République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de Mme Loly Bolay, présidente.

Assistent à la séance: MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, François Longchamp, Robert Cramer et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Christophe Aumeunier, Caroline Bartl Winterhalter, Antoine Bertschy, Marcel Borloz, Mariane Grobet-Wellner, Michel Halpérin, Virginie Keller, Andreas Meister, Yves Nidegger, Ivan Slatkine et René Stalder, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

E 1582
Prestation de serment de la/du successeur remplaçant Mme FALQUET Gabrielle, députée démissionnaire

La présidente. M. Thierry Charollais est assermenté. (Applaudissements.)

PL 10216-A
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Jean-Marc Odier, Gabriel Barrillier, Michel Ducret, Michèle Ducret, Jacques Follonier, Frédéric Hohl, Jacques Jeannerat, Pierre Kunz, Patricia Läser, Patrick Saudan, Charles Selleger, Louis Serex modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 01) (Renvoi en commission et ajournement)

Suite du premier débat

La présidente. Nous sommes toujours au point 31 de notre ordre du jour. Le rapporteur est M. Jornot - il est là. Il y avait encore trois autres personnes qui souhaitaient s'exprimer, dont M. Eric Stauffer.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi - qui a pour rapporteur M. Jornot - ne me surprend pas. Je vais vous expliquer pourquoi. Depuis un certain temps, par tous les moyens à disposition du pouvoir législatif, que nous représentons, des limitations de la parole sont édictées au sein de ce parlement.

Une voix. A cause de qui ?!

M. Eric Stauffer. Oui, vous faites bien de le dire: «à cause de qui ?» Justement, Monsieur le président du PDC... (Exclamations.) Ce n'est pas vous ? C'est pas vous, excusez-moi ! Mais ça venait de chez vous ! Madame la présidente, il est à noter que certains renient leurs paroles ici. Et moins on en dit, mieux ils se portent ! Eh bien non, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas comme ça que fonctionne un parlement ! Un parlement est fait pour parlementer, et c'est donc au sein de cet hémicycle, sous l'oeil attentif de la population, que nous sommes appelés à délibérer sur les outils législatifs qui modifieront la vie quotidienne de nos concitoyens. Et c'est là où le bât blesse, parce que vous êtes parvenus, grâce à une courte majorité lors des débats sur la bonne gouvernance des établissements publics cités par mon collègue Roger Deneys. Je ne rappellerai pas ici - mon éducation me l'interdirait - que vous avez mis les pieds sur la table et bu du champagne en lisant le journal alors que l'on parlait de bonne gouvernance... Donc, je ne le rappellerai pas, justement pour éviter ce genre de - selon vous - dérapage.

Néanmoins, Mesdames et Messieurs les députés qui avez déposé ce projet de loi pour limiter le temps de parole, eh bien, grâce à vous, il y a eu un référendum, remporté par la population qui vous a désavoués ! Là, c'est vrai, vous avez pris une sacrée claque, et par deux fois ! Le soir de la discussion au parlement, nous avons dû, M. Deneys et moi, déposer une «myrielle» d'amendements... (Commentaires.) ... «myrielle» ou «kyrielle», comme vous voulez, ça n'a aucune espèce d'importance ! Avec arrogance, vous n'avez pas voulu nous écouter, et le peuple vous a rappelés à l'ordre. C'est lui qui a le dernier mot !

Raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous allons nous opposer à ce projet de loi élaboré par «Saint Jornot». Il est vrai que sa supériorité dans le langage est tout à son honneur, mais, dans bien des cas, cela fait que ce parlement est complètement annihilé par son «phrasage», puisqu'il ne peut plus s'exprimer.

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, je vous enjoins de refuser ce projet de loi et à laisser sa fonction première à ce parlement, c'est-à-dire parlementer !

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à «Saint» Jornot Olivier. (Rires.)

M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Je vais faire un peu de «phrasage», vous me le pardonnerez. (Rires.) Je souhaite en effet rappeler à ce Grand Conseil de quoi il s'agit, parce que cela fait un moment, déjà avant la pause, que nous parlons d'un tas de choses, que nous projetons tout un tas de peurs intérieures sur un débat qui ne mérite pas autant d'honneurs. Je rappellerai d'ailleurs qu'en commission, lorsqu'on estime qu'un projet de loi voté par la majorité représente une atteinte terrible à la démocratie, on dépose un rapport de minorité ! Je suis très surpris d'entendre aujourd'hui un certain nombre de partis pousser des cris d'orfraie alors même qu'ils n'ont pas jugé utile ni pris la peine de prendre leur plume pour rédiger un rapport de minorité ! Me retrouvant seul rapporteur, je pensais d'ailleurs que le débat serait tranquille et je suis très surpris de constater que tel n'est pas le cas.

Le deuxième point que je voudrais relever, c'est qu'on doit finalement discuter et décider d'une chose extrêmement simple ! Tout à l'heure, on l'a compliquée à l'envi. On doit simplement décider, dans le cadre du système actuel des demandes de renvoi en commission - question assez facile à trancher - s'il est nécessaire que chaque groupe parlementaire ait le temps de dire exactement la même chose que les groupes qui l'auront précédé, c'est-à-dire, selon les fois, quatre fois la même chose, trois fois dans l'autre sens, etc. Donc, s'il est nécessaire, pour le bien de la démocratie, d'entendre à plusieurs reprises exactement les mêmes arguments, probablement pas exprimés dans le même «phrasage», mais les mêmes arguments quand même ! C'est de ça qu'il s'agit dans ce projet de loi, et seulement de ça.

Tout à l'heure, on a évoqué la solution fédérale. La solution fédérale, c'est celle qui consiste en effet à exiger des groupes qu'ils déposent des demandes de renvoi avant le débat. Alors c'est formidable, parce que ça permet à chacun de s'exprimer, mais le résultat concret c'est qu'ensuite, dans le cours du débat, on ne peut plus former de demande de renvoi ! Or, il est arrivé dans ce parlement qu'après quelques heures de débat échauffé on ait pu trouver raisonnable de renvoyer un objet en commission, et je trouverai dommage que le parlement se prive de cette possibilité.

Il y a une autre solution dont nous n'avons pas parlé, qui est évoquée dans le rapport, c'est celle qu'on pratique en matière de motions, en matière de résolutions et en matière de rapports divers. Elle consiste à obliger - à obliger ! - que le premier tour de parole soit terminé avant de voter sur le renvoi en commission. Ça évite la solution du «débat dans le débat» qui, précisément, pourrit nos discussions en matière de projets de lois.

Toutefois, de nouveau, ce n'est pas de cela qu'il s'agit aujourd'hui ! Il s'agit aujourd'hui uniquement de savoir quels sont les interlocuteurs qui s'expriment lors du débat sur le renvoi en commission. Le groupe radical proposait qu'on applique la même solution que pour les points de l'ordre du jour définis comme urgents. En matière d'urgences, Mesdames et Messieurs, personne d'entre vous ne considère que la démocratie est bafouée parce que vous ne pouvez pas vous exprimer lors des demandes d'urgence ! Un député fait une demande d'urgence, on dit oui ou on dit non, et c'est réglé ! Parce qu'il est relativement facile de comprendre ce que signifie le choix ou le refus de l'urgence; de la même manière qu'il est relativement facile de comprendre les enjeux du choix ou du refus d'un renvoi en commission !

Pour les projets de lois, Mesdames et Messieurs, je vous rappellerai qu'en raison du système de renvoi automatique de ceux-ci en commission, la problématique ne se pose en réalité que quand les projets de lois reviennent de commission. Donc, elle ne se pose que pour les projets de lois pour lesquels il y a des rapports. Et s'il y a des rapports, il y a des rapporteurs, et c'est à ces rapporteurs que le projet de loi tel qu'il est sorti de commission se propose de donner la parole pour qu'ils s'expriment avec le Conseil d'Etat sur la question du renvoi. Cela signifie que quand un objet est controversé et que la minorité joue son rôle en faisant un rapport de minorité, eh bien, celle-ci a la possibilité de s'exprimer sur la question du renvoi en commission !

Je crois donc qu'il n'y a là aucune atteinte à la démocratie, il n'y a aucune volonté de brimer qui que ce soit et il n'y a aucune atteinte à la substance des débats ! Il y a simplement volonté de mieux régler une problématique purement technique qui, aujourd'hui, est mal organisée.

Nous avons reçu tout à l'heure un amendement. J'aimerais d'entrée de cause en dire deux mots pour relever que si effectivement la démocratie «totale et impartiale» consiste à donner trois minutes à chaque groupe pour qu'il s'exprime sur le fond et sur la proposition de renvoi, ça signifie en gros que, là où un groupe - comme le groupe socialiste, par exemple - peut aujourd'hui s'exprimer trois fois sept minutes, fois le nombre de ses députés, c'est-à-dire à peu près trois cent cinquante-sept minutes, soit six heures, il ne pourrait plus s'exprimer que trois minutes avec cet amendement !

Je crois qu'il y a vraiment de la marge entre la solution proposée par la loi actuelle, qui ne fonctionne pas, et des solutions qui, elles, conduiraient effectivement à empêcher un déroulement correct des débats. Donc, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi tel qu'il est, sans projeter dessus des peurs qui n'ont pas de raison d'être.

Une voix. Très bien !

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, dès lors qu'il s'agit des règles de fonctionnement de votre Grand Conseil, le Conseil d'Etat se montre très retenu. Néanmoins, quelques observations pourraient peut-être éclairer vos travaux.

Depuis un certain nombre d'années, vous vous êtes limités dans l'exercice de la parole. En premier lieu, en supprimant le débat de préconsultation. En deuxième lieu, en limitant la durée et le nombre des interventions. Maintenant vous vous attaquez au problème du renvoi en commission. Toutes choses qui sont de votre compétence. Ce que j'observe tout de même avec curiosité, c'est que plus vous ajoutez de règles limitant le temps de parole, plus vos débats durent. Et, surtout, l'ordre du jour n'est pas épuisé ! Au point que je viens à m'en demander si, en réalité, la complexité et la limitation que vous vous imposez n'a pas cet effet pervers que des députés créatifs trouvent un certain nombre de moyens pour s'exprimer encore plus qu'ils ne l'auraient fait s'ils n'avaient pas été limités ! Je pense que vous êtes un peu dans cette situation-là.

Si vous me permettez de le rappeler, quand j'étais député, à l'époque du gouvernement monocolore, il y avait encore le débat de préconsultation et aucune limitation du temps de parole. L'ordre du jour était toutefois épuisé le vendredi soir à 23h30 ! Il y avait pourtant de solides contradicteurs de part et d'autre, mais la culture politique voulait à ce moment-là que tout le monde ne s'exprime pas sur tous les sujets au maximum du temps admis. Dès lors que vous avez fixé un maximum dans la durée du temps de parole, vous vous retrouvez avec la situation dans laquelle personne n'entend parler moins que ce temps maximum, parce que les orateurs se sentiraient déconsidérés de parler moins que le temps total auquel ils ont droit. La norme maximum est donc devenue une norme minimum !

Le résultat des courses, c'est que vous aurez pour la session de septembre environ deux cent cinquante projets inscrits à votre ordre du jour.

S'agissant du projet qui vous occupe, le Conseil d'Etat renonce à vous faire part de sa position, mais il vous invite à réfléchir à la manière d'organiser le temps de parole pour ne pas, comme presque à chaque coup, vous tirer une balle dans le pied ! (Applaudissements.)

Mis aux voix, le projet de loi 10216 est adopté en premier débat par 41 oui contre 31 non et 2 abstentions.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

La présidente. A l'article 78A, alinéa 2, nous sommes saisis d'un amendement de Mme Sandra Borgeaud, à qui je donne la parole pour qu'elle le présente.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Cet amendement demande tout le contraire de ce que M. Jornot a tenté de vous faire croire. Il ne s'agit absolument pas de réduire le temps de parole de sept à trois minutes, mais de faire en sorte que les demandes de renvoi en commission surviennent une fois que les tours de paroles ont eu lieu et que tout le monde a pu s'exprimer en toute démocratie. Si une demande de renvoi en commission survient, il faut qu'elle soit faite tout à la fin. C'est pour cela que je demande que la démocratie soit impartiale et respectée... Il faut que la demande de renvoi intervienne tout à la fin, de façon que ça se passe démocratiquement ! De plus, il n'y a pas six groupes actuellement, comme il est indiqué dans le rapport. Je rappelle juste que nous sommes sept groupes !

J'approuve ce qu'a dit M. Moutinot, cela me paraît totalement juste: plus vous fixez des règles, moins on avance ! Ce n'est pas cohérent. Le fait que vous empêchiez les gens de s'exprimer librement sur le fond des choses aboutit à une prise d'otage. On s'en est rendu compte dernièrement: dès qu'un parti s'aperçoit que son projet de loi a peu de chances d'aboutir, il essaie de gagner du temps en demandant un renvoi en commission et en empêchant les autres - les adversaires - de s'exprimer sur le fond, pour être sûr de ne pas être laminé propre en ordre sur le siège ! Ça, ce n'est pas normal ! Je n'appelle pas cela de la démocratie, je n'appelle pas cela être dans un parlement pour discuter des choses. Et si vous n'êtes pas capables de faire le travail en commission et qu'il faut ensuite palabrer des heures encore, sur le siège, ce n'est pas de la responsabilité de tout le monde ! Il faudrait peut-être simplement demander à quelques personnes de se calmer un peu.

Cet amendement demande simplement que tous les groupes puissent s'exprimer clairement, de manière qu'ils aient aussi le droit de pouvoir dire les choses, en tout cas pour la minorité. Car, se baser sur un renvoi en commission décidé en trente secondes, c'est totalement inutile, personne ne comprend rien, et si le renvoi en commission est refusé, eh bien, ces groupes perdent automatiquement, puisque le projet de loi est ensuite accepté tel quel par la majorité ! De cette façon-là, ce n'est pas démocratique !

Je ne suis pas là pour faire la prof d'école ni vous rappeler ceci: vous oubliez que nous sommes des élus, que c'est un honneur, un privilège, et non pas un droit et un dû. Tout le monde se doit le respect, alors ne faites pas aux autres ce que vous ne voulez pas qu'on vous fasse !

Acceptez cet amendement et, à ce moment, on pourra rediscuter ! Sinon, je refuserai le projet de loi tel qu'il est. (Brouhaha.)

M. Eric Stauffer (MCG). Je tiens à relever l'excellente intervention de M. Moutinot, qui a parfaitement raison dans son argumentaire. J'en veux pour preuve que, pour la prochaine séance du Grand Conseil, je me suis vu contraint de prendre un rapport de minorité contre notre excellent collègue, M. Olivier Jornot, simplement parce que le temps de parole étant limité, si je voulais faire passer tout ce que le MCG veut dire, je ne pouvais le faire qu'avec le rapport de minorité ! (Rires.) Eh oui ! Vous pouvez rigoler, mais en attendant, Mesdames et Messieurs les députés, la réalité quotidienne dans les rues de Genève est très loin de votre arrogance dans ce parlement. Alors, ricanez, continuez, vous nous faites plaisir !

Enfin, tout ça pour dire encore une fois que nous allons nous opposer à ce projet de loi. Nous soutiendrons en revanche l'amendement de la députée Sandra Borgeaud, mais, à la fin, nous nous opposerons quand même à ce projet de loi.

M. Alberto Velasco (S). J'aimerais m'adresser au rapporteur de ce projet de loi qui dénonce là l'absence de rapporteur de minorité. C'est vrai, il y a parfois des personnes qui votent contre un projet mais n'estiment pas nécessaire de pondre un rapport de minorité, de s'asseoir à la table des rapporteurs, pour en débattre. Monsieur Jornot, si le système devait nous obliger, chaque fois, à faire ne serait-ce qu'un paragraphe de minorité, il y aurait un, deux ou trois rapports de minorité ! Cela obligerait Mme le sautier à prévoir un budget important pour les rapports et il y aurait une quantité de paperasse incroyable; cela ferait que chacun des trois rapporteurs s'exprimerait, parce qu'il en a le droit ! Conclusion: les débats dureraient encore plus longtemps, comme le disait M. Moutinot tout à l'heure. Non, ce n'est pas la solution ! Et je pense, chers collègues - je le répète - que, si le groupe radical est pertinent dans son constat, la solution qui nous est proposée aujourd'hui n'est pas satisfaisante. La pratique du parlement a changé, j'en conviens. Il y a moins d'accords entre les groupes, il y a beaucoup plus de confrontations, et parfois pour des projets qui n'en valent même pas la peine. Mais qui a introduit cette pratique ? On pourrait débattre là-dessus... Je suis à la commission des finances et j'ai pu voir comment les choses ont dérivé, dans ce parlement. Et, Monsieur Stauffer, vous y êtes pour quelque chose... (Commentaires.)

Donc, chers collègues, l'amendement qui nous est proposé est un pis-aller. Le groupe socialiste votera cet amendement au lieu d'accepter le projet de loi tel quel. Bien que certains - dont M. Gros, même - aient dénoncé les carences de ce projet de loi tel qu'il est rédigé, aucune proposition n'a été faite pour un renvoi en commission, pour amender le texte ou pour l'améliorer ! C'est dommage, parce qu'on aurait peut-être dû imaginer une meilleure solution. En l'occurrence, nous nous voyons obligés d'essayer de faire passer l'amendement proposé par la députée Borgeaud, qui ne nous satisfait pas complètement mais nous laissera au moins la possibilité de nous exprimer.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que vous acceptiez au moins cet amendement, qui donnera à chaque groupe la possibilité de s'exprimer. Je répète toutefois que les solutions proposées ne sont pas «la» solution et que cela nuit à la possibilité d'expression de chaque groupe.

M. Pascal Pétroz (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, nous assistons vraiment à un drôle de débat. C'est souvent le cas, d'ailleurs, lorsque nous évoquons le fonctionnement de notre Grand Conseil. Il est rare que ce type d'objet soit traité avec sérénité. Enfin, il est quand même piquant de constater un certain nombre de choses: sur un objet précédent, le parti socialiste - l'UDC de même, d'ailleurs - a fait le reproche au groupe démocrate-chrétien d'inonder ce parlement de motions diverses et variées; et, dans le cadre de ce débat, vous venez crier au loup en disant qu'il s'agit d'une atteinte à la démocratie, d'une atteinte à votre liberté d'expression. Alors, c'est quoi la liberté d'expression ? C'est que le PDC n'aurait pas le droit de s'exprimer et de déposer des motions et que le parti socialiste aurait le droit de parler autant qu'il veut ? Est-ce que la démocratie est à géométrie variable ?! Non, elle ne l'est pas ! Nous avons le même droit, vous et nous, de déposer toutes les motions qu'il nous semble opportun de présenter, ce d'autant plus que celles que nous déposons sont pertinentes, quoique certains puissent en douter ! Vous verrez mardi prochain, lors du dépôt, que nous avons encore une motion assez intéressante à vous soumettre. (Brouhaha.)

Une autre chose piquante dans ce débat est que M. le président du Conseil d'Etat commence son intervention en disant qu'il est d'usage que le Conseil d'Etat s'impose une certaine retenue en ce qui concerne le fonctionnement de notre Grand Conseil, et je suis parfaitement d'accord avec cette réflexion. Si votre intervention s'était arrêtée là, Monsieur le président du Conseil d'Etat, j'aurais été enchanté ! Le problème, c'est que si vous avez commencé en nous disant que le Conseil d'Etat devait s'imposer une retenue, vous nous avez dit ensuite le mal que vous pensiez de ce projet de loi ! (Commentaires.) Permettez-moi une certaine perplexité !

Mme Borgeaud s'est tout à l'heure plainte du fait que nous parlons trop, dans ce Grand Conseil, et je crois qu'en cela elle a parfaitement raison. Je relève quand même que c'est elle qui a déposé un amendement et que ce dernier est en train de nous faire discourir longuement !

Venons-en à cet amendement, précisément. Je crois que le principe, quand on vote un texte, c'est que, indépendamment de l'idée de base, il doit pouvoir être compréhensible. Dans la mesure où il va figurer dans la législation genevoises, il ne doit pas comporter de fautes d'orthographe et doit, si possible, être compréhensible et expurgé de toute considération extérieure au débat. Alors, on peut bien corriger et ôter les accents en trop, ce n'est pas grave. Toutefois, quand on dit que «chaque groupe a trois minutes pour s'exprimer sur le fond du PL», on devrait plutôt écrire «projet de loi» que «PL». En réalité, si l'on veut être logique, il faudrait juste écrire - toujours à propos de cet amendement - que «chaque groupe a trois minutes pour s'exprimer sur la proposition de renvoi».

Mais que dire par rapport à la phrase finale «pour que la démocratie totale et impartiale soit respectée» ? Je comprends votre point de vue, vous allez prendre la parole tout à l'heure, vous pourrez bien évidemment développer que la raison de votre amendement est précisément le respect d'une démocratie «totale et impartiale», mais il me semble que cela ne devrait pas, en tant que tel, figurer dans votre amendement ! Il s'agirait donc aussi d'enlever ce dernier bout de phrase. Voilà ce que je voulais me permettre de relever quant à la forme de cet amendement.

Dernière point: M. Stauffer a dit quelque chose de tout à fait juste, de tout à fait pertinent, parce que ça résume bien la problématique dans notre parlement: M. Stauffer a dit tout à l'heure que, pour pouvoir s'exprimer autant qu'il le souhaitait, il était obligé de faire des rapport de minorité.

La présidente. Monsieur le député !

M. Pascal Pétroz. Je conclus ! Je termine dans quelques instants. Le gros problème que nous avons, dans ce parlement, est que nous ne parvenons pas à nous autolimiter ! Voilà le problème ! C'est que les règles de courtoisie et la volonté de faire avancer les choses, qui relèvent du bien commun et du bon sens, nous n'arrivons plus à les appliquer à nous-mêmes ! C'est la raison pour laquelle nous légiférons et que la législation comporte des effets pervers. Ce projet de loi est une proposition, ce n'est peut-être pas la meilleure, mais d'autres, visant à limiter la durée de nos débats, seraient les bienvenues ! Je vous remercie.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je vais entrer d'emblée dans le sujet. Effectivement, j'ai mis un «à»... Puisqu'on veut parler du français, ce n'est pas une faute d'orthographe, Monsieur Pétroz, c'est une faute de conjugaison, comme cela peut arriver à tout le monde ! Ainsi, on va vraiment au fond des choses... Si le petit accent que j'ai mis n'avait pas lieu d'être, excusez-moi !

«PL» signifie «projet de loi», tout le monde l'aura compris. Je pense effectivement que, si le projet de loi devait être amendé, on écrirait «projet de loi», ce n'est qu'une question de sémantique. Cela peut vous déranger en tant qu'avocat, ce qui n'est pas mon cas !

D'autre part, si vous dites que ce n'est pas le lieu d'inscrire que la démocratie totale et impartiale doit être respectée, on peut effectivement discuter sur ce point-là. Si j'ai écrit cela, c'est parce que, depuis trois ans que je siège dans ce parlement, j'ai pu - moi qui reste sur le terrain et qui garde mon âme très entière, je l'admets - me rendre compte qu'il n'y a pas toujours la démocratie totale et impartiale dans ce parlement ! Sinon, je ne me serais jamais permis d'écrire cela.

Il y a encore une petite parenthèse que je pourrais faire, après ce que M. Jornot a dit. Concernant les urgences, j'aimerais juste vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, que la plupart d'entre elles - pour leur grande majorité - sont décidées au Bureau du Grand Conseil, avec les chefs de groupe, et non pas ici ! Donc, cela se décide d'entente, dans les caucus, et c'est déjà largement discuté avant d'arriver ici.

En ce qui concerne les renvois en commission, il n'y a que les initiatives qui partent en commission législative qui sont sans débat. Cela fait partie du règlement et c'est normal.

Une proposition aurait cependant pu être faite. En effet, je vois que tout le monde critique, or personne ne propose rien: c'est «faites comme je dis, mais ne dites pas comment je fais !» Et vous auriez très bien pu avoir l'idée d'établir le règlement de la même façon que pour les motions: à l'article sur les renvois en commission, il est prévu clairement que, lorsqu'il y a une motion, il y a automatiquement un premier tour de parole. Dans le cas qui nous occupe, vous auriez donc pu proposer un changement ! Mais je vois que personne n'a cru bon de le faire... Alors, avant de critiquer, proposez mieux ! Ensuite on pourra discuter ! Moi, j'essaie de proposer quelque chose. Je ne prétends pas être la meilleure, mais, au moins, j'ai le courage d'agir au lieu de discuter dans le vide.

La présidente. Voici l'amendement: «La proposition de renvoi se fait tout à la fin du débat. Chaque groupe a trois minutes pour s'exprimer sur le fond du projet de loi et la proposition de renvoi pour que la démocratie totale et impartiale soit respectée.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 28 oui.

Mis aux voix, l'article 78A, alinéa 2 (nouvelle teneur), est adopté.

Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).

Troisième débat

La loi 10216 est adoptée article par article en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 10216 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 43 oui contre 33 non.

Loi 10216

M 1105-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Fabienne Bugnon, Jean-François Courvoisier, Marie-Françoise de Tassigny, Luc Gilly, Philippe Schaller visant à supprimer l'utilisation des produits chimiques dans les canons à eau de la police genevoise

Débat

La présidente. Je rappelle que nous sommes dans un débat classé en catégorie II, qui prévoit trois minutes de temps de parole par groupe.

M. Pierre Losio (Ve). Ça sera suffisant, Madame la présidente ! Mesdames et Messieurs les députés, cette motion qui émanait de membres de différents partis d'une précédente législature exprimait une demande bien précise: l'interdiction de l'usage de produits chimiques ou de tout autre additif lors de l'emploi de lances à eau servant à la dispersion des manifestations.

Cette demande exprimée par ces députés n'était pas anodine, puisqu'il y a quelques années une manifestation paysanne qui s'était déroulée à Berne avait été dispersée à l'aide de canons à eau contenant du gaz. Les manifestants qui n'avaient bien évidemment pas pu se doucher immédiatement après les échauffourées en avaient récolté des brûlures graves ! Or Genève est un endroit où l'on vient manifester de loin et où l'on manifeste souvent. On pourrait évidemment installer des douches à la place des Nations ou sur la place Neuve, ou près de la gare de Cornavin, mais vous reconnaîtrez que ce serait quand même plus simple et beaucoup moins coûteux de ne pas utiliser du tout ces gaz et de ne pas utiliser ces additifs chimiques lorsque les lances à eau sont en action. La puissance de jet de ces lances est déjà largement suffisante pour disperser les manifestants.

La réponse à cette motion ne convient donc pas au groupe des Verts et nous vous demandons de bien vouloir renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je rappelle que ce rapport provient déjà du Conseil d'Etat, où vous demandez qu'on le renvoie, si j'ai bien compris. (Remarque.) C'est bien ça. Nous voterons tout à l'heure.

M. Alberto Velasco (S). Comme l'a dit M. Losio, cette motion faisait, à l'époque, suite à des événements survenus dans notre république. Certains manifestants avaient été affectés par l'intervention de la police, et de manière assez conséquente. Les députés de l'époque avaient donc estimé qu'on pouvait très bien employer les canons à eau, mais en évitant l'usage de produits chimiques.

Or le Conseil d'Etat nous donne aujourd'hui une réponse, disant brièvement qu'il comprend bien ce que l'on veut dire, mais que, ma foi, on continuera toujours à utiliser les produits chimiques, il est vrai avec proportionnalité, en fonction de l'engagement. Mais la question ne se pose pas au niveau de la proportionnalité ! Je le répète, dès qu'on utilise des produits chimiques, il y a danger pour la santé d'autrui ! Et j'estime que la puissance d'un canon à eau est suffisante pour mettre à mal les manifestants. En effet, elle suffit pour disperser des manifestants et il n'y a vraiment pas besoin d'ajouter à l'eau des produits qui sont extrêmement nocifs pour la santé ! Nous avons la responsabilité de faire respecter l'ordre public, c'est vrai, mais nous avons aussi celle de veiller qu'il ne soit pas maintenu au détriment de la santé de nos concitoyens.

Par conséquent, Madame le présidente, le groupe socialiste demandera le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat, afin qu'il soit tenu compte des demandes des députés de l'époque.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Vous faites donc la même demande que M. Losio.

M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que la réponse du Conseil d'Etat est absolument conforme en tous points aux pratiques genevoises. Il ne convient pas de comparer la culture, que je ne critique pas, de nos amis alémaniques à la culture en matière de maintien de l'ordre qui est pratiquée à Genève. J'en donne un seul exemple: les villes suisses alémaniques utilisent les balles en caoutchouc; Genève n'a jamais utilisé cela. Notre canton est conscient que l'utilisation de tels procédés n'est pas recommandable. Mais, lorsqu'il s'agit de protéger la population, de protéger un secteur, et même - éventuellement ! - de protéger le parlement qui siège ici, il n'y a pas d'abus à autoriser l'utilisation de substances chimiques, parcimonieusement, et de les additionner à de l'eau. Il y a des éléments perturbateurs dans notre démocratie - nous en avons vu - qui font fi de cette dernière, la mettent en péril et, aussi, mettent en danger la vie des citoyens ! Dans ce cadre-là, il est important de doter la police de moyens lui permettant de maîtriser la situation: la démocratie peut être mise en danger par tout un chacun qui ne sait même pas pourquoi il manifeste, mais qui a décidé de casser, de vandaliser ! Là, il est parfois nécessaire d'utiliser des moyens adéquats pour le maintien de l'ordre.

Aussi, le groupe démocrate-chrétien ne renverra pas ce rapport au Conseil d'Etat et invite le Grand Conseil à prendre acte de ce texte.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Mesdames et Messieurs les députés, je soutiens la réponse du Conseil d'Etat. Si les gens étaient un peu mieux éduqués et plus respectueux de leur environnement, la police n'aurait pas besoin d'utiliser de canons à eau, tout simplement ! Je pense qu'il s'agit d'une question de respect, de dignité humaine, d'éducation, et que la réponse au problème soulevé est là. La police effectue son boulot, nous n'avons pas à lui dire ce qu'elle doit faire, des personnes sont là pour ça. Et si des gens se plaignent de lésions, eh bien, ils n'avaient qu'à se tenir tranquilles; ainsi, ils n'en auraient pas subi ! Je refuse donc le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat.

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion a dix ans, elle avait un côté émotionnel, et nous, radicaux, l'avions d'ailleurs signée. Nous sommes pleinement satisfaits de la réponse du Conseil d'Etat et allons bien évidemment prendre acte de ce rapport.

M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, M. Ducrot, tout à l'heure, a présenté les arguments contre le renvoi d'une manière synthétique, ce qui fait que je pourrai me dispenser de revenir sur tout ce qu'il a dit, pour vous rappeler seulement que nous avons voté dans cette enceinte une loi sur les manifestations.

Dans cette loi sur les manifestations, nous avons ancré le principe d'une pesée des intérêts, dans laquelle est inclus l'intérêt de l'ordre public. Donc, ça signifie qu'on ne peut pas demander ensuite au Conseil d'Etat d'appliquer cette pesée des intérêts au moment où il est confronté à une manifestation, au moment où la police est confrontée à une manifestation, en lui disant simultanément quels instruments il doit utiliser et lesquels il ne doit pas. Je rappelle également que cette loi sur les manifestations inscrit en son centre la proportionnalité, ce qui signifie: dans le sens même de ce que le Conseil d'Etat a répondu à cette motion. Eh bien, c'est le principe de proportionnalité qui doit guider l'intervention de la police, et rien d'autre !

Je me permets, Mesdames et Messieurs les députés, à ce stade de la discussion, de m'étonner de l'angélisme qui consiste à croire que toutes les manifestations peuvent aisément être dispersées avec de l'eau pure et de la bonne volonté ! Non, ce n'est pas vrai ! Il y a, à Genève, des manifestations dures. Il y a dans notre canton des situations où il est nécessaire, dans le respect de la proportionnalité, d'agir avec des moyens plus efficaces que le canon à eau seul. Et c'est se voiler la face que d'imaginer que de telles situations n'existent pas. Je vous propose également de prendre acte de ce rapport.

M. Roger Golay (MCG). Tout d'abord, en raison de ma fonction - que vous connaissez tous - je m'abstiendrai au moment du vote, d'autant plus que j'avais été entendu à l'époque, en ma qualité de président du syndicat de la police, à propos de la sécurité qu'apportaient ces canons à eau pour la police.

Je voudrais simplement relever que lorsque ces derniers sont utilisés, ils ne le sont pas de la même manière qu'à Berne; les instructions à Genève sont totalement différentes. En l'occurrence, on ne fait pas de jets directs, ce sont des particules qui retombent et occasionnent des picotements aux narines, aux yeux, sur la peau, etc., mais sans gravité. Et si ces canons à eau, avec le gaz, sont supprimés demain, qu'y aura-t-il à la place ?! Des charges de gendarmerie qui occasionneront nettement plus de lésions corporelles que ce qui se passe aujourd'hui avec les canons à eau. Il y aura des fractures, ce qu'on ne peut éviter quand il y a une charge, quand il y a confrontation directe. Je pense que, pour le bien des manifestants et pour celui des forces de l'ordre, il vaut mieux maintenir l'usage des canons à eau avec le gaz.

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce débat nous permet de rappeler cette belle manifestation au cours de laquelle notre ancien collègue John Dupraz avait été aspergé par les grenadiers bernois ! Ça avait permis à votre Grand Conseil de déposer cette motion.

Je ne retire évidemment pas un seul mot de la réponse du Conseil d'Etat. Comme l'a rappelé M. le député Golay, la proportionnalité implique qu'on utilise un moyen, certes dommageable, pour éviter quelque chose de plus dommageable encore. Sans dire que le contraire ne se produit jamais, il faut quand même reconnaître la parcimonie et l'à-propos avec lesquels la police genevoise utilise, très rarement, les gaz dans les canons à eau. C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat vous prie de bien vouloir prendre acte de sa réponse.

La présidente. Je vais faire voter le renvoi de ce rapport à son auteur, le Conseil d'Etat.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d’Etat de son rapport sur la motion 1105 est rejeté par 35 non contre 20 oui et 1 abstention.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1105.

M 1526-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Antonio Hodgers, Christian Bavarel, Sylvia Leuenberger, Esther Alder, Anne Mahrer, Stéphanie Nussbaumer visant à l'engagement de détenteurs de permis C dans la police genevoise

Débat

Mme Mathilde Captyn (Ve), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, les Verts sont satisfaits que cette motion ait enfin été traitée par la commission judiciaire. Son traitement a d'ailleurs amené la commission à débattre au-delà de son contenu. La motion soulève en effet deux questions importantes. D'une part, une question de principe: quelle conception de la police avons-nous ? D'autre part, une question pratique: comment sortir de la pénurie de policiers ?

Sur la question de principe, quasiment tous les partis se sont exprimés en faveur d'une police aujourd'hui plus représentative de la multiculturalité genevoise, qui comprend des étrangers tout comme des Suisses dans ses troupes, et c'est une très bonne chose ! Il y a seulement eu la position pour le moins étrange des socialistes qui, visiblement, ont une vision passéiste de la police. Ils voudraient qu'elle soit la garante du cadre légal de notre pays. Soit, comme nous tous ! Mais ils pensent apparemment que les résidents non suisses seraient moins à même de garantir les droits et les devoirs de chacun. Là, il faudra qu'ils m'expliquent, car j'ai peur d'avoir perçu dans leur point de vue une belle expression de xénophobie.

Les libéraux, eux, au contraire, ne voient pas pourquoi la motion concerne les bénéficiaires d'un permis C seulement. Ils se sont positionnés en faveur de l'engagement d'Européens, ceux concernés par les accords bilatéraux, par exemple.

Il est donc temps de sortir de la situation actuelle, ambiguë, qui veut que l'on accepte à l'école de la police des candidats détenteurs du permis C, tout en les obligeant à se naturaliser. Il y a une majorité politique qui est d'avis qu'il faut une police davantage représentative de la population cosmopolite de Genève, ce qui aurait l'avantage de favoriser le dialogue et la proximité. C'est donc le moment d'ouvrir les portes de l'école de la police à toute personne qui s'y intéresse, indépendamment de sa nationalité et sans l'obliger pour autant à devenir suisse.

Au sujet de la deuxième question, l'effet que cela pourrait avoir sur la pénurie de recrutement que connaît la police depuis plusieurs années, les groupes étaient plus partagés. Les Verts, le PDC et les libéraux estiment qu'autoriser l'engagement d'étrangers au sein de la police pourrait avoir un effet positif sur le recrutement, alors que le MCG et les socialistes pensent qu'il faudrait abaisser les exigences des examens d'entrée à l'école de police, ainsi que les critères d'engagement qu'ils jugent trop sévères. Une chose est sûre, tout le monde s'est accordé pour dire qu'il fallait agir contre cette pénurie en multipliant les mesures d'encouragement.

La conclusion des travaux de la commission judiciaire va finalement plus loin que l'invite unique de cette motion qui demande de prévoir et de faciliter l'engagement de détenteurs de permis C dans la police genevoise. La grande majorité de la commission demande donc le renvoi de ce texte au Conseil d'Etat.

M. Alberto Velasco (S). Tout d'abord, je tiens à rendre hommage à la rapporteure de la commission parce qu'elle a effectivement retracé très bien la position des socialistes. Par contre, nous taxer de xénophobes, nous, socialistes, c'est quand même un peu fort ! Voyez-vous, la proposition vient essentiellement de moi et de Mme Pürro. Je suis d'origine étrangère - espagnole, comme mon nom l'indique - et Mme Pürro est également d'origine étrangère. Vous savez, bien avant même que les Verts n'existent, je me battais déjà pour l'intégration des étrangers et j'ai donné, dans des caves, des heures et des heures de cours à des étrangers ! Donc voyez-vous, ni moi ni le parti socialiste ne sommes xénophobes ! Lisez l'histoire du parti socialiste, cela vous montrera que c'est un parti qui n'est pas du tout xénophobe, Madame ! Et je pense que vous pourriez retirer ce terme d'ici à la fin de la séance.

Maintenant, il y a de drôles de façons d'intégrer les étrangers. Les Verts nous disent que, pour intégrer les étrangers, il faudrait créer un corps expéditionnaire dans le canton. C'est quoi, un corps expéditionnaire ? Ces gens seront supposés exercer une tâche régalienne, mais sans aucun droit politique ! Je vous le dis, Madame, je m'en fous que le policier soit suisse ou espagnol ! Je m'en fiche, ce que je veux, c'est qu'il ait les droits politiques ! Je m'explique: dans les communes où les droits politiques des étrangers existent, je ne vois pas de problème à l'engagement de policiers municipaux étrangers ! Ce que je ne veux pas, c'est qu'on utilise les étrangers pour des engagements très durs, comme les manifestations dont nous avons parlé tout à l'heure - avec la sale ambiance qu'il peut y avoir dans notre pays... Car la xénophobie existe dans notre pays ! Et elle ne vient pas des socialistes. Nous ne sommes pas xénophobes et nous avons le courage de dire les raisons pour lesquelles nous ne sommes pas d'accord.

Cette motion pourrait même exacerber le sentiment de xénophobie. Vous savez très bien qu'il arrive que la police aille chercher les personnes qui ne veulent pas faire leur service militaire... Je suis très gêné d'imaginer les réactions que pourrait susciter le fait que des étrangers interviennent dans la limitation de liberté de personnes qui, elles, sont citoyennes ! C'est très délicat ! Ce sera autre chose si, demain, un scrutin accorde aux étrangers le droit de vote au niveau cantonal, droit pour lequel nous, socialistes, militons. S'il advient que les étrangers obtiennent le droit de vote, le droit d'exercer leurs droits politiques, ils pourront alors faire partie d'une police citoyenne, exerçant une fonction régalienne et, en même temps, des droits politiques !

La présidente. Excusez-moi, Monsieur le député ! Je voulais vous le dire tout à l'heure, nous sommes dans un débat «par catégorie», suite à la requête en ce sens de la commission, d'ailleurs. Le temps de parole est de trois minutes par groupe et vous êtes en train de le dépasser.

M. Alberto Velasco. Alors, laissez-moi au moins le temps de finir. (Commentaires.)

La présidente. Bien, mais il vous faut conclure, et je ferai la même chose pour les autres personnes qui vont encore s'exprimer, par souci d'équité.

M. Alberto Velasco. Par conséquent, nous avons aussi pris langue avec le Conseil d'Etat qui nous a dit que les détenteurs de permis C peuvent aujourd'hui se présenter aux examens de l'école de la police et y être admis. A la sortie de l'école, ils bénéficient quasiment immédiatement de la nationalité suisse et, donc, des droits politiques qui vont avec.

Je crois qu'aujourd'hui rien n'empêche quelqu'un qui a un permis C d'entrer dans la police, s'il nous garantit qu'il exercera ses droits politiques. L'intégration, c'est ça, Madame la rapporteure ! On intègre les gens en leur donnant des droits politiques ! C'est ça l'intégration: des droits politiques !

M. Frédéric Hohl (R). Tout d'abord, je tiens à remercier Mme Captyn. Votre rapport était excellent et votre présentation tout à fait claire. On est pleinement dans l'actualité, aujourd'hui, avec le manque d'effectifs dans la police, malgré une ligne budgétaire disponible qui permettrait d'engager des nouveaux policiers.

Alors, mis à part pour une dizaine ou une quinzaine de policiers spécifiquement voués au renseignement, la cheffe de la police a plutôt bien accueilli cette proposition de motion. On le sait, il y a près de 40% d'étrangers à Genève. Nous pensons donc que c'est une très bonne idée que des détenteurs de permis C entrent dans la police; cela a beaucoup de sens !

Il me semble également que la police devrait peut-être travailler un peu mieux son image. Je crois qu'il est temps de revaloriser cette profession pour que des jeunes s'y intéressent. Ça, je crois que c'est un point qui est très important et que vous devez peut-être inclure dans vos discussions. Alors, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical vous encourage à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Gilbert Catelain et je rappelle que le temps de parole accordé est de trois minutes par groupe.

M. Gilbert Catelain (UDC). La commission judiciaire ne s'est pas posé la question de savoir pourquoi il fallait être suisse pour accomplir une mission de maintien de la paix à l'étranger ou une mission de sauvegarde des moyens d'existence en Suisse et s'il y avait la possibilité d'être étranger pour accomplir une mission de sécurité intérieure en Suisse.

Je rappelle que cette motion est actuellement inapplicable, parce qu'aujourd'hui un ressortissant serbe au bénéfice d'un permis C ne pourrait pas patrouiller avec un gendarme français en France ! Il serait donc limité dans son champ d'activité. Ce sera possible après l'entrée en vigueur des accords de Schengen, mais actuellement ce n'est pas possible et ces questions juridiques n'ont pas été étudiées par la commission.

Les candidats à la profession de gendarme ne manquent pas. A l'instar d'autres secteurs économiques, il existe un décalage entre les besoins du marché de l'emploi, ici la police, et les qualifications du demandeur d'emploi. Les premières expériences menées par la police démontrent que ce décalage est encore plus marqué avec les détenteurs de permis C: seul un candidat sur dix a pu être engagé ! Il y a donc peu de chances que la mise en oeuvre de cette motion, de l'invite de cette motion, ait des effets tangibles sur les effectifs de la police genevoise.

Nous devrons certainement imaginer d'autres solutions. En particulier, passer d'un système de recrutement qui disqualifie de bons candidats suisses, respectivement genevois, à un système qui permette, en concertation avec l'école de police et l'office cantonal de l'emploi, de remettre en selle les candidats dont les seules lacunes résident dans un déficit d'acquis scolaires. Au vu des exigences de la profession de gendarme, de l'évolution de cette profession, de son profil de carrière, il est risqué d'assouplir les conditions d'engagement au niveau des exigences scolaires. L'UDC estime qu'accepter cette motion reviendrait à ignorer le problème de fond, à savoir les lacunes graves de nombreux candidats, en particulier genevois, dans des domaines importants tels que la maîtrise de l'orthographe ou de l'algèbre. Avant de se prononcer sur un problème aussi grave que celui du recrutement de la police, il conviendrait que le DIP analyse et nous présente les résultats des examens de recrutement, d'admission à la police genevoise.

Dans l'intervalle, l'UDC estime qu'il serait beaucoup plus efficace d'élargir le bassin de recrutement de la police genevoise et des gardiens de prison en assouplissant les conditions d'âge, comme le prévoit le projet de loi 10274 que l'UDC a déposé. Pour ces motifs, l'UDC ne soutiendra pas le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Jean-Claude Ducrot (PDC). Monsieur le président, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, il y a encore dix ans, vraisemblablement personne ne pensait que Genève s'ouvrirait sur l'Europe. Or ce sera d'autant plus vrai avec Schengen et la coopération du Centre de police et de coopération transfrontalière qui se trouve à l'aéroport. Notre frontière n'est qu'un fil ! Les échanges entre les nations qui nous entourent sont devenues monnaie courante, nous ne pouvons pas dire que nous sommes les meilleurs chez nous et que nous pouvons tout régler tout seul. Non, Mesdames et Messieurs ! Je pense qu'il est nécessaire de faire preuve d'esprit d'ouverture en faveur des personnes, des jeunes qui sont assimilés et travaillent chez nous, qui sont intéressés par la profession de policier mais qui ne peuvent pas y accéder parce qu'ils ne sont pas citoyens suisses. Pourtant, beaucoup d'entre eux ne connaissent même plus leur pays d'origine et se disent genevois. Je crois donc qu'il est important de donner une chance à ces jeunes de s'engager chez nous.

Quant à abaisser les exigences pour entrer dans la police, cela me semble une mauvaise chose. Il ne convient pas d'abaisser les exigences, mais de les maintenir. Pour critiquer l'école genevoise, je pense qu'il est vrai qu'il y a eu des cas où, manifestement, les Confédérés étaient mieux préparés pour les examens de police. Or il y a toujours des possibilités ! M. Catelain a dit qu'il n'en existait pas, or il y des possibilités de repasser les examens, pour ceux qui ne les ont pas réussis. Il est possible de se présenter à d'autres examens !

Nous vivons à l'époque de Schengen ! Nous vivons avec Schengen, qui sonne à notre porte ! C'est le moment de dire oui, d'oser dire que nous voulons une ouverture envers les personnes de notre canton qui sont intéressées à entrer dans la police mais qui ne sont pas citoyens suisses. Avec 38% d'étrangers à Genève, il y a du potentiel, quand bien même il soit minime. Il y a des potentialités de pouvoir engager des étrangers qui sont chez nous et je ne pense pas que la sécurité de notre canton sera mise en cause. Dans le recrutement, il convient d'être attentif, d'approfondir plus précisément la sélection des personnes qui seront candidates et, comme pour un Suisse, de faire en sorte d'accepter ces gens, car ils seront certainement de bons policiers qui sauront servir notre république.

Aussi, le groupe démocrate-chrétien accepte le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

M. Eric Stauffer (MCG). Messieurs les députés, pourquoi pas engager des frontaliers dans l'armée suisse ? On est dans Schengen ! Ben alors ?! La sécurité nationale, on peut aussi la confier à tous les étrangers d'Europe... Je crois qu'il faut être un peu sérieux, Mesdames et Messieurs les députés ! Nous sommes en train de parler de la sécurité intérieure ! La sécurité intérieure n'est faite que pour les titulaires de passeports suisses ! Il est hors de question d'engager des permis C dans la police genevoise: les policiers ont accès à des informations hautement sensibles, à des bases de données, jusqu'au niveau de la Confédération. Mais je crois rêver ! Et vous, Monsieur le député Ducrot, en tant qu'ancien commissaire de la police de sûreté de la République et canton de Genève, vous osez tenir ce discours ?! Je ne comprends plus ! Enfin, vous me direz qu'on n'en est pas à une déconvenue près !

Encore une fois, je crois que c'est le début d'un exercice qui est très dangereux. Nous avons entendu notre conseiller d'Etat - pour qui j'ai beaucoup d'estime, il le sait - une petite rumeur laissait entendre qu'on pourrait engager aussi des frontaliers dans la police genevoise... La réponse est non ! Les permis C, c'est non ! Sauf s'il y a une demande de naturalisation en cours ! Et j'aimerais vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion a été déposée avant les accords qui sont intervenus entre les syndicats de la police, l'Etat et les permis C, puisque la police engage des permis C pour autant qu'une demande de naturalisation suisse ait été déposée. M. le conseiller d'Etat me corrigera si cela n'est pas exact.

Alors encore une fois, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut arrêter le délire, il faut cesser de dire que tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil ! On veut devenir policier ? On veut rentrer dans la gendarmerie ? On veut être inspecteur de sûreté ? On veut être commissaire ? Eh bien, on demande le passeport suisse ! C'est la moindre des choses ! Ce n'est pas une question de patriotisme ou je ne sais quoi ! C'est une question de bon sens par rapport à la République de Genève dans laquelle nous vivons. Essayez de faire l'exercice en France voisine avec un Genevois qui dirait qu'il aimerait s'engager dans la gendarmerie nationale... Eux sont plus intelligent, car cela dépend de l'armée: vous savez qu'en France la gendarmerie dépend directement de l'armée, donc de la sécurité intérieure. Ce que vous vous apprêtez à voter ici aujourd'hui reviendrait à dire que dans l'armée suisse, pour la défense du pays, nous pourrions prendre des étrangers. Mais faites une légion étrangère ! Et faites une police-légion étrangère ! Nous, nous n'adhérerons pas à cela.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous enjoins de refuser ce texte parlementaire et je vous demande de respecter les citoyens de Genève, avec les institutions telles qu'elles ont été établies depuis plusieurs siècles ! Merci.

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est demandée par Mme Sandra Borgeaud - je vous rappelle, Madame, que vous ne bénéficiez que d'une minute et demie pour vous exprimer.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Merci, Madame la présidente. Je vais être brève ! Mesdames et Messieurs les députés, le problème ne se pose absolument pas avec les permis C, puisqu'ils peuvent déjà s'engager à condition de se faire naturaliser. Et cela a très bien fonctionné ainsi jusqu'à maintenant. On ne peut pas, non plus, obliger les Suisses à être genevois. Je vous rappelle quand même que la majorité des policiers sont valaisans, fribourgeois et vaudois. Ils sont confédérés, mais ils sont suisses ! S'ils n'étaient pas là, Genève n'aurait plus de police - allez me trouver encore un Genevois aujourd'hui, ça devient très difficile !

D'autre part, je dirai qu'on peut effectivement envisager d'assouplir les examens d'entrée à l'école de police. Je rappelle qu'il y a une formation: il y a une école de police qui peut très bien combler les éventuels manquements des candidats et améliorer leurs points faibles. De plus, il faudrait faire beaucoup plus de publicité - comme le fait actuellement la douane - si l'on veut améliorer l'image de la police et donner envie d'y entrer. (Brouhaha.) Hé ! Ho ! S'il vous plaît, parlez moins fort ! Merci !

Une voix. Attention !

Mme Sandra Borgeaud. J'aimerais aussi, chose très importante, que les hautes hiérarchies de la police veillent aux bonnes conditions de travail, qu'elles aient confiance en leurs hommes et qu'elles arrêtent de les suspendre systématiquement ou de leur mettre des enquêtes administratives sur le dos pour des initiatives qui, il y a quelques années encore, leur auraient valu des félicitations.

J'aimerais aussi rappeler que l'âge d'entrée actuel est fixé à 35 ans. On peut tout à fait aussi envisager d'augmenter cette limite à 38 voire 40 ans. A cet âge, les personnes sont en bonne santé, en pleine maturité, et on n'a pas affaire à des gamins de 20 ans !

Je soutiendrai donc ce renvoi au Conseil d'Etat, afin que ce dernier puisse étudier toutes les pistes proposées aujourd'hui. Il y en a plusieurs, mais on doit régler ce problème, et rapidement, car nos policiers - je parle pour eux, en leur nom - en ont plus que marre de la situation actuelle !

M. Jean-Michel Gros (L). Chers collègues, un député, situé sur ma gauche maintenant, évoquait tout à l'heure la démocratie et ce que doit être un parlement. La démocratie doit être la clarté, la transparence ! Eh bien, j'aimerais bien voir ça de sa part, parce que la transparence implique aussi d'être fidèle à ses votes ! En commission, le MCG vote en faveur de cette motion et, ici, on vient se faire insulter parce qu'on propose d'engager des policiers qui ne seraient pas purement suisses, avec un passeport dûment estampillé: ça commence à bien faire, au niveau de la démocratie et des spectateurs qui nous regardent ! S'il n'y en a pas beaucoup à la tribune, peut-être sont-ils un peu plus sur Léman Bleu !

J'en viens aux faits. L'audition de la cheffe de la police était particulièrement intéressante. Elle nous a dit qu'elle était favorable, comme nous l'a rappelé Mme Captyn, à l'engagement de détenteurs de permis C et, davantage encore, à l'engagement d'autres étrangers qui ne seraient pas au bénéfice de ce permis. Elle a dit qu'il y avait certaines restrictions - et là, je fais le parallèle avec ceux qui ne veulent pas engager d'étrangers dans l'armée suisse - oui, elle voit une objection en ce qui concerne certains services sensibles de renseignement, dans lesquels ces personnes étrangères pourraient entrer en conflit étant donné leur origine. Ceci concerne une quinzaine de postes à Genève et elle ne voyait vraiment pas de problème par rapport à cela ! Et elle le gérera très bien, dans le cadre de l'affectation des personnes concernées.

Oui, nous sommes favorables à l'élargissement du recrutement - non pas pour résoudre une fois pour toute le manque d'effectifs de la police genevoise ! - et là, nous sommes également ouverts aux propositions faites par plusieurs autres groupes - je n'ai pas toutes les motions ou tous les projets de lois en mémoire. Mais, évidemment, il s'agit ici d'une motion parmi d'autres ! A l'heure actuelle, la restriction de n'engager que des permis C sous promesse d'une naturalisation future fait que les résultats ne sont pas extraordinaires au niveau de la réussite du recrutement. C'est donc un essai.

Bien sûr, Monsieur Catelain, nous n'avons pas étudié en commission toutes les implications de Schengen, des accords de libre circulation des personnes, ce n'était pas notre rôle, mais nous avons dit explicitement que nous attendions que le Conseil d'Etat, dans sa réponse, nous exprime les difficultés que pourrait, en fonction de cette motion, soulever soit l'accord de libre circulation des personnes, soit Schengen.

Il est évident que dans l'esprit de Mme Bonfanti, l'engagement d'étrangers autres que des permis C - elle l'a évoqué - concerne surtout des élèves, des gendarmes issus de l'école de gendarmerie française. Il est évident que, pour Genève, il est quand même intéressant d'avoir des gens qui parlent la langue vernaculaire ! C'est probablement plus efficace que d'engager un Islandais qui débarque ici. Autrement dit, ça se limiterait probablement à des gens qui sont déjà plus ou moins intégrés.

Je voulais toutefois dire quelque chose à M. Velasco, qui ne veut pas de policiers étrangers car ils n'ont pas le droit de vote et ne peuvent pas voter les lois qu'ils vont appliquer. Mais, Monsieur Velasco, on ne demande pas ça à un policier ! On ne demande pas qu'il vote les lois, on lui demande de les appliquer, en prêtant serment, devant le Conseil d'Etat, qu'il les appliquera en son âme et conscience, comme tout policier le fait ici. Monsieur Velasco, lorsque les Confédérés viennent nous sauver par les effectifs qu'ils fournissent, croyez-vous que, à l'issue de leur formation à l'école de police, ils ont déjà voté une loi à Genève ? Tous ces Fribourgeois, ces Valaisans, ces Jurassiens... Eh bien non, ils n'ont pas voté nos lois !

La présidente. Il vous faut conclure !

M. Jean-Michel Gros. Je conclus. C'est pourquoi, dans un esprit d'ouverture, les libéraux soutiendront cette motion et vous demandent de la renvoyer au Conseil d'Etat, duquel nous attendons évidemment toutes les explications sur les obstacles qu'il pourrait trouver dans une telle proposition de solution.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Stauffer, vous avez la parole: il vous reste trente-cinq secondes.

M. Eric Stauffer (MCG). Ce sera largement suffisant, Madame la présidente ! Je demande le renvoi de cette motion en commission judiciaire, au motif que dans les accords bilatéraux que la Suisse a signés, il est fait mention de l'engagement de détenteurs permis C, donc de résidents européens dans toute l'administration, à l'exception de la police, de l'armée et des activités ayant trait à la sécurité intérieure... Enfin, il existe toute une liste qui est spécifiée. Donc, je pense que cette motion pourrait avoir une incidence contraire au droit supérieur et aux traités internationaux signés par la Suisse.

A ce titre, je demande le renvoi en commission judiciaire, afin que cette question puisse y être étudiée, pour qu'on ne fasse pas des textes «qui ne correspondent à rien», comme l'ont dit très justement les libéraux, et qu'on se fasse balayer ensuite !

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je suis un peu surpris, parce qu'il y a une demande de renvoi en commission, mais, en toute hypothèse, il va de soi que la faisabilité des choses fera partie intégrante de la réponse du Conseil d'Etat.

Historiquement, je vous rappelle qu'au XIXe siècle, la loi sur la police prévoyait que les officiers devaient être genevois et que le corps de police pouvait compter jusqu'à 25% d'étrangers au maximum. En réalité, on était souvent un peu en dessus de cette limitation et il faut reconnaître, Monsieur Stauffer, qu'ils étaient tous frontaliers. Il n'y avait pas de policiers islandais à Genève à cette époque !

Le Conseil d'Etat attache une grande importance au vote de votre Grand Conseil, Mesdames et Messieurs les députés, parce que nous sommes favorables à une ouverture. Evidemment, cette ouverture n'est possible qu'avec votre soutien. Que ce soit en faveur des personnes avec un permis C - résidentes, par exemple - ou, effectivement, en faveur des frontaliers.

Traiter du recrutement de la police genevoise en trois minutes relève un peu de la plaisanterie, mais je vais quand même vous donner une ou deux informations. La première, c'est qu'en termes de recrutement, nous sommes en train de désigner une personne qui, au sein de la police, n'aura que cette tâche ! Parce que, fondamentalement, le recrutement, on s'aperçoit que c'est une question de personne à personne, que c'est une tâche qu'on ne peut pas faire comme ça, en plus, en faisant un peu de publicité par ci, par là... Nous aurons véritablement un officier chargé du recrutement.

Deuxième remarque, sur les obstacles: je veux bien être gentil avec l'orthographe, mais il y a juste des limites qui font partie de la carte de visite de la police. On ne peut pas voir écrire des «à» n'importe où ! (Rires.)

Troisième élément: d'autres obstacles, tels que la taille, le poids et des choses de ce genre-là, je les ai d'ores et déjà supprimés, avec, je l'admets, un effet parfaitement insuffisant.

Alors, si vous voulez vraiment aider - fortement - au recrutement dans la police genevoise, ce n'est pas compliqué. Ce qui pèche aujourd'hui sur le marché de l'emploi, c'est la rémunération, et c'est là où l'on peut et où l'on doit faire un effort !

La présidente. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Une demande d'amendement présentée par M. Eric Stauffer consiste à ajouter dans l'invite de la motion les mots: «de la zone Schengen». Comme seuls les chefs de groupe ont reçu ce texte, je vous lis la phrase complétée. Il s'agirait d'inviter le Conseil d'Etat «à prévoir et faciliter l'engagement de détenteurs de permis C de la zone Schengen dans la police genevoise». Nous nous prononçons sur cet ajout. (Remarque de M. Eric Stauffer.) Vous n'avez plus le droit à la parole, Monsieur Stauffer ! (Nouvelle remarque de M. Eric Stauffer.) Non, non ! C'est ainsi dans un débat par catégories, Monsieur le député ! C'est le règlement. Mesdames et Messieurs les députés, avez-vous tous compris l'ajout ?

Des voix. Oui !

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 34 non contre 11 oui.

La présidente. Je rappelle que le renvoi de cette proposition de motion à la commission judiciaire a été demandé.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1526 à la commission judiciaire et de la police est rejeté par 43 non contre 12 oui et 6 abstentions.

Mise aux voix, la motion 1526 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 36 oui contre 19 non et 5 abstentions.

Motion 1526

M 1659-A
Rapport de la commission judiciaire et de police chargée d'étudier la proposition de motion de MM. Eric Stauffer, Henry Rappaz : Mesure de contrainte immédiate envers les frontaliers conducteurs de véhicules automobiles qui ont fait l'objet d'amendes d'ordre (AO) en ville de Genève, AO qui ont été converties en contraventions et pour lesquelles les contrevenants (120'000 depuis 2003) ont bénéficié d'une "immunité" totale

Débat

La présidente. Messieurs les rapporteurs, merci de vous déplacer jusqu'à la table ad hoc. Et de vous dépêcher un tout petit peu... Je rappelle que nous sommes dans un débat classé en catégorie II, avec trois minutes de temps de parole par groupe, rapporteur compris. Monsieur le rapporteur, avez-vous l'intention de venir ? Il arrive... Tout vient à point pour qui sait attendre !

M. Jean-Claude Ducrot (PDC), rapporteur. Madame la présidente, Mesdames, Messieurs, cette motion du MCG, d'aucuns pourraient le croire, a lancé un pavé dans la mare, lié au problème des amendes d'ordre que le service des contraventions ne parvient pas à encaisser. La motion du MCG parlait de mettre des sabots, engins permettant de bloquer in situ les véhicules étrangers contrevenants, pour faire en sorte que les récalcitrants paient leurs amendes.

Après audition en commission du lieutenant-colonel Cudré-Mauroux, commandant de la gendarmerie, il s'est avéré que cette pratique serait lourde, si elle était adoptée. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison qu'il faudrait du personnel 24h/24. Sans cela, on ne pourrait pas agir en maintenant une contrainte constante sur les automobilistes. A supposer qu'un automobiliste doive une certaine somme, quelle qu'elle soit, et qu'on décide de placer un sabot sur son véhicule, peut-on plier bagage en laissant entendre à cet automobiliste qu'il n'a qu'à revenir le lendemain matin ? Non, il y aurait là une entrave à sa liberté, une contrainte inacceptable, quand bien même ce contrevenant aurait à payer son amende. Cette solution ne peut donc pas être retenue.

On a parlé tout à l'heure des problèmes d'effectifs de la police: on sait qu'il faudrait un personnel important, disponible 24h/24, uniquement pour faire en sorte que les contrevenants paient leurs amendes après la pose d'un sabot.

S'il est vrai qu'il y a des grandes villes françaises comme Paris où ce système a été adopté. Comparaison n'est toutefois pas raison: ce n'est pas parce que cela existe à Paris, ville de plusieurs millions d'habitants où les contraintes de circulation sont pires qu'à Genève, qu'on pourrait adopter ce mode de faire ici !

On a encore dit qu'il y a des personnes - au départ appelées «des frontaliers», mais je parlerai d'étrangers - qui ne paient pas leurs amendes... C'est vrai ! C'est un constat qu'on peut faire. Toutefois, il nous a également été dit qu'il y avait une étroite collaboration avec le CCPD, Centre de coopération polices douanes, que cette solution permettait, avec la participation des pays riverains plus particulièrement - avec la France notamment - de faire en sorte de procéder aux encaissements nécessaires. Alors, on peut aussi ressentir un malaise par rapport aux amendes de moins de 100 F pour lesquelles le CCPD n'agit pas, parce que le travail administratif serait bien évidemment très important...

La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur !

M. Jean-Claude Ducrot. Un accord a toutefois été signé avec la France, qui permettra à la police française d'obtenir, en France, de citoyens français, le paiement des amendes relatives aux infractions commises en Suisse. Dès lors, la commission vous invite à rejeter la motion 1659 proposée par le MCG.

La présidente. Je rappelle que le temps de parole accordé est de trois minutes ! Monsieur Stauffer, vous pouvez vous exprimer.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion m'a valu une plainte pénale de l'ex-conseillère d'Etat Micheline Spoerri, parce que j'ai dit, lorsque nous avions déposé cette motion, que ses services avaient donné l'instruction d'envoyer les codes informatiques aux services des agents de ville pour détruire les fiches souches. Et les 120 000 amendes d'ordre des frontaliers, je les ai vues personnellement ! Plainte pénale a donc été déposée et j'ai reçu une lettre du procureur général Daniel Zappelli qui me demandait de me déterminer sur la levée de mon immunité parlementaire. J'ai demandé que mon immunité parlementaire soit levée ! Cela, afin que je puisse m'exprimer librement ! Et, dans cette attente, j'ai fourni les codes informatiques envoyés par le service des contraventions au service des agents de ville, codes qui ont servi à détruire les fiches souches ! Eh bien, la plainte pénale a été classée, Mesdames et Messieurs les députés !

Alors, aujourd'hui vous pouvez venir nous faire la leçon et dire que raison n'est pas raison ou que comparaison n'est pas raison... Moi je dis que les frontaliers, avec leurs véhicules ventouses qui squattent toutes les places de parking à Genève, se foutent éperdument de recevoir des amendes de stationnement ! Parce qu'ils ne les payent pas ! J'ai écrit, puis j'ai reçu une lettre de la police fédérale qui m'a répondu que le CCPD ne parvenait pas à gérer le flot des contraventions concernant des voitures frontalières.

En France, ce n'est pas comme en Suisse, Mesdames et Messieurs les députés, le numéro de plaque n'est pas relatif à la personne, mais à la voiture. Lorsqu'on vend une voiture, on vend les plaques avec, et il est très difficile d'établir le lien entre le propriétaire et la voiture ! Avant, à Genève, lorsqu'on délivrait un permis G, sur le formulaire figurait une case pour inscrire le numéro d'immatriculation de la voiture du demandeur de permis. Or, depuis que nous avons des frontaliers dans ce service, ils ont supprimé cette case ! Pfuit ! Il n'y a donc plus de relation directe entre le véhicule et son détenteur, et l'identification n'est plus possible ! Je vous défie de contrôler cela, et c'est absolument vrai: les formulaires d'inscription pour les permis G ne comportent plus la case pour indiquer le numéro de plaque du véhicule !

Voilà ce qu'est devenue aujourd'hui la République et canton de Genève ! Et nous, au MCG, nous nous opposons à cela ! Nous, nous avons été élus pour protéger les Genevois, pour faire en sorte que les villages de la périphérie de Genève ne soient pas envahis par 200 000 véhicules tous les jours ! Nous avons été élus pour que les Genevois puissent trouver des places de parc et que l'on cesse cette escroquerie des macarons. En effet, Genève vend des macarons pour plus de 21 millions de francs, mais en encaissant moins de 10 millions pour les places de stationnement... Et les Genevois passent à la caisse en payant des amendes d'ordre tous les jours !

Je vous demande donc de soutenir cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, et j'en ai terminé pour cette première session de la reprise de 2008 !

La présidente. Modérez-vous, Monsieur le député ! Vous allez arriver au bord de l'infarctus si vous continuez comme ça ! La parole est à M. Pierre Losio.

M. Pierre Losio (Ve). Nous étions réticents à l'égard de cette motion qui reprend le thème récurrent du MCG: les frontaliers comme boucs émissaires. En ce qui nous concerne, nous ne connaissons pas de conducteurs frontaliers récidivistes: nous constatons que des conducteurs automobiles commettent des infractions et que d'autres n'en commettent pas ! Pour nous, ça s'arrête simplement là !

Quant à cette motion, la désignation d'un bouc émissaire constituait déjà un point négatif pour nous. Notre réticence a été renforcée par l'audition du commandant de la gendarmerie, qui nous a dit que la solution proposée - la pose d'un sabot sur les véhicules - induirait des coûts supplémentaires en personnel et en matériel; surtout, cela nécessiterait la mise en place d'un service 24h/24. Par-dessus le marché, une telle mesure entraverait l'ensemble des activités et des missions de la police ! La police a des missions plus importantes à effectuer sur le terrain, missions que nous souhaitons qu'elle continue à accomplir, et même qu'elle les renforce, notamment dans des quartiers spécifiques de notre ville.

D'autre part, nous avons été informés de l'entrée en vigueur d'un accord pour fin 2008 - c'est M. le conseiller d'Etat Moutinot qui nous l'a appris. Cet accord permettra d'identifier de manière réciproque, soit dans nos deux pays, les véhicules en infraction, dans le but d'encaisser les montants correspondant aux amendes infligées.

Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à suivre le rapport de la majorité de la commission et à refuser cette motion. Je vous remercie.

La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Alberto Velasco. (Exclamations.)

M. Alberto Velasco (S). Ai-je le droit de m'exprimer, chers collègues ? Oui ?!

Des voix. Oui ! (Brouhaha.)

M. Alberto Velasco. Je demande cela par rapport au vote sur l'objet de tout à l'heure ! J'aimerais dire à M. Stauffer... Où est-il ? Ah oui, c'est vrai qu'il a dit qu'il en avait fini pour cette session. Il nous a quittés, alors que la télévision est toujours là...

J'aimerais relever que ce que propose M. Stauffer peut aussi, parfois, avoir des conséquences. En tout cas, à la commission des visiteurs, nous avons appris qu'un frontalier s'est suicidé à la prison de Champ-Dollon, où il avait été incarcéré parce qu'il n'avait pas payé ses amendes de stationnement... Quand on demande des mesures strictes à l'encontre de frontaliers qui ne payent pas leurs amendes, cela peut parfois avoir des conséquences qui vont jusqu'à coûter une vie !

Par ailleurs, on nous a informés qu'il y a aujourd'hui des accords entre la Suisse et la France et au niveau européen pour permettre l'encaissement de ces amendes. Par conséquent, cette motion est superfétatoire et ne sert à rien.

Se pose encore le problème - ressenti comme tel, il est vrai, par beaucoup de citoyens des communes périphériques - de cette circulation incroyable générée tous les matins. Mais c'est un problème d'infrastructures et d'équipements au niveau cantonal ! Et j'espère que le CEVA apportera bientôt une solution à une partie de ce problème. Je dis cela parce qu'on trouve certains des opposants au CEVA dans les rangs du MCG... Si vous voulez éviter ce problème de circulation, il faut donc soutenir le CEVA !

De plus, dans nos budgets, il faudrait peut-être aussi prévoir des investissements supplémentaires dans les infrastructures, notamment en matière de transports publics. C'est cela qu'il faut faire, et non pas s'en prendre aux frontaliers qui, soit dit en passant, et je le souligne, participent grandement au fonctionnement et au bien-être de ce canton. On les paie pour effectuer un travail - on ne leur donne pas l'argent, comme ça - et ils contribuent à notre développement ! Les socialistes ne voteront donc pas cette motion.

M. Gilbert Catelain (UDC). Sur le fond, le problème posé par le MCG est concret, il révèle en fait qu'une infraction doit être poursuivie et sanctionnée. Là où le bât blesse, c'est au niveau des moyens à mettre en oeuvre pour sanctionner les infractions. Ce que nous demande le MCG en fin de compte, c'est de combler une lacune administrative par une mesure physique totalement disproportionnée. Et il faut résoudre cette lacune par une mesure concrète.

Ce qu'il conviendrait, c'est que notre conseiller d'Etat, M. Laurent Moutinot, nous indique ce que va prévoir l'accord de Berne II - qu'on appelle maintenant, sauf erreur, l'accord de Paris - en matière d'échange de données. Parce qu'en fait la réponse existe, Monsieur Stauffer, et je crois qu'il ne faudra plus vous faire trop de souci: dès que les accords de Paris seront mis en oeuvre, cela ne concernera pas seulement les frontaliers. Et, si je vous entends bien, par «frontaliers» il s'agit, au sens ancien du terme, de personnes incluant des Suisses qui circulent avec des voitures immatriculées en France. Donc, on pourrait simplement parler d'automobilistes qui sont immatriculés à l'étranger, ce serait plus simple. Ainsi, avec l'accord de Berne II, l'échange de données sera possible et l'effet positif, Monsieur Stauffer, c'est que vous ne serez plus en situation d'impunité quand vous circulerez sur l'autoroute en France et que vous serez «flashé» par un radar, alors que, jusqu'à ce jour, votre amende passait directement au panier ! Dorénavant, sauf erreur, les autorités françaises pourront directement consulter nos fichiers, nous transmettre la contravention et solliciter la collaboration de la police genevoise. Donc, c'est réciproque. De mon point de vue, le problème soulevé est totalement résolu avec les accords de Paris.

En plus, demain, avec les accords de Schengen, lorsqu'un citoyen français habitant la zone frontalière prendra l'avion de Londres à Genève, son identité sera, avec le système de recherches informatisées RIPOL, contrôlée à l'aéroport d'arrivée: si l'on constate qu'une amende est impayée, le contrevenant aura l'obligation de s'en acquitter avant d'être libéré. Des solutions existent donc, rassurez-vous !

Toutefois, pour la compréhension de l'ensemble du débat, il serait préférable qu'on nous donne une petite explication sur la mise en oeuvre de l'accord signé entre la France et la Suisse. Pour ces raisons, alors qu'il s'était abstenu en commission, à l'époque - parce qu'il n'avait pas les réponses concrètes quant au contenu de l'accord - le groupe UDC refusera carrément, cette fois, d'entrer en matière sur cette motion.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Stauffer, vous avez quinze secondes pour vous exprimer.

M. Eric Stauffer (MCG). Top chrono ! Mesdames et Messieurs, j'aimerais vous dire qu'à Lausanne ils ont réglé le problème, puisque les voitures des frontaliers qui ne paient pas leurs amendes sont emmenées directement à la fourrière... Le frontalier doit se rendre à la fourrière pour s'acquitter du montant dû ! Dans le canton de Bâle, les mêmes mesures de contraintes existent pour les véhicules frontaliers ! Mais c'est vrai que, à Genève, nous sommes plus intelligents... Et, surtout, beaucoup plus ouverts, car nous disons: «Frontaliers, venez: vous aurez l'impunité ! Bienvenue à Genève !»

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je crois que me lancer dans un cours sur l'applicabilité des sanctions outre frontières est inutile. Je remercie M. le rapporteur des explications complètes qu'il vous a données et je remercie M. Catelain de la précision de son exposé.

Effectivement, j'aurai à répondre de la mise en oeuvre de cet accord. Je crois qu'il n'est plus temps que je vous en fasse la description détaillée, surtout qu'avec trois minutes à disposition ce serait un peu court, mais je confirme les propos de M. Catelain et je confirme aussi les propos de M. Ducrot. Je vous prie par conséquent de bien vouloir rejeter cette motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 1659 est rejetée par 53 non contre 8 oui.

La présidente. Je vous propose d'arrêter là nos travaux. Je vous souhaite une bonne soirée. A très bientôt !

La séance est levée à 18h35.