République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1328
7. Proposition de motion de MM. Florian Barro, Michel Parrat, Jacques Béné et Thomas Büchi sur la politique du Conseil d'Etat pour la production de logements. ( )M1328

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,considérant:

que la demande de logements a tendance à augmenter, notamment à la suite de la venue à Genève de plusieurs entreprises multinationales ;

que les observateurs du marché de l'immobilier prédisent une prochaine pénurie de logements si des mesures ne sont pas prises rapidement pour faire face à la situation ;

que la politique actuelle du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement ne semble pas s'adapter à cette situation en limitant la production de logements dans le secteur « libre » et en imposant des quotas de logements sociaux ;

que personne ne souhaite un retour de la pénurie ;

invite le Conseil d'Etat

à procéder, sans retard et en collaboration avec les milieux intéressés, à une analyse circonstanciée de la demande de logements, notamment dans le secteur dit « libre », c'est-à-dire non subventionné ;

à définir dans les plus brefs délais une politique claire en matière de production et de rénovation de logements ;

à solliciter de la Confédération des possibilités de dérogation aux conditions de résidence au lieu de travail pour les étrangers.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Depuis l'arrivée de plusieurs entreprises multinationales sur le sol genevois et la reprise économique, les professionnels de l'immobilier, tout comme d'autres observateurs, constatent un resserrement de l'offre de logements dans le canton et en particulier d'appartements de grande taille.

Il devient urgent de prendre des mesures pour permettre la construction de nouveaux logements, en particulier dans le secteur non subventionné, car les logements sociaux ne peuvent être mis à la disposition des fonctionnaires internationaux et des cadres d'entreprises multinationales à Genève.

En effet, la loi générale sur le logement et la protection des locataires impose des conditions de résidence à Genève et des barèmes aux bénéficiaires des logements, conditions qui ne peuvent manifestement pas être respectées par ces personnes.

Or, à l'heure actuelle, il faut constater que le Conseil d'Etat n'a pas de politique claire et déterminée en faveur de la construction de ce type de logement.

D'un côté, le Département de l'économie (DEEE) mène une politique de promotion économique active, qui porte ses fruits.

D'un autre côté, le Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (DAEL) impose des conditions minimales de production de logements subventionnés, qui ne reposent sur aucune étude scientifique et dont on sait qu'elles ne répondent pas aux demandes de cette nouvelle catégorie de locataires.

Un premier pas en faveur d'une concertation entre les départements a été effectué entre le DEEE et le Département des finances. Il n'est pas suffisant, car il faut impérativement que tous les départements coordonnent leur action.

En particulier, à défaut de mise à disposition de nouveaux logements, on risque de créer une pénurie nuisible à tous points de vue.

De plus, le resserrement de l'offre de logements de grande taille rend difficile la recherche pour les Genevois. Ces derniers sont autant de citoyens, de contribuables et de consommateurs qu'il est important de garder sur le sol cantonal.

C'est le but de la présente motion, à laquelle nous vous demandons de réserver bon accueil.

Débat

M. Florian Barro (L). Cette motion se situe dans le prolongement de l'interpellation urgente que j'avais développée le mois passé, au sujet de la production de logements sociaux dans les zones de développement. La réponse que nous avait donnée le Conseil d'Etat n'était, on s'en doute, pas suffisante à nos yeux - comme c'est le cas, en règle générale, pour les interpellations urgentes - et nous l'avions d'ailleurs anticipée en déposant cette motion, qui demande essentiellement une politique claire en matière de développement et, surtout, en matière de construction de logements de tous types.

Dans ce contexte, est-ce à l'Etat de contribuer à entretenir une pénurie, ou du moins à la favoriser ? Ou doit-il, au contraire, promouvoir un développement dans le respect des procédures et des intérêts respectifs ? Pour nous, poser la question, c'est y répondre. A ce jour, des démarches sont entreprises par le département de l'économie pour favoriser les entreprises, l'emploi et l'économie en général, qui représente le carburant de notre politique sociale, mais, à notre sens, on ne peut pas mettre du carburant quand on a perdu les clés du réservoir !

Ainsi, le plan directeur actuellement à l'étude à la commission d'aménagement, qui préconise un peu tout et son contraire, ou le plan directeur actuellement en vigueur, qui demande qu'on utilise au mieux les zones à bâtir, en particulier les zones proches de l'agglomération, sont combattus, notamment par la Ville. Or, comment veut-on promouvoir l'installation d'entreprises et l'installation de leurs collaborateurs, sans une politique de développement claire des logements, notamment des logements non subventionnés ?

En résumé, notre motion demande au Conseil d'Etat de prendre les décisions qui s'imposent et d'être en phase avec le développement du canton. Monsieur Moutinot, à notre avis, vous ne pourrez pas construire 1800 logements HBM sans la contribution de la croissance du canton. Donnez-vous les moyens de votre politique et ne tentez pas de décourager la libre entreprise !

Je vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir cette motion et de l'envoyer au Conseil d'Etat, tout en demandant préalablement à celui-ci des éléments d'information factuels.

M. Christian Grobet (AdG). Nous tenons à dire, avec beaucoup de franchise, aux auteurs de cette motion que nous ne partageons pas l'objectif visé. De toute évidence, ils souhaitent que l'on donne la priorité à la construction de logements libres, c'est-à-dire non subventionnés, voire que leurs loyers ne soient même plus contrôlés, comme c'est habituellement le cas dans la zone de développement.

Aujourd'hui, s'il manque quelque chose à Genève, Monsieur Barro, ce sont bien les logements sociaux, c'est-à-dire les logements subventionnés et destinés aux revenus inférieurs, qui sont une partie très importante de la population. On constate, en effet, qu'au fil des années le parc des logements HLM ne fait que diminuer. Vous savez comme nous que la «durée de vie» d'un logement HLM est de vingt à vingt-cinq ans au maximum, et qu'au terme de cette période le logement devient libre et qu'il ne répond plus aux critères du logement social. Peut-être M. Moutinot pourra-t-il nous dire tout à l'heure quel est le pourcentage actuel des logements sociaux dans le canton, mais on peut déjà affirmer qu'au fil des années ce pourcentage n'a fait que diminuer.

Par voie de conséquence, s'il faut définir une priorité, c'est bien la construction de logements subventionnés. Je rappelle du reste qu'une initiative, toujours pas totalement concrétisée, demandait la construction de 3000 logements HBM, parce qu'il y a dix ans on se rendait déjà compte que c'était cette catégorie de logements qui faisait le plus défaut.

En revanche, s'agissant des logements non subventionnés, Monsieur Barro, vous vous moquez du monde : il y en a suffisamment sur le marché ! Par ailleurs, estimer que ces logements sont trop chers pour les collaborateurs des multinationales qui s'installent à Genève, c'est faire le constat de l'échec de cette politique de liberté totale que vous voulez dans le domaine de la construction de logements. Car il est vrai que, s'il n'y a pas un certain nombre de règles en matière de fixation des loyers, les logements deviennent une denrée extrêmement onéreuse. Il n'y a qu'à lire les journaux : les logements libres existent, mais ils sont actuellement à des prix exagérés et la solution serait plutôt de trouver un moyen pour réduire ces loyers. Evidemment, la meilleure méthode, qui est la vôtre du reste, serait l'autorégulation des milieux de la construction et des promoteurs ; il faudrait qu'ils se montrent un peu moins gourmands et les logements vacants qui sont offerts sur le marché trouveraient alors certainement preneurs.

Par voie de conséquence, nous ne pourrons pas, quant à nous, voter la motion qui nous est proposée ce soir.

M. David Hiler (Ve). Pour faire court, notre groupe dira à M. Laurent Moutinot de continuer comme il le fait, c'est-à-dire que 70% des logements construits soient effectivement attribués au logement social, avec la recommandation supplémentaire que, dans ces 70%, il y ait un volume suffisant pour les coopératives et les organismes à but non lucratif. En effet, pour éviter les effets de la sortie de logements du système HLM, il faut effectivement travailler avec ces opérateurs, qui sont les seuls à garantir des loyers raisonnables à long terme.

Pour le reste, nous nous réjouissons de constater - ce qui a l'air de gêner certains - qu'en réalité, parmi les logements libres, c'est la PPE qui l'emporte. C'est un besoin, une partie de la population souhaite acheter et tant qu'à faire, autant qu'il y ait des logements en PPE que des loyers libres totalement hors de prix. Si les gens veulent acheter, c'est bien, ils échappent ainsi à la domination d'un propriétaire.

Donc, hormis le bémol en faveur des organismes à but non lucratif, nous vous demandons donc, Monsieur Moutinot, de continuer avec ces pourcentages : c'est bien, même si ce ne sera probablement pas suffisant. Mais ne vous laissez surtout pas distraire par cette motion qui, à l'évidence, veut favoriser un tout petit groupe social qui ne me paraît pas manquer actuellement des choses qui font les bienfaits de la vie !

M. Pierre-Alain Cristin (S). Comme les motionnaires, nous sommes sensibles au marché de l'immobilier à Genève ; ils nous prédisent une prochaine pénurie de logements et, comme eux, nous ne la voulons pas, mais pour d'autres motifs : notre souci n'est pas de pouvoir loger les employés d'entreprises internationales, mais de voir une envolée des prix de la construction et des loyers qui se répercuteront sur les locataires. De plus, le concept de logements économiques a subi une lente mais inexorable évolution, qui l'a conduit vers un produit ne se différenciant guère du logement du secteur libre. Type d'appartement, degré de finition, niveau d'équipement : les standards sont devenus identiques.

C'est pourquoi le groupe socialiste se donnera comme priorité le logement bon marché, qui ne représente que 2% du parc de logements du canton, car nous pensons que pour les ménages à revenus modestes - environ 25% de la population - l'effort de la collectivité publique doit être accru. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste refusera cette motion.

M. Thomas Büchi (R). Il est impensable, Monsieur Grobet, que Genève prenne le risque d'une nouvelle crise du logement. C'est principalement pour cette raison que nous avons déposé cette motion, afin d'inciter l'Etat à prendre des mesures pour éviter une situation de pénurie. Il est indiscutable que, depuis quelque temps, la demande augmente ; il faut donc s'adapter à cette nouvelle donne et accroître la production de logements, ceci aussi dans le secteur libre.

Nous ne sommes pas contre le développement du logement social et notre groupe l'a prouvé à plusieurs reprises. En effet, combien de motions n'avons-nous pas soutenues ou signées concernant les coopératives d'habitation ou les logements HBM ! Mais il est primordial qu'un développement harmonieux de tous les secteurs du logement se fasse. Autrement, nous paierons les pots cassés dans quelque temps.

Il faut donc que le Conseil d'Etat adapte sa politique et la calque sur la politique de promotion économique qu'il développe actuellement. Si on veut être attractif sur le plan économique, il faut aussi offrir des logements aux gens qui viennent travailler à Genève et ce, de nouveau, dans tous les secteurs du logement. Il ne faut pas que ces mesures que l'on veut attractives se retournent contre nous et nous portent finalement préjudice.

Par conséquent, si vous ne voulez pas renvoyer cette motion ce soir au Conseil d'Etat, reconnaissez qu'elle mérite au moins d'être débattue et que le minimum qu'on puisse faire, c'est de la renvoyer en commission.

M. Florian Barro (L). Je voudrais répondre aux propos de M. Grobet, qui dit que notre motion vise à déréguler le marché du logement. Vous savez bien que la plupart des projets de construction se trouvent en zone de développement, là où précisément l'Etat intervient et contrôle. Vous avez rappelé à M. Moutinot qu'il convenait de construire environ 1800 logements HBM pour parfaire la loi des 3000 logements. Mais pour cela il faut aussi donner des moyens à l'Etat. A cet égard, notre vision des choses, c'est que le petit groupe social que M. Hiler trouve anormal de favoriser a la malheureuse habitude de payer des impôts et de contribuer ainsi à la politique sociale du canton ! On ne peut mener une politique sociale généreuse sans avoir la possibilité, en contrepartie, de récolter les recettes fiscales qui permettent justement d'alimenter la construction de logements sociaux.

M. Grobet rappelle que le parc de logements sociaux diminue chaque année. Evidemment, on en construisait jusqu'à 6000 par année dans les années 60 et, aujourd'hui, on en construit environ 1800. Comment voulez-vous inverser cette tendance à la baisse, sachant que c'est à l'époque où l'Alliance de gauche n'existait pas que se construisaient le plus de logements ?

Par ailleurs, l'Alliance de gauche a la propension d'utiliser les arguments qui l'arrangent. Quand on parle de fiscalité, il y a trop de riches à Genève ; quand on parle de logement social, il y a trop de gens qui ont des moyens modestes et qu'il faut aider. En définitive, y a-t-il trop de riches, ou trop de pauvres ? Il faudrait peut-être accorder vos violons pour enfin détecter où se trouvent exactement les problèmes.

Monsieur Grobet, vous dites aussi qu'il n'y a pas de pénurie. Je peux vous donner l'exemple d'entreprises multinationales qui louent des logements à l'avance, avant l'arrivée de leurs cadres, pour être sûres de disposer d'un logement. Alors, ne me dites pas qu'il n'y a pas de pénurie !

En conclusion, puisque vous ne voulez pas l'envoyer directement au Conseil d'Etat et qu'il y a un déficit d'information au niveau de ce Grand Conseil, je vous recommande, comme l'a proposé M. Büchi, de renvoyer cette motion en commission. Ceci afin d'y recevoir les informations qui vous démontreront que nous ne sommes pas dans l'erreur en préconisant d'accueillir aussi les familles disposant de plus de moyens que celles que vous voulez absolument implanter dans notre canton.

M. René Koechlin (L). Ce qui indispose quelques députés des bancs d'en face, dont M. Grobet, c'est à l'évidence la deuxième partie de la première invite, soit le fait de réduire l'analyse circonstanciée de la demande au secteur libre et non subventionné. Mesdames et Messieurs, gouverner, c'est prévoir. On prévoit une crise du logement relativement proche, comparable à celle des années 80. Or, je pense qu'il appartient au gouvernement de tenter d'anticiper et aux députés que nous sommes d'être informés. Cette motion ne demande rien d'autre.

Elle demande, d'une part, une analyse circonstanciée de la demande de logements : qui pourrait ne pas souhaiter cette analyse ? D'autre part, elle demande au gouvernement de définir une politique claire en matière de production de logements et accessoirement de rénovations. Là aussi, Mesdames et Messieurs, on ne peut que la souhaiter en cette matière; et pour le moment celle-ci ne ressort pas clairement.

Aussi, que l'on amende la première invite, que l'on supprime la deuxième partie, d'accord, on pourra examiner cela en commission. Mais notre Grand Conseil se doit de se préoccuper et de la demande en matière de logements d'une façon générale et de leur production, c'est-à-dire de la façon potentielle de répondre à cette demande, qui risque de devenir pressante au cours des prochaines années. Il est de notre devoir de demander ce type d'informations et ce type d'éclaircissements au gouvernement.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, je vous suggère de renvoyer cette motion en commission, afin, peut-être, d'obtenir par anticipation ces informations ; à défaut de la renvoyer ensuite, lorsqu'elle reviendra de commission, au Conseil d'Etat, pour qu'il procède à l'analyse circonstanciée et à la définition d'une politique claire en matière de production de logements.

M. Pierre Marti (PDC). Je comprends bien que le parc des HLM diminue et que c'est un secteur qu'il ne faut jamais arrêter de soutenir, pour répondre à la demande de certaines personnes en difficulté. Mais, Monsieur Grobet, il me semble que vous êtes intervenu, comme souvent, sans avoir lu les invites de cette motion. Et, comme l'a dit M. Koechlin, si vous n'avez pas lu les invites au Conseil d'Etat, il est facile de s'emballer et de dire qu'il n'est pas prioritaire de construire pour une certaine catégorie de gens qui ont les moyens. En l'occurrence, Monsieur Grobet, nous devrions nous réjouir d'avoir l'opportunité d'accueillir des personnes qui ne demandent pas des HLM, mais des appartements à loyers libres.

Ce que nous réclamons, c'est une analyse de la demande actuelle. S'agissant de répondre à la demande prépondérante de la population, peut-être verra-t-on, dans l'analyse statistique, qu'en ce moment il y a un véritable besoin d'appartements en loyers libres... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Je vois que cela n'intéresse pas beaucoup M. Grobet, mais cela ne change rien : il a de toute façon déjà décidé qu'il ne faut que des HLM, partout et même dans des zones où l'on pourrait construire autre chose !

Il est extrêmement important que nous étudiions la situation et c'est bien l'invite qui est faite au Conseil d'Etat. Il convient de poser cette question d'une façon globale : de quels logements avons-nous besoin actuellement ? Faut-il mettre l'accent sur les HLM ou sur d'autres logements, du fait de l'accueil actuellement à Genève d'un certain nombre d'entreprises ? J'ai pu constater, auprès d'un certain nombre de régies, qu'il n'y avait absolument plus aucun logement à mettre à disposition des cadres supérieurs de sociétés qui s'installent chez nous. Nous devons donc faire un effort, pas seulement pour l'accueil des entreprises, mais aussi pour l'accueil des personnes qui viendront, grâce à elles, travailler chez nous et y payer des impôts.

M. Christian Grobet (AdG). On ne peut pas dissocier les invites de l'exposé des motifs de cette motion : pour moi, le but poursuivi par les motionnaires est très clair, en fonction de leur exposé des motifs.

Cela dit, si véritablement l'intention de certains députés est d'avoir un bilan de la situation actuelle, de voir comment les flux de logements ont évolué ces dernières années et quels sont les besoins - car je suis conscient qu'il y a des besoins - nous accepterons le renvoi en commission de cette motion, dans le sens qui a été indiqué par M. Koechlin. Et ce, malgré la mauvaise rédaction de ce texte et compte tenu du fait que, durant la législature précédente, nous nous étions plaints de ce que certaines de nos motions n'étaient pas discutées.

M. Laurent Moutinot. Il m'a tout d'abord été demandé un chiffre : les logements sociaux représentaient, il y a une quinzaine d'années, 20% du parc locatif genevois ; ils représentent aujourd'hui moins de 12%. A ma connaissance, la situation générale de la population ne s'est pas améliorée dans une proportion telle... (Brouhaha.)

Le président. Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas continuer ainsi. Je demande le silence, s'il vous plaît !

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. ... la situation ne s'est pas améliorée dans une proportion telle que l'on puisse justifier pareille diminution du parc de logements sociaux.

La motion qui est proposée nous invite, dans un premier temps, à faire une analyse de la demande. Je puis vous dire qu'en ce qui concerne le logement social cette analyse existe et que les partenaires sociaux la connaissent. En effet, grâce à la réunion en un seul fichier des demandes faites auprès de l'office cantonal du logement et des fondations immobilières de droit public, nous connaissons la totalité des demandes de logement social, qui sont à l'heure actuelle de 3000 demandes non satisfaites, étant précisé que le retard dans la réalisation du programme de 3000 HBM est d'environ 1500 appartements.

En revanche, les demandes hors du logement social sont effectivement mal appréhendées à l'heure actuelle et je me réjouis de l'aide du Grand Conseil pour inciter les milieux immobiliers privés à donner ces chiffres, car à l'heure actuelle ils s'y refusent ! On affirme qu'il y a des manques, je veux bien le croire, mais force est de constater qu'il n'y a pas le même degré de précision, à l'heure actuelle, dans le décompte de ces deux types de demandes.

Cela dit, compte tenu du fait qu'aujourd'hui il sort du secteur social beaucoup plus de logements qu'il n'en rentre, je maintiens que la proportion de deux tiers de logement social et d'un tiers de logement libre, dans les nouvelles opérations, est juste et je n'entends pas changer cette proportion. En effet, face à une pénurie de logements, qui frappe tout le monde - je suis parfaitement d'accord qu'elle touche aussi bien les cadres expatriés des multinationales que la classe moyenne et les populations défavorisées - face à cette situation il n'y a qu'une réponse, c'est l'augmentation globale du volume de production de logements, mais jamais je n'accepterai que, dans cet effort, la population la plus défavorisée se voit privée de son contingent en faveur du reste de la population ! C'est là une proposition inacceptable ! (Applaudissements.)

Il est évident, Monsieur Barro, que lorsque nous approchons des compagnies étrangères pour les inciter à s'installer à Genève, la moindre des corrections à leur égard est de leur fournir des logements et des logements qui correspondent à leurs besoins. Il s'agit bien entendu de logements d'une certaine qualité, d'un certain standing ; je suis d'accord de les construire, de faire tous les efforts nécessaires dans ce sens, mais jamais, je le répète, au détriment du logement social !

Mesdames et Messieurs les députés, la réponse tient dans le volume de construction. Votre commission d'aménagement a voté hier soir, dans le cadre du projet de concept du plan directeur, des taux de densité : elle a confirmé le taux de densité de 1,2 en zone de développement, elle a précisé le taux de densité de 0,8 en zone 4A et de 0,6 en zone 4B. Si vous adoptez, comme je le souhaite, ce projet de concept, avec ces taux de densité, il faudra ensuite avoir le courage de les appliquer dans les zones que cela concerne. Et ceci malgré les difficultés, s'agissant des communes, des voisins et de tous ceux qui n'en voudront pas. Je suis quant à moi décidé à appliquer ce plan directeur, si vous le votez, parce qu'en situation de pénurie, une fois encore, ce sont forcément ceux qui ont le moins de moyens qui souffrent et le rôle de l'Etat est justement d'intervenir en faveur de cette catégorie de population. Voilà pourquoi je ne peux absolument pas tolérer la demande de la motion, en ce qu'elle tend à privilégier des gens qui n'en ont pas vraiment besoin !

Cela dit, il faut arriver à répondre à tous les besoins ; je suis prêt à y donner la main et je vous demande votre appui. Dans ces conditions, je vous donnerai volontiers toutes autres explications, en vous remerciant d'inviter les milieux immobiliers privés à participer à l'opération devant la commission du logement. (Applaudissements.).

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission du logement.