République et canton de Genève

Grand Conseil

R 661
Proposition de résolution de Mmes et MM. Serge Hiltpold, Patrick Saudan, Ivan Slatkine, Beatriz de Candolle, Charles Selleger, Antoine Barde, Pierre Weiss, Christiane Favre, Alain Meylan, Fabienne Gautier, René Desbaillets, Michel Ducret, Jacques Béné, Jacques Jeannerat, Daniel Zaugg, Pierre Conne, Fabiano Forte, Guillaume Barazzone, Gabriel Barrillier, Bertrand Buchs, Renaud Gautier : Soutenons la patrouille des glaciers

Débat

Le président. Je donne la parole à M. Hiltpold.

M. Serge Hiltpold (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il n'est pas nécessaire de vous présenter la Patrouille des glaciers. Elle fait partie d'un mythe du ski-alpinisme suisse, elle est organisée tous les deux ans. C'est une compétition internationale qui réunit des sportifs civils et militaires, qui jouit d'une haute considération dans le milieu de l'alpinisme, tout comme la Pierra Menta en France.

Vous savez que cette patrouille emploie le tracé de la Haute Route, entre Zermatt et Verbier, avec l'engagement de nombreux sportifs qui sont encadrés par l'armée, qui, seule, a les moyens nécessaires de faire en sorte que les choses se déroulent dans de bonnes conditions - notamment à la cabane Bertol, au col de Riedmatten, à la Rosablanche, de même qu'à tous les passages un peu particuliers - et d'engager, en complément, des bénévoles. Elle a les moyens logistiques d'organiser cette course, et ces moyens représentent un coût. La Patrouille est assurée jusqu'en 2012, mais, sur le plan fédéral, elle est fortement remise en question quant aux subventions et budgets. Après en avoir discuté avec pas mal de patrouilleurs et amis - Olivier Français, Jacques Bourgeois, Christophe Darbellay, entre autres - je constate qu'il y a bon nombre d'actions qui se font dans les autres cantons pour soutenir cet événement: dans le canton de Fribourg, dans celui de Vaud, dans celui de Neuchâtel. C'est un soutien de la Suisse romande par rapport à cette course, afin que le Parlement fédéral épaule cette organisation.

Au-delà du fond, je pense qu'il s'agit d'une valeur historique, comme l'est Zermatt en Suisse; c'est une image extraordinaire pour le Valais, pour la Suisse romande, pour les sportifs qui s'engagent toute l'année et se fixent un but dans une saison.

Je pense pouvoir compter sur votre soutien et vous invite à voter cette résolution très simple, demandant à assurer au-delà de 2012 le financement et la pérennité de cet événement sportif. Je vous en remercie.

M. Jean-François Girardet (MCG). Je remercie tout d'abord le résolutionnaire d'avoir pris cette initiative de soutenir notre Patrouille des glaciers. Je dis «notre» parce qu'elle appartient aussi un peu à la population genevoise, vu la participation régulière d'équipes provenant de ce canton. C'est effectivement une vitrine extraordinaire qu'offre la Télévision Suisse Romande à l'ensemble des collectivités et des pays du monde entier, puisque cette manifestation y est souvent relayée. Elle offre une vitrine extraordinaire sur les paysages, tout d'abord, du canton du Valais. De plus, c'est effectivement de la publicité bon marché, mais qui touche notre économie, puisque cela profite largement au domaine touristique.

C'est également une vitrine extraordinaire pour notre armée. Alors qu'on rechigne un peu à lui donner des missions typiquement militaires au niveau du canton de Genève, ici, l'armée a l'occasion d'exercer dans de multiples domaines, notamment celui des transmissions, celui du secourisme, celui de l'organisation et le domaine sportif également. Pour toutes ces raisons - et bien sûr pour d'autres encore, étant donné que des personnes ont demandé la parole - le MCG soutiendra cette résolution, afin que le Conseil d'Etat transmette le message que Genève soutient sa Patrouille des glaciers.

Une voix. Bravo ! (Commentaires.)

M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la Patrouille des glaciers est un des événements sportifs les plus importants et les plus mythiques sur le sol de notre pays. Epreuve se déroulant tous les deux ans, la prochaine - comme cela a été dit par mon préopinant, le patrouilleur Serge Hiltpold - aura lieu en 2012. L'avenir de la patrouille n'est malheureusement pas assuré. Pourtant, l'élite mondiale du ski-alpinisme y côtoie les amateurs, sur un parcours de rêve qui relie Zermatt, via Arolla, pour arriver à Verbier. C'est une aventure humaine et sportive hors du commun qui doit perdurer, et ce dans l'esprit qui anime les patrouilleurs et les patrouilleuses, en partageant le goût de l'effort, le dépassement de soi, et parfois la souffrance.

Le groupe UDC soutiendra bien évidemment sans réserve cette résolution. Et comme le disait notre ancien et excellent conseiller fédéral Adolf Ogi: «Le sport, c'est une école de vie.»

M. Guillaume Barazzone (PDC). Merci, Monsieur le président, de me donner l'occasion de dire que le groupe démocrate-chrétien est très enthousiaste et votera cette motion, pour les raisons qui ont été évoquées tout à l'heure.

La Patrouille des glaciers, c'est notre histoire, c'est notre patrimoine, c'est nos paysages. C'est également une grande fête populaire, parce que si l'on a dit jusqu'à présent qu'il s'agissait d'une compétition sportive de haut niveau, il s'agit avant tout d'une compétition sportive populaire où un grand nombre de gens veulent s'inscrire. D'ailleurs, les listes d'attente explosent. Et je crois que l'engouement populaire - le fait que cette patrouille et cet événement sportif appartiennent à notre histoire - devrait faire réfléchir à deux fois le ministre de notre défense et notre parlement, afin de voter cette résolution de manière appuyée. J'espère que le Conseil d'Etat fera également un grand effort auprès de notre Conseil fédéral. Si Mme Rochat a l'occasion d'en parler à Mme Calmy-Rey, cela serait de bon aloi. Je vous remercie de voter cette résolution.

M. Pierre Weiss (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, il y a en Suisse un certain nombre d'institutions, certaines plus anciennes que d'autres, qui devraient être intouchables. Il y a quelques mois, nous avons parlé du haras d'Avenches - c'était notre collègue, Mme Amaudruz, qui avait soulevé ce point. Ce haras aurait pu être la victime de mesures de réductions fédérales nécessaires, mais pas assez ciblées, puisque précisément elles incluaient le haras d'Avenches. Il y a la Patrouille suisse, à laquelle on sait aussi combien notre population est attachée, parce qu'elle parvient, y compris à Genève, à se manifester dans certaines réunions aériennes. Et puis, il y a la Patrouille des glaciers. Je n'en parle pas en tant que participant, contrairement à la famille Hiltpold... (Remarque.) ...j'en parle en tant que spectateur ! Je suis un spectateur assidu de la Patrouille des glaciers à son départ de Zermatt; j'allais dire que je parle presque en tant que Zermattois. (Brouhaha.) Et je peux vous dire, pour qui n'y a pas assisté, que de voir s'élancer des dizaines, des centaines de skieurs, avec les skis sur l'épaule, qui traversent le village à dix heures du soir, vous avez l'impression qu'il y a des hordes de sangliers ! Qu'il y a des troupeaux d'éléphants ! Qu'il y a des mammouths qui bondissent des forêts, tellement le bruit est fort dans les rues qui résonnent ! (Brouhaha. Commentaires.) Je ne parle pas des hérissons de notre collègue ! La Patrouille des glaciers, ce n'est pas seulement, par conséquent, quelque chose qui permet des exploits sportifs: c'est devenu un événement pour notre pays. «Un événement reconnu internationalement», comme l'a dit l'un de nos collègues. L'armée suisse, ou plus exactement son ministre, ferait une erreur en supprimant les subventions en faveur de cette patrouille. Et je crois que cette résolution doit être soutenue unanimement par notre parlement.

Le président. Au cas où certains d'entre vous ne l'auriez pas remarqué, le Cirque Knie est arrivé à Genève. (Rires.) Les représentations commencent incessamment et vous y trouverez la moitié des animaux évoqués par M. le député Weiss. La parole est à Mme la députée Anne Emery-Torracinta.

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Merci, Monsieur le président. Je suis très heureuse, Mesdames et Messieurs les députés, de voir cette résolution. Heureuse, parce qu'enfin les libéraux-radicaux ont compris quelque chose ! Ils ont compris que la Confédération se désengage systématiquement d'un point de vue financier de toute une série de projets qui étaient en cours.

Mais où étiez-vous, Mesdames et Messieurs les députés du parti libéral-radical, quand l'AI, par exemple, a été systématiquement démantelée ? Où étiez-vous lorsqu'on a enlevé les moyens auxiliaires ? (Commentaires. Le président agite la cloche.) Où étiez-vous quand le conseiller fédéral Burkhalter a supprimé le remboursement des lunettes ? Où étiez-vous quand l'enseignement spécialisé a été remis aux cantons, parce que cela coûte trop cher ? Où étiez-vous quand les coûts des institutions pour personnes handicapées ont été remis aux cantons ? Et où serez-vous ces prochains mois et ces prochaines années, chaque fois que la Confédération cherchera à se débarrasser d'un certain nombre de charges ?!

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, on peut regarder avec sympathie cette résolution, on peut même vous soutenir, mais on espère aussi que pour vous l'avenir de la Suisse ne se résume pas à quelques personnes qui vont patrouiller sur les glaciers. (Commentaires.)

Le président. La parole est à M. le député Christian Bavarel.

M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Les Verts adorent cette période de campagne, merveilleuse, qui nous a permis de goûter, en début d'année, à un très très beau disque d'Hubert-Félix Thiéfaine que je vous recommande à tous. Il s'appelle «Suppléments de mensonge».

Aujourd'hui, je ne sais pas si je dois, comme certains, faire mon coming-out sur l'émoi des corps de ces hommes en sueur, s'élançant à l'assaut des montagnes ! (Rires. Exclamations.) Je ne sais pas si je dois déclarer, la main sur le coeur: « En tant que Valaisan de Chamoson, je suis attaché à nos Alpes et à nos traditions confédérales»... (Remarque.) Bien sûr qu'il y a des femmes, Madame ! Néanmoins... (Remarque.) Bien sûr que des femmes font cette course extraordinaire ! Néanmoins, cela n'amène pas autant de lyrisme ! Je n'ai pas entendu dans cette salle autant de lyrisme et d'émoi quant aux femmes s'élançant en sueur pour aller conquérir les Alpes, que quant à ces fiers soldats qui ne font rien qu'à mugir dans nos campagnes ! (Brouhaha.)

Cela dit, chez les Verts, vous aurez des gens qui soutiendront cette résolution; d'autres sont plus dubitatifs. Ils sont plus dubitatifs, parce qu'il nous semble que c'est une affaire valaisanne, avec un financement confédéral. Nous pensons que, par rapport au budget valaisan, lequel touche un milliard de francs de subventions de la Confédération - ce qui est à peu près l'équivalent de notre contribution en termes de solidarité confédérale - il y a une histoire valaisanno-valaisanne !

Alors, on est attaché, je comprends bien - c'est important... Les combats de reines sont importants ! La beauté de nos Alpes est essentielle ! J'entends bien cela, je comprends cette attache. Mais le parlement valaisan va-t-il présenter une résolution pour soutenir le marathon de Genève ? Ou le triathlon de Genève ? Ou la Course de l'Escalade ? Comme patrimoine confédéral ? (Brouhaha.) Est-ce qu'on veut entrer dans ce genre de choses ? Chez les Verts, nous restons tout à fait dubitatifs à ce sujet-là ! Et certaines personnes vont même aller jusqu'à refuser cette résolution, pensant que les Valaisans doivent se débrouiller avec leur Patrouille des glaciers, qui est certes très belle... (Commentaires.) Bien sûr qu'on a le droit de participer ! Mais les Valaisans viennent aussi courir à la Course de l'Escalade ! J'espère bien ! Et j'espère que, lors du Bol d'Or, nous avons la participation de gens de tout le tour du lac ! Toutefois, ici, c'est un problème qui me semble être très valaisan.

Alors on comprend que, en période électorale, cette résolution voudrait que tout le monde s'engouffre derrière ! Parce que cela fait vibrer cette fibre patriotique tellement merveilleuse ! Et l'aventure... Et c'est... C'est «Aimons nos montagnes et nos Alpes de neige !» Bon, voilà ! Les Verts vont peut-être un peu casser la belle ambiance par rapport à cela. Nous pensons que la Patrouille des glaciers est très bien: elle est organisée par les Valaisans, avec le soutien de la Confédération. Certes, nous souhaitons que cela puisse se poursuivre, mais nous ne sommes pas certains que le parlement genevois doive entrer dans cette histoire-là. (Commentaires. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Mauro Poggia, à qui il reste une minute.

M. Mauro Poggia (MCG). Je dirai juste un mot, Monsieur le président. L'intervenant précédent du MCG vous a dit que nous allions soutenir cette proposition. Je voudrais simplement rappeler que notre regretté collègue Fabien Delaloye a fait en 2010, en tant que Valaisan aussi, la Patrouille des glaciers. Donc c'est pour nous une raison supplémentaire, en sa mémoire, de soutenir ce projet. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Nous sommes en procédure de vote.

Mise aux voix, la résolution 661 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 52 oui contre 7 non et 9 abstentions.

Résolution 661