République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8438-A
25. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat en vue de l'achat de bâtiments et de terrains propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge. ( -) PL8438
Mémorial 2001 : Projet, 2651. Renvoi en commission, 2671.
Rapport de M. Alberto Velasco (S), commission des finances

La Commission des finances, sous la présidence de MM. Dominique Hausser et Philippe Glatz, s'est réunie les 14 février, 7 et 28 mars et 24 avril 2001, pour examiner le projet de loi 8438.

M. .

Par ailleurs, la commission a eu l'occasion d'entendre Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat chargée du Département de l'instruction publique, MM. Eric Doelker, vice-recteur de l'Université, Eric Biéler, directeur du service technique en matière de bâtiments et locaux scolaires et M. Stéphane Tanner, de la direction des affaires fiscales du Département des finances.

Ce projet de loi de crédit répond à un double but :

assurer pour l'avenir le maintien et le développement sur le site de Battelle d'un pôle d'enseignement supérieur répondant tant aux besoins de notre Alma Mater que des hautes écoles spécialisées (HES),

permettre à l'Etat d'engager la réalisation d'un important programme de logements sociaux en collaboration avec les fondations immobilières de droit public et des coopératives d'habitation.

La Fondation Battelle a été créée le 28 mars 1952 et reconnue d'utilité publique par le Conseil d'Etat. A l'époque, ce dernier s'était engagé à exonérer la fondation de tout impôt sur le revenu et la fortune (actuellement impôt sur le bénéfice et le capital), à l'exception des revenus immobiliers et  de la fortune immobilière, et également de l'impôt immobilier complémentaire puisque Battelle possède d'autres immeubles à Genève.

En juillet 1986, le Conseil d'Etat reconduisait pour une durée indéterminée l'exonération de Battelle, toujours reconnue d'utilité publique.

C'est en décembre 1953 que la Fondation Battelle a acheté ce domaine, d'une superficie de 88'606 m2 de la Société immobilière de Grange-Collomb, laquelle le détenait depuis 1925.

A l'heure actuelle, l'Institut Battelle est propriétaire, sur le territoire de la commune de Carouge, de trois parcelles (Nos 2938, 2940 et 2941, feuille 42) représentant au total 76 500 m2. Ces parcelles sont intégralement sises en 3e zone de développement (fonds villa). Elles comportent un ensemble de bâtiments affectés jusqu'ici à des activités de recherche, d'enseignement, de laboratoire et d'administration, représentant au total 24 650 m2 de plancher.

Ces parcelles sont au bénéfice d'un plan localisé de quartier No 28 566A-544 adopté le 23 juin 1994 par le Conseil d'Etat, en application de la loi générale sur les zones de développement. Outre les bâtiments existants, ce plan offre la possibilité de réaliser sur les susdites parcelles 35 380 m2 de plancher pour la construction de logements et 39 400 m2 de plancher supplémentaires à destination de bâtiments d'activités.

Tenant compte du fait que le projet de loi porte, d'une part, sur l'acquisition de terrrains et immeubles destinés à l'enseignement universitaire et supérieur, c'est-à-dire d'actifs à inscrire au patrimoine administratif et, d'autre part, de terrains de réserve pour la construction de logements, qui seront inscrits au patrimoine financier, le projet est structuré en 4 titres.

Concerne les terrains et immeubles destinés à l'enseignement et à la recherche, dont la valeur d'acquisition ascende à F 92'835'000 et se décompose de la manière suivante :

Au total, ces 2 volets, qui recouvrent l'acquisition de l'ensemble du domaine actuel de Battelle, représentent une dépense globale de F 120'000'000.

Concerne le compte de fonctionnement et se décompose de la manière suivante :

- moins value sur les frais d'études,

L'Université s'est installée à l'Institut Battelle dès 1987, grâce à la mise en location d'une surface suffisante pour l'installation provisoire d'une partie de la Faculté des sciences économiques et sociales, dans l'attente de la réalisation de la première étape d'Uni-Mail. En 1992, ces mêmes locaux ont permis de regrouper l'ensemble de la Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation (FAPSE). Cette surface a pu ensuite être augmentée en 1996, pour l'intégration de la nouvelle formation universitaire des maîtres et maîtresses de l'enseignement primaire, lesquels resteront sur ce site jusqu'à la mise en service du futur bâtiment Uni-Pignon (PL 8142), en principe en 2002.

En 1997, l'intérêt de l'Université pour le site de Battelle et ses bâtiments existants s'est considérablement renforcé par l'échange de propriété effectué avec l'Etat entre la campagne Rigot, qui appartenait à l'Université mais s'avérait inexploitable par cette dernière, et le terrain du « Foyer de Pinchat » (qui s'étend de l'Institut Battelle jusqu'au chemin de Pinchat, le long du chemin Vert), parcelle de 53 185 m2 partiellement utilisée par l'enseignement primaire (bâtiment existant).

Lorsque l'Institut Battelle met 1300 m2 de surface brute de plancher (SBP) supplémentaire en location en 1998, cette disponibilité est alors la seule qui permette d'absorber à très court terme les besoins de la nouvelle Direction genevoise de la haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO), ainsi que de la nouvelle Haute école de gestion HES. En 1999, des disponibilités complémentaires permettent d'augmenter les surfaces HES, et de regrouper le 3e cycle de l'Institut d'architecture (IAUG). Ensemble, l'Université et les HES occupent, à ce jour, 11 700 m2 de SBP sur ce site.

Pour les HES, seule la Haute école de gestion est implantée à Battelle, ainsi que les locaux de la direction générale.

A moyen terme, il est prévu d'installer sur ce site, pour l'Université : le Centre universitaire d'informatique (CUI), le Centre universitaire d'étude des problèmes de l'énergie (CUEPE), la section de mathématiques et l'Institut d'architecture.

Dès lors, les principaux bâtiments de l'Université de Genève seront localisés sur cinq zones,à savoir :

« Bastions, Mail, Arve, CMU et Battelle »

Disponibilité actuelle de l'Etat à Battelle

Les chiffres qui suivent illustrent, de manière synthétique, les disponibilités actuelles de l'Etat à Battelle en tant que locataire pour l'Université et les HES ainsi que les possibilités d'extension, une fois l'acquisition réalisée, après le départ des autres locataires et la réalisation du potentiel constructible pour les activités d'enseignement et de recherche.

- Bâtiments d'activités

 surfaces brutes de plancher existantes totales 24 650 m2

 dont : 

 actuellement loués par l'Etat (UNI + HES)  11 700 m2

 pour un montant annuel de   3 732 033 F

 loués à des tiers ou occupés par Battelle  12 950 m2

 surfaces (théoriques) d'activités potentiellement

 constructibles selon PLQ, admis le 85 % de

 39 400 m2     33 500 m2

 surfaces totales après réalisation des droits à bâtir 58 150 m2

Evaluation des besoins en surfaces 

Du rapport établi par le Rectorat en mars 2001, sur l'évaluation des besoins en surface pour l'Université, il en résulte que :

On constate donc que, sans parler des besoins des HES, dont la croissance est actuellement extrêmement forte, on ne voit pas de quelle manière l'Etat pourrait, d'ici quelques années, satisfaire aux besoins actuels ou connus à court terme de l'Université sans, non seulement, consolider sa présence à Battelle mais encore s'assurer la disponibilité des réserves de capacité qu'offre ce domaine.

Ainsi, le périmètre Battelle, qui fait l'objet du présent projet de loi, s'intègre logiquement dans la planification et la politique de regroupement des sites universitaires proposée par le Rectorat et appuyée par le Conseil d'Etat.

Prix d'achat moyen

Comme l'a indiqué le Conseil d'Etat dans son exposé des motifs, l'acquisition des bâtiments occupés par l'Université et les HES donnera droit, à terme, à des subventions fédérales. L'Office fédéral de l'éducation et de la science (OFES) pour l'Université et l'Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie (OFFT) pour les HES ne se prononceront toutefois sur le montant de leur contribution qu'après consultation de l'Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL).

Le montant subventionnable de ces bâtiments sera déterminé en suivant les règles suivantes :

Depuis le 23 juin 1994, date d'adoption du plan localisé de quartier N° 28 566A-544, le potentiel réalisable pour du logement sur les terrains propriété de Battelle n'a pas encore été exploité, mis à part une parcelle qui a été acquise par la CIA et sur laquelle un immeuble de logements est actuellement en construction.

Les droits à bâtir que l'Etat envisage d'acquérir, en vertu du présent projet de loi, correspondent à 35 380 m2 de plancher se répartissant en six bâtiments et 323 logements. En cas d'achat de ces droits, le Conseil d'Etat a indiqué qu'il en confierait la réalisation, d'une part, à des fondations de droit public pour la construction de logements de catégorie HBM (en pleine propriété ou en droit de superficie) et, d'autre part, à des coopératives d'habitations, en droit de superficie, pour la construction de logements de catégorie HLM ou HM.

Les conditions financières de cette acquisition sont conformes aux normes habituellement appliquées par l'Office cantonal du logement, à savoir :

étant entendu que, dans l'hypothèse où Battelle conserverait une partie des droits à bâtir, comme indiqué ci-dessus, le prix d'acquisition serait réduit à due concurrence.

A ce prix de vente s'ajoutera une indemnité de F 8 millions pour remboursement des frais d'études, élaboration des dossiers d'autorisation de construire, travaux d'infrastructures (canalisations, routes) et frais divers exposés par la venderesse. Ces montants pourront toutefois être repris dans les plans financiers des futures constructions.

Comme le Conseil d'Etat l'a précisé dans son exposé des motifs, Battelle a sollicité et obtenu du DAEL les autorisations de construire l'ensemble des immeubles de logement prévus au plan localisé de quartier.

S'il est vrai que l'ensemble de ces autorisations de construire ont été contestées devant les juridictions de recours (Commission de recours LCI, Tribunal administratif, Tribunal fédéral) par deux propriétaires résolument hostiles à la réalisation du plan localisé de quartier, il est tout aussi vrai que la situation se décante progressivement, à telle enseigne que, dans un arrêt rendu le 30 mars 2001, le Tribunal fédéral a débouté les recourants dans le cadre de deux de ces procédures, les recours ayant été rejetés dans la mesure où ils étaient recevables.

Le Conseil d'Etat est donc tout à fait confiant quant au fait que les autorisations de construire querellées, qui se fondent sur un plan localisé de quartier en force, devraient selon toute vraisemblance être définitivement confirmées par les autorités de recours.

Il semble que les autorités communales de Carouge se sont interrogées sur les incidences négatives qu'entraînerait la réalisation du plan localisé de quartier, notamment en termes de capacité d'absorption du trafic induit par le réseau des routes existantes, d'aménagement des cheminements piétons, d'un risque de surdensification des régions de Drize, Pinchat, Grange-Collomb, de la préservation de l'arborisation, etc.

Ces inquiétudes ont donné lieu au vote d'une délibération municipale le 14 novembre 2000 préconisant la modification du plan localisé de quartier sur différents points, la mise en place de différentes mesures de circulation et l'adaptation du réseau routier régional. Depuis lors, les contacts nécessaires ont été établis avec le DAEL. Ainsi, certaines clarifications ont été apportées et un groupe de travail Etat/commune de Carouge a été mis sur pied réunissant des représentants du DAEL (direction de l'aménagement, direction du génie civil, service des opérations foncières), du Département de justice et police et des transports (Office des transports et de la circulation), des TPG et des communes de Carouge et Veyrier afin d'étudier dans leur ensemble les problèmes de circulation liés non seulement au développement du périmètre de Battelle mais à celui de la région environnante.

Une subvention fédérale est prévue et serait calculée en fonction d'un montant subventionnable à déterminer.

Ce crédit sera réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 2001.

Ce projet de loi entre dans le cadre du volume d'investissements nets-nets admis par le Conseil d'Etat pour 2001.

En préambule, Mme Brunschwig Graf indique aux commissaires que le DIP étudie depuis plusieurs années les emplacements nécessaires au développement de l'enseignement supérieur et son choix s'est porté sur le site de Battelle. En effet, lors de la mise en oeuvre de la loi, la Haute Ecole de gestion qui s'était ouverte avec 45 élèves en a 512 pour la rentrée 2000, la projection pour les années suivantes se stabilisant à 634 élèves. Ceci signifie un besoin de locaux important, d'autant plus que les étudiants ne passent pas d'un site à l'autre pour poursuivre leur formation. Elle souligne qu'un objectif stratégique pour Genève est d'avoir une école de gestion digne de ce nom, la seule formation étant assurée auparavant par les Cours commerciaux de Genève, sont venus s'ajouter les étudiants de l'Ecole de gestion documentaire, précédemment à l'Institut d'études sociales, et ceux de l'Ecole informatique de gestion qui eux venaient de l'école de commerce de Malagnou.

En outre, selon Mme Brunschwig Graf, de nouveaux étudiants ont choisi la voie de la formation supérieure. C'est ainsi que les indicateurs mis en place démontrent une augmentation de 14 % de la population qui suit une formation tertiaire, et il ne s'agit pas d'une situation d'étudiants virtuels mais ils sont déjà inscrits, pour une bonne partie. Il devient donc urgent de prévoir des locaux supplémentaires, le partage avec l'Université devenant de plus en plus difficile, chaque année.

Par ailleurs, Mme Brunschwig Graf souligne que, dans les obligations des HES, figure la nécessité de développer une formation postgrade qui implique également un milieu pour le faire, une des caractéristiques de la Haute école de gestion étant le développement de la formation en emploi mais également à plein temps et, partant, de disposer de locaux adéquats. En outre, le département envisage de regrouper sur un même site le Centre d'appui en technologie de la formation et de la communication qui travaille largement avec CIM Genève et qui fait partie des centres requis sur le plan cantonal et sur le plan fédéral. D'autre part, toutes les HES devront être reconnues d'ici 2003 et elles exigent la mise à disposition d'infrastructures, en termes de bibliothèques, cafétérias, laboratoires, etc. Selon Mme Brunschwig Graf, la démonstration a été faite à la Commission fédérale qu'il n'était pas raisonnable de songer à installer la Haute école des arts appliqués à proximité de la Haute école de gestion pour des questions de structures, machines et laboratoires, ni de songer aux bâtiments neufs de l'EIG et aux bâtiments complémentaires qui doivent être construits. La solution de la « cathédrale » qui regrouperait toutes les formations HES a donc été écartée d'emblée. Il n'en demeure pas moins que l'Université a aussi besoin de locaux sans omettre la nécessité d'instaurer des collaborations avec les HES. Le fait d'avoir des programmes dans des lieux communs fait aussi partie des exigences de la Confédération.

En conclusion, Mme Brunschwig Graf défend avec une grande fermeté l'achat de la parcelle de Battelle.

Au nom de l'Université, M. Doelker réaffirme la volonté et le souhait de l'Université de pouvoir emménager définitivement certaines de ses unités sur le site de Battelle, car il était prévu depuis longtemps que branches de l'architecture, l'informatique, les mathématiques et les sciences de la terre y soient installées. Selon M. Doelker, ceci serait possible grâce aux bâtiments A, B, C et E déjà en place sur le site de Battelle.

S'agissant des sciences de la terre, M. Doelker explique qu'il y aurait la nécessité de construire un nouveau bâtiment puisque le bâtiment F est déjà occupé par les HES et que d'autre part, l'Université a rencontré des besoins tout à fait récents et nouveaux. En effet, pour l'architecture, il s'agit de 300 personnes, 80 collaborateurs et 220 étudiants et chercheurs. Le nombre d'étudiants en informatique a plus que doublé en deux ans, soit 500 étudiants et 120 collaborateurs de recherche, personnel administratif et technique. Quant aux mathématiques, il s'agit de 170 personnes.

M. Doelker informe les commissaires que l'Université a aussi le souci d'éviter de prolonger inutilement des locations. En effet, pour les mathématiques, elles s'élèvent à 514'000 F aux Acacias et il y a également une location extrêmement coûteuse dans un bâtiment inapproprié, voire ancien et dangereux, rue des Maraîchers, soit 1'242'000 F.

Enfin, M. Doelker informe les commissaires qu'une étude basée sur l'évolution des effectifs des étudiants démontre déjà qu'il y aura un déficit, selon les normes genevoises, de 24'000 m2 en sciences et ceci après les réalisations de Sciences III et l'acquisition des bâtiments actuels de Battelle. Par ailleurs il semble que l'Université est à bout touchant dans l'établissement d'un rapport à ce sujet.

S'agissant de la partie fiscale, M. Tanner indique que la fondation a été créée le 28 mars 1952, fondation reconnue d'utilité publique et qui est entrée en contact avec le Conseil d'Etat en 1951 déjà. Ce dernier s'engageait par écrit à exonérer Battelle de tout impôt sur le revenu et la fortune (actuellement impôt sur le bénéfice et le capital), à l'exception des revenus immobiliers et de la fortune immobilière, à l'exception également de l'impôt immobilier complémentaire puisque Battelle possède d'autres immeubles à Genève. Le dernier arrêté du Conseil d'Etat date du 23 juillet 1986 où il reconduit, pour une durée indéterminée, l'exonération de Battelle, toujours reconnue d'utilité publique, arrête qui développe ses effets également en matière d'IFD.

En conséquence de quoi, M. Tanner fait remarquer que depuis les 50 ans que Battelle est établie à Genève, elle ne paie pas d'impôts, ni sur le bénéfice, ni sur le capital et ne paie des impôts que sur ses possessions immobilières et les revenus qui en découleraient. Par ailleurs, l'administration fiscale a pu constater, ces dernières années, que les résultats financiers de Battelle étaient régulièrement des pertes et qu'une fondation aux Etats-Unis alimente le manquo.

S'agissant des recours, M. Moutinot indique que le PLQ n'a jamais fait l'objet et il est en force, mais qu'il est vrai, en revanche, qu'il y a des recours de la part des voisins, le long du chemin Vert, contre les autorisations de construire, recours à épisodes multiples qui sont évidemment pendants devant le Tribunal fédéral. En conséquence, le DAEL ne peut pas présumer du sort de l'un ou l'autre de ces recours mais le PLQ existe et il est en force.

Au sujet de l'entrée en force du PLQ et de l'opportunité de l'acquisition, M. Moutinot indique que la commune de Carouge se fait effectivement un certain nombre de soucis sur le périmètre concerné. Toutefois, et le département est catégorique sur ce point, elle n'entend pas remettre en cause le PLQ mais demande, ce qui est parfaitement légitime, que soient réglés un certain nombre de problèmes de circulation, suite à la densification du secteur Pinchat, Battelle et Grange-Collomb. Il indique que certains remettent en cause le PLQ pour différentes raisons dont le sort de la maison qui se trouve au centre, ancienne propriété de « maître ». Là aussi, le département doute qu'une demande de classement aurait la moindre chance d'aboutir.

S'agissant de l'opportunité de l'acquisition, M. Moutinot souligne qu'il aurait fallu peut-être acheter en 1994 / 1995 mais ce qui est certain est qu'il vaut mieux faire cette opération en 2001 qu'en 2003, car au prix de l'immobilier, ce n'est pas forcément la plus mauvaise période.

Au sujet des droits à bâtir conservés par Battelle, M. Moutinot indique que si Battelle conservait les droits à bâtir sur deux immeubles, il y aurait une déduction au prorata sur la vente qui aurait pour effet d'en diminuer le prix d'autant. C'est une option qu'elle a souhaité garder mais le département préférerait avoir le tout. Si tel n'était pas le cas, il serait privé de quelques possibilités mais l'opération resterait globalement satisfaisante.

S'agissant du terrain propriété de l'Université, M. Moutinot souligne que la raison pour laquelle il n'est pas raisonnable d'envisager maintenant de le densifier et le fait qu'il faudrait auparavant, impérativement, régler le problème de circulation, ce qui est une autre paire de manches. En effet, c'est toute la circulation « voie Cottier » qui se pose dans ce projet. Les quatre communes sur lesquelles elle est censée passer ayant des conceptions diverses, l'une songeant à une autoroute, l'autre à un chemin piéton, la troisième à un tunnel et la quatrième ne sachant pas ce qu'elle veut, il y a donc un problème d'harmonisation, indépendamment de la question de savoir s'il faut faire une route ou s'il y a d'autres méthodes. M. Moutinot conclut qu'au-delà des opinions personnelles politiques à ce sujet, il faudra pas mal de temps pour régler ce problème avant que l'on puisse densifier davantage.

Concernant les besoins de locaux de l'Etat, M. Moutinot indique que le DAEL a consolidé la totalité des demandes et est arrivé à environ 30'000 m2, non compris les classes qui sont réclamées d'urgence, pour tel ou tel cycle ou établissement scolaire, où l'on construit un petit ajout en catastrophe. Il informe que le Conseil d'Etat a catégorisé ces demandes en urgentes, nécessaires et « à géométrie variable ». Enfin il souligne l'avantage du site de Battelle par le potentiel qu'il offre pour répondre à la rapide 'évolution des besoins.

A la suite de ces interventions, certains commissaires souhaitent que le DIP soit en mesure de fournir une statistique de l'évolution du nombre d'étudiants dans l'enseignement supérieur, dans les cinq dernières années, voire une projection sur les cinq années à venir, en termes d'évolution des mètres carrés à disposition. En effet, pour ceux-ci, la Commission, souvent confrontée à un objet particulier sans vision d'ensemble, le rend réticente à tout nouvel achat dans la mesure où il a souvent 'impression d'être « mené en bateau ». Car bien souvent, une fois libérés, les locaux servent à loger d'autres services, la situation ne sera pas pour autant améliorée, raison pour laquelle il a le sentiment d'un côté inflationniste dans la demande et dans les besoins.

En réponse à la question, Mme Brunschwig Graf admet le bien-fondé de la demande de pouvoir disposer des perspectives pour les HES et l'Université et indique que ceci a été fait en partie pour les premières nommées. Quant à l'impression d'être « menée en bateau », Mme Brunschwig rappelle que le développement de la formation a des conséquences qu'il faut aussi assumer en termes d'emplacement. Or, le site de Battelle est intéressant, stratégiquement, la proximité des lignes de tram étant une raison supplémentaire de l'acquérir, dans la mesure où les étudiants viennent également de l'extérieur.

A la question sur la date d'acquisition de ces terrains, M. Dufey précise que les terrains ont été acquis par Battelle en 1953, non pas à l'Etat mais à une société immobilière de [Granges Collons], société privée puisqu'elle était représentée par un avocat. Le montant de la transaction était de 230'000 F pour 88'600 m2, ce qui représente 2.60 F le mètre carré. En outre, les terrains propriété de l'Etat sur le chemin Vert ont été acquis par l'Etat à Battelle en 1992, qui les avait elle-même achetés à l'Hospice général en 1974. Il précise aussi le prix d'achat par l'Etat des anciens terrains de l'Hospice général, 320 F, le mètre carré, soit avant l'adoption du PLQ, sur la base d'un prix de terrain villas.

Un commissaire soulève la question des opposions à un PLQ en force, quand bien même toutes les conditions légales à la construction sont remplies et qui, ainsi, empêchent toute réalisation. Il craint donc que l'Etat achète des terrains à bâtir pour en faire un parc public à Carouge et il n'est pas certain que ce soit le prix à payer.

En réponse à la question, M. Moutinot reconnaît que les craintes se sont en partie justifiées mais le DAEL a déjà franchi toute une série de difficultés en ce qui concerne Battelle. Par ailleurs, il est conscient qu'il peut y avoir de nouvelles difficultés mais l'autre solution qui consisterait à acheter des objets clés en main aurait un autre inconvénient au niveau de la différence de prix. Par conséquent, on peut certes admettre un risque mais il est minimal et choisi en fonction des terrains disponibles.

La question sur l'opportunité de construire 100 % de logement social sur ce site est soulevée par un des commissaires estimant le choix pourrait ne pas correspondre aux besoins de l'évolution économique à Genève. En effet, pour ce commissaire, on ne peut pas, d'un côté, accueillir des entreprises avec des fortes valeurs ajoutées et qui ont besoin de personnel plutôt qualifié et, de l'autre, ne construire que des logements sociaux, ces divergences doivent donc être levées au nom de l'équilibre. A la suite de cette intervention, le commissaire, au nom du groupe libéral, demande que soit revue la formulation de l'exposé des motifs puisqu'il y figure : « ...et d'autre part à des coopératives d'habitation en droit de superficie pour la construction de logements de catégorie HBM et HM ».

S'agissant de la question de l'équilibre, M. Moutinot, est d'accord à la différence près que tout le monde ne voit pas les choses de la même manière mais chacun est d'accord sur le principe. S'agissant du périmètre considéré, l'immeuble de la CIA n'est pas subventionné et dans la partie que l'Etat souhaite acquérir, il est indiqué dans l'exposé des motifs, moitié « coopératives », moitié HBM. Or, la moitié « coopératives » ne signifie pas « subventionné » pour toutes les coopératives. M. Moutinot confirme donc que le département s'en tient à la règle 2/3 et 1/3 et non pas à la totalité en subventionné. Si l'opération est réalisée dans sa totalité, cette proportion sera respectée et par conséquent, une partie des coopératives sera en loyer libre. Par contre, si Battelle conserve des immeubles, sa partie sera en loyer libre et le département recadrera le périmètre pour que la proportion globale soit à nouveau respectée.

Le groupe libéral, tout en reconnaissant que le président du DAEL tient au respect du pourcentage deux tiers / un tiers, logements HBM / logements « libres » sur le périmètre en question considère que sa réflexion ne porte que sur une parcelle et elle omet de tenir compte du périmètre élargi où ce pourcentage est largement dépassé. Il souhaiterait aussi que l'on tienne compte du fait que la Ville de Carouge risque de se trouver face à une concentration de logements subventionnés, aboutissant à une forme de paupérisation du territoire communal, voire de création de ghetto social entraînant un déséquilibre sociologique indésirable. Raison pour laquelle ces commissaires s'interrogent s'il ne serait pas possible de transformer un des bâtiments prévus sur le site de Battelle en logements « libres ».

En réponse, le Conseil d'Etat précise les points suivants :

Par ailleurs, le département estime que la remarque concernant la répartition des HBM s'adresse davantage à la commune de Vernier qui se plaint amèrement d'avoir accueilli un nombre excessif de logements subventionnés, notamment des HBM, mais il n'a pas le sentiment que la Ville de Carouge soit parmi les communes les plus défavorisées. Cela étant dit, il ne faut pas tout assimiler à des logements HBM dès l'instant où il est indiqué que l'Etat construira des logements sociaux. Les logements HLM, notamment, s'adressent à une catégorie de citoyens qui ne sont pas parmi les plus démunis et qui, au plan fiscal, ne sont pas sans intérêt. Quant à savoir si un des immeubles sur la parcelle de Battelle pourrait passer en logements « libres », il lui paraît difficile de s'écarter du but poursuivi par le Conseil d'Etat.

Quant aux commissaires de l'Alternative, ils remarquent que le nombre de logements subventionnés dans le canton n'a pas cessé de diminuer ces dernières années. La proportion se situait à 26 %, dans les années 1980, et elle est descendue à 11 %. C'est cela la réalité. Par ailleurs, ils indiquent qu'il y a de plus en plus de gens qui ont des difficultés à se loger à des prix convenables et la remontée des prix des logements est très nette au regard de l'évolution du coût de la vie. Au fond, c'est cette vision de la société qui veut que Carouge soit réservée à une élite qui aurait un bon revenu mais qui payerait très peu d'impôt qui, pour certains commissaires, est gênante. En effet, les gens qui habitent des logements subventionnés n'ont pas tous des problèmes sociaux et ont le droit de vivre dans ce canton.

Abordant la question des autorisations de construire, certains commissaires, tout en comprenant la volonté du président du département de maintenir la proportion deux tiers / un tiers, estiment qu'il aurait aussi intérêt à la réduire quelque peu pour aller à la rencontre des autorités carougeoises, compte tenu de la lutte qu'il faudra mener pour les autorisations de construire.

Certains commissaires du groupe libéral sont convaincus que la loi sur les proportions HBM ne correspond plus à la réalité. Raison pour laquelle, même avec la garantie du département, ils se disent opposés à ce type de répartition de constructions. Par ailleurs ils considèrent regrettable que la commission doive donner une seule réponse à plusieurs questions car, à l'évidence, dès l'instant où la commission ne peut voter qu'une seule fois si elle ne veut pas pénaliser l'Université face à la démonstration de besoins indispensables, elle ne peut que se montrer favorable à l'ensemble du projet.

D'autres commissaires de l'Alternative estiment, à contrario, que le canton doit faire face à une situation où de plus en plus de logements HLM arrivent en fin de la période de subvention et retournent dans le secteur libre, ce qui fait que la proportion de logement social à Genève ne fait que diminuer. Le grand problème n'est donc pas un manque de logements libres mais surtout de logements bon marché.

Sans autres commentaires pertinents de la part des commissaires, le président soumet au vote ce projet de loi.

Vote du projet de loi 8438

Soumise au vote,

l'entrée en matière est acceptée à l'unanimité

3 S, 3 AdG, 2 Ve, 3 L, 2 R, 2 DC

Après une relecture article par article et un vote d'ensemble, la Commission des finances s'est déclarée

d'accord avec le projet à l'unanimité

3 S, 3 AdG, 2 Ve, 3 L, 2 R, 2 DC

Au vu de l'exposé qui précède, la Commission des finances vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ce rapport et de voter le présent crédit permettant l'achat de bâtiments et de terrains propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge.

Projet de loi(8438)

en vue de l'achat de bâtiments et de terrains propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Crédit d'investissement

1 Un crédit d'investissement de 92 835 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition des immeubles et terrains y afférents propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge.

2 Il se décompose de la manière suivante :

Art. 2 Budget et compte d'investissement

1 Ce crédit est réparti dès 2001 en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement sous les rubriques 54.04.00.500.09 et 54.04.00.503.09.

2 La dépense sera comptabilisée en 2001 en une tranche unique sous la rubrique 54.04.00.503.09.

3  Ce montant se décompose de la manière suivante :

Art. 3 Subvention fédérale

Une subvention fédérale est prévue. Elle est estimée à 30 % de la valeur des bâtiments existants pour l'Université et à 33 % pour les HES dans les limites des montants subventionnables.

Art. 4 Financement et couverture des charges financières

1 Le financement de ce crédit (déduction faite de la subvention fédérale) est assuré, au besoin, par le recours à l'emprunt, dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

2 En complément à l'autorisation d'emprunt figurant au chapitre V à l'article 13 de la loi du 15 décembre 2000 établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'année 2001, le Conseil d'Etat est autorisé à emprunter en 2001 la somme de 62 835 000 F relative à la part du crédit susmentionné non couverte par la loi budgétaire 2001.

Art. 5 Amortissement

L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur d'acquisition (ou initiale) selon la méthode linéaire et est porté au compte de fonctionnement.

Art. 6 Autorisation d'emprunt

Le Conseil d'Etat est autorisé à contracter des emprunts, au nom de l'Etat de Genève, pour une somme pouvant atteindre 19 165 000 F, aux conditions du marché les plus avantageuses.

Art. 7 Inscription au patrimoine financier

Ces emprunts sont destinés au financement de l'achat d'autres terrains propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge, à inscrire comme réserve au patrimoine financier.

Art. 8 Autorisation d'emprunt

Le Conseil d'Etat est autorisé à contracter des emprunts, au nom de l'Etat de Genève, pour une somme pouvant atteindre 8 000 000 F, aux conditions du marché les plus avantageuses.

Art. 9 Inscription au patrimoine financier

Ces emprunts sont destinés au financement des frais d'études, travaux d'infrastructures et frais divers, à inscrire au patrimoine financier.

Art. 10 Moins-value sur les frais d'études, travaux d'infrastructures et frais divers

1 La cession de tout ou partie des frais d'études, travaux d'infrastructures et frais divers donne lieu à une moins-value comptable au maximum de 8 000 000 F résultant de la différence entre la valeur comptable et de cession.

2 Cette moins-value sera inscrite en tant que charge, au compte de fonctionnement.

Art. 11 Intérêts et frais d'emprunts

Le complément d'emprunt mentionné sous titre I, article 4, alinéa 2, ainsi que les lois d'emprunts mentionnées sous titre II, articles 6 et 8, généreront un montant global supplémentaire d'intérêts et de frais d'emprunts estimé à 2 700 000 F pour le budget 2001.

Art. 12 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.

battelleplan12345678910111213annexe I

annexe II

annexe III

Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. En quelques mots, je rappellerai que ce projet concerne un investissement de 120 millions, pour des terrains où 35 000 m2 de plancher environ seront affectés à des logements, et 39 000 m2 à l'activité de l'université. Cet achat représentera une économie pour notre République de 3 750 000 F environ, qui sont actuellement affectés aux locations de nombreux bâtiments. La conseillère d'Etat présidente du DIP a, de plus, relevé l'urgence qu'il y avait pour l'université de disposer de locaux supplémentaires. Cela étant, certains commissaires ont souligné le manque de vision d'ensemble dans ces types de projets et ont souhaité que par la suite, quand il s'agira d'investir pour l'achat de bâtiments, un plan d'ensemble nous soit présenté.

L'affectation aux logements a donné lieu à un débat que l'on peut considérer comme intéressant, où l'on a vu deux positions s'affronter. D'une part, celle des tenants du logement social, pour qui le déficit actuel de logements sociaux à Genève fait que ces parcelles doivent être affectées en priorité à ce type de logement. D'autre part, la position de ceux pour qui le développement économique de Genève, l'arrivée de certaines multinationales et autres sociétés a entraîné aussi un déficit de logements en loyer libre, ce qui justifierait que l'Etat sursoie au rapport habituel 2/3-1/3 entre ces deux types de logements.

Des commissaires ont fait des remarques concernant une possible densification sociale de ce périmètre et ont plaidé pour une certaine mixité. Là-dessus aussi, la majorité de la commission a passé outre pour les raisons que je viens d'évoquer, à savoir le déficit de logements sociaux.

Quant au reste, l'unanimité de la commission s'est faite parce que ceux qui n'étaient pas favorables aux logements sociaux étaient en revanche favorables aux locaux pour l'université et que, le projet se votant en un bloc, ils ont dû se résoudre à l'accepter, tout en demandant au rapporteur de souligner cette lacune, à savoir le fait qu'il n'y ait pas eu un vote pour chaque affectation.

M. Pierre Ducrest (L). Ce projet présente deux volets, l'un bon, l'autre moins bon. Comme chaque fois où l'on nous propose un projet comptant deux parties, il faut faire la pesée d'intérêts entre les deux pour arriver à une solution. Ici, la partie bonne est celle qui a trait aux terrains nécessaires à l'université et aux HES, dont d'aucuns savent ici que le besoin n'est plus à prouver et que leur achat est correct. La deuxième partie, par contre, est non seulement moins bonne, mais est empreinte d'un flou qui n'a pas été levé en commission des finances, loin s'en faut.

Nous avons bien entendu posé différentes questions au département de l'aménagement et du logement. Certaines réponses ont été données, mais il faut bien admettre qu'elles n'étaient pas péremptoires. C'étaient plutôt des conditionnels et on sait qu'en politique les conditionnels sont dangereux, parce qu'avec eux on aboutit souvent à une solution totalement contraire à celle que l'on croyait juste. J'en veux pour preuve certaines questions qui ont été posées - Monsieur le rapporteur, vous les avez relevées - concernant la densification des terrains, la typologie des bâtiments qui pourraient être construits sur cette parcelle hormis les locaux de l'université, ou encore la problématique des transports et de la circulation.

Si ce projet avait été présenté il y a deux ans, nous n'aurions peut-être pas eu la même réaction qu'aujourd'hui, où certaines choses nous paraissent étranges, voire difficiles à admettre. En effet, il y a deux ans, il n'y avait pas encore certains projets qui sont pendants devant les commission d'aménagement et LCI en vertu de la loi contraignante qui prévoit de faire du logement social dans des proportions que je qualifierai d'assez importantes, soit 2/3-1/3. Par ailleurs, je rappelle que ces velléités d'achat de terrains ne tiennent pas compte des efforts des communes dans lesquelles elles sont prévues.

En l'occurrence, ce projet-ci intéresse la commune de Carouge qui a déjà beaucoup fait au niveau du logement social. Je ne veux pas rappeler ici cet effort, je l'ai fait en commission, mais il est important et il dure toujours. Carouge s'est inquiétée de ce projet et son Conseil municipal - vous l'avez indiqué dans votre rapport, Monsieur le rapporteur - a, le 14 novembre dernier, voté une délibération et interpellé le département pour lui demander des explications concernant l'avenir de cette parcelle. Le département, par la voix de son président, a essayé de nous rassurer en commission des finances, en disant qu'il avait pris langue avec la commune pour résoudre, si tant est qu'il puisse le faire, les problèmes de la circulation nouvelle engendrée par les velléités de construction sur cette parcelle et les autres problèmes sociaux, économiques, qui risquent de changer totalement l'aspect conjoncturel, l'aspect social de cet endroit... (Commentaires.) ...et peut-être politique, Monsieur Spielmann! C'est ce qui vous intéresse d'ailleurs, mais de cela je n'en ferai pas cas!

Puis, voici quarante-huit heures, le Conseil municipal de Carouge a voté une motion à l'unanimité, tous partis confondus - l'Alliance de gauche dont vous faites partie, Monsieur Spielmann, et tous les autres partis - pour dire qu'il n'avait pas confiance et qu'il convenait de demander au département de l'aménagement et du logement quelque chose de plus tangible. Ceci prouve bien, Mesdames et Messieurs les députés, qu'en commission nous n'avons pas eu des réponses claires et que des questions se posent, tant au niveau cantonal qu'au niveau communal.

Je n'irai pas plus loin. Je vous rappellerai simplement que ce type de projet prévaut pour environ neuf communes, qui sont plutôt des communes suburbaines, et que la préoccupation carougeoise à propos de ce projet-ci risque de déborder ailleurs dans notre canton.

Nous voterons donc ce projet, parce que, comme je l'ai dit, il comporte une partie bonne et une autre mauvaise, ou moins bonne, et que nous sommes un peu coincés. Mais nous tenons à dire solennellement, Monsieur le président Moutinot, qu'il faut savoir mettre de l'eau dans son vin et tenir compte des desiderata d'une partie de la population, d'une commune, d'un conseil municipal qui à l'unanimité, voici quarante-huit heures, a voté une motion qui vous est adressée.

M. Pierre Marti (PDC). Je me permets de prendre la parole, parce que j'ai reçu ce matin même une lettre de l'Association des habitants du quartier de la Tambourine, soit le quartier qui jouxte la parcelle Battelle. Cette lettre accompagne une pétition adressée à la commune de Carouge et au Grand Conseil et je me permets de la lire. Elle n'est pas longue et expose l'avis de la plus grande partie des gens de la région.

«Les habitants de Genève sont aujourd'hui de toute évidence sensibles à leur cadre de vie et ils n'ignorent plus cet élément lorsqu'on envisage une nouvelle urbanisation. Ce respect de l'environnement, lorsqu'il implique une densité moindre des immeubles en projet, diminue, il est vrai, la rentabilité escomptée. En revanche, un bon cadre de vie protège un quartier d'éventuelles dérives ainsi que des problèmes qui peuvent en découler : délinquance, déprédations, etc. C'est un gain à long terme, si l'on envisage l'ensemble du coût social lié à l'urbanisation.

»Notre association (des habitants du quartier de la Tambourine) est porteuse à son échelle d'un débat démocratique et public, que nous souhaitons voir se poursuivre au sein des autorités cantonales avec le soutien de notre commune (Carouge). Le fait que nous ayons réuni, en une semaine, près de 1000 signatures, exprime la claire volonté des pétitionnaires que les erreurs du passé en matière de concentration d'immeubles ne se reproduisent pas. Ce qui a fortement sensibilisé la population, c'est le fait que les prévisions pour notre quartier n'aient pas tenu compte d'un vrai cadre de vie à l'échelle humaine - densité et hauteur des constructions par exemple - et qu'un parc intégré pour enfants n'a même pas été prévu pour huit ou neuf immeubles (c'est ce qui existe actuellement).

»Nous tenons à souligner que les signataires proviennent d'horizons sociaux divers. Nous abordons donc, par le biais de cette pétition, un problème de fond, qui est celui d'une éthique de l'urbanisation (qui va au-delà des clivages politiques, Monsieur Spielmann!) Nous souhaitons conserver à ce quartier son caractère de transition entre la ville et un grand ensemble de villas, obtenir un parc pour enfants qui représente un centre de vie pour la future cité, voire diminuer le nombre des immeubles prévus et que leur hauteur ne soit pas supérieure à celle des cinq bâtiments déjà construits. La zone dans laquelle nous habitons est déjà surdensifiée par rapport au plan initial. Nous souhaitons pouvoir vivre dans un quartier harmonieux et développé de façon cohérente par rapport au projet du périmètre Battelle dans son ensemble.

»L'association que nous avons tout récemment créée a pour but de développer une dynamique de quartier et manifestations diverses. Elle symbolise le plaisir que nous avons à vivre à Carouge et à nous y intégrer. Nous ne sommes de toute évidence pas opposés à la construction de logements à caractère social, nous en sommes d'ailleurs les premiers bénéficiaires. Nous sommes conscients de la crise à laquelle est actuellement confrontée notre ville, mais désirons simplement conserver au quartier sa dimension humaine.»

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, il me semblait important de lire ce courrier.

Mme Mariane Grobet-Wellner (S). Le groupe socialiste soutient évidemment cet excellent projet, voté, je le rappelle, à l'unanimité en commission des finances. Il répond au besoin de locaux supplémentaires de l'Uni et permettra l'acquisition de terrains sur lesquels il sera possible de réaliser quelque 35 380 m2 de surface de logement dont la population a besoin, soit environ 330 logements. Toutefois, nous tenons à ce que les proportions énoncées par M. Moutinot soient respectées sur la totalité de cette parcelle. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, il vous a été distribué une proposition d'amendement, que M. Dominique Hausser va développer tout à l'heure, qui vise à inscrire cette proportion de 2/3-1/3 dans la loi.

M. Georges Krebs (Ve). Sur le principe de l'achat de cette parcelle, nous sommes tout à fait d'accord, tant les besoins en logements et en locaux pour l'université sont avérés. En ce qui concerne le pourcentage des logements sociaux, 2/3-1/3 est une proportion tout à fait acceptable, d'autant que les logements sociaux qui vont être construits le seront dans une commune qui a peu de logements sociaux. Une répartition équitable est souhaitable, si l'on pense, par exemple, à la commune de Vernier, qui abrite les deux tiers du parc des logements sociaux.

En revanche, en ce qui concerne l'aménagement, le plan localisé de quartier est à revoir absolument. Il doit l'être en tenant compte de l'avis des habitants, de l'impact sur l'environnement, sur le trafic. Ce plan d'aménagement doit aussi tenir compte des besoins sociaux, comme l'ont déjà évoqué mes préopinants. Nous sommes donc d'accord sur le principe de l'achat de la parcelle, mais avec des réserves en ce qui concerne la densification et l'impact sur l'environnement.

M. Bernard Clerc (AdG). Notre groupe soutient ce projet de loi, qui comporte effectivement deux volets. Le premier est relatif aux besoins de l'université, des HES, de l'enseignement en général; ces besoins ne sont pas contestés, compte tenu des rapports qui nous ont été faits sur les prospectives en matière de locaux destinés à l'enseignement.

Ici, j'aimerais relever le fait que le propriétaire actuel de ces parcelles, à savoir la Fondation Battelle, bénéficie, depuis son installation à Genève, d'exonération fiscale et que, si les prix d'achat sont «conformes», entre guillemets, au marché, il faut constater que cette fondation va réaliser une plus-value non négligeable par rapport aux investissements qu'elle a réalisés.

L'autre volet du projet, dont M. Ducrest nous dit que c'est la partie mauvaise, concerne les logements. Pour nous, la construction de logements sociaux est une priorité, pour la simple et bonne raison que, depuis une quinzaine d'années, le pourcentage de logements subventionnés dans notre canton n'a pas cessé de diminuer. Il était de plus du quart au début des années 80, il est aujourd'hui de 11% par rapport au total des logements existants. Notre priorité est donc la construction de logements sociaux, et non la construction d'appartements ou de villas pour une population aisée, qui a largement les moyens d'acquérir ces biens à d'autres endroits dans le canton. Je rappelle que la zone villa représente 50% des zones constructibles du canton et qu'elle abrite un peu plus de 10% de la population : ces chiffres montrent bien où nous devons mettre la priorité.

En l'occurrence, le chef du département nous a communiqué une réponse écrite sur ce que le Conseil d'Etat prévoyait sur la partie destinée au logement, à savoir deux tiers de logements sociaux. Mais comme les voeux du Conseil d'Etat peuvent changer suivant les circonstances, puisqu'il n'y a aucune contrainte législative concernant cette proportion, il nous semble effectivement judicieux, tel que le propose l'amendement de M. Hausser, d'inscrire cet élément dans la loi.

Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, la position de l'Alliance de gauche sur cette question. Nous voterons donc le projet de loi avec l'amendement déposé par M. Dominique Hausser.

M. Bernard Lescaze (R). Ce projet est en effet important, tant pour l'université que pour la capacité de l'Etat à mettre à disposition un certain nombre de terrains à bâtir. Le groupe radical est donc favorable d'emblée à l'acquisition des terrains de Battelle.

Il tient toutefois à dire qu'il regrette un peu la politique au coup par coup qui semble présider à l'aménagement des bâtiments existants pour l'université et les HES - la HES-SO pour l'instant et peut-être, plus tard, certains bâtiments pour la HES-S2. En effet, l'université dispose - suite à l'échange avec l'Etat de la propriété de Varembé dite campagne Rigot - d'un vaste terrain à proximité immédiate de Battelle, sur Pinchat. Il est regrettable que l'université considère pour l'instant ce terrain comme une simple réserve foncière, alors même, comme l'ont dit plusieurs préopinants, qu'elle nous a présenté des rapports faisant état d'une grande pénurie de locaux. A cet égard, il faudra qu'on sache rapidement à quoi s'en tenir, avant que l'université ne développe d'autres projets de construction en ville.

En ce qui concerne les logements, nous ne sommes pas opposés - même si nous regrettons que ce soit inscrit dans la loi - à une affectation à du logement social pour les deux tiers, étant entendu que le chef du département a bien précisé qu'il y aurait un équilibre entre les différentes formes de logement social, et qu'il s'agit au surplus d'un terrain acquis par l'Etat. L'Etat devenant propriétaire, il nous paraît normal qu'il décide l'affectation et la proportion entre les types de logements, d'autant que la commune de Carouge bénéficiera, ou du moins ses habitants, d'un petit parc situé à proximité immédiate du Rondeau.

En revanche, même si l'on peut faire des réserves sur le plan localisé de quartier, il ne nous paraît pas judicieux de le remettre en question. Les terrains de Battelle figurent parmi les rares terrains presque immédiatement constructibles : refaire un plan localisé de quartier, recommencer toute la procédure de consultation, de vote, d'oppositions éventuelles des voisins, entraînerait bien des délais supplémentaires. Quoi que l'on puisse dire de ce plan localisé de quartier, nous ne pensons donc pas qu'il faille le remettre en question.

C'est pourquoi le groupe radical acceptera l'achat du terrain, s'abstiendra ou acceptera, selon les députés présents, l'adjonction proposée par le parti socialiste, et se réjouit qu'une petite partie de la pénurie de logements puisse être ainsi résorbée grâce à la construction sur ces terrains.

M. Pierre-Louis Portier (PDC). Même au risque de lasser cette assistance, j'aimerais, à l'occasion de ce débat sur l'acquisition des terrains Battelle - qu'évidemment le groupe démocrate-chrétien ne remet pas en question - insister, tout comme l'a fait notre collègue M. Marti, sur la nécessité de prendre en compte tous les problèmes, non seulement d'aménagement à l'intérieur du périmètre concerné, mais également autour dudit périmètre.

En effet, il faut savoir que non seulement le périmètre Battelle est déjà en cours de construction - on l'a dit, cinq immeubles ont déjà été construits et une école est en cours de construction - mais que le quartier de Grange-Collomb et d'autres périmètres alentour ont également vu ou verront leur population augmenter fortement. Or, vous n'ignorez pas que l'ensemble du secteur est en proie à d'énormes problèmes de circulation, particulièrement au Rondeau de Carouge, qui sont actuellement loin d'être résolus. En l'occurrence, augmenter fortement la population sans mettre à disposition les infrastructures routières et de transports publics nécessaires ne va pas dans le sens de résoudre ces problèmes...

J'aimerais également insister sur l'aspect sécurité dans le secteur. En plus de l'école de la Tambourine, qui est en construction et qui, dans un peu plus d'une année, accueillera de jeunes élèves, le cycle d'orientation de Pinchat occasionne déjà passablement de trafic piéton et à vélo de jeunes adolescents qu'il convient évidemment de protéger.

C'est pourquoi, Monsieur le président du département, je me permets de vous encourager, tout comme le font les exécutifs des communes environnantes - Carouge évidemment et depuis longtemps, mais également Troinex, Bardonnex et Veyrier - à mettre vos services devant une planche à dessin pour nous faire des propositions. Il est indispensable de reprendre ce problème à la base, c'est de notre responsabilité!

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Je tiens à souligner que ce qui concerne le PLQ a été mis en exergue en page 13 du rapport, et notamment l'intervention du département.

Cela dit, je rappellerai à M. Ducrest que, dans le temps, vivait au centre de Carouge une classe laborieuse, ouvrière, socialement défavorisée. Ensuite, lors des années de spéculation, cette classe a dû quitter le centre de Carouge pour s'installer ailleurs. Il est donc logique qu'aujourd'hui on la favorise. Mais, Monsieur Ducrest, il ne tient qu'à vous que cette classe défavorisée rejoigne une classe un peu mieux nantie! Le dernier rapport de l'Hospice général montre que les salaires sont de plus en plus bas et que les gens ont de plus en plus de difficulté à payer leur loyer : c'est la raison pour laquelle, malheureusement, l'Etat doit construire des logements sociaux. Mais il ne tient qu'à vous de payer un peu mieux les gens afin que l'Etat puisse se désengager dans ce domaine et que ces gens puissent rejoindre les classes plus favorisées... Cela ne tient qu'à vous et au groupe libéral !

M. Dominique Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, plusieurs d'entre vous l'ont dit, est intéressant, s'agissant de l'acquisition de parcelles concernant l'université et les HES. Genève se donne ainsi les moyens de continuer à offrir une formation de qualité.

La deuxième partie du projet concerne la construction d'un certain nombre de logements. Notre canton - qui, je vous le rappelle, fait 282 km2 - s'est doté d'un plan d'aménagement du territoire qui implique de définir les zones dans lesquelles on va implanter des activités économiques, industrielles, de commerce, artisanales, de formation, de loisirs, mais aussi bien sûr des logements. En 1975, Genève comptait un peu plus de 300 000 habitants et 40 000 logements sociaux. En 2000, il compte 410 000 habitants et 15 000 logements sociaux grosso modo. L'ensemble de ce parlement ne peut donc qu'être favorable au développement des logements sociaux, car il est évident que leur nombre devrait suivre une population en croissance. Même si la situation économique, malgré dix ans de crise, n'est pas aussi dramatique qu'elle peut l'être dans d'autres régions du monde, il est évident qu'il y aura toujours besoin de logements à destination de familles dont la situation financière est un peu difficile.

Le projet qu'on nous propose ici est clair et suit la logique que le gouvernement a défendue depuis le début de cette législature, consistant à réaliser, dans les différents périmètres, des logements sociaux et des logements en loyer libre dans une proportion de 2/3-1/3. Le 26 mars dernier, le conseiller d'Etat Moutinot, au nom du Conseil d'Etat, répondait en commission des finances, suite à l'interpellation d'un député lors du débat sur ce sujet. Il disait très clairement : «Le PLQ 28568-A, dans le périmètre duquel sont situés les terrains de Battelle que l'Etat souhaite acquérir, permet la construction de 547 logements selon les autorisations de construire délivrées. A l'heure actuelle, 224 logements sont déjà construits, soit 80 logements sans prestation de l'Etat et 144 logements subventionnés. Il reste par conséquent 323 logements à construire, correspondant aux droits à bâtir encore détenus par Battelle...» - droits dont l'achat est compris dans le projet de loi qui nous est soumis. M. Moutinot précisait ensuite : «...soit Battelle conserve les droits à bâtir concernant 120 logements, et ceux-ci seront réalisés en version dite PPE. Il restera pour l'Etat 203 logements, qui seront construits, par une fondation HBM et des coopératives, en version subventionnée, ce qui représente un rapport de 2/3-1/3 de logements sociaux, versus non sociaux ou en loyer libre, sur l'ensemble du périmètre concerné. Si l'Etat acquiert la totalité, il s'engage à transmettre les droits à bâtir à un investisseur qui souhaite les acquérir, de manière à réaliser du loyer libre.»

C'est la raison pour laquelle nous vous proposons, au vu d'un certain nombre de tensions que nous avons senties lors des débats en commission et ici ce soir, un nouvel article 7A Affectation, qui précise : «Deux tiers du périmètre du plan localisé de quartier 28566-A sont affectés à la réalisation de logements sociaux». Ceci a l'avantage d'inscrire dans la loi la volonté du Conseil d'Etat et celle, par ailleurs, du parti socialiste et de ceux qui soutiendront notre amendement.

M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais revenir sur le type de logement à réaliser sur les terrains de l'Institut Battelle. Monsieur Ducrest, je ne m'étonne pas qu'en tant que libéral vous ne souhaitiez pas que l'on réalise la catégorie de logements dont la population a le plus besoin. En revanche, je m'étonne qu'en tant que Carougeois, qu'en tant qu'élu d'une commune dont la Fondation HLM a initié des réalisations remarquables, vous décriiez aujourd'hui ce type de logements. Ceux-ci étaient, il n'y a pas si longtemps, une fierté pour votre commune, une fierté sur tous les bancs, si ce n'est peut-être les libéraux... Je me souviens en tout cas d'un ancien conseiller d'Etat radical qui vantait les mérites de la Fondation HLM de la Ville de Carouge.

Cela dit, pour nous, il est clair que l'Etat doit maîtriser des terrains, précisément pour réaliser les logements sociaux dont la population a besoin. Nous nous félicitons donc que l'Etat ait engagé des pourparlers dans ce sens avec l'Institut Battelle, étant entendu que, ces terrains étant en zone de développement, l'Etat dispose d'un droit de préemption. Nous avons par ailleurs noté que l'Etat n'acquerrait peut-être pas la totalité de ce domaine : le rapport évoque cette hypothèse, on semble revenir là-dessus ce soir... En ce qui nous concerne, nous le regretterions vivement : nous pensons que l'Etat devrait maîtriser la totalité des terrains en cause, ce qui lui permettrait de répartir les droits à bâtir. Cela nous paraîtrait d'autant plus normal que ces terrains ont bénéficié d'un changement de zone au profit de l'Institut Battelle, ce qui a donné auxdits terrains achetés très bon marché une plus-value extraordinaire. D'autre part, l'Institut Battelle a bénéficié d'exonérations fiscales et il paraît normal qu'après les bénéfices qu'elle a retirés sur le plan foncier l'Etat reprenne la main sur ces terrains qui n'intéressent plus Battelle.

A ce sujet, je rappellerai qu'au moment où le plan localisé de quartier a été élaboré, au début des années 90, une pression extraordinaire a été exercée par l'Institut Battelle, relayée par certains conseillers d'Etat. Je ne sais pas si c'est cela qu'évoquait récemment la «Tribune de Genève» dans un de ses articles, mais il est vrai que de très fortes pressions ont été exercées par le prédécesseur de M. Lamprecht pour qu'on satisfasse les revendications de l'Institut Battelle, dont on laissait entendre qu'il allait construire, se développer sur place. Il fallait éviter que l'Institut Battelle quitte Genève, mais aujourd'hui, ce qui était à craindre s'est réalisé, à savoir que c'était une pure opération de valorisation des terrains en vue de son départ de Genève.

Cela a été également le cas du plan localisé de quartier du Grand-Pré, qui a été modifié au profit de Landis et Gyr, pour lui permettre soi-disant de faire des bureaux : il avait été affirmé devant le Conseil municipal de la Ville de Genève que Landis et Gyr voulait étendre ses activités! En fait, on constate que des entreprises ferment, mettent tous les employés à la porte, simplement pour faire une affaire immobilière. Ce n'est pas acceptable et nous ne devons pas prêter la main à de telles opérations. C'est la raison pour laquelle j'espère que le Conseil d'Etat fera en sorte de maîtriser, concrètement, l'ensemble des terrains.

Deuxième observation concernant la politique des transports. Lorsque ce plan localisé de quartier a été mis au point - après de longues discussions, du reste, avec la commune de Carouge qui, sauf erreur, était d'accord à l'époque - il n'était pas question d'élargir le réseau routier. En l'occurrence, j'espère, contrairement à ce que souhaite M. Portier, que ce ne sera pas le cas, parce que plus on va élargir les routes, plus on va encourager les déplacements en voitures, plus les problèmes de circulation vont s'aggraver en ville et plus le climat va se détériorer. On ne peut pas à la fois déplorer, à juste titre, que le président Bush foule aux pieds le protocole de Kyoto et continuer, à Genève, de mener une politique encourageant le transport automobile.

Ces parcelles sont extrêmement bien situées, à proximité immédiate d'une des principales lignes de transport public du canton, soit la ligne de tram 12. Par voie de conséquence, il faut effectivement rendre le réseau des transports publics plus efficace, mais il ne faut en aucun cas inciter davantage de personnes à prendre la voiture en élargissant les routes, ce qui provoque précisément l'insécurité sur les voies de circulation du secteur.

M. Pierre Ducrest (L). Il est très facile de faire des comparaisons de chiffres et de pourcentages. Monsieur Clerc, vous avez rappelé que les logements subventionnés diminuaient en pourcentage dans ce canton. Certes! Mais est-ce que cela signifie que les loyers, dans les bâtiments qui se retrouvent en loyer libre, ont augmenté de telle manière que ces logements ne sont accessibles qu'aux gens ayant des revenus supérieurs à ceux de la catégorie que vous défendez ? Evidemment non, tout ceci est faux!

M. Grobet m'a cité tout à l'heure en parlant de Carouge, s'étonnant que j'oublie que les lois Dupont avaient permis de réaliser les Tours de Carouge. A cet égard, j'aimerais vous rappeler une chose, Monsieur Grobet : la Fondation HLM de Carouge, fin 2000, a réalisé un état locatif de 12 800 000 F et il n'y a pas un logement de cette fondation qui soit un logement de prestige! Ce sont tous des logements dont les loyers répondent aux besoins prépondérants de la population, voire sont plus bas. Ce qui veut dire qu'on devrait en tenir compte dans les pourcentages et les statistiques concernant les logements subventionnés. A Carouge, Monsieur Grobet, hormis les cinq tours, plus une qui est passée du régime HCM au loyer libre, il y a les Allobroges, Montfalcon, la rue Vautier dans le Vieux-Carouge... Vous citiez d'ailleurs le Vieux-Carouge : la Fondation HLM de Carouge vient d'acquérir un immeuble rue du Pont-Neuf pour faire aussi du logement à loyers bas.

D'autre part, il y a d'autres sociétés à Carouge, comme la Carougeoise qui s'occupe aussi de bâtiments dont les loyers sont fort bon marché. Pour revenir à la Fondation HLM, elle possède des bâtiments à la rue des Moraines et elle a dernièrement réalisé des logements à la rue Daniel-Gevril, dont le pourcentage est de 2/3 de logements sociaux et 1/3 de logements en loyer libre. Donc, ce que je voudrais exprimer par là, c'est que certaines communes font déjà l'effort de respecter ce pourcentage ou de s'en approcher. En imposant ce pourcentage d'une manière ponctuelle sur une parcelle, vous allez créer un déficit fiscal, un déséquilibre fiscal, et ceux qui vont payer ce déséquilibre, c'est l'ensemble des citoyens de ce canton. Il vaudrait mieux définir, dans chaque commune, ce qui a été fait et utiliser le pourcentage qui reste, si vous voulez accomplir ce qui vous tient à coeur. Vous verriez qu'ainsi vous n'auriez pas de problème parce qu'il y aurait un équilibre fiscal.

Mais ce soir, la doctrine a parlé; d'ailleurs, l'amendement proposé par M. Hausser le prouve. Monsieur Hausser, vous l'avez déjà fait pour la halle 6 : vous savez que vous avez gagné d'avance et que nous allons voter ce projet parce que nous ne pouvons pas faire autrement. Votre amendement passera parce que vous avez la majorité, cet amendement qui consiste à inscrire la proportion 2/3-1/3 et qui est la porte ouverte au point 35 de l'ordre du jour qui sera débattu tout à l'heure !

M. Claude Blanc (PDC). Nous venons d'entendre beaucoup de bonnes déclarations d'intention sur la nécessité de construire des logements et si possible des logements sociaux, ainsi que sur la nécessité d'acquérir des terrains à cet effet. Je constate quant à moi, et je l'ai dit en commission des finances, qu'entre dire qu'on va construire des logements, fabriquer des lois pour construire des logements, et construire réellement ces logements, il y a un pas, que dis-je, un fossé que l'Etat n'a pas beaucoup de facilité à franchir. M. Moutinot le sait mieux que personne - et ses prédécesseurs aussi, Monsieur Grobet! - entre vouloir et pouvoir il y a un ravin, un fossé, parce qu'à force de contraindre on finit par provoquer la réaction.

A cet égard, en commission des finances, j'avais même posé une condition, mais je sais qu'elle est irréaliste et j'ai fini par l'abandonner : j'aurais aimé être assuré que, sur ces terrains que nous allons acquérir pour l'université - qui nous a démontré ses besoins - et pour construire du logement, nous allions réellement pouvoir construire du logement. En effet, comme cela a été dit par plusieurs orateurs, il y a sur ces parcelles un bel enchevêtrement d'oppositions, de recours possibles, de tergiversations administrative et autres. Il y a même une villa dont je m'étonne qu'on n'ait pas encore demandé le classement, mais enfin cela pourrait venir : après que l'Etat aura acquis ces terrains, peut-être qu'Action Patrimoine vivant demandera le classement de la villa, ce qui augmentera le prix du mètre carré disponible... Bref, j'avais demandé à la commission des finances que l'on conditionne l'achat des parcelles destinées au logement à l'obtention des autorisations de construire en force, c'est-à-dire après épuisement de tous les recours possibles. M. Moutinot m'a évidemment fait comprendre que je demandais la lune. Alors, admettons que je demande la lune, mais j'ai peur, je vous le dis franchement, que nous acquérions des terrains à 120 F le m2 pour offrir un parc public supplémentaire à la Ville de Carouge qui n'en demande pas tant - encore que, le temps qu'on construise quelque chose, les arbres qu'on y aura plantés auront le temps de devenir bien vieux!

En l'état, nous voterons ce projet, mais je ne me fais pas beaucoup d'illusions sur les réelles possibilités que nous aurons de concrétiser nos bonnes intentions.

M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, comme vous l'avez relevé de manière unanime, ce projet s'inscrit dans la politique d'acquisition par l'Etat des terrains qui sont nécessaires. L'affectation de ces parcelles profitera à l'enseignement supérieur - université et HES - et elle permettra de contribuer à résoudre la pénurie de logements et de créer une zone de verdure dans la région du Rondeau de Carouge.

L'amendement de M. Hausser qui tend à fixer dans la loi le pourcentage de logement social est tout à fait normal. Il va dans le sens des assurances que j'avais données à la commission des finances et le souhait d'inscrire cette précision dans la loi me paraît légitime, étant rappelé qu'à l'origine la demande avait été faite par l'Entente que je garantisse au moins un tiers de logements libres, car elle craignait que j'affecte la totalité au logement social. Aujourd'hui, la crainte a, semble-t-il, basculé du côté de l'Alternative, qui craint qu'il n'y ait pas 2/3 de logements sociaux. Alors, tant qu'à faire, inscrivons ces chiffres dans la loi, étant rappelé que la règle des 2/3-1/3, ce n'est pas moi qui l'ai inventée, ce n'est pas M. Joye, ce n'est pas M. Grobet, c'est bien antérieur et on ne sait exactement à quand elle remonte. En revanche, j'ai entendu M. Robert Ducret, conseiller d'Etat à l'époque, justifier cette règle en disant que le pourcentage de 2/3-1/3 correspondait grosso modo au pourcentage des revenus qui, dans la population, permettent l'accès au logement social, ce qui est évidemment la seule justification possible.

Monsieur Ducrest, vous m'avez invité, de même que M. Marti, à tenir compte des réactions des voisins et des souhaits de la commune de Carouge. Comme vous le savez, un groupe de travail existe entre le département et la commune de Carouge depuis que celle-ci s'est manifestée, de manière à améliorer tout ce qui peut l'être en ce qui concerne l'aménagement et la circulation. Mais, et là je réponds clairement à M. Krebs, il n'est pas question de toucher au plan localisé de quartier. Faute de quoi, on retomberait dans les craintes de M. Blanc, à savoir que rien ne se fasse jamais. Ce plan localisé de quartier a été validé par le Tribunal fédéral sur recours, cela s'est produit d'ailleurs pendant les travaux de la commission des finances. Je suis ouvert à discuter de tout ce qui n'en fait pas partie, de toute modification mineure susceptible d'améliorer les choses; en revanche, une remise en cause de ce plan localisé de quartier est rigoureusement exclue.

Vous avez en outre, Monsieur Ducrest, fait un parallèle entre le train de déclassements en zone villa et Battelle. Permettez-moi de vous faire observer qu'il n'y a aucun rapport, parce que ce terrain est en zone de développement, et depuis longtemps. Il est d'ailleurs aussi au bénéfice, comme je le disais, d'un plan localisé de quartier.

Dans les discussions avec la commune de Carouge, il y a effectivement des aspects qui concernent directement le périmètre Battelle, d'autres qui concernent Grange-Collomb, Lancoux, le terrain de l'université, nous en sommes parfaitement conscients. Carouge, je vous en donne acte, Monsieur Ducrest, est un excellent élève en matière de logement social, mais, comme vous le savez, un excellent élève peut toujours faire mieux et je suis persuadé que Carouge participera à l'effort général que nous demandons à toutes les communes.

Mesdames et Messieurs les députés, d'une manière ou d'une autre, soit que Battelle effectivement conserve quelques droits à bâtir, soit que l'Etat les achète tous, nous nous tiendrons à la répartition de 2/3-1/3 sur l'ensemble du périmètre de ce PLQ. Alors même que sur les terrains de l'Etat, normalement, on ne devrait construire que du logement social et laisser les privés construire du logement libre, il se justifie ici, compte tenu de la taille du périmètre et pour éviter de faire un ghetto, d'appliquer la règle.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de suivre les recommandations unanimes de votre commission des finances et de voter ce projet de loi, avec l'amendement de M. Hausser.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 7.

Art. 7A (nouveau)

La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement qui vise à ajouter un article 7A nouveau :

«Art. 7A Affectation (nouveau)

Deux tiers du périmètre du plan localisé de quartier 28566-A sont affectés à la réalisation de logements sociaux.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 8 est adopté, de même que les articles 9 à 12.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(8438)

en vue de l'achat de bâtiments et de terrains propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Crédit d'investissement

1 Un crédit d'investissement de 92 835 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition des immeubles et terrains y afférents propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge.

2 Il se décompose de la manière suivante :

Art. 2 Budget et compte d'investissement

1 Ce crédit est réparti dès 2001 en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement sous les rubriques 54.04.00.500.09 et 54.04.00.503.09.

2 La dépense sera comptabilisée en 2001 en une tranche unique sous la rubrique 54.04.00.503.09.

3  Ce montant se décompose de la manière suivante :

Art. 3 Subvention fédérale

Une subvention fédérale est prévue. Elle est estimée à 30 % de la valeur des bâtiments existants pour l'Université et à 33 % pour les HES dans les limites des montants subventionnables.

Art. 4 Financement et couverture des charges financières

1 Le financement de ce crédit (déduction faite de la subvention fédérale) est assuré, au besoin, par le recours à l'emprunt, dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

2 En complément à l'autorisation d'emprunt figurant au chapitre V à l'article 13 de la loi du 15 décembre 2000 établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'année 2001, le Conseil d'Etat est autorisé à emprunter en 2001 la somme de 62 835 000 F relative à la part du crédit susmentionné non couverte par la loi budgétaire 2001.

Art. 5 Amortissement

L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur d'acquisition (ou initiale) selon la méthode linéaire et est porté au compte de fonctionnement.

Art. 6 Autorisation d'emprunt

Le Conseil d'Etat est autorisé à contracter des emprunts, au nom de l'Etat de Genève, pour une somme pouvant atteindre 19 165 000 F, aux conditions du marché les plus avantageuses.

Art. 7 Inscription au patrimoine financier

Ces emprunts sont destinés au financement de l'achat d'autres terrains propriété de Battelle Memorial Institute at Columbus à Carouge, à inscrire comme réserve au patrimoine financier.

Art. 7A Affectation

Deux tiers du périmètre du plan localisé de quartier 28566A sont affectés à la réalisation de logements sociaux.

Art. 8 Autorisation d'emprunt

Le Conseil d'Etat est autorisé à contracter des emprunts, au nom de l'Etat de Genève, pour une somme pouvant atteindre 8 000 000 F, aux conditions du marché les plus avantageuses.

Art. 9 Inscription au patrimoine financier

Ces emprunts sont destinés au financement des frais d'études, travaux d'infrastructures et frais divers, à inscrire au patrimoine financier.

Art. 10 Moins-value sur les frais d'études, travaux d'infrastructures et frais divers

1 La cession de tout ou partie des frais d'études, travaux d'infrastructures et frais divers donne lieu à une moins-value comptable au maximum de 8 000 000 F résultant de la différence entre la valeur comptable et de cession.

2 Cette moins-value sera inscrite en tant que charge, au compte de fonctionnement.

Art. 11 Intérêts et frais d'emprunts

Le complément d'emprunt mentionné sous titre I, article 4, alinéa 2, ainsi que les lois d'emprunts mentionnées sous titre II, articles 6 et 8, généreront un montant global supplémentaire d'intérêts et de frais d'emprunts estimé à 2 700 000 F pour le budget 2001.

Art. 12 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.