République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 13 avril 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 7e session - 16e séance -autres séances de la session
No 16/III
Jeudi 13 avril 2000,
nuit
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, et Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat, ainsi que MM. Nicolas Brunschwig, Régis de Battista, Hervé Dessimoz, Jean-Claude Dessuet, Bénédict Fontanet, Jean-Pierre Gardiol, Claude Haegi et Chaïm Nissim, députés.
3. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
M. Christian Brunier(S). J'annonce le dépôt de la proposition de motion suivante :
Mme Erica Deuber Ziegler(AdG). J'annonce également le dépôt d'une proposition de motion :
Je demanderai demain à 14 h qu'elle puisse être traitée en urgence au cours de la journée.
Le président. Oui, Madame. Il faudra donc que tous les députés soient saisis du texte et que vous interveniez demain au point «Discussion de l'ordre du jour».
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Le président. Nous sommes saisis de la demande d'interpellation suivante :
Cosignataires : Christine Sayegh, Mireille Gossauer-Zurcher, Christian Brunier, Françoise Schenk-Gottret, Alain Charbonnier.
Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine session.
e) de questions écrites.
Néant.
Ce projet de loi a été traité le 1er décembre 1999 par la Commission d'aménagement sous la présidence de M. Rémy Pagani en présence de M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, chef du DAEL et avec l'assistance de MM. G. Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures, J-Ch. Pauli, juriste du DAEL et G. Gardet, directeur et urbaniste cantonal.
L'une des auteurs du projet de loi rappelle en préambule son origine qui fait suite aux événements de la Grand-Cour à Troinex : en effet, la commune avait refusé d'afficher l'avis de mise à l'enquête publique d'un projet de modification de zones. Il leur a donc semblé souhaitable d'apporter des modifications à la loi d'application de la loi fédérale.
Travaux de la commission
1. Audition de l'Association des communes genevoises : MM. M. Föllmi (vice président) et M. Hug (secrétaire général)
M. .
Concernant l'art. 15A, al. 5, la mise au point d'un avant-projet de loi émanant du Grand Conseil par les seules autorités cantonales (département + « auteurs de la motion ») prive, selon elle, les communes de toute collaboration en la matière. Dans ce sens, cette mesure n'apparaît pas équitable du point de vue démocratique. De plus, la seule représentativité des auteurs d'une motion prévue dans la phase de mise au point ne semble pas suffisante dans un contexte élargi tendant à une modification du régime des zones de construction.
Concernant l'art. 16, al. 1 et 2, l'ACG estime que la procédure de préconsultation actuelle exigeant l'enquête publique par voie de publication dans la Feuille d'avis officielle, l'avis aux propriétaires et l'affichage dans la commune est adéquate. Elle pense que remplacer l'obligation d'affichage de la commune par une invitation à afficher est particulièrement peu motivant et que cela affaiblit le rôle communal.
En conclusion, l'ACG se prononce donc défavorablement à l'endroit de ces deux propositions qui, à ses yeux, diminuent grandement la capacité d'expression des communes face à des projets de modifications de zones issus du Grand Conseil.
L'ACG demande expressément au Grand Conseil de s'en tenir aux dispositions actuelles. Les personnes auditionnées ajoutent que si ces propositions devaient aboutir, elles provoqueraient un effet démobilisateur auprès des autorités municipales, qui, dès lors, ne rempliraient plus à satisfaction leur rôle de relais de proximité auprès de la population. Enfin, il leur paraît disproportionné d'opérer une modification législative à partir d'un seul dossier.
2. Discussion de la commission
La commission décide d'entrer en matière sur le projet de loi par 9 avis favorables (1 R, 3 S, 2 Ve et 3 AdG) contre 3 avis contraires (L) et 1 abstention (DC).
Cependant, la commission est sensible à l'argument de l'ACG concernant l'obligation pour la commune concernée de faire connaître l'avant-projet par voie d'affichage (art. 16, al. 1). Tous les commissaires se rallient à la proposition de M. Moutinot consistant à modifier l'article 16 comme suit :
Art. 16, al. 1 : l'avant-projet de loi doit être soumis à une enquête publique de 30 jours, annoncée par voie de publication dans la FAO et d'affichage dans la commune. Des avis personnels sont envoyés par le département, sous pli recommandé, aux propriétaires des terrains compris dans le périmètre lorsque le nombre de communications individuelles n'excède pas 50.
Concernant l'al. 2 de l'art. 16, le département précise que tous les plans d'affectation et les enquêtes publiques sont publiés par ses soins quatre fois pendant 30 jours, à raison d'une fois par semaine, dans la FAO. Quant au propriétaire, il est avisé par lettre recommandée où figurent les dates de l'enquête publique.
La nouvelle formulation proposée dans le projet de loi est refusée par 5 voix contre et 9 abstentions.
On en reste donc au texte de la disposition actuelle, à savoir :
Art. 16, al. 2 : Pendant la durée de l'enquête, chacun peut prendre connaissance de l'avant-projet de loi à la mairie ou au département et adresser à ce dernier ses observations.
Art. 15A, al. 5
La question porte sur l'opportunité d'intégrer les auteurs de la motion dans la procédure de mise au point d'un projet de loi quand le Grand Conseil le demande par voie de motion.
Certains commissaires estiment que cela complique la procédure. Un autre commissaire explique sa réticence par le fait que les auteurs d'une motion ne représentent pas à eux seuls l'institution. L'institution est le Grand Conseil et la Commission de l'aménagement peut le représenter. Il conviendrait alors de donner cette compétence à la Commission d'aménagement.
Le chef du département pense qu'il est légitime d'associer les auteurs d'une motion à la démarche mais cela ne doit pas signifier qu'une commission siège en permanence pour élaborer tous les plans liés à un projet.
La formulation suivante est proposée pour l'art. 15A, al. 5 :
Lorsque le Grand Conseil le demande par voie de motion, le département met au point un avant-projet conformément à l'alinéa 2 et en liaison avec la Commission d'aménagement du canton. L'avant-projet de loi est mis à l'enquête publique sans retard.
Cette proposition est acceptée par 12 oui et 2 abstentions (L).
Le présent projet de loi ainsi amendé est accepté par 12 oui et 2 abstentions (L).
C'est pourquoi nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre les mêmes conclusions et d'accepter ce projet de loi.
Projet de loi(8073)
modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 30)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit :
Art. 15A, al. 5 Proposition du Grand Conseil (nouveau)
5 Lorsque le Grand Conseil le demande par voie de motion, le département met au point un avant-projet conformément à l'alinéa 2 et en liaison avec la commission d'aménagement du canton. L'avant-projet de loi est mis à l'enquête publique sans retard.
Art. 16, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'avant-projet de loi doit être soumis à une enquête publique de 30 jours, annoncée par voie de publication dans la Feuille d'avis officielle et d'affichage dans la commune. Des avis personnels sont envoyés par le département, sous pli recommandé, aux propriétaires des terrains compris dans le périmètre lorsque le nombre de communications individuelles n'excède pas 50.
Premier débat
M. Alain Etienne (S). Voilà ce qui arrive lorsqu'une commune fait la mauvaise tête ! En effet, il n'est pas acceptable, de notre point de vue, qu'une autorité communale refuse d'afficher l'avis de mise à l'enquête publique d'un projet de modification de zone, comme cela a été le cas pour la Grand-Cour à Troinex. Cette question a d'ailleurs été tranchée par le tribunal.
Pour un cas exceptionnel, il nous fallait modifier la loi, afin que cette situation ne se reproduise plus à l'avenir. La proposition retenue par la commission à l'article 16, alinéa 1, répond ainsi au but recherché. De plus, en ce qui concerne l'article 15A, alinéa 5, une nouvelle possibilité est donnée à notre Grand Conseil, soit la mise au point d'un avant-projet par le département en relation avec la commission d'aménagement. Cette disposition concerne uniquement des projets engagés par le Grand Conseil. L'autonomie communale n'est pas restreinte, puisque l'article 15A, alinéa2, actuel prévoit la collaboration avec la commune.
Le groupe socialiste vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à suivre les conclusions de la commission d'aménagement et à accepter ce projet de loi.
M. Christian Grobet (AdG). Le projet de loi que nous avons déposé visait à ce que les députés aient, comme c'était en fait le but de l'article actuel à l'origine, un droit d'initiative comparable à celui des communes. Ce projet de loi n'était effectivement peut-être pas rédigé de la manière adéquate et la commission de l'aménagement a cherché - ce dont nous la remercions - à améliorer le texte. Mais, à l'analyse, nous constatons que les députés n'ont finalement toujours pas un droit d'initiative comparable à celui des communes, c'est-à-dire que s'ils déposent un projet de motion visant une modification de zone, ils n'ont pas de garantie que la procédure aboutisse jusque devant le Grand Conseil. Preuve en est que le Conseil d'Etat n'a toujours pas présenté au Grand Conseil les projets de modification de zone demandés dans des motions approuvées par ce Grand Conseil, soit pour Troinex, soit pour Chêne-Bougeries.
Nous estimons donc que le projet qui sort de commission n'est pas satisfaisant et nous avons préparé une proposition d'amendement visant à rajouter un alinéa 6 à l'article en cause, que je vais vous remettre, Monsieur le président. Cela dit, comme la question est relativement technique, je vous suggère que cet amendement que nous déposons présentement soit renvoyé en commission avec le projet de loi, afin que la commission de l'aménagement puisse en débattre et trouver une solution qui soit satisfaisante.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse. Il est effectivement un peu dommage que nous n'ayons pas été saisis de cet amendement au moment des débats en commission. Sans en connaître la teneur, je crois qu'il vaudrait mieux, en effet, renvoyer le tout en commission pour pouvoir en discuter de façon sereine.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer le projet à la commission d'aménagement du canton est adoptée.
La Commission d'aménagement du canton a étudié le projet de loi 8079 lors de sa séance du 26 janvier 2000 sous la présidence de M. Rémy Pagani et en présence de Mme S. Piguet du service des monuments et sites, et de M. G. Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures.
Présentation du projet
La commission s'est rendue sur place pour mieux visualiser les déclassements proposés. Ce projet de loi fait suite à une étude des hameaux entreprise par la commune depuis plusieurs années pour répondre à différents critères, soit :
satisfaire au voeu de la commune d'augmenter sa population sans sacrifier la zone agricole ;
répondre à la demande de propriétaires souhaitant transformer d'anciens bâtiments ruraux en habitations ;
réorganiser la zone construite, impliquant ainsi un meilleur impact sur l'aspect du village.
A cet effet, il faut rappeler l'article 22 de la LaLAT, qui prévoit en son second alinéa la possibilité de déclasser un hameau en 4e zone rurale lorsqu'une partie importante n'est manifestement plus affectée à l'agriculture.
M. Dominique Barth, maire adjoint, nous a accompagnés sur le site et a ensuite répondu à nos questions à la mairie, en précisant que quelques logements de plus, même s'ils ne sont pas nombreux, revêtent toute leur importance pour une commune qui ne compte que 500 personnes.
Au surplus, la commune, avec les propriétaires, a travaillé en étroite collaboration avec la Commission des monuments, de la nature et des sites, de même qu'avec la Commission d'urbanisme.
A Cara, trois périmètres distincts sont proposés : les deux premiers comprennent la maison de maître du Petit Cara et ses dépendances, ainsi que le groupement de bâtiments situé à proximité; le troisième englobe les bâtiments bordant le passage de la douane à l'est. Rappelons que la douane se trouve en zone de développement 5. Les deux premiers périmètres représentent une superficie de 5409 m2, le troisième de 1035 m2.
La définition des nouvelles zones 4B protégées répond aux termes de la loi ; son périmètre passe au plus près des constructions existantes, de manière à préserver tant l'échelle des hameaux que la qualité du site environnant.
Le présent projet de loi a fait l'objet d'un préavis favorable à l'unanimité du Conseil municipal de la commune de Presinge, en date du 27 avril 1999.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'Ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone 4B protégée concernée par le présent projet de loi.
En conséquence de ce qui précède, et du vote à l'unanimité de la commission, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de loi.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8079)
modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Presinge (création de zones 4B protégées)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1
1 Le plan N° 29004-531, dressé par le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, le 7 mai 1998, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Presinge (création de zones 4B protégées à Cara) est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987 sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'Ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre des zones 4B protégées, créé par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan N° 29004-531 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
4
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La Commission d'aménagement du canton a étudié le projet de loi 8080 lors de sa séance du 26 janvier 2000 sous la présidence de M. Rémy Pagani et en présence de Mme S. Piguet du service des monuments et sites, et de M. G. Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures.
Présentation du projet
La commission s'est rendue sur place pour mieux visualiser les déclassements proposés. Ce projet de loi fait suite à une étude des hameaux entreprise par la commune depuis plusieurs années pour répondre à différents critères, soit :
satisfaire au voeu de la commune d'augmenter sa population sans sacrifier la zone agricole ;
répondre à la demande de propriétaires souhaitant transformer d'anciens bâtiments ruraux en habitations ;
réorganiser la zone construite, impliquant ainsi un meilleur impact sur l'aspect du village.
A cet effet, il faut rappeler l'article 22 de la LaLAT, qui prévoit en son second alinéa la possibilité de déclasser un hameau en 4e zone rurale lorsqu'une partie importante n'est manifestement plus affectée à l'agriculture.
M. Dominique Barth, maire adjoint, nous a accompagnés sur le site et a ensuite répondu à nos questions à la mairie, en précisant que quelques logements de plus, même s'ils ne sont pas nombreux, revêtent toute leur importance pour une commune qui ne compte que 500 personnes.
Au surplus, la commune, avec les propriétaires, a travaillé en étroite collaboration avec la Commission des monuments, de la nature et des sites, de même qu'avec la Commission d'urbanisme.
A Presinge-Dessus, deux périmètres comprennent à l'ouest les bâtiments de part et d'autre de la route de la Louvière, à l'est ceux du chemin des Blessoniers. Le projet de loi fixe le gabarit des constructions à Rez + 1 + superstructure, sans prise de jour dans la pente des toitures, de telle sorte que les nouvelles interventions s'harmonisent avec les bâtiments existants. La superficie de la nouvelle zone 4 B protégée est de 7603 m2.
Il y a lieu de préciser ici qu'en cas de nouvelle construction sur la parcelle 1896, celle-ci serait subordonnée à la démolition de la petite construction cadastrée sous le numéro 235.
La définition des nouvelles zones 4B protégées répond aux termes de la loi; son périmètre passe au plus près des constructions existantes, de manière à préserver tant l'échelle des hameaux que la qualité du site environnant.
Le présent projet de loi a fait l'objet d'un préavis favorable à l'unanimité du Conseil municipal de la commune de Presinge, en date du 27 avril 1999.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'Ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone 4B protégée concernée par le présent projet de loi.
En conséquence de ce qui précède, et du vote à l'unanimité moins une abstention (Vert) de la commission, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de loi.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8080)
modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Presinge (création d'une zone 4B protégée)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1
1 Le plan N° 29003-531, dressé par le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, le 18 novembre 1998, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Presinge (création de zones 4B protégées, à Presinge-Dessus) est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987 sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre des zones 4B protégées, créé par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan N° 29003-531 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
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Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,considérant:
que la demande de logements a tendance à augmenter, notamment à la suite de la venue à Genève de plusieurs entreprises multinationales ;
que les observateurs du marché de l'immobilier prédisent une prochaine pénurie de logements si des mesures ne sont pas prises rapidement pour faire face à la situation ;
que la politique actuelle du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement ne semble pas s'adapter à cette situation en limitant la production de logements dans le secteur « libre » et en imposant des quotas de logements sociaux ;
que personne ne souhaite un retour de la pénurie ;
invite le Conseil d'Etat
à procéder, sans retard et en collaboration avec les milieux intéressés, à une analyse circonstanciée de la demande de logements, notamment dans le secteur dit « libre », c'est-à-dire non subventionné ;
à définir dans les plus brefs délais une politique claire en matière de production et de rénovation de logements ;
à solliciter de la Confédération des possibilités de dérogation aux conditions de résidence au lieu de travail pour les étrangers.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Depuis l'arrivée de plusieurs entreprises multinationales sur le sol genevois et la reprise économique, les professionnels de l'immobilier, tout comme d'autres observateurs, constatent un resserrement de l'offre de logements dans le canton et en particulier d'appartements de grande taille.
Il devient urgent de prendre des mesures pour permettre la construction de nouveaux logements, en particulier dans le secteur non subventionné, car les logements sociaux ne peuvent être mis à la disposition des fonctionnaires internationaux et des cadres d'entreprises multinationales à Genève.
En effet, la loi générale sur le logement et la protection des locataires impose des conditions de résidence à Genève et des barèmes aux bénéficiaires des logements, conditions qui ne peuvent manifestement pas être respectées par ces personnes.
Or, à l'heure actuelle, il faut constater que le Conseil d'Etat n'a pas de politique claire et déterminée en faveur de la construction de ce type de logement.
D'un côté, le Département de l'économie (DEEE) mène une politique de promotion économique active, qui porte ses fruits.
D'un autre côté, le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (DAEL) impose des conditions minimales de production de logements subventionnés, qui ne reposent sur aucune étude scientifique et dont on sait qu'elles ne répondent pas aux demandes de cette nouvelle catégorie de locataires.
Un premier pas en faveur d'une concertation entre les départements a été effectué entre le DEEE et le Département des finances. Il n'est pas suffisant, car il faut impérativement que tous les départements coordonnent leur action.
En particulier, à défaut de mise à disposition de nouveaux logements, on risque de créer une pénurie nuisible à tous points de vue.
De plus, le resserrement de l'offre de logements de grande taille rend difficile la recherche pour les Genevois. Ces derniers sont autant de citoyens, de contribuables et de consommateurs qu'il est important de garder sur le sol cantonal.
C'est le but de la présente motion, à laquelle nous vous demandons de réserver bon accueil.
Débat
M. Florian Barro (L). Cette motion se situe dans le prolongement de l'interpellation urgente que j'avais développée le mois passé, au sujet de la production de logements sociaux dans les zones de développement. La réponse que nous avait donnée le Conseil d'Etat n'était, on s'en doute, pas suffisante à nos yeux - comme c'est le cas, en règle générale, pour les interpellations urgentes - et nous l'avions d'ailleurs anticipée en déposant cette motion, qui demande essentiellement une politique claire en matière de développement et, surtout, en matière de construction de logements de tous types.
Dans ce contexte, est-ce à l'Etat de contribuer à entretenir une pénurie, ou du moins à la favoriser ? Ou doit-il, au contraire, promouvoir un développement dans le respect des procédures et des intérêts respectifs ? Pour nous, poser la question, c'est y répondre. A ce jour, des démarches sont entreprises par le département de l'économie pour favoriser les entreprises, l'emploi et l'économie en général, qui représente le carburant de notre politique sociale, mais, à notre sens, on ne peut pas mettre du carburant quand on a perdu les clés du réservoir !
Ainsi, le plan directeur actuellement à l'étude à la commission d'aménagement, qui préconise un peu tout et son contraire, ou le plan directeur actuellement en vigueur, qui demande qu'on utilise au mieux les zones à bâtir, en particulier les zones proches de l'agglomération, sont combattus, notamment par la Ville. Or, comment veut-on promouvoir l'installation d'entreprises et l'installation de leurs collaborateurs, sans une politique de développement claire des logements, notamment des logements non subventionnés ?
En résumé, notre motion demande au Conseil d'Etat de prendre les décisions qui s'imposent et d'être en phase avec le développement du canton. Monsieur Moutinot, à notre avis, vous ne pourrez pas construire 1800 logements HBM sans la contribution de la croissance du canton. Donnez-vous les moyens de votre politique et ne tentez pas de décourager la libre entreprise !
Je vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir cette motion et de l'envoyer au Conseil d'Etat, tout en demandant préalablement à celui-ci des éléments d'information factuels.
M. Christian Grobet (AdG). Nous tenons à dire, avec beaucoup de franchise, aux auteurs de cette motion que nous ne partageons pas l'objectif visé. De toute évidence, ils souhaitent que l'on donne la priorité à la construction de logements libres, c'est-à-dire non subventionnés, voire que leurs loyers ne soient même plus contrôlés, comme c'est habituellement le cas dans la zone de développement.
Aujourd'hui, s'il manque quelque chose à Genève, Monsieur Barro, ce sont bien les logements sociaux, c'est-à-dire les logements subventionnés et destinés aux revenus inférieurs, qui sont une partie très importante de la population. On constate, en effet, qu'au fil des années le parc des logements HLM ne fait que diminuer. Vous savez comme nous que la «durée de vie» d'un logement HLM est de vingt à vingt-cinq ans au maximum, et qu'au terme de cette période le logement devient libre et qu'il ne répond plus aux critères du logement social. Peut-être M. Moutinot pourra-t-il nous dire tout à l'heure quel est le pourcentage actuel des logements sociaux dans le canton, mais on peut déjà affirmer qu'au fil des années ce pourcentage n'a fait que diminuer.
Par voie de conséquence, s'il faut définir une priorité, c'est bien la construction de logements subventionnés. Je rappelle du reste qu'une initiative, toujours pas totalement concrétisée, demandait la construction de 3000 logements HBM, parce qu'il y a dix ans on se rendait déjà compte que c'était cette catégorie de logements qui faisait le plus défaut.
En revanche, s'agissant des logements non subventionnés, Monsieur Barro, vous vous moquez du monde : il y en a suffisamment sur le marché ! Par ailleurs, estimer que ces logements sont trop chers pour les collaborateurs des multinationales qui s'installent à Genève, c'est faire le constat de l'échec de cette politique de liberté totale que vous voulez dans le domaine de la construction de logements. Car il est vrai que, s'il n'y a pas un certain nombre de règles en matière de fixation des loyers, les logements deviennent une denrée extrêmement onéreuse. Il n'y a qu'à lire les journaux : les logements libres existent, mais ils sont actuellement à des prix exagérés et la solution serait plutôt de trouver un moyen pour réduire ces loyers. Evidemment, la meilleure méthode, qui est la vôtre du reste, serait l'autorégulation des milieux de la construction et des promoteurs ; il faudrait qu'ils se montrent un peu moins gourmands et les logements vacants qui sont offerts sur le marché trouveraient alors certainement preneurs.
Par voie de conséquence, nous ne pourrons pas, quant à nous, voter la motion qui nous est proposée ce soir.
M. David Hiler (Ve). Pour faire court, notre groupe dira à M. Laurent Moutinot de continuer comme il le fait, c'est-à-dire que 70% des logements construits soient effectivement attribués au logement social, avec la recommandation supplémentaire que, dans ces 70%, il y ait un volume suffisant pour les coopératives et les organismes à but non lucratif. En effet, pour éviter les effets de la sortie de logements du système HLM, il faut effectivement travailler avec ces opérateurs, qui sont les seuls à garantir des loyers raisonnables à long terme.
Pour le reste, nous nous réjouissons de constater - ce qui a l'air de gêner certains - qu'en réalité, parmi les logements libres, c'est la PPE qui l'emporte. C'est un besoin, une partie de la population souhaite acheter et tant qu'à faire, autant qu'il y ait des logements en PPE que des loyers libres totalement hors de prix. Si les gens veulent acheter, c'est bien, ils échappent ainsi à la domination d'un propriétaire.
Donc, hormis le bémol en faveur des organismes à but non lucratif, nous vous demandons donc, Monsieur Moutinot, de continuer avec ces pourcentages : c'est bien, même si ce ne sera probablement pas suffisant. Mais ne vous laissez surtout pas distraire par cette motion qui, à l'évidence, veut favoriser un tout petit groupe social qui ne me paraît pas manquer actuellement des choses qui font les bienfaits de la vie !
M. Pierre-Alain Cristin (S). Comme les motionnaires, nous sommes sensibles au marché de l'immobilier à Genève ; ils nous prédisent une prochaine pénurie de logements et, comme eux, nous ne la voulons pas, mais pour d'autres motifs : notre souci n'est pas de pouvoir loger les employés d'entreprises internationales, mais de voir une envolée des prix de la construction et des loyers qui se répercuteront sur les locataires. De plus, le concept de logements économiques a subi une lente mais inexorable évolution, qui l'a conduit vers un produit ne se différenciant guère du logement du secteur libre. Type d'appartement, degré de finition, niveau d'équipement : les standards sont devenus identiques.
C'est pourquoi le groupe socialiste se donnera comme priorité le logement bon marché, qui ne représente que 2% du parc de logements du canton, car nous pensons que pour les ménages à revenus modestes - environ 25% de la population - l'effort de la collectivité publique doit être accru. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste refusera cette motion.
M. Thomas Büchi (R). Il est impensable, Monsieur Grobet, que Genève prenne le risque d'une nouvelle crise du logement. C'est principalement pour cette raison que nous avons déposé cette motion, afin d'inciter l'Etat à prendre des mesures pour éviter une situation de pénurie. Il est indiscutable que, depuis quelque temps, la demande augmente ; il faut donc s'adapter à cette nouvelle donne et accroître la production de logements, ceci aussi dans le secteur libre.
Nous ne sommes pas contre le développement du logement social et notre groupe l'a prouvé à plusieurs reprises. En effet, combien de motions n'avons-nous pas soutenues ou signées concernant les coopératives d'habitation ou les logements HBM ! Mais il est primordial qu'un développement harmonieux de tous les secteurs du logement se fasse. Autrement, nous paierons les pots cassés dans quelque temps.
Il faut donc que le Conseil d'Etat adapte sa politique et la calque sur la politique de promotion économique qu'il développe actuellement. Si on veut être attractif sur le plan économique, il faut aussi offrir des logements aux gens qui viennent travailler à Genève et ce, de nouveau, dans tous les secteurs du logement. Il ne faut pas que ces mesures que l'on veut attractives se retournent contre nous et nous portent finalement préjudice.
Par conséquent, si vous ne voulez pas renvoyer cette motion ce soir au Conseil d'Etat, reconnaissez qu'elle mérite au moins d'être débattue et que le minimum qu'on puisse faire, c'est de la renvoyer en commission.
M. Florian Barro (L). Je voudrais répondre aux propos de M. Grobet, qui dit que notre motion vise à déréguler le marché du logement. Vous savez bien que la plupart des projets de construction se trouvent en zone de développement, là où précisément l'Etat intervient et contrôle. Vous avez rappelé à M. Moutinot qu'il convenait de construire environ 1800 logements HBM pour parfaire la loi des 3000 logements. Mais pour cela il faut aussi donner des moyens à l'Etat. A cet égard, notre vision des choses, c'est que le petit groupe social que M. Hiler trouve anormal de favoriser a la malheureuse habitude de payer des impôts et de contribuer ainsi à la politique sociale du canton ! On ne peut mener une politique sociale généreuse sans avoir la possibilité, en contrepartie, de récolter les recettes fiscales qui permettent justement d'alimenter la construction de logements sociaux.
M. Grobet rappelle que le parc de logements sociaux diminue chaque année. Evidemment, on en construisait jusqu'à 6000 par année dans les années 60 et, aujourd'hui, on en construit environ 1800. Comment voulez-vous inverser cette tendance à la baisse, sachant que c'est à l'époque où l'Alliance de gauche n'existait pas que se construisaient le plus de logements ?
Par ailleurs, l'Alliance de gauche a la propension d'utiliser les arguments qui l'arrangent. Quand on parle de fiscalité, il y a trop de riches à Genève ; quand on parle de logement social, il y a trop de gens qui ont des moyens modestes et qu'il faut aider. En définitive, y a-t-il trop de riches, ou trop de pauvres ? Il faudrait peut-être accorder vos violons pour enfin détecter où se trouvent exactement les problèmes.
Monsieur Grobet, vous dites aussi qu'il n'y a pas de pénurie. Je peux vous donner l'exemple d'entreprises multinationales qui louent des logements à l'avance, avant l'arrivée de leurs cadres, pour être sûres de disposer d'un logement. Alors, ne me dites pas qu'il n'y a pas de pénurie !
En conclusion, puisque vous ne voulez pas l'envoyer directement au Conseil d'Etat et qu'il y a un déficit d'information au niveau de ce Grand Conseil, je vous recommande, comme l'a proposé M. Büchi, de renvoyer cette motion en commission. Ceci afin d'y recevoir les informations qui vous démontreront que nous ne sommes pas dans l'erreur en préconisant d'accueillir aussi les familles disposant de plus de moyens que celles que vous voulez absolument implanter dans notre canton.
M. René Koechlin (L). Ce qui indispose quelques députés des bancs d'en face, dont M. Grobet, c'est à l'évidence la deuxième partie de la première invite, soit le fait de réduire l'analyse circonstanciée de la demande au secteur libre et non subventionné. Mesdames et Messieurs, gouverner, c'est prévoir. On prévoit une crise du logement relativement proche, comparable à celle des années 80. Or, je pense qu'il appartient au gouvernement de tenter d'anticiper et aux députés que nous sommes d'être informés. Cette motion ne demande rien d'autre.
Elle demande, d'une part, une analyse circonstanciée de la demande de logements : qui pourrait ne pas souhaiter cette analyse ? D'autre part, elle demande au gouvernement de définir une politique claire en matière de production de logements et accessoirement de rénovations. Là aussi, Mesdames et Messieurs, on ne peut que la souhaiter en cette matière; et pour le moment celle-ci ne ressort pas clairement.
Aussi, que l'on amende la première invite, que l'on supprime la deuxième partie, d'accord, on pourra examiner cela en commission. Mais notre Grand Conseil se doit de se préoccuper et de la demande en matière de logements d'une façon générale et de leur production, c'est-à-dire de la façon potentielle de répondre à cette demande, qui risque de devenir pressante au cours des prochaines années. Il est de notre devoir de demander ce type d'informations et ce type d'éclaircissements au gouvernement.
C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, je vous suggère de renvoyer cette motion en commission, afin, peut-être, d'obtenir par anticipation ces informations ; à défaut de la renvoyer ensuite, lorsqu'elle reviendra de commission, au Conseil d'Etat, pour qu'il procède à l'analyse circonstanciée et à la définition d'une politique claire en matière de production de logements.
M. Pierre Marti (PDC). Je comprends bien que le parc des HLM diminue et que c'est un secteur qu'il ne faut jamais arrêter de soutenir, pour répondre à la demande de certaines personnes en difficulté. Mais, Monsieur Grobet, il me semble que vous êtes intervenu, comme souvent, sans avoir lu les invites de cette motion. Et, comme l'a dit M. Koechlin, si vous n'avez pas lu les invites au Conseil d'Etat, il est facile de s'emballer et de dire qu'il n'est pas prioritaire de construire pour une certaine catégorie de gens qui ont les moyens. En l'occurrence, Monsieur Grobet, nous devrions nous réjouir d'avoir l'opportunité d'accueillir des personnes qui ne demandent pas des HLM, mais des appartements à loyers libres.
Ce que nous réclamons, c'est une analyse de la demande actuelle. S'agissant de répondre à la demande prépondérante de la population, peut-être verra-t-on, dans l'analyse statistique, qu'en ce moment il y a un véritable besoin d'appartements en loyers libres... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je vois que cela n'intéresse pas beaucoup M. Grobet, mais cela ne change rien : il a de toute façon déjà décidé qu'il ne faut que des HLM, partout et même dans des zones où l'on pourrait construire autre chose !
Il est extrêmement important que nous étudiions la situation et c'est bien l'invite qui est faite au Conseil d'Etat. Il convient de poser cette question d'une façon globale : de quels logements avons-nous besoin actuellement ? Faut-il mettre l'accent sur les HLM ou sur d'autres logements, du fait de l'accueil actuellement à Genève d'un certain nombre d'entreprises ? J'ai pu constater, auprès d'un certain nombre de régies, qu'il n'y avait absolument plus aucun logement à mettre à disposition des cadres supérieurs de sociétés qui s'installent chez nous. Nous devons donc faire un effort, pas seulement pour l'accueil des entreprises, mais aussi pour l'accueil des personnes qui viendront, grâce à elles, travailler chez nous et y payer des impôts.
M. Christian Grobet (AdG). On ne peut pas dissocier les invites de l'exposé des motifs de cette motion : pour moi, le but poursuivi par les motionnaires est très clair, en fonction de leur exposé des motifs.
Cela dit, si véritablement l'intention de certains députés est d'avoir un bilan de la situation actuelle, de voir comment les flux de logements ont évolué ces dernières années et quels sont les besoins - car je suis conscient qu'il y a des besoins - nous accepterons le renvoi en commission de cette motion, dans le sens qui a été indiqué par M. Koechlin. Et ce, malgré la mauvaise rédaction de ce texte et compte tenu du fait que, durant la législature précédente, nous nous étions plaints de ce que certaines de nos motions n'étaient pas discutées.
M. Laurent Moutinot. Il m'a tout d'abord été demandé un chiffre : les logements sociaux représentaient, il y a une quinzaine d'années, 20% du parc locatif genevois ; ils représentent aujourd'hui moins de 12%. A ma connaissance, la situation générale de la population ne s'est pas améliorée dans une proportion telle... (Brouhaha.)
Le président. Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas continuer ainsi. Je demande le silence, s'il vous plaît !
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. ... la situation ne s'est pas améliorée dans une proportion telle que l'on puisse justifier pareille diminution du parc de logements sociaux.
La motion qui est proposée nous invite, dans un premier temps, à faire une analyse de la demande. Je puis vous dire qu'en ce qui concerne le logement social cette analyse existe et que les partenaires sociaux la connaissent. En effet, grâce à la réunion en un seul fichier des demandes faites auprès de l'office cantonal du logement et des fondations immobilières de droit public, nous connaissons la totalité des demandes de logement social, qui sont à l'heure actuelle de 3000 demandes non satisfaites, étant précisé que le retard dans la réalisation du programme de 3000 HBM est d'environ 1500 appartements.
En revanche, les demandes hors du logement social sont effectivement mal appréhendées à l'heure actuelle et je me réjouis de l'aide du Grand Conseil pour inciter les milieux immobiliers privés à donner ces chiffres, car à l'heure actuelle ils s'y refusent ! On affirme qu'il y a des manques, je veux bien le croire, mais force est de constater qu'il n'y a pas le même degré de précision, à l'heure actuelle, dans le décompte de ces deux types de demandes.
Cela dit, compte tenu du fait qu'aujourd'hui il sort du secteur social beaucoup plus de logements qu'il n'en rentre, je maintiens que la proportion de deux tiers de logement social et d'un tiers de logement libre, dans les nouvelles opérations, est juste et je n'entends pas changer cette proportion. En effet, face à une pénurie de logements, qui frappe tout le monde - je suis parfaitement d'accord qu'elle touche aussi bien les cadres expatriés des multinationales que la classe moyenne et les populations défavorisées - face à cette situation il n'y a qu'une réponse, c'est l'augmentation globale du volume de production de logements, mais jamais je n'accepterai que, dans cet effort, la population la plus défavorisée se voit privée de son contingent en faveur du reste de la population ! C'est là une proposition inacceptable ! (Applaudissements.)
Il est évident, Monsieur Barro, que lorsque nous approchons des compagnies étrangères pour les inciter à s'installer à Genève, la moindre des corrections à leur égard est de leur fournir des logements et des logements qui correspondent à leurs besoins. Il s'agit bien entendu de logements d'une certaine qualité, d'un certain standing ; je suis d'accord de les construire, de faire tous les efforts nécessaires dans ce sens, mais jamais, je le répète, au détriment du logement social !
Mesdames et Messieurs les députés, la réponse tient dans le volume de construction. Votre commission d'aménagement a voté hier soir, dans le cadre du projet de concept du plan directeur, des taux de densité : elle a confirmé le taux de densité de 1,2 en zone de développement, elle a précisé le taux de densité de 0,8 en zone 4A et de 0,6 en zone 4B. Si vous adoptez, comme je le souhaite, ce projet de concept, avec ces taux de densité, il faudra ensuite avoir le courage de les appliquer dans les zones que cela concerne. Et ceci malgré les difficultés, s'agissant des communes, des voisins et de tous ceux qui n'en voudront pas. Je suis quant à moi décidé à appliquer ce plan directeur, si vous le votez, parce qu'en situation de pénurie, une fois encore, ce sont forcément ceux qui ont le moins de moyens qui souffrent et le rôle de l'Etat est justement d'intervenir en faveur de cette catégorie de population. Voilà pourquoi je ne peux absolument pas tolérer la demande de la motion, en ce qu'elle tend à privilégier des gens qui n'en ont pas vraiment besoin !
Cela dit, il faut arriver à répondre à tous les besoins ; je suis prêt à y donner la main et je vous demande votre appui. Dans ces conditions, je vous donnerai volontiers toutes autres explications, en vous remerciant d'inviter les milieux immobiliers privés à participer à l'opération devant la commission du logement. (Applaudissements.).
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission du logement.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Rapporteur: M. René Koechlin
Sous la présidence de M. Rémy Pagani, la Commission d'aménagement a examiné la motion citée en titre le 9 février 2000 (et non 2999 comme indiqué dans le procès-verbal !). Assistaient à la séance M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, chargé du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, MM. Georges Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures et Jean Charles Pauli, juriste du département sus-cité.
La motion en cause perpétue le débat sur l'affectation de la zone industrielle et sur le degré de mixité qu'il est souhaitable de lui appliquer. Ce dernier, dont le principe est généralement admis, donne cependant lieu à diverses interprétations qui sont souvent antinomiques et provoquent ainsi des affrontements politiques et idéologiques.
La gauche, pour sa part, entend restreindre l'utilisation de la zone industrielle en l'affectant aux seules entreprises de production et en n'accordant une dérogation qu'aux firmes commerciales les plus modestes, voire les plus démunies, à l'exclusion de toutes celles qui sont florissantes, importantes, riches, et qui ont un impact économique notoire, notamment par la création d'emplois, l'accroissement de la prospérité et les retombées fiscales. Cette attitude discriminatoire vise à favoriser les plus faibles au détriment des puissants qui n'ont qu'à s'implanter ailleurs, dans les zones ordinaires où non seulement le terrain est cher, mais où l'espace et les infrastructures d'accueil sont généralement insuffisants; raisons pour lesquelles, précisément, les sociétés les plus dynamiques et en pleine expansion cherchent à s'établir dans des secteurs où les terrains disponibles sont plus vastes, plus accessibles et mieux équipés.
Le principal argument qui permet de s'opposer à ce genre d'implantations réside dans la stricte interprétation de la notion d'affectation : réserver la zone industrielle aux seules activités de production, à l'exclusion des autres, commerciales ou administratives. L'Alternative épouse volontiers cette attitude restrictive, tandis que l'Entente voudrait plutôt favoriser une utilisation plus souple afin de faciliter aussi la tâche des entreprises porteuses de prospérité.
En fait, de quoi s'agit-il ? Quel est le sens de l'invite proposée par les motionnaires sinon d'enjoindre le Conseil d'Etat à farfouiller dans les affaires d'une entreprise commerciale qui, depuis des décennies, rend d'immenses services à la population; à tel point que l'on peut considérer qu'elle répond à l'intérêt général. De par sa forme de coopérative, elle remplit de surcroît les critères de participation collective auxquels non seulement la gauche, mais aussi les démocrates déclarent être attachés.
Pour ces motifs, la moitié de la commission s'oppose à la motion en cause ; elle représente ainsi la majorité réglementaire et propose l'amendement suivant à défaut duquel elle juge la motion insipide et tendancieuse:
Deuxième invite : « indiquer dans quelles zones le Conseil d'Etat considère pouvoir implanter les activités de même nature que celles de Brico-Loisirs et selon quelle procédure. »
Les commissaires de l'Alternative ayant refusé cet amendement par 7 voix contre 7, ceux de l'Entente ont rejeté la motion dans la même proportion de suffrages; c'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, ces derniers vous proposent de les suivre.
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RAPPORT DE LA MINORITÉ
Rapporteur: Mme Fabienne Bugnon
L'annonce faite par la Migros de regrouper ses activités de Brico-Loisirs dans un seul site et de ce fait d'abandonner ses centres de vente de Meyrin et Chêne-Bourg a suscité de légitimes questions.
Raison pour laquelle, en avril 1998, quatre députés ont interpellé le Conseil d'Etat pour qu'il veuille bien faire rapport, au Grand Conseil, sur les intentions de la Migros.
La demande qui peut paraître étonnante s'agissant de liberté du commerce trouve toute sa légitimité dans la gestion des zones dont le Grand Conseil est responsable. En effet, la Migros a bénéficié de dérogations pour pouvoir s'installer dans des zones industrielles et artisanales qui n'ont pas pour vocation d'accueillir ce type de grandes surfaces de vente.
Ces situations de dérogation ayant été acquises dans le passé, il n'est pas lieu d'y revenir, mais par contre se pose la question de l'affectation future des surfaces abandonnées d'une part et la localisation de nouvelles activités dans un lieu non prévu à cet effet d'autre part.
Renvoyée à la Commission d'aménagement du canton plutôt que directement au Conseil d'Etat, il aura fallu attendre près de deux ans pour que cette motion puisse être traitée.
Nous avons ainsi pris acte de la réponse écrite du conseiller d'Etat Moutinot.
Dérogations obtenues sur la base d'un simple échange de courrier entre MM. Joye et Maitre, respectivement alors président du DTP et président du DEP (voir annexes pages 4 et 5).
On découvre à cette lecture qu'il était préférable à l'époque « de s'en tenir à une dérogation aux normes de la zone industrielle, plutôt que de procéder à une modification des limites de zone » qui aurait nécessité une décision du Grand Conseil. C'est un exemple frappant que nous n'avons cessé de dénoncer, l'économie prime sur l'aménagement du territoire. Soit une totale abnégation des règles régissant l'aménagement du territoire au nom de la « nécessité » économique, éludant au passage, dans certains cas, une décision (et donc un débat) du Grand Conseil, au profit d'une politique dérogatoire. Ces pratiques appartiennent nous l'espérons au passé, ce rapport de minorité est là pour les mettre à jour.
Concernant la deuxième question posée par la motion, à savoir le devenir des friches industrielles laissées par la Migros à Meyrin et à Chêne-Bourg, le conseiller d'Etat Moutinot a rappelé l'installation de Pfister en lieu et place du Brico-Loisirs de Meyrin. Pfister, qui avait obtenu, cette fois-ci grâce à un vote du Grand Conseil, un déclassement pour développer ses activités à Vernier et qui, une fois le déclassement obtenu a jeté son dévolu sur une autre parcelle. Il n'est d'ailleurs pas inutile de rappeler qu'au moment de ce déclassement contesté, la minorité avait suggéré que Pfister s'installe dans la future friche de Brico-Loisirs. Une fois de plus, nous avions raison trop tôt ! Résultat, aujourd'hui Pfister s'installe à Meyrin et la zone déclassée de Vernier reste en attente, puisque ce même Grand Conseil a refusé de la rendre à son affectation d'origine.
Au sujet de Chêne-Bourg, nous n'avons pu recevoir de plus amples informations de la part du DAEL, le bail courant jusqu'en 2007, la Migros n'a pas fait part de ses intentions.
Pour la majorité de la commission, peu encline à soutenir cette motion, le Conseil d'Etat doit « indiquer dans quelle zone le Conseil d'Etat considère pouvoir implanter les activités de même nature que celles de Brico-Loisirs et selon quelle procédure » ? (amendement Koechlin). La minorité a estimé que cette réponse se trouvait dans le concept de l'aménagement du territoire et dans le rapport sur la mixité dans les zones industrielles ; en effet, nombreuses sont les zones destinées aux activités commerciales susceptibles de répondre aux besoins exprimés, ce qui justifie d'autant plus de ne pas brader la zone industrielle.
L'amendement Koechlin a donc été refusé par 7 NON (2 S, 3 AdG, 2 Ve) contre 7 oui (3 L, 2 R, 2 DC) ; ce qui a permis ensuite à la majorité de circonstance de refuser la motion par 7 NON (3 L, 2 R, 2 DC) contre 7 OUI (2 S, 2 Ve, 3 AdG).
La minorité vous propose donc, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter cette motion et de la renvoyer au Conseil d'Etat, afin que celui-ci fasse un rapport circonstancié tenant compte également de l'avenir du Brico-Loisirs de Chêne-Bourg.
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Débat
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Cette motion, comme beaucoup d'autres textes traités par ce Grand Conseil, soulève une fois de plus le problème de l'affectation de la zone industrielle. De façon plus large, elle pose le problème de l'implantation de toutes les activités qui ne sont pas considérées comme industrielles - c'est-à-dire ne comportant pas nécessairement de production - et qui ont de la peine à trouver des terrains où s'implanter.
La question posée dans l'invite nous paraît insuffisante et c'est la raison pour laquelle la majorité de la commission a rejeté cette motion. Je précise qu'il s'agissait en fait d'une majorité de circonstance, car en réalité il y avait 7 avis pour et 7 avis contre. Comme les contre l'emportent en cas d'égalité, la motion a donc été refusée par la majorité, alors qu'un amendement proposé par cette même majorité avait été refusé auparavant par l'autre partie de la commission. On en est donc arrivé à une sorte de match nul, si vous me permettez l'expression, qui fait qu'on ne sait plus très bien où est la majorité et où est la minorité, en tout cas en ce qui concerne la commission, dans la composition qui était la sienne lors des travaux.
S'agissant de notre amendement, nous proposions une deuxième invite demandant au Conseil d'Etat d'indiquer dans quelles zones il considérait pouvoir implanter les activités de même nature que celle de Brico-Loisirs et selon quelle procédure, car là est vraiment le problème.
Un certain nombre de députés ne veulent pas d'activités du type Brico-Loisirs dans les zones industrielles, sous prétexte que ce ne sont pas des activités industrielles au sens où on l'entend communément. Dans les zones ordinaires, ces activités ne trouvent pas de terrains, ou alors les prix en sont prohibitifs. Dans les zones de développement, l'on argumente en disant qu'elles doivent répondre aux besoins prépondérants de la population et l'on considère que la plupart de ces activités qui cherchent à s'implanter n'appartiennent pas à la catégorie des objets répondant à ces besoins-là. Finalement, toute une série d'activités ne savent tout simplement pas où s'implanter. Alors, que font-elles ? Ou bien elles périclitent, ou bien elles vont s'implanter soit dans le canton de Vaud, soit en France voisine, ce qui est évidemment regrettable pour l'économie de ce canton comme pour les utilisateurs. C'est la raison pour laquelle la majorité vous demande de bien vouloir voter la deuxième invite proposée en commission.
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, M. Koechlin vous a expliqué pourquoi la majorité avait changé de côté. Ce rapport expose un problème d'affectation de zone industrielle, mais il a un autre sens, sur lequel le rapporteur de majorité a passé un peu vite : il vise aussi à nous rappeler les pratiques d'une certaine époque, où il suffisait que, par courrier, deux conseillers d'Etat s'arrangent, pour s'en tenir à une dérogation aux normes de la zone industrielle, plutôt que de procéder à une modification de limite de zone. Il est important de garder en mémoire ce genre de pratiques pour qu'elles ne se reproduisent plus.
Dans la motion qui vous est soumise, l'invite demande au Conseil d'Etat de nous faire rapport sur la politique de la Migros et sur le déplacement de ses Brico-Loisirs. Nous avons vu qu'à Meyrin, par exemple, lorsque la Migros a décidé de partir, le lieu qu'elle occupait était voué à devenir une friche industrielle. Entre-temps, l'entreprise Pfister - pour laquelle nous avions voté un déclassement à Vernier - a finalement décidé de s'installer à Meyrin, sur la friche laissée libre par la Migros. C'est ce genre de politique au coup par coup dont nous avons assez et nous souhaitons que le Conseil d'Etat s'exprime à ce sujet.
Jusque-là, nous sommes visiblement suivis par le rapporteur de majorité, mais il a voulu ajouter une invite demandant au Conseil d'Etat d'indiquer dans quelles zones il considère pouvoir implanter ces activités-là. De notre point de vue, c'est très clair : ces activités n'ont rien à faire en zone industrielle, il y a suffisamment de surfaces commerciales vides et de zones prévues à cet effet. En outre, la minorité de ce jour-là a estimé que la réponse à la question posée par l'amendement de M. Koechlin se trouvait dans ce fameux concept de l'aménagement du territoire. Nous ne voyons donc pas pourquoi cette question devrait être posée une nouvelle fois ; les réponses ont été données, nous en restons là.
En revanche, nous demandons au Conseil d'Etat qu'il nous fasse un rapport circonstancié - autre que la lettre qu'il a écrite au président de la commission - sur les projets de la Migros et qu'il nous dise également ce que va devenir le Brico-Loisirs de Chêne-Bourg. Ce dernier bénéficie d'un bail jusqu'en 2007, mais la Migros a déjà annoncé qu'elle le regrouperait à la Praille. Je vous remercie donc de bien vouloir voter le rapport de minorité.
M. Alain Etienne (S). C'est effectivement une majorité de circonstance qui a amené M. Koechlin, au nom de l'Entente, à déposer un rapport de majorité, en raison de l'absence involontaire d'un commissaire socialiste.
Cela dit, notre groupe soutient le rapport de minorité. En effet, les socialistes ont eu plusieurs fois l'occasion de s'exprimer sur le sujet de l'affectation de la zone industrielle. Nous l'avons déjà dit : nous avons le souci de ne pas faire augmenter les prix des terrains, afin de permettre à des petites entreprises de s'y maintenir ou de venir s'y implanter. Oui, Monsieur Koechlin, les petites entreprises sont aussi porteuses de prospérité ! Il n'est pas sain d'opposer les puissants aux plus faibles comme vous le faites. Comment pouvez-vous parler d'attitude discriminatoire dans ce débat ? Il s'agit ici simplement de comprendre ce qui s'est passé dans ce dossier, à une époque où l'aménagement du territoire se faisait apparemment par simple échange de courrier. Le conseiller d'Etat Laurent Moutinot a eu l'occasion de répondre à certaines de nos questions par lettre. Cependant, il nous paraît plus opportun que le Conseil d'Etat réponde à cette motion par le biais d'un rapport, qui aura l'avantage d'être plus complet.
Concernant le rapport de majorité, oui, Monsieur Koechlin, en bons démocrates, comme vous dites, nous sommes favorables à une politique de modifications des limites de zones, qui passent devant le Grand Conseil, plutôt qu'à une politique dérogatoire, comme l'a très justement relevé Mme Bugnon dans son rapport de minorité. Il est clair que l'économie ne doit pas primer sur le politique.
Concernant votre amendement, c'est tout simplement de la provocation. Je vous invite, Monsieur Koechlin, à formuler une autre motion, qui sera la vôtre et que nous serons disposés à discuter en commission. Pour l'heure, le groupe socialiste vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter cette motion telle que proposée et de la renvoyer au Conseil d'Etat.
M. Rémy Pagani (AdG). Notre groupe soutiendra le rapport de minorité pour toutes les raisons qui ont déjà été énoncées. Permettez-moi d'en ajouter quelques-unes.
En ce qui concerne l'affaire Pfister, il est étonnant que certains oublient de mentionner qu'une majorité a voté une dérogation sur un terrain en zone industrielle, situé sur la route de Meyrin. Ensuite, cette même entreprise Pfister a décidé - c'était d'ailleurs au départ une proposition de l'Alliance de gauche - de s'installer sur le site laissé vacant par le Brico-Loisirs de la Migros, mais le terrain que nous avions déclassé l'est toujours, le Grand Conseil ayant refusé de le remettre aux normes de la zone industrielle.
Un autre problème qui surgit dans cette affaire, auquel il convient de donner une réponse, Monsieur Koechlin, concerne l'immeuble qu'occupe actuellement Pfister en ville. Va-t-il rester vide, va-t-il être transformé, je ne sais en quoi ? Toujours est-il qu'il va constituer une nouvelle friche en Ville de Genève, ce qui signifie des impôts en moins pour la municipalité. Il serait intéressant d'avoir une réponse de la part de M. Koechlin quant à cet effet domino.
En ce qui concerne les zones industrielles, il est étonnant de voir que des groupes puissants comme la Migros, comme Obirama du groupe Manor, comme la Coop - la Coop qui, je vous le rappelle, voulait s'installer au bord de l'autoroute et qui s'est finalement installée à la Praille - obtiennent des dérogations, alors qu'elles ont les moyens, par rapport aux petites et moyennes entreprises, de s'installer ailleurs dans notre canton. Mais cela à des conditions de location évidemment plus chères ; on ne peut donc pas leur reprocher de se ruer sur l'occasion quand une majorité décide de déclasser des terrains en zone industrielle, puisque c'est tout bénéfice pour leurs comptes.
Voilà en ce qui concerne la réalité de la zone industrielle. Il ne faut pas nous dire que ces entreprises ne trouvent pas de terrain ailleurs, ce n'est pas vrai. Ce qui les incite à demander, à exiger, à faire pression, surtout sur les bancs d'en face, pour obtenir des dérogations, ce sont les bas prix des terrains en zone industrielle. Quant à moi, je trouve regrettable que certains gaspillent ce potentiel mis en place par nos aînés, qui permet d'offrir aux petites et moyennes entreprises qui débutent des terrains bon marché, qui ne plombent pas leur budget d'exploitation et qui leur permettent d'exister dans notre canton.
Je vous rappelle ici que les véritables créateurs d'emplois dans notre pays sont les petites et moyennes entreprises et que les grands groupes, quand ils se restructurent ou se regroupent, détruisent objectivement l'emploi. L'affaire de Jelmoli et du Grand Passage en est l'exemple type. Par conséquent, avant de se lancer dans de grandes diatribes sur l'inutilité de la zone industrielle, il faut mettre tout cela en perspective, Monsieur Koechlin !
M. Hubert Dethurens (PDC). La polémique sur l'installation des commerces en zone industrielle n'est pas nouvelle. J'en conviens, le coup par coup n'est pas une bonne méthode. Comme je l'ai déjà dit devant ce Grand Conseil, je ne souhaite pas que la banlieue de Genève ressemble aux banlieues de certaines villes européennes, mais on ne doit pas non plus inciter nos commerces traditionnels à passer de l'autre côté de la frontière ou, comme l'a dit M. Koechlin, dans le canton de Vaud.
C'est pourquoi la mise en place d'un règlement s'impose, à mon avis, ou en tout cas une large concertation. Le concept d'aménagement va être adopté, je veux bien, mais vous savez, Mesdames et Messieurs, qu'on peut revenir, au coup par coup, avec des projets de lois devant le Grand Conseil qui, là, est mis sous pression. Je fais partie de ceux qui n'aiment pas - en cela, je vous rejoins - être mis sous pression, comme dans l'affaire Pfister, mais pour éviter cela il faudrait avoir une discussion un peu plus large. A mon avis, la deuxième invite de cette motion pourrait y contribuer. C'est pourquoi le groupe démocrate-chrétien votera cette motion, y compris, bien entendu, la deuxième invite.
M. Olivier Vaucher (L). Pour la énième fois, Mme la députée Bugnon se trouve à la table des rapporteurs pour défendre un rapport concernant les déclassements de zone industrielle. Cela montre bien, Mesdames et Messieurs les députés, que l'implantation des grandes surfaces pose un réel problème.
Il est facile de dire qu'il y a suffisamment de friches commerciales pour accueillir ces grandes surfaces. Il est clair aussi, et je rejoins le député Pagani, qu'il faut réserver suffisamment de terrains à des prix bon marché pour les PME. Oui, Monsieur Pagani, je suis entièrement d'accord avec vous, mais les grandes surfaces, à ma connaissance, répondent à un besoin de la majorité de la population, puisque ce sont leurs prix qui permettent à cette population d'accéder à la consommation. Il me semble donc tout à fait judicieux dans certains cas - il ne faut pas, bien sûr, que cela devienne une habitude - de permettre à ces grandes surfaces de s'installer dans un endroit qui leur convienne. En effet, leurs prix seront compétitifs pour autant que les prix des terrains sur lesquels elles s'implantent soient raisonnables et pour autant que le site soit visible et accessible à tout le monde. On ne peut pas imposer à ces grandes surfaces de s'installer n'importe où. C'est pourquoi il est important de pouvoir, de cas en cas, trouver des solutions et leur donner une réponse favorable.
Dans ce sens, la seconde invite que M. Koechlin propose dans son rapport est parfaitement légitime. Le concept d'aménagement tel qu'il est issu des travaux de la commission d'aménagement ne donne pas la réponse à ce genre de problème. Voilà pourquoi il serait souhaitable qu'aujourd'hui le Conseil d'Etat prenne enfin une position claire et indique où les commerces qui répondent à un besoin prépondérant de la population peuvent s'installer.
Le président. La parole est à M. Koechlin.
(La mémorialiste hésite au moment d'enclencher le micro.)
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Je suis rapporteur, Madame la mémorialiste, ce qui explique que j'aie changé de place !
D'abord, j'aimerais que Mme la rapporteuse de minorité veuille bien m'indiquer succinctement - elle pourra me l'indiquer en détail plus tard - quelles sont les nombreuses zones susceptibles d'accueillir des activités commerciales. La LaLAT n'en prévoit aucune, elles n'existent en tout cas pas dans la législation. Les zones ordinaires, je vous l'ai dit, ne se prêtent pas à ce genre d'implantation. Les zones de développement non plus, car celles-ci sont destinées aux besoins prépondérants de la population. Il ne reste donc strictement que les zones industrielles. Or, vous ne voulez pas les affecter à ce genre d'activités. Alors, où implanter ces activités ? Ma question reste entière.
Ensuite, je constate que le débat se polarise sur une opposition entre la défense des puissants, je reprends le terme de M. Etienne, et la défense des petites et moyennes entreprises. Monsieur Etienne, vous avez interprété des propos, que je n'ai pas tenus mais que vous avez cru devoir m'attribuer, concernant la défense des puissantes entreprises au détriment des petites et des faibles. Je suis, autant que vous, le défenseur des petites et moyennes entreprises, car je reconnais comme vous qu'elles sont pourvoyeuses d'emplois, autant sinon plus que les grandes. Mais le problème n'est pas là ! Il n'est pas dans la défense des petites ou des grandes entreprises, mais dans la manière dont nous pouvons répondre à la demande de toutes les entreprises, quelle que soit leur dimension, qui cherchent désespérément des terrains où implanter leurs activités commerciales ou autres, qui n'ont pas de caractère industriel.
En l'occurrence, notre question est simple et nous voudrions que le Conseil d'Etat y réponde. Nous sommes constamment confrontés à ce problème, de concert avec des petites, des moyennes ou des grandes entreprises, et nous voudrions qu'il soit débattu par ce Grand Conseil, mais sur la base d'un rapport du Conseil d'Etat. C'est la raison pour laquelle nous voudrions introduire notre amendement.
En ce qui concerne l'immeuble Pfister auquel vous faisiez allusion tout à l'heure, Monsieur Pagani, vous avez choisi un mauvais exemple. Il est vrai qu'il existe des friches industrielles à Genève, mais ne prenez pas l'immeuble Pfister comme exemple. Cet immeuble était à l'origine un immeuble de logements qui, progressivement, a été affecté au magasin-exposition de l'entreprise Pfister. Il est ainsi devenu un immeuble totalement commercial, à une époque où on contrôlait probablement moins l'extension d'une firme à caractère purement commercial comme Pfister. Aujourd'hui, cet immeuble pourrait parfaitement être réaffecté, en tout cas partiellement, à du logement. Je dis partiellement, parce qu'il donne sur la rue de la Servette : vous avouerez que le rez-de-chaussée et le premier étage se prêtent mal au logement et devraient continuer à être affectés à des activités commerciales. En revanche, les étages supérieurs pourraient parfaitement être réaffectés au logement, comme ils l'étaient antérieurement. Ne parlons donc pas, dans ce cas, de friches industrielles; il y en a de meilleurs exemples dans le canton.
J'en connais quelques-unes et je vous le dis très honnêtement : elles ne se prêtent pas à l'implantation d'activités commerciales, simplement de par leur position. Vous savez bien que, pour une activité commerciale, la situation est déterminante, fondamentale. Alors, ne forçons pas les entreprises à s'implanter sur des terrains qui ne leur conviennent pas, précisément pour des motifs commerciaux, et ce, quelle que soit, je le répète, leur dimension; car cette règle est absolue : elle vaut autant pour les petites et moyennes entreprises, Monsieur Etienne, que pour les grandes. En l'occurrence, nous ne demandons pas au Conseil d'Etat de dire où il entend implanter des entreprises de la dimension de la Migros, mais où il entend implanter toute entreprise de caractère commercial, quelle que soit sa dimension. Une réponse du Conseil d'Etat à cette question serait extrêmement intéressante pour le Grand Conseil.
M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais faire quelques observations, parce que je crois qu'on a pris le problème à l'envers. S'agissant de savoir où implanter les Brico-Loisirs, je conviens avec M. Koechlin que c'est un problème spécifique qui n'est pas facile à résoudre. Mais je rappelle qu'on peut créer, comme on l'a déjà fait, des zones d'activités spécifiques. On a ainsi créé une zone d'activités pour le centre administratif de Reuters, par exemple. On a créé une zone spécifique pour un manège, en déclassant un terrain en zone agricole. On peut donc fort bien prévoir une zone d'activités qui soit réservée à une activité particulière. C'est le cas, par exemple, de la Suzette, à côté de Palexpo.
Dans le cas présent, le véritable problème est ailleurs. En fait, il n'y a pas beaucoup de grands Brico-Loisirs. Une chaîne commerciale s'est lancée avec un certain succès dans ce domaine et a ouvert trois centres, qui étaient bien répartis : l'un à la Praille, en vertu d'une vieille dérogation sur laquelle je ne vais pas revenir mais qui était manifestement non conforme aux normes de la zone Praille-Acacias ; le second à Chêne-Bourg ; le troisième à Riant-Bosson, dans une zone artisanale dite mixte, qui n'était pas à proprement parler une zone industrielle et où, à l'époque, le département des travaux publics avait admis l'installation d'un Brico-Loisirs, sous prétexte que cela servait aussi à la construction pour les particuliers. On a donc admis que ce cas limite s'y installe, à la condition que d'autres activités commerciales ne s'y implantent pas.
Le drame, c'est que tout d'un coup la Migros a décidé de supprimer les centres de Chêne-Bourg et de Meyrin, pour tout regrouper dans la zone Praille-Acacias, ce qui, au niveau de l'aménagement du territoire et de la politique des transports, est une véritable catastrophe. En effet, on sait que 95% des clients des Brico-Loisirs y viennent avec leur véhicule, puisqu'ils repartiront avec du matériel. A cet égard, la décentralisation, avec un centre sur la rive gauche, l'autre à peu près au milieu du canton et le troisième à Meyrin, était une bonne formule. Je rappellerai ici que les socialistes ont, à juste titre, déposé récemment une motion concernant la création des nouveaux centres d'activités et leurs relations avec les transports publics. Dans le cas qui nous occupe, le regroupement de ces trois centres à la Praille est, en tout cas au niveau de la politique des transports, un très mauvais coup.
Maintenant, je soulèverai un problème supplémentaire. Monsieur Koechlin, puisque vous avez parlé de Pfister, cela vaut la peine d'y revenir. Je ne sais pas si Pfister s'est vraiment étendu aux étages supérieurs des immeubles rue de la Servette-rue de la Poterie au détriment de logements. Vous avez peut-être de meilleurs renseignements que nous. Quant à moi, j'avais le sentiment qu'il occupait surtout une arcade au rez-de-chaussée et peut-être l'entresol... Quoi qu'il en soit, le problème est le suivant.
Pfister nous a fait croire qu'il voulait se recentrer sur un terrain à la route de Meyrin qui était destiné à des activités industrielles et le Grand Conseil a accepté de déclasser ce terrain industriel, faisant ainsi, nous l'avons dit et nous continuons à le dire, une grave erreur. En effet, il y a peu de terrains industriels et il faut garder des réserves pour l'avenir, parce que le seul espoir pour le secteur secondaire - qui est en train de s'étioler à Genève - de se maintenir, c'est de pouvoir disposer de terrains bon marché. En l'occurrence, ce terrain en bordure de la route de Meyrin était resté non construit ; ce n'était pas du tout une friche, c'était une spéculation immobilière. Tout le monde sait combien ce terrain avait été payé par des spéculateurs qui, au bout de vingt ans, ont obtenu ce qu'ils souhaitaient, à savoir un déclassement de ce terrain industriel en zone commerciale et administrative pour Pfister. Or, à ce moment-là, ô stupéfaction, après qu'on nous eut fait le coup des cent emplois en jeu, poussant la majorité de ce Grand Conseil à déclasser le terrain, trois mois après, Pfister, comme par hasard, s'est rétracté et a décidé de s'installer dans le bâtiment libéré à Riant-Bosson, éventualité qui avait du reste été évoquée.
On peut ici se demander si, finalement, il n'y a pas eu complaisance de la part de Pfister à l'égard des promoteurs, mais ce que je voulais dire, Monsieur Koechlin, c'est que tout le raisonnement que vous tenez s'effondre à Riant-Bosson. En effet, à Riant-Bosson, on a précisément fait le raisonnement que vous avez fait : sous prétexte que ce n'était pas une vraie zone industrielle et qu'un Brico-Loisirs se situe entre le commerce et l'activité secondaire, on a accordé une dérogation. Mais le problème est que dorénavant le bâtiment de Riant-Bosson ne sera plus occupé par un Brico-Loisirs, ni par une activité du secteur secondaire, mais tout simplement par un magasin de meuble ! On assiste donc à une tertiarisation totale de ce bâtiment, selon le schéma classique du changement partiel, qui avait vu des logements se transformer en logements meublés, puis en pension et enfin en hôtel, nous amenant à préciser la LDTR pour empêcher ce genre de processus, de grignotages successifs.
A Riant-Bosson, il y aura dorénavant un magasin de meubles et quand il faudra implanter un nouveau Brico-Loisirs, on nous demandera peut-être de déclasser un terrain en zone agricole ! Voilà ce qui ne va pas et c'est pourquoi nous avons déposé cette motion. Dans cette histoire de Brico-Loisirs et de Pfister en particulier, il y a eu une véritable manipulation de la part de certains propriétaires immobiliers et on a fait une politique que je me permets de qualifier de désastreuse au niveau de l'aménagement du territoire !
M. John Dupraz (R). Le groupe radical votera la motion avec la deuxième invite proposée par le rapporteur de majorité. Cet amendement soulève un véritable problème, puisque, à vous entendre, on croirait que c'est le pouvoir politique qui décide où vont s'installer les centres de distribution. Or, cela ne se passe pas comme cela, Mesdames et Messieurs !
Là, je dévoilerai mes liens d'intérêt, en vous disant que je suis administrateur de Coop-Genève : dans un premier temps, nous voulions nous installer - option de la direction générale de Bâle - dans la ZIPLO à Plan-les-Ouates, avec accès par voiture et places de parc à disposition, pour offrir un magasin pouvant présenter de nombreux articles et être attractif. On nous a dit que c'était impossible, parce que non conforme à la zone, et qu'il fallait voir ailleurs. Aujourd'hui, ce centre est prévu à la Praille, mais on nous dit qu'il n'y a pas assez de transports publics. Il y a même une initiative : qui prévoit de supprimer le centre commercial ! Quant à moi, je constate une chose et là les propos de M. Pagani m'étonnent un peu : en tant que syndicaliste, il devrait être heureux de constater... Je vois que M. Pagani rit, il se moque de l'emploi, c'est nouveau ! Le dogme totalitaire et absolu de directives paralysantes, voilà ce que M. Pagani voudrait imposer à la République et canton de Genève, pour faire de Genève un village gaulois ! Voilà le rêve de M. Pagani, qui jouerait le rôle d'Astérix, en moins drôle bien sûr !
Mesdames et Messieurs, ce sont les managements de ces grandes maisons qui, en fonction de critères nouveaux correspondant aux besoins des consommateurs, déterminent les lieux où elles doivent s'implanter. Et il serait peut-être judicieux que le Conseil d'Etat mène une étude plus approfondie pour voir quels sont les terrains qu'on pourrait proposer pour ces grands centres de distribution. Ceux-ci ont un grand intérêt, parce qu'ils offrent une catégorie d'emplois de moyen à bas de gamme, qui répondent aux besoins de certaines personnes dans ce canton, où domine le tertiaire. C'est le genre d'emplois que le tertiaire n'offre pas et je crois qu'il est bienvenu qu'une société offre des emplois à tous les échelons de la hiérarchie sociale, pour tout le monde. Dans ce sens, il est ridicule et scandaleux qu'un syndicaliste comme M. Pagani n'arrive pas à saisir cette opportunité, ne comprenne pas que c'est une chance que des grands centres veuillent s'installer à Genève !
Regardez ce qui se passe actuellement, Mesdames et Messieurs ! Autour de Genève, en France voisine, toute une série de grands centres de distribution se sont installés à la périphérie pour attirer la clientèle genevoise. Préférez-vous dégoûter les gens qui veulent investir chez nous, créer des emplois, répondre aux besoins des consommateurs ? Préférez-vous inciter les gens à aller acheter à l'extérieur, et que les emplois se créent en France voisine ? Bravo, Monsieur Pagani ! Comme fossoyeur de l'emploi, on ne fait pas mieux !
Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut savoir raison garder. La proposition du rapporteur de majorité est sensée ; elle permettrait de déterminer quels sont les endroits où on pourrait, à moyen terme, implanter ces centres de distribution, qui sont les bienvenus pour l'économie genevoise, pour l'emploi et pour les besoins des consommateurs, n'en déplaise à une gauche conservatrice, totalitaire et enferrée dans ses vieux tabous ! (Exclamations et bravos.)
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Très brièvement, je dirai que tout est une question de termes. M. Grobet appelle «grignotage de la zone industrielle» ce qui, en réalité, n'est qu'une tentative de répondre aux besoins et de mettre ladite zone en adéquation avec la demande. J'entends la demande réelle, et non pas celle rêvée, d'activités secondaires, dont on peut être nostalgique mais qui, dans ce canton, ont fait place à d'autres activités, également porteuses de prospérité. Prospérité que je relève en passant, car je crois que, dans ce canton, il existe une réelle prospérité; mais elle est due à divers types d'activités et pas nécessairement exclusivement aux activités du secteur secondaire.
M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, à partir d'un cas précis, vous avez fait un vaste débat sur les zones industrielles et, cas échéant, les zones commerciales. Cette motion demande au Conseil d'Etat de faire un rapport sur le projet de Brico-Loisirs de la Migros dans la zone de la Praille. J'ai fourni à la commission de l'aménagement toutes les indications que je connaissais. Si vous souhaitez que je vous les donne par le biais d'un rapport, je le ferai volontiers, mais il n'y aura pas grand-chose de plus que ce que je vous ai déjà dit. Quant aux conséquences sur les centres Brico-Loisirs de Meyrin et de Chêne-Bourg, j'interpellerai volontiers la Migros, mais elle me répondra ce qu'elle voudra ! Cela dit, si vous souhaitez que les réponses que je vous ai données fassent l'objet d'un rapport du Conseil d'Etat, je n'y ai pas d'objection.
J'en viens à l'invite proposée par M. Koechlin qui me demande «d'indiquer dans quelles zones le Conseil d'Etat considère pouvoir implanter les activités de même nature que celles de Brico-Loisirs». Je réponds : dans la zone adéquate, Monsieur Koechlin, vous le savez, qui n'est évidemment pas la zone industrielle, vous le savez aussi. C'est-à-dire soit une zone votée en tant que telle, soit dans la zone 3 de développement, par le biais d'un plan localisé de quartier qui, comme dans la plupart des cas, réserve une partie logement, une partie équipements publics et quelques surfaces d'activités. Il est vrai qu'en zone de développement les surfaces d'activités sont en général peu importantes et qu'il pourrait être justifié, dans tel ou tel périmètre, qu'elles le soient plus.
C'est dire, et cela tombe sous le sens, que les dérogations en zone industrielle ne sont en tout cas pas une méthode d'aménagement du territoire. Il doit y avoir un débat. S'agissant précisément du déclassement du terrain Pfister, j'ai ouvert le débat, dans un sens qui n'a d'ailleurs pas toujours plu, mais la décision a au moins été prise démocratiquement par le Grand Conseil, et non par voie de dérogation.
M. Dupraz m'a beaucoup surpris, car je le connais extrêmement jaloux du pouvoir politique en matière d'aménagement, lorsqu'il a expliqué froidement qu'en réalité ce sont les managements des grandes sociétés qui décident ce qu'il faut faire. Monsieur Dupraz, je vous ai connu plus ardent défenseur des prérogatives du parlement ou des autorités élues. Il est vrai que l'on ne peut pas méconnaître les réalités économiques, mais encore faut-il que les autorités constituées aient leur mot à dire ! (Commentaires et brouhaha. Le président agite la cloche.)
Mesdames et Messieurs les députés, les centres commerciaux ont une certaine importance, ils présentent un certain nombre d'avantages, mais nous ne devons pas nous cacher leurs graves défauts et les difficultés qu'ils posent en matière d'aménagement du territoire, en matière de transports, en matière de concurrence avec le petit commerce, en matière d'emplois dans la mesure où il s'agit souvent d'emplois importés et non de réponses aux problèmes d'emploi locaux. Je n'ai pas d'objection fondamentale à ce qu'il y ait des centres commerciaux sur le territoire du canton de Genève, mais à condition que les différents problèmes posés par l'existence même des centres commerciaux soient réglés. En effet, même parmi ceux d'entre vous qui souhaitez l'implantation de centres commerciaux, j'ai entendu que vous ne souhaitiez pas que Genève ressemble à certaines banlieues françaises, où les centres commerciaux et les voitures se suivent les uns derrière les autres. C'est un aménagement du territoire dont personne ne veut. Et si personne n'en veut, cela implique précisément que les pouvoirs publics contrôlent quelque peu, et même un peu plus, ce processus.
Voilà ! Sur le fond, le débat peut certainement se poursuivre. Sur la motion en tant que telle, je vous ai dit dans quelle mesure et de quelle manière je pouvais y répondre. J'attends vos décisions à ce sujet.
Le président. Nous somme saisis, par le rapporteur de majorité, d'un amendement consistant à ajouter une deuxième invite, qui figure en page 2 du rapport. Je cite :
«- à indiquer dans quelles zones le Conseil d'Etat considère pouvoir implanter les activités de même nature que celles de Brico-Loisirs et selon quelle procédure.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1206)
sur la concentration d'activités commerciales dans la zone industrielle Praille-Acacias
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
invite le Conseil d'Etat
à lui faire rapport sur le projet de « Brico-Loisirs » de la Migros dans la zone industrielle de la Praille et sur les dérogations qu'implique ce projet ainsi que ses conséquences pour les centres de « Brico-Loisirs » de Meyrin et de Chêne-Bourg.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Crédits de fonctionnement
1 Un crédit extraordinaire de fonctionnement au maximum de 140 000 F est accordé à l'espace de vie enfantine, fondation de droit privé, sise à l'Hôtel des Finances, 26, rue du Stand, ci-après la crèche, au titre de subvention cantonale de fonctionnement couvrant la période d'exploitation de septembre à décembre 2000.
2 Une subvention annuelle au maximum de 400 000 F est accordée à la crèche au titre de subvention cantonale de fonctionnement dès 2001.
Art. 2 Budget de fonctionnement
1 Le crédit extraordinaire mentionné à l'article 1, alinéa 1 ne figure pas au budget de fonctionnement 2000. Il sera comptabilisé en 2000 sous la rubrique 21.02.00.365.01.
2 La subvention mentionnée à l'article 1, alinéa 2 est inscrite au budget de fonctionnement dès 2001 sous la rubrique 21.02.00.365.01.
Art. 3 But(s)
1 Cette subvention, ainsi que celle de la Ville de Genève, doit permettre à la crèche, d'accueillir des enfants d'âge préscolaire dont les parents travaillent à l'Hôtel des Finances ou habitent dans le quartier.
2 Elle doit notamment servir à couvrir tout ou partie du déficit d'exploitation mais dans les limites de montant fixées à l'article 1.
Art. 4 Durée
Elle est reconduite d'année en année sauf décision contraire du Grand Conseil.
Art. 5 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le Conseil d'Etat, en partenariat égal avec la Ville de Genève, vous sollicite aujourd'hui pour un projet social, l'ouverture de la première crèche, dans les locaux de l'Etat, soit à l'Hôtel des Finances. Compte tenu de la répartition des tâches entre la Ville et l'Etat, de l'expérience importante du département municipal des affaires sociales, plus particulièrement de son service « Délégation à la petite enfance », le Conseil d'Etat, soit pour lui, le Département des finances, a imaginé la nécessité d'une complète collaboration entre ces deux corporations de droit public pour ouvrir cette crèche. Cette nouvelle institution, fruit de la collaboration des deux entités précitées, sera une fondation de droit privé - on préserve ainsi l'équilibre au niveau public - dont les frais de fonctionnement seront couverts par les pensions payées par les parents (9 à12 % de leur revenus nets) et les subventions égales de l'Etat (dans les limites du projet de loi) et de la Ville.
Rappel de la situation de la petite enfance à Genève
Les publications de la Délégation à la petite enfance (voir notamment « La petite enfance en Ville de Genève », indicateurs en tendances, éd. 1998, No 2) résument la plupart des problèmes à résoudre par les privés et les collectivités publiques dans ce domaine et nous en donnons un bref aperçu ci-dessous.
Les femmes occupent de plus en plus une place sur le marché du travail et le taux d'activité des femmes mariées a plus que doublé entre 1960 et 1997, passant de 30 à 70 %. La tertiarisation de l'emploi à Genève et la possibilité de travailler à temps partiel favorisent l'activité professionnelle de la mère de famille.
Il y a 22'984 enfants de moins de 5 ans au 31 décembre 1997 dont un tiers fréquentent de manière régulière une institution de la petite enfance.
Pour résoudre le problème de placement des jeunes enfants, la capacité d'accueil a augmenté de 65 % dans les crèches entre 1987 et 1997. Il y a 152 institutions de la petite enfance dans le canton dont 34 crèches, en 1997. Trois demandes sur cinq ne peuvent obtenir satisfaction dans les crèches. Par crainte de ne pas pouvoir trouver de place pour leur enfant, les parents l'inscrivent à la crèche dès le début de la grossesse de la mère. Les demandent affluent au printemps, et en septembre. La famille se règle sur l'école, puisque pour certains, l'enfant passe de la crèche à l'école ; on harmonise donc les « rentrées ».
L'effort financier des pouvoirs publics est important dans ce domaine puisqu'on sait que la Ville de Genève couvre à hauteur de deux tiers les charges des institutions de la petite enfance sur son territoire ; cela signifie que les parents ne couvrent que le tiers des frais de fonctionnement, même si l'effort financier qui leur est demandé n'est pas négligeable pour leur budget familial, soit 9 à12 % des salaires nets. Les coûts de fonctionnement sont dus en partie à la progression des charges salariales, 70 % du personnel exerçant des charges éducatives pour lesquelles il a été dûment formé. L'encadrement éducatif de valeur, mérite une rétribution adéquate. En 1997, il y a en moyenne 6 enfants par poste éducatif dans les crèches. Compte tenu des stagiaires et auxiliaires, il y a en fait 9,5 enfants par employé(e) diplômé(e).
La fréquentation à temps partiel dans les crèches est en progession, se calquant sur les horaires de la mère. Les crèches sont fréquentées aujourd'hui par des enfants de tout milieu social. Les enfants de condition modeste, entre autres les enfants de familles monoparentales, y sont bien représentés. Quant aux autres enfants, leur placement est souvent sollicité pour des motifs de socialisation, d'intégration lorsqu'ils sont de langue étrangère notamment. La valeur éducative de la crèche qui complète celle offerte par la famille n'est donc plus à démontrer. L'accueil des jeunes enfants contribue à aider les mères à exercer harmonieusement une activité professionnelle souvent indispensable pour des raisons économiques.
Sans aller comme certains pays jusqu'à inscrire le droit à la crèche dans la constitution (Finlande), ou envisager une scolarisation dès l'âge de deux ans et par là-même une prise en charge étatique de l'éducation très tôt et certes coûteuse, on peut participer à la résolution du problème de l'accueil des moins de 5 ans par le soutien financier efficace des pouvoirs publics, aux structures encore privées destinées à la petite enfance. Une collaboration complète entre les collectivités publiques et les responsables des lieux d'accueil permet une bonne adéquation entre la famille, la structure d'accueil (crèche, jardin d'enfants ou école) et le monde professionnel.
Les parlements cantonal et municipal sont d'ailleurs parfaitement conscients de ces problèmes puisqu'ils ont voté en 1991, la création de la crèche-garderie pour la communauté universitaire (voir mémorial du Grand Conseil 1991, p. 1827 et ss), que la Ville de Genève finance en partenariat avec l'Université la nouvelle crèche au quai du Cheval-Blanc, près d'Uni-Mail. De plus, un rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la politique familiale répondant à diverses interventions parlementaires concernant la famille, du 10 novembre 1999, retrace aussi la problématique des diverses formes de soutien à la famille (RD 341 ; M 941-B ; M 1078 -A ; M 1090-A ; Q 3300). La motion 1314, déposée le 30 novembre dernier, concernant les structures d'accueil des enfants de 3 à 4 ans, au titre de soutien à la famille et au travail des femmes, est le signe récent d'un appel devenu nécessaire à la collaboration financière entre le canton et les communes pour permettre de compléter et parfaire le rôle social des collectivités publiques dans le domaine de l'éducation en partenariat avec la famille d'aujourd'hui.
Présentation de la crèche sise à l'Hôtel des Finances
Depuis de nombreuses années, notamment lorsque l'Etat a commencé à décentraliser ses services, à construire notamment « l'Hôtel des Finances », avec des locaux modernes et tout neufs en 1982, des idées de crèche ont circulé parmi le personnel. Les femmes y sont nombreuses comprenant parmi elles beaucoup de jeunes mères. La Commission du personnel du Département des finances, plus particulièrement constituée de représentants de l'administration fiscale cantonale, a demandé à plusieurs reprises qu'une crèche soit créée à l'Hôtel des Finances. La présidente du département des finances, Mme Micheline Calmy-Rey, préoccupée de la condition féminine en général et de celle de mère exerçant une activité professionnelle en particulier, a annoncé, dès l'automne 1997, au moment de son élection au Conseil d'Etat, qu'une crèche puisse voir le jour dans les murs de l'Hôtel des Finances.
A ce jour, entre 70 et 100 enfants du personnel de ce département sont en âge d'en bénéficier. Des places supplémentaires pour les enfants des habitants du quartier sont aussi nécessaires. En effet, les trois crèches qui sont dans les environs de l'Hôtel des Finances sont saturées.
Fondation de droit privé
La crèche en constitution est une fondation de droit privé. Cette solution est choisie parce qu'elle permet aux deux collectivités publiques qui la soutiendront financièrement d'avoir un droit de regard égal dans la structure aidée. Le but de la fondation est de permettre aux parents d'enfants d'âge préscolaire qui travaillent à l'Hôtel des Finances ou habitent le quartier de les confier, pendant leurs heures de travail, à un établissement de la petite enfance. La fondation est responsable du bien-être des enfants lorsqu'ils sont à la crèche, mais ne se substitue pas à la responsabilité éducative des parents.
Dans le Conseil de fondation, l'Etat et la Ville de Genève, subventionneurs à égalité, auront chacun deux représentants.
Les ressources de la fondation sont constituées des pensions versées par les parents, des subventions officielles et privées, des dons et legs. Le prix de pension payé par les parents est conforme au barème des prix de pensions fixé par la Ville de Genève (9 à12 % du salaire net).
Localisation de la crèche
Les locaux qui lui sont destinés ont été prévus dans l'Hôtel des Finances, secteur « Clos Bouillane » (perpendiculaire à la rue du Stand, au rez-de-chausssée, sur 300m2 de surface brute. Les enfants disposeront d'une place de jeux engazonnée, derrière les locaux de l'Office des transports et de la circulation, au 20, rue du Stand, soit à proximité immédiate de leurs propres locaux. La crèche aura sa propre entrée, donnant sur le « Clos Bouillane ».
Nombre des places disponibles et horaire d'ouverture
Le service d'évaluation continue des lieux de placement pour enfants et adolescents, service de protection de la jeunesse dépendant de l'Office de la jeunesse, sur la base des plans qui lui ont été soumis, a donné, le 15 février 2000, un préavis favorable pour une capacité d'accueil de 35 enfants présents. Il pourrait s'agir de 10 bébés jusqu'à l'âge de la marche et 25 enfants de la marche à 4 ans.
La crèche sera ouverte 12 heures par jour soit par exemple de 7h30 à 19h30.
La Ville et l'Etat se partageant à égalité les frais de fonctionnement de cette nouvelle structure, ils disposeront chacun de la moitié des places. Cela signifie qu'il y aura 17 places pour des enfants du quartier. Les prestations publiques sont ainsi mises à égalité à disposition du contribuable-parent et du contribuable-fonctionnaire.
A l'Hôtel des Finances, le personnel s'inquiète déjà de la date d'ouverture de l'institution, de l'accord du Parlement pour permettre cette ouverture puisqu'elle est subordonnée à une aide financière. A l'extérieur de l'Hôtel des Finances - puisque la rumeur a déjà couru de l'éventuelle ouverture d'une nouvelle structure pour la petite enfance - on se renseigne. Ainsi donc tant à l'intérieur de l'Hôtel des Finances que dans le quartier, on sollicite des places pour des enfants.
Budget de la fondation
Le budget de la fondation figure en annexe. On y constate un déficit de fonctionnement de. 729'393 F. D'une manière générale, le coût d'un enfant dans ce type d'établissement est d'environ 20'000 F. La Ville et l'Etat souhaitent prendre en charge le déficit précité de fonctionnement par moitié chacun. Cela revient à solliciter de votre Parlement 400'000 F, part de l'Etat pour une année. Compte tenu de la date d'ouverture de la crèche souhaitée au 1er septembre 2000 - parce qu'elle correspond à un moment favorable pour l'entrée en crèche, la sortie arrivant au moment de l'admission à l'école publique - il est sollicité une subvention partielle pour l'an 2000 soit 140 000 F comprenant le salaire d'une directrice avec les charges, engagée deux mois avant l'ouverture. En effet, pour assurer un bon fonctionnement de la crèche dès septembre, il sera nécessaire d'engager notamment la directrice dès juin-juillet 2000 pour qu'elle puisse préparer l'équipement et l'organisation demandés par le service d'évaluation des lieux de placement pour enfants et adolescents (Service de protection de la jeunesse).
Collaboration étroite entre Ville et Etat
Il faut souligner que ce projet est possible grâce à une collaboration complète entre la Ville et l'Etat.
L'Etat met à la disposition les locaux gratuitement, sans reporter les loyers, l'énergie, l'assurance-incendie ou les coûts des travaux pour aménager la crèche. Ces travaux ont néanmoins eu un coût, soit 650'000 F. La participation du fonds Eckert, en payant les infrastructures mobilières et octroyant le capital de dotation de 10'000 F de la fondation, est aussi un autre élément dont il faut tenir compte. Il participera d'ailleurs également par la suite, à part égale avec la Ville de Genève, au renouvellement/remplacement du matériel, mobilier de la crèche. Le Département de l'instruction publique, soit pour lui le service d'évaluation continue des lieux de placement pour enfants et adolescents, par ses échanges et conseils nombreux et fructueux au Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, chargé d'établir les plans de la crèche, a joué un rôle important pour trouver des solutions d'utilisation optimale des 300 m2 disponibles.
La Ville gérera les salaires du personnel et sera office payeur, en appliquant ses normes de salaires selon la convention collective relative aux salaires de la petite enfance comme elle le pratique pour ce type d'institution subventionnée. Le personnel est assuré à la FOP (fondation de prévoyance en faveur du personnel des institutions subventionnées), comme tout le personnel des crèches subventionnées par la Ville de Genève. En ce qui concerne le paiement des pensions dues, la fondation se chargera des écolages, mais à l'aide de logiciels fournis par la Ville de Genève.
Le Département des finances est depuis plusieurs mois en contact avec la Délégation à la petite enfance de la Ville de Genève, pour mettre au point ce projet. Ce service, grâce à son expérience, a pu donner des conseils pour les locaux et participera au choix du matériel nécessaire à l'exploitation de la crèche. Ce travail de consultant offert gratuitement par la Ville représente un coût non facturé. Le personnel de la crèche pourra aussi compter sur l'appui de la Ville pour composer et mener son programme éducatif auprès des enfants.
La Ville, l'Etat et la fondation de droit privé, dans les limites du présent projet de loi, en conformité du règlement relatif aux conditions de subventionnement des institutions de la petite enfance, signeront en sus une convention de partenariat.
Enfin, cette collaboration permettra l'ouverture de la crèche, sise à l'Hôtel des Finances, aux enfants du quartier, démontrant ainsi que les deux collectivités publiques mettent leurs structures - bien qu'elles revêtent ici la forme d'une fondation droit privé - à disposition de la population.
Conclusion
Au vu des explications ci-dessus, nous sollicitions, Mesdames et Messieurs les députés, votre bienveillant examen en vue de l'octroi de la subvention nécessaire au fonctionnement de la crèche, sise à l'Hôtel des Finances, qui doit contribuer à améliorer l'accueil de la petite enfance.
Annexe : budget de la crèche
910
Préconsultation
M. Pierre Ducrest (L). Nous y voilà donc ! Voici quelques mois, j'avais développé une interpellation urgente, par rapport aux rumeurs qui couraient dans la République, pour savoir ce qu'il advenait de cette crèche et comment elle allait être réalisée. Ce soir, nous avons une partie de la réponse sous forme d'un projet de fonctionnement de ladite crèche - qui n'est pas un petit projet, j'y reviendrai tout à l'heure. Concernant le reste de la réponse que j'aurais souhaité recevoir, il n'y a malheureusement qu'une lumière diffuse, qu'une lumière tamisée dans l'exposé des motifs. Celui-ci parle, à propos de l'investissement et des travaux nécessaires à l'implantation de cette crèche, de 650 000 F, mais ceci n'est pas tout. En effet, cette crèche va bénéficier de locaux qui étaient nécessaires pour des salles de conférence ; par conséquent, dans le même Hôtel des finances, il faudra bien reaménager des salles de conférence, ce qui aura un coût. D'autre part, l'aménagement du clos dit Bouillane, derrière l'Hôtel des finances et derrière les locaux de l'OTC de 20, rue du Stand, entraînera aussi un coût.
Lundi, j'ai posé la question du coût à M. Moutinot, lors de son audition à propos des comptes de son département, mais je n'ai pas eu de réponse. En effet, nous traitions les comptes 1999 et il était un peu difficile de donner les dépenses réelles pour la crèche en 2000. Cela dit, comme ce soir nous avons la chance d'avoir parmi nous la présidente du département des finances et le président du DAEL, j'espère que je vais avoir, tout à l'heure, les réponses qui me manquent. D'autant plus, Mesdames et Messieurs, que naguère nous avons voté un projet de loi modifiant la LDTR, qui a été adopté récemment par le peuple du bout des lèvres, dans lequel on mélangeait un peu tout, c'est-à-dire la rénovation, la transformation et l'entretien. Dans le cas présent, 650 000 F, plus le reste, est-ce de l'entretien, des transformations, des aménagements, on ne le sait pas ! Alors, à toutes ces questions, qui concernent l'installation et l'investissement, j'aimerais bien obtenir une réponse.
D'autre part, au niveau du fonctionnement, la combinazione entre les représentants de la Ville de Genève et le département des finances montre à l'envi que cette crèche est très chère au niveau du fonctionnement, du fait des normes outrancières que l'on impose dans ce domaine. Nous sommes bien sûr acquis au principe des crèches, qui sont nécessaires, mais nous sommes aussi acquis à une saine gestion des deniers publics, y compris dans le cadre des crèches. Or, ces normes qui entraînent des coûts de plus de 20 000 F, voire de 25 000 F par enfant et par année, ont des effets énormes qu'il faut prendre en compte. En l'occurrence, le problème est le suivant : notre parlement est appelé à voter une loi qui prévoit, pour 2001, une subvention de 400 000 F, mais qu'en sera-t-il plus tard ? Vous savez tous, Mesdames et Messieurs les députés, que les subventions que l'Etat accorde aux différentes sociétés, différents groupements, augmentent souvent automatiquement, d'année en année, simplement du fait que les personnes qui travaillent dans ces groupements sont assimilés aux fonctionnaires, sont soumis aux règles de la fonction publique et que, si les salaires de la fonction publique augmentent, ces salaires-là augmentent aussi. Il y a donc, dans ces histoires de crèches, quelque chose qui nous interpelle : on nous demande 400 000 F pour 2001, mais que va-t-il se passer plus tard ? Si, chaque année, on nous demande une somme toujours plus grande, ce ne sera jamais fini et, un jour, ce ne sera plus le coût de la crèche mais le coût total des subventions qui devra faire l'objet d'un débat de fond dans ce parlement.
Voilà les réponses, Madame la présidente, Monsieur le président, que j'aimerais obtenir. Ensuite, nous verrons comment la discussion se poursuivra en commission des finances, puisque celle-ci a déjà commencé.
Mme Nelly Guichard (PDC). Comme nous l'avons dit à maintes reprises dans cette enceinte, nous sommes favorables à l'ouverture de crèches et savons que l'offre est encore largement insuffisante par rapport à la demande, puisque seules trois demandes sur cinq sont satisfaites. Par contre, nous nous étonnons quelque peu de voir surgir, comme par miracle - et Dieu sait si le parti démocrate-chrétien est prêt à croire aux miracles ! (Exclamations et rires.) - ... à l'intérieur de l'Hôtel des finances, une crèche pour laquelle ce Grand Conseil n'a jamais vu le moindre projet de loi pour financer une quelconque transformation de locaux.
Heureusement que, dans sa grande générosité, la Ville a offert gratuitement ses services de consultant pour l'aménagement des locaux et le choix du matériel, comme nous avons pu le lire en page 8 de l'exposé des motifs : «Le département des finances est depuis plusieurs mois en contact avec la délégation de la petite enfance de la Ville de Genève pour mettre au point ce projet. Ce service, grâce à son expérience, a pu donner des conseils pour les locaux et participera au choix du matériel nécessaire à l'exploitation de la crèche. Ce travail de consultant offert gratuitement par la Ville représente un coût non facturé.» Merci à la Ville ! L'Etat vous en sera éternellement reconnaissant !
Si je vous ai fait la lecture de ce paragraphe, c'est parce qu'il est à l'image de la crèche qui est mise en place, avec des normes très strictes en vigueur en Ville de Genève et édictées, de par ce fait, pour le reste du canton. La prise en charge, la socialisation des petits enfants doit être faite dans de bonnes conditions, certes, mais pas dans le luxe, avec des normes tellement excessives qu'elles empêchent d'autres crèches de voir le jour dans des quartiers, dans des villes suburbaines, dans des entreprises, dans des villages, et je le déplore.
Au sujet du projet de loi 8198, je trouve très bien d'accueillir 35 enfants, mais ne pourrait-on pas en accueillir davantage ? A part cela, 400 000 F, c'est beaucoup pour 17 enfants du personnel de l'Hôtel des finances. C'est une somme rondelette et qui, de surcroît, ne nous dit pas comment le personnel perçoit cette prise en charge très partielle des 70 à 100 enfants potentiellement concernés. Pour le surplus, je peux juste dire que je m'étonne qu'on traite le sujet en commission avant qu'il n'ait été formellement envoyé à la commission concernée par le Grand Conseil, comme M. Ducrest l'a relevé tout à l'heure.
Mme Dolorès Loly Bolay (AdG). Je ne partage pas et l'Alliance de gauche ne partage pas, mais pas du tout, l'avis des libéraux. Nous considérons au contraire que ce projet est à saluer et qu'il est, comme le dit l'exposé des motifs, un véritable projet social.
Nous avons eu le loisir, mardi passé, d'entendre M. Manuel Tornare et notre camarade Mme de Tassigny... (Exclamations et brouhaha.) ... nous dire qu'aujourd'hui il y a un manque de places dans les crèches en Ville de Genève. On compte 46 crèches en Ville de Genève et les deux tiers des demandes ne sont pas agréées. Ce projet vient donc à point. Certes, la capacité d'accueil, dans un quartier défavorisé comme le quartier de la Jonction, n'est peut-être pas suffisante, mais c'est un pas en avant. Il faut savoir qu'aujourd'hui beaucoup de familles et, parmi elles, beaucoup de familles défavorisées sont aux abois, car elles n'arrivent plus à trouver des places pour leurs enfants. C'est pourquoi nous saluons cette démarche. Nous voterons ce projet de loi et je tiens à remercier Mme Calmy-Rey de son initiative.
Mme Christine Sayegh (S). Le groupe socialiste salue aussi l'heureuse initiative du Conseil d'Etat et plus particulièrement de Mme Calmy-Rey d'avoir concrétisé l'idée d'une crèche à l'Hôtel des finances. Ce projet permet de contribuer au dynamisme de la politique de la famille ; il permet à beaucoup de femmes, d'hommes aussi, de ne pas se trouver toujours devant le dilemme : le travail ou l'enfant. Il y a lieu aussi de reconnaître que c'est un bon appui à nos initiatives sur l'assurance-maternité. Cela encouragera Mesdames et Messieurs à fonder des familles et à rajeunir notre société, qui en a besoin.
Nous saluons également la collaboration de la Ville et du canton. Nous nous plaignons souvent des doublons : aujourd'hui, nous pouvons saluer cette collaboration. Quant au coût de ce projet, Mesdames, Messieurs, je dirai que c'est un investissement essentiel pour notre société, pour une société que nous souhaitons de qualité. Aussi, nous espérons une ambiance joyeuse dans cette future crèche, à l'image de Jaques-Dalcroze, dont nous fêtons le jubilé cette année, et du cabaret de ses chansons Nix, Nax, Nox ! Nous nous réjouissons donc de traiter ce projet en commission.
Le président. Dans cette agréable ambiance, je donne la parole à M. Dupraz !
M. John Dupraz (R). Mesdames et Messieurs les députés, il peut vous paraître étonnant qu'un vieux macho comme moi s'intéresse à un tel sujet, ce d'autant plus qu'issu d'un milieu rural, élevé à la campagne, travaillant à la campagne, j'ai eu un privilège : nous avons eu le bonheur d'avoir trois enfants et ma femme, restant à la maison, a pu s'en occuper avec attention et leur consacrer tout son temps quand ils étaient petits. Mais, aujourd'hui, il clair que les temps ont changé, que la société actuelle exige, bien souvent, que l'époux et l'épouse aient un emploi et je dois dire que la crèche est un moyen de garder les enfants en famille, de les préparer, de les épanouir pour l'école. En l'occurrence, ce projet est un bon projet, d'autant plus excellent qu'il démontre que la collaboration entre la Ville et l'Etat n'est pas impossible. Sur des bons projets, elle peut se concrétiser.
Alors, il est vrai que l'on pourrait ergoter, comme certains le font, sur les prix, les coûts, mais pour moi les enfants n'ont pas de prix et pas de coût... (Applaudissements.) ...ils sont l'avenir de notre société. Si, jusqu'à maintenant, les politiciens et les responsables des deniers publics des parlements municipaux ou cantonaux, voire des Chambres fédérales, se préoccupent beaucoup des personnes âgées - ce qui est juste aussi - il ne faut pas oublier que les enfants sont l'avenir de la société et du pays. Ils méritent notre attention et nous devons fournir des efforts concrets pour les préparer à prendre la relève et qu'enfin il y ait de bons députés dans ce parlement dans vingt ans ! (Applaudissements.)
Mme Micheline Calmy-Rey. Un mot pour répondre aux interrogations de M. Ducrest. Monsieur Ducrest, le coût des investissements est couvert par la rubrique du DAEL «Rénovation, transformation et adaptation des bâtiments». Je vous ai dit que je vous donnerai le numéro de ladite rubrique lors de notre prochaine séance de commission. Quant à parler de combinazione Ville-canton, Monsieur Ducrest, je ne peux accepter ce terme : ce n'est pas une combinazione, c'est un partenariat Ville-canton, qui permet de financer à 50% chacun le fonctionnement de cette crèche, qui permet aussi d'ouvrir la crèche sur le quartier, ce qui est, à mon sens, un immense plus. En outre, c'est un premier partenariat entre la Ville et le canton, ce qui démontre tout de même que c'est une chose possible. Je remercie ici la délégation de la petite enfance pour sa collaboration.
Par ailleurs, il est absolument faux de dire que c'est une crèche chère, Monsieur Ducrest. Ce n'est pas une crèche plus chère que les autres, c'est une crèche qui applique les normes de la Ville en matière de salaires du personnel et en matière de participation des parents aux coûts de fonctionnement. D'ailleurs, dans votre calcul, vous n'avez probablement pas vu que la participation des parents vient en diminution du coût de fonctionnement. Ce n'est donc pas 30 000 F de déficit, mais bien 20 000 F par enfant, qui seront à couvrir pour moitié par le canton, pour moitié par la Ville ; par conséquent, ce n'est pas une crèche plus chère que les autres.
Enfin, je voudrais encore dire une chose : ce projet me tient à coeur, parce qu'il fait partie d'une politique du personnel que je souhaite, une politique qui vise à motiver les gens, à les fidéliser, à ce qu'ils se sentent bien à l'endroit où ils travaillent. Il me tient à coeur pour une deuxième raison, c'est qu'il offre une possibilité aux femmes de disposer des infrastructures nécessaires pour travailler tout en ayant des enfants. A cet égard, il est quand même piquant que, ce soir, ce soit un député radical qui doive défendre cette crèche, alors que les PDC la critiquent ! (Applaudissements.)
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
Lors de sa séance du 19 janvier 2000, tenue sous la présidence de M. Bernard Lescaze, la Commission des finances a examiné le présent projet de loi visant à autoriser le Conseil d'Etat à transférer le portefeuille des actions nominatives Crossair du patrimoine administratif au patrimoine financier.
Présentation du projet
L'Etat de Genève possède actuellement 21'500 actions nominatives Crossair.
Initialement, la participation de l'Etat de Genève au capital de la compagnie Crossair par la possession d'actions était considérée comme une des missions de l'Etat.
C'est la raison pour laquelle sur les 21'500 actions nominatives Crossair dont l'Etat dispose, 12'500 sont inscrites au patrimoine administratif.
La teneur de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, entrée en vigueur le 7 octobre 1993 (LGF), article 62, alinéa 2, précise la définition du patrimoine administratif comme suit :
« Le patrimoine administratif comprend les biens affectés à l'accomplissement des tâches publiques. Ce sont notamment les investissements, les prêts, les subventions aux investissements, ainsi que les participations permanentes ou dotations »
L'article 62, alinéa 2, de la LGF indique également que « Le patrimoine financier comprend les valeurs et les placements qui peuvent être aliénés. » Le Conseil d'Etat souhaite pouvoir envisager de les vendre.
La possession de ces actions n'entre pas dans la définition du patrimoine administratif de la LGF - « accomplissement des tâches publiques ».
Il convient par conséquent de transférer ces 12'500 actions au patrimoine financier afin d'assurer la mise en conformité du bilan de l'Etat avec la LGF.
Travaux de la commission
Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Département des finances, précise que le Conseil d'Etat souhaite pouvoir envisager de vendre ces actions.
La valeur fin janvier d'une action Crossair était de 780 F, ce qui représentait un capital investi de près de 17 millions.
La vente de ces actions permettrait de réduire d'autant la dette de l'Etat.
La plus-value éventuelle réalisée figurera dans les comptes de l'Etat en tant que recette sous la nature 424.01 « Gains comptables sur les placements du patrimoine financier ».
Dans certains cas et pour des raisons bien précises, la possession d'actions dans une entreprise peut figurer dans le patrimoine administratif de l'Etat.
Tel n'est aujourd'hui pas le cas des actions de la compagnie Crossair dont le développement se fait depuis l'aéroport Bâle-Mulhouse.
L'Etat de Genève a du reste renoncé à son siège dans le conseil d'administration de Crossair suite à la décision de l'assemblée générale des actionnaires, en juin 1999, de réduire le nombre d'administrateurs de 17 à 9.
Conclusion et vote de la commission
En conclusion, c'est à l'unanimité que la Commission des finances vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter le projet de loi 8162 tel que présenté par le Conseil d'Etat.
Premier débat
Mme Marianne Grobet-Wellner (S), rapporteuse. Je voudrais préciser, à titre indicatif, que la valeur des actions dont il est question est de 730 F aujourd'hui.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8162)
autorisant le Conseil d'Etat à transférer le portefeuille des actions nominatives Crossair du patrimoine administratif au patrimoine financier
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Transfert du patrimoine administratif au patrimoine financier
Le Conseil d'Etat est autorisé à transférer les 12 500 actions nominatives Crossair du patrimoine administratif au patrimoine financier.
Art. 2 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
La Commission des finances a examiné cette motion lors des séances des 2 et 9 février 2000 sous la présidence de M. Bernard Lescaze.
A l'origine, la motion faisait référence au projet de loi 6909 concernant les enveloppes budgétaires, qui est un problème distinct de l'organisation et du fonctionnement de l'administration. Simples à écrire sur le papier mais complexes à mettre en oeuvre et surtout, ce sont des problèmes distincts.
Un objectif est de simplifier les hiérarchies, mais à l'Etat le problème principal est lié au fait que l'on donne des augmentations de salaire par le biais des hiérarchies. Il serait plus utile de se concentrer sur le problème des cloisonnements horizontaux où il serait certainement possible de faire quelque chose. Quant aux structures participatives, elles sont une autre affaire et une autre difficulté qui ne s'inscrit pas forcément dans l'organisation même. Elles sont essentiellement relationnelles et il faut surtout faire en sorte que ni les syndicats, ni le Conseil d'Etat ne les considèrent comme des rivaux. S'agissant de l'enveloppe budgétaire, le problème est d'une autre nature, qui pose la question du contrôle. Quant aux relations avec les administrés, ce n'est pas un fonctionnement horizontal qui mènera à être plus aimable avec l'administré. C'est la raison pour laquelle il vaudrait la peine de bien distinguer les problèmes plutôt que de renvoyer la motion telle quelle.
Plusieurs commissaires proposent de supprimer l'invite sur le système d'enveloppe budgétaire qui pose un ensemble de questions complexes, notamment sur le contrôle démocratique.
Cependant, si l'on veut élargir et renforcer les structures participatives, il faut que le Parlement soit partie prenante. S'agissant de l'évaluation des fonctions, il y a toujours le problème de la formation continue et l'idée est de faire reconnaître notamment les fonctions d'expertise. A titre d'exemple, la conseillère d'Etat parle de l'AFC qui compte quelque 450 collaborateurs, dont 40 postes de chefs de service. Le plan de carrière est extrêmement rigide et il est aisé de comprendre pourquoi les taxateurs s'en vont dès qu'ils sont formés. De plus, il existe différents degrés de connaissance à l'intérieur de la fonction de taxateur qui, pour l'instant, ne sont pas reconnus. Au bout de tant d'années de fonction, un collaborateur va être nommé sous-chef de service, chef de service, sous-directeur, directeur adjoint, ce qui mène à une administration extrêmement hiérarchisée. C'est la raison pour laquelle le fonctionnement de la structure participative doit être examiné en parallèle avec une réforme du système d'évaluation des fonctions.
Quant aux commissions du personnel, le constat paraît simple à faire. Lorsqu'elles soulèvent un certain nombre de problèmes, lors de décisions de l'autorité politique, on ne veut pas en entendre parler. Ceci ne signifie pas que la Commission du personnel doive gérer à la place de la direction du service mais que son opinion soit au moins relayée auprès de l'instance politique. A titre d'exemple, une décision du Département de l'action sociale et de la santé a mené à ce que toutes les avances AI passent par l'OCPA, malgré l'avis de la Commission du personnel de l'Hospice général qui estimait que l'invalidité était liée à d'autres phénomènes dont la dépendance à l'alcool, aux drogues et à des problèmes psychiques nécessitant un encadrement minimum. Cet avis n'a pas été pris en compte et il a fallu faire marche arrière quelques années plus tard, après s'être rendu compte que les personnes concernées allaient sans autre demander une avance AI à l'OCPA, avec les conséquences financières que cela suppose dès le moment où la décision est négative. Le retour des dossiers à l'Hospice général s'est traduit par une augmentation subite de la charge de travail des collaborateurs. Cet exemple démontre que les prestations aux usagers et les conditions de travail du personnel sont souvent étroitement imbriquées. D'autres propositions de la part de la Commission du personnel ont mené à une fin de non-recevoir. Les seules fois où elle a pu se faire entendre ont découlé de l'engagement d'un rapport de force, précisément après une fin de non-recevoir.
Suite à cette discussion nourrie, la commission a amendé la motion comme suit :
Le Grand Conseil
invite le Conseil d'Etat
à faire un état des lieux, rapporter sur les expériences en cours et mettre à l'étude :
la constitution de structures permanentes de participation du personnel ;
la simplification des hiérarchies dans la fonction publique ;
le décloisonnement horizontal à l'intérieur des services et entre les services.
Au vote, la motion ainsi amendée est acceptée par 9 OUI (2 AdG, 2 S, 2 Ve, 1 R, 2 DC) et 4 abstentions (3 L, 1 R).
La commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. Les réponses du Conseil d'Etat sont attendues avec la présentation du rapport de gestion et des comptes 1999.
Débat
M. Dominique Hausser (S), rapporteur. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion démontre que gouverner, c'est prévoir ; c'est la raison pour laquelle la commission des finances, dans sa majorité, vous recommande de la renvoyer au Conseil d'Etat.
M. Pierre Ducrest (L). Cette motion est le genre de motion qui semble aller dans le bon sens au début et qui finalement va dans l'autre sens. Cela fait de nombreuses années que nous réclamons une simplification des hiérarchies dans la fonction publique, de même que le décloisonnement horizontal à l'intérieur des services et entre les services. Nous souscrivons donc entièrement aux deux invites des motionnaires sur ce sujet. Par contre, comme souvent dans des motions ou des projets de lois, il y a une exagération qui met à bas tout l'édifice. En l'occurrence, c'est la première invite qui demande «la constitution de structures permanentes de participation du personnel». Là, c'est la boîte de Pandore : il suffit de l'ouvrir et tout peut en sortir ! Nous avons déjà vu, lors des négociations entre le Conseil d'Etat et la fonction publique qui ont eu lieu il y a deux ans, ce qu'il est advenu.
Alors, nous n'allons pas épiloguer, mais n'ayant pas l'assurance que la simplification voulue par cette motion soit bien ciblée, nous nous abstiendrons, en regrettant toutefois de ne pouvoir suivre les deux autres invites.
Mme Micheline Calmy-Rey. J'avais cru le parti libéral très attaché à la réforme de l'Etat. Mesdames et Messieurs, vous l'avez demandée à plusieurs reprises, vous êtes revendicateurs sur ce sujet. Aujourd'hui, on vous propose une motion qui demande des informations sur des réformes en cours, que ce soit la réforme du système d'évaluation des fonctions, ou la mise en place de structures participatives dans un gros service pour la refonte informatique de l'administration fiscale cantonale, et vous refusez qu'on vous donne ces informations ! Permettez-moi tout de même de m'étonner. En tout cas, en ce qui me concerne, je souhaite pourvoir donner ces informations au Grand Conseil et c'est la raison pour laquelle j'ai demandé que cette motion me soit renvoyée, afin que je puisse vous répondre.
M. Pierre Ducrest (L). Madame la présidente du département des finances, je viens de dire que nous étions entièrement d'accord sur deux invites de cette motion. Je croyais avoir été assez clair, mais il semble que je n'ai pas été compris et, s'il faut le répéter, je le répète.
Nous sommes quémandeurs sur ce sujet, c'est vrai. Vous-même, hier, dans le communiqué du Conseil d'Etat, vous disiez que vous alliez dans ce sens-là. Mais, en l'occurrence, il y a une phrase dans cette motion qui ne nous plaît pas, parce qu'elle va trop loin. Nous savons bien ce qu'on va faire de cette phrase : on va instituer un soviet, c'est ce que veulent certains. Quant à nous, nous aimerions que, dans une administration qui compte 23 000 collaborateurs, on arrive à des simplifications, comme nous vous le demandons budget après budget.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(993)
concernant la gestion de l'appareil de l'Etat
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
invite le Conseil d'Etat
à faire un état des lieux, rapporter sur les expériences en cours et mettre à l'étude :
la constitution de structures permanentes de participation du personnel ;
la simplification des hiérarchies dans la fonction publique ;
le décloisonnement horizontal à l'intérieur des services et entre les services.
Lors de sa séance du 26 janvier 2000, la Commission des finances, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, a traité le projet de motion 1108. La conseillère d'Etat Micheline Calmy-Rey, présidente du Département des finances et M. Cordt-Møller, directeur général des finances du DF, ont participé à la réunion. Mme Eliane Monnin a tenu le procès-verbal.
Mme Calmy-Rey, coauteure de cette motion déposée en décembre 1996, a rappelé qu'elle s'était à l'époque insurgée contre le manque de transparence des dépenses générales résultant des reports de crédit. Malheureusement, ces lacunes de clarté restent parfois d'actualité. A titre d'exemple, le report de crédit de 30 millions d'économies sur les dépenses générales ne sera pas apparent dans les comptes 1999. Des correctifs ont déjà été apportés en regroupant tous les reports de crédit sur une rubrique particulière et en repartant à zéro tous les quatre ans. Il faut tout de même admettre que ce système a permis de réaliser un certain nombre d'économies non négligeables. M. Jean-Paul Pangallo, directeur du budget, a d'ailleurs rédigé une note sur cet objet dans le rapport de gestion montrant que les reports de crédit, depuis leur mise en place, avaient permis d'économiser un montant de l'ordre de 100 millions.
M. Cordt-Møller admet également qu'il n'y a pas une transparence totale à l'examen des dépenses générales selon le principe « budget = comptes ». Toutefois, cette transparence se retrouve, d'une part dans un document extra comptable présentant les économies réalisées et, d'autre part, sur la position 319 qui apparaît actuellement dans les comptes.
Quant à la réflexion approfondie sur les procédures budgétaires, dans un objectif de transparence et de cohérence, demandée au travers de la motion, elle a fait l'objet des premières modifications de la loi sur la gestion administrative et financière présentée au Grand Conseil. L'application des normes comptables internationales IAS permet d'atteindre ce but. Une deuxième série de modifications de la loi sur la gestion administrative et financière est en préparation et sera présentée avec les comptes 1999. En outre, un autre dossier est ouvert, sur l'évolution des règles dans le cadre du projet « services publics 2005 ». Il a débuté avec l'expérience des services pilotes NPM qui va s'achever à fin 2000. L'examen de ce qui pourra être repris ou au contraire rejeté sera intégré dans le dossier SP 2005.
Les commissaires reconnaissent qu'une partie des invites de la motion sont désormais concrétisées.
Vote de la motion 1108
En conclusion, la commission vote, à l'unanimité, le renvoi de la motion 1108 en soulignant que malgré les explications données en commission, Mme Micheline Calmy-Rey souhaite apporter une réponse plus détaillée notamment sur les reports de crédit et la gestion des enveloppes budgétaires.
Débat
M. Christian Brunier (S), rapporteur. Je vais être très bref, pour faire plaisir à M. Annen qui me le demande ! En 1996, le groupe socialiste, sous l'impulsion d'une députée très prometteuse, Micheline Calmy-Rey, avait déposé une motion contre le manque de transparence des dépenses générales résultant des reports de crédits. Depuis, il y a eu quelques changements, notamment au département des finances ; il y a eu quelques améliorations de fonctionnement, notamment en matière de transparence des finances publiques, avec l'instauration, entre autres, de la norme comptable internationale IAS, qui permet d'avoir plus de transparence et de clarté dans les finances de l'Etat. Nous avons donc décidé, à l'unanimité de la commission des finances, de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, pour qu'il nous fasse l'inventaire de ce qui a été réalisé et nous donne éventuellement quelques pistes complémentaires. Nous attendons ce rapport avec impatience lors du traitement des comptes 1999.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1108)
concernant les procédures budgétaires
LE GRAND CONSEIL,
considérant que :
- les comptes et les budgets présentent quelques défauts en regard des principes de la gestion administrative et financière admis par l'usage et par la loi, défauts d'ailleurs mis en évidence par les experts de la fiduciaire chargée de conduire l'audit global de l'Etat,
invite le Conseil d'Etat
- à renoncer à des adaptations ponctuelles de la pratique comptable, pratique admise par la loi et les usages, et notamment à renoncer au mécanisme de comptabilisation des reports de crédit tel qu'il est appliqué depuis trois ans et au système des enveloppes budgétaires, tel qu'il est introduit aujourd'hui dans nos budgets et dans nos comptes, c'est-à-dire sans renforcement des procédures d'évaluation et de contrôle;
- à entreprendre une réflexion approfondie sur les procédures budgétaires dans un objectif de transparence et de cohérence;
- à présenter au Grand Conseil un ensemble de principes comptables sous forme de loi permettant aux députés(e)s de mener un travail sérieux de suivi et de contrôle.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
l'impact positif de l'utilisation des transports publics sur la qualité de vie, l'environnement et la circulation en milieu urbain ;
le prix élevé des titres de transports publics, facteur qui n'encourage pas leur utilisation et favorise indirectement l'usage de moyens de transport individuels ;
la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA) du 2 septembre 1999 ;
la probable augmentation à terme du taux de TVA suisse afin de le rapprocher de la moyenne européenne, ce qui aurait pour conséquence, dans les conditions actuelles, d'augmenter le tarif des transports publics ;
l'exonération intégrale en Italie, en Irlande, en Norvège et au Danemark de la TVA sur les transports publics, et le taux zéro appliqué en Grande-Bretagne ;
la réduction du taux de TVA accordée sur les prestations des transports publics dans tous les pays membres de l'Union européenne ;
l'existence en Suisse d'un taux de TVA différencié, avec application d'un taux intégral sur les prestations de transports publics ;
invite les autorités fédérales
à réviser la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA) afin que les prestations des transports publics soient soumises à un taux de TVA réduit, en maintenant la pleine récupération de l'impôt payé au préalable pour les entreprises prestataires.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a été introduite le 1er janvier 1995 en remplacement de l'impôt sur le chiffre d'affaire (ICHA). Le taux maximal était alors fixé à 6.5 %. L'article constitutionnel prévoyait cependant une augmentation de 1 % si le financement des assurances sociales n'était plus assuré. Le législateur a fait usage de cette possibilité en fixant le taux maximal de TVA à 7.5 % le 1er janvier 1999.
Mais ce taux est maximal. En Suisse comme ailleurs, le taux est différencié selon les biens et services. La loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA) du 2 septembre 1999 prévoit ainsi différentes catégories :
un taux de 7.5 % appliqué à la plupart des biens et services, avec possibilité pour l'entreprise prestataire de récupérer l'impôt préalable payé sur les frais consentis ;
un taux de 3.5 % sur les prestations du secteur de l'hébergement, avec possibilité de récupérer l'impôt préalable ;
un taux de 2.3 %
LTVA, article 36
l'exclusion de la taxe pour certains biens et services.
LTVA, article 18
l'exonération de la taxe.
LTVA, article 19
l'exemption de la taxe.
LTVA, article 25
Le taux de TVA n'est donc pas uniforme en Suisse. En particulier, certains biens et services sont soumis à une TVA plus basse afin de faciliter voire encourager leur consommation. En général, ce sont des produits de première nécessité ou des prestations que les autorités veulent promouvoir.
C'est le cas des nombreuses exceptions prévues dans la loi. Cependant, les prestations de transports publics n'en font pas partie. Pourtant, l'impact positif de leur utilisation sur l'environnement et la qualité de la vie n'est plus à démontrer. On en veut pour preuve que la TVA appliquée aux transports publics est réduite partout ailleurs en Europe !
Ainsi, tous les Etats membres de l'Union européenne appliquent une TVA préférentielle. Le Danemark, l'Irlande, l'Italie et la Norvège (hors UE), exemptent totalement les transports publics, sans toutefois que la TVA payée au préalable puisse être récupérée. En Grande-Bretagne, l'incitation est encore plus grande puisque le taux est nul et la taxe récupérable sur les frais. Enfin, comme vous pouvez le constater sur le tableau annexé, la TVA est réduite dans tous les autres pays de l'Union européenne, de moitié au minimum, toujours avec la possibilité de récupérer l'impôt préalable.
La Suisse est donc un des seuls pays européens dont la politique fiscale n'encourage pas l'utilisation des transports publics ! De plus, avec un taux qui risque bien d'augmenter ces prochaines années afin de le rapprocher des normes européennes, le prix des transports publics pourrait être renchéri d'autant.
Au début de cette année, sans une motion votée par ce Grand Conseil, les prix des transports publics genevois auraient pu augmenter. Or, si l'on souhaite encourager l'usage des transports publics, il est urgent d'agir tant au niveau de l'offre de transport que de son prix. La proposition d'une TVA réduite, sur l'un des modèles actuellement en vigueur en Europe, va dans cette direction. La formulation de cette motion est volontairement ouverte, afin de laisser libre cours à la créativité de nos parlementaires fédéraux. Nous vous signalons que le Grand Conseil zurichois a déjà adressé une demande similaire aux autorités fédérales.
En vous remerciant de réserver un bon accueil à cette résolution, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à l'envoyer directement aux autorités fédérales.
ANNEXE
Tableau - 13 pays européensTVA standard, TVA transp. publics, Réduction accordée
Pays
TVA standard, %
TVA transp. Publics, %
Réduction accordée, %
Allemagne
15
7
53
Autriche
20
10
50
Belgique
21
6
71
Danemark
25
Exonération
100
Espagne
16
7
56
France
20,6
5,5
73
Grèce
18
8
56
Irlande
Exonération
100
Italie
19
10
Transp. Urbain : Exonération
47
100
Luxembourg
15
3
80
Pays-Bas
17,5
6
66
Royaume-Uni
17,5
0
100
Suisse
7,5
7,5
0
Source : Tableau publié dans "; Public Transport International, mai 1995, page 80, et complété par nos propres informations.
Débat
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). A l'heure où les normes OPAir et OPB doivent être respectées, il est impératif que le transfert modal se pratique aisément et que les automobilistes laissent leur voiture au parc-relais et prennent les transports publics. Or, les prix des transports publics genevois ne sont pas particulièrement bas, les normes OPAir et OPB ne sont pas respectées et la TVA en Suisse risque d'augmenter.
Tout ceci nous a amenés à demander, via cette résolution, à nos autorités fédérales d'envisager une TVA réduite pour les transports publics. Cela n'a rien d'extraordinaire, si l'on regarde ce qui se passe en Europe à ce sujet et c'est une chose indispensable à l'heure où la votation sur les bilatérales approche. On voit que c'est une pratique courante en Italie, en Irlande, en Norvège et au Danemark. En Grande-Bretagne, mieux encore, on applique le taux zéro. La démarche, en Suisse, d'une TVA différenciée est depuis longtemps entrée dans les moeurs. Le taux maximal est de 7,5%, rappelons-le. Un taux de 3,5% se pratique dans l'hôtellerie, de 2,3% sur de nombreux produits, dont je ne citerai que quelques-uns : produits comestibles, boissons, fleurs, livres, journaux, etc. L'exonération et l'exemption de la taxe se pratique aussi. Dès lors, pourquoi ne pas envisager une TVA réduite pour les transports publics ? L'impact positif de leur utilisation sur l'environnement et la qualité de la vie n'est plus à démontrer.
Nous vous demandons d'envoyer cette résolution non pas à Berne, comme demandé dans le texte que vous avez sous les yeux, mais à la commission législative. Celle-ci examinera sous quelle forme elle travaillera à cette résolution, afin qu'elle soit considérée comme une initiative cantonale et qu'elle ne termine pas sa route dans une corbeille à papier !
M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais dire, au nom de l'Alliance de gauche, que nous soutenons cette résolution. Mais il y a effectivement un problème en ce qui concerne la suite donnée à de telles résolutions visant à concrétiser le droit d'initiative cantonale. Je crois que notre sautière, Mme Hutter, s'en est préoccupée. Quant à moi, en ma qualité de conseiller national, je puis dire que, ces cinq dernières années, les résolutions votées dans ce Grand Conseil entendant faire usage du droit d'initiative n'ont jamais été traitées à Berne comme initiatives cantonales.
Il y a donc effectivement un problème de forme à résoudre, si nous voulons que nos démarches à Berne visant à utiliser le droit d'initiative aient la suite que nous souhaitons. C'est pourquoi nous appuyons le renvoi de cette résolution à la commission législative. Il serait intéressant que Mme Hutter assiste aux débats et nous indique peut-être, avec l'expérience qu'elle a du parlement fédéral, quelles seraient les solutions les plus appropriées sur le plan formel.
M. Jean-Marc Odier (R). L'argument principal de cette demande de réduction de TVA, c'est l'encouragement des moyens de transports occasionnant moins de nuisances au niveau de l'environnement et de la qualité de vie. Cela dit, si l'objectif poursuivi est tout à fait correct, parce qu'il correspond à un intérêt public, je pense que les transports publics ne sont pas la seule entreprise effectuant des transports collectifs et ce qui est juste pour une entreprise publique devrait aussi l'être pour une entreprise privée. C'est pourquoi je vous propose un amendement consistant à remplacer dans l'invite les termes «transports publics» par «transports collectifs». Avec cet amendement, le groupe radical votera la résolution.
M. Jean Spielmann (AdG). Je voudrais faire deux observations. La première sur le fond : il est clair que la TVA appliquée aux transports soulève une série de questions, notamment par rapport au reste des pays européens. Ainsi, les transporteurs suisses paient la TVA, mais les transporteurs de voyageurs étrangers qui traversent le pays en transit n'en paient pas ou moins, selon le pays d'où ils viennent. Il y a là un problème de concurrence et d'égalité de traitement entre des modes de transport identiques. En l'occurrence, le problème est débattu à Berne : le rapport sur la modification de la loi sur la TVA va être présenté prochainement au Conseil national et il y a, parmi la liste des initiatives des cantons en suspens à Berne, une initiative à ce sujet déposée par le canton de Zurich.
En s'appuyant notamment sur l'article 93 de la Constitution, le canton de Zurich a en effet déposé une initiative aux Chambres fédérales - je rappelle que l'initiative des cantons a la même valeur qu'une initiative déposée par un député des Chambres fédérales, ou qu'une initiative populaire - et que cette dernière demande qu'il soit appliqué aux transports publics une taxe sur la valeur ajoutée d'un taux réduit et qu'il leur soit accordé la possibilité de déduire la totalité de l'impôt préalable. L'initiative zurichoise lie donc le problème du montant de la TVA à prélever et de la déduction de l'impôt préalable. En effet, il est plus intelligent de demander une réduction du taux plutôt que la suppression de la TVA, puisque si on supprime la TVA - comme cela a été demandé par exemple par les sportifs - cela implique qu'on ne peut plus déduire ensuite l'impôt préalable. Le texte qui nous est proposé prévoit, en l'occurrence, un taux réduit plutôt que la suppression et je pense que c'est intelligent. Reste à prévoir aussi le problème de l'impôt préalable.
Sur la forme, en fonction de la rédaction des textes tels qu'ils ont été présentés, il y a en ce moment deux initiatives cantonales genevoises qui sont à l'ordre du jour des Chambres fédérales et qui ont été, toutes deux, adressées au Conseil des Etats. Il s'agit de l'initiative concernant la garantie du salaire en cas de congé maternité et de l'initiative sur la révision de l'assurance-maladie. Seules ces deux initiatives ont passé le cap et il est donc effectivement intelligent d'examiner la procédure pour que cette résolution aboutisse. A part l'initiative du canton de Zurich, le rapport sur la modification de la loi sur la TVA va être traité prochainement au Conseil national et il faudrait donc faire assez vite. Si on utilise la même démarche que pour les deux initiatives que je viens de citer, la présente initiative aboutira et ensuite le Conseil national et une commission décideront laquelle des deux Chambres est prioritaire. Dans les deux initiatives évoquées, c'est le Conseil des Etats qui l'était. Il faut savoir qu'à Berne les objets parlementaires qui ne sont pas traités dans un délai de deux ans sont automatiquement mis au rebut et qu'il faut, dans ce cas, revenir à la charge. C'est le sort qui a été réservé à quelques-unes de nos initiatives ; il n'en reste que deux aujourd'hui dans les annales fédérales.
Ce problème de la TVA ayant déjà été soulevé par Zurich, il conviendrait d'adresser le plus rapidement possible notre texte à Berne. Il suffit de l'amender et qu'il soit conforme à la législation pour qu'il aboutisse. Lorsque la commission législative examinera la conformité du texte, qu'elle essaie d'y inclure le problème de l'impôt préalable, ainsi on aura un texte complet.
M. Pierre Ducrest (L). Il est vrai que payer la TVA, cet impôt indirect, n'est jamais très satisfaisant quand il s'agit de transports publics. Nous pourrions le concevoir si Mme Schenk-Gottret n'avait prononcé certaines phrases dirigées contre la voiture : la voiture provoque des nuisances, il faut donc absolument prendre les transports publics et pour ce faire il faut baisser la TVA ! Il y a d'autres arguments que nous aurions pu admettre pour baisser la TVA.
Par ailleurs, je relève une incohérence dans certaines démarches. Voilà une résolution qui est déposée par des gens qui font partie de la commission des transports et notamment de la majorité de la commission des transports. Or, la majorité de cette commission a tripatouillé le contrat de prestations des TPG que ce parlement doit bientôt voter, avec la complicité du Conseil d'Etat, puisque ce dernier a avalisé les desiderata de la majorité de la commission. D'une part, le contrat de prestations interdit dorénavant d'augmenter le prix des billets et il faudra, par conséquent, augmenter la subvention. Mais, en plus, le Conseil d'Etat a commis l'erreur de retirer les deux projets de lois relatifs au transfert d'actifs des TPG, que ceux-ci réclamaient à hauts cris puisque ce transfert aurait permis d'avoir une réduction de TVA. Cette réduction de TVA aurait bien sûr agi sur les frais d'exploitation des TPG, laissant ainsi plus de marge de manoeuvre sur les prix des billets.
En conclusion, nous sommes d'accord avec l'amendement déposé par M. Odier au nom des radicaux. Nous verrons ce qu'il adviendra de cette résolution, mais nous aimerions quand même voir une meilleure cohérence dans les démarches des proposants, qui proposent quelque chose d'un côté et exactement le contraire, de l'autre !
Mise aux voix, cette proposition de résolution est renvoyée à la commission législative.
La Commission des finances a traité cet objet lors de sa séance du 8 décembre 1999, sous la présidence de M. Bernard Lescaze et en présence de M. Patrick Pettmann, directeur général de l'office du personnel de l'Etat.
La teneur de cette pétition est la suivante :
Pétition(1236)
concernant la modification de l'article 32 des statuts de la CEH et de l'article 14A de la loi sur le personnel de l'Etat (B 5 15)
Les soussignés, membres pensionnés des Etablissements publics médicaux genevois, représentés par l'association ADP-EPM, demandent l'annulation de l'article 32 des statuts de la CEH et la modification de l'article 14A de la loi, en vertu de l'article 36, alinéa 2 de la LPP, afin de remédier à l'injustice dont sont victimes les pensionnés de la CEH.
Ils vous prient de bien vouloir demander au Conseil d'Etat de soumettre à votre Conseil une proposition de modification des articles de statuts et de loi susmentionnés, car vu les décisions du Conseil d'Etat de suspendre l'indexation des salaires de la fonction publique (juin 1992), les pensionnés les moins nantis ont été durement frappés dans leur pouvoir d'achat.
L'assemblée générale de la CEH a voté à l'unanimité, en novembre 1992, décision renouvelée en 93, 94, 95, 96 et 97, la modification de l'article susmentionné.
Nous rappelons que l'indexation des pensions au coût de la vie est à la charge de notre caisse de prévoyance (CEH), qui a déclaré en avoir les disponibilités financières.
Le comité de l'ADP-EPM est à votre disposition pour toute audition que vous jugerez utile.
N.B. : 719 signatures
ADP-EPM, M. Etienne Voldet, 95, avenue Bois-de-la-Chapelle, 1213 Onex
Audition de M. Etienne Voldet et de Mme Gautier, délégués de l'ADP-EPM auprès du comité de la caisse de prévoyance du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève (CEH)
L'ADP-EPM
L'Association des pensionnés des Etablissements publics médicaux a été créée le 13 décembre 1995 et s'est fixée pour but la défense des intérêts des anciens employés et fonctionnaires des Hôpitaux Universitaires Genevois. L'association est à l'origine de la pétition 1236, laquelle a réuni l'adhésion de 719 personnes.
La CEH c'est…
3000 pensionnés pour 11 000 cotisants ;
l'obligation d'affiliation pour tout le personnel selon les mêmes critères que la LPP ;
une pension moyenne de 1600 F, montant modeste en raison de l'obligation tardive d'être assuré (1979 pour les travailleurs de l'hôpital de Loëx et la Maison des convalescents) et surtout en raison de la proportion importante de travailleurs appartenant aux petites classes de traitements (4, 5 ou 6), nettoyeurs, employés de cuisine, aides hospitalières, aides de buanderie, infirmières assistantes…
Le patron de la CEH c'est…
Théoriquement, l'assemblée générale de la CEH, puisqu'elle a pour compétence de discuter et d'approuver les modifications statutaires.
L'assemblée générale de la CEH du 19 novembre 1992, par exemple, a adopté un nouvel article 32 de ses statuts qui prévoit l'indexation des pensions à l'indice genevois du coût de la vie.
Dans les faits, c'est le Conseil d'Etat. En effet, si toute modification des statuts de la CEH doit être approuvée par le Grand Conseil, celui-ci ne peut se prononcer que sur une proposition du Conseil d'Etat. La modification votée le 19 novembre 1992 à l'unanimité n'a pas franchi l'obstacle du Conseil d'Etat… malgré les promesses de M. Olivier Vodoz, ancien conseiller d'Etat, de M. Gérard Ramseyer et de Mme Calmy-Rey, conseillers d'Etat.
Objet du litige
C'est bien de l'indexation des rentes de la CEH au coût de la vie qu'il s'agit. Le Conseil d'Etat en reste à l'ancien article 32 des statuts de la CEH et à l'article 14A de la loi B 5 15 sur le traitement du personnel de l'Etat, stipulant que « les pensions des membres du personnel ou leurs ayants droit sont indexées selon les mêmes règles que pour les membres du personnel en activité ».
En liant l'indexation des pensions aux accords signés entre le Conseil d'Etat et les associations du personnel de la fonction publique, les rentes ont perdu 9,58 % de leur pouvoir d'achat entre 1992 et fin 1998 ; la perte sera d'environ 11 % à fin 2000. On a quelques pincements de coeur lorsqu'on sait qu'il y a beaucoup de pensions versées aujourd'hui qui sont de 500 à 600 F par mois. Beaucoup des pensionnés de la CEH doivent faire appel à l'OCPA pour compléter leurs revenus.
Selon les pétitionnaires, qui d'ailleurs ne réclament pas le versement rétroactif de ce qui leur est dû, la CEH a les moyens de supporter l'indexation annuelle, une indexation qui ne coûterait rien à l'Etat, car selon la lettre de la direction de la CEH au Conseil d'Etat du 25 mai 1993, on a admis à l'origine que le taux de cotisation de 21 % comprenait une composante de 4 % pour le financement à long terme du coût de l'indexation des pensions et qu'à fin 1992, c'est un capital de 140 millions qui a été accumulé dans cet objectif.
Et la CIA, et la CAP, et la caisse de la police ?
Le problème de l'indexation des rentes se pose aussi à la CIA. Une résolution des délégués du groupe F a été soumise à l'assemblée du 26 novembre 1996, par laquelle il est demandé la suppression dans les statuts de la CIA de la référence à la loi B 5 15.
Les statuts de la caisse d'assurance du personnel de la Ville de Genève, du personnel des Services industriels de Genève et du personnel communal transféré dans l'administration cantonale (CAP) prévoient à l'article 58 que « toutes les pensions de la Caisse sont complétées par une pension d'indexation adaptée au 1er janvier de chaque année, selon l'évolution de l'indice genevois des prix à la consommation, sous réserve des dispositions de l'article 96, alinéa 4 » (relatif aux écarts éventuels constatés dans le capital de pilotage).
La caisse de pension des fonctionnaires de la police et de la prison est la plus « choyée » selon les pétitionnaires, puisqu'avec les cotisations « spéciales » de l'Etat, le produit des ventes d'objets trouvés, etc., le retraité se retrouve avec une rente presque aussi élevée que son dernier salaire… Pour couvrir le déficit technique dû à l'indexation des retraites, cette caisse a prévu une cotisation d'adaptation égale à 6 % du traitement assuré.
Que demande l'ADP-EPM ?
Les pétitionnaires ne demandent pas un traitement aussi généreux que celui réservé aux pensionnés de la police et de la prison, mais au moins égal à celui réservé aux retraités affiliés à la CAP. La CEH, assurent-ils, en a les moyens et il n'en coûtera rien aux contribuables.
Discussion et vote de la commission
Au cours de la discussion, à laquelle participe M. Pettmann, il est fait remarquer que les pensionnés de la CEH n'ont pas été oubliés, puisque leurs rentes ont été réadaptées en 1993 et 1995 et qu'en 1997, 1998 et 1999, un montant forfaitaire de 420 F par année au maximum a été versé. La perte du pouvoir d'achat depuis 1992, de 10,54 %, n'est toutefois pas contestée. Selon M. Pettmann, on ne peut pas parler de blocage ; par ailleurs, il conteste l'affirmation selon laquelle la CEH a les moyens de faire face par elle-même à une indexation annuelle, ainsi que la prise en compte d'un 4 % en prévision des dites indexations. A noter qu'1 % d'indexation représente, pour l'ensemble des caisses de pension (CIA - CEH - CP), 3,6 millions de francs.
La droite libérale est d'avis que la CEH n'est pas à même de supporter techniquement les indexations, que les personnes qui ne cotisent pas à un 2e pilier devraient essayer de se constituer un 3e pilier par l'épargne, que l'arsenal des lois sociales en faveur des personnes âgées dont les revenus sont insuffisants est assez complet et que par conséquent la pétition est à déposer sur le Bureau du Grand Conseil.
Un avis qui n'est pas partagé par la gauche et par une partie des députés du centre, qui estiment que la pétition fait ressortir les inconvénients d'un système de retraite fondé sur le principe de la capitalisation, qu'il n'est pas normal que ce soit par la voie de compléments OCPA que l'on dove compenser des manquements au système d'un 2e pilier tel la CEH et que cette affaire doit être renvoyée au Conseil d'Etat pour trouver une solution dans le sens souhaité par les pétitionnaires.
Au vote, la pétition est renvoyée au Conseil d'Etat par 7 oui (2 AdG, 2 S, 2 DC, 1 R) contre 3 non (2 L, 1 R) qui souhaitent la classer et 1 abstention (Ve).
Débat
M. René Ecuyer (AdG), rapporteur. Il est un peu dommage que des anciens serviteurs de l'Etat doivent lancer une pétition pour se faire entendre. En fait, les retraités de la CEH ont, à plusieurs reprises et depuis plusieurs années, soulevé le problème de l'adaptation de leurs rentes mais celui-ci a été mis de côté.
En l'occurrence, lorsque des accords entre le Conseil d'Etat et les organisations de travailleurs des services publics prévoient de geler les salaires des fonctionnaires, les rentes sont également gelées. Avec ce système, la perte du pouvoir d'achat des retraités s'élèvera à fin 2000 à environ 11%, ce qui n'est pas tolérable. Ce d'autant que les salariés voient quand même une progression de leurs revenus grâce aux annuités et autres, ce qui n'est pas le cas pour les retraités. Les gens qui se sont exprimés en commission dépendent de la CEH, la caisse de retraite du personnel hospitalier. Ce sont en majorité des petits rentiers, c'est-à-dire des gens qui avaient de petits emplois de nettoyeurs ou autres dans les hôpitaux. La retraite moyenne de la CEH est de 1600 F et certaines retraites sont très basses, inférieures à 500 F. On voit ainsi des retraités des services de l'Etat faire appel aux prestations complémentaires pour pouvoir tourner, en raison du montant des loyers et d'une AVS insuffisante.
Nous vous recommandons donc, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter les conclusions du rapport, demandant au Conseil d'Etat d'aller dans le sens des pétitionnaires.
Mme Micheline Calmy-Rey. Depuis de nombreuses années, les associations de pensionnés demandent de découpler le système d'indexation entre le personnel en activité et les pensionnés de l'administration cantonale. Aucun consensus n'a pu être trouvé sur ce point jusqu'ici. Cette situation a conduit le Conseil d'Etat à autoriser, pour les années 1997, 1998 et 1999, le versement d'une prime annuelle unique de 2%, plafonnée à 420 F et non intégrée dans les pensions de base, à condition que les caisses de prévoyance concernées puissent, bien entendu, faire face au versement de ces primes annuelles. Vu le faible taux d'indexation prévu au 1er janvier 2000, j'ai proposé, dans une lettre datée du 8 février, adressée aux comités de la CIA et de la CEH et aux associations de pensionnés, de reconduire le versement d'une prime annuelle de 2%, plafonnée à 420 F, en décembre 2000. Cela nécessitera, après avoir obtenu l'accord des caisses et des associations, une décision du Conseil d'Etat.
Pour les années futures, je me propose de présenter au Conseil d'Etat un projet de loi qui modifie l'article 14A de la loi B 5 15, en maintenant le principe de l'indexation actifs-pensionnés, mais en prévoyant de verser aux pensionnés une allocation unique correspondant à l'inflation annuelle, sous déduction du taux d'indexation accordé aux membres du personnel en activité, s'il devait y avoir une différence. Le taux ainsi obtenu serait plafonné à hauteur d'une rente annuelle de 60 000 F, ce qui conduirait au versement d'un montant fixe pour les rentes annuelles supérieures à 60 000 F, et cela dans le but de répondre à votre souci, Monsieur Ecuyer, c'est-à-dire de ne pas prétériter les petits retraités. Cette prime unique ne serait pas intégrée dans les pensions de base.
J'ai écrit dans ce sens à la fois à la CEH, à la CIA et aux associations de pensionnés. J'attends leurs réponses, mais vous aurez compris que j'accepte bien volontiers la pétition qui m'est adressée. J'espère pouvoir revenir devant vous très rapidement, avec une solution qui rencontre l'agrément de tous.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des finances (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
invite le Conseil d'Etat
EXPOSÉ DES MOTIFS
La loi fédérale sur la libéralisation du marché de l'électricité (LME) a pour objectif, selon le désir du Conseil fédéral, de libéraliser le marché de l'électricité afin de le rendre compatible avec les règles de l'Union européenne, de garantir la concurrence et l'approvisionnement en courant de manière efficace par l'ouverture à de nouveaux producteurs ainsi que le libre choix des fournisseurs par les consommateurs.
L'intention est d'ouvrir le marché de l'électricité en prévoyant l'accès réglementé au réseau sur la base d'un accord. Les exploitants des réseaux, tels que les SIG, seront contraints d'acheminer, sans discrimination et sur une base contractuelle, le courant de leurs clients éligibles moyennant un dédommagement calculé en fonction des coûts nécessaires à l'exploitation.
A l'heure actuelle, nul ne sait le sort qui sera réservé au réseau de très haute tension. Il semble que le réseau de distribution, pour des raisons ayant trait à l'économie, à l'environnement, à la protection des sites et donc à la multiplication possible de ceux-ci, sera géré sous forme de monopole.
Il est admis que cette loi aura des effets financiers indirects sur les cantons et les communes. En effet, 75 % des entreprises de distribution et de production sont propriété des collectivités publiques. Or, cette libéralisation du marché de l'électricité entraînera un processus de concentration de sociétés avec à la clé, des fusions, des faillites, des pertes d'emploi, et une incidence sur la politique écologique et énergétique adoptée au niveau communal, cantonal et fédéral.
A la différence de la directive de l'Union européenne, qui prévoit son ouverture en trois étapes échelonnées sur 7 ans avec une pause lui permettant d'examiner l'opportunité de poursuivre l'ouverture, il est probable, vu le déroulement des travaux aux Chambres fédérales, que la loi prévoyant l'ouverture (libéralisation globale en 3 ou 6 ans) du marché entre en vigueur en 2001!
Le calendrier pourrait être le suivant :
fin 1999 → débats en commission du national
1er semestre 2000 → débats aux Chambres fédérales
délai référendaire → 3 mois
mise en vigueur → 2001
Domaines affectés par la libéralisation
La compétitivité qui sera instaurée dans ce secteur économique, par exemple la dénonciation anticipée de contrats, risque d'alourdir la charge que représentent les investissements non amortissables qui se chiffrent par milliards. Le renouvellement des équipements hydroélectriques, la question de l'abaissement de la redevance hydraulique, la garantie du service public et la réglementation des rapports internationaux sur le marché de l'électricité seront aussi affectés par cette libéralisation. A Genève, certaines communes estiment que la perte des recettes provenant des redevances pourrait avoir une incidence sur leurs finances. La perte des redevances actuellement versées aux communes pourrait causer une perte fiscale de 1 à 3 sur les centimes additionnels!
Marché suisse de l'électricité
Alors que la loi sur la LME n'est pas encore sortie des Chambres fédérales, le marché a déjà anticipé la tendance à la baisse des prix par l'obtention de rabais par les gros consommateurs. Ces rabais, il est vrai, ont été obtenus en engageant un combat politique avec la menace de conclure des contrats avec d'autres producteurs et de recourir à la commission de la concurrence. C'est ainsi que la Migros a conclu en 1999 un accord avec Watt Suisse (filiale du groupe germano-suisse) portant sur l'alimentation en énergie électrique de ses vingt-six fabriques helvétiques. Le rabais s'est chiffré à plusieurs millions. Malgré le refus des Entreprises Electriques Fribourgeoises d'ouvrir leur réseau à Watt Suisse, cette dernière a été mise sous pression et a dû consentir d'importants rabais. Le même scénario s'est produit avec le groupe Swissmétal et les Forces motrices bernoises.
Accentuation des disparités régionales
Selon l'Office fédéral de l'énergie et sur la base d'une étude d'Ecoplan, la libéralisation de l'électricité risque d'accentuer les disparités régionales. L'origine du problème viendrait du principe du consommateur-payeur qui introduira une dose d'inégalité entre les régions. En effet, les communes ne peuvent pas recevoir et payer le même service au même coût quand les densités de population et les tailles sont différentes. C'est ainsi que les coûts moyens par entreprise d'approvisionnement en électricité pour la distribution régionale et locale se situent entre 4,5 et 13 ct/kWh. Les distances et la topographie ayant une influence sur le coût de l'entretien et de l'acheminement, le coût peut osciller entre 4,8 et 23,1 ct/kWh selon la commune, soit des différences qui pourraient aller du simple au quadruple ! L'étude montre qu'en cas de grande consommation les coûts fixes seront d'autant mieux amortis. Cette économie d'échelle, si elle tire les prix vers le bas, incite néanmoins à une plus grande consommation et pourrait aller à l'encontre des principes défendus par toutes les collectivités publiques sur l'utilisation rationnelle de l'énergie. Dans ces conditions et afin d'éviter une forte disparité des prix d'utilisation du réseau, la loi sur la libéralisation doit intégrer une composante de solidarité. Dans le cas contraire, les entreprises industrielles et de services bénéficieraient d'un rééquilibrage en leur faveur, alors que les ménages risqueraient de passer, une fois de plus, à la caisse.
Risques pour les SIG
Si cette libéralisation devait se produire dans un délai tel que les petits consommateurs pourraient être éligibles, il est possible d'imaginer que les habitants, d'un quartier, d'une rue, les membres d'un groupement professionnel, d'une association, d'un syndicat ou d'un club se réunissent en groupement d'achat afin de négocier des prix plus avantageux. Ce cas de figure, pour les SIG, pourrait représenter non seulement une baisse sur son chiffre d'affaires, mais encore une remise en question de ses engagements à l'encontre d'EOS. Dans ce contexte, les SIG seront-ils contraints d'acheter le courant des auto-producteurs à 16 ct/kWh ?
Risques sur la qualité de l'approvisionnement
Cette même compétitivité, à l'heure actuelle, induit les sociétés productrices et distributrices à diminuer, de manière drastique, leurs investissements sur les équipements et les charges liées à l'emploi. Cette politique aura comme conséquence non seulement une augmentation des risques de pannes mais une diminution de la fiabilité de l'approvisionnement, et par conséquent de la qualité de la prestation qui était l'un des principes d'un service public fournisseur d'énergie.
Risques sociaux
Au sujet des conditions de travail, celles-ci risquent de se dégrader. On estime que les emplois de la branche devraient diminuer de 20 à 30 % par rapport aux effectifs actuels. Déjà, les SIG ont procédé à une réduction d'environ 10 % ces dernières années. Ces réductions d'emploi seront imposées soit au travers de fusions (rationalisation des activités) soit par une diminution drastique des coûts.
Les autres pays européens : exemples des conséquences de la libéralisation
Comme nous l'avons évoqué, la libéralisation du marché de l'électricité pourrait avoir un impact majeur sur les producteurs, les consommateurs, les collectivités genevoises et les employés de la branche. Les différents pays qui ont entamé ce processus en ont fait d'ailleurs l'expérience, comme vous pouvez le constater par ce bref tour d'horizon.
Pays-Bas
Un grand chambardement a eu lieu dans ce pays. Fusion ou disparition de la majorité des entreprises du pays. Le nombre des acteurs de la scène énergétique du pays pourrait être rapidement ramené à cinq ou six, contre une vingtaine de compagnies aujourd'hui. Une des conséquences étant la mainmise de groupes étrangers sur le secteur de la distribution électrique et gazière.
Allemagne
Les monopoles régionaux ont disparu depuis vingt et un mois, et 150 entreprises de trading ont fait leur apparition. Le marché a enregistré des baisses de tarif allant jusqu'à 50 % aux dépens d'exploitants d'ouvrages de production privés ou municipaux. Ce sont principalement les entreprises vouées exclusivement à la distribution qui ont bénéficié de ces baisses. Des magazines destinés au grand public n'hésitent pas à appâter leurs lecteurs en leur proposant de réduire la facture de 30 %. Pour la première entreprise électrique, cette politique de baisse de tarif s'est traduite par une chute des bénéfices d'environ 11 % et un recul du chiffre d'affaire de 15,5 %. Les fusions en cours vont entraîner la perte de 12'500 emplois !
Suède
Pas moins de 160 sociétés rivalisent pour vendre du courant aux particuliers. A l'image de ce qui s'est produit dans les télécommunications, les boîtes aux lettres débordent d'offres de promotion qui déboussolent les consommateurs.
Espagne
Marché libéralisé à concurrence de 50 % d'ici la fin de l'an 2000. La concurrence qui s'en est suivi a entraîné une baisse des coûts de production de l'ordre de 25 %. L'exigence d'une rétribution de la part du gouvernement des grandes entreprises du secteur de production d'énergie électrique, afin de faire face aux investissements non amortissables INA, pose non seulement un problème à celui-ci mais freine la cadence de la libéralisation.
Grande-Bretagne
Privatisée dès 1990, la distribution a fait l'objet dès 1995 d'une série d'offres publiques d'achats (OPA) de la part d'opérateurs américains et français. Le marché de la production est dominé par deux acteurs privés. L'électricité britannique vit actuellement un mouvement de rerégulation. Objectif : mieux répartir les bénéfices de la concurrence au profit des petits consommateurs, pour l'instant grands perdants de la dérégulation.
Norvège et Finlande
Dérégulé depuis la fin de 1998, ce marché totalement intégré s'est regroupé au sein de l'une des toutes premières bourses d'électricité européenne et a servi de laboratoire européen. A la baisse des tarifs dans un premier temps a succédé une augmentation. 30 % des emplois de la branche ont disparu en Norvège. Le niveau de sécurité des installations a fortement baissé.
France
Version minimale de l'ouverture, la France adopte le 1er février 2000, avec un an de retard sur ses partenaires, le projet « relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ». Le marché sera ouvert à concurrence de 30 % et 34 % en 2003. Les particuliers seront exclus de cette ouverture.
Principales compagnies européennes du marché de l'électricité.
Au niveau des entreprises, le paysage européen des principales sociétés présentes sur le marché de l'électricité a subi de grands changements. Le phénomène de concentration que l'on observe, puisque la plupart de ces sociétés résultent de fusions, pourrait avoir des conséquences directes sur la Suisse. Actuellement, les grandes compagnies européennes s'intéressent de près au marché suisse de production et de distribution de l'électricité.
La lecture de ces chiffres donne une idée des regroupements intervenus dans le marché de l'électricité et permet de comparer nos entreprises locales avec les principaux acteurs du marché européen. On peut se poser des questions lorsque l'on sait que certaines sociétés européennes s'intéressent au marché romand et en particulier très concrètement à l'hydroélectricité d'Energie Ouest Suisse.
La libéralisation du marché de l'électricité en Suisse pourrait donc avoir des conséquences importantes sur les différents acteurs de notre République et Confédération. Dans ce cadre, nous pensons qu'il est important que le Conseil d'Etat face preuve d'anticipation et procède à une évaluation des impacts économiques, sociaux et environnementaux de ce changement probable.
C'est dans cet esprit que nous vous prions, Mesdames et Messieurs les député-e-s, de renvoyer la présente motion au Conseil d'Etat.
Débat
M. Alberto Velasco (S). Quand on sait ce qui s'est passé dans certains pays où la libéralisation du marché de l'électricité a été mise en place, il y a lieu de se poser un certain nombre de questions sur les conséquences que cette libéralisation pourrait avoir chez nous.
Il a été dit ce soir que gouverner, c'est prévoir et je dis que prévoir implique aussi de connaître l'impact qu'aura cette libéralisation sur notre économie, sur l'Etat et aussi, pourquoi pas, sur la politique environnementale et le respect de notre constitution. Ce d'autant plus que le marché, aujourd'hui, non seulement s'accommode déjà de cette libéralisation mais la devance, en obligeant les Services industriels à pratiquer déjà des baisses de tarif assez conséquentes. Ceci ne se fera pas sans conséquences, puisque nous avons tous pu lire dans les journaux, ces derniers jours, qu'on prévoit environ 4000 pertes d'emplois dans ce secteur. Les intérêts des entreprises publiques seront aussi affectés et bien des services publics seront tentés de jouer la baisse des tarifs, ignorant les intérêts à moyen et long terme.
On connaît aujourd'hui la tendance qui se dessine aux Chambres pour une libéralisation douce. Nous pensons donc que ces études d'impact - qui au demeurant pourraient se faire en collaboration avec une série d'entités à Genève, comme le COPE, les SIG, l'OCEN, etc. - pourraient par la suite être bénéfiques à ces dernières. Tenant compte de ces considérations, nous vous demandons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de faire bon accueil à cette motion.
Mme Janine Berberat (L). Messieurs les motionnaires, vous demandez au Conseil d'Etat une étude d'impact qui devra porter autant sur l'entreprise des Services industriels et tous ses clients - privés comme publics - que sur l'environnement, le social, l'emploi et j'en passe. Vous faites, au niveau des considérants, un amalgame où vous juxtaposez intérêts économiques et contraintes de la politique énergétique et environnementale, et vous ignorez sans doute à dessein que la libéralisation a commencé, que les producteurs comme les exploitants s'organisent déjà en conséquence.
Le champ d'analyse que vous proposez pour cette étude est immense et les influences entre les secteurs concernés ne font qu'augmenter la difficulté d'approche. C'est un travail de longue haleine, qui coûtera cher, si on ne veut pas se limiter à une compilation de textes existants, et pour aboutir à quoi ? Vous êtes absolument muets sur le sujet ! Votre proposition de motion est non seulement frileuse, parce qu'elle cherche une forme de protectionnisme illusoire, mais aussi rétrograde, car, à travers l'exposé des motifs où vous affichez les résultats que vous craignez, vous évitez tout simplement de préparer l'avenir pour faire face aux difficultés qui doivent être affrontées.
Mesdames et Messieurs les députés, le train est déjà parti et c'est se leurrer de croire qu'une étude de plus va le stopper ou le freiner. Il est certain que cette libéralisation aura des conséquences de tous ordres et risque d'entraîner des clivages locaux. Elle va générer des restructurations importantes, engendrer, c'est vrai, des pertes d'emplois. Mais, sur ce point, permettez-moi de vous rappeler que nous avons pu lire dans la presse que les Services industriels entendaient passer le cap sans diminuer les emplois, ce qui ne peut que nous réjouir et qui pondère quelque peu les propos de M. Leuenberger.
Cette ouverture de marché va surtout - et c'est peut-être là que le bât blesse le plus - obliger à des modifications de comportement, qui était jusque-là plus proche du monopole que de la concurrence. Sans aucun doute, ces changements sont très importants, mais nous pouvons nous y préparer et il nous semble, à nous libéraux, que la priorité aujourd'hui est d'intervenir sur le terrain, plutôt que de peindre le diable sur la muraille. Par exemple, en mettant sur pied une structure d'information qui ne se limite pas à une bourse de données de prix, mais qui offre des programmes et des actions d'aide à la décision ; en sensibilisant les preneurs éligibles, comme le veut la conception que nous avons adoptée, à la qualité de l'énergie, à sa provenance et pas seulement à son coût ; en donnant aux Services industriels, par des décisions politiques courageuses et non partisanes, les moyens de réaliser une politique compétitive ; en valorisant les actions faites en faveur de l'environnement et des économies d'énergie par les entreprises privées, qui sont des acteurs importants dans cette libéralisation.
En résumé, il nous paraît, à nous libéraux, plus important d'investir pour construire ensemble un vrai partenariat entre fournisseurs, clients et instances politiques, au lieu de demander à l'Etat de payer une étude de marché pour le compte d'une entreprise, les Services industriels, qui a les moyens et surtout la volonté de la faire. C'est pourquoi le groupe libéral ne soutiendra pas cette motion.
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Le groupe des Verts ne peut soutenir cette motion, pour des raisons un peu différentes de celles du groupe libéral.
Cette motion demande une étude d'impact. Cette étude, fort évidemment, ne pourrait pas être réalisée par le Conseil d'Etat ni par les services de l'administration ; elle devrait être réalisée par des chercheurs, scientifiques, universitaires, à des coûts probablement fort élevés. Ces frais seraient naturellement tout à fait justifiés, s'il s'agissait d'une nécessité pour se faire une opinion en matière de libéralisation. Or, j'aimerais quand même rappeler à MM. les motionnaires que le Grand Conseil ne découvre pas réellement ce sujet, puisqu'il a notamment déjà voté deux résolutions contre la libéralisation du marché de l'électricité. J'ai suffisamment de respect pour les députés de ce Grand Conseil pour penser qu'ils votent en toute connaissance de cause et qu'ils n'ont pas déjà oublié les raisons pour lesquelles ils ont voté ces deux résolutions : en l'occurrence, cette proposition de motion est, à mon sens, un recul vis-à-vis de la position que le Grand Conseil a déjà prise en matière de libéralisation. D'ailleurs, si vous ne connaissez pas les arguments qui nous ont poussés à voter ces deux résolutions contre la libéralisation, je vous suggère de consulter la presse syndicale, où l'on trouve parfois des articles fort intéressants, écrits par les mêmes motionnaires !
C'est pourquoi les Verts ne soutiendront pas cette motion : ils savent d'ores et déjà pourquoi ils sont contre la libéralisation du marché de l'électricité.
M. Pierre Vanek (AdG). Trois mots sur cette question, qui a effectivement déjà fait l'objet de débats et de résolutions dans ce Grand Conseil. Madame Berberat, vous nous la jouez sur l'air : «La libéralisation est déjà en marche, c'est un bulldozer sur lequel on n'a guère prise - ce qui est largement vrai - mais les motionnaires ne le savent pas !» Or, au contraire, ils le savent et le dénoncent précisément, en citant par exemple les agissements de l'entreprise Watt, la spéculation sur le marché virtuel de l'électricité... On sait qu'aujourd'hui, bien que le marché ne soit pas encore ouvert, les entreprises vendent de l'électricité à terme en quelque sorte, en spéculant sur cette libéralisation, ce qui est parfaitement détestable et scandaleux. Vous ne pouvez donc pas nous la jouer comme cela, en disant simplement qu'il y aura des pertes d'emploi, mais qu'on n'y peut rien, qu'il faut faire ce qu'on peut pour un partenariat, et d'autres choses de ce type qui sont d'ailleurs en contradiction complète avec l'idée fondamentale, l'idée force de cette libéralisation. Cette idée force, c'est celle de la concurrence axée exclusivement sur l'aspect économique : que le plus fort gagne, que celui qui a les reins les plus solides fasse du dumping, reconstitue des monopoles privés, vende de l'électricité de qualité tout à fait discutable, sale, en provenance de Dieu sait quelle centrale nucléaire et de Dieu sait où !
Nous avons déjà entendu tout cela, nous avons débattu dans ce Conseil de la libéralisation. Pour ma part, je m'affiche franchement contre cette libéralisation et je considère que la bataille n'est pas perdue - si elle l'était, ce ne serait qu'une bataille, pas la guerre - et que nous devons donc la mener et ne pas nous accommoder des conséquences prétendument fatales et absolument nécessaires de la mondialisation et de la déréglementation, telles que vous les prônez. Conformément au petit échange que j'avais eu avec le conseiller d'Etat Robert Cramer suite à une interpellation sur la libéralisation, je pense toujours que celle-ci sape les bases d'une politique publique et démocratique de l'énergie, qu'elle sape la mise en oeuvre, par exemple, de la conception cantonale de l'énergie que nous avons votée récemment. Preuve en est qu'aujourd'hui - là, vous avez raison, Madame Berberat - cette libéralisation du marché de l'électricité est en route, alors qu'à ce stade aucune loi sur l'ouverture des marchés de l'électricité n'a encore été votée par un quelconque parlement. Les Chambres y travaillent, le délai référendaire n'est pas échu, c'est dire que ce fatalisme est inacceptable et même antidémocratique.
Dans ce sens, je salue le travail sérieux que les motionnaires ont fourni dans l'exposé des motifs, qui est d'une qualité supérieure à ceux des premières résolutions que nous avons votées ensemble, Mesdames et Messieurs, bien au-delà des bancs stricts de l'Alternative, d'ailleurs.
Maintenant, la motion invite le Conseil d'Etat à réaliser une étude d'impact sur cette question de la libéralisation. On trouve, dans l'exposé des motifs, toute une série d'éléments s'agissant de l'impact de cette libéralisation. On sait - je le lis en page 3 - que cela va affecter le renouvellement des équipements hydroélectriques. On sait ce que cela représente comme possibilités de rabais pour les gros consommateurs et de risques de pénalisation d'une politique d'utilisation rationnelle de l'énergie. On sait ce que cela représente - je trouve cela dans votre motion - en termes d'accentuation potentielle des disparités régionales. On sait qu'il y aura une incitation - je lis encore cela en page 4 de l'exposé des motifs - à une plus grande consommation, ce qui va à l'encontre des principes défendus par toutes les collectivités publiques et singulièrement par la nôtre. On sait qu'il y a des risques à tous les niveaux pour l'entreprise Services industriels de Genève, entreprise que nous détenons non pas pour faire de l'argent, mais pour assurer un service public pour tous. On sait que cela représente des risques pour la qualité de l'approvisionnement - je le lis toujours dans votre exposé des motifs. On sait aussi les risques sociaux en termes de suppression d'emplois, que Mme Berberat a eu la grâce de reconnaître tout à l'heure.
Par conséquent, à ce stade, inviter le Conseil d'Etat à préparer une étude d'impact, dans l'espoir de pouvoir nous déterminer d'après cette étude d'impact, c'est peut-être une étape un peu dépassée : vous savez, et vous les avez citées, toutes les conséquences de cette libéralisation. C'est aussi peut-être faire preuve d'angélisme : le Conseil d'Etat, qui serait, par hypothèse, mandaté pour faire cette étude d'impact, ne partage pas forcément les sensibilités en la matière de la majorité de cette assemblée.
Je ne sais donc pas si cette étude d'impact, telle que vous la demandez, est une bonne idée. En revanche, je salue le travail de préparation qui a été fait et je souscris non pas à chaque virgule, mais à l'orientation exposée dans l'exposé des motifs. Par rapport à cette question, qui est effectivement d'une actualité urgente, nous ne pouvons pas nous contenter des deux résolutions que nous avons votées il y a quelques mois et nous endormir sur nos lauriers. Aussi, pour en discuter, je vous propose, Mesdames et Messieurs les motionnaires, comme à l'ensemble de cette assemblée, non pas de voter cette motion sur le siège, mais de la renvoyer à la commission de l'énergie et des Services industriels pour faire le point sur cette question.
M. John Dupraz (R). Les gens qui ont déposé cette proposition de motion sont peu ou prou des employés ou des proches des Services industriels et je comprends qu'ils s'inquiètent quant à leur avenir. Cela dit, je crois qu'il faut situer le problème dans son contexte. Etre contre la libéralisation du marché de l'électricité, refuser que cela soit un fait inéluctable, etc., ce ne sont que des fables. Il y a une directive européenne qui règle la libéralisation du marché de l'électricité, dont les dispositions sont entrées en vigueur en 1999 et, en 2009, le marché européen sera libéralisé. Or, la Suisse est géographiquement au centre de l'Europe et son réseau de transport d'électricité est interconnecté avec l'Union européenne. Par conséquent, soit on prend des dispositions pour que cette libéralisation se passe le moins mal possible - c'est ce qu'essaient de faire les Chambres fédérales : la loi sur le marché de l'électricité a été votée par le Conseil national en mars dernier - soit on se déclare contre la libéralisation, on refuse tout, on lance un référendum contre la loi et on verra alors une libéralisation sauvage, bien pire que celle que nous essayons d'organiser pour qu'elle se passe le moins mal possible.
Je rappelle, s'agissant de libéralisation, que c'est la production qui est libéralisée... Vous pouvez hocher la tête, Monsieur Vanek, mais c'est ainsi, les faits sont têtus, comme disait un de vos anciens collègues ! Les faits sont têtus : c'est la production qui est libéralisée, le transport et la distribution restent des monopoles naturels. Il n'est pas question, par exemple, de construire deux lignes à haute tension à travers la Suisse. Voyez-vous une entreprise, si libérale soit-elle, venir concurrencer les Services industriels dans la distribution ? (L'orateur est interpellé.) Non, Monsieur Cristin, vous êtes complètement à côté de vos pompes ! Il n'est pas question de libéraliser le transport et la distribution, encore une fois ce sont des monopoles naturels !
Maintenant, je dirai que cette motion enfonce des portes ouvertes. L'impact de la libéralisation sur les consommateurs, les petits consommateurs, sera quasi nul. Il n'y aura qu'une légère baisse du prix de l'électricité, parce que ce qui revient cher, sur la facture des consommateurs, c'est le transport et la distribution. Concernant les effets sur les entreprises privées et publiques, les grosses entreprises auront des gros rabais, les moyennes des rabais moyens et les petites pratiquement rien. C'est ainsi, ce sont les règles du marché !
Quant aux effets sur l'Etat, comme consommateur, on peut estimer que l'Etat va payer son électricité un peu moins cher. En revanche, comme actionnaire des Services industriels, là il y a un problème. En effet, le gros problème de la libéralisation du marché de l'électricité, ce sont les investissements non amortissables. Or, EOS est une entreprise dont les Services industriels sont actionnaire à 25% et qui est menacée. Au niveau fédéral, nous avons donc proposé des mesures d'accompagnement - et celui qui vous parle a été un des artisans de ces mesures, contestées du reste par les milieux économiques, ce que je regrette beaucoup - à savoir une taxe sur les énergies non renouvelables, dont une partie servirait à financer ces investissements non amortissables, puisqu'on change les règles du jeu et qu'on doit amortir plus vite les investissements qu'il était prévu d'amortir sur cinquante ou soixante ans. Comme l'Europe est momentanément en surproduction d'énergie électrique, on peut s'attendre à une baisse de prix dans les cinq à dix premières années suivant l'ouverture du marché, mais à terme il remontera. Il faut donc passer ce cap et pour ce faire, nous prévoyons des mesures d'accompagnement, à savoir cette taxe sur les énergies non renouvelables, pour financer notamment ces investissements non amortissables. Quand je dis financer, il s'agit de prêts qui seraient accordés et que les entreprises, une fois revenues à meilleure fortune, devraient rembourser, selon des conditions qui seront fixées entre la Confédération, les cantons et les entreprises concernées. En l'occurrence, ce n'est donc pas une libéralisation sauvage, des mesures sont prises, même si l'Etat de Genève et les Services industriels ont, c'est vrai, quelques soucis à se faire.
S'agissant des communes, la redevance hydroélectrique n'est pas touchée. Dans cette libéralisation du marché, il n'est pas question pour les Chambres fédérales de toucher aux redevances hydroélectriques, qui se montent, si j'ai bonne mémoire, à environ 2 milliards et qui servent notamment à financer les budgets des collectivités publiques, des communes des régions périphériques et des régions de montagne. Cas échéant, si pour des raisons de compétitivité on devait décider de réduire, voire de supprimer ces redevances hydroélectriques, il s'agirait alors, dans un esprit confédéral bien compris, de pallier ces diminutions de ressources pour les collectivités publiques concernées par d'autres ressources que l'Etat central devrait fournir. En effet, pour moi comme pour beaucoup de parlementaires fédéraux, il n'est pas question de pénaliser encore plus les régions périphériques, sachant que la mondialisation - dont on a souvent parlé et dont je ne suis pas un sympathisant telle qu'elle se réalise actuellement - pénalise surtout ces régions périphériques. Il ne s'agit donc pas de s'attaquer à la redevance hydroélectrique et, à mon avis, il ne devrait pas y avoir de conséquences négatives pour les communes et l'environnement.
En revanche, concernant le volet social et l'emploi, il est vrai qu'en période de restructuration il y a des difficultés. On a vu ce qui s'est passé dans le bâtiment ces dernières années à Genève. Cependant, je vous rappellerai que nous avons voté une libéralisation sur six ans, alors que certains socialistes la voulaient sur trois ans ! Alors, Mesdames et Messieurs les socialistes, arrangez-vous avec vos petits copains de Suisse alémanique, qui voulaient une libéralisation sur trois ans ! En tout cas, nous les radicaux, nous la voulons sur six ans. Nous pensons qu'à vue humaine la loi n'entrera pas en vigueur avant 2002, que 2002 plus six ans, cela fait 2008 : nous sommes dans le rythme européen et ce délai permettra de donner du temps au temps pour trouver des solutions pour l'emploi. M. Leuenberger l'a dit : il ne s'agit pas de mettre les gens à la porte, n'importe comment. Il conviendra de trouver des mesures d'accompagnement pour amortir les effets néfastes de cette libéralisation sur l'emploi.
Cela dit, je doute que les Services industriels soient beaucoup touchés au niveau des emplois liés à la production de l'électricité. En effet, ils ne sont qu'un petit producteur d'électricité et sont surtout un distributeur et un fournisseur de prestations. Je dirai d'ailleurs que la chance des Services industriels, c'est d'être - comme l'agriculture, si je puis me permettre - multifonctionnels, d'avoir plusieurs cordes à leur arc. C'est une chance pour les Services industriels. Leur faiblesse, c'est d'être un gros actionnaire d'EOS, car EOS est menacé, et nous essayons, au niveau fédéral, de prendre des mesures pour amortir le choc de la libéralisation.
En l'état, Mesdames et Messieurs, je me demande si cette motion est vraiment utile, car au niveau local les conséquences seront vraiment minimes. A Berne, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que les choses se passent le moins mal possible. Mais que vous le vouliez ou non, cette libéralisation aura lieu ; il s'agit de la réaliser dans les meilleures conditions possibles, soit pour nos entreprises hydroélectriques qui sont une chance pour l'avenir de notre pays, soit pour l'emploi, soit pour notre rapprochement avec l'Europe que nous voterons le 21 mai.
M. Christian Brunier (S). J'aimerais tout d'abord dire que Mme Caroline Dallèves-Romaneschi, si elle en a certainement fait une très bonne lecture, n'a pas compris l'objectif de la motion. Le but de cette étude n'est pas de préparer le terrain pour que nous décidions ce qu'il convient de penser de la libéralisation. Sur ce point, nous avons une position très nette : philosophiquement, les socialistes genevois - je dis bien «genevois» - sont opposés à la libéralisation des marchés de l'énergie, car on ne doit pas considérer l'énergie comme un simple produit de consommation et la vendre comme une vulgaire lessive. Voilà pour l'aspect philosophique.
Maintenant, il faut parler du concret. Je suis d'accord avec M. Dupraz : qu'on le veuille ou non, la libéralisation du marché est malheureusement à nos portes et elle arrive d'ailleurs plus vite que ne le dit M. Dupraz. Celui-ci est très optimiste aujourd'hui, mais la libéralisation a déjà des effets très concrets sur la politique énergétique de ce pays et sur la politique des Services industriels en particulier. Ce défi, ou cette menace, suivant comment on ressent la libéralisation, va apporter, il faut le reconnaître, quelques infimes avantages. Il est vrai qu'il y a eu un culte peut-être excessif du monopole et que la libéralisation permet de le remettre en question. Mais, avant tout, la libéralisation des marchés va engendrer de nombreux risques et je crois qu'il faut le dire clairement aujourd'hui.
Face à ces risques, il y a trois manières d'agir. Il y a la manière de M. Dupraz, qui a fait un travail remarquable aux Chambres fédérales, mais qui est aujourd'hui tombé dans l'angélisme en disant que, oui, il y a des risques, mais qu'à Genève nous sommes meilleurs que tous les pays européens, que nous avons une entreprise énergétique fabuleuse et que nous allons finalement gérer les risques sans problème. Ce n'est en tout cas pas ma vision des choses.
La deuxième manière est celle de certains députés qui font en quelque sorte de la réactivité. Face aux risques, ils disent qu'il convient d'attendre, qu'il ne faut pas imaginer le pire tout de suite et qu'au moment où surgiront des problèmes on tentera d'agir au mieux. Ces députés n'ont pas compris, je crois, l'avertissement que nous avons reçu à travers Swisscom. Concernant Swisscom, un bon nombre de politiques de ce pays, y compris dans mon parti, ont joué le jeu de la réactivité, en disant qu'il convenait de laisser venir les risques et d'agir ensuite pour les contrer. On voit le résultat ! Aujourd'hui, s'agissant de Swisscom, on court après les risques et il y a des gens qui passent à la trappe quotidiennement !
La troisième solution est celle que nous préconisons ce soir. Cela s'appelle la proactivité : avant de subir les risques de la libéralisation, nous voulons essayer de les évaluer, de les étudier pour mieux les connaître, pour tenter d'anticiper et de trouver des garde-fous et des solutions imaginatives pour réagir au mieux. M. Velasco disait que gouverner, c'est prévoir. A cet égard, il me semble que, dans cette enceinte, certains sont plutôt des adeptes du rétroviseur !
D'autres se sont inquiétés qu'on fasse des études sur tout et n'importe quoi. Ils ont raison et nous ne demandons pas des études sur tout et n'importe quoi : l'étude que nous demandons aujourd'hui porte sur un thème qui va toucher et qui touche déjà plusieurs activités du canton. De plus, nous ne demandons ni une méga-étude à 200 000 ou 300 000 F qui durerait une année ou deux ans, ni une sculpture sur nuages que personne ne pourrait utiliser. Nous demandons une étude pragmatique pour répondre à des questions très réelles. J'ai entendu, parmi les différentes explications qui ont été données, des gens qui ont l'air de tout savoir. Quant à moi, je ne crois pas être le plus ignare sur ce sujet, mais j'ai pourtant de nombreuses questions sur cette libéralisation. Je prends quelques exemples.
Notre constitution comporte un certain nombre de dispositions qui prônent une utilisation rationnelle de l'énergie et qui exigent qu'on utilise une énergie propre. Nous sommes un certain nombre ici à soutenir ces dispositions et le peuple a voté de manière très claire en faveur de cette politique énergétique. Or, un marché totalement libéralisé risque d'avoir des conséquences au niveau de la constitution. Même si cette libéralisation ne concerne que la production, il ne faut pas rêver, il y aura aussi des conséquences sur le transport de l'énergie et sur la distribution. On le voit déjà : aujourd'hui, des gens sont prêts à brader notre réseau de transport à certains privés, à certains banquiers zurichois proches de M. Blocher. Ces conséquences, du point de vue de la constitution, on ne les connaît pas ou mal aujourd'hui et, rien que pour cela, il vaut la peine de faire une étude.
Autres questions : l'Etat est-il un client éligible ou pas ? Quelle va être la conséquence de notre éventuelle éligibilité ? Est-ce que ceci va réduire notre facture énergétique ? Est-ce que ceci va être compensé, par exemple, par des prises de participation très fortes dans l'énergie solaire ? Ce sont des questions qu'il faut se poser.
Au niveau des redevances, M. Dupraz prétend détenir la vérité. Pourtant, j'ai entendu le président des communes genevoises dire, cette semaine même, qu'il avait des craintes et qu'à son avis, dans un marché complètement libéralisé, les redevances ne tiendront pas la route à terme, ni d'ailleurs les rabais. Un certain nombre de rabais accordés aux collectivités publiques sont en train d'être diminués, voire complètement supprimés et cela aura une conséquence notamment fiscale pour les communes, évaluée entre 1 à 3 centimes additionnels pour certaines communes. On ne peut donc pas dire, sous prétexte que M. Dupraz nous rassure, que tout est réglé et qu'on n'a plus besoin de réfléchir sur le sujet.
Il y aura, bien sûr, des conséquences sur l'emploi, dont je ne parlerai pas pour ne pas être accusé de contrevenir à l'article 24 de notre règlement. Je soulèverai en revanche la question des tarifs. Il y a actuellement des tarifs très rigides qui assurent une équité entre les différents consommateurs et qui permettent d'assurer le service public. Aujourd'hui, personne n'a mesuré les conséquences sur l'équité entre les clients et sur la notion de service public.
Je crois que tout cela mérite donc une étude, pragmatique et simple, sur des questions très précises. Lorsque Mme Berberat nous dit que cette étude ne servirait à rien, j'ai l'impression qu'elle la redoute un peu et je la comprends ! En effet, les résultats de cette étude démontreront, une fois de plus, que la libéralisation des marchés est nocive pour la société et pour la majorité de nos concitoyens, comme l'ont été les libéralisations de marchés que nous avons connues ces dernières années. Par contre, vous avez raison, Madame Berberat, sur un point, c'est que notre motion est peut-être trop large, qu'elle concerne un spectre peut-être trop étendu pour être traitée de manière pragmatique et rapide.
Aussi, je suis d'accord avec M. Vanek qui proposait d'envoyer cette motion en commission, non pas pour faire un grand débat sur la libéralisation - car on sait que ce qui nous sépare, ce sont des valeurs et on ne pourra pas se mettre d'accord sur des valeurs - mais pour inventorier un certain nombre de questions cruciales à propos desquelles, pour le moment, nous n'avons aucune réponse, ou seulement des prémices de réponses. Rien que pour cela, le sujet mérite une discussion en commission et une étude pragmatique et peu coûteuse.
M. Alberto Velasco (S). Je voudrais juste dire à Mme Berberat que nous ne demandons pas du tout une étude de marché. Entendons-nous bien : ce que nous voulons, c'est une étude d'impact. Concernant l'étude de marché, je suis d'accord avec elle, ce sont les entreprises privées qui doivent la faire. Il n'est donc pas du tout question de demander une telle étude.
D'autre part, Monsieur Dupraz, la libéralisation est effectivement en route, mais il faudrait peut-être la réguler et, pour la réguler, il faut connaître les paramètres. En l'occurrence, je doute que beaucoup dans cette salle les connaissent. Vous les connaissez peut-être globalement et assez pour dire que vous n'êtes pas d'accord avec ce qui va se passer, mais quant à savoir ce qui va réellement se passer dans les divers secteurs, y compris au niveau de l'agriculture, vous n'en savez rien et moi non plus. C'est la raison pour laquelle nous voudrions étudier ce qui va se passer au niveau cantonal. C'est tout !
M. Pierre-Alain Cristin (S). Sans ignorer les effets socio-économiques de la libéralisation des marchés électriques, je soulignerai ses effets environnementaux. Partant du fait que l'électricité est un élément vital dans notre quotidien, on ne peut la considérer comme une marchandise comme les autres. Par conséquent, les entreprises qui la produisent et la distribuent assument un rôle d'intérêt public et ont donc à respecter les principes du développement durable, car les effets de la libéralisation des marchés seront multiples sur l'environnement.
1. La baisse des prix va induire une augmentation de la consommation d'électricité.
2. Des raisons économiques, car d'énormes investissements ont été consentis ces dernières années dans le domaine de l'énergie d'origine hydroélectrique, conduiront certains producteurs à préférer des installations moins gourmandes en investissements et plus rapidement réalisables, alimentées avec des combustibles fossiles et il faudra prévoir une augmentation considérable des émissions de Co2.
3. Comme nous le voyons avec la libéralisation des télécommunications, il y aura un effet de concurrence accrue entre fournisseurs, ce qui poussera les entreprises de distribution à vouloir s'approvisionner là où le courant est le moins cher et donc à occulter la provenance du courant électrique, ce qui nous promet des scénarios catastrophes, puisque les usines nucléaires de certains pays, notamment de l'Est, qui ne sont pas les plus fiables, devront tourner à plein régime pour nous fournir du courant bon marché.
Mesdames et Messieurs les députés, pour les générations à venir, il est de notre devoir aujourd'hui d'être attentifs à cette libéralisation des marchés électriques et aux conséquences qu'elle aura sur l'environnement en Suisse et dans le reste de l'Europe. C'est pourquoi le groupe socialiste vous demande de soutenir cette motion et, comme l'a proposé le député Vanek, de la renvoyer en commission de l'énergie.
M. Pierre Vanek (AdG). Monsieur Brunier, vous avez dit en substance : il y a la philosophie d'un côté, nous sommes contre la libéralisation, nous ne nous mettrons pas d'accord avec les autres ; il faut donc maintenant faire une étude pragmatique, avec des spécialistes, sur un certain nombre de questions précises.
Pour ce qui est de définir des questions plus précises, c'est un des débats que nous pourrons avoir en commission. En revanche, pour ce qui est d'être pragmatiques, revenons sur le cas de Swisscom que vous avez évoqué et sur celui de la Poste aussi, qu'on oublie et dont nous avons débattu abondamment dans cette enceinte. A l'époque, éclairés par une philosophie de défense du service public et une méfiance, qui s'est avérée fondée, face aux méfaits du libéralisme, les référendaires de 1997 avaient, dans leur argumentaire, décrit de manière pragmatique et assez précisément ce qui est en train de se passer. Or, à la même époque, d'autres experts ont pondu des centaines de pages pour expliquer qu'il n'y avait aucun danger pour l'emploi, que cette libéralisation allait bénéficier aux consommateurs, à l'ensemble de l'économie, de la société, et qu'on raserait pratiquement gratis en matière de poste et télécommunications.
Pourquoi ces experts ont-ils tenu ces propos ? C'est là qu'il y a un peu d'angélisme dans votre démarche : on sait que, dans les débats sur l'énergie, il n'y a pas simplement des experts qui savent et qu'il suffit d'interroger, avant de faire comme ils disent. On sait - nous avons souvent eu ces échanges en matière nucléaire - que les experts sont plus ou moins d'un côté ou de l'autre, sont plus ou moins informés par une «philosophie» ou une autre. Et, dans ce sens, je renverrai avec plus de sérénité une demande d'expertise ou d'étude d'impact au Conseil d'Etat, ou au conseiller d'Etat encore présent sur les bancs du Conseil d'Etat, si celui-ci pouvait nous affirmer que sa philosophie en matière de libéralisation est celle de la majorité de ce Conseil. Or, ce n'est pas tout à fait le cas. Quelle que soit la bonne volonté de M. Cramer, que je ne mets pas en doute, je ne crois pas qu'il puisse faire une déclaration de ce type. En conséquence, je crains, Monsieur Brunier, que l'étude qui pourrait être faite par le Conseil d'Etat ne soit pas forcément la plus objective et donc la plus à gauche, ou réciproquement !
Maintenant, un mot pour M. Dupraz. Monsieur Dupraz, vous avez embouché les mêmes trompettes fatalistes que Mme Berberat, à quelques nuances près. Pour vous, la libéralisation est là, elle est incontournable, elle se fait à l'échelle européenne et il s'agit maintenant de prendre toutes les mesures d'accompagnement possibles pour limiter la casse. Vous me dites que les gouvernements en Europe sont de gauche, mais vous savez bien que ce n'est pas vrai, nous le savons tous dans cette salle. Personne ne pense à Genève que M. Tony Blair, par exemple, est de gauche ! Mme Françoise Buffat l'encensait, pas parce qu'il est de gauche, mais parce qu'il est un bon libéral, comme elle les aime ! Voilà pour la parenthèse.
Sur le fond, il y a quelque chose de grave dans vos propos. Je suis pour l'adhésion à l'Union européenne, mais si vous présentez aujourd'hui l'Europe comme un rouleau compresseur, une fatalité par rapport à laquelle on ne peut que s'adapter, vous lui rendez un bien mauvais service. Y compris à l'échelle européenne - certes, les institutions aujourd'hui ne le permettent guère, mais il y a une bataille à mener pour que ce soit le cas - il faut qu'on défende des idées de service public, des idées écologiques. Il faut qu'elles puissent passer, ou du moins être reçues comme faisant partie d'un débat possible et ce débat existe, du reste, à l'échelle européenne, vous le savez bien. Il y a des forces qui s'opposent à ce processus de libéralisation. Alors, vous rendez un bien mauvais service à cette Europe que vous prétendez défendre, en la présentant comme l'incarnation d'une fatalité économique sur laquelle les citoyens de notre modeste République n'auraient aucune prise. La prise est sans doute difficile, mais c'est un combat essentiel pour la démocratie et c'est dans cet esprit-là que je me battrai, y compris jusqu'au référendum, contre ce projet de loi sur la libéralisation.
Vous avez dit encore, Monsieur Dupraz, que seule la production était libéralisée et que la distribution restait un monopole. Soyons sérieux ! En l'état de ce que vous avez voté à Berne, le Réseau reste une société de droit privé qui est simplement le lieu de cette concurrence acharnée. Vous avez parlé de monopoles naturels : quant à moi, je pense qu'effectivement il y a lieu d'instituer un monopole en la matière, mais un monopole qui soit contrôlé démocratiquement - ce qui ne sera pas le cas - un monopole qui ne soit pas au service de la maximisation des bénéfices des marchands d'électricité. Or, si on va dans le sens que vous prêchez, on retrouvera des monopoles à l'échelle européenne, dans cinq, dix ou quinze ans. Trois ou quatre compagnies dirigeront tout en matière d'énergie et les débats, y compris contradictoires, que nous aurons pu avoir dans cette enceinte sur la politique de l'énergie apparaîtront vraiment comme quelque chose relevant du passé. Quant à moi, je me bats pour maintenir cet espace démocratique-là et c'est dans ce sens que je m'oppose à cette libéralisation.
M. Jean Spielmann (AdG). Par rapport à ce qui vient d'être dit, je crois qu'un élément fondamental a été complètement occulté ou oublié, c'est qu'il y a dans l'organisation d'une société un certain nombre d'activités qui ne peuvent pas être soumises purement et simplement au marché, parce qu'il s'agit d'activités d'intérêt général.
Le problème de l'énergie est un problème fondamental pour nos sociétés. On a beaucoup parlé du nucléaire, on a parlé de la nécessité d'économiser l'énergie, de la mise en place d'une politique alternative pour sortir du nucléaire et mettre à disposition de la population d'autres systèmes de production d'énergie. Partant de là, au moment où certains décident, sous l'impulsion du libéralisme, de tout confier au marché, cela pose un problème de fond, qui n'a pas été abordé et qu'on devrait examiner. Je parle de la maîtrise des collectivités publiques sur les modes de production de l'énergie et sur l'avenir d'une société qui, se basant uniquement sur le marché, laisserait la liberté aux producteurs d'électricité de proposer les meilleurs prix, alors qu'en définitive le meilleur marché n'est pas toujours ce qui est le mieux pour l'ensemble de la société, même si pour certains cela peut être favorable.
Je suis de ceux qui sont contre cette privatisation et qui dénoncent le pari complètement fou que font un certain nombre d'antinucléaires et de responsables socialistes de Suisse alémanique : ils considèrent que la réalité des prix va pousser les nucléaires à abandonner le marché, qu'on pourra démontrer que le nucléaire est plus cher que les autres productions et qu'ainsi on sortira du cycle nucléaire. Donc, choisissons le libéralisme, disent-ils, privatisons les marchés de l'électricité, quelles que soient les conséquences sociales, politiques, écologiques ! A cet égard, je trouve qu'il y a une part d'irresponsabilité à suivre les radicaux dans la voie qu'ils préconisent. Comme l'a dit justement M. Dupraz tout à l'heure, les radicaux veulent libéraliser en six ans et certains veulent le faire en trois ans. Mais le problème n'est pas de savoir si on va libéraliser en trois ans ou en six ans, le problème est de savoir si c'est intelligent de le faire.
Quant à moi, je considère qu'il y a des priorités dans une société et qu'on ne peut pas laisser le marché dicter sa loi dans un domaine aussi important que celui de la production d'énergie et de l'abandon du nucléaire. On doit garder en mains publiques la possibilité d'intervenir dans ce dossier ; il est faux de le soumettre purement et simplement aux lois du marché, qui en définitive vont conduire à une politique qui ira à l'encontre des intérêts de la population, pour les seuls intérêts privés et pour l'argent.
M. Jean Rémy Roulet (L). Je voudrais adresser quelques remerciements à ma collègue Janine Berberat, bien sûr, pour son excellente présentation, remerciements aussi, pour leur prise de position courageuse, aux Verts qui demandent le renvoi de cette motion en commission, et remerciements surtout à M. Vanek, qui nous épargne une étude, fort onéreuse au demeurant, sur les bienfaits ou les méfaits de cette ouverture des marchés de l'électricité. Je crois que celle-ci est en marche, qu'il n'y a plus grand-chose à dire et qu'il y a plutôt des choses à faire.
Quand on lit l'exposé des motifs des motionnaires, on reste un peu perplexe, d'autant plus que ces motionnaires travaillent aux Services industriels. Je lis en page 4 : «Risques pour les SIG», alors qu'on pourrait dire «chance» pour les SIG ! «Il est possible d'imaginer, écrivent les motionnaires, que les habitants d'un quartier, d'une rue, les membres d'un groupement professionnel, d'une association, d'un syndicat ou d'un club se réunissent en groupement d'achat afin de négocier des prix plus avantageux.» Oui, Mesdames et Messieurs, il est clair que c'est vers cette voie-là que nous allons tendre enfin, après un monopole de fait qui date de quarante, cinquante, voire soixante ans dans certaines régions de ce pays. Nous vivons en effet la fin d'un monopole et la fin d'un monopole, qu'il soit privé ou public, entraîne évidemment des modifications structurelles.
Vous avez cité, Monsieur Brunier, l'exemple de Swisscom. Pour l'entreprise Swisscom, cette libéralisation, certes, pose problème, mais pour l'ensemble du marché, combien d'emplois ont-ils été créés à Genève dans le secteur des télécommunications, ces derniers mois ? Ces emplois se comptent par centaines, Mesdames et Messieurs ! Imaginez un instant que, dans le secteur de l'énergie, un tel phénomène peut se produire, que de nouveaux métiers vont apparaître dans ce processus de libéralisation. Or, plutôt que de parler de chance, vous parlez de risques. En tant qu'employés des Services industriels de Genève, vous devriez au moins avoir l'audace de prendre parti pour cette libéralisation et non contre elle.
Du reste, un des éléments qui explique la position musclée des libéraux par rapport à cette motion concerne justement l'employeur des trois motionnaires : comme par hasard, il s'agit des Services industriels ! Messieurs, un peu de bon sens : si vous voulez que votre motion ait une certaine crédibilité aux yeux de certains députés dans ce Grand Conseil, aux yeux du public et des gens qui votent pour vous, il s'agit clairement de séparer vos fonctions. Il y a là un problème : vous ne pouvez pas, en tant qu'employés des SIG, demander une étude de marché pour les SIG au sein de cette enceinte. Voilà pourquoi le groupe libéral a décidé de ne pas soutenir votre motion.
M. Christian Brunier (S). Très brièvement, car le débat a suffisamment duré, je voudrais expliquer deux choses à M. Roulet. Premièrement, concernant la séparation des fonctions, je dirai que nous n'avons aucun intérêt direct dans la réalisation de cette étude. Les milieux économiques ont vraisemblablement plus d'intérêt à shooter cette motion que nous n'en avons, en tant qu'employés des SI, à la soutenir.
Deuxième chose, vous comparez les marchés de l'énergie et des télécom, mais il n'y a aucune comparaison possible ! Le marché des télécom a créé un grand nombre d'emplois, dites-vous, mais il faudrait faire la balance des emplois, parce que nous ne sommes pas sûrs qu'elle soit positive. Je vous rappelle que, pour maintenir les emplois, un certain nombre de travailleurs ont vu leurs conditions de travail se dégrader sensiblement. D'autre part, la libéralisation des télécom a été couplée à une augmentation sensible de la demande. La plupart des gens ont aujourd'hui un portable, des connections Internet ; il y a donc une augmentation de la demande. S'agissant de l'énergie, pouvez-vous me répondre : quelle va être l'augmentation de la demande en électricité ? Rêvez-vous d'une société qui consomme deux fois plus d'électricité ? J'espère que vous vous êtes mal exprimé et que ce n'est pas le choix de société que vous avez fait.
On ne peut donc pas comparer ces libéralisations. Le produit télécom est de plus en plus utilisé dans le monde. La consommation d'énergie, au contraire et heureusement, stagne dans notre canton. Elle a augmenté de 1% à 1,5%, et ce sans tenir compte de l'augmentation de la population. Ce sont donc des prestations totalement différentes et les lois du marché ne sont pas applicables à un produit aussi stratégique que l'énergie. Je le rappelle : on ne vend pas de l'énergie comme on vend une vulgaire lessive !
Le président. Je donne la parole à M. Robert Cramer, conseiller d'Etat... (Protestations de M. John Dupraz.)
S'il vous plaît, Monsieur, je ne vous ai pas vu lever la main ! Je donne la parole à M. Cramer !
M. Robert Cramer. Je tiens tout d'abord à rendre hommage à M. Dupraz pour son intervention de tout à l'heure... (Rires et exclamations.) ...ainsi bien sûr qu'aux autres intervenants qui se sont exprimés. Au fond, ces interventions montrent qu'il y a, sur ces bancs, une somme impressionnante de connaissances et de compétences sur le sujet dont traite cette motion. A tel point que l'on peut se demander si ce parlement a réellement besoin d'un rapport supplémentaire... (Applaudissements.)
J'ai éprouvé un second sentiment en vous écoutant, Mesdames et Messieurs les députés : je ne vous cacherai pas que j'ai été soulagé de voir que le chemin que vous étiez en train de prendre était à tout le moins celui d'un renvoi en commission. En effet, j'ai fait chiffrer ce que cette motion représenterait, si l'on voulait répondre sérieusement à la volonté des motionnaires, en faisant toutes les études qui sont demandées. Si nous voulons traiter cette motion comme elle doit l'être, cela va tout d'abord prendre du temps ; les mandataires que nous avons pressentis ont parlé d'une durée d'une année. Quant au coût, on m'a parlé d'un coût de 150 000 à 200 000 F. C'est le prix pour que le Conseil d'Etat ne vous réponde pas en exprimant ses opinions quant à la libéralisation - d'ailleurs, comme M. Vanek m'y a invité, je me garderai bien de faire une déclaration du Conseil d'Etat sur ce point ! - mais réponde simplement, de façon technique, aux invites de la motion.
Un renvoi en commission, en revanche, permettrait également d'aborder quelques autres questions qui ont été posées. Par exemple, qu'en est-il des rapports entre la libéralisation du marché et les exigences de notre constitution ? Nous pourrons peut-être découvrir ensemble que, depuis le 1er janvier 1999, il existe une loi fédérale sur l'énergie dont les dispositions, ma foi, ne sont pas si différentes de celles contenues dans notre constitution. La Berne fédérale, treize ans après Genève - mais il est vrai que les Bernois ont la réputation d'être parfois un peu lents ! - s'est mise au diapason de ce que doit être une vraie et une bonne politique de l'énergie.
Ce renvoi nous permettra peut-être aussi de répondre à quelques interrogations concernant le statut des clients éligibles : jusqu'où l'Etat est-il concerné, car il est bien sûr concerné ? Comment l'Etat doit-il réagir à cette nouvelle opportunité qui lui est offerte par le biais de ce statut de client éligible ?
Nous pourrons discuter de tout cela et si, après cette discussion, il apparaît encore à la commission qu'il convient d'aller de l'avant et qu'une étude est indiquée, nous arriverons au moins à la cerner. Nous arriverons à faire qu'elle soit suffisamment modeste pour être menée en interne par l'administration, pour qu'elle paraisse rapidement, non pas après que la messe fut dite, mais à temps pour être utile au débat qui s'engage. Etant précisé que celui-ci n'est pas seulement, comme plusieurs d'entre vous l'ont signalé, un débat sur la libéralisation ; il est aussi, et peut-être surtout, un débat sur la façon dont notre collectivité publique et les Services industriels vont s'organiser pour pouvoir répondre à cette perspective.
Le président. Je fais voter la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission de l'énergie.
La proposition de renvoi est mise aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève par 39 oui contre 33 non.
Lors de sa séance du 8 février 2000 sous la présidence de M. Walter Spinucci et en présence de M. Robert Cramer, conseiller d'Etat et de M. René Delacuisine, directeur du Service de l'agriculture, la Commission des affaires communales, régionales et internationales s'est penchée sur la problématique du régime des zones franches autour de Genève.
Ce dossier avait déjà fait l'objet de trois séances soit le 19 mai et les 16 et 30 juin 1998 et c'est sur la demande du département et avec l'accord de la commission que ce dossier avait été gelé afin que le Département de l'intérieur, de l'agriculture et de l'environnement puisse le faire évoluer.
Exposé de M. Robert Cramer
Cette motion, déposée le 3 mars 1998, demandait l'intervention vigoureuse tant auprès des organismes transfrontaliers que des douanes françaises et du Conseil fédéral afin de rétablir une application de régime des zones franches conforme aux textes et à l'esprit des Traités de 1815 et 1816, ainsi que de la Sentence de Territet.
La première intervention s'est faite auprès des Autorités fédérales tout en sachant que le dispositif des traités de 1815 et 1816 et de la Sentence de Territet prévoit l'existence d'une Commission franco-suisse des zones franches que l'on peut réunir en cas de litiges. Si aucune solution n'est trouvée, c'est le Tribunal arbitral de La Haye qui alors tranchera judiciairement.
C'est donc en prenant contact avec les Autorités fédérales que le 21 avril 1998 la Commission franco-suisse des zones franches s'est réunie. Le compte rendu de cette séance avec la délégation suisse a été rendu lors de la séance du 30 juin 1998 des Affaires communales, régionales et internationales. Se sont réunis deux ambassadeurs venus de Berne, M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat en charge du DEEE, et des représentants des associations professionnelles nationales dans le domaine de l'agriculture.
Deux conclusions se sont imposées :
La perspective d'une réunion de la Commission franco-suisse n'apparaissait pas sous les meilleurs auspices car en cas de blocage et d'affrontements, l'issue serait douteuse et si l'on souhaitait poursuivre la procédure, il aurait fallu s'adresser au Tribunal arbitral de La Haye auprès duquel nos chances de succès s'avéraient fort minces. En effet, la Sentence de Territet, entérinée en 1933, avait estimé que le traité de 1815 était encore applicable. Alors que même le monde de 1815 était différent de celui de 1933, tant au point de vue des dirigeants que de l'organisation territoriale.
Le processus de négociations au sujet des bilatérales était engagé et la diplomatie suisse désirait éviter toute dispute qui aurait pu compromettre ces accords. Ainsi les Autorités fédérales douanières ont-elles suggéré de résoudre cette problématique des zones franches au niveau régional et donnèrent les instructions nécessaires au troisième arrondissement douanier de se mettre à la disposition des protagonistes pour trouver des solutions acceptables.
Les transactions se sont poursuivies sur trois fronts :
Une démarche de nature administrative menée par le directeur du Service de l'agriculture qui rencontra ses homologues français auxquels il fit part des difficultés subies par les agriculteurs des deux côtés de la frontière, ce qui permit de lever bien des malentendus par une modification de l'état d'esprit des uns et des autres et donna l'occasion à la Chambre genevoise d'agriculture de s'entretenir avec ses homologues français.
Une autre démarche cette fois-ci de nature institutionnelle fut promue. Un nouveau groupe de concertation et de discussion fut créé pour débattre des problèmes communs sur l'agriculture et qui se nomme : « Agriculture et aménagement du territoire » auquel participe le Comité régional franco-genevois (CRFG) et la Chambre genevoise d'agriculture. Cette structure présente l'avantage d'être plus simple et plus souple que les institutions judiciaires qui résultent de l'application du traité de 1815.
Une troisième démarche se situe au niveau des douanes. Le responsable, M. Cottet, suite à de longues discussions avec ses homologues français, a pu conclure un certain nombre d'accords relatifs aux démarches en matière de passage de la frontière des produits agricoles.
Exposé de M. René Delacuisine
En préambule, notre orateur rappelle que les accords zoniens permettent aux produits agricoles de pénétrer sur le sol suisse en franchise de taxes depuis la France, mais que l'inverse n'est pas vrai. Toute production zonienne est autorisée à pénétrer sur notre territoire s'il est démontré qu'elle ne met pas en péril notre production locale ce qui à l'époque de la Sentence de Territet ne posait aucun problème. Parmi les produits provenant de la zone, on trouve le lait, les produits laitiers, la viande et le vin. A part le lait dont les importations zoniennes en Suisse représentaient alors 25 300 litres par jour en franchise, est passé aujourd'hui à 60 000 litres par jour ; on ne constate pas une augmentation des quantités importées.
Par contre, c'est avec les produits non contingentés tels les légumes qu'il y a un malaise. En 1975, la production s'élevait à environ 75 tonnes en 1998, elle a passé à 4 000 tonnes. Cette situation alarma les maraîchers genevois et l'Union maraîchère décida alors de réunir sous le même organisme les producteurs zoniens et genevois permettant ainsi aux uns et aux autres de se contingenter mutuellement en fonction des saisons et de la demande. Il faut savoir que la production maraîchère genevoise est « exportée » pour plus de 60 % voire 80 % vers les grandes villes alémaniques.
Revenons à la production laitière qui, en zone, est excédentaire mais valorisée sur sol français par les Laiteries Réunies. Il fut un temps heureux où les avantages financiers pour les zoniens étaient réels, ce qui n'est plus le cas actuellement avec la libéralisation des marchés et la chute des prix des produits agricoles tout en n'omettant pas l'abolition de la prise en charge obligatoire car, actuellement, il faut aller à la conquête des marchés.
Jusqu'au 1er janvier 2000, le bétail de boucherie zonien était assimilé à des animaux de boucherie indigènes quand il passait sur sol suisse. Or, depuis cette date, l'ordonnance fédérale sur le bétail de boucherie précise la définition « d'animal du pays », et son article 2 dit ceci que « tout animal dont l'accroissement du poids a eu lieu pour l'essentiel sur le territoire douanier suisse ou qu'il y a passé la majeure partie de son existence ». Ce qui rend les acheteurs helvétiques fort hésitants et les 1 500 bêtes qui étaient acheminées sur notre territoire ne figurent plus dans l'abattage indigène, ce qui entraîne des effets non négligeables sur l'agriculture zonienne. Les prix suisses ne sont plus garantis et les zoniens ne jouissent pas de mesures compensatoires.
Qu'en est-il des accords bilatéraux en ce qui concerne le volet agricole ? Le secteur fromager représente la pièce maîtresse ; toutefois la zone est très peu concernée par le fait que les Laiteries Réunies ne produisent que des pâtes molles et aucune pâte dure. Pour ce qui a trait aux AOC et autres désignations spécifiques territoriales, ceci dans le cadre des accords conclus, on pourrait rencontrer des difficultés avec le vin, sachant que le vin zonien ne pourra plus s'appeler « vin suisse », l'origine de la production étant étrangère.
Au cas où les bilatérales devaient être conclues, le bilan qui présentait une valeur d'importation sur notre pays de 65 millions de francs suisses versus une valeur d'exportation de 5 millions des mêmes francs, devrait se modifier en faveur de la Suisse.
Un fait étrange s'est révélé sur le plan douanier. En effet, chaque poste de douane appliquait sa propre règle en matière d'importation des produits zoniens. Ce qui fait que les administrations du troisième arrondissement douanier suisse et de la région Rhône-Alpes ont élaboré un dispositif unique pour l'ensemble des postes douaniers. Désormais, la règle sera la même pour tout le monde tant du côté suisse que du côté français. Cette procédure ayant été introduite le 7 décembre dernier, il n'est pas encore possible d'en mesurer les effets tout en sachant que la situation ira en s'améliorant. En cas de litige, l'arbitrage sera plus rapide et applicable à l'ensemble des acteurs.
En conclusion, il a fallu deux ans de discussions depuis le dépôt de cette motion pour harmoniser cette nouvelle pratique douanière.
Discussion de la commission
Lors de la discussion qui suivit ces exposés, il fut encore question des labels relatifs aux produits biologiques.
Il y fut répondu que dans le cadre des accords bilatéraux, les produits biologiques doivent être contrôlés par l'organe faîtier et ne sont autorisés à porter cette désignation que les produits dont l'accréditation a été avalisée. Un produit biologique français n'aura pas la possibilité de porter la mention biologique suisse. Il en sera de même pour les AOC.
Un commissaire relève que décidément il n'existe aucune réciprocité au niveau de l'exportation du gros bétail et des fromages à pâte molle.
Il lui est répondu qu'il en va ainsi depuis 1815. Il est question d'inégalité constitutive des Genevois à Vienne et il faut bien voir qu'à l'endroit d'un pouvoir vaincu, ces derniers ont voulu que la région dont on débat soit considérée au même titre que Genève, c'est-à-dire libre de droits de douane pour les produits agricoles et industriels, ce qu'il leur a été octroyé. Or, à cette époque, les Genevois n'ont jamais imaginé qu'ils pourraient un jour exporter et à ce moment-là cet arrangement représentait des avantages certains pour Genève. En 1933, lors de la Sentence de Territet, les Français ont réagi et ont signifié leur volonté de pouvoir lever les droits de douane. Les Suisses se sont battus pour défendre ce régime aux fins d'importer des produits à bon marché et ils ont gagné. Aujourd'hui, nos compatriotes qui produisent suffisamment de produits agricoles aimeraient pouvoir les exporter, mais n'oublions pas que pendant 200 ans, ils ont pu bénéficier de règles avantageuses.
Quel sort va-t-on réserver à cette motion qui, à l'origine, était destinée au Conseil d'Etat ? La commission juge qu'une réponse est apportée et qu'un travail appréciable a été entrepris pour améliorer les échanges entre la zone franche et Genève sans toutefois pouvoir établir une réciprocité, ceci étant dû aux accords signés en 1933 et encore en vigueur. Toutefois, il faut relever que quelques changements vont apparaître lorsque les accords des bilatérales seront conclus.
C'est donc à l'unanimité (1 AdG, 2 DC, 2 L, 2 R, 1 Ve) que la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de prendre acte de ce rapport
Proposition de motion(1195)
pour le rétablissement d'un réel régime des zones franchesautour de Genève
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
considérant :
- l'application défectueuse et à sens unique du régime des zones franches agricoles ;
- le risque de détérioration de la prospérité de notre région et de la qualité de nos relations de voisinage qu'une telle situation engendre ;
invite le Conseil d'Etat
à intervenir vigoureusement tant auprès des organismes transfrontaliers, que des douanes françaises et du Conseil fédéral - et ce en usant au besoin des moyens de pression dont il dispose - afin de rétablir une application du régime des zones franches conforme aux textes et à l'esprit des Traités de 1815 et 1816, ainsi que de la Sentence de Territet.
7891011
Débat
Mme Yvonne Humbert (L), rapporteuse. Tout d'abord, je dois relever la diligence avec laquelle le département a réglé certains problèmes douaniers qui compliquaient nos échanges économiques avec la zone.
Ensuite, afin que ce rapport soit complet, j'aimerais ajouter que la production maraîchère genevoise est expédiée, pour plus de 60%, vers les grandes villes alémaniques, telles que Zurich, Berne, Bâle. Un autre problème agitant la campagne à chaque printemps est l'estivage. Il faut savoir que l'estivage sur sol français ne peut devenir exécutoire que si les départements français prennent des arrêtés préfectoraux. A ce jour, aucun arrêté préfectoral n'a été promulgué. Le problème qui se pose aujourd'hui est celui de la traçabilité, puisque, depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance sur le trafic des animaux, aucun bovin ne peut quitter un rural sans la double marque auriculaire. (Meuglements divers dans la salle.) Or, il s'avère que le nouveau système mis en place ne peut pas déployer immédiatement les effets attendus car l'ONGIS, qui doit fournir les marques, a pris du retard dans sa livraison. Par ailleurs, la France n'a pas encore été saisie par la Suisse pour obtenir une reconnaissance quant à cette nouvelle forme d'identification. Sur le plan genevois, des mesures sont prises pour que les passages en douane puissent s'effectuer dans les meilleures conditions, mais encore faut-il que les administrations douanières française et suisse reçoivent les mêmes directives. Ce problème ne relève pas directement des zones franches, mais il pourrait, si des incompréhensions se manifestent, alourdir les relations franco-genevoises, ce qui serait stupide pour les uns et pour les autres.
Enfin, s'agissant du sort de cette motion, la commission vous demande de prendre acte de ce rapport, car il lui semblait inutile que le Conseil d'Etat nous fasse rapport sur ce rapport !
M. John Dupraz (R). C'est un problème très complexe, où il faut distinguer le régime des zones franches et le régime des biens-fonds. Je ne veux pas entrer dans le détail, car il est tard, mais je regrette un peu qu'on n'aille pas un peu plus loin, que le Conseil d'Etat ne fasse pas preuve d'un peu plus de fermeté vis-à-vis de nos chers amis français. En effet, les échanges sont actuellement à sens unique.
Les accords régissant la zone franche auxquels on fait référence visaient surtout à assurer l'approvisionnement de Genève et les produits qui venaient de zone franche à Genève devaient rester à Genève. Or, maintenant, la plupart de ces produits vont beaucoup plus loin que les frontières genevoises. Il y a donc eu une extension «naturelle» de l'application de ces accords et je trouverais logique que, suite à cette extension des accords que je ne remets pas en cause, on soit un peu plus réceptif de l'autre côté de la frontière concernant les produits agricoles, que ce soient les légumes, les fruits et surtout le vin provenant de Genève. Pour le vin, nous avons les pires difficultés, parce qu'on nous oppose toujours la législation européenne. Alors qu'on parle de rapprochement avec l'Europe et que nous allons bientôt voter les bilatérales, il y a là un véritable problème.
Je souhaiterais donc que ce problème soit traité au sein du Comité franco-genevois et que le Conseil d'Etat demande la réunion de la Commission permanente des zones franches, qui ne s'est pas réunie depuis belle lurette, par rapport à cette problématique. Vous pourriez, Monsieur le conseiller d'Etat, agir en collaboration avec les milieux concernés, la Chambre d'agriculture, l'Union suisse des paysans - qui a un siège de droit dans cette commission - et la Chambre genevoise de commerce et d'industrie, puisque le Conseil d'Etat ne siège pas dans cette commission permanente, aussi bizarre que cela puisse paraître. Je rappelle ici qu'en son temps le Conseil d'Etat avait délégué son pouvoir à la Chambre de commerce et d'industrie.
Il faut remettre certaines choses au point. Quant à moi, je trouverais absolument légitime et équitable qu'une partie des produits agricoles de Genève puisse être distribuée et vendue dans la zone franche, ce d'autant plus que beaucoup de supermarchés et de magasins de la zone accueillent les chalands venant de Genève. Ce ne serait que justice et équité et c'est un challenge pour vous, Monsieur le conseiller d'Etat. Je rappelle que Genève a besoin des travailleurs frontaliers, mais que nous restituons des impôts perçus sur ces salaires aux collectivités locales frontalières, qui leur permettent de vivre «confortablement». Il y a donc là un véritable problème d'équité qui ne sera pas réglé avec ce rapport, malgré tous les efforts que vous avez faits et dont nous vous remercions. Il faut faire encore un peu plus pour que les frontières françaises s'ouvrent aux produits agricoles genevois. Je vous remercie d'y prêter attention et je reste à votre disposition, ainsi que les organismes intéressés, pour entreprendre de telles démarches.
M. Alain Etienne (S). Je tiens juste à signaler que les socialistes ont suivi avec intérêt les travaux de la commission et qu'ils ont même participé au vote : dans le rapport, on a oublié de mentionner le vote des deux socialistes et il faut donc les rajouter !
M. Robert Cramer. Tout d'abord, je me dois de remercier Mme Humbert pour la qualité de son rapport.
Ensuite, je vous dirai, Monsieur Dupraz - ainsi qu'à vos cosignataires, bien sûr, mais je sais que vous avez joué un rôle important dans la rédaction de cette motion - que celle-ci a indiscutablement eu des effets. Vous avez constaté que cette motion a été un détonateur et qu'elle a permis un certain nombre de démarches. Il est vrai que celles-ci n'ont pas permis de régler tous les problèmes, qui sont des problèmes récurrents auxquels les agriculteurs suisses sont confrontés depuis des dizaines d'années.
Pour ma part, je fonde de grands espoirs sur le fait que nous avons réussi à attirer la question agricole au sein du Comité régional franco-genevois, ce qui n'était pas le cas jusqu'ici. Comme vous avez pu le lire dans le rapport, un groupe s'est maintenant constitué, dans le cadre des questions d'aménagement du territoire, qui s'appelle «Agriculture et aménagement du territoire». Je serai particulièrement attentif à ce que les travaux dans ce groupe se poursuivent, de sorte que les différents problèmes ponctuels qui peuvent se poser soient évoqués, que non seulement des solutions soient trouvées aux cas particuliers, mais qu'elles soient généralisables.
Concernant plus particulièrement les questions liées à la viticulture, nous avons pris connaissance d'un rapport, que vous connaissez certainement, qui avait été fait par la Chambre genevoise d'agriculture et qui montrait les tracasseries douanières assez incompréhensibles auxquelles les consommateurs étaient confrontés, lorsqu'ils entendaient faire passer en France du vin acheté en Suisse. Vous avez vu que nous avons réussi à résoudre cette question de façon convenable, en tout cas pour ce qui relève de la consommation des particuliers. Des instructions ont été données aux douanes suisse et française, que vous découvrez en annexe au rapport.
Concernant la question de l'estivage, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les indications qu'a données Mme Humbert. J'avais l'impression que, pour cette année-ci, l'affaire était réglée et que pour une fois il n'y aurait pas de frictions autour de l'estivage. J'ai récemment reçu une note du service de l'agriculture me disant que, sur le plan douanier, tout était en ordre. Vous me dites qu'apparemment cela ne serait pas le cas. Je vais donc, dès demain matin, voir ce qu'il en est, parce qu'à vrai dire il faudra bien une fois mettre fin au feuilleton de l'estivage et que la période du passage des animaux genevois en France pour l'estivage ne soit pas à chaque fois une période de psychodrame ! Il faut vraiment que les bêtes puissent partir à l'alpage et estiver dans des conditions qui soient un peu moins stressantes, non pas pour les animaux, mais pour les éleveurs !
Le président. Nous votons le rapport de la commission des affaires communales et régionales, qui sera renvoyé au Conseil d'Etat... (Protestations et brouhaha.)
Mis aux voix, ce rapport est adopté.
Le président. Ce rapport est donc envoyé au Conseil d'Etat... (Protestations.)
Mesdames et Messieurs les députés, si l'on demande, dans la conclusion de ce rapport, d'en prendre acte, c'est tout simplement... que le rapporteur s'est trompé ! (Rires et exclamations.) Vous souhaitez qu'on prenne acte de ce rapport, meuh... ? Y a-t-il d'autres propositions, meuh... ? Bien, si ce n'est pas le cas, nous prenons acte de ce rapport ! (Applaudissements.)
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
La séance est levée à 23 h 35.