République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1914
Proposition de motion de Mmes et MM. Véronique Pürro, Virginie Keller, Anne Emery-Torracinta, Geneviève Guinand Maitre, Laurence Fehlmann Rielle, Alberto Velasco, Alain Charbonnier, Alain Etienne, Thierry Charollais, Loly Bolay, Lydia Schneider Hausser, Régis De Battista, Mariane Grobet-Wellner, Elisabeth Chatelain, Pablo Garcia Genève ne peut vivre sans ses voisins

Débat

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Je vais quand même rendre la maternité de cette motion à son auteur: c'était Mme Véronique Pürro. Cette dernière n'étant plus présente parmi nous, je la remplace ce soir. Mesdames et Messieurs les députés, c'est une banalité, une lapalissade, a priori, de dire que Genève ne peut pas vivre sans ses voisins. Vous savez qu'aujourd'hui il y a environ un demi-million de passages tous les jours à la frontière, que ce soit celle avec le canton de Vaud ou la frontière française. Nous avons donc une perméabilité du canton, qui fait qu'effectivement nous ne pouvons pas vivre sans nos voisins. Cela ne date d'ailleurs pas d'aujourd'hui puisqu'on peut remonter au Moyen-Age et aux franchises accordées par l'évêque Adhémar Fabri en 1387. En effet, parmi ces franchises, il y en avait une extrêmement intéressante qui parlait déjà d'accord de libre passage de personnes et de biens. C'est donc une longue tradition genevoise que de vivre avec ses voisins.

Alors - me direz-vous - à quoi sert cette motion ? Eh bien, elle s'inscrit quand même dans un cadre assez particulier, celui du fameux placard - émanant d'un parti de ce canton et paru dans la «Tribune de Genève» au moment de la votation sur le CEVA - qui avait parlé de la «racaille d'Annemasse». Alors, vous pourriez me dire, chers collègues: «Mais c'est dépassé, ça, c'était au mois d'octobre !» Eh bien, malheureusement, on a vu sur nos tables aujourd'hui encore, en lisant la longue liste des interpellations urgentes d'un député du MCG, qu'on continue de trouver dans le parlement de ce canton des gens qui osent traiter nos voisins de racaille. Je crois donc, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion a toute son actualité.

Que demande cette motion ? Tout d'abord, de la transparence. Puisqu'on vit avec nos voisins - on circule, le Salève est la montagne des Genevois, beaucoup d'entre nous ont des résidences en France et, indépendamment de cela, les Français viennent travailler chez nous - eh bien, ce qu'on souhaite, c'est d'abord de la transparence, qu'on sache exactement ce qui se passe. Et je crois que le meilleur moyen d'éviter le racisme et la xénophobie, c'est l'information.

Nous demandons donc au Conseil d'Etat d'informer régulièrement la population sur la situation exacte des frontalières et des frontaliers qui travaillent dans notre canton. Nous demandons également d'intensifier les contrôles, puisque qui dit libre circulation des personnes et échanges en termes de travail dit aussi qu'il faut respecter les lois en vigueur et qu'il est important d'éviter le dumping. Et puis surtout, Mesdames et Messieurs les députés, j'appelle tous les démocrates de ce parlement, tous ceux qui considèrent que le fascisme n'est pas mort et qu'il nous menace toujours, à dire oui à cette motion, parce qu'aujourd'hui on parle de racaille, dans les années 30, on parlait de parasites s'agissant des juifs, plus près de nous, au Rwanda, on traitait les Tutsis de cancrelats, et on a vu à quoi cela a mené: à des millions de morts. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Bertinat qui a une proposition d'amendement.

M. Eric Bertinat (UDC). Merci, Monsieur le président. Indépendamment de ce large débat sur la terminologie à utiliser vis-à-vis des voyous qui viennent sur Genève, il n'en demeure pas moins que la proposition que nous font les socialistes est bonne et que l'UDC ne voit aucun empêchement à accepter les différentes invites qui y sont formulées. L'UDC aimerait simplement préciser la première invite en ajoutant les termes «nombre de travailleurs licenciés». Il est bon de connaître exactement ces chiffres, tous les chiffres, pour qu'on puisse savoir ce qui se passe à Genève, non seulement en termes de sécurité mais aussi de travail, que ce soit dans le secteur privé ou public.

Dans le secteur public, par exemple, on a obtenu tous les chiffres, on sait ce qu'il en est du nombre de travailleurs frontaliers - qui n'inclut pas, je le précise, les Suisses habitant en France. Ces derniers n'ont pas besoin d'un permis spécial pour venir ici, or les travailleurs frontaliers, oui. Les chiffres dont on dispose portent donc réellement sur les travailleurs français ou européens venant travailler ici en Suisse. Ces chiffres sont très importants, ils ne sont pas à balayer, comme ça, d'un coup de main. Et la population doit être informée, ce qui pourra éviter aussi, sans doute, des querelles de clocher où l'on macère sur ce genre de problèmes.

Je rappellerai quand même qu'en 2005, selon l'indicateur paru au deuxième semestre 2009, l'effectif était de 45 081 personnes; au premier semestre 2009, il était de 65 566 et, au deuxième semestre 2009, de 66 195, hormis - je tiens à le préciser - les 10 ou 15 000 Helvètes habitant hors du canton. La demande que font les socialistes inclut évidemment aussi les travailleurs habitant dans le canton de Vaud, voire même un peu plus loin. Il serait bon d'avoir cette vision, cette vue précise et quasi photographique de tous ces chiffres, incluant également le nombre de travailleurs établis hors du canton de Genève, c'est-à-dire - encore une fois - non seulement ceux qui résident en France, mais aussi ceux qui habitent en Suisse.

Il serait bon d'avoir un cliché exact du problème de la perte d'emplois dont sont victimes ces travailleurs, pour qu'on puisse aussi saisir l'ampleur de ce problème pour Genève. Actuellement, lorsqu'on demande, par exemple à M. Longchamp, ce qu'il en est, pas seulement du chômage purement genevois, mais du chômage global qui inclut justement tous ces travailleurs, on est dans l'impossibilité de fournir la réponse. Or il serait quand même intéressant de voir quel est vraiment ce dynamisme que connaît le canton de Genève et comment se régule tout cela. Ce sont des chiffres intéressants, et c'est pour cela que nous vous proposons de compléter cette invite. Il s'agit simplement, si vous êtes d'accord d'accepter la proposition que nous font ce soir les socialistes, d'être sûr qu'on puisse trouver ces chiffres.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, nous tenons à remercier le groupe socialiste pour sa motion qui est bonne, et nous allons la soutenir. En effet, figurez-vous que si c'était le MCG qui avait déposé la même motion pour demander des chiffres sur les frontaliers, on nous aurait traités de xénophobes, de racistes, j'en passe et des meilleures. Donc bravo ! (Commentaires.) Enfin, vous avez pris conscience... (Commentaires.) ...du problème des frontaliers à Genève. (Applaudissements.) Et le MCG ne peut que vous remercier, Mesdames et Messieurs les socialistes: enfin, nous allons donner une information à la population genevoise et elle pourra juger sur pièces les dégâts qu'ont causés ces ouvertures trop rapides des frontières dans le cadre des accords bilatéraux I, II et III, parce que ça, c'est une réalité ! Et j'aimerais quand même vous rappeler, chers collègues socialistes, qu'une certaine Micheline Calmy-Rey - mais de quel parti est-elle ? Ah, mais elle est socialiste, et conseillère fédérale de surcroît ! - a pris la parole à la fin de l'année dernière pour dire qu'il y avait un problème avec la main-d'oeuvre frontalière et qu'il fallait voir pour réserver la priorité des emplois aux Suisses. Nous sommes donc vraiment doublement satisfaits, au MCG, d'accueillir cette motion qui va enfin éclairer les Genevois sur tous ces chiffres qui permettent de savoir exactement combien de frontaliers on a, surtout dans la fonction publique.

Et puis - puisque notre action a aussi quelque chose de bénéfique dans ce parlement - il y a quelques heures, le Conseil d'Etat, enfin, la conseillère d'Etat, qui est issue des rangs de gauche - vous l'avez entendue comme nous, chers collègues - s'est inquiétée de l'engagement de ces 23 frontaliers contractuels en lieu et place de chômeurs genevois. Nous sommes donc triplement satisfaits ce soir et, au nom du Mouvement Citoyens Genevois que j'ai l'honneur de présider, je vous dis: «Merci !» Enfin, nous soutenons sans condition le renvoi de cette motion - parce qu'il faudrait quand même l'étudier un peu - à la commission de l'économie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Comme vous le savez, on peut dire tout ce qu'on veut, mais tout est dans la forme et, effectivement, la forme est parfaite, merci. Je passe maintenant la parole à M. Weiss.

M. Pierre Weiss (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est pour des raisons pour le moins partiellement différentes que nous soutiendrons cette motion - partiellement différentes de ce qui vient d'être dit à l'instant. Nous la soutiendrons parce que le message réel de cette motion, c'est d'abord de dire: «Tous ensemble !» Et je crois que nous sommes tous ensemble dans le même bateau de l'agglomération, qui nous conduit à souffrir des mêmes maux et à bénéficier des mêmes biens - et les mêmes biens, c'est une prospérité en réalité partagée. Et à ceux qui ne la partagent pas, eh bien nous essayons tant bien que mal d'offrir notre appui et de faire preuve de solidarité. C'est donc «tous ensemble !», y compris à l'égard des chômeurs, tous ensemble lorsqu'il s'agit de création d'emplois.

Et il y a le deuxième message de cette motion: «Tous semblables et tous différents.» Nous sommes tous semblables, mais nous sommes également tous différents, et cette motion reconnaît la complémentarité qui doit exister entre les personnes habitant des deux côtés de la frontière - la frontière nationale, voire les frontières cantonales. Cela étant, cette motion enfonce, à certains égards, des vasistas ouverts, enfin... (Commentaires.) C'est plus petit que des portes... Ce sont de petites fenêtres, de petites lucarnes. C'est ainsi, par exemple, que le contrôle du respect des lois et des réglementations en vigueur se fait par le Conseil de surveillance du marché de l'emploi, par les partenaires sociaux ensemble, justement, même s'ils ont des vues différentes. Ils examinent ensemble ce qu'il en est de la mise en oeuvre des accords bilatéraux notamment. Et de ce point de vue là, on pourrait penser que la troisième invite - qui vise à intensifier les contrôles - est une invite de méfiance à l'égard des partenaires sociaux et, de la part du groupe socialiste, à l'égard des syndicats. Mais je ne voudrais croire qu'il y ait cette méfiance à l'égard des syndicats.

En ce qui concerne la première invite, le vasistas est partiellement ouvert, parce que les chiffres existent. Il suffit de voir ce que, d'une part, produit l'office cantonal de la statistique et, d'autre part, les chiffres venant de la statistique française ou de la statistique vaudoise - des chiffres qui sont d'ailleurs à notre disposition. Pour cette raison, tout en soutenant cette motion et en nous réjouissant que, sur le plan du fond, elle donne ce message de solidarité, nous regrettons qu'elle n'ait pas, sur le plan formel, un contenu plus nourri.

Maintenant, s'agissant de la demande d'amendement déposée par M. Bertinat, je crois qu'on ne peut pas entrer en matière. On ne peut pas parler du nombre des travailleurs licenciés: il faudrait en réalité parler du nombre d'emplois créés, parce qu'il y a certes ceux qui sont licenciés, mais il y a aussi ceux qui sont engagés. Vous voyez donc que les choses sont un peu plus complexes, raison pour laquelle il convient que nous en restions au message simple - «tous ensemble !» - délivré par la motion socialiste. Et d'ailleurs, c'est «tous ensemble» que le groupe libéral aimerait exprimer sa solidarité avec Mme Pürro et sa sympathie envers elle, comme on l'a fait d'ailleurs hier soir à l'égard d'autres députés. Voilà comment je conclurai mon intervention.

M. Gabriel Barrillier (R). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'effectivement cette motion arrive à point nommé - nous aurons d'autres motions qui vont suivre et que nous allons examiner. En effet, notre population est quand même inquiète - on le sait - vis-à-vis de la crise économique. Il ne faut donc pas se voiler la face: il y a un déficit d'information, dont nous sommes tous un peu responsables, sur le fonctionnement de la région, sur le fonctionnement du marché de l'emploi dans la région. Et c'est notre devoir, ainsi que celui des autorités et des partenaires sociaux, de montrer à quel point ils sont actifs pour maîtriser ces phénomènes. Bien sûr, la région ne se construit pas sur fond d'angélisme, c'est un rapport de force, il s'agit d'emplois, mais nous avons la possibilité de véritablement informer la population. Il existe par exemple un observatoire du marché du travail, qui réunit l'office cantonal de la statistique, l'office vaudois de la statistique et l'Institut national de la statistique. Nous avons ici un problème de communication s'agissant de montrer comment se construit cette région. Et l'amendement de l'UDC n'est pas nécessaire dans la mesure où l'on connaît le taux de chômage dans chacun des territoires qui constituent notre région franco-valdo-genevoise. Dès lors, le parti radical peut accepter cette motion qui est positive, parce que nous avons les moyens de piloter cette région.

M. Miguel Limpo (Ve). Si nous partageons l'esprit général de la motion, nous sommes en revanche un peu sceptiques quant à son contenu. En effet, nous avons l'impression que cette motion a été faite - et sa date de dépôt le prouve - au moment des élections. Et c'est vrai qu'à ce moment-là les enjeux et les annonces qui paraissaient dans la presse ont sûrement poussé le groupe socialiste à déposer cette motion.

Deuxièmement, nous pensons aussi que l'opportunité de cette motion n'est pas forcément la meilleure. En effet, courir après les arguments d'un parti, qui est le troisième de notre canton et pour lequel près de 85% de la population n'a pas voté, nous semble quand même donner trop d'importance à des éléments souvent faux et basés sur des statistiques complètement erronées.

Néanmoins, il nous semble important, c'est vrai - comme l'a dit mon collègue Barrillier - de répondre à l'inquiétude de la population. En effet, on le voit de plus en plus, le vote en faveur du MCG répond peut-être à une partie des inquiétudes de la population - à 15% des inquiétudes de la population, peut-être davantage, mais ça reste malgré tout une minorité.

Donc, de ce côté-là, je pense qu'il serait important d'avoir plus d'informations. Mais, en même temps, il convient de rappeler que, pour nous les Verts, l'endroit où les arguments doivent être donnés, c'est aussi au sein des parlements et de la rue. Nous considérons en effet que le Conseil d'Etat, évidemment, doit jouer son rôle d'information, mais que c'est aussi à nous, partis, d'expliquer à quel point les chiffres qui sont donnés de manière répétée par le MCG s'avèrent - cela a été prouvé à de multiples reprises - complètement erronés selon l'avis de l'ensemble des gens; le MCG lui-même revient de temps en temps sur les chiffres qu'il donne.

J'ai l'impression que, vis-à-vis du MCG et de ses chiffres ressemblant davantage à des chimères qu'à des réalités, nous n'avons pas forcément besoin du Conseil d'Etat. Mais évidemment que cette aide-là - des chiffres basés sur des réalités - pourrait être utile. Nous voterons donc en faveur de cette motion, tout en étant sceptiques sur la dernière invite qui semble donner raison, tout d'un coup, au MCG, ce à quoi nous ne pouvons pas consentir.

Nous allons donc regarder cette motion avec bienveillance, mais nous sommes relativement sceptiques; nous la voterons surtout pour essayer d'informer la population au mieux.

M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que cette question des frontaliers, de la main-d'oeuvre qui vient du canton du Vaud ou de France voisine, anime le débat politique depuis des mois voire des années. Tout a été dit et tout a été souvent déformé, exagéré, sur cette question. Il est effectivement urgent que nous ayons des informations plus complètes, plus crédibles, de façon que certains groupes arrêtent de faire leur fonds de commerce de cette problématique réelle mais souvent exagérée et déformée. Il est peut-être bon de rappeler également que le chômage touche aussi beaucoup la main-d'oeuvre frontalière ces derniers mois et pas seulement les Genevois - il serait peut-être bon, en effet, de le rappeler au travers d'informations qui pourraient nous être données. Le texte de cette motion pourrait effectivement être rediscuté en commission et amendé, mais je crois que le message est clair. Et aujourd'hui, le groupe démocrate-chrétien considère qu'il est urgent d'avoir un certain nombre de clarifications d'informations, raison pour laquelle nous sommes d'avis que cette motion doit être renvoyée au Conseil d'Etat sans amendement.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Stauffer, à qui il reste cinquante secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. (Commentaires.) Non mais je vais faire vite ! Mesdames et Messieurs les députés, l'UDC, les libéraux, les radicaux, le PDC et les socialistes: le MCG vous remercie ! Très sérieusement: vous avez pris conscience de ce problème, ce qui veut dire qu'aujourd'hui nous allons pouvoir disposer de chiffres exacts. En effet, j'aimerais vous rappeler, chers collègues, que j'ai déposé des interpellations urgentes écrites au sujet des établissements publics autonomes, et la réponse du Conseil d'Etat sur le nombre de frontaliers a été la suivante: «Le chiffre n'est pas connu du gouvernement.» Ça, c'était la réponse officielle, elle figure au Mémorial du Grand Conseil. Alors on va finalement obtenir une vraie information, et je pense que c'est bien, parce que pour pouvoir prendre les bonnes décisions, il faut évidemment avoir les bonnes informations. Quant au groupe des Verts, je ne répondrai pas à vos basses...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !

M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président. Je ne répondrai pas à vos attaques, et si 85% des gens n'ont pas voté pour nous, je vous rappelle que vous aussi, à un demi-pourcent près, vous êtes dans la même situation. Et le jour où vous connaîtrez une aussi forte progression que le Mouvement Citoyens Genevois, eh bien nous applaudirons...

Le président. Merci, Monsieur le député...

M. Eric Stauffer. ...des deux mains ! (Applaudissements.)

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Ce sera dix secondes, Monsieur le président, pour une toute petite précision afin de vous dire que les socialistes n'attendent pas les élections pour se préoccuper de ce genre de questions. (Commentaires.) Nous avons en effet déposé, au début de l'année 2009 ou à la fin de l'année 2008, une motion liée aux votations fédérales du 8 février 2009 sur l'extension de la libre circulation des personnes à la Roumanie et à la Bulgarie. On y demandait quelque chose qui allait dans le sens de ce qui est proposé ici comme troisième invite, c'est-à-dire de faire toute la lumière et toute la transparence sur les différents échanges qu'il y a dans le canton. Cette motion, je crois, a été renvoyée - difficilement, mais elle a été renvoyée - à la commission de l'économie. Donc nous sommes conséquents, nous suivons une politique, et ce ne sont pas des périodes électorales - contrairement à ce que pensent nos collègues Verts - qui nous font déposer ce genre de textes.

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Barrillier, à qui il reste une minute et quinze secondes.

M. Gabriel Barrillier (R). Ouh là ! Monsieur le président, chers collègues, j'aimerais simplement souligner, à l'intention du MCG, qu'à la différence des demandes réitérées que ce parti a faites pour connaître les données, les chiffres, etc., sur l'économie de la région, cette motion-là, déposée par les socialistes, elle n'est pas soupçonneuse: elle est positive, elle est constructive, elle est confiante, elle est sereine. (Commentaires. Exclamations.) C'est ça, la différence ! Et c'est pour cela que nous soutenons cette motion. (Commentaires. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. M. Meylan a encore appuyé sur le bouton. Il lui reste... Non, vous avez trois minutes, c'est bon !

M. Alain Meylan (L). Ah, il me reste du temps ?! M. Weiss m'a laissé du temps, c'est magnifique !

M. Pierre Weiss. Je suis généreux !

M. Alain Meylan. Merci, Monsieur Weiss. J'interviens juste pour dire quand même...

Le président. Vous avez vingt secondes !

M. Alain Meylan. Vingt secondes... Ça suffira, vingt secondes. C'est vrai que les chiffres, Monsieur le président - vous transmettrez à M. Stauffer - sont connus. Il y a un conseil, une commission officielle à qui l'on donne tous les chiffres, donc ces chiffres, on les connaît. Personnellement, je suis membre de cette commission, mais je ne divulgue pas ces chiffres parce que je suis soumis au secret.

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, en réalité cette motion trouve déjà une partie des réponses dans la documentation existante, mais le Conseil d'Etat l'accepte volontiers pour consolider peut-être un certain nombre de chiffres, qui sont dans tel document, dans telle commission, dans tel service de l'Etat, afin d'avoir une vision plus large. Mais il y a des chiffres qu'on ne pourra pas vous donner, ceux sur le nombre de frontaliers ou de non-frontaliers par entreprise genevoise, parce que l'Etat n'est pas encore - et, j'espère, ne sera jamais - une espèce d'hydre à douze têtes qui rentrent dans chaque entreprise. Alors c'est vrai que pour une boulangerie que vous connaissez bien, on avait su, mais plutôt par une incidence... (Commentaires.) Etait-ce une trahison... Vous avez semblé dire tout à l'heure qu'il fallait tout savoir sur chaque nom. Ce sont des chiffres qu'on pourra vous donner, mais on ne pourra le faire comme pour les établissements publics, par exemple, s'agissant desquels on a pu vous transmettre des nombres exacts par établissement avec son nom; pour les entreprises, on ne pourra pas vous le dire. On pourra vous indiquer par exemple que, dans l'horlogerie, les ouvriers qualifiés... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...viennent en majorité de France voisine. Donc, ces choses-là, on pourra vous les dire. (Commentaires.) Non, mais vous demandiez ces précisions, je tenais d'ores et déjà à vous les apporter.

Pour le reste, je partage avec le député Barrillier l'idée que cette motion a un caractère curieux, dans le bon sens du terme. Elle est curieuse, non pas qu'elle soit singulière, mais parce qu'elle s'intéresse. Et ne pas s'intéresser à l'avenir de notre région, maintenant, ce serait réellement une calamité, dans la mesure où beaucoup de choses ont été faites en matière de schéma territorial de l'agglomération, avec des succès massifs. Et le dernier d'entre eux est le CEVA qui va enfin pouvoir démarrer, avec des adjudications dans lesquelles on voit que les entreprises trouvent une satisfaction raisonnable au partage des différents mandats qui ont pu être donnés aux uns et aux autres.

Et puis, une fois qu'on a créé cette partie du squelette - M. Barrillier parlait du CEVA comme de la colonne vertébrale - il y a également une autre partie, ce sont les trams, ce sont les liaisons, ce sera un jour la traversée du lac. Toutes ces choses doivent se recouvrir de chair parce qu'on ne peut pas vivre avec des squelettes toute sa vie, on doit précisément leur donner vie. Et leur donner vie, c'est amener dans la discussion l'une des choses que sous-tend cette motion: quelle est la politique des services ? Comment parlera-t-on du logement transfrontalier, comment parlera-t-on de la santé transfrontalière ? Comment parlera-t-on de toutes ces choses qui font l'éducation, qui font la culture et qui, finalement, soudent une agglomération au-delà de ses frontières nationales ?

Alors, si vous êtes d'accord, Mesdames et Messieurs les députés, nous profiterons en répondant le plus précisément possible aux questions qui sont posées. Nous répondrons également sur les grands axes de développement que nous entendons donner à la dynamique de l'agglomération transfrontalière à travers sa structure existante, qui est le Comité régional franco-genevois, et à travers sa structure à venir qui est le Groupement européen de coopération, dont on espère pouvoir porter la naissance sur les fonts baptismaux d'ici à quelques semaines, quelques mois au plus tard. Merci, en tout cas, de nous adresser cette motion, merci aussi d'une patience qui excédera modestement, peut-être, les six mois, pour aller jusqu'à neuf mois cet automne, cela pour une réponse parfaitement circonstanciée.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis d'abord d'une demande de renvoi en commission... (Remarque.) Vous la retirez. Dans ce cas, nous nous prononcerons sur le renvoi au Conseil d'Etat, mais je vais auparavant vous faire voter l'amendement proposé par M. Bertinat à la première invite. L'amendement est le suivant: «en collaboration avec les partenaires sociaux, à informer régulièrement la population genevoise sur la situation exacte des frontaliers-ères et des personnes qui résident sur le canton de Vaud, mais travaillent à Genève (nombre de personnes concernées, statut, nombre de travailleurs licenciés, secteurs économiques, services des administrations cantonale et municipales, apports économiques pour le canton, rentrées fiscales, etc.);»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 38 oui et 5 abstentions.

Mise aux voix, la motion 1914 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 87 oui et 2 abstentions.

Motion 1914