudolph Giuliani - ancien maire de New-York - donne actuellement une conférence.» On fera économiser des voyages somptueux à New-York, lesquels ne servent strictement à rien ! Merci ! (Commentaires.)

Le président. Avant de passer la parole aux rapporteurs, je signale juste, d'une manière incidente, que M. le député Stauffer confond allègrement les crédits d'investissements et les crédits de fonctionnement; qu'il propose des demandes d'amendements sans changer le titre de la loi; que, par deux fois, on est, dans le fond, confrontés à des investissements qui deviennent du fonctionnement... Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.

M. Pierre Weiss (hors micro). Je vous remercie de me donner la parole, or je suis rapporteur de minorité. Je la prends très volontiers, mais, par courtoisie, j'étais prêt à la céder à ma collègue.

Le président. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole.

Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Je crois que vous avez dit l'essentiel par rapport à ces amendements. M. Stauffer devra peut-être nous expliquer comment il compte engager des policiers avec un crédit d'investissements; je ne sais pas sur combien d'années ça s'amortit, des policiers. (Brouhaha.) Enfin, il y a plusieurs détails à connaître par rapport à ce genre de proposition. Je ne vais pas m'y arrêter plus longuement. Nous refuserons évidemment ces quatre amendements. J'ajoute que le ticket de bus est à 3 F, et non pas à F 3,20.

J'aimerais juste redire en quelques mots que le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui en troisième débat va améliorer l'efficience du traitement des données recueillies par les radars. C'est un projet qui est bon en matière de sécurité routière; c'est un projet qui est bon également pour l'efficience de l'Etat et qui permettra de remettre des ressources policières sur le terrain et non pas aux bords des routes, à relever des données radars. Je vous encourage tous à accepter ce projet de loi.

Le président. Merci, Madame la rapporteure de majorité. La parole est à M. le rapporteur de minorité. J'espère être clair cette fois-ci.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président du Grand Conseil ! Je pourrais presque être d'accord, dans un mouvement oecuménique, avec Mme le rapporteur de majorité, sauf qu'il y a des choses qui se passent au ciel, et l'on peut avoir une vision irénique, et puis, il y a la réalité genevoise.

Aujourd'hui, on nous présente un budget avec 430 millions de déficit. On nous présente un budget qui nous annonce une augmentation d'un milliard de la dette ! (Exclamations.) On nous présente un budget qui nous montre qu'il faudra peut-être des diminutions de prestations pour la population ou des augmentations d'impôts ! (Commentaires. Le président agite la cloche.) Alors que l'on nous présente ce budget et que l'on doit réviser le plan financier quadriennal... (Remarque de M. Roger Deneys.) Je crois que M. Deneys est pris d'incontinence verbale ! (Rires. Exclamations. Commentaires.) Peut-être un docteur ! Alors que nous avons affaire à une situation budgétaire qui est la traduction concrète d'une situation économique mondiale de crise; alors que des Etats voisins se débattent dans des difficultés sans nom; alors qu'il y a des licenciements dans des entreprises privées ici, à Genève, on se dit que rattraper, récupérer un projet qui remonte à 2005, pour le mettre aux dépenses d'investissements de ce canton, pour cette année ou la prochaine, quand il sera finalement réalisé, ce n'est vraiment pas avoir le sens ni des réalités, ni des priorités !

Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, dire oui à ce projet, c'est dire oui à l'irréalité ! C'est dire oui à la non-prise en considération des difficultés que traverse Genève et dans lesquelles pourrait nous emmener ce budget non révisé ! Ce sera un signe: ceux qui disent oui aujourd'hui à ce budget se moquent de la situation de crise de Genève, raison pour laquelle il y a un mouvement politique qui doit se faire jour dans ce Grand Conseil, pour dire: ce projet est intéressant, mais pas cette année ! Pas cette année, pas dans ces conditions !

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Dans la mesure où les deux rapporteurs ont pu s'exprimer, nous allons procéder suivant la méthode normale en ce qui concerne le débat: chacun d'entre vous pourra intervenir à l'énoncé des articles.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. A l'article 1, nous avons quatre amendements en toute simplicité; nous allons donc les voter. Nous commençons par le premier. (Remarque.) Est-ce que M. Jeannerat souhaite s'exprimer à ce propos ?

M. Jacques Jeannerat (R). Oui, Monsieur le président, je voulais m'exprimer à propos des amendements, d'abord pour souligner le fait qu'ils n'ont strictement rien à voir avec le projet de loi. Au nom des groupes libéral et radical, je vous annonce que si le moindre de ces amendements devait être accepté avant le vote final, je demanderais le renvoi en commission. Donc, je suis contre ces amendements.

Le président. Merci, Monsieur le député. Madame von Arx-Vernon, c'est au sujet de l'article 1 que vous voulez intervenir ?

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (hors micro). Non, j'interviendrai globalement après, Monsieur le président.

Le président. Merci. Monsieur le député Deneys, est-ce au sujet de l'article 1 ?

M. Roger Deneys (S). Je peux m'exprimer sur l'article 1, bien entendu. Mesdames et Messieurs les députés, les amendements n'ont rien à voir avec le projet de loi, mais l'intervention de M. Weiss non plus ! Evoquer la situation des finances publiques genevoises futures pour refuser un tel projet de loi, qui est un investissement nécessaire en matière de sécurité routière et qui permet un retour sur investissement relativement rapide... Parce qu'on pourrait faire un peu plus d'efforts en matière de sécurité routière à Genève. Je vous rappelle que le nombre de morts y est élevé; le nombre d'accidents l'est aussi. Et c'est bien en prenant des mesures un peu plus strictes et en n'entretenant pas le laxisme que les libéraux, les radicaux et le MCG souhaitent entretenir année après année que nous pouvons améliorer la situation.

Pour le reste, Monsieur Weiss, je vous rappellerai que la situation actuelle, c'est le résultat de la baisse d'impôts de 500 millions par année, baisse que vous avez votée ! Que vous avez proposée ! Et qui a été soutenue notamment par le MCG ! (Commentaires.) La situation inouïe dans laquelle nous allons nous trouver est le résultat de vos propositions complètement ridicules et invraisemblables qui mettent en danger Genève. Pour cette simple raison, il faut refuser les amendements et voter le projet de loi tel qu'il est sorti des travaux de la commission.

Le président. Vous avez raison, Monsieur le député, de rappeler à M. Weiss qu'il était hors sujet, mais c'était aussi votre cas. Monsieur le député Stauffer, il vous reste quarante-cinq secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Quarante-cinq secondes pour dire, Monsieur le président, que je suis d'accord avec vous: M. Deneys est hors sujet quand il vient parler de la baisse des impôts. Oui, le MCG a voté la baisse des impôts ! Et, Mesdames et Messieurs de la gauche, avec vos syndicats, au lieu de protéger les travailleurs frontaliers, vous feriez mieux de vous occuper des travailleurs genevois, pour leur donner la priorité à l'emploi ! Voilà la réalité ! Voilà la réalité de la République et du canton de Genève au travers des socialistes ! Mais je l'ai déjà dit: vous avez commencé par être des princes, vous finirez par être des crapauds ! C'est le principe de l'évolution inversée ! (Commentaires. Rires.)

Le président. Vous étiez aussi totalement hors sujet, Monsieur le député !

Nous sommes en procédure de vote. Voici le premier amendement: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit de fonctionnement. Un crédit global de 3,20 F - en lieu et place des 2 millions ! - y compris TVA est ouvert pour l'achat d'un ticket de bus ou de tram pour Mme Rochat, afin qu'elle puisse se rendre au Victoria Hall, où M. Rudolph Giuliani - ancien maire de New-York - donne actuellement une conférence.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 12 oui.

Le président. Nous sommes saisis d'un deuxième amendement, toujours à l'article 1: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit d'investissement. Un crédit global de 2 000 000 F y compris TVA est ouvert pour la construction de 50 places de détention administrative.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 63 non contre 13 oui.

Le président. Nous sommes saisis d'un troisième amendement à l'article 1: «Article 1 (nouvelle teneur). Crédit d'investissement. Un crédit global de 2 000 000 F y compris TVA est ouvert au Conseil d'Etat pour financer l'achat de GPS (systèmes de guidage) pour les véhicules d'intervention de la police.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 57 non contre 13 oui.

Le président. Enfin - oh surprise ! - nous sommes saisis d'un quatrième amendement à l'article 1:

«Article 1 (nouvelle teneur). Crédit de fonctionnement. Un crédit global de 10 000 000 F pour l'engagement de nouveaux policiers et de personnel administratif.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 13 oui.

Le président. Est-ce que Mme von Arx-Vernon entend s'exprimer sur l'article 1, que nous n'avons toujours pas adopté ? (Réponse hors micro de Mme Anne-Marie von Arx-Vernon.) «Après, globalement», bien ! M. Weiss entend-il demander la parole pour parler de l'article 1, toujours pas adopté ? (Remarque de M. Pierre Weiss). Si, lorsqu'ils désirent parler, les uns et les autres appuyaient sur le petit bouton se trouvant devant eux, ce serait beaucoup plus simple pour le président !

Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2 et 3.

Le président. Je suis obligé, Madame von Arx-Vernon, de vous donner la parole maintenant. Car si l'article 4 est accepté, l'affaire sera réglée.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Au nom du groupe démocrate-chrétien, je redis notre soutien à ce projet de loi, pour plusieurs raisons, dont une qui nous semble totalement prioritaire: lorsqu'un dispositif permet peut-être de sauver des vies, eh bien, il est important de le voter. Par ailleurs, il a été dit qu'il y aura une rationalisation des procédures, ce qui nous semble toujours très intéressant et économique; il y a, en plus, le moyen de traiter les infractions avec des données beaucoup plus fiables, ce qui est également un principe d'économie; et il s'agit avant tout d'augmenter la sécurité routière. De surcroît, ce qui nous est proposé ici assure un retour sur investissement. Donc vous voyez, sauver des vies, faire des économies, avoir un retour sur investissement, cela nous semble être un projet tout à fait acceptable et c'est pourquoi nous vous invitons à l'adopter. Je vous remercie.

Mis aux voix, l'article 4 est adopté, de même que l'article 5.

Le président. La parole est à M. Pierre Weiss.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Monsieur le président, je voulais juste dire pour conclure que si Mme von Arx-Vernon a relevé un certain nombre de points, ceux-ci n'ont pas été confirmés par les auditions. Il n'a notamment pas été confirmé qu'il y avait eu des problèmes avec la sécurité des policiers ou des personnes du département dans le relevé actuel des photos prises par les radars. En revanche, il faut dire qu'il serait erroné de faire une équivalence ou un théorème mathématique entre augmentation de la sécurité et augmentation des amendes. Parce que, en réalité, ce que recherche M. Deneys - et là je réponds à son intervention - c'est simplement à ce qu'il y ait une augmentation des amendes, qui pleuvent sur les cyclistes - qui vont trop vite...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss. ...et sur les scootéristes - qui vont trop vite... (Remarque.) Et sur les automobilistes ! Qui vont peut-être, eux aussi, trop vite. Donc aujourd'hui...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss. ...cette fausse équivalence que vous faites, Monsieur Deneys, me convainc, moi, de voter non à ce projet de loi. Nous l'accepterons quand l'Etat aura de l'argent pour ceci ou pour rénover la salle du Grand Conseil, sujet de saison.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe à l'article 6... (Remarque.) Pardon, Madame la rapporteure: je vous cède la parole.

Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Contrairement à ce qu'essaie de dire le rapporteur de minorité, nous avons un choix aujourd'hui: nous pouvons avoir un Etat efficient ou un Etat qui travaille de manière artisanale. Comment est-ce que cela se déroule, de nos jours ? Deux policiers passent leur journée à faire la tournée des radars pour récupérer, sur une clé USB, des données qui ne sont pas fiables, ni facilement exploitables. Celles-ci sont ensuite stockées sur des CD-Rom, ce qui rend après-coup très difficile toute recherche de photo, notamment pour des réclamations d'automobilistes qui auraient des remarques à émettre quant à leur amende. Donc le citoyen perd du temps, les policiers perdent du temps, les employés administratifs du service des contraventions en perdent également. Aujourd'hui, on vous propose de rationaliser cela, d'avoir aussi un meilleur contrôle interne - ce qui, je crois, est un travail en cours au DSPE, que nous saluons et que nous souhaitons aider - et nous avons le choix entre un Etat inefficace et un Etat efficient: je vous propose la deuxième solution et vous remercie d'accepter ce projet de loi.

M. Pierre Weiss. La répression pour les automobilistes ! (Commentaires.)

Le président. La parole à M. le député Stauffer, à qui il reste quinze secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Simplement pour dire que les propos de Mme la députée sont faux ! Ce ne sont pas des policiers, c'est du personnel administratif qui va faire le relevé. Et croyez-nous, nous sommes bien informés au MCG. Donc, vos propos sont mensongers et...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Eric Stauffer. ...vous tentez d'induire en erreur ce parlement !

Une voix. Et la population !

Le président. Nous poursuivons le vote.

Mis aux voix, l'article 6 est adopté.

Mis aux voix, le projet de loi 10619 est rejeté en troisième débat dans son ensemble par 43 non contre 35 oui.