République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 18 mars 2010 à 20h30
57e législature - 1re année - 6e session - 27e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Guy Mettan, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Mark Muller, David Hiler, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat, ainsi que M. Philippe Morel, député.
Le président. M. Pierre Stastny et M. Fabrice Scheffre sont assermentés. Le Grand Conseil prend acte de votre serment, Messieurs, et vous souhaite une heureuse carrière ! La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Le président. La commission des pétitions nous informe qu'elle désire renvoyer les pétitions suivantes:
Pétition : Non au déclassement de terres agricoles au profit de la construction d'une aire autoroutière à Bardonnex (P-1724)
à la commission d'aménagement du canton;
Pétition : Non à une aire autoroutière polluant Bardonnex et Perly ! Ne mettons pas l'automobile à la place de l'Homme ! Oui à des logements de taille humaine et intégrés dans le paysage! (P-1726)
à la commission d'aménagement du canton.
Le président. En application de l'article 119 de la LRGC, le texte de cette initiative est renvoyé à la commission législative, dans l'attente du rapport du Conseil d'Etat sur sa validité et sa prise en considération, rapport qui devra être déposé dans un délai de trois mois.
L'initiative 145 est renvoyée à la commission législative.
Débat
Mme Loly Bolay (S), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, la commission législative a étudié cette initiative sous l'angle de sa recevabilité. Vous aurez lu dans mon rapport que l'unanimité s'est faite pour considérer que cette initiative répondait à l'exigence d'unité de la forme, du genre et de la matière. En ce qui concerne sa conformité au droit supérieur, il n'y a pas eu de vote négatif mais que des abstentions, sur son exécutabilité aussi. En revanche, elle a été déclarée valide par l'ensemble des commissaires.
Il y a eu une rectification - seulement formelle, Monsieur le président, mais je dois le dire - à l'article 2 de l'initiative dont la numérotation n'est pas conforme aux usages... aux usages actuels... aux usages, pardon ! Cette initiative sera donc rectifiée par la chancellerie après le vote populaire.
C'est tout ce que j'ai à dire, Monsieur le président, sur la recevabilité de l'initiative 144 dont la commission législative approuve totalement la validité.
Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole n'étant pas demandée, nous allons nous prononcer sur cette initiative. Nous votons d'abord sur l'unité de la forme... (Quelques instants s'écoulent. Remarque.) Je remercie notre premier vice-président d'avoir actionné la sonnette... (Commentaires.) Voilà !
Mise aux voix, l'unité de la forme de l'initiative 144 est adoptée par 74 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, l'unité du genre de l'initiative 144 est adoptée par 74 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, l'unité de la matière de l'initiative 144 est adoptée par 74 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la conformité au droit supérieur de l'initiative 144 est adoptée par 49 oui et 22 abstentions.
Mise aux voix, l'exécutabilité de l'initiative 144 est adoptée par 51 oui et 24 abstentions.
Mise aux voix, la validité de l'initiative 144 est adoptée par 63 oui et 17 abstentions.
L'IN 144 est renvoyée à la commission des transports.
L'IN 144-A est renvoyée à la commission des transports.
Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 144-B.
Premier débat
M. Renaud Gautier (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, il s'agit d'un petit projet de loi qui s'inscrit dans cette logique que nous vivions depuis plusieurs années, à savoir celle du budget par prestations, et qui tend à la création d'un centre unique de gestion du contentieux de l'Etat de Genève, rattaché au département des finances. Ceci n'a rien de très particulier ni de spécial, si ce n'est effectivement de placer en un seul lieu les compétences nécessaires pour gérer les créances que l'Etat peut avoir. (Remarque.) N'est-ce pas ?
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur ! Vous avez terminé ?
M. Renaud Gautier. Absolument !
Le président. Je vous remercie de la brièveté de votre rapport. Je passe la parole à M. le rapporteur de minorité, M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Nous prenons acte que le rapporteur de majorité dit: «C'est un projet de loi sans importance, c'est un petit projet de loi.» Non, Mesdames et Messieurs ! En réalité, ce projet de loi fait suite à la débâcle de la Banque cantonale genevoise, qui coûtera in fine plus de 2,2 milliards au contribuable genevois. Alors nous n'avons effectivement pas les mêmes appréciations, Monsieur le député, s'agissant de «projets de lois sans importance» - qui sont très courants, et, comme cela, tout va bien dans le meilleur des mondes !
En fait, de quoi s'agit-il ? Eh bien, il s'agit tout simplement de régler la petite bagatelle de 177 actes de défaut de biens datant des années... Vous savez, les années durant lesquelles la Banque cantonale et tous ses érudits de la finance, de même que tous ses grands spécialistes de l'immobilier, octroyaient des crédits à leurs petits copains - vous savez, qui finançaient par ailleurs quelques partis politiques ! Evidemment qu'au bout d'un moment ça a coincé dans la machine ! Et l'on s'est retrouvé avec une facture de 5 milliards qui ont été repris par la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève pour essayer de sauver ce qui était «sauvable». Et c'est donc, au final, une facture de 2,2 milliards qui sera présentée au contribuable genevois !
Le MCG a été très à la page avec la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève. Le titre est assez long, mais le travail fut aussi laborieux. En effet, il faut savoir que, dans le cadre de ses activités, le modeste député que je suis s'est quand même pris quelque chose comme deux plaintes pénales de la part de la Fondation de valorisation et une demande au Tribunal civil pour atteinte à la personnalité, ceci parce que nous avons osé mettre en cause le directeur de cette fondation - un certain élu d'un certain parti de l'Entente dans la commune de Bernex - qui avait participé, selon nous, à la débâcle de la Banque cantonale de Genève en contribuant à signer des contrats pour des montants qui n'avaient aucun rapport avec les objets financés. Il a donc contribué à falsifier les comptes de la banque et, résultat des courses, aujourd'hui c'est le contribuable genevois qui va payer les pots cassés ! Maintenant, avec tout ce processus, Mesdames et Messieurs, on arrive à ces 177 actes de défaut de biens qui, accrochez-vous, représentent la «bagatelle» citée par le député Gautier, soit quand même - tout de même ! - la somme de 468 millions de francs ! Belle «bagatelle», Monsieur le député ! Ça représente quand même - laissez-moi vous le dire ! - 5% de la dette cantonale genevoise ! Et les 2,2 milliards qui seront présentés au contribuable ne représentent pas moins de 30% de la dette du canton. Alors vous voyez, les bagatelles à la libérale...
Vous m'excuserez, mais, sur ce dossier-là, on ne pourra pas vous suivre. Sur bien d'autres sujets, nous sommes en accord, mais pas sur celui-là ! Peut-être y a-t-il un lien de cause à effet, peut-être que certains dirigeants de cette banque et certains conseillers d'Etat étaient proches de vos milieux... Et puis ma foi, aujourd'hui, les vrais responsables - pfuit ! On attend toujours un hypothétique procès avec quelques fusibles certes importants, mais les vrais coupables, eux, se la coulent douce: ils ont certainement tiré de bons bénéficies et doivent bien rigoler en voyant que la facture est présentée finalement au peuple genevois.
En fait, le Conseil d'Etat nous a présenté en commission une première version dans laquelle il voulait limiter au montant de 100 000 F les abandons de créances sur les actes de défaut de biens...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !
M. Eric Stauffer. Bah ! Vous voyez, Monsieur le président, c'est toujours le problème: quand on parle de sujets importants, avec cette majorité gouvernementale, vous limitez...
Le président. Vous avez encore dix secondes, exceptionnellement !
M. Eric Stauffer. ...le temps de parole. Et puis c'est toujours la même chose: le seul crétin, dans l'histoire, c'est le contribuable, qui continue à payer les casseroles de la Banque cantonale ! Ici, on ne peut pas s'exprimer ! Ici, on nous limite la parole ! (Remarque.) Ici, on fait des débats de quarante minutes...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité, votre temps de parole est largement écoulé !
M. Eric Stauffer. ...et puis, encore une fois, la facture sera pour le contribuable !
Le président. Je vais maintenant passer la parole à M. Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons, les Verts, être extrêmement clairs: selon nous, le scandale de la Banque cantonale est total. Néanmoins, le lieu où cela doit se résoudre, c'est en justice. Et nous attendons un procès, Monsieur Stauffer, avec autant d'impatience que vous ! Nous souhaitons avoir un procès !
De quoi s'agit-il ? A un moment, nous avions un trou de 5 milliards; c'est redescendu à 2 milliards, ce qui veut dire qu'il y a des gens qui ont bouché le trou. Il s'agit de finir ce travail, et, Monsieur Stauffer, je trouve détestable que vous tapiez sur les gens qui essaient de boucher le trou ! (Commentaires. Brouhaha.) Maintenant, nous attendons, nous, un procès pour condamner ceux qui ont fait le trou, et non pas pour taper sur les personnes qui ont essayé de le boucher ! (Remarque.)
M. Claude Jeanneret (MCG). Eh bien, je vais continuer le... comment dirais-je ? Je vais poursuivre sur la lancée de mon collègue de parti. Je reviens sur ce qu'a dit M. Bavarel: premièrement, concernant les 5 milliards, personne n'a fait un effort pour les diminuer ! Quand on pense que l'immobilier a plus que doublé depuis cette époque, eh bien, si l'on a encore 2 milliards de dettes, c'est que ça s'est fait d'une manière un tout petit peu... Disons «soft», pour certains que ça intéresse. Si l'on avait bien travaillé, et si ce parlement n'avait pas été à la botte de ceux qui ont pris de l'argent, on n'aurait jamais 2 milliards de dettes ! On aurait zéro franc de dettes et on aurait un bénéfice. C'est tout ce que je peux vous dire !
De plus, il est inadmissible de constater qu'on arrive à passer de très nombreuses minutes - pour ne pas dire plus, et c'est un euphémisme - en commission des finances pour, peut-être, 170 000 F de dépenses relatives à des voitures électriques, alors qu'on ose dire ici que 460 millions, c'est une bagatelle ! Je trouve cela scandaleux ! C'est une irresponsabilité absolument inadmissible de la part des élus du peuple !
Je voudrais dire un truc, puisqu'on nous affirme: «On n'a pas à vérifier la remise de dettes sur les ADB, parce que ce n'est pas intéressant» - car 500 000 F, voire un million, il ne faut pas voir les petites choses... Eh bien non ! Les petites choses peuvent en cacher des grandes ! Et moi, j'estime que, là, nous avons fait une erreur fondamentale, parce que - par mesure de simplification, dit-on, mais surtout par mesure de complaisance vis-à-vis de certaines actions - on ne veut pas tout contrôler. Je ne suis pas d'accord: nous devons agir ! Nous, le MCG, avons été opposés à l'augmentation à 500 000 F du montant pour le contrôle des remises des ADB, alors que le Conseil d'Etat nous avait proposé 100 000 F, ce qui était beaucoup plus raisonnable. Nous avons une dette de 468 millions à gérer sur la remise d'ADB, et j'estime que c'est notre devoir, à la commission des finances, d'examiner cela. Aujourd'hui, il est inadmissible que l'on vote une loi pour diminuer le travail de la commission des finances, simplement par mesure d'économie ! Non ! Ce n'est pas une mesure d'économie, il faut bien le dire ! C'est une mesure de complaisance, c'est tout ! Ce n'est pas qu'on n'ait pas confiance en le Conseil d'Etat, bien au contraire. Mais si lui-même a proposé 100 000 F, c'est qu'il était conscient de l'importance de la chose, et c'est la raison pour laquelle il est inadmissible que la commission des finances ait décidé - par la voix de certains partis qui étaient bien impliqués dans l'affaire - de monter la limite du contrôle à 500 000 F.
J'ajouterai encore ceci: quand on arrive à avoir une perte de 2,2 milliards sur de l'immobilier - qui a, comme je le disais tout à l'heure, plus que doublé depuis que la catastrophe s'est produite - on ne peut pas se féliciter de la gestion de la dette de la Banque cantonale ! Le malheur dans toute cette histoire, c'est que c'est de nouveau ceux qui paient des impôts, c'est de nouveau la population genevoise qui est en train de payer la mauvaise gestion et la facilité de décision ! Une décision qui a été prise à dix heures le soir, n'importe comment, et qui n'a pas tenu compte de toutes les catastrophes que cela pouvait provoquer ! Et 2 milliards, sur 13 milliards de dettes pour Genève, c'est quand même beaucoup d'argent !
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Claude Jeanneret. J'en reviens à une chose: le MCG ne peut pas accepter cette loi, et nous nous opposerons à cette proposition telle qu'elle est faite maintenant. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il faut en revenir aux faits, aux chiffres - et c'est ce dont avait à traiter la commission des finances. Je crois que tout le monde sera d'accord ici pour dire que les 2,5 milliards qui sont à payer par les contribuables, c'est beaucoup trop, et que cela montre que les banques publiques peuvent être, à l'occasion, aussi mauvaises que les banques privées. Ce n'est pas une raison de se rassurer pour autant, mais enfin, c'est une façon de voir que ce n'est pas la forme de propriété qui importe, mais la qualité et les compétences des dirigeants.
De quoi s'agit-il ce soir ? Il s'agit de savoir si l'on fait confiance ou pas au Conseil d'Etat, et certains ici pratiquent la méfiance, voire veulent jeter le discrédit, pour des montants qui ne sont pas de 467 885 000 F, mais pour des montants qui sont, sur ce total de 465 millions, de moins de 13 millions ! En effet, il y a moins de 13 millions pour lesquels la commission des finances, dans sa majorité, est d'avis qu'il convient de donner au Conseil d'Etat la compétence de régler les cas. Combien sont-ils, ces cas ? Ils sont 63 sur un total de 177. En d'autres termes, 63 cas sont des actes de défaut de biens de moins d'un demi-million, de moins de 500 000 F. Les autres - je laisserai l'expert-comptable calculer la différence entre 177 et 63 - eh bien, ce sont des actes de défaut de biens de plus de 500 000 F. Pour ceux-là, la commission des finances entend effectivement exercer son contrôle. Cela montre bien que nous ne démissionnons pas, que nous remplissons notre mandat et que nous allons à l'essentiel.
Le Conseil d'Etat aurait pu, à la limite, se sentir légèrement, sinon méprisé, en tout cas mis en cause, puisqu'on lui disait qu'il n'avait qu'à s'occuper des choses de second ordre - des actes de défauts de biens de moins de 500 000 F. Il ne l'a pas fait, je crois qu'il a parfaitement compris qu'il s'agit là plutôt de ventes administratives que de décisions plus importantes. Et c'est la raison pour laquelle la grande majorité de la commission des finances a considéré qu'il était rationnel pour elle de s'occuper des choses importantes et pas des secondaires.
Cela étant dit, nous avons entendu, ici, des attaques personnelles lancées contre un magistrat communal, et elles n'ont pas été formulées de façon complète. Je me garderai bien de dire qui a raison ou qui a tort, mais, à ma connaissance, ce magistrat communal de la commune voisine de la mienne a vu une plainte contre lui classée. En revanche, le député qui s'est exprimé a toujours contre lui-même - ce député est à la table du rapporteur de minorité - une plainte civile de la part de celui qu'il a mis en cause et dont il a voulu jeter l'honneur à la poubelle. Donc, il y a un moment où il faut savoir qui est du côté de ceux qui salissent et qui est du côté de ceux qui sont propres !
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ne soutiendront pas l'amendement du MCG. Il faut dire que, pour eux, l'essentiel ici est de ne pas laisser les abandons de créances simplement aller jusqu'à un terme où l'on ne récupère rien, mais, bien entendu, de mettre la pression sur ces débiteurs pour qu'on puisse récupérer de l'argent. Et comme l'a dit M. Weiss tout à l'heure, c'est vrai que vis-à-vis de ces montants - à 100 000 F ou à 500 000 F - en réalité, en augmentant cette limite on garde quand même un montant de 452 millions de francs à la compétence du Grand Conseil et l'on laisse effectivement 13 millions à celle du Conseil d'Etat. Ça ne m'étonne pas que le MCG se focalise sur les petites affaires et les petits dossiers, et préfère occulter les gros - on sait très bien que la commission a aussi d'autres dossiers à traiter.
Mesdames et Messieurs les députés, la priorité doit être le contrôle démocratique: à partir du moment où notre Grand Conseil peut obtenir des informations de la part du Conseil d'Etat, on peut estimer que la commission a fait son travail correctement en fixant cette limite à 500 000 F. (Commentaires.)
Et pour le reste, Monsieur Jeanneret, je trouve particulièrement choquants vos propos concernant les 2 milliards que nous aurions perdus parce que nous serions de mauvais gestionnaires dans l'immobilier. Je vous rappelle, Monsieur Jeanneret - et M. Stauffer a essayé de le répéter à maintes occasions, mais vous n'avez pas bien dû l'entendre - que ces 5 milliards sont bien liés à la spéculation qui a eu lieu l'époque ! Et c'est bien pour cela qu'on ne peut pas récupérer cet argent: parce que les prix qu'avaient établis les spéculateurs - qui sont peut-être de certains milieux de cette enceinte, c'est vrai - étaient surfaits ! Mais en l'occurrence, en vendant à un prix réel, évidemment qu'on allait perdre en tout cas la moitié, voire plus. On peut donc plutôt se féliciter de ce que le marché immobilier ait connu une certaine reprise, car c'est celle-ci qui a permis de limiter la casse, et certainement pas l'intervention du MCG ! Qui, par ailleurs, a aussi connu quelques élus ayant eu des casseroles avec cette Fondation de valorisation. Donc, je crois qu'on n'a de leçon à donner à personne ! (Remarque.) Je vous dirai simplement qu'on est ici en train de boucler cette affaire: ce qui compte surtout, c'est d'éviter qu'une telle chose se reproduise. Pour cela, je pense qu'il faudrait compter sur tous les groupes - et j'espère qu'on pourra aussi compter sur le MCG quand il faudra éviter que cela se reproduise.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Gautier. (Remarque de M. Eric Stauffer.) Monsieur Stauffer, vous souhaitez vous exprimer, mais comme votre temps de parole est épuisé, je vous redonnerai cette dernière au deuxième débat, afin de présenter votre amendement.
M. Renaud Gautier (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président au regard si doux, puis-je vous demander de rappeler au rapporteur de minorité que nous examinons le PL 10570-A - il s'agit du point 162 de notre ordre du jour - et que ce projet traite de la modification de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève. C'est de cela qu'il s'agit ! Alors après, évidemment, on peut, à un titre ou à un autre, décider de mettre toute la crème fouettée qu'on veut en disant que c'est la faute de celui-ci ou de celui-là... Ce dont on parle ici, l'enjeu de ce soir, c'est: voulons-nous donner à un service de l'Etat - en l'occurrence, le département des finances - une compétence sur la gestion des créances ? Tout le reste n'est que billevesées. Voilà donc sur quoi nous avons à voter ce soir, et non pas sur l'avenir ou sur le futur hypothétique de la Banque cantonale de Genève.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je veux tout de même vous rappeler quelle serait la conséquence si, par hasard, ce projet de loi n'avait pas été déposé: c'est simplement que le Conseil d'Etat - ou plus exactement, en l'occurrence, le service concerné - traiterait ces actes de défaut de biens selon des directives, sans en référer à qui que ce soit. C'est ce que nous faisons dans le domaine de l'administration fiscale - j'espère que vous imaginez ce que représenterait un passage de ces gestions devant les commissions parlementaires.
Donc, le Conseil d'Etat - qui avait été accompagné pendant plus de dix ans, tout de même, par une commission parlementaire pour ces dossiers - a estimé qu'il convenait, sur ce dossier particulier, qu'une commission, en l'occurrence la commission des finances, ait les mêmes prérogatives que celles qui avaient été attribuées à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation. Il l'a fait, parce qu'il estime que tout ceci reste encore brûlant, dix ans après, et qu'il est bon qu'il n'y ait pas trop de soupçons là autour.
Nous étions partis sur un niveau extrêmement bas, tout en précisant au parlement qu'au fond c'était essentiellement son problème de savoir à quelle hauteur - 100 000 F ou 500 000 F - l'abandon de créances devait être approuvé par la commission. La commission a choisi 500 000 F, ce qui paraît à peu près raisonnable. De toute façon, le circuit est en soi relativement complexe: un service est concerné, il faut que le chef du département porte l'affaire au Conseil d'Etat, il faut que le Conseil d'Etat soit d'accord, et - au-dessus de 100 000 F ou 500 000 F, selon la décision du deuxième débat - une commission doit encore donner son préavis ! Vous reconnaîtrez, disons, qu'une certaine prudence règne autour de cette affaire.
Pour le reste, effectivement, ça coïncide - et c'est important - avec la création d'un service de contentieux et, notamment, de traitement des actes de défaut de biens, qui fonctionnera pour l'ensemble de l'Etat. Voilà sur quoi vous devez voter, mais il convient de vous rappeler quand même la base du problème: sans cette loi, c'est l'administration qui traite ces actes de défaut de bien !
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Maintenant que la parole n'est plus demandée, nous allons nous prononcer sur la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 10570 est adopté en premier débat par 85 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 70, al. 1, lettre b (nouvelle teneur) à 71B (nouveau).
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement du MCG à l'article 71C. Je passe la parole à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous demandons de remettre ce que le Conseil d'Etat a proposé initialement, c'est-à-dire une limite à 100 000 F.
Vous me permettrez de réagir à quelques propos qui ont été tenus ici: on entend du député Deneys qu'il y a finalement un contrôle démocratique, que tout va bien dans le meilleur des mondes; nous entendons aussi de M. David Hiler, notre excellent conseiller d'Etat - je le souligne, et sans ironie - qu'il y a quand même une certaine prudence qui règne autour de ceci puisqu'il y a, pour les montants supérieurs à 500 000 F, les contrôles A, B, C, avant que ça arrive en commission. Mesdames et Messieurs, et Mesdames Messieurs du Conseil d'Etat, rappelez-moi donc quel contrôle démocratique il y a eu sur la Banque cantonale genevoise, en 2000, pour plomber les Genevois à plus de 2 milliards de francs ! Vous étiez les mêmes ! Les mêmes partis ici, les mêmes contrôles démocratiques ! Et vous vous êtes moqués du peuple genevois ! Vous avez autorisé, validé toutes ces demandes de crédits, qui n'avaient pas lieu d'être, pour enrichir une certaine caste à Genève au détriment de l'ensemble de la population ! Et c'est à ce titre-là que le MCG, aujourd'hui, s'oppose à ce mode de faire. Parce que «contrôle démocratique», oui, mais contrôle par le parlement et les commissions ! Et je veux voir maintenant quel est celui d'entre vous, à gauche comme à droite, qui viendra contredire ce que je viens d'affirmer ici !
C'est pour ces raisons que nous proposons cet amendement fixant la limite à 100 000 F pour le contrôle par la commission des finances. Je vous remercie de soutenir - dans un acte responsable de «contrôle démocratique», comme vous aimez bien le mettre en avant - cet amendement du MCG. Merci ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Il n'est nul besoin de vociférer, nous avons rajouté des haut-parleurs et l'on vous entend parfaitement. Je passe la parole à M. Jeanneret.
M. Claude Jeanneret (MCG). Merci, Monsieur le président. Eh bien oui, je crois que le cas est assez grave pour que le contrôle démocratique soit complet. Au parlement, nous sommes des élus du peuple, je pense qu'il est normal qu'on ait un contrôle assez détaillé. Et ce n'est pas parce que ce n'est - pour M. Weiss - «que»18 millions, que ce n'est pas important. Non, pas du tout ! Il est très important que nous ayons un contrôle sur l'ensemble de cette débâcle. Parce que c'en est une. Je rappellerai à M. Deneys que la présidente de la Banque cantonale, à l'époque, était de son parti et qu'elle a même prétexté qu'elle ne connaissait pas très bien la comptabilité pour expliquer avoir signé des bilans qui n'étaient pas bons. Alors, s'il y a des gens qui vont véritablement combattre les excès de certaines banques, c'est le MCG. Mais on peut dire en tout cas que le parti socialiste n'a pas été dans le coup: au contraire, il a soutenu la débâcle ! Merci, Monsieur Deneys ! Merci, Monsieur le président. Nous nous opposerons donc... Nous maintenons cette proposition d'amendement... (Commentaires.) ...que nous souhaitons que tout le monde, démocratiquement, vote avec nous. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est au rapporteur de majorité, M. Gautier.
M. Renaud Gautier (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, bien évidemment, si l'on demande de contredire mon éminent vis-à-vis, je ne peux pas me retenir. S'agissant de déterminer si la limite - ou le curseur - doit être posée à un chiffre ou un autre, somme toute s'est posée la question de savoir quelle confiance ou quelles compétences peuvent être accordées à l'administration. Alors on peut - comme mon éminent vis-à-vis - décider que, dans l'administration, tout se pourrit, etc., et qu'il faudrait tout faire au niveau parlementaire. Je me pose juste la question de savoir si vingt-quatre heures par jour vont suffire !
On peut, au contraire, se dire que, dans le fond, ce sont les décisions importantes - celles qui consistent à savoir comment réaliser une créance dépassant un certain montant qui devrait être fixé - donc, des décisions importantes qui devraient faire l'objet d'une discussion et d'un contrôle démocratique - ça me fait toujours rire lorsque certains utilisent ce mot-là quand ça les arrange et pas dans d'autres circonstances. En l'occurrence, la commission, dans sa grande majorité, a décidé qu'en plaçant le curseur à 500 000 F il n'y avait aucun déni démocratique de quelque ordre que ce soit. Au contraire, dans la mesure où la majorité avait demandé ce qu'on a appelé un «bilan d'entrée» par rapport à la somme des créances - qui ne sont pas seulement celles de la Banque cantonale - on souhaitait pouvoir discuter, au niveau de la commission des finances, les montants des créances au-dessus de 500 000 F. Je vous engage donc à refuser cet amendement et à vous en tenir au texte du projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole n'étant plus demandée, je vais faire voter l'amendement du MCG, lequel figure dans le rapport de minorité. Il s'agit de remplacer...
M. Eric Stauffer. Je demande le vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Remarque de M. Eric Stauffer.) Modérément... (Exclamations. Commentaires.) ...mais vous l'êtes. (Appuyé.) Il s'agit donc de remplacer, à la lettre b) de l'article 71C (nouveau), le montant de 500 000 F par 100 000 F: «Les abandons de créances sont du ressort du Conseil d'Etat. Au-delà de 100 000 F, ils sont au surplus soumis à l'approbation de la commission des finances du Grand Conseil.»
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 71 non contre 14 oui.
Mis aux voix, l'article 71C (nouveau) est adopté par 71 oui contre 14 non.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
Le président. Le troisième débat est demandé. (Remarque de M. François Longchamp.) Oui, très bien ! Je passe la parole à M. Stauffer pour le troisième débat.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'interviendrai de manière très brève. La population prendra acte du contrôle démocratique et du niveau auquel ce parlement veut le fixer. Aujourd'hui - et je rejoins le conseiller d'Etat David Hiler sur ce point - il y a une absence totale de contrôle, donc mieux vaut 500 000 F que rien. Nous soutiendrons ainsi la démarche sans la contrer. C'est-à-dire que nous nous abstiendrons sur le vote final, je tenais simplement à le dire. Mais, encore une fois... (Remarque de M. Renaud Gautier.) Monsieur Gautier, vous pouvez rigoler et faire de l'humour, mais quand on parle de 2,2 milliards... Peut-être que pour vous, éminent libéral, ce n'est rien ! J'ai cru savoir que vous avez un peu pédalé pour trouver quelques fonds, de manière très positive, pour un musée genevois, et je vous en félicite... (Commentaires.) Mais 2,2 milliards, c'est quand même beaucoup, beaucoup d'argent !
Donc, c'était simplement pour cette prise de... (Commentaires. M. Renaud Gautier tend un billet de banque à M. Eric Stauffer.) Voilà... (Commentaires.) ...100 millions?! Il me tend 100... trillions ! De quelle république bananière s'agit-il, pouvez-vous nous le spécifier, Monsieur le député ? (Rires. Exclamations.) Peut-être faudrait-il en imprimer pour Genève ! (Exclamations.) Car Genève a vraiment besoin... (Exclamations. Protestations) ... Mesdames et Messieurs, d'imprimer... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des billets de 100 trillions... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. ...puisque nous allons bientôt rejoindre, avec un diplôme, le statut de république bananière. J'en ai terminé, Monsieur le président.
Le président. Monsieur le rapporteur, merci. (Remarque.) Monsieur Jeanneret, tenez-vous à intervenir ou s'agit-il d'une erreur ? (Remarque.) Nous passons donc au vote.
La loi 10570 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10570 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 71 oui et 15 abstentions. (Exclamations à l'annonce du résultat.)
Le président. Nous passons au point 130 de notre ordre du jour.
Premier débat
M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi 10541 présente diverses singularités. La première était évoquée aujourd'hui dans un quotidien de la place: c'est un des rares projets de lois portant réforme de la police à avoir été accepté à l'unanimité par la commission chargée de l'étudier - c'est un signal à relever.
Sa deuxième singularité, c'est qu'à l'occasion du dépôt de ce projet de loi le Conseil d'Etat a inventé un concept nouveau, celui du projet de loi à monter soi-même. Le kit était composé d'un projet de loi à peu près dépourvu d'exposé des motifs et donc incompréhensible pour le lecteur qui souhaitait saisir l'intention de notre gouvernement. Et puis, à côté, vous aviez un rapport: le RD 794 qui, lui, présentait quelques généralités sur la réforme de la police, mais sans aucune proposition concrète. Et par une manoeuvre, vous deviez joindre l'un à l'autre, et votre kit se transformait en un projet de loi que la commission judiciaire devait ainsi interpréter et étudier.
Enfin, la troisième singularité, c'est qu'on a affaire à un projet de loi qui se proposait de réformer de manière importante l'organisation de la police et pour lequel on avait estimé que, dans le fond, consulter la police elle-même était un luxe dont on pouvait se passer, avec le résultat que la direction de cette police est venue nous dire tout le mal qu'elle pensait du projet, en des termes évidemment très différents selon les services concernés qui avaient jugé préférable de se contredire largement pour favoriser le travail de la commission.
Tout cela n'était donc pas tout à fait aisé. Néanmoins, rapidement, la commission judiciaire est arrivée à la solution qui vous est présentée ce soir et qui a consisté à dissocier les aspects qui n'étaient pas controversés - ceux qui concernent la rémunération, ceux qui concernent les horaires de travail, ceux qui concernent l'âge de la retraite. Et cela est extrêmement important, parce que ça fait des années qu'on traîne, dans cette République, un certain nombre de scories en la matière. Elles ont été mises en évidence par différents rapports l'an dernier: le rapport de l'ancien conseiller d'Etat Annoni et le rapport de la Cour des comptes. C'est un indéniable progrès que d'avoir fait un nettoyage dans tout ce régime étrange d'indemnités, respectivement d'avoir supprimé une incongruité législative que l'on appelle «l'amendement G», du nom d'un ancien conseiller d'Etat - je peux vous donner peut-être d'autres indices: c'est un spécialiste des initiatives populaire irrecevables. Je pense que vous aurez reconnu de qui il s'agit.
En revanche, il y a une partie que la commission a refusée, c'est celle concernant la réorganisation des services de la police. Ce refus ne signifie pas que les commissaires auraient décidé, auraient pensé, que ces éléments étaient nécessairement faux, qu'ils devaient nécessairement être rejetés, mais c'est simplement que la commission n'a pas été placée en position de se faire une opinion raisonnable, faute des explications et de la vision nécessaires pour comprendre ce que le département, derrière cette réorganisation, voulait faire de notre police.
Cela signifie, Mesdames et Messieurs, que nous allons ce soir - si vous votez ce projet de loi - réaliser un pas important dans l'amélioration des conditions de travail en général de notre police, par le biais de la réforme de la rémunération et des heures, des horaires en particulier.
Et puis nous allons, d'un autre côté, laisser un chantier. Un chantier ouvert sur lequel il faudra revenir: il faudra revenir sur la réorganisation de la police; il faudra revenir sur la problématique de la police de la sécurité internationale; il faudra revenir sur les missions de notre police - nous sommes l'un des rares cantons qui a une loi sur la police ne donnant pas de missions à sa police. Il faudra que nous arrivions à comprendre quelle est l'idée directrice du Conseil d'Etat et comment il va, comment le département - grâce notamment à son nouveau chef - va pouvoir empoigner ces problèmes. Et nous nous réjouissons, à ce moment-là - lorsque nous verrons une véritable vision à long terme - de pouvoir, dans un second temps, voter une réorganisation, parce que ce sera, alors, nécessaire de le faire. Je vous recommande donc d'entrer en matière.
M. Pierre Losio (Ve). Je tiendrai tout d'abord, peut-être même au nom de la commission, à remercier le rapporteur pour la clarté du travail qu'il nous a rendu - mais on sait que ce n'est vraiment pas un scoop en ce qui le concerne.
Qu'est-ce qu'on n'a pas lu, et qu'est-ce qu'on n'a pas entendu à propos de ce projet de loi ! Le projet de loi, la réforme de la police, la loi sur la police est refusée par la commission du Grand Conseil ! En fait, je constate que, ce soir, nous avons un rapporteur de majorité, nous avons un projet de loi, et, effectivement, on a passé sous silence tout ce qui avait été accepté. Cela mérite peut-être d'être relevé !
Nous avons revu l'échelle d'évaluation des fonctions des trois corps concernés - la gendarmerie, la PJ, la PSI - et on en a même rajouté un: le personnel carcéral. C'était indispensable par rapport à la mission de service public et l'exposition de ces gens au service de notre population et de notre République. On a mis la retraite en conformité avec le droit fédéral. Nous avons demandé au Conseil d'Etat qu'il nous présente un projet au mois de septembre concernant le pont-retraite pour le personnel concerné approchant de l'âge de la retraite. Nous avons réintégré la police dans le petit Etat, notamment en ce qui concerne les horaires. Nous avons fiscalisé certains avantages liés aux indemnités - ce qui n'était pas le cas auparavant - et nous avons, forts des lumières du rapport Annoni et de celui de la Cour des comptes, mis à jour les indemnités en les basant sur un système forfaitaire. Tout ça, on en a très peu parlé, mais c'est un résultat extrêmement important.
Le rapporteur de majorité l'a souligné: nous ne sommes pas entrés en matière sur l'organisation de la police. Il est très rapidement apparu évident, à la suite des auditions, que ce n'était pas mûr. On ne peut pas faire une réforme organisationnelle «contre», on ne peut la faire qu'avec une adhésion du corps concerné. (Remarque.) Pour nous, il est indispensable de revoir cette structure organisationnelle dans une perspective beaucoup plus générale et que le Grand Conseil s'en tienne à une étude structurelle, organisationnelle mais non pas opérationnelle.
Mesdames et Messieurs, le groupe des Verts attend donc sans impatience un projet de loi qui devrait - M. le rapporteur l'a signalé - venir «dans les mois qui viennent», si je reprends les termes de son rapport.
Mais je ne voudrais pas passer sous silence quelque chose qui m'a paru important: vous savez que l'ouverture de la pêche a eu lieu il n'y a pas longtemps. Et vous aurez remarqué - à lire la presse ou à entendre certaines déclarations radiotélévisées d'officines situées dans des zones industrielles - que la chasse était ouverte et qu'il fallait tirer sur la tête du département ! (Remarque.) Celles et ceux qui se prennent pour des leaders d'opinion ou des faiseurs d'opinion devront prendre patience ! Et quand je repense à ce qui s'est passé avant les élections et à ce que j'ai lu dans la presse ou entendu récemment sur des antennes - l'ouverture de la chasse à la cheffe du département - ça me rappelle une certaine règle qu'avait explicitée en son temps un journaliste français, Jean-François Kahn, la règle des trois «L»: lécher... (Remarque.) Pardon ? (Remarque.) Non, non ! ...c'était donc lécher, lâcher, lyncher. Et c'est bien ce à quoi nous assistons aujourd'hui. En ce qui nous concerne, nous ne nous alignons pas dans cette perspective: nous savons que la cheffe du département travaille. C'est un sujet important, il ne s'agit pas de se précipiter, la sécurité a été l'un des grands sujets de cette campagne électorale, et, en ce qui nous concerne, nous faisons confiance à la cheffe du département pour qu'elle nous présente, avant l'été, une préconsultation concernant l'organisation de la police. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements. )
Mme Nathalie Fontanet (L). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral est aujourd'hui très satisfait du projet de loi 10541 dans sa version telle qu'elle est présentée devant notre plénum - satisfait, car le sujet est d'importance et que le moins que l'on puisse dire est que nous étions mal partis, très mal partis. Les travaux de la commission, notamment les auditions, ont très rapidement révélé que le projet de loi, dans sa version initiale, était un projet fourre-tout dans lequel tous les domaines et questions se mélangeaient: la consultation, quand elle avait eu lieu, avait été bâclée; les négociations avec les partenaires concernés étaient quasiment inexistantes; et le projet de loi ne tenait absolument pas compte de la très prochaine entrée en vigueur du code de procédure pénale.
Face à ce constat, les libéraux ont très rapidement proposé de supprimer toutes les mesures organisationnelles de ce projet de loi et de se concentrer sur les questions relatives à la réforme des horaires et heures supplémentaires, à la réforme de la rémunération et à la modification de la retraite. Cette proposition a été soutenue par l'unanimité de la commission et ensuite avalisée par la nouvelle magistrate en charge du département.
La réforme des horaires est un pas important, car elle a pour conséquence que tous les policiers, à l'instar du reste de l'administration, seront dorénavant soumis à la loi sur le personnel de l'Etat et travailleront par conséquent en moyenne quarante heures par semaine. Ce faisant, nous sommes convaincus que ce projet de loi donne les moyens, non seulement nécessaires mais très attendus, au Conseil d'Etat pour mieux gérer la question des heures supplémentaires de la police, et qu'il répond ainsi à la demande contenue dans le rapport de la Cour des comptes.
Les libéraux saluent également les conséquences de cette réforme, à savoir la suppression par le Conseil d'Etat de l'ordre de service controversé qui avait réduit à trente-six heures par semaine l'horaire de travail de la gendarmerie. En cette période notoire de manque d'effectifs, les libéraux se félicitent de cette suppression dont l'effet peut être assimilé à la création d'environ quarante postes.
Grâce à ce projet de loi, la police aura désormais une rémunération transparente et plus juste. Depuis de nombreuses années, la rémunération des policiers a été décriée; ils étaient pointés du doigt, considérés par certains comme des privilégiés, voire des profiteurs - c'est dire si cette réforme était attendue ! Elle devait à la fois tenir compte de la difficulté, de la pénibilité et de la dangerosité de la fonction de policier, tout en supprimant multitude de primes et avantages, parfois défiscalisés, qui nuisaient à leur image. A cet égard, les libéraux saluent la modification profonde du régime et des indemnités, mais surtout l'augmentation de la classe d'engagement des fonctionnaires de police, car cette augmentation permettra sans aucun doute de valoriser la fonction et d'assurer un meilleur recrutement.
La modification de la retraite du personnel de police était nécessaire pour que le canton de Genève soit en conformité avec la législation fédérale en la matière. Si le passage à 58 ans ne pouvait être négocié, il était important pour les libéraux de s'assurer que le projet de loi, dans ses dispositions transitoires, fixe un délai au Conseil d'Etat pour présenter un projet de loi sur le pont-retraite, afin de ne pas pénaliser trop durement les fonctionnaires de police particulièrement touchés par cette modification.
Le groupe libéral tient également à se féliciter que l'âge maximum de travail ait été maintenu à 65 ans. Nous sommes convaincus qu'en période de manque d'effectifs la possibilité pour un policier de travailler jusqu'à 65 ans ne présente que des avantages. De façon plus générale, si laisser la place à la jeunesse est important, nous estimons que l'expérience est un atout dont il n'y a pas de raison de se priver.
Toutes ces réformes sont importantes, et les libéraux s'en réjouissent. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, l'essentiel est à venir: les libéraux attendent en effet avec impatience la future réforme de l'organisation de la police. A ce sujet, ils font une entière confiance à leur magistrate, Isabel Rochat, pour ne pas commettre la même erreur que son prédécesseur, parce qu'une réforme de l'organisation de la police doit nécessairement être précédée d'une réflexion sur ses missions et les moyens de les remplir. Il ne s'agit pas de réformer pour se faire plaisir, mais de réformer pour mieux servir les Genevois et pour mieux protéger leur sécurité. En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe libéral vous invite à soutenir ce projet de loi. (Applaudissements. )
Mme Céline Amaudruz (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC soutient ce projet de loi car il a une réelle échéance. Au 1er janvier 2010, on est censés remplir les conditions suivantes, enfin, respecter les projets suivants: les horaires et heures supplémentaires, la rémunération, les indemnités et débours, la création de divers services et la création de la fonction d'assistant de sécurité. Ce projet de loi, qui a pour but la réorganisation de la police, a été un véritable fléau, mais c'est une étape importante et indispensable. Dès lors que l'on va voter, ce soir, la rémunération et l'élévation de l'âge de la retraite, le groupe UDC vous recommande de soutenir le projet de loi, ce d'autant plus qu'une motion UDC - initiée par notre regretté collègue Olivier Wasmer - demandait justement d'appliquer les recommandations de la Cour des comptes. Enfin, le groupe UDC se réjouit de recevoir le projet de loi de la cheffe du département concernant l'organisation. Je vous remercie.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, nous exprimons à M. Jornot nos remerciements pour son excellent rapport. Il est vrai que, quand nous avons reçu ce projet en automne, nous avons tous - l'ensemble de la commission, l'ensemble des députés qui ont pris la peine de le lire - trouvé que c'était probablement un peu confus et vraiment fourre-tout. Nous avions deux possibilités, la première étant de renvoyer ce projet à son auteur. Mais là, nous aurions probablement fait une erreur et nous avons choisi de nous mettre au travail, d'organiser des auditions et d'essayer de tirer de ce projet fourre-tout les éléments qui pouvaient être extrêmement utiles et attendus du corps de police. De nombreuses auditions ont révélé, bien évidemment, le travail et l'engagement de la police. Cela a été relevé tout à l'heure, on a traité des rémunérations, des horaires, de l'âge de la retraite. On est donc tous heureux que, ce soir, ce projet aboutisse avec l'unanimité.
Comme tous les groupes, nous nous réjouissons de recevoir prochainement, Madame la conseillère d'Etat, cette réforme de la police. Et, comme de la part de tous les groupes, vous avez notre plein soutien, de même que celui que nous donnons entièrement au corps de police. Nous vous remercions.
Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes soutiendront ce projet de loi qui consacre une solution acceptable en ce qui concerne le mode de rémunération des policiers. Les socialistes se réjouissent d'ailleurs de l'accord passé entre les syndicats de police et le Conseil d'Etat, dont le résultat trouve sa consécration légale dans ce projet. Cela met heureusement fin à des années d'un régime particulièrement compliqué et difficilement compréhensible.
Quant à l'élévation de l'âge de la retraite à 58 ans, elle est imposée par le droit fédéral et donc inéluctable. Cela étant, il faudra être très attentif à trouver une solution équitable pour tous les policiers qui se trouvent proches de la retraite et pour lesquels cette élévation de l'âge de la retraite pourrait avoir des conséquences particulièrement dures. Nous serons donc très attentifs à la négociation qui sera menée et surtout au résultat qui devra être présenté au Grand Conseil d'ici à fin septembre 2010. Je vous remercie.
M. Fabiano Forte (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais me joindre aux remerciements de notre collègue Frédéric Hohl quant au rapport qui a été fait ce soir. Le rapporteur de la commission a su tirer la substantifique moelle... (Exclamations. Commentaires.) ...d'un projet de loi initial qui ne tenait pas debout. On a parlé de méchoui, mais on peut parler de melting-pot, de patchwork... Plus personne ne se retrouvait dans le projet de loi qui était à l'étude de la commission judiciaire et de la police.
Alors, on a parlé d'avantages, de lisser un certain nombre d'indemnités, de ceci et cela, mais je crois que le plus important dans ce projet de loi qui est ressorti des travaux de la commission judiciaire et de police, c'est la revalorisation d'un métier ! Policier, gendarme, c'est un métier ! Ce n'est pas une fonction ! Je crois que la commission l'a bien compris, et ce projet de loi en est la preuve.
Maintenant, il faudra bien entendu aller plus loin dans les réformes - mais nous avons pleine confiance en le département de la sécurité, de la police et de l'environnement - parce qu'il ne s'agit pas là de réformer un métier, des fonctions pour lesquelles nous attachons la plus grande importance, une belle institution, en quarante-cinq jours ! Cela prend un tout petit peu plus de temps, et il faut que ce soit fait en bonne intelligence ! Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député, la parole est à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, que d'autosatisfaction ce soir ! Vous êtes tous à vous caresser les uns les autres - bravo ! Tout va bien dans le meilleur des mondes ! Alors, excusez-moi, on va s'inscrire un peu en faux, même si nous allons soutenir - pour ne pas faire de la guérilla parlementaire - le présent projet de loi. Mais j'aimerais quand même souligner ici qu'une certaine libérale, du nom de Mme Spoerri, avait fait beaucoup de choses pour la police et notamment pour ce qu'on appelle aujourd'hui «certains avantages» - et encore faut-il prendre en considération la classe de salaire dans laquelle ils travaillent. Et puis nous constatons que, quelques années après, eh bien, c'est une autre libérale qui va défaire ce qu'une libérale avait fait, c'est-à-dire que les avantages octroyés par une libérale vont être défaits par une autre libérale. Moi je m'inquiète, et le MCG avec moi, quand nous entendons, Mesdames et Messieurs les députés, de la part d'une autre libérale - mais qui, elle, n'est pas magistrate, ce n'est pas faute d'avoir essayé - qui dit... (Protestations. Commentaires.) ...que c'est très bien d'uniformiser le statut des policiers avec l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat. Non, Mesdames et Messieurs les députés ! Les policiers ne sont pas des fonctionnaires comme les autres au sein de l'Etat ! (Commentaires.) Ce sont des gens qui prennent des risques sur leur vie, qui assurent votre protection et votre sécurité. Et à ce titre-là, ils doivent être traités d'une manière différente, en relation avec la profession qu'ils exercent. Et non, Monsieur le député Forte: policier n'est pas un métier, policier, c'est une vocation ! (Brouhaha.) Ces gens doivent avoir la vocation de protéger les citoyens genevois.
Alors, encore une fois, nous n'allons pas nous opposer à ce projet de loi. C'est vrai que nous aurions combattu la version initiale avec toute l'énergie qu'on nous connaît au MCG, tant c'était... Mon éducation m'interdit de le dire, mais je pense que c'était le dernier baroud d'honneur du conseiller d'Etat socialiste, qui s'est évertué, pendant ces quatre ans, à flinguer l'image de la police, à tout faire pour qu'elle en soit au stade où elle en est aujourd'hui et à tout faire aussi pour que - c'est le corollaire, vous m'excuserez de faire cette petite parenthèse - aujourd'hui Genève soit un paradis pour les dealers, les mendiants et autres malfrats qui viennent de l'autre côté de la frontière, comme vous le savez - cela a déjà été dit et démontré à moult reprises. Et finalement, c'est ce que nous voulons combattre. Malheureusement, nous constatons qu'après cent jours - peut-être pas en quarante-cinq jours, Monsieur Forte, pour ça, il aurait fallu que le score soit différent - eh bien, nous constatons qu'il y a toujours autant de dealers dans les rues, il y a toujours autant de mendiants, il y a toujours autant de criminalité ! Il ne se passe pas deux ou trois jours sans qu'il y ait une attaque à main armée... La dernière a eu lieu ce matin avec quelqu'un qui est extraordinaire: il arrive avec un fusil dans le casino de l'ICC, à l'aéroport... (Commentaires.) ...et puis, finalement, il a pu reprendre sa voiture en payant le parking et en ressortant, comme ça, tranquillement. C'est «Welcome everybody !», hein... (Rires. Brouhaha.) Venez à Genève, ici, de toute façon, pfuit ! On vous donne tout: on vous donne les seringues pour vous injecter derrière la gare...
Le président. Monsieur le député, vous devez vous adresser à la présidence !
M. Eric Stauffer. Pardon ?
Le président. Adressez-vous à la présidence !
M. Eric Stauffer. Oh oui, Monsieur le président, mais vous transmettrez à mes collègues, parce que, finalement, je crois qu'on n'est pas sur la même longueur d'ondes quant à l'aspect sécuritaire ! Et malheureusement, nous ne voyons pas de grand changement, au contraire, nous voyons une péjoration de la situation.
Pour en revenir au projet de loi qui nous occupe, eh bien - comme je vous l'ai dit - nous... (Exclamations.) Mais oui ! Continuez à faire de l'humour, Mesdames et Messieurs ! Vous savez, moi, je veux dire... Finalement, ce n'est pas vraiment un problème, les gens vous le diront demain matin au marché, ou samedi quand vous irez faire vos courses, que finalement ils n'en peuvent plus, hein, de ces personnes âgées qui se font tirer leur sac - j'en passe et des meilleures, la liste est tellement longue...
Le président. Il vous faut conclure, et rapidement !
M. Eric Stauffer. Oui, je vais conclure, Monsieur le président. Si l'on pouvait conclure une fois pour toutes, en éliminant...
Le président. Ah, nous en serions très heureux !
M. Eric Stauffer. ...les criminels et autres malfrats de Genève, ce serait vraiment une bonne chose ! Voilà, nous ne nous opposons donc pas à ce projet de loi, mais nous serons extrêmement attentifs...
Le président. Merci !
M. Eric Stauffer. ...au respect de la vocation de policier.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, vous l'aurez compris, le MCG...
Le président. Et il vous reste dix secondes !
M. Mauro Poggia. Dix secondes ! (Commentaires.) Je crois que l'essentiel a été dit par mon collègue... (Brouhaha.)
Le président. C'est parfait !
M. Mauro Poggia. Mais j'ajouterai simplement que nous serons attentifs aux réflexions en profondeur que doit mener maintenant la cheffe du département sur les missions et l'organisation des forces de l'ordre. On nous dit que l'aspect financier a été réglé, nous n'en sommes pas certains. Il y a encore des questions qui sont en discussion, nous espérons évidemment qu'elles seront menées à terme, parce qu'il n'y a pas de police efficace s'il n'y a pas de police considérée.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Hohl, à qui il reste... (Remarque.) ... à peu près trois minutes.
M. Frédéric Hohl (R). Oh ! Merci beaucoup, Monsieur le président. Monsieur Stauffer, vous adorez terminer les débats, vous adorez parce que c'est 21h35 - il y a une bonne audience sur Léman Bleu...
Vous nous dites que vous allez éventuellement ne pas vous opposer à ce projet. Les commissaires qui siègent à la judiciaire - vous n'en faites pas partie - ont accepté ce projet, donc vraiment je ne comprends pas. (Commentaires.) Je ne comprends pas ! Donc, c'est toujours la même rengaine ! (Remarque de M. Eric Stauffer.) C'est toujours la même chose: vous utilisez ces heures d'antenne pour expliquer que la situation ne va pas à Genève...
M. Eric Stauffer. C'est la réalité !
M. Frédéric Hohl. On a compris. Là, on parle d'un projet, ça a été clairement détaillé, ce n'est pas ce débat ! Vous vous trompez ! Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Forte, à qui il reste deux minutes trente.
M. Fabiano Forte (PDC). C'est largement suffisant, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, eh bien, notre collègue Frédéric Hohl a relevé une partie de ce que je voulais dire: les commissaires MCG présents à cette commission ont voté sans jérémiades ce projet de loi. Et j'inviterai nos collègues de la commission, Monsieur le président de la commission judiciaire et de la police, à réserver leur verve pour les travaux de la commission, puisque ce projet de loi n'est qu'une première pierre à l'édifice. Et je remercie M. Poggia d'avoir ramené un tout petit peu à la raison - autant que faire se peut - son collègue Eric Stauffer.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Bolay, à qui il reste presque trois minutes.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord, bien évidemment, remercier - cela a déjà été fait tout à l'heure - le rapporteur. J'aimerais aussi dire que ce projet de loi est très important. Important, car ce que nous avons extrait du projet de loi initial est quelque chose où il fallait mettre de l'ordre. On l'a indiqué, le rapport Annoni et le rapport de la Cour des comptes ont mis le doigt sur quelque chose qui dysfonctionnait depuis des années. Avec ces horaires, il y avait un cumul énorme d'heures supplémentaires. Il fallait véritablement mettre cela à plat, et c'est le mérite de ce projet de loi; preuve en est que la suppression de l'ordre de service «Spoerri», eh bien, c'est quarante postes supplémentaires.
Il y a aussi la revalorisation du métier de policier. Mesdames et Messieurs les députés, le métier de policier est difficile, qui demande de l'engagement, de l'effort, du sacrifice. Il fallait donc que cette revalorisation soit faite, il fallait qu'on reconnaisse, par cet élément, le travail énorme que fait la police et dont on a besoin.
Bien évidemment, on a aussi prévu dans ce projet de loi l'élévation de l'âge de la retraite, puisqu'il s'agit d'une contrainte fédérale. On le savait: Genève était le seul canton dont les policiers pouvaient prendre la retraite après trente ans de service. Donc, contrainte fédérale oblige, c'est la retraite à 58 ans. Mais nous avons aussi mis la limite à 65 ans. Pourquoi ? Parce qu'il y a peut-être certains policiers qui souhaitent travailler au-delà de 58 ans et, pourquoi pas, effectuer des travaux, non pas en étant dans la rue, mais d'autres tâches administratives.
Mais la question importante - et celle-là, tout le monde l'a relevée, il va falloir y revenir - c'est celle de l'organisation. Est-ce que, oui ou non, la PSI doit être intégrée dans la gendarmerie ? Quelle police voulons-nous pour demain ? Cette police citoyenne ? Quelle police ? Il faut qu'elle ait les moyens suffisants pour faire son travail ! On l'a répété à maintes reprises: aujourd'hui, il manque des effectifs substantiels à la police - à la gendarmerie d'abord, parce que même la loi sur la police n'est pas, je veux dire... La loi n'est pas, comment dire... (Remarque.) Tout à fait: c'est parce qu'il manque des effectifs dans la LPol. Donc, cette loi, on ne peut même pas - je n'arrive pas à trouver les mots... Mais, Mesdames et Messieurs les députés, cette organisation est nécessaire ! Elle avait été incluse dans le projet de loi initial, et l'on a estimé qu'il était un peu tôt. En effet, on ne peut pas réaliser cette réforme sans avoir, au préalable, une consultation large des syndicats de police, qui sont les premiers concernés, et puis, bien évidemment, de la hiérarchie de la police, qui a aussi son mot à dire.
Donc, le groupe socialiste votera, comme il l'a fait en commission, ce projet de loi qui est - je l'ai dit tout à l'heure - extrêmement important...
Le président. Il vous faut conclure !
Mme Loly Bolay. Je conclus. Bien évidemment, Monsieur le président, nous serons attentifs, par la suite, aux autres projets de lois à venir sur toutes ces questions qui ont été laissées en suspens.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je ne sais pas s'il faudra la vocation, mais en tout cas la foi pour pouvoir combattre toutes les nuisances et le mauvais esprit qui semble régner chez certains, visant à démolir l'esprit constructif paraissant s'être instauré depuis le début de la législature. La foi, la confiance dans cette mission, je l'ai, et puis vous assurer de ma détermination. Et je vous adresse, bien sûr, mes remerciements quant à la célérité avec laquelle la commission a traité ce projet de loi.
On a parlé de fléau, de fardeau, de fourre-tout... Il fallait en tirer les bonnes graines, et je suis extrêmement reconnaissante à ceux qui ont su en dégager le meilleur. Le meilleur, c'est ce que nous nous efforcerons de faire, vous et moi. A moi de vous présenter maintenant une mission claire, afin de revaloriser non seulement cette fonction, mais aussi cette mission première qui est d'assurer le fondement de notre liberté, à savoir la sécurité. Mesdames et Messieurs, je crois que rien de trop ne sera fait s'agissant de défendre notre liberté à travers la sécurité et celles et ceux qui sont chargés de remplir cette mission.
Une petite précision concernant le tempo: un nouveau projet de loi va effectivement être présenté; il est peut-être ambitieux - et je n'aime pas ne pas tenir mes promesses - quant à fixer un délai à cet été. Il s'agira surtout de prendre son temps, de pouvoir auditionner les uns les autres et de pouvoir prendre la température, surtout de celles et ceux qui sont directement concernés, afin que je puisse être en mesure de présenter une préconsultation devant la commission avant la fin de l'année. C'était mon engagement, j'espère que vous allez m'aider à pouvoir mener à bien cette mission.
Il est question de changer d'état d'esprit. Certaines questions n'ont pas encore été résolues, elles le seront incessamment, s'agissant de la finalisation de protocoles restant à définir et pour lesquels il fallait encore trouver un accord par rapport aux débours et heures supplémentaires. Ce sera fait ces prochains jours, du moins d'ici à fin mars. Quoi qu'il en soit, les choses vont bon train et l'on est vraiment sur le point - je l'espère - de pouvoir vous apporter de bonnes nouvelles d'ici Pâques.
Concernant ce nouveau groupe de travail que je vais constituer, afin d'être en mesure de pouvoir étudier vraiment la meilleure façon de réorganiser la police, nous nous mettrons à l'oeuvre dès la rentrée de Pâques. Je voulais vous préciser cela. Il s'agit également de présenter, d'ici au 30 septembre, un projet de loi relatif au pont-retraite - puisque cela a été évoqué - ainsi qu'un projet de loi concernant l'adaptation au code de procédure pénale. Voilà, Mesdames et Messieurs, il me reste à remercier, bien sûr, le rapporteur, ainsi que tous les commissaires qui ont oeuvré pour qu'on puisse tirer le meilleur de ce projet de loi. Merci beaucoup.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 10541 est adopté en premier débat par 85 oui et 3 abstentions.
La loi 10541 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10541 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 84 oui et 3 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 136 de notre ordre du jour. Le rapport est de Mme Buche, à qui je passe la parole. (Quelques instants s'écoulent. Bruit de micro. )
Une voix. Ah, c'était très bien ! (Brouhaha.)
Le président. Il faut réappuyer sur le bouton, je crois. (Bruit de micro.)
Des voix. Ah !
Mme Irène Buche (S), rapporteuse. Ça fonctionne ? (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, après avoir assuré la protection des ambassades et représentations étrangères à Genève pendant plusieurs années, l'armée suisse s'est retirée partiellement de cette mission le 1er janvier 2010. Elle n'a laissé à la disposition du canton que cinquante militaires professionnels pour assurer ces tâches de planton, lesquelles consistent pour l'essentiel à assurer une présence, surveiller et alarmer si nécessaire. (Brouhaha.) Les plantons assurant cette mission n'ont pas de pouvoirs de police, leur seule compétence étant précisément de l'appeler. Le canton de Genève a donc dû prendre la relève en remplaçant les militaires par des membres de la police de sécurité internationale - PSI.
La crainte des signataires de la motion 1821 était que l'affectation de forces de la PSI à ces tâches de planton représente un important gaspillage de compétences et affaiblisse de surcroît la sécurité des quartiers dans lesquels sont implantées les organisations internationales et les représentations étrangères. En effet, cela diminuerait le nombre de membres de la PSI en patrouille dans la rue.
Les motionnaires ont donc demandé que le Conseil d'Etat renonce à affecter des forces de police à la garde des représentations étrangères et qu'il délègue les missions de planton à des agents privés. La majorité des membres de la commission a toutefois estimé que cette délégation de tâches à des agents privés ne pouvait être que provisoire, en attendant la formation et l'engagement d'assistants de sécurité pouvant assumer ces dernières. On sait qu'une première volée d'assistants de sécurité est en cours de formation et pourra entrer en fonction d'ici à quelques mois; ce processus va se poursuivre ensuite avec d'autres volées. La commission a donc décidé que ce n'est qu'à titre tout à fait provisoire que l'Etat pouvait être autorisé à faire appel à une ou plusieurs entreprises de sécurité privées, sous la supervision de la police, en attendant l'engagement d'assistants de sécurité au sein de la PSI, engagement qui lui permettra d'assurer seule cette mission. C'est donc la motion amendée dans ce sens que je vous propose de voter ce soir. Je vous remercie.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, en principe, lorsque l'on signe une motion et qu'elle revient avec un rapport qui en recommande l'adoption, on est heureux. Eh bien malheureusement, ce soir, ce n'est pas le cas. Je ne suis pas heureux, parce que je constate que les premières démarches entreprises par les libéraux dans ce dossier datent d'il y a deux ans. C'était en mars 2008 que nous avons commencé, par une interpellation urgente à l'égard du Conseil d'Etat, en signalant exactement les problèmes aujourd'hui mis à jour par le rapport qui vient de vous être présenté. Et on nous a répondu que tout allait bien et qu'en effet, entre les militaires professionnels d'un côté, entre les agents de la PSI de l'autre - qui allaient être divertis de leur mission - et entre les cinquante policiers qu'on allait faire naître par génération spontanée d'ici là, eh bien, on pourrait facilement résoudre le problème du départ de l'armée. Cette réponse était tellement absurde que nous avons immédiatement déposé la motion qui revient aujourd'hui. Et cette motion, cela fait une année et demie qu'elle a commencé d'abord par couler des jours heureux dans notre ordre du jour, avant d'être renvoyée en commission pour que cette dernière, enfin, vous la soumette aujourd'hui. Et pendant ce temps, que s'est-il passé ? Eh bien, strictement rien ! En effet, le chef de département précédent - sur lequel je m'en voudrais de poursuivre l'exercice consistant à lui tirer dessus en permanence, surtout maintenant qu'il n'est plus là - avait personnellement décidé que tant qu'il serait là, il n'y aurait jamais un agent de sécurité privé qui assurerait la tâche de surveillance des ambassades. Et c'est dommage ! Parce que les travaux de commission nous ont permis d'acquérir deux certitudes: d'abord, la première, c'est que tous les acteurs sont favorables à cette solution. Tous, que ce soit la direction de la police et de ses différents services ou que ce soit les membres du personnel que nous avons entendus, tous nous ont dit que ce n'est pas une tâche policière que d'assurer la surveillance statique devant les représentations diplomatiques et que cette tâche pouvait parfaitement être déléguée à des privés. Puis, la deuxième certitude que nous avons acquise, c'est celle que la solution qui consiste, comme aujourd'hui, à avoir cent dix agents de la police de la sécurité internationale s'occupant de la surveillance statique des lieux diplomatiques, eh bien, est un gaspillage éhonté ! Aussi bien de ressources financières que de compétences de la part de ces agents, qui sont même, pour certains, dotés du brevet de policier et que l'on emploie à des tâches n'étant tout simplement pas celles pour lesquelles soit ils ont été formés, soit ils ont été engagés.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, même si ce soir nous allons voter cette motion, c'est avec un certain sentiment, un petit goût amer dans la bouche que, en ce qui concerne les libéraux, nous le ferons - ce goût amer laissé par l'attente, l'attente qu'enfin on puisse voter ce texte.
Alors la commission a décidé que, dans le fond, il fallait légèrement amender l'invite de la motion pour que cette solution de recours à des agents privés soit provisoire...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Olivier Jornot. Oui, je vais immédiatement conclure, Monsieur le président. Nous, les libéraux, nous étions contre le fait que ce soit une solution provisoire, mais comme à Genève les solutions provisoires - on l'a vu par exemple avec certains bâtiments scolaires - durent parfois jusqu'à un siècle, pour ce provisoire-là, nous sommes d'accord et nous voterons la motion. (Commentaires.)
Mme Céline Amaudruz (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe UDC va soutenir cette motion. Nous ne sommes pas certains que c'est elle qui nécessitait l'urgence, néanmoins le groupe UDC tient à la sécurité à Genève, et c'est dans ce sens que nous allons soutenir cette motion. En effet, le fait de devoir confier la protection des représentations étrangères aux forces de police cantonales, en lieu et place de militaires, va poser un grave problème qui est très simple: une diminution inévitable de la présence de la police dans la rue, ce d'autant qu'ils auront pour mission insolente de prendre leur téléphone pour composer un numéro - mais où allons-nous ? Donc, je vous en supplie, accordez l'accès à ces postes à des entreprises de sécurité privées !
Mme Emilie Flamand (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, sur le principe, les Verts sont totalement opposés à l'idée de déléguer une tâche régalienne de l'Etat, telle que le maintien de la sécurité, à des entreprises privées. C'est vrai que dans le maintien de la sécurité il y a des activités plus ou moins palpitantes, mais ça reste un rôle, selon nous, qui doit être étatique. Au début, nous étions donc opposés à cette motion, mais les auditions ont rapidement révélé que la situation était inextricable et que, faute de trouver une solution rapide, il allait falloir retirer du terrain soixante agents de la PSI pour les affecter à la surveillance des ambassades, ce qui n'est évidemment pas souhaitable. Devant ce casse-tête et en attendant l'engagement des assistants de sécurité à qui cette tâche sera finalement confiée, nous avons accepté cette motion avec un amendement précisant que l'engagement d'agents privés ne devait se faire qu'à titre provisoire. Nous insistons sur ce point et nous voterons sans enthousiasme la motion ainsi amendée.
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, au parti radical, nous trouvons - comme ma collègue Verte - que la sécurité est une tâche de l'Etat...
M. Gabriel Barrillier. Ah !
M. Frédéric Hohl. ...mais...
M. Gabriel Barrillier. «Mais» !
M. Frédéric Hohl. ...mais comme certains d'entre vous, j'ai également fait de l'armée, et...
M. Gabriel Barrillier. Oh !
M. Frédéric Hohl. ...c'est vrai que passer une nuit entière devant une ambassade...
M. Gabriel Barrillier. Mais oui... Oui, oui...
M. Frédéric Hohl. ...ce n'est pas ce qu'il y a de plus... On va dire: sexy.
M. Gabriel Barrillier. Planqué !
M. Frédéric Hohl. On parlait tout à l'heure de la revalorisation du métier de policier: je pense qu'il est très important que le Conseil d'Etat et le département, probablement avec les assistants de sécurité, imaginent d'autres pistes. Et celle qui nous est proposée aujourd'hui - l'engagement d'entreprises de sécurité privées à titre provisoire - ma foi, on verra bien le temps que cela durera.
M. Gabriel Barrillier. Un certain temps !
M. Frédéric Hohl. C'est une solution pour laquelle nous n'avons pas le choix. Nous adhérons donc à cela et allons voter cette motion.
M. Mauro Poggia (MCG). Le MCG va soutenir cette motion. Et, comme M. le député Jornot, nous avons évidemment regretté que le précédent chef du département ait autant attendu - ou plutôt, il n'a pas attendu, il n'a rien fait pendant des mois - alors que cette échéance du 1er janvier 2010 pour le départ de l'armée était connue. Cela allait impliquer et cela a impliqué provisoirement que des forces de police - qui sont bien plus utiles ailleurs sur le terrain - soient utilisées à des travaux de «sécurisation», dirions-nous, des représentations étrangères.
C'est vrai que la tâche de défendre la société doit incomber avant tout à l'Etat: c'est lui qui est garant de la démocratie, et elle n'existe pas sans sécurité. Alors, le fait de déléguer ces tâches de sécurité, même subalternes, pose un problème de principe. Nous ne pouvons toutefois pas faire autrement et nous devons choisir, aujourd'hui, entre la délégation de ces tâches de sécurité à des entreprises privées et/ou déléguer ces tâches à des agents de l'Etat - des gendarmes en uniforme qui ont bien mieux à faire, vous le savez aussi bien que moi.
Nous allons donc soutenir cette motion, mais que les choses soient claires: nous n'accepterons pas du provisoire qui dure, contrairement à ce qu'a dit M. le député libéral. Les libéraux s'opposent systématiquement à voter des crédits supplémentaires lorsqu'il s'agit de tâches comme celles-là. J'espère qu'ils vont, cette fois-ci, changer de ton en fin d'année, lorsqu'il s'agira de débloquer les fonds nécessaires pour remplacer ces agents de sécurité privés par des agents de la force publique engagés par l'Etat, parce que nous ne voulons pas du provisoire qui dure.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Eric Stauffer à qui il reste une petite minute.
M. Eric Stauffer (MCG). C'est amplement suffisant pour faire un constat et reprendre vos propos, chers collègues. Nous entendons des Verts: «La situation est inextricable.» «Situation chaotique», décrite par les députés libéraux... Eh bien, Mesdames et Messieurs, c'est le constat d'échec de ces gouvernements successifs... (Exclamations.) ...qui n'ont pas su prévoir la sécurité à Genève. Comme l'a dit mon excellent collègue Mauro Poggia, la situation était connue pour le 1er janvier 2010: on savait qu'il n'y aurait plus d'armée. Voilà la sécurité qu'on nous propose !
Finalement, cette motion n'a aucun effet contraignant, donc on l'envoie au Conseil d'Etat en lui disant: «Coucou ! Le parlement aimerait juste que vous puissiez déléguer ceci aux privés.» Et puis, le gouvernement fait exactement ce qu'il veut ! En effet, nous avons appris avec effroi, au MCG, que le gouvernement a donné son autorisation pour engager des auxiliaires de police qui sont des frontaliers, c'est-à-dire des étrangers résidant à l'étranger.
Alors, je vous le dis, Mesdames et Messieurs, dans le calme qui nous caractérise: si, demain, ces gens continuent à être engagés au sein des forces de police, il y aura un soulèvement dans la rue... (Commentaires.) Parce que nous ne sommes pas prêts, Mesdames et Messieurs, à accepter de telles dérives de notre parlement ou de notre gouvernement ! Et j'aimerais, à ce propos, vous rappeler l'article 43 de la constitution genevoise, qui prévoit que devrait perdre ses droits civiques toute personne qui travaille pour une puissance étrangère... Je vous laisse méditer sur cette petite phrase et savoir si vous êtes des élus de la République et canton de Genève ou si vous travaillez pour la France, pour favoriser les Français...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Eric Stauffer. ...au détriment des citoyens genevois ! (Commentaires.)
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste va évidemment voter cette motion. En effet, c'est lui qui, en commission, avait proposé l'amendement prévoyant que la délégation à des entreprises de sécurité privées ne puisse se faire qu'à titre provisoire - et uniquement provisoire. Le groupe socialiste l'a fait pour deux raisons, Monsieur le président: bien évidemment, depuis que l'armée s'est retirée de Genève, eh bien, les missions diplomatiques, la Genève internationale, doivent bénéficier de cette surveillance. Nous ne voulons pas prétériter la Genève internationale et avons accepté que la sécurité privée puisse venir remplacer, en attendant les assistants de sécurité, les plantons sur ces sites. Cela étant, pour nous, bien sûr que la sécurité est une tâche régalienne de l'Etat, elle doit le demeurer, et c'est bien évidemment à titre très provisoire que nous concevons cette motion.
Cela dit, pour nous aussi, il y avait un problème par rapport à la PSI. Pourquoi ? La PSI a fait un travail admirable dans la Genève internationale, elle fait aussi un travail admirable à l'Aéroport international de Genève; nous avons constaté qu'affecter les forces de la PSI à la surveillance des missions et ambassades dans la Genève internationale était une perte du savoir-faire de cette police. Alors, qu'elle puisse le faire de manière temporaire, d'accord, mais je crois que la PSI doit conserver les tâches qui sont les siennes à l'heure actuelle.
Monsieur le président, comme je l'ai dit tout à l'heure, le groupe socialiste votera cette motion avec cet élément transitoire, pour une période dont nous avons souhaité qu'elle ne se prolonge pas au-delà d'une année.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Je vais simplement apporter une petite rectification pour éviter que d'aucuns se soulèvent pour pas grand-chose. S'agissant des aspirants à l'école d'assistant de sécurité, j'aimerais juste apporter la précision suivante: sur 119 candidatures déposées, 52 candidats ont été convoqués aux examens d'admission et 36 d'entre eux ne se sont même pas présentés. Au final, après examen, il reste 20 candidats, je vais vous en donner le détail: il s'agit de 12 Suisses, 4 permis C, 1 permis B et 2 permis G dits «frontaliers». Sur les 20 candidats, un est au chômage; sur les 2 permis frontaliers, il y en a un qui est en voie de régularisation parce que son détenteur va épouser une Suissesse d'ici peu de temps... (Commentaires. Brouhaha.) ...il en reste donc un. Ces demandes sont en cours de validation. Il s'agissait simplement d'apporter cette précision pour éviter qu'il y ait des soulèvements pour, finalement, pas grand-chose. (Brouhaha.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.
Mise aux voix, la motion 1821 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 78 oui et 5 abstentions.
Débat
Le président. Nous sommes au point 150 de notre ordre du jour, motion 1941 intitulée: «Pénurie de logements: où sont les grues ?» (Brouhaha.)
M. Renaud Gautier. La réponse, c'est: aux Pâquis.
Le président. La parole n'étant pas demandée... (Remarque.) Oui, Mme Torracinta ! ...nous passons, comme convenu, tout de suite au vote de la motion 1941. Celles et ceux qui... (Commentaires.) La proposition était de la renvoyer au Conseil d'Etat... (Commentaires.) Pardon: à la commission du logement ! Donc, celles et ceux qui acceptent de renvoyer cette motion à la commission du logement... (Remarque.) Monsieur Slatkine, vous avez demandé la parole: je vous l'accorde. (Commentaires.)
M. Ivan Slatkine (L). Merci, Monsieur le président...
Mme Anne Emery-Torracinta. On avait dit «sans débat» !
M. Ivan Slatkine. Vous avez peut-être dit «sans débat», Madame la députée, mais vous me permettrez d'intervenir... (Commentaires.) ...parce que j'ai quelques questions à poser. (Commentaires.)
Le président. Madame Torracinta, vous avez le droit de prendre la parole, mais je la passe d'abord à M. Slatkine.
M. Ivan Slatkine. Merci, Monsieur le président. Permettez-moi juste de dire quelques mots, je vais être très bref. (Remarque.) Mais qui s'oppose aux simplifications des procédures ? Qui s'oppose aux simplifications des PLQ ? (Commentaires.) Qui a conseillé à la commune d'Ambilly de ne pas vendre ses terrains ? N'est-ce pas l'ASLOCA, qui a été représentée pendant de nombreuses années par M. Velasco et d'autres du partis socialiste ? Je ne vais pas développer, je vais être très bref ! Mais venir donner aujourd'hui des leçons et cibler un conseiller d'Etat par rapport à une problématique qui est large - ce n'est pas en quatre mois qu'on peut résoudre des problèmes de logement - c'est assez lâche, et je voulais le relever ce soir. En effet, je trouve que cette motion qui cible un conseiller d'Etat n'est pas très correcte; ce n'est pas très élégant. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, le groupe libéral s'opposera au renvoi de cette motion en commission. Je vous remercie.
Mme Irène Buche (S). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'on peut partir d'un simple constat: les statistiques publiées récemment par l'OCSTAT pour les constructions de logements en 2009 sont assez édifiantes. Seulement 1230 logements ont été construits, alors que le Conseil d'Etat nous en promettait 2300. Et parmi ces 1230 logements, il y déjà 238 villas, des logements en PPE, et très peu de logements... Le reste, ce sont des logements à louer - on n'a pas les chiffres détaillés, mais on sait en tout cas que la part des logements d'utilité publique est très faible. A partir de là, on a de quoi s'inquiéter ! Et ce n'est pas depuis quatre mois seulement que le Conseil d'Etat doit faire ce qu'il a à effectuer pour résorber cette pénurie de logements. (Remarque.) Il faut maintenant que le Conseil d'Etat ait un plan, un vrai programme de construction, et qu'il nous dise où il en est. On parle toujours des grands projets, or on voit très bien que le nombre de logements proposés diminue dans chaque projet au fur et à mesure qu'il avance. Ça aussi, c'est inquiétant. Voilà la raison de cette motion... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous souhaitons vraiment que le Conseil d'Etat ait maintenant un plan, un programme, que l'on sache exactement où l'on va et que toutes les possibilités soient exploitées. Je vous remercie.
M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais abonder dans le sens de ma collègue Buche et rappeler que, si la situation est effectivement catastrophique concernant les logements, elle prend des proportions encore plus importantes lorsque l'on parle de logement social. J'aimerais rappeler qu'en 2006 un protocole d'accord a été signé, qui prévoyait la création de 30 000 LUP en dix ans pour arriver à 15% du parc immobilier, et que l'Etat était d'accord de libérer 30 millions de francs pour permettre de construire ces logements. La somme a même été augmentée suite à l'initiative lancée en 2004 par l'ASLOCA, l'initiative 133 concernant l'or de la Banque nationale. Et aujourd'hui, quatre ans après la signature de l'accord, seulement 160 LUP ont été construits et 850 logements existants ont été requalifiés en LUP, alors que, durant la même période, le parc immobilier subventionné a diminué d'à peu près 3000 unités. Aujourd'hui, 4900 personnes sont inscrites à l'office du logement, et j'ai le sentiment que, si le Grand Conseil ne prend pas en main cette thématique-là, ces personnes ne sont pas près de trouver un toit. C'est la raison pour laquelle je vous invite à accepter le renvoi de cette motion à la commission du logement.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1941 à la commission du logement est adopté par 68 oui contre 14 non et 6 abstentions.
Débat
M. Edouard Cuendet (L). Mesdames et Messieurs les députés, la résolution qui vous est soumise aujourd'hui pose une question toute simple: voulez-vous que la Suisse et, par ricochet, le canton de Genève conservent un système fiscal cohérent et respectueux de la sphère privée ou préférez-vous imposer un régime fiscal fondé sur la toute-puissance du fisc et de l'Etat ? C'est, au fond, de cela qu'il s'agit. Le système fiscal suisse, je le rappelle, est fondé actuellement sur un subtil équilibre entre la protection de la sphère privée du contribuable et le nécessaire droit de l'Etat d'effectuer des contrôles. Cet équilibre a notamment pour conséquence la distinction opérée entre la simple soustraction d'impôts et la fraude fiscale. Cette dernière présuppose en général, en résumé, l'utilisation d'un faux dans les titres. En revanche, omettre de déclarer un élément de fortune ou de revenu ne constitue qu'une soustraction fiscale qui n'est pas considérée comme un délit selon le droit suisse. En Suisse, seule la fraude fiscale peut donner lieu à une levée du secret bancaire. Cela ne veut pas pour autant dire que l'évasion ou la soustraction fiscales y soient tolérées, bien au contraire !
Et c'est là que je me permets d'insister: le fisc, fédéral et cantonal, n'est absolument pas démuni pour poursuivre ces éventuels contribuables récalcitrants. En effet, il dispose tout d'abord d'un impôt de garantie, c'est l'impôt anticipé de 35%, qui a à peu près le taux le plus élevé au monde. En plus, le fisc peut infliger des amendes extrêmement lourdes, puisqu'elles peuvent ascender à plus de trois fois le montant soustrait. Et, enfin, les délais de prescription sont particulièrement longs en Suisse, en général dix ans, ce qui permet au fisc de poursuivre les contrevenants.
Mais - comme vous le savez sans doute, puisque vous lisez certainement les journaux - suite aux pressions massives exercées par des Etats étrangers et par des organisations comme le G20, la Suisse a cédé le 13 mars 2009 et a accepté de supprimer, au niveau international, la distinction entre la fraude et la soustraction fiscales, notamment dans le cadre des conventions de double imposition. Et c'est là où intervient la résolution: est-ce que cette forme de capitulation au niveau international constitue une raison suffisante pour supprimer en Suisse, pour les contribuables suisses, cette distinction en droit interne et, de la sorte, mettre à mal tout le système fiscal dont la Suisse s'est dotée de manière démocratique, en faisant cette espèce de chamboulement complet sur la base de pressions extérieures ? Le groupe libéral et les autres signataires de la résolution en question pensent qu'il ne faut pas, précisément, céder à cette capitulation, mais donner un signe politique fort. En effet, les cantons sont concernés, et il n'est pas normal que les autorités cantonales crient urbi et orbi qu'elles sont pour cette suppression. Je rappellerai d'ailleurs ici que, le 13 mars 2009, le Conseil fédéral a clairement indiqué que la suppression de cette distinction au niveau international ne devait rien changer pour les contribuables suisses.
Bien entendu, dans les rangs d'en face, beaucoup de personnes plaident pour l'abolition du système actuellement en vigueur. Ce sont ceux-là qui rêvent d'un Etat fort, extrêmement fort, qui domine le citoyen pour qu'il puisse être contrôlé et devienne totalement transparent. Et nous sommes justement opposés à cette transparence absolue: nous sommes pour que l'Etat soit au service du citoyen, et non pas l'inverse ! Ces mêmes personnes, certaines d'entre elles en tout cas, rêvent d'imposer en Suisse des systèmes à la française ou à l'allemande, qui sont extrêmement intrusifs et où le fisc intervient avec des méthodes policières auprès des contribuables. On a vu l'échec de ces systèmes puisque, dans des Etats comme la France et l'Allemagne, ils n'ont eu qu'un effet, c'est de chasser leurs contribuables...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député ! (Commentaire.)
M. Edouard Cuendet. C'est pour cela que les signataires plaident pour que notre pays et notre canton conservent leur système fiscal et que le Conseil d'Etat s'oppose à la suppression de la distinction entre fraude et soustraction fiscales.
Une voix. Bravo Edouard ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Amaudruz... Euh, pardon: Madame ! Madame Amaudruz !
Mme Céline Amaudruz (UDC). Je ne suis pas encore un monsieur, mais je vous remercie, Monsieur le président ! Personne ne va être surpris si l'on vous dit que le groupe UDC soutient et signe cette résolution. Vous n'êtes pas sans savoir que le groupe UDC se bat depuis des années pour le maintien du secret bancaire. Je vous rappelle que, le 14 novembre 2002, une résolution UDC a été adoptée, elle s'intitulait: «Inscrire le secret bancaire dans la Constitution fédérale». Elle n'a malheureusement pas fait grand effet. Dès lors, on a décidé, le groupe UDC, de lancer une initiative populaire pour inscrire le secret bancaire dans la Constitution suisse. Je ne peux que vous inciter à la signer ! (Commentaires.) Il y a deux semaines, M. Nidegger a déposé une initiative parlementaire visant à inscrire le secret, enfin, la défense de la sphère privée bancaire... (Brouhaha.) Il est évident que l'UDC va se battre pour le secret bancaire, pour la défense de la sphère privée.
Aujourd'hui, l'enjeu n'est pas de savoir si c'est les libéraux ou les UDC qui ont commencé à se battre pour ça ! Parce qu'on est face à une situation grave, Mesdames et Messieurs les députés: on doit sauver notre place financière dont dépend une part essentielle des places de travail à Genève. Ce sont des ressources fiscales indispensables à la politique sociale, Mesdames et Messieurs les députés ! Il faut sauver l'économie de Genève et, particulièrement, éviter un effet de dominos. Enfin, il faut préserver la sphère privée, qui est au coeur de nos valeurs. Et elle nous touche tous, Mesdames et Messieurs les députés !
Comme vous le savez, le secret bancaire est entré dans le droit suisse en 1934; il y a une loi à ce propos. Depuis lors, la Suisse vit avec la tradition du secret bancaire. Le but de ce dernier est d'imposer, à un banquier ou à toute personne qui est soumise à cette loi, le respect de la sphère privée de chaque individu. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Aujourd'hui, il faut lancer un appel au Conseil fédéral, qui a l'air de lâcher du lest: oui, ils subissent beaucoup de pressions à l'extérieur, mais il faut se battre ! Il faut que les cantons se battent, il faut que Genève se batte. Et il faut montrer au Conseil fédéral qu'on n'est pas d'accord d'accepter sa mollesse et, aussi, son esprit de contradiction ! Réagissons ! Défendons nos valeurs ! J'aimerais qu'on m'explique comment, depuis des années, toutes ces personnes qui ont des comptes en Suisse, qu'elles soient suisses ou étrangères... (Exclamations. Commentaires. Rires.)
Une voix. Merci l'UDC !
Mme Céline Amaudruz. Merci de votre intervention !
M. Antoine Bertschy. C'est ce qui fait notre fortune !
Mme Céline Amaudruz. Bon... Je peux continuer ?! Je vous remercie !
Le président. Je vous en prie, Madame !
Mme Céline Amaudruz. Merci ! Tous...
Le président. Mais vous avez atteint les trois minutes, il vous faut conclure !
Mme Céline Amaudruz. Je vais conclure. Tous ces gens étaient en situation légale. Et, du jour au lendemain, on leur dit: «Mesdames et Messieurs, vous êtes en situation illégale» ?! Mais c'est juste n'importe quoi ! Alors, je vous en conjure...
Le président. Très bien...
Mme Céline Amaudruz. Je conclurai en disant: «Vive le secret bancaire, vive la sphère privée, et vive la Suisse !» (Commentaires. Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Les invites de la présente résolution disent, car la Suisse a dû accepter, sous la menace de plusieurs pays de l'OCDE, de revoir la notion de secret bancaire et, donc, de transmettre des informations aux pays signataires de conventions de double imposition - parce que la Confédération mais également l'Association des banquiers privés suisses ont accepté de considérer qu'il ne pouvait plus y avoir de distinction entre fraude fiscale et évasion fiscale et que nous allons petit à petit accepter une entraide administrative plus importante dans un certain nombre de cas de CDI, car, bien sûr, ces décisions auront influencé le système bancaire suisse... Alors vous voulez sauver, à l'interne de notre pays, des bastions instaurés sur des sables mouvants. Et ce que vous proposez dans vos invites, c'est un appel à couvrir des fraudes et des détournements de la loi fiscale suisse sous couvert de la protection de la sphère privée.
Dans l'exposé des motifs, vous expliquez qu'en Suisse l'Etat est chanceux, car il peut compter sur un impôt anticipé de 35%. Vous oubliez juste d'indiquer que ces 35% portent sur les bénéfices d'une somme versée sur un compte en banque. Cela ne garantit pas que la somme sur le compte en banque soit déclarée aux impôts... Oui, il y a des amendes fortes lorsque le fisc découvre qu'un contribuable n'a pas déclaré cette somme. Mais quand on joue au poker, on en accepte certaines règles ! Et si l'on triche et que l'on se fait découvrir, eh bien, on en accepte les conséquences. Il semble que, dans certaines histoires, on utilisait des tonneaux de goudron et des plumes dans ces cas-là...
Mesdames et Messieurs les députés, la plupart des contribuables suisses, comme dans n'importe quel pays du monde, sont attachés à leur lieu de vie, à leurs emplois. Si l'Etat manque de ressources, ce sont les contribuables moyens qui vont payer plus cher, alors que ceux qui ont le pouvoir financier pour soustraire leur contribution au bien public peuvent s'en tirer à meilleur compte... Plus nous acceptons que le système financier et bancaire reste opaque, plus nous enrichissons les personnes déjà riches et appauvrissons le citoyen contribuable moyen. Pour ces raisons, nous refuserons cette motion.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Les Verts sont également attachés à la protection de la sphère privée du contribuable. Cependant, il est très clair pour les Verts que le secret bancaire ne doit pas servir à protéger les délits fiscaux.
Afin de garantir la justice fiscale, nous sommes d'avis que la distinction entre la fraude et la soustraction fiscales doit disparaître, tant sur le plan national qu'au niveau international. Nous considérons en effet cette distinction comme étant artificielle. La personne qui omet de déclarer sa fortune ou une partie de celle-ci et celle qui tente de se soustraire à limpôt de manière fallacieuse visent en fait le même objectif: payer moins d'impôts que ce qu'elles devraient.
Enfin, cette distinction entre fraude et soustraction fiscales est une particularité du droit suisse qui est appelée à disparaître, et nous sommes d'avis que les gesticulations de parlementaires cantonaux ne changeront pas grand-chose à cet état de fait. Nous ne voterons donc pas cette proposition de résolution.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Dandrès, à qui il reste vingt secondes.
M. Christian Dandrès (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais revenir en deux mots sur la distinction entre fraude fiscale et soustraction fiscale et rappeler simplement que, contrairement à ce qu'a indiqué mon collègue Cuendet, la principale justification de cette distinction, c'est la guerre fiscale que la Suisse mène contre la communauté internationale depuis de nombreuses décennies. (Commentaires.) La réalité est donc beaucoup plus prosaïque que la noble défense de la sphère privée... (Commentaires.) ...à laquelle je suis particulièrement attaché. (Commentaires.) A partir du moment où la Suisse a décidé de collaborer avec les pays tiers, cette distinction n'a plus lieu d'être en droit interne également. Mais j'aimerais quand même rassurer les auteurs de la résolution en rappelant simplement que le secret fiscal existe à Genève et que ce n'est pas demain que les informations transmises au fisc seront étalées...
Le président. Très bien, monsieur le député...
M. Christian Dandrès. Je termine ! ...seront étalées dans la presse ! Je vous remercie.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, je suis consterné par les propos que j'entends dans la bouche des députés socialistes et Verts: des discours angéliques. Est-ce que l'on pense réellement que l'on va pouvoir, avec des caisses vides, mener une politique sociale efficace dans ce pays ? Est-ce qu'on pense réellement que les Suisses sont des êtres supérieurs, qui ont réussi à maintenir un pouvoir d'achat supérieur au reste de l'Europe depuis la dernière guerre parce qu'ils sont simplement meilleurs que les autres ? Ou pense-t-on réellement que nous avons su, grâce à notre système bancaire - avec les défauts qui ont été corrigés, qui étaient graves et qui méritaient d'être corrigés - eh bien, pense-t-on que nous avons su faire profiter aussi les entreprises d'un système bancaire fort ? Le MCG est pour ce système bancaire-là. Et que l'on cesse de nous dire que l'évasion et la fraude fiscales sont deux choses identiques !
Le petit entrepreneur français qui réussit à mettre de côté un peu d'argent après avoir payé ses impôts français - si on lui laisse quelque chose ! - et qui décide simplement de placer ses économies, honnêtement mises de côté, en Suisse plutôt que de les laisser en France... (Commentaires. Protestations.) ...ne serait-ce que pour des raisons successorales... (Brouhaha.) Est-ce que cet homme-là est un malhonnête ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Est-ce que cet homme-là est un malhonnête ?! Bien sûr que non ! (Commentaires.) Ça n'a rien à voir avec celui qui crée une société... (Commentaires.) Si les socialistes sont gênés par mon discours, parce qu'il touche la vérité... (Commentaires.) ...je suis désolé pour eux ! (Commentaires.) Vous faites un amalgame entre deux choses qui n'ont absolument rien à voir: le fraudeur est celui qui, par des moyens malhonnêtes, trompe le fisc; c'est celui qui crée une société en Suisse et qui, grâce à des fausses factures, fait sortir de l'argent depuis la France, depuis l'Allemagne. Celui-là ne mérite pas de protection ! (Commentaires.) Ce n'est plus que dans des mauvais romans que l'on voit des gens, des criminels, qui placent de l'argent sale en Suisse. Est-ce que vous avez essayé... Est-ce que vous avez essayé, ne serait-ce que de recevoir 25 000 francs sur votre compte bancaire ? Et que votre banquier vous téléphone pour vous demander ce que c'est et de produire toutes les pièces nécessaires ? La Suisse est certainement l'un des pays les plus stricts pour l'ouverture des comptes aujourd'hui et pour la surveillance de l'argent sale ! (Brouhaha.) Que l'on arrête de faire des amalgames ! Nous ne sommes pas des agents du fisc étranger, et il est scandaleux que des Etats étrangers puissent instiguer des personnes à violer nos lois dans un but fiscal ! Et il est scandaleux que des personnes, ici - qui sont censées défendre les travailleuses et travailleurs de ce pays - viennent démanteler la richesse de ce pays, richesse qui s'est forgée grâce à un secret bancaire devant être préservé dans le respect, évidemment, de l'honnêteté. (Brouhaha.)
Pour ces raisons, nous soutiendrons assurément cette résolution. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député, vous avez parlé pile trois minutes. Aussi, Monsieur Jeanneret, j'en suis désolé pour vous, le temps de parole est écoulé pour votre groupe, ce qui m'oblige à passer la parole à M. Barazzone.
M. Guillaume Barazzone (PDC). Merci, Monsieur le président. Acculée par un certains Etats étrangers ayant des intérêts convergents, la Suisse - et son Conseil fédéral sans stratégie - depuis quelques mois, a baissé ses culottes. Mais c'est de la géopolitique, c'est l'intérêt des Etats. La Suisse a décidé d'appliquer les standards de l'OCDE pour faire plaisir à plusieurs Etats étrangers. On essaie de nous faire croire, depuis un certain temps, que tous ces événements, cette chaîne d'événements, ne sont qu'une fatalité - les derniers en date étant les déclarations de Mme Widmer Schlumpf; je ne sais si elle déclarait cela au nom du Conseil fédéral ou pour son compte propre. On essaie de nous faire croire que la dernière étape - soit la suppression de la distinction entre soustraction et évasion fiscales en droit interne, c'est-à-dire la manière dont la loi suisse règle les relations entre le citoyen suisse et les administrations fiscales - est une fatalité.
Nous voulons que le canton de Genève, qui accueille plusieurs établissements financiers, fasse savoir par le biais de son gouvernement qu'il s'agissait d'une dernière étape. Nous disons: «Stop !» Et nous voulons que le Conseil d'Etat le dise clairement à l'Assemblée fédérale et au Conseil fédéral en le leur écrivant.
Je pense que si nous voulons mener ce débat sur un plan moral, nous le pouvons. Mais nous, nous disons clairement que nous ne souhaitons pas d'un Etat qui considère que le citoyen, par définition, trompe le fisc et que cela doit être la présomption de base. Nous pensons que le système, qui a fait ses preuves jusqu'à présent en droit interne, doit être maintenu.
C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter cette résolution. Nous prions le Conseil d'Etat de faire un geste fort et des déclarations publiques à l'attention de l'Assemblée fédérale, pour que le canton de Genève - qui a un poids «indéterminant» dans ce dossier au niveau helvétique - puisse peser dans la balance et que le Conseil fédéral ainsi que l'Assemblée fédérale maintiennent le système actuel en droit interne s'agissant de la distinction entre l'évasion fiscale et la soustraction fiscale. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Jacques Jeannerat (R). Mesdames et Messieurs les députés, le secret bancaire vise à protéger la sphère privée, pas les activités... (Panne de micro durant quelques secondes.) Lorsqu'elle souscrit des engagements internationaux, la Suisse les respecte. Dans le cadre de ces derniers, la Suisse transmet des informations, y compris sur des questions fiscales, de manière transparente, constructive, via l'entraide administrative et judiciaire. La collaboration internationale peut être modifiée à condition de respecter les principes du droit international public. Les changements ne doivent pas résulter d'une politique de... (Panne de micro durant quelques secondes.) ...d'exiger cela, en particulier de la part d'Etats de droit amis. La fiscalité de l'épargne empêche efficacement l'évasion fiscale et constitue un instrument valable: elle est pratiquée avec succès au sein de l'Union européenne, en Suisse ainsi que dans nos relations bilatérales avec l'Union européenne. Un échange automatique d'informations ayant pour but de mettre à nu le citoyen n'est pas conciliable avec notre culture juridique, nos principes de démocratie directe et de fédéralisme. Les radicaux voteront cette résolution: pas d'abandon de la sphère privée !
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Weiss, à qui il reste deux minutes trente.
M. Pierre Weiss (L). Il en faudra bien moins, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a les aspects techniques de la résolution présentée devant vous ce soir - et que nous espérons voir adoptée, défendue ensuite par le Conseil d'Etat et prise en compte par les Chambres fédérales - et puis il y a évidemment le message politique. Il y a le message politique de ceux qui veulent non seulement défendre ce pays, mais aussi les intérêts de la population de ce pays, face à ceux qui ont déjà abandonné. Il y a des capitulards, il y a des gens qui croient qu'il faut se coucher face aux pressions venant de l'étranger, il y a des gens qui croient qu'il faut servilement copier des législations étrangères. Nous ne sommes pas de ceux-là, raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter cette résolution ! Je vous remercie.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, je dois confesser avoir été un peu gêné par le mélange entre deux objets résolument distincts. Et d'ailleurs, ceux qui se préparent à voter cette résolution disent des choses différentes, parce qu'au fond ils ne sont pas d'accord sur ces objets. Là, dans la résolution, l'objet est limité, il parle de ce que nous devons faire en ce qui nous concerne par rapport aux modifications qui ont eu lieu à l'extérieur. Un autre débat est celui qui a été soulevé au hasard de quelques phrases, par M. Poggia ou par l'UDC: la question de nos relations avec l'étranger.
La Suisse, ma foi - par son autorité, le Conseil fédéral - a accepté de se conformer aux standards de l'OCDE. Sauf si l'une ou l'autre des conventions de double imposition était attaquée en référendum - et je laisserai ceux qui le font porter les conséquences catastrophiques d'un tel acte quant aux mesures de rétorsions que ne manqueraient pas, en particulier, de prendre les Etats-Unis... Eh bien, sauf à croire que les CDI ne soient pas ratifiées et n'entrent pas en force, nous sommes dans les standards de l'OCDE. Cette question, à ce stade, est close, sauf si elle posée à nouveau par l'un ou l'autre groupe.
Là, vous avez souhaité vous exprimer sur un sujet - qui n'a d'ailleurs, en réalité, pas du tout la même importance - celui de savoir si, dans la situation nouvelle créée par ces conventions - par le fait que nous ayons accepté les standards de l'OCDE - le droit de poser un certain nombre de questions lorsqu'on a des informations à disposition est réservé à des Etats étrangers ou si les administrations fiscales de ce pays peuvent en bénéficier également. Ce débat a été lancé il y a plusieurs mois déjà par, en son nom propre, le radical, M. Wanner, président de la Conférence des directeurs cantonaux des finances - soit les conseillers d'Etat chargés des finances. La CDF n'a jamais pris position. Ce débat a d'abord fait l'objet de diverses positions où il était assez frappant de voir... (Remarque.) Oui, c'est celui de Soleure. ...que les positions ne répondaient pas du tout à une géométrie politique telle que celle qu'on vient de vivre ici. Et évidemment, le débat a pris une autre ampleur lorsque, assez longuement - dans une colonne libre que vous avez certainement lue en sa version française dans «Le Temps» - la conseillère fédérale Widmer Schlumpf a indiqué qu'à partir du moment où plusieurs Etats étrangers - qui vont devenir très nombreux, ça ne s'arrêtera pas à quinze, et qui ne sont pas tous très proches - pouvaient interroger les banques par le biais de l'autorité fédérale sur des soupçons relatifs à une évasion fiscale - donc pas simplement un oubli: une omission, c'est-à-dire que quelqu'un ait consciemment voulu dissimuler des faits - eh bien, Mme Widmer Schlumpf disait qu'à partir du moment où ce droit est accordé à des Etats étrangers, il doit l'être aux autorités de notre pays.
Là-dessus, le débat s'est poursuivi, chacun a été happé par la presse, y compris votre serviteur qui a indiqué deux choses. La première, c'est qu'effectivement, vraisemblablement, il faudrait une symétrie, mais que, par conséquent, ça cesserait strictement là où les conventions s'arrêtaient: pas d'échange automatique d'informations. Il n'est pas question, ni de la part de M. Wanner, ni de la part de Mme Widmer Schlumpf, ni de la part des dix ou quinze politiciens - M. Hiltpold, M. Maudet - qui se sont prononcés en faveur de cette solution, d'arriver au système où les banques et l'employeur remplissent la déclaration fiscale - ce qui est le système français. Personne n'a dit cela ! Voici la question qui s'est posée: si un fisc cantonal, qui n'a que très peu de moyens pour combattre la fraude - il ne faut pas exagérer, l'IFD en a un peu plus, mais les cantons, très peu - donc, si un fisc cantonal a des soupçons fondés qu'il peut démontrer au même titre qu'un Etat étranger, est-il normal qu'il ne puisse pas interroger les banques de la même façon que des Etats étrangers ? C'est ça, la question. En fait, elle se limite à ça.
Tous les acteurs de ce débat - et je crois qu'il faut s'en tenir à cela - ont dit que de toute façon, dans la culture suisse, il y a, disons, une volonté de conserver la confidentialité. Ça veut dire que les banques, dans l'esprit de ceux qui ont posé ce débat au niveau fédéral, ne devraient répondre que lorsqu'il y a des soupçons fondés. C'est ça le débat, on peut avoir un avis ou l'autre.
Vous avez choisi la résolution. Par ce moyen, c'est le parlement qui exprime son opinion. Bien entendu, le Conseil d'Etat transmettra, comme il le fait de toute résolution, aux Chambres fédérales. Mais ça n'épuise pas absolument la question, parce qu'en réalité, très franchement, s'agissant de la confidentialité, personne, je crois - enfin, à ce stade - ne souhaite réellement que nous passions à un système d'échange automatique des informations, des banques suisses aux administrations fiscales. C'est totalement contraire à la culture du pays. En revanche, êtes-vous vraiment persuadés, lorsqu'il y aura septante, quatre-vingts, nonante CDI, que des pays ne brillant pas par leur démocratie auront, concernant leurs ressortissants, le droit, par le biais de cette CDI, d'interroger les banques et que nous n'aurons pas ces droits équivalents ? Pensez-vous vraiment que, durablement, nous n'amènerons pas un changement de système ?
Dans le cadre du débat au niveau du parti radical suisse, du PLR, la question de la notion de soustraction fiscale aggravée a été posée. S'en est ensuivi un grand débat, à peu près aussi houleux que le vôtre, et il va continuer parce que la question est posée.
Je vous dis donc que le Conseil d'Etat transmettra, bien entendu, cette résolution, mais que la question de savoir comment nous allons organiser la fiscalité suisse en fonction de ce qui s'est passé par rapport aux standards OCDE - c'est-à-dire, fondamentalement, les appliquons-nous aussi aux administrations fiscales suisses ? - est un débat beaucoup moins important et beaucoup moins délicat que celui de savoir si, en regard de ce qui a été accepté par la Suisse, on veut revenir en arrière. Dans le premier cas, je pense que c'est question d'opinion. Et en réalité, en ce qui me concerne en tout cas, je ne m'échaufferai pas sur ce dossier. En revanche, vis-à-vis de ceux qui voudraient profiter de ce débat pour alimenter la révolte, pour revenir en arrière sur l'acceptation de standards OCDE, alors là, je le dis, et vous le savez - Monsieur Cuendet, vous le savez en particulier, comme d'autres - le retour en arrière, actuellement, aurait des conséquences catastrophiques pour l'économie suisse, les places financières de Genève et de Zurich en particulier. Donc, d'accord sur le débat d'aujourd'hui - on voit bien que les gens se sont exprimés en dehors de clivages politiques sur le plan national - mais: non à l'utilisation de ce débat, pour remettre en cause des solutions trouvées péniblement dans un rapport de forces défavorable. Et tant que nous demeurerons d'accord, je dirai que le reste sera vraiment un débat à fleurets mouchetés, qui, réellement, n'a pas le côté dramatique qu'on a peut-être voulu lui donner maintenant, à la genevoise. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. M. Roger Deneys nous ayant saisis d'un amendement, je lui donne la parole - pour trois minutes au maximum.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que j'ai été particulièrement choqué d'entendre certains arguments, parce qu'il est très clair qu'aujourd'hui nous sommes toutes et tous attachés à la survie de l'économie bancaire à Genève et en Suisse. (Exclamations. Applaudissements. Commentaires.) Mais cette survie, Mesdames et Messieurs les députés, c'est comme - si l'on se souvient de Darwin - celle d'une espèce animale dans l'évolution. (Commentaires.) Si les banquiers suisses ne veulent pas finir comme des dinosaures, il serait grand temps qu'ils se rendent compte que le monde change, que la conjoncture change, et que nos vérités d'il y a cinquante ans ne sont pas celles d'aujourd'hui. (Brouhaha.) Pour ces simples raisons, Mesdames et Messieurs les députés, il serait bon que les milieux bancaires - et d'ailleurs, certains d'entre eux ont réalisé cette évolution - se rendent compte que l'avantage artificiel créé par cette distinction très hypocrite entre fraude fiscale et soustraction fiscale, qui ne serait pas de la fraude, n'est pas réaliste, n'a pas d'avenir et ne peut pas permettre au secteur bancaire de survire. Certains politiciens de droite en Suisse, Mesdames et Messieurs les députés, l'ont déjà bien compris et sont en faveur de la suppression de cette distinction.
Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il en va de l'avenir du secteur bancaire en Suisse - qui représente au demeurant 13% du PIB de la Suisse; il ne faut donc pas oublier qu'il y a quand même encore 87% qui sont dans l'industrie horlogère, chimique, etc. (Remarque.) Oui, «et dans le bâtiment», Monsieur Barrillier ! On ne saurait donc sacrifier le reste de l'économie suisse sur l'autel de quelques banquiers qui ont un avenir doré.
Pour cette simple raison, Mesdames et Messieurs les députés, je suis convaincu - nous, socialistes, le sommes - que l'avenir du secteur bancaire suisse passe par les compétences et les capacités des personnes y travaillant, et pas par des avantages historiques artificiels. Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous demandons de soutenir notre amendement qui vise à supprimer la distinction artificielle entre fraude et soustraction fiscales. Pour ces raisons, je vous demande de voter cet amendement, pour l'avenir du secteur bancaire suisse et genevois !
Des Voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Antoine Bertschy (UDC). Je vois que le parti socialiste parle de Darwin quand ça l'arrange, hein ? Effectivement, on parle souvent de darwinisme social - là, ça vous dérange ! - et puis, tout d'un coup, de «Darwin, l'évolution du secret bancaire»... On fait référence à Darwin. Mais quand il s'agit de problèmes sociaux, Darwin est le pire des hommes qu'il y ait jamais eu sur cette terre ! Je remarque aussi qu'il y a deux catégories de population qui décrient Darwin à certains moments: les intégristes religieux et les socialistes. (Brouhaha.) C'est quand même assez terrible, hein ? Comme quoi, parfois les extrêmes se rejoignent. (Commentaires.)
On va parler de cet amendement. Monsieur Deneys, cet amendement va exactement dans le sens contraire de ce qui est déposé... C'est n'importe quoi ! On ne peut pas soutenir ceci ! Vous voulez la fin du secret bancaire... (Brouhaha.) Le secret bancaire... Vous devez cette place, que vous tenez ici à l'heure actuelle, au secret bancaire ! On n'aurait peut-être pas de démocratie, s'il n'y avait pas le secret bancaire ! (Commentaires.) Nous avons une démocratie parce que nous sommes un pays riche ! (Rires. Brouhaha.) Regardez un peu la carte du monde ! Regardez-là et réfléchissez quant au temps: il y a longtemps que les pays riches ont vu la démocratie. Et les pays qui étaient pauvres avant et qui deviennent riches commencent à la voir. C'est la richesse qui fait la démocratie ! C'est quand les citoyens sont heureux, donc quand il y a de la richesse, qu'ils deviennent démocrates ! (Brouhaha.) Avant, vous aviez des dictatures ! (Brouhaha.) Nous ne pouvons pas entrer... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...dans ce genre de raisonnements, Monsieur Deneys, cet amendement est simplement inacceptable ! Nous le refuserons, parce qu'il va au contraire de la résolution que nous avons signée !
M. Ivan Slatkine (L). Mesdames et Messieurs les députés, je vais être extrêmement bref pour relever qu'on a l'habitude des amendements un peu provocants de M. Deneys - c'est assez drôle, vous gagnez un peu de temps. Mais j'aimerais juste rappeler ici une chose: cette résolution, Mesdames et Messieurs les députés, n'est pas destinée à défendre le système bancaire suisse ! (Brouhaha.) C'est une résolution pour défendre les citoyens suisses, citoyens de gauche, citoyens de droite, citoyens du centre ! Il s'agit uniquement de défendre les personnes. (Commentaires.) Il ne s'agit absolument pas de vouloir défendre une banque ou une autre ! Non, Mesdames et Messieurs, ce sont des valeurs que nous défendons ! C'est une relation entre le citoyen et l'Etat que nous défendons ! (Commentaires. Brouhaha.) C'est une notion de la liberté que nous défendons ! (Commentaires.) C'est une notion de la confiance qu'il existe entre l'Etat et les citoyens que nous défendons ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est tout ! Nous ne défendons aucun lobby, et je voulais le dire ce soir ! Je vous remercie. (Exclamations.)
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Pascal Pétroz (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, beaucoup de choses ont pu être dites dans ce débat, elles étaient parfois extrêmement intéressantes, parfois un peu lassantes. Deux observations à ce stade du débat: premièrement, la sphère privée est une notion indispensable dans notre ordre juridique, qu'il s'agisse du secret bancaire, du secret professionnel du médecin, de l'avocat, et nous ne devrons jamais transiger sur ce point.
Maintenant... (Brouhaha.) ...à propos de l'intervention de M. Deneys. Je crois qu'il faut bien se rendre compte du débat: nous sommes en présence d'une guerre qui a été diligentée par un certain nombre de pays - par exemple, les Etats-Unis, qui ont un paradis fiscal, le Delaware; de même que le Royaume-Uni, qui a Guernesey et Jersey. Donc, il s'agit de pays qui ont des paradis fiscaux et qui viennent aujourd'hui nous dire comment il faudrait faire ! Je suis frappé de voir que, finalement, le débat de ce soir, nous ne l'avons pas eu auparavant, alors que nous aurions pu l'avoir tout seuls. Nous l'avons sous la pression d'Etats étrangers qui viennent nous dicter aujourd'hui notre politique ! Cela n'est pas acceptable, Mesdames et Messieurs les députés ! Nous avons le droit de décider de notre destin, nous avons le droit de décider de ce qui nous paraît être juste, nous avons le droit d'avoir cette distinction entre évasion et soustraction fiscales, et ce n'est pas à des Etats étrangers, qui eux-mêmes ont des paradis fiscaux, de nous expliquer ce qui doit être fait dans notre pays ! Je vous remercie.
M. Claude Jeanneret (MCG). Je vais rappeler que le MCG est cosignataire de cette résolution, et avec fierté, parce qu'il s'agit là non pas de parler seulement de fiscalité, mais d'honneur et de courage. La Suisse est un peuple courageux, c'est un peuple d'honneur. Et je dois dire une chose, c'est que ce débat est assez dénigrant vis-à-vis de la liberté. En effet, nous sommes un pays de liberté, nous sommes la plus vieille démocratie d'Europe occidentale, et je crois que certains l'oublient. Je sais que pour les socialistes, la liberté, c'est uniquement l'asservissement à leur dictature. On peut voir, au niveau des pays du Nord... Si Staline pouvait revenir dans certains pays du Nord, il constaterait aujourd'hui que, même dans ses plus grands délires, il n'aurait jamais pensé qu'on pourrait asservir les gens à ce point ! Et j'espère bien qu'on n'en arrivera pas là un jour !
J'aimerais relever autre chose. Il ne faut pas ouvrir un débat sur la fraude et l'évasion. La fraude, il faut la sanctionner. L'évasion, c'est autre chose. L'évasion...
Des voix. Ah !
M. Claude Jeanneret. Je crois que la Suisse a pris de bonnes dispositions. Parce qu'en taxant 35% du revenu d'une fortune, il est clair que l'évasion n'est pas uniquement une question fiscale. C'est peut-être une question personnelle... (Rires.) ... et je préfère quand même... (Brouhaha.) Vous rigolez, Messieurs-dames... (Brouhaha.) Attendez ! Ceux qui nous condamnent, les Etats-Unis et les autres, ils ont des trustees bien pires qu'un secret bancaire... (Brouhaha. Commentaires.) C'est quelque chose de totalement immoral ! En ce qui nous concerne, c'est une question d'honneur personnel. Et c'est une question de liberté personnelle ! Ah ouais, évidemment que tous ces partis qui n'ont que des doctrines ne débouchant que sur des taxes et sur la suppression de la liberté ne peuvent pas comprendre cela ! Le rire d'en face, je le comprends dans cette conception ! Mais nous, nous ne pouvons pas l'accepter ! Nous défendons l'idée du citoyen, l'idée d'un citoyen honnête. Parce que les citoyens sont honnêtes ! Il faut arrêter de dire qu'en Suisse on n'est pas honnête: nous sommes le pays qui paie le plus d'impôts par tête de citoyen ! Nous sommes le pays qui a le moins de chômage ! Nous sommes le pays qui a le plus d'activités ! Et là, on veut remettre en question tout ce qui a permis cet équilibre du pays ?! Il faut arrêter de rentrer dans des... Il faut arrêter de s'asservir et de se mettre à plat ventre devant des gens qui veulent uniquement prendre notre activité bancaire ! Car l'activité bancaire, Monsieur Deneys, ce n'est pas uniquement 13% du PIB: c'est toute la possibilité de financer notre économie ! Et cela, on l'oublie. Si la Suisse bénéficie de cela, si les salaires sont élevés, c'est parce que l'argent est bon marché - il faut voir cela comme c'est ! Et il faut arrêter de critiquer un système... Il n'est pas parfait, loin de là, et on n'a pas dit qu'il ne fallait pas l'améliorer, mais arrêtons de couper la branche sur laquelle on est assis !
Alors il faut, une fois pour toutes, soutenir cette résolution ! Il faut surtout que l'on ne lâche pas, il faut que le peuple suisse se montre aussi courageux qu'il l'a toujours été et qu'il ne cède pas sous les pressions étrangères ! Merci, Monsieur le président.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Deneys, à qui il reste trente secondes. (Commentaires.)
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha.) Monsieur Bertschy, j'ai bien entendu: vous êtes déçu que les dictatures ne soient plus là pour nourrir les banquiers suisses... (Exclamations.) Monsieur Bertschy, j'aimerais vous rappeler que vous vous plaignez régulièrement, dans votre parti, que les réfugiés envahissent la Suisse et coûtent très cher à son économie. Eh bien, la misère du monde, elle est financée par des gens qui font de la fraude ou de l'évasion fiscales ! Parce qu'ils oublient de déclarer combien ils ont caché en Suisse ! (Exclamations.)
Des voix. Bravo ! (Applaudissements. Exclamations.)
M. Roger Deneys. Et ça... (Applaudissements. Huées.) Eh oui ! (Le président agite la cloche.) Et les mesures de rétorsion internationales, qui vont ruiner le reste de l'économie suisse... (Commentaires.) Eh bien ça, c'est votre responsabilité ! (Commentaires.) Et les amendements Deneys, c'est M. Dick Marty... (Commentaires.)
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Roger Deneys. ...conseiller aux Etats et radical... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui les a défendus ! Alors moi...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Roger Deneys. ...je vous dis simplement ceci: oui à la liberté; mais non à la liberté de frauder !
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Amaudruz, à qui il reste une minute. (Exclamations. Commentaires.)
Mme Céline Amaudruz (UDC). Merci, Monsieur le président. J'ai juste une question: Monsieur Deneys, est-ce que vous vivez au pays des Bisounours ? (Rires.) Où tout est beau, où tout est mignon ? Mais ouvrez les yeux ! Pensez-vous sincèrement que le service, tradition de la Suisse, va suffire aujourd'hui ?! (Commentaires. Brouhaha.) L'Union européenne a ses paradis fiscaux ! L'Asie a ses paradis fiscaux ! Alors arrêtez, le service ne suffit plus, il faut défendre la sphère privée et le secret bancaire !
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole au dernier intervenant: M. Bavarel.
M. Christian Bavarel (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts accepteront l'amendement Deneys. Nous sommes très heureux de participer ce soir à ce débat national. Nous savons que nous, à gauche, avions un peu la spécialité de présenter des résolutions à Berne, sur des sujets ne nous concernant pas forcément; nous sommes contents de voir qu'aujourd'hui, à droite, vous avez la même pratique !
Je rappellerai gentiment à M. Bertschy que nous sommes un parlement représentant une population à peu près équivalente à celle de Saint-Etienne - Saint-Etienne est une ville dans laquelle on peut vivre, Aix-en-Provence aussi. Ce sont des gens qui vivent autrement que nous. Mais j'ai l'impression, ce soir, que nous avons bel et bien un débat digne du parlement du Conseil municipal de St-Etienne - j'en suis ravi - et c'est peut-être ça notre immense bonheur ! (Commentaires. Brouhaha.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Encore trente secondes à M. Bertschy, et le débat est clos - on passe au vote. (Brouhaha.)
M. Antoine Bertschy (UDC). Merci, Monsieur le président. Saint-Etienne, avant d'être une ville, est un saint - je le rappelle à M. Bavarel.
Quant à l'intervention de M. Deneys, je dirai que ce qui a ruiné certains pays, ce ne sont probablement pas le banques, mais plutôt certains systèmes politiques qui étaient souvent de gauche, socialistes ou communistes. (Exclamations. Brouhaha.)
Le président. Nous allons nous prononcer sur l'amendement de M. Deneys. (Remarque de M. Roger Deneys.) C'est terminé, Monsieur le député, vous n'avez plus droit à la parole... (Commentaires.) Ah, le vote nominal est demandé ! (Brouhaha.) Très bien, il est accepté ! Je vous rappelle la teneur de l'amendement. Il s'agit d'une nouvelle invite, laquelle remplace comme suit les deux qui figurent dans la résolution: «[...] à supprimer en droit suisse la distinction entre fraude et soustraction fiscales.»
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 66 non contre 31 oui. (Exclamations à l'annonce du résultat.)
Mise aux voix, la résolution 605 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 66 oui contre 30 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Nos travaux ne sont pas terminés ! Nous passons à la dernière urgence, point 138 de l'ordre du jour: résolution 604 de la commission des visiteurs.
Débat
Le président. Cette résolution peut être votée en dix minutes, elle a été approuvée à l'unanimité. Cependant, je passe la parole à la présidente de la commission des visiteurs, Mme Bolay, afin qu'elle nous présente brièvement cet objet.
Mme Loly Bolay (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette résolution exprime les inquiétudes de la commission des visiteurs face à ce que sera, à partir du 1er janvier 2011, précisément «Justice 2011». (Brouhaha.) Cette résolution manifeste sa préoccupation par rapport aux aménagements et déménagements... (Brouhaha. Le président agite la cloche) ...qui seront nécessaires pour installer les autorités de poursuite pénale. Il est prévu qu'elles devront être déménagées, à titre provisoire, dans le bâtiment dit «Saint-Georges», sur la route de Chancy. Une dépense de 10 millions sera effectuée pour adapter les locaux aux normes. (Brouhaha.) Les autorités de jugement resteront... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...en Vieille-Ville, mais, pour cela aussi, il y a d'énormes travaux à réaliser. En effet, sept bâtiments sont concernés par ces aménagements et déménagements.
Nous sommes inquiets parce que, lorsque la commission a auditionné le groupe de pilotage, il nous a été indiqué qu'en ce qui concerne les bâtiments à Saint-Georges, route de Chancy, les 10 millions nécessaires seront pris dans les crédits de programmes et que, en revanche, pour les travaux en Vieille-Ville, lesquels sont très conséquents, eh bien, il serait nécessaire de déposer un projet de loi.
Comme nous sommes déjà à fin mars et qu'en avril notre plénum ne siège pas, nous sommes très inquiets. C'est la raison pour laquelle cette résolution invite le Conseil d'Etat à prendre vraiment toutes les mesures pour que «Justice 2011» puisse être opérationnelle dès le 1er janvier. Car je vous rappelle que toute la procédure va changer au niveau administratif, pénal et civil. Je rappelle également que la commission ad hoc a été instaurée à cet effet et qu'elle a travaillé d'arrache-pied: ce plénum a déjà voté plusieurs projets de lois. Aussi la commission des visiteurs s'inquiète-telle, parce qu'il y a va falloir réaménager les cellules dans deux sites. De plus, il y a le transfert des détenus entre trois sites: Saint-Georges, Palais de justice et Champ-Dollon. Nous craignons donc, si les travaux ne sont pas terminés à temps, qu'il y ait des conséquences très dommageables pour la prison de Champ-Dollon ! Dont je vous rappelle, Monsieur le président, qu'elle est en surpopulation énorme et que c'est une véritable poudrière ! Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, la commission des visiteurs, unanime, vous demande d'adopter cette résolution.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole n'étant pas demandée, nous procédons au vote.
Mise aux voix, la résolution 604 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 82 oui contre 2 non et 5 abstentions.
Le président. Nous sommes arrivés au terme de nos urgences. Je vous souhaite une excellente nuit, Mesdames et Messieurs les députés, et vous retrouverai demain à 15h30 !
La séance est levée à 23h.