République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 20 novembre 1998 à 17h
54e législature - 2e année - 1re session - 51e séance -autres séances de la session
No 51/VII
Vendredi 20 novembre 1998,
nuit
Présidence :
M. .
premier vice-président
puis
M. Jean Spielmann, président
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, Guy-Olivier Segond, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Mme et MM. René Ecuyer, Claude Haegi, Danielle Oppliger et Jean-Pierre Restellini, députés.
3. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
La Commission des travaux, sous la présidence de M. Dominique Hausser, s'est réunie les 13 octobre, 20 octobre et 3 novembre 1998, pour examiner le projet de loi 7882, déposé le 30 juillet 1998 et renvoyé par le Grand Conseil en Commission des travaux lors de la séance des 24/25 septembre 1998.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat chargé du Département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie a participé aux travaux de la commission lors des séances du 13 et 20 octobre et 3 novembre assisté de M. Claude Calame, chef du service planification et constructions.
Introduction
Le concept de valorisation des déchets organiques par le processus de compostage, adopté à Genève en 1992, préconisant la diminution de la quantité de déchets à incinérer et l'intensification de leur valorisation, répond aux exigences de l'Ordonnance sur le traitement des déchets de 1990 (OTD).
L'article 7 y précise en effet que "; les cantons encouragent la valorisation des déchets compostables par les particuliers eux-mêmes, notamment par le biais d'informations et de conseils. Si des particuliers n'ont pas la possibilité de valoriser eux-mêmes leurs déchets compostables, les cantons veillent à ce que les déchets soient dans la mesure du possible collectés séparément et valorisés ".
En 1987, le Grand Conseil a accepté un crédit de Fr. 2,6 millions (loi 5930 du 9 avril 1987) pour la réalisation d'une installation pilote de compostage sur le site de Châtillon, d'une capacité de 3 000 tonnes par an.
L'expérience s'étant révélée concluante, le Conseil d'Etat a décidé, en 1990, de compléter cette installation en l'agrandissant de manière à pouvoir traiter 10 000 tonnes de déchets organiques par an. Le Grand Conseil adoptait alors le crédit de Fr. 6,4 millions (loi 6508 du 21 juin 1990), nécessaire à la réalisation de ces travaux
C'est le 27 mai 1993, que le nouveau complexe de traitement des déchets organiques des communes d'Avully, Avusy, Bernex, Chancy, Confignon, Dardagny, Carouge, Laconnex, Lancy, Meyrin, Onex, Satigny, Soral, Vernier et de quelques quartiers de la Ville de Genève est mis en service. Suite aux odeurs nauséabondes émanant de l'installation, et à la plainte des habitants de la commune de Bernex, une série de mesures est prise afin de limiter ces inconvénients. Notamment par le traitement des déchets le jour même de leur arrivée. En effet, une étude olfactive, entreprise en 1996, a montré qu'une part importante des odeurs était imputable au compostage.
En 1997, une augmentation considérable du tonnage des déchets à traiter chaque semaine, environ 350 tonnes - alors que l'installation ne peut accepter que des pointes de l'ordre de 200 tonnes - a entraîné de nouvelles nuisances olfactives. C'est alors qu'au mois de juin 1997, la commune de Bernex a présenté au DIER une pétition signée par 550 citoyens de la commune, destinée à "; soutenir le projet d'une installation de traitement des ordures ménagères par méthanisation sur le site de Châtillon ". Cette installation devant permettre dans les plus brefs délais et en substitution du centre de compostage actuel, d'éradiquer l'émission des odeurs nauséabondes que subit la population voisine. A titre de mesures urgentes, les déchets organiques provenant des ménages seront dirigés sur l'usine des Cheneviers durant les mois de juillet et d'août 1997, et une étude pour la réalisation d'une telle installation est entreprise par le Conseil d'Etat. Les modalités d'inscription et de participation pour la construction de cette installation sont publiées le 6 août 1997 dans la FAO et la FOSC. En référence aux accords du GATT/OMC, la procédure d'adjudication sélective a été choisie. Au terme du délai d'inscription, soit le 5 septembre 1997, huit groupes ont déposé leur candidature et c'est le 19 décembre 1997 que ces concurrents déposaient leur dossier pour l'ouverture publique des offres.
La proposition la plus coûteuse se chiffrait à 11 444 375 francs (hors taxe). Quant à l'offre la plus économique, elle se chiffrait à 7 460 663 francs HT.
Un jury composé de membres du DIAE, de l'Office cantonal de l'énergie (OCEN) et d'Energie 2000, a évalué l'ensemble des projets afin de déterminer le montant du crédit d'investissement ainsi que le montant des subventions demandées à l'Office fédéral des questions conjoncturelles. La Confédération ayant, d'ores et déjà, accordé une subvention de 700 000 francs au titre de la relance économique.
Dès octobre 1996, dans le cadre de la commission de gestion globale des déchets, un groupe de travail "; valorisation des déchets organiques " est constitué. Ce groupe de travail, composé de conseillers administratifs ou de maires de communes, de représentants d'associations de défense de l'environnement, de fonctionnaires de l'Etat et de la Ville présente, en décembre 1997, un rapport sur la valorisation des déchets organiques du canton de Genève. Ce rapport, faisant partie intégrante du plan cantonal de gestion des déchets, conclut à l'édification de trois centres de traitement des déchets organiques sur le canton et propose, comme action prioritaire, de réaliser l'extension du centre de compostage du site de Châtillon par la réalisation d'une installation de méthanisation.
Objectifs de la nouvelle installation de Châtillon
La nouvelle installation de Châtillon a été dimensionnée pour avoir une capacité de traitement de 10 000 tonnes par an et néanmoins pouvoir absorber les fluctuations saisonnières des déchets organiques. La capacité de 10 000 tonnes par an a été déterminée sur la base des quantités actuelles de 5 000 tonnes par an sur le site de Châtillon et d'une augmentation induite par l'accroissement du nombre de communes dont les déchets verts devraient être traités. En effet, le nouveau projet de gestion des déchets organiques prévoit entre autres l'extension des levées sur la totalité de la Ville de Genève. Compte tenu du digestat qui sera introduit dans l'installation de compostage actuelle (3 000 t/an), la capacité totale de l'installation de Châtillon sera de 17 000 tonnes par an.
En outre, le projet doit en optimisant sa rentabilisation, par l'utilisation de technologies modernes, répondre aux exigences actuelles de respect de :
- l'environnement ;
- l'hygiène ;
- l'ergonomie.
Pour l'usine de méthanisation, il s'agira de :
- Traiter les déchets organiques par le biais de la méthanisation.
- Garantir la qualité de l'air.
- Respecter les normes de qualité pour les sous-produits de la méthanisation.
- Offrir de bonnes conditions de travail au personnel (moins d'exposition aux nuisances, limitation des déplacements).
- Garantir la sécurité du personnel, des visiteurs et une qualité de vie des riverains.
- Commande optimalisée des installations.
- Gestion informatisée de l'exploitation.
- Faciliter les problèmes de maintenance et d'exploitation.
- Rationaliser l'exploitation et réduire le travail de nuit ou de fin de semaine.
Technologie utilisée
La digestion anaérobie (micro-organisme pouvant se développer sans air ni oxygène) est une technique qui répond parfaitement aux attentes actuelles dans le domaine de la gestion des déchets puisqu'elle permet, outre la récupération de la matière organique, de produire de l'énergie en limitant les émissions dans l'atmosphère, notamment de composés malodorants.
Le procédé choisi, digestion en une étape, offre la possibilité de réaliser une installation fiable avec un seul digesteur. Grâce à l'absence de tout dispositif mécanique à l'intérieur du digesteur, la maintenance se trouve simplifiée.
Processus de chargement
La réception des déchets se passe dans une halle de déchargement fermée, isolée de l'extérieur par un portail automatique et est mise en dépression, ce qui évite la propagation des odeurs. Le concept du digesteur vertical permet une extraction gravitaire. Le compost brut est ensuite amené par bandes transporteuses capotées jusqu'au pied de la bande transporteuse existante, à destination de l'aire de maturation.
En ce qui concerne le traitement des odeurs, une aspiration d'air est prévue à tous les endroits du traitement où le produit n'est pas hermétiquement isolé. L'air aspiré fait l'objet d'un traitement biologique spécifique. Aucune odeur due à l'installation de digestion ne sera perceptible aux limites de propriété.
Production de gaz, d'énergie électrique et consommation sur le site
La productivité du gaz attendue est de 119 Nm3 par tonne de déchets bruts, la teneur en méthane attendue est de 55 % en moyenne, le reste étant de la vapeur d'eau et du gaz carbonique. L'autoconsommation de l'installation est réduite a 46 kWh biogaz et de 26 kWh électriques par tonne de déchets traités.
Energie produite
Trois variantes ont été étudiées :
- Consommation par le site de l'énergie produite jusqu'à concurrence de ses besoins, l'excédent de production étant reversé dans le réseau des SIG et rétribué selon un tarif figurant dans la loi.
- Lavage du gaz produit et introduction de celui-ci dans le réseau des SIG à Bernex (prix de rachat de l'énergie sous forme de gaz très nettement inférieur au prix de rachat de l'électricité).
- Utilisation d'un groupe chaleur-force pour la production de l'énergie nécessaire au fonctionnement du site, le solde du gaz est traité comme carburant pour les véhicules de service (solution entraînant un investissement supplémentaire de 2,5 millions de francs dont l'amortissement impliquerait une augmentation de 70 F par tonne pour le traitement des déchets)
Parmi ces trois variantes, c'est la première qui a été choisie par le département en raison des avantages techniques et économiques. L'installation sera équipée de deux groupes chaleur-force de 200 kW électriques ; ils seront asservis à la production de gaz. Un gazomètre sera construit afin d'absorber les pointes de production. Compte tenu du dimensionnement des groupes et des fluctuations de la quantité de déchets à traiter en cours d'année, le fonctionnement des groupes sera le suivant :
- durant 70 % du temps, soit 6130 heures, un seul groupe sera en fonction avec une puissance variant de 50 % à 100 % ;
- durant 24 % du temps, soit 2100 heures, deux groupes seront en fonction avec une puissance variant de 50 % à 100 % ;
- durant 6 % du temps, soit 530 heures, les deux groupes fonctionneront à pleine puissance.
Le surplus de production électrique sera injecté sur le réseau des Services industriels de Genève (SIG). Cette énergie étant considérée comme provenant de source renouvelable (biomasse), selon l'article 21A de la loi sur l'énergie (L 2 30) du 18 septembre 1986, les SIG ont l'obligation de reprendre cette production pour un montant équivalant à trois fois le prix de vente. C'est sur cette base que les recettes ont été évaluées.
Il est à relever qu'au cas où cette loi devrait être modifiée, et que le prix de rachat de l'énergie soit égal à celui de vente, le coût de traitement des déchets serait augmenté de 15 F à 20 F par tonne.
La chaleur sera partiellement utilisée pour chauffer les locaux sociaux du site qui, actuellement, sont chauffés par des convecteurs électriques. L'excédent de chaleur produite, soit 3 GWh/an sera rejeté dans l'atmosphère. L'impact environnemental a été considéré comme étant acceptable. Actuellement, le service est discussion avec l'OCEN pour de possibles améliorations au niveau du projet afin de revaloriser cette énergie calorifique.
Le bilan énergétique annuel est représenté par le schéma ci-après.
Délais d'exécution
- Ouverture du chantier janvier 1999
- Fin des travaux décembre 1999
- Mise en service janvier à juillet 2000
Pour avoir droit aux subventions fédérales, cette planification doit être impérativement respectée.
Coût du projet
Le coût hors taxe de la réalisation projetée se décompose de la manière suivante :
1. Coût de la construction selon offre de l'entreprise générale 7 465 000 F
2. Equipements complémentaires (gazomètre, chauffage, structure) 615 000 F
3. Divers et imprévus 300 000 F
4. Prestation de management de projet 180 000 F
5. Fonds de décoration 1% 86 000 F
6. Total de la construction HT 8 646 000 F
7. Subventions de la Confédération - 700 000 F
8. Total net HT 7 946 000 F
HT= hors taxe
Le montant du crédit ne comprend pas la TVA. En effet, les taxes de traitement des déchets organiques étant assujetties à la TVA, l'impôt préalable peut être récupéré.
Données financières concernant l'exploitation
Les budgets d'exploitation de l'installation actuelle et du projet futur se décomposent comme suit :
Budget actuel
Budget 2000
Ecart
Charges
Charges du personnel
360 000 F
450 000 F
90 000 F
Intérêts et amortissement
400 000 F
1 017 400 F
617 400 F
Frais d'entretien bâtiment et installations
300 000 F
512 000 F
212 000 F
Consommables
0 F
26 000 F
26 000 F
Divers et évacuation
0 F
150 000 F
150 000 F
Prestation interne, autres services de l'Etat (usine des Cheneviers)
200 000 F
200 000 F
0 F
Total
1 260 000 F
2 355 400 F
1 095 400 F
Recettes
Vente du compost
100 000 F
100 000 F
0 F
Taxe sur le tonnage des déchets
1 160 000 F
1 765 400 F
605 400 F
Economie d'énergie (autosuffisance)
0 F
90 000 F
90 000 F
Prévision de vente d'énergie
0 F
400 000 F
400 000 F
Total
1 260 000 F
2 355 400 F
1 095 400 F
Résultat
0
0
0
Les charges supplémentaires seront couvertes par une augmentation de taxe de traitement. Ceci en vertu du principe pollueur-payeur.
En effet, lorsque l'installation de biométhanisation fonctionnera à plein régime avec une production annuelle d'environ 17 000 tonnes, la taxe perçue sera d'environ 130 F la tonne, alors que celle-ci est actuellement de 155 F pour les déchets organiques provenant des levées. Ces 130 F pourraient être augmentés d'environ 20 F, si l'hypothèse énoncée à la page 6 (§ 3) concernant le prix de vente de l'énergie se réalise. Néanmoins, le coût de traitement restera très avantageux par rapport à celui de l'incinération. Celui-ci, actuellement de 215 F par tonne, devrait augmenter significativement ces prochaines années.
Couverture financière du projet d'investissement
Dépense nouvelle d'investissement
Crédit brut proposé Fr. 8 646 000
Subvention Fr. 700 000
Crédit net proposé Fr. 7 946 000
Charges financières annuelles
Annuités constantes (amortissement 20 ans) Fr. 617 400
Intérêts passifs 0
Total Fr. 617 400
Revenus supplémentaires annuels (1)
Recettes propres Fr. 1 005 400
Economies prévues Fr. 90 000
Total des revenus supplémentaires Fr. 1 095 400
Charges supplémentaires annuelles (2)
Total des charges financières Fr. 617 400
Charges en personnel Fr. 90 000
Dépenses générales (nouv. bâtiment et ouvrage) Fr. 388 000
Total des charges Fr. 1 095 400
Couverture du projet
Insuffisance de couverture 0
Taux de couverture 100 %
Audition
La commission a procédé à l'audition des représentants des communes "; rive gauche ", soit Mme L. Martin - MM. P.-Y. Gerber, C. Martin, accompagnés par M. Barras de la maison Atag.
M. Gerber présente le projet GICAL qui signifie : Groupement intercommunal de compostage Arve et Lac. Ce projet qui est conçu depuis quelque temps avec une étude d'impact, pourrait démarrer, pour autant que le Département de l'intérieur donne son accord pour l'extension.
Le GICAL désirerait recevoir quelques précisions quant au financement de l'installation prévue à Châtillon. Il aimerait être sûr que le prix à la tonne, qui est moins élevé que celui de leur projet, comprend bien les mêmes paramètres de calcul, y compris les investissements.
La particularité de ce centre où tout le traitement se fera en méthanisation et en andins à demi-enterrés, est qu'il sera couplé à l'installation horticole d'un propriétaire qui utilisera le compost. Ainsi, la chaleur produite est valorisée en énergie de chauffage de la serre ou sous forme d'un groupe chaleur-force pour la production d'énergie électrique.
L'association, dotée d'une structure juridique, a été prévue avec un capital social de 2 millions, souscrit par l'ensemble des communes intéressées au projet, en proportion du nombre d'habitants.
D'autre part, afin de garantir un prix de revient assez bas, les communes s'engagent à porter leurs déchets au centre. L'objectif étant de garantir un certain volume, qui serait d'environ 10 000 tonnes/an. Le coût est d'ordre financier, d'amortissement et de fonctionnement. Il s'agit d'une société sans but lucratif. L'investissement total consenti pour ce projet qui s'élève à 11,3 millions, est financé par : le capital social souscrit par les communes, un prêt sociétaire souscrit également par les communes (ce prêt subordonné est rémunéré) et un prêt hypothécaire de 20 ans.
La participation retenue n'étant pas celle du pollueur-payeur, elle se fera par une souscription de 14 commune (50 000 habitants), selon son nombre d'habitants. Afin de garantir la viabilité du projet, le volume traité doit atteindre 10 000 tonnes par an. Pour l'ensemble du canton, le potentiel de déchets à traiter est de 30 000 tonnes. Ce centre étant conçu pour traiter le tiers des déchets du canton, correspondant à un bassin de population de 130 000 personnes, cela signifie qu'il faudra trouver la contribution de 90 000 personnes supplémentaires pour que le volume à traiter soit suffisant.
Le prix à la tonne serait de Fr. 156.-, puis Fr. 124.- après 10 ans. Au terme de la durée de vie de ce centre, les frais sont remboursés et la société a ainsi créé des liquidités pour reconstituer le capital initial.
M. Gerber précise que la première étape du Nant-de-Châtillon a été financée par l'ensemble des contribuables du canton et la seconde va l'être par le pollueur-payeur. Il se demande s'il est normal que les communes rive gauche paient la construction de leur centre, sans aucune aide de l'Etat ? Ils désirent être mis sur pied d'égalité avec le Nant-de-Châtillon et non uniquement en concurrence.
Discussion
Un des soucis de la commission a été de savoir si l'installation proposée était conçue de manière à absorber l'augmentation du volume des déchets, ainsi que les périodes de pointe. Les graphiques figurant aux annexes 3 et 4, montrent que les volumes de déchets livrés sur le site obéissent à une certaine périodicité. C'est ainsi que l'on passe, par rapport à une valeur moyenne annuelle, de -40 % en hiver à + 80 % en été. Le département nous confirme que l'installation a été dimensionnée pour absorber cette pointe de production qui, actuellement, représente 350 tonnes par semaine et à l'avenir peut-être 600 tonnes. Quant à la question de savoir si l'on aurait pu, avec l'installation actuelle, moyennant l'augmentation de la halle et le dégazage de celle-ci, éviter les problèmes liés d'odeur et de sous-capacité, il est répondu que non seulement il y a une difficulté à écouler la quantité de compost produite actuellement, mais que cette installation, mis à part le fait qu'elle produira de l'énergie, et donc permettra une baisse des coûts, a l'avantage de pas augmenter trop la production de compost. Au cas où l'écoulement du compost produit viendrait à être un problème, il pourrait être résolu en l'offrant gratuitement sans les frais de transport. Le surcoût serait de 5 F la tonne. Dans l'hypothèse où les SIG baisseraient de manière significative le prix de rachat de l'énergie produite, ce qui aurait comme conséquence de renchérir d'environ 20 F la tonne, le coût de traitement, serait malgré tout inférieur à celui d'aujourd'hui et largement concurrentiel par rapport aux Cheneviers.
Face aux problèmes soulevé par le GICAL sur le tonnage optimal de déchets permettant la rentabilisation de leur installation - 10 000 tonnes/an - alors que le potentiel de la zone rive gauche est d'environ 7 000 tonnes/an, le coût de traitement des déchets qui s'avère supérieur à celui de Châtillon, plusieurs commissaires ont soulevé la question, à savoir si le département avait prévu une péréquation financière ou quantitative (volumes des déchets) entre l'ensemble des sites de traitement du canton. M. Cramer indique (voir annexe 7) que le plan cantonal des déchets prévoit un système de découpage du canton. Si ce plan ne s'avère pas adéquat, une négociation sera à prévoir pour rééquilibrer. Il a donné la garantie au GICAL qu'il y aura un système de négociation des quantités de déchets entre les différentes installations en fonction de leur importance. Le plan de gestion des déchets parle des quantités de traitement ; en revanche, la péréquation n'a pas lieu sur le plan économique. Ces projets ont chacun leur logique. Le département respecte la démarche du GICAL, néanmoins l'Etat veut que la politique de gestion des déchets soit une réussite.
D'autre part, le département confirme son désir de voir diminuer la quantité de déchets à incinérer. Dans ce cadre, il ne faut pas que les installations se fassent concurrence, au contraire, elles doivent travailler en partenariat et développer une synergie. M. R. Cramer confirme que, s'il devait y avoir des difficultés, il y aura de l'entraide et que le principe adopté est celui du pollueur-payeur.
Les commissaires ont soulevé la question du déclassement des terrains qui seraient en zone agricole et auquel une compensation devrait être trouvée. M. R. Cramer, qui s'est engagé à effectuer les démarches nécessaires afin de régulariser la situation, nous informe que l'installation serait plutôt en zone de forêt et qu'une compensation allant dans le sens d'un reboisement est entreprise
Conclusion
Des considérations telles que la surcharge actuelle de l'installation, les odeurs nauséabondes qu'elle propage, l'intérêt évident de fournir de l'énergie renouvelable et l'économie substantielle des frais de traitement pour les collectivités publiques, confirment l'utilité pour la collectivité de la réalisation de l'installation de biométhanisation.
Vote
Soumise au vote, l'entrée en matière du projet est acceptée par la majorité de la commission, 10 oui (2 L, 1 R, 1 DC, 2 S, 1 Ve, 3 AdG) moins 1 abstention (1 L).
Après une relecture article par article, la majorité de la Commission des travaux s'est déclarée d'accord avec le projet, 9 oui (2 AdG, 2 DC, 3 S, 2 Ve) moins 3 abstentions (3 L) et recommande au Grand Conseil d'accepter le projet de loi 7882.
Annexes :
1. Plan d'implantation
2. Schéma de fonctionnement
3, 4, 5. Graphiques
6 Figure des zones d'apport
7 Etude relative aux émissions d'odeurs
ANNEXES
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Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Je n'ai rien à ajouter à mon rapport qui est suffisamment explicite et complet.
M. Jean-Pierre Gardiol (L). Notre groupe s'est abstenu sur ce projet de loi car il n'a pas été totalement convaincu. En effet, les libéraux ont été plus que surpris par la proposition du Conseil d'Etat de construire cette installation, qui devrait s'ériger dans une zone industrielle, sur un terrain se trouvant en zone de forêt. Cela paraît un peu surprenant en regard de toutes les misères qu'endure aujourd'hui le propriétaire privé qui veut construire dans notre canton. D'autre part, la conception de cette installation qui prévoit un broyeur à l'entrée de la chaîne nous a laissés songeurs. En effet, cette installation traitera demain les déchets organiques à grande échelle, c'est-à-dire nos poubelles qui auront dû être triées au préalable par nos concitoyens. Avec ce système de broyage, à la moindre erreur : un médicament, une pile, ici plutôt que là, le compost sera pollué globalement.
C'est également pour cette raison que nous avons émis des réserves quant à la qualité future de ce compost. Nous sommes en effet convaincus que les analyses d'aujourd'hui ne seront pas celles de demain. De ce fait, nous sommes très perplexes quant à la vente de ce compost, car le marché n'est pas évident. Même si ce compost est donné gratuitement, qui paiera le transport ? Qui paiera l'épandage sur les champs ? En relevant rapidement ces points de nos réflexions et en tenant compte des coûts qui pourraient être bien plus élevés que prévus, nous ne sommes, en définitive, pas convaincus que le compost coûtera moins cher que l'incinération. Malgré toutes ces réticences brièvement résumées, le président Cramer a estimé qu'il fallait tenter l'expérience et c'est la raison pour laquelle il nous a convaincus de nous abstenir. Nous comptons néanmoins sur lui pour suivre l'expérience de près et agir - en bon gestionnaire qu'il est - si l'expérience s'avérait négative.
Par contre, lors de l'étude de ce projet de loi, nous avons eu l'occasion d'entendre - comme le rapport le relate - des représentants du GICAL, c'est-à-dire ceux des communes de la rive gauche désirant également réaliser un centre de compost. Même si le président Cramer garantit les zones d'apport à ce centre, qui sera géré par un privé, de nombreuses questions se posent. A nos yeux, le montage financier présente de grands risques. La conception n'est pas la même qu'au Nant-de-Châtillon car il n'a pas été prévu d'injecter la production d'électricité sur le réseau des Services industriels. Mais tout ceci n'est rien en regard de sa situation proche de l'hôpital de gériatrie, proche des habitations et proche d'une école.
En effet, je possède ici un rapport explosif concernant les effets sur la santé publique que la construction d'un tel centre pourrait entraîner. En fonction des dangers encourus, l'OMS préconise l'interdiction d'implanter des sites de compostage industriel à moins d'un kilomètre des zones d'habitation et à moins de deux kilomètres des hôpitaux, des foyers pour personnes âgées, des écoles, des crèches, et recommande l'implantation en milieu rural ou forestier.
Sans entrer dans les détails, les risques courus par la population aujourd'hui sont très importants par rapport au tas de compost qui est en ce moment entreposé à cet endroit. Ces risques deviennent encore plus importants lors de l'agitation et de l'aération des tas de compost. Les risques sont de trois types : rhinoconjonctivite, asthme, urticaire; inflammation broncho-pulmonaire; lésions irréversibles des poumons. Cette situation, gérée d'une manière incompréhensible par la majorité du Conseil municipal de Vandoeuvres, m'amène aux questions suivantes : Monsieur le président, comment a-t-on pu autoriser une telle construction à cet endroit au vu des recommandations de l'OMS ? Comment a-t-on autorisé une construction industrielle sur un terrain cette fois-ci agricole ? Ce centre a-t-il été fermé ? Comment va-t-on évacuer ce tas sans mettre en danger la population ? Le département va-t-il donner son accord pour l'extension au mépris de la santé des habitants et des problèmes déjà rencontrés à l'époque à Genève dans une situation analogue près d'un hôpital ?
Mme Janine Hagmann (L). Je crois que nous nous souvenons tous, dans cette enceinte, des nombreuses interpellations et questions posées à propos du Nant-de-Châtillon. En effet, M. Mauris, ici présent, a retranscrit les plaintes des habitants de Bernex et des environs concernant les odeurs nauséabondes dégagées par l'amas de déchets verts. Je me souviens que M. Haegi s'était rendu sur place avec un «nez» pour prouver que les odeurs étaient vraiment nauséabondes. En fait, j'aimerais rappeler ici que ce sont surtout les déchets humides qui provoquent des nuisances, bien que l'amoncellement de déchets de jardin non compostés au fur et à mesure provoque des ennuis écologiques.
Je suis bien placée pour le savoir puisque la décharge située sur la commune de Vandoeuvres - qui n'accueillait que des déchets de jardin - vient d'être fermée par M. Cramer. Malgré des crédits déjà énormes - 2,6 millions en 1987, 6,4 millions en 1990 - on nous demande d'accepter aujourd'hui un investissement de 8,5 millions. M. Cramer essaie de nous prouver que ces 8 millions et demi ne coûteront rien au contribuable : en raison de la loi du pollueur-payeur, cet investissement sera complètement amorti par les déchets livrés au Nant-de-Châtillon.
J'espère, Monsieur le président, que tout a été bien calculé, bien pensé et bien prévu, que les comptes sont transparents, car le contribuable n'accepterait sûrement pas de gonfler à l'infini ce coût du Nant-de-Châtillon. J'espère que l'on ne s'engage pas dans un gouffre financier, si des problèmes de dysfonctionnements devaient survenir au cours de l'exploitation, ce qui obligerait à modifier le budget et les frais à la hausse ou les recettes à la baisse.
Le contribuable a déjà beaucoup donné pour cette station de compostage qui n'est effectivement pas satisfaisante. Je ne conteste pas son amélioration par l'apport de méthanisation, car je crois que les usines de méthanisation, celle de Zoug et celle d'Amiens par exemple, donnent entière satisfaction. Mais il est clairement indiqué à la page 3 du rapport de M. Velasco que le Nant-de-Châtillon doit être réalisé comme action prioritaire.
Ce qui me gêne, c'est que les contribuables d'Arve-Lac ont déjà participé aux péripéties du Nant-de-Châtillon. Maintenant qu'ils désirent construire, entièrement à la charge des communes, une station rive-gauche, ils apprennent qu'il y aura des zones d'apport imposées par l'Etat; qu'ils n'auront pas le droit d'apporter leurs déchets au Nant-de-Châtillon, même pendant la construction du GICAL; que des dérogations limitées dans le temps pour l'apport chez des paysans ne seront plus possibles; qu'il faut tout acheminer dès maintenant aux Cheneviers, à plus de 200 F la tonne, vous le savez très bien. Comment M. le président Cramer expliquera-t-il aux gens qu'ils doivent trier leurs déchets s'ils apprennent ensuite que tout est brûlé pêle-mêle aux Cheneviers ? Comment expliquer à la population d'Arve-Lac que leur compost au GICAL leur coûtera 156 F la tonne alors qu'il est prévu à 130 F au Nant-de-Châtillon ? Y aura-t-il une guerre d'apport des déchets pour se disputer les fournisseurs ? Etes-vous sûr que nous ne sommes pas en train de voir trop grand et qu'il est bien raisonnable de mener de front la même année le Nant-de-Châtillon, 8 millions, et le GICAL, 12,5 millions - même si cet argent ne provient pas du même porte-monnaie, puisque l'investissement de l'un est garanti par l'Etat et l'autre par les communes ?
Je conteste d'ailleurs un peu le discours de mon prédécesseur. Nous ne sommes pas là pour discuter du GICAL qui est un projet dépendant uniquement des communes. Nous ne sommes là que pour discuter en ce moment du Nant-de-Châtillon que nous devons voter rapidement, je vous le rappelle, si nous voulons obtenir une subvention fédérale. Pour moi, je le voterai ce soir, mais avec des promesses de discussions et de concertations pour qu'il y ait une équité dans le canton. L'écologie coûte cher, nous sommes d'accord. Admettons que c'est un plus indispensable à léguer à nos successeurs, mais ne prenons pas de décisions hâtives, irréfléchies. La population participe bien au jeu du tri, ne la dissuadons pas en allant trop loin et trop vite.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. J'aimerais commencer par une observation d'ordre général, tout en remerciant vivement le groupe libéral de son abstention constructive, si j'ai bien compris. En matière d'investissement, en tout cas pour ce que j'ai vu ce soir, si l'on devait compter sur le groupe libéral pour arriver à faire tourner l'économie de notre canton, nous n'irions malheureusement pas très loin. (Protestations.) Cela dit, les diverses interventions qui ont été faites, celle de M. Gardiol, celle de Mme Hagmann, montrent que nous sommes actuellement davantage dans un débat qui concerne le GICAL et la commune de Vandoeuvres que dans le débat qui était annoncé dans notre ordre du jour, qui est celui du Nant-de-Châtillon. En l'occurrence, en espérant que nous pourrons revenir à ce qui est l'objet de cet ordre du jour, je veux bien vous donner quelques indications.
Tout d'abord, je dirai à M. Gardiol que je n'ai pas sa connaissance de ce qui se passe sur le site de compostage de Vandoeuvres, n'ayant pas, comme lui, le privilège d'habiter à quelques centaines de mètres de ce site, ce qui suscite peut-être une attention accrue de sa part quant aux techniques qui y sont pratiquées. Je ne suis pas non plus en situation de campagne électorale pour les municipales.
Mme Hagmann, pour sa part, a posé un certain nombre de vraies questions auxquelles je dois répondre. Le premier point : je tiens encore une fois à affirmer de la façon la plus claire devant le Grand Conseil que le principe qui s'applique en matière de politique des déchets, qu'il s'agisse des déchets incinérés ou compostés, est le principe du pollueur-payeur. Il n'y a pas un centime provenant de l'impôt qui soit destiné au traitement des déchets. Le financement est assuré intégralement par les usagers : communes, collectivités publiques ou industries qui amènent des déchets à la décharge, dans des sites de compostage ou dans des sites d'incinération.
Sur ce point, je tiens à être parfaitement explicite. Nos comptes sont transparents; ceux en particulier de l'usine des Cheneviers sont contrôlés par les usagers, c'est-à-dire pour une bonne partie par les communes, qui sont très bien représentées dans la commission de gestion, et vous savez parfaitement bien, Madame Hagmann, quels sont les principes de calcul. Du reste, pendant longtemps, la comptabilité des Cheneviers incluait également les comptes du site de compostage. Je crois que, sur ce point, vous avez facilement les moyens, en tant que magistrat communal, d'être totalement rassurée, au cas où il y aurait encore, à vos yeux, la moindre ambiguïté à ce sujet.
Deuxièmement : je tiens tout de même à vous rappeler, en ce qui concerne les incertitudes évoquées par M. Gardiol, que le site du Nant-de-Châtillon traite actuellement 10 000 tonnes de déchets par an. Nous allons accroître la capacité de cette installation pour passer de 10 000 à 17 000 tonnes. Les collaborateurs qui travaillent au Nant-de-Châtillon ont réussi jusqu'ici à maîtriser la technologie adaptée pour traiter ces grandes quantités de déchets. Il n'y a aucune raison d'avoir de la suspicion ni à cet égard ni en ce qui concerne les technologies envisagées pour augmenter la capacité de cette usine.
Troisièmement : vous vous posez la question, Madame Hagmann, de savoir si nous ne sommes pas en train de voir trop grand. Je crois que nous voyons juste. Actuellement, dans le canton de Genève, les installations dont nous disposons ne parviennent pas à traiter tous les déchets compostables qui sont d'ores et déjà amenés par les usagers, cela alors même que dans une grande partie du canton - je pense notamment à la Ville de Genève qui représente tout de même la moitié de la population de ce canton - peu d'efforts ont été faits en matière de récupération de déchets organiques. Si ces efforts ont été très modestes, c'est notamment parce que l'on savait qu'il nous manquait les installations nécessaires pour traiter les déchets récoltés.
Aujourd'hui, le Nant-de-Châtillon est en situation de saturation. Ce site conçu pour 10 000 tonnes de déchets se trouve actuellement avec un apport de 12 000 tonnes. Vous savez mieux que moi, Madame, ce qu'il en est dans votre région, à Vandoeuvres, et dans les régions environnantes, puisque l'installation actuelle du GICAL n'arrive plus - et de loin - à répondre aujourd'hui à la demande. Comme vous le savez parfaitement bien, les quantités sont suffisantes dans la zone de récolte du GICAL pour que l'installation prévue puisse fonctionner dès demain. Vous le savez tellement bien que vous êtes préoccupée, à juste titre, par la perspective que, si le centre de compostage nécessaire ne peut pas être créé, toutes les communes de cette zone d'apport seront contraintes de faire incinérer les déchets, et de le faire de façon très coûteuse pour les communes puisqu'il en découlera un surcoût de l'ordre de 30 à 50%.
J'en viens enfin à la conclusion de votre intervention pour vous dire encore une fois, et devant ce Grand Conseil, que le département est particulièrement attaché, sur ce dossier comme sur d'autres, à mener à bien nos projets en matière de gestion des déchets en concertation étroite avec les communes et les usagers. Cela n'est pas seulement une affirmation que je fais devant cette assemblée, cela résulte de la façon dont nous avons jusqu'ici mis sur pied ensemble le plan de gestion des déchets. Vous savez que la commission qui s'est occupée de la révision de ce plan de gestion des déchets était présidée par un magistrat communal. Il s'agissait du maire de la ville de Carouge. Dans cette commission, plus d'un tiers des membres étaient des magistrats communaux. Vous savez qu'il en ira de même aussi bien dans la commission de gestion de l'usine des Cheneviers que dans la commission de gestion des déchets prévue par le projet de loi sur les déchets que avez renvoyé en commission lors de cette session.
En matière de zones d'apport, à plusieurs reprises et publiquement, j'ai donné la garantie à toutes les personnes qui sont en train de se lancer dans le cadre de sites de récupération - le Nant-de-Châtillon, le GICAL à Vandoeuvres et également l'installation qui se fera à Bellevue - que nous partagerons les déchets organiques, si cela est nécessaire, au prorata de l'importance de nos installations respectives. En d'autres termes, la question de savoir comment les zones d'apport sont dessinées sur les cartes n'a qu'une importance secondaire. Ce qui a de l'importance, c'est la garantie d'avoir les quantités de déchets nécessaires pour faire tourner les installations. Comme vous m'y invitez encore une fois, je répète cette assurance et j'y ajoute cette assurance supplémentaire qu'aux yeux du département il est important que nous puissions mener ensemble cette politique ambitieuse de gestion des déchets.
Cela implique que nous allons nous entraider les uns et les autres. Les communes ont beaucoup aidé l'Etat pour mettre sur pied sa politique de gestion des déchets. L'Etat aidera, si cela est nécessaire, les communes pour que l'on puisse réaliser cette politique. J'espère ainsi vous avoir suffisamment rassurée pour que non seulement vous-même, Madame la maire et Madame la députée, votiez ce projet de loi, mais qu'également il se trouve quelques autres voix sur vos bancs pour l'adopter également.
Présidence de M. Jean Spielmann, président
M. Alain-Dominique Mauris (L). Faudra-t-il augmenter l'impôt communal de Bernex d'un centime pour offrir aux Bernésiens et à la région - dont le vice-président de notre parlement est un éminent habitant - une pince à nez ? Tout vient à point à qui sait attendre, mais à quel prix ! Celui qui est le plus cher, le temps de la patience. Le temps de croire que l'autorité, sensibilisée par les relents nauséabonds subis par les villageois de Bernex et de la région, allait enfin y prêter attention.
Ce soir encore, Mesdames et Messieurs, tout le monde retient son souffle. Non seulement à cause des odeurs, un peu plus rares par temps froid, mais dans l'attente du vote du parlement. N'osant pas trop y croire, plusieurs habitants voulaient amener ce soir une à deux tonnes de déchets pour recouvrir notre cour extérieure, afin que l'assemblée puisse vraiment se rendre compte à quel point ces odeurs sont nauséabondes et insupportables. Parmi nous, certains n'y prêtent toujours pas attention, ceux-là mêmes qui sous d'autres cieux dans notre canton, à pleines narines, respirent l'air pur de leur région. Eh bien oui, sachez qu'à Bernex et dans la région il y a des personnes qui aspirent aussi à respirer un jour à pleines narines l'air pur de Châtillon. Ce d'autant plus que le coût d'investissement de 8,6 millions - important, il est vrai - est couvert par les recettes des déchets traités.
La description de ce projet, déjà étudié par M. Claude Haegi et repris par M. Cramer, montre que c'est un bon projet. Je vous encourage à ne point tarder davantage et à voter ce projet de loi porteur de solutions et innovant dans le domaine de l'environnement. Les habitants de toute une région vous remercient.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. J'aimerais répondre à M. Gardiol en disant que la réponse à sa question figure dans le projet. Dans l'hypothèse d'une distribution gratuite du compost, le transport et l'épandage seraient à la charge de l'usager.
En ce qui concerne la question des odeurs évoquée par Mme Hagmann, la méthanisation a été prévue pour éliminer ces odeurs. Je tiens à dire, d'autre part, que cette installation est largement financée puisque non seulement le coût sera baissé à 130 F la tonne, alors qu'aujourd'hui il est à 156 F, mais que de ce fait nous disposerions, le cas échéant, de 20 F de marge sur chaque tonne produite pour amortir cette installation.
M. Walter Spinucci (R). Nous n'avions pas besoin des paroles rassurantes du président Cramer pour nous convaincre du bien-fondé de ce projet. Nous le soutiendrons parce que nous le trouvons très bon, voire excellent. Nous le soutiendrons par solidarité avec la population de Bernex. Nous savons ce qu'elle souffre lorsque les odeurs nauséabondes se dégagent de la station de Châtillon. Nous le soutiendrons aussi et surtout, peut-être, parce que nous ne voulons plus payer 215 F la tonne d'ordures compostables que nous récoltons avec beaucoup de soin dans nos communes. Vous avez notre appui, Monsieur le président.
M. Bernard Annen (L). Je n'entendais pas nécessairement prendre la parole ce soir, mais je ne peux m'empêcher de répondre à un certain nombre d'assertions. Ainsi, par exemple, lorsqu'un avocat me donne des leçons d'économie, je me pose toujours des questions, car, pour lui, il s'agit de faire passer son message plutôt que d'étudier les chiffres. Dans le cas qui nous intéresse, j'ai pu poser un certain nombre de questions auxquelles il n'a naturellement pas été répondu. J'aimerais simplement vous donner un exemple : en général, lorsqu'un investissement est étudié à la commission des travaux, tout le monde s'attache à essayer d'avoir le prix de la dernière bride qui serre un tuyau d'écoulement. Dans le cas qui nous occupe, il nous est proposé un prix en bloc, point, terminé ! C'est dire à quel point il nous est facile de nous prononcer sur ce genre d'investissement.
Cela étant, il me paraît quand même relativement important de relever ce qui suit. Tout d'abord en ce qui concerne Vandoeuvres : il est vrai que le GICAL ne nous regarde pas, que nous ne nous prononçons pas là-dessus, mais en attendant c'est bien l'Etat qui devra donner l'autorisation pour cette usine qui se trouve sur un terrain agricole. Or personne ne nous en parle. Au Nant-de-Châtillon, le site se trouve sur une zone forêt. Personne ne nous en parle. Pourtant, lorsqu'il y a, dans un endroit ou dans un autre, une petite entorse au règlement, quelles réactions, quelles demandes en tout genre n'entendons-nous pas, dans les rangs d'en face, pour empêcher une construction ! Force est de constater qu'il y a deux poids et deux mesures.
De même, lors des demandes d'autorisation de construire, les gens qui y sont opposés se manifestent et demandent des études d'impact sous n'importe quel prétexte. Or, aujourd'hui, j'apprends qu'il y a des normes OMS, mais tout le monde préfère les oublier. Personne ne veut s'atteler à les examiner. Nous aimerions à cet égard avoir un certain nombre d'informations.
En matière de vision d'ensemble dans ce domaine, M. Cramer nous a expliqué qu'il y avait un plan global avec une répartition rive-gauche, rive-droite, Nant-de-Châtillon, pour les usines de compostage. Naturellement, au niveau des mécanismes économiques, un certain nombre de questions lui ont été posées. Que nous a-t-il répondu ? Qu'il déciderait lui-même quelles sont les communes qui iront dans tel centre ou dans tel autre. C'est parfaitement scandaleux. C'est une méthode dictatoriale et rien d'autre. Nous attendons par conséquent quelques éclaircissements dans ces domaines respectifs.
Cela étant, je ne veux pas nier les nuisances mentionnées par notre collègue, maire de la commune de Bernex. C'est vrai que nous devons faire quelque chose mais il faudrait peut-être, cher collègue, vous tourner vers ceux qui, à l'époque, ont été responsables de la construction du Nant-de-Châtillon, alors que nous avions, nous libéraux, refusé la première étape en disant qu'il allait y avoir des nuisances. En l'état, je me réjouis de voir que nos adversaires aujourd'hui veulent réparer les erreurs du passé et nous allons soit nous abstenir, soit voter ce crédit, car effectivement ce qui existe aujourd'hui au Nant-de-Châtillon est une mauvaise expérience que nous devons corriger.
Cela dit, Monsieur le président du département, nous attendons de votre part que des règles du jeu soient établies, qu'elles soient acceptées par tout le monde. Il n'est plus possible aujourd'hui de vous entendre tenir le discours de tout à l'heure et d'entendre les maires des communes avoisinantes et d'ailleurs dire exactement le contraire. Ainsi que je vous l'ai dit en commission, je vous crois, je vous fais confiance, mais sachez, Monsieur le président, que nous serons derrière pour savoir si vous respectez vos engagements.
M. Pierre Meyll (AdG). Il est évident que nous n'allons pas faire ici le procès du GICAL et des circonstances dans lesquelles ce projet a été réalisé. S'agissant du site de Châtillon, je crois qu'il faudrait quand même insister sur un argument d'importance, c'est que nous pouvons obtenir une subvention fédérale de 700 000 F pour autant que les travaux commencent avant janvier de l'année prochaine. N'oublions pas qu'une somme de 700 000 F est en jeu. Monsieur Annen, vous mettez en doute les prix indiqués, mais il y a quand même des conditions qui sont prévues et qui seront tenues. Je pense que vous avez pu poser en commission passablement de questions auxquelles il a été répondu. Que quelques réponses vous aient paru un peu bizarres, je peux le comprendre. Quant à la position de M. Gardiol, elle est totalement différente. Je dirais même qu'il pourrait y avoir là certains liens d'intérêt qui ont été évoqués récemment, mais cela ne concerne pas le GICAL, je le précise. En conclusion, il faut voter ce projet, car je vous le rappelle, à vous qui êtes si attachés aux intérêts du canton : 700 000 F sont en jeu. Pour les libéraux, ce n'est peut-être rien, mais pour nous c'est beaucoup.
M. Christian Grobet (AdG). Je vois que M. Annen continue de mener des batailles d'arrière-garde. Je rappellerai simplement qu'au moment où il s'est agi d'agrandir l'usine des Cheneviers pour faire face à l'augmentation des déchets, le Grand Conseil a voulu que soit mis au point un plan de traitement des déchets par recyclage et récupération. Il est vrai que les députés de votre parti n'étaient pas chauds à l'égard de cette autre forme de gestion des déchets. Vous étiez attaché à l'élimination par incinération, dont on ne peut pas se passer, il est vrai, en l'état actuel des choses, mais qui pose quantité de problèmes. A l'époque, vous traîniez les pieds pour mettre en place des sites de compostage. Le premier, réalisé au Nant-de-Châtillon, a effectivement posé des problèmes, mais la décharge elle-même provoquait de longue date des plaintes de la part de la commune de Bernex en raison des odeurs qui en émanaient. Je crois donc qu'il ne faut pas tout mettre sur le dos du compostage.
Cela étant dit, je me félicite que M. Cramer ait pris cette affaire en mains. J'espère que le concept qui avait été mis au point il y a six ans, d'entente avec les communes genevoises, et qui prévoyait la réalisation de trois centres cantonaux de compostage pour faire face à la grande quantité de déchets organiques susceptibles d'être compostés, pourra être mis en place. Il est vrai, et nous l'avions toujours dit à l'époque, que la mise en place de ces centres n'est pas évidente, car il y a des problèmes de nuisances et il n'est pas facile de trouver des sites. Il n'empêche que c'est tout de même la solution la plus écologique en ce qui concerne le traitement de nos déchets.
Nous soutiendrons bien entendu ce projet, en remerciant M. Cramer d'avoir contribué à sortir de l'ornière cette voie du compostage qui, malheureusement, a pris quatre ans de retard sous le gouvernement monocolore. Nous espérons que les deux autres centres cantonaux verront le jour. J'aimerais dire enfin à M. Annen qu'à moins que ma mémoire ne me trahisse, le Grand Conseil, dont vous faisiez partie à l'époque, a bel et bien voté pour le site de Châtillon une zone d'équipements publics. Par voie de conséquence, les installations ne se trouvent ni en zone agricole, ni en zone de bois et forêts, mais en zone d'équipements publics.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je tiens à revenir brièvement sur l'intervention de M. Annen, qui s'est mieux terminée qu'elle n'avait commencé. Je souhaite revenir sur les trois points qui ont été abordés. Le premier : Monsieur Annen, je ne sais pas qui peut donner des leçons d'économie à l'autre dans cette affaire, mais ce que je puis dire, en tout cas, c'est que ce n'est pas grâce à vous assurément que ce projet de loi est aujourd'hui devant le Grand Conseil. Ce que je puis dire aussi, c'est que la guerre de tranchées, les manoeuvres dilatoires que vous avez utilisées en commission et que vous continuez d'utiliser lors de cette séance sont susceptibles de coûter 700 000 F à notre canton. C'est là au moins une constatation comptable qui est simple.
Une voix. Une menace !
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Non, ce n'est pas une menace, comme je l'entends dans cette salle. C'est un fait. La Confédération nous garantit un versement de 700 000 F pour autant que le projet de loi soit exécutoire d'ici la fin de l'année et que les travaux puissent commencer au mois de janvier. Si tel n'est pas le cas, c'est-à-dire si un vote n'intervient pas à cette séance, nous n'obtiendrons pas cette subvention. Si vous êtes en mesure, Mesdames et Messieurs les députés, de voter aujourd'hui, c'est - je tiens à le dire - grâce au rapporteur, M. Velasco, qui a bien voulu rédiger son rapport en vingt-quatre heures, parce que les méthodes qui ont été utilisées en commission, la façon dont on a voulu différer le débat, auraient eu pour effet, sans cette célérité, que l'on n'aurait pas pu voter aujourd'hui.
Quant au second point, Monsieur Annen, que vous avez abordé. En ce qui concerne la définition des sites, ici aussi vous savez précisément ce qu'il en est. Il existe dans ce canton un plan cantonal de gestion des déchets. M. Grobet y a fait allusion tout à l'heure. Ce plan a été réactualisé par le Conseil d'Etat et, au mois d'octobre, la nouvelle version du plan est entrée en vigueur. Ce plan, je l'ai rappelé tout à l'heure, n'est pas le fait du président du département. Ce plan a été élaboré par une commission dont l'essentiel des membres étaient des magistrats communaux et également des industriels qui travaillent dans l'industrie des déchets. Ce sont les destinataires de ces installations qui ont décidé ce qu'elles devaient être, où elles devaient être et quelles étaient les zones d'apport de ces différents sites. L'assurance que je donne en plus et qui va au-delà de ce plan consiste à dire que, si les zones d'apport, telles que définies dans le plan, ne sont pas suffisantes, nous procéderons à une répartition différente de façon à ne pas défavoriser les trois installations prévues dans ce plan.
En ce qui concerne la zone sur laquelle va se construire le Nant-de-Châtillon, effectivement la question du déclassement se pose. Vous savez, Monsieur Annen, pour l'avoir entendu en commission, que j'ai approché le DAEL pour que nous engagions les procédures nécessaires à ce déclassement, de sorte que votre Grand Conseil va être prochainement saisi d'un projet de loi à cet effet. J'ajoute que les autorisations de construire permettant aussi bien la réalisation du centre de compostage de Vandoeuvres que celle du centre de compostage du Nant-de-Châtillon ont déjà été délivrées il y a une année ou sont sur le point d'être délivrées, de sorte que, dès l'instant où vous aurez voté et une fois le délai référendaire échu, nous pourrons immédiatement engager les travaux.
Espérant vous avoir ainsi apporté les quelques renseignements qui manquaient encore, je conclus en étant confiant quant à votre vote.
M. Claude Blanc (PDC). Je ne sais pas si j'ai bien entendu ce qu'a dit tout à l'heure M. Grobet, mais j'ai cru comprendre qu'il affirmait que ces terrains avaient été déclassés en zone d'équipement public... (L'orateur est interpellé.) Je ne sais pas, Monsieur le président, si la mémoire de M. Grobet devient tout à coup défaillante, mais j'ai participé aux travaux de la commission et je trouve la confirmation à la page 13 du rapport de M. Velasco : il semblerait que non seulement ces terrains n'ont pas été déclassés, qu'une partie serait en zone agricole mais qu'une autre partie serait en zone de forêts. Ce qui est un comble quand on se souvient du pointillisme de M. Grobet concernant les destinations de zones et l'attention qu'il portait à ce que personne ne puisse déborder d'une zone sur une autre. Je croyais - comme vous, Monsieur Grobet - que ces terrains avaient été déclassés depuis longtemps, qu'avant de construire la décharge de Châtillon vous auriez pris soin de faire déclasser ces terrains. Tel n'a pas été le cas, semble-t-il, puisqu'il nous a été affirmé que ces terrains n'avaient pas été déclassés. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Monsieur Grobet, qui voulez donner des leçons aux autres, c'est encore un de vos héritages que nous avons là. Vous nous avez dit tout à l'heure que cette affaire avait dormi pendant le gouvernement monocolore. Je constate que cette affaire a été mal traitée avant le gouvernement monocolore, et devinez qui était responsable de cette affaire avant le gouvernement monocolore ? Cela étant, je voterai le projet car c'est un bon projet.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7882)
ouvrant un crédit d'investissement avec subvention pour la construction d'une installation de méthanisation des déchets organiques sur le site de Châtillon
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit d'investissement
1 Un crédit de 8 646 000 F (hors TVA et y compris renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour la construction d'une installation de méthanisation sur le site de Châtillon.
2 Il se décompose de la manière suivante :
• construction de l'installation 7 465 000 F
• équipements complémentaires 615 000 F
• divers et imprévus 300 000 F
• prestation de management de projet 180 000 F
• attribution au fonds de décoration 1 % 86 000 F
• renchérissement 0 F
• Total 8 646 000 F
Art. 2 Budget d'investissement
Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 1998, sous la rubrique 69.79.00.541.37.
Art. 3 Subvention fédérale
Une subvention fédérale au titre de la relance économique est prévue. Elle sera comptabilisée sous la rubrique 69.79.00.660.37 et se décomposera comme suit :
• montant retenu pour la subvention 8 646 000 F
• subvention 700 000 F
• financement à charge de l'Etat 7 946 000 F
Art. 4 Couverture financière
Les charges financières en intérêts et en amortissement du crédit sont couvertes par une adaptation des recettes du site de Châtillon.
Art. 5 Amortissement
L'investissement est amorti chaque année sous la forme d'une annuité constante et est porté au compte de fonctionnement du site de Châtillon.
Art. 6 Utilité publique
L'ensemble des travaux résultant de la réalisation prévue à l'article 1 est décrété d'utilité publique au sens de l'article 3, alinéa 1, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933.
Art. 7 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
La Commission des travaux, sous la présidence de M. Dominique Hausser, s'est réunie le 10 mars et 19 mai 1998, pour examiner le projet de loi 7822, déposé le 4 février 1998 et renvoyé par le Grand Conseil en commissions des visiteurs pour préavis et des travaux lors de la séance du 20 février 1998.
M. .
M. M. F. Reinhard, directeur des bâtiments
M.P. Perroud, service entretien et transformations.
Ont assisté à notre séance du 10 mai 1998 à "; La Clairière " :
M. M. F. Reinhard, directeur des bâtiments
M. M. P. Perroud, service entretien et transformations
M.S. Rocamora, technicien-architecte, DAEL
M. M. J. Reymond directeur du service de l'application des peines et mesures, DJPT.
Introduction
Ce projet concerne la transformation du bâtiment de la Maison de Montfleury, abritant actuellement des adultes en fin de peine, en un établissement mixte pour mineurs. Les personnes qui y sont actuellement détenues seront déplacées dans les deux bâtiments situés à l'entrée de la parcelle, occupés jusqu'alors par l'administration de la Fondation des Foyers Feux-Verts (voir annexe 1). Ces travaux s'imposent pour les raisons suivantes :
Mixité
Depuis plusieurs années, le Tribunal de la jeunesse, la Fondation officielle de la jeunesse, ainsi que plusieurs organismes chargés de l'éducation spécialisée sollicitent l'ouverture de "; La Clairière " à la mixité. En automne 1995, la Commission de l'éducation spécialisée a également formulé une recommandation dans ce sens (rappelons que la législation pénale permet de priver des adolescent(e)s de leur liberté, notamment en vue de les placer en détention préventive). Ne disposant pas à ce jour d'un établissement pénitentiaire pour les jeunes mineures, le Tribunal de la jeunesse les place, soit à la maison d'arrêt pour femmes de "; Riant-Parc ", soit - pour les observations en milieu fermé - au Centre communal pour adolescents de Valmont (à Lausanne) dont le coût de la prise en charge est très élevé (420 F par jour).
Il en résulte une véritable inégalité de traitement entre adolescents et adolescentes. Alors que les premiers sont suivis à "; La Clairière " par des éducateurs qui y effectuent un travail socio-éducatif de grande qualité, les secondes ne bénéficient pas, à la maison d'arrêt pour femmes de "; Riant-Parc ", de prise en charge éducative et y côtoient des délinquantes adultes ayant parfois un lourd passé pénal. De plus, pour la vie quotidienne, "; La Clairière " offre des possibilités d'activités adaptées à l'âge des détenus qui y sont placés.
Exiguïté des locaux
L'affectation du bâtiment de la "; Maison de Montfleury " à la détention des mineurs s'impose principalement en raison de l'exiguïté des locaux de "; La Clairière " qui ne pourraient pas accueillir des détenues mineures, faute de place.
Subventions fédérales
La transformation du bâtiment de la "; Maison de Montfleury " en centre de détention et d'observation pour mineurs bénéficie de subventions de la Confédération en vertu de la loi fédérale sur les prestations de la Confédération dans le domaine de l'exécution des peines et des mesures
Suite à l'estimation générale de l'office fédéral de la justice, ce dernier - après expertise effectuée par l'office des constructions fédérales - se déclare prêt à allouer une subvention de construction de 1 313 466 F. Cette somme, après déduction de la réduction linéaire, correspond aux 38.6 % des frais reconnus.
Adaptations aux normes fédérales en vigueur
Les cellules actuelles de "; La Clairière " ne correspondent plus aux normes fédérales en vigueur pour un établissement pénitentiaire de délinquants mineurs. En collaboration avec les services utilisateurs et la Confédération, un programme de travaux a été étudié : le bâtiment "; Montfleury " sera transformé afin de répondre au nouveau concept pédagogique de l'institution élaboré par les juges cantonaux.
Données statistiques
D'après le rapport annuel 1997 de "; La Clairière " et courbes sur la durée de placement et exécution des peines (voir annexes 6 à 10) on constate une nette augmentation du nombre des placements et leur durée. Il en va de même en ce qui concerne les mandats disciplinaires. Il y a une donnée qui mérite toute notre attention, c'est la forte augmentation de l'accueil des mineurs de moins de 15 ans avec le même pronostic pour les prochaines années. Ce pronostic est étayé par la forte augmentation des dossiers durant les premiers mois de l'année. La cause, selon le rapport qui nous a été remis, serait l'inactivité et la rupture avec le lien familial qui s'opère de plus en plus tôt.
Descriptif des travaux à effectuer (voir annexes 2, 3, 4, 5)
Enveloppe du bâtiment et structure
Les travaux seront limités au strict nécessaire. Le projet limite autant que possible les interventions sur la structure. Les murs des façades en béton apparent seront réparés des atteintes de la carbonatation. Hormis ces quelques travaux, les façades seront conservées et des grilles de protection seront ajoutées. La toiture fera l'objet d'une révision légère. Les travaux de structures sur ce bâtiment concerneront principalement des éléments porteurs intérieurs à transformer et la création de dégagements devant les fenêtres du sous-sol pour apporter de la lumière.
Travaux intérieurs au bâtiment
Les travaux d'aménagements intérieurs consisteront, aux étages, à transformer les cellules, afin d'y adjoindre un cabinet de toilette comprenant WC et lavabo. Les murs resteront crépis et seront peints. Au rez-de-chaussée, des cloisons seront abattues et d'autres construites aux fins d'aménager des lieux de vie pour les adolescents et des locaux administratifs pour le personnel. De même, au sous-sol, des cloisons seront modifiées, afin d'aménager des ateliers/classes pour les garçons et les filles, la cuisine et les locaux techniques. L'ensemble des murs seront crépis et peints.
Installations de chauffage
Il est prévu de regrouper en une seule installation (à "; La Clairière "), la production de chaleur et d'eau pour le bâtiment "; La Clairière " et le bâtiment voisin destiné aux personnes soumises aux Lois sur les Mesures de Contraintes (L.M.C.).
Installations de ventilation
Les installations de ventilation assureront l'extraction de l'air des locaux sanitaires, des WC des différentes cellules et de la cuisine.
Installations sanitaires
Les installations sanitaires comprendront des appareils d'usage courant et des conduites d'alimentation d'eau chaude et froide de types traditionnels.
Installations électriques : courants faible et fort
Les installations électriques comprendront un tableau principal pour le bâtiment, des tableaux secondaires aux étages. La lustrerie équipée de ballasts électroniques permettra des économies d'énergie. Le central téléphonique datant de 1972 sera remplacé. Une nouvelle distribution secondaire est prévue ainsi que des appareils à prépaiement. Des interphones seront installés dans les cellules, vers les portes d'accès et vers le portail extérieur. L'installation de radiotélévision sera maintenue. Un réseau de caméras permettra de surveiller les façades et le portail d'entrée. La centrale d'alarme existante sera maintenue, mais modifiée selon la nouvelle disposition des lieux. En façade, des projecteurs et des luminaires seront installés et assureront le balisage du chemin d'accès.
Aménagements extérieurs
Les espaces extérieurs seront aménagés afin de pouvoir servir pour le sport et la promenade. La propriété sera protégée par des clôtures grillagées d'une hauteur appropriée.
Mobilier
Compte tenu de la spécificité des locaux et de l'usage qui en sera fait, le mobilier sera renouvelé et choisi dans une gamme de produits conforme à l'utilisation, l'ancien n'étant pas récupérable puisque particulièrement vétuste et désormais inadapté.
Coût des travaux
Travaux préparatoires 5 000 F
Bâtiment 1 536 100 F
Equipements d'exploitation 86 300 F
Aménagements extérieurs 320 500 F
Frais divers 132 300 F
Ameublement et décoration 509 100 F
Total des travaux 2 589 300 F
Honoraires 570 150 F
T.V.A. 207 416 F
Fonds de décoration 31 600 F
Renchérissement 13 900 F
Sous-total 3 412 366 F
Déduction subvention fédérale 1 313 466 F
Total général travaux 2 098 900 F
Evaluation des charges financières moyennes
Dépense nouvelle d'investissement
Crédit brut proposé : Fr. 3 412 366.-
Subvention fédérale : Fr. 1 313 466.-
Crédit net proposé : Fr. 2 098 900.-
Charges financières annuelles (1)
Amortissement constant, bâtiment (25 ans à 4 %) Fr. 71 430.-
Amortissement constant, Equipements (8 ans à 12,5 %) Fr. 39 144.-
Intérêts passifs moyens (5,75 %) Fr. 60 343.-
Total des charges financières Fr. 170 917.-
Couverture financière
Total des revenus (1) Fr. 130 650.-
(Recettes propres + Economies prévues)
Total des charges financières Fr. 170 917.-
Charges en personnel Fr. 350 000.-
Coûts induits Fr. 128 775.-
(conciergerie, entretient, locaux, énergie, etc..)
Total des charges (2) Fr. 649 692.-
Couverture du projet (insuffisance) ((1) - (2)) Fr. 519 042.-
Taux de couverture en % 20,11
Délais d'exécution du projet
Le délai d'exécution du projet est d'un an.
Les travaux débuteront après l'acceptation du projet compte tenu du délai référendaire.
Chronologie des travaux
Avant d'être traité par la Commission des travaux, ce projet a été débattu au sein de la Commission des visiteurs lors des séances du 27 mars et 3 avril 1998. En outre, la Commission des visiteurs a visité l'institution "; La Clairière " le 17 février. A la suite des travaux la Commission des visiteurs a rendu un préavis favorable, (6 pour (2 L, 2 S, 1 R, 1.V) 2 contre (ADG)) dont le compte rendu figure sur les rapports de majorité et minorité joints en annexe.
Dans le rapport de majorité, la Commission des visiteurs a estimé :
- qu'il y avait urgence de traiter ce projet de loi à la Commission des travaux
- que l'incarcération des mineurs, bien qu'exceptionnelle, reste indispensable
- qu'un établissement pour mineurs doit répondre à des normes actuellement non respectées
- qu'actuellement il y avait une différence de traitement inacceptable entre sexes au détriment des filles
- que la commission devait cependant poursuivre son travail afin de connaître le programme et la méthode socio-pédagogique.
Dans son rapport de minorité, la Commission des visiteurs, tout en admettant un certain nombre de considérants allant dans le sens de la réalisation de ce projet, a néanmoins estimé qu'avant de parler de transformation et d'aménagement il y avait lieu :
- de mettre en accord la politique en matière de jeunesse en conflit avec la loi, avec le projet du nouveau code pénal. Lequel donne à la détention une place extrêmement réduite et a contrario favorise les mesures éducatives.
- de déterminer un concept pédagogique clair quant à :
• la mixité des sexes
• l'isolement cellulaire
• l'encadrement par une équipe psychopédagogique ou médico-pédagogique ou socio-éducative.
Discussion
Tant au niveau des débats de la Commission des visiteurs, que celle des travaux, il en est ressorti que le but de "; La Clairière " ne doit pas être d'enfermer les adolescents, mais de permettre un travail éducatif avec ceux-ci. D'autre part, il semble selon MM. John Zwick, (chef du secteur des subventions de constructions de l'Office fédéral de la justice) et J. Reymond, que l'Office fédéral de la justice ne tolère plus l'actuelle situation sanitaire de "; La Clairière ". A savoir que les cellules de surface inférieure à 10 m2 ne disposant pas de toilettes et d'eau courante, ne sont pas conformes aux règles minimales de la Confédération et de celles de l'Union européenne.
Si l'on se réfère à l'annexe 3 ainsi qu'à la présentation qui nous a été faite par le département, une fois le projet réalisé, l'institution devrait être en accord avec les règles et normes décrites ci-dessus et répondre au souhait exprimé par Mme Anne-Françoise Comte Fontana au nom du Tribunal de la jeunesse. A savoir un traitement d'égalité quant à la prise en charge des filles par rapport à celle dont bénéficient aujourd'hui les garçons. En effet, à l'heure actuelle, les adolescentes sont internées à Riant-Parc ou elles sont séparées des adultes par un grillage.
Le projet tel que présenté par M. Dubuis (voir annexes 1, 3, 4, 5) consiste à loger dans le bâtiment 4, occupé aujourd'hui par l'institution Montfleury, "; La Clairière " qui hébergera les filles et les garçons. Les bâtiments délaissés par "; La Clairière ", soit le 5 et 6, seront occupés par l'institution LMC (application de la Loi sur les Mesures de Contraintes). S'il est vrai que l'utilisation future de "; La Clairière " actuelle pour l'accueil des LCM n'a pas été débattue au sein de la commission quant à la proximité des lieux et les conséquences sur le plan des représentations sociales et des effets psychologiques pour les jeunes d'une telle proximité, la remarque faite par Mme M. Ruchat dans son rapport de minorité devrait intégrer la conception de ce projet. A savoir que les personnes internées dans le cadre des LCM n'ayant pas commis de délit, ces lieux ne devraient pas être conçus sous forme cellulaire mais communautaire.
Afin de répondre aux besoins de "; La Clairière ", le projet consiste à aménager des espaces administratifs et semi-privés. Les circulations seront bien séparées à l'intérieur. En sous-sol (annexe 5), les travaux consistent à aménager des fenêtres, les ateliers, la cuisine et la buanderie. Au rez-de-chaussée (annexe 4), il y aura d'un côté les jeunes filles et de l'autre les garçons, avec des lieux de vie. A l'étage (annexe 3) se trouvent les cellules qui vont passer à 12,87 m2, respectant ainsi la norme fédérale qui est de 12 m2, avec des sanitaires. Il est prévu de changer toutes les installations. Le prix par cellule étant de Fr. 150 000.-.
Un des aspects sur lequel la commission s'est penchée a été le concept pédagogique et le lien architectural avec cette dimension. Certains commissaires ont regretté que l'audition de Mme Facelli (représentante de l'Office fédéral de la justice et responsable de la reconnaissance des institutions susceptibles de percevoir des subventions) n'ait pas eu lieu avant le début des travaux de notre commission, car ses conclusions auraient pu alimenter le débat. Et de regretter que la conception du projet architectural ait été conçue avant même que le concept pédagogique ait été décidé. Le président, ayant estimé qu'il n'était pas impératif d'attendre que l'équipe pédagogique soit auditionnée par la Commission des visiteurs pour poursuivre nos travaux, a néanmoins suggéré de rapporter le contenu de ladite audition sous la forme d'une annexe au présent rapport (elle figure sous l'intitulé d'une adjonction au préavis de la Commission des visiteurs) ainsi que les remarques soulevées sous cet aspect.
Il serait néanmoins souhaitable que les éléments suivants puissent être pris en compte lors de la mise en place du projet, à savoir :
- le double mandat de l'établissement, soit prison préventive et prison de détention
- la question de la cellule et de l'isolement cellulaire comme moyen éducatif
- la mixité des sexes
- la philosophie de la prise en charge des jeunes.
Malgré ces observations, la majorité des commissaires a estimé que ce projet présentait une nette amélioration par rapport à la situation actuelle et que la structure mise en place était à même de garantir une certaine souplesse.
D'autre part, la subvention de la Confédération prévue en 1997, et reconduite en 1998, ne serait pas reconduite en 1999 si la décision concernant l'ouverture du chantier devait intervenir en 1999.
Il a été aussi question de savoir pourquoi on n'a pas envisagé de reconstruire à neuf l'ensemble du projet, car la conservation de St-Antoine a représenté un surcoût de 20 %. Sur quoi le département nous a répondu que le supplément des dépenses de St-Antoine était dû à l'affectation des lieux en bureaux administratifs. Dans le cas qui nous occupe construire du neuf coûterait nettement plus cher.
Vote
Soumise au vote, l'entrée en matière du projet est acceptée par la majorité de la commission (1 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve) moins 2 abstentions (2 AdG).
Après une relecture article par article, la majorité de la Commission des travaux s'est déclarée d'accord avec le projet (1 L, 2 R, 2 DC, 3 S, 1 Ve) moins 2 abstentions (2 AdG) et recommande au Grand Conseil d'accepter le projet de loi 7822.
Annexe 12
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ANNEXE
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Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Ce rapport, avant d'arriver à la commission des travaux, a transité par la commission des visiteurs qui a rendu un rapport de majorité et de minorité qui figurent dans mon rapport. Les points importants à souligner sont la non-mixité qui implique actuellement une inégalité de traitement entre adolescents et adolescentes. En effet, ces dernières n'ont pas aujourd'hui les éducateurs à disposition comme c'est le cas pour les adolescents placés à La Clairière. La transformation du bâtiment permettrait aux détenues mineures, grâce à cette mixité, de bénéficier d'un suivi socio-éducatif par des éducateurs spécialisés.
Il faut relever également l'exiguïté des locaux actuels qui ne répondent pas aux normes européennes, ni aux normes fédérales et qui ne sont pas pourvus de sanitaires. Ce sont ces considérations qui ont amené notre commission à voter le projet La Clairière. Néanmoins, nous souhaitons attirer l'attention sur les considérations émises par Mme Ruchat qui figurent dans le rapport
Mme Esther Alder (Ve). Les Verts soutiendront ce projet de loi. D'une part pour répondre aux normes européennes en matière d'incarcération de mineurs, comme cela a été dit par le rapporteur, mais également afin que les détenues filles puissent bénéficier de conditions adéquates de détention, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Par ailleurs, nous sommes tout à fait conscients qu'il y a urgence puisque la subvention de la Confédération ne pourra pas être reconduite. Voilà donc notre position quant à la construction elle-même. En revanche, par rapport à la mixité qui est prônée dans le projet, nous sommes d'avis qu'elle n'a de mixité que le nom. Or pour nous, cette mixité devra se traduire dans les faits. Cela étant dit, pour nous la détention de mineurs ne doit être et ne devra être qu'exceptionnelle. Il est vrai que la délinquance augmente et que l'âge des délinquants s'abaisse. Mais cela est à mettre en parallèle avec une société qui elle aussi dysfonctionne. Ce n'est en tout cas pas en construisant des prisons que la question sera résolue. En matière de délinquance, et c'est le simple bon sens, il faut agir en aval et en amont. Or l'effort que nous consacrons à la prévention est bien en deçà de ce qu'il devrait être. Ainsi les Verts feront des propositions dans ce sens.
D'autre part, nous sommes très soucieux du concept éducatif mis en avant par les responsables de La Clairière. Notamment sur la pratique de l'isolement qui non seulement est contraire aux droits de l'enfant mais qui, à mon sens, n'a de seule vertu que celle d'assurer la tranquillité des éducateurs. Une autre préoccupation est la formation du personnel éducatif. Le travail avec des mineurs en milieu carcéral est très spécifique, d'autant plus, et cela a été dit, qu'il y a de plus en plus de situations difficiles, voire psychiatriques, et là nous sommes convaincus qu'une formation complémentaire est indispensable.
Pour terminer, si La Clairière doit exister, nous nous attacherons à ce qu'elle redevienne un phare en matière de prise en charge de mineurs délinquants. Et surtout, si aujourd'hui nous sommes prêts à investir plus de deux millions dans des bâtiments, nous pensons qu'il en faudrait bien davantage pour la prévention, car La Clairière c'est un peu l'arbre qui cache la forêt.
Mme Martine Ruchat (AdG). La question de la détention des mineurs qui sous-tend le projet de loi sur l'aménagement de Montfleury ne se résume pas, pour nous, à la dimension des cellules ni à l'installation de W.-C. et de hauteurs de grillages sécuritaires. Il est question de conception de l'enfant et du jeune, de valeurs, de réelle politique en matière de prévention et d'éducation des mineurs en conflit avec la loi. Si nous reprenons la chronologie des travaux, nous voyons une réunion de la commission des travaux le 10 mars, deux commissions de préavis le 27 mars et le 3 avril - sur ma demande dans la séance du 19 février à la commission des visiteurs - puis à nouveau une commission des travaux le 19 mai avec vote, sans attendre les auditions à la commission des visiteurs concernant le concept pédagogique, qui eurent lieu le lendemain 20 mai. Or, au mois de mai, le concept pédagogico-pénitentiaire qui aurait dû être à la base d'une transformation éventuelle n'avait pas encore été défini; l'est-il aujourd'hui ?
Aucune étude de besoin n'avait été effectuée, aucun chiffre ne pouvait nous être fourni : nombre de prévenus, de détenus, de jeunes en observation, en arrêt disciplinaire. Ce n'est que mardi dernier que la commission des visiteurs s'est rendue sur les lieux mêmes, définis comme problématiques : Riant-Parc où sont détenues les jeunes filles.
Permettez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, d'émettre les hypothèses suivantes. Soit nous avons mal pensé, c'est-à-dire dans une mauvaise logique, la question de la détention des mineurs, filles et garçons, en voulant traiter dans l'urgence un problème qui demande une réflexion de fond. Je vous rappelle que Genève, et en particulier La Clairière, a perdu ces dernières années sa renommée en matière de prise en charge des mineurs délinquants. Soit certains, plus avisés que moi, ont volontairement choisi cette logique à des fins politiques et financières, pour 1 313 466 F. Il reste donc 2 098 900 F à payer pour compléter. Soit encore, la question financière et administrative passe avant celle de la prise en charge des jeunes en conflit avec la loi, du traitement à leur appliquer, et passe avant la souffrance individuelle et sociale qui, à l'évidence, précède le passage à l'acte et précède la mise en détention.
J'ose encore espérer que les discussions qui vont avoir lieu dans ce parlement vont nous faciliter la prise de décision avec une meilleure connaissance de la situation. Je me permettrai, pour éclairer cette question, d'aborder deux aspects : celui de la mixité et celui de l'isolement cellulaire. J'aimerais au préalable, après la visite de Riant-Parc, relever un certain nombre d'erreurs contenues dans le rapport de M. Velasco. Le paragraphe concernant la mixité utilise une rhétorique visant à forcer le trait afin d'inquiéter les députés et de les engager à voter oui au PL 7822. Qu'ils se rassurent; les jeunes filles ne côtoient pas des délinquantes adultes et elles ne sont pas séparées d'elles par un grillage. Après notre visite - et M. Velasco a pu s'en rendre compte lui-même - nous pouvons affirmer que les jeunes filles sont dans un quartier séparé, lequel est particulièrement étriqué il est vrai, avec un simple balcon pour la promenade. Ces jeunes filles ne sont pas en contact avec les femmes adultes qui se promènent autour du bâtiment.
Cela étant dit, on a souvent parlé, lors des travaux, des risques de contamination. Serait-ce que la délinquance est conçue à Genève comme une maladie qui s'attrape et qui nécessite un éloignement, un isolement, une quarantaine ? Je n'ose l'imaginer. Là encore et toujours, nous sommes dans un débat de fond qui doit avoir lieu. Pourquoi ne pas, moyennant un travail de type psychopédagogique, comme il se fait excellemment à La Pâquerette aujourd'hui, envisager des relations entre des femmes, dont certaines ont des enfants et même des bébés dans la prison, et les jeunes filles ? Pourquoi ne pas privilégier un travail de relation plutôt que l'isolement en cellule ? Je répondrai : parce que les murs sont plus vite construits et coûtent moins cher que des relations de type socio-thérapeutique ou psycho-thérapeutique. Mais sur le long terme, a-t-on calculé les coûts de la stigmatisation du passage en prison, de la récidive ou de tous les maux que peut engendrer le passage en prison, en termes de souffrance psychique, pour des jeunes de 11, 12, 13, 14 ans ?
On semble vouloir perpétuer à Genève l'isolement cellulaire comme concept, tout en présentant la mixité comme une innovation. Une étude a-t-elle été faite ? D'aucuns remettent en question la mixité dans les écoles, y voyant une source d'inégalité puisque celle-ci ne tient pas compte des spécificités des sexes respectifs. On ne fait aujourd'hui que s'étonner de la violence des filles en prison. S'est-on intéressé aux raisons ? Serait-ce que la prison est un milieu particulièrement nocif pour les filles? N'y aurait-il pas d'alternative, comme le renforcement de l'équipe éducative dans une institution éducative, La Pommière, par exemple ? Ou l'engagement à Riant-Parc d'une psychologue-pédagogue pour ces jeunes filles, qui sont d'ailleurs fort peu nombreuses - il y en avait, je vous le rappelle, deux cette semaine - et qui ne restent en moyenne que quatre à cinq jours, afin de faire un travail d'encadrement psycho-pédagogique et de rendre la détention plus tolérable. En quoi les jeunes filles seraient-elles bénéficiaires de cette pseudo-mixité d'ailleurs, puisque - comme l'a rappelé Mme Esther Alder - il s'agit en fait de construire deux ailes distinctes ? Cela a-t-il été étudié ? Permettez-moi d'en douter.
La question de l'isolement cellulaire m'amène à dire ceci : l'on s'est bien gardé dans le rapport de mettre en avant la réalité de la cellule, qui est actuellement - il faut le redire - le seul concept éducatif à La Clairière. Dans le descriptif du coût des travaux, on s'est gardé aussi de donner des détails sur les seize cellules qui vont remplacer les douze cellules actuelles. Où mettrions-nous les vingt mineurs placés à Champ-Dollon, comme l'a relaté la presse dans la deuxième semaine de novembre ? dans les seize cellules ? Et où iront alors les filles ? à Riant-Parc ?
Il ne s'agit pas ici du jeu des chaises musicales ni du jeu d'Abalone qui consiste à repousser hors du plateau de jeu le surplus, c'est-à-dire les perdants. Il s'agit de penser la détention des mineurs. M. Velasco dans son rapport fait le pronostic d'une augmentation des jeunes en détention. Prévoit-il le nombre de jeunes qui demain descendront dans la rue ou qui seront mal intégrés dans la collectivité, prélude à des actes de violence ? Prévoit-il une augmentation de la répression policière ? Ou un zèle particulier de la police à traquer toute transgression juvénile ? M. Velasco a-t-il aussi prévu le nombre de tentatives de suicides commises notamment dans la nouvelle prison pour mineurs ? A-t-il prévu la récidive ? Qu'a-t-on prévu pour prévenir les effets néfastes de l'isolement ? Qu'a-t-on prévu enfin pour intégrer les jeunes étrangers qui forment le 80% du contingent de La Clairière?
L'isolement cellulaire n'est un moyen ni éducatif, ni thérapeutique. A fortiori, des études ont montré que l'isolement cellulaire de courte durée est aussi particulièrement nocif. La prison, on le sait, est destructrice de la personnalité. Alors, il faut sérieusement se tourner vers des alternatives, ce que met en avant d'ailleurs le nouveau code pénal.
Permettez-moi de vous lire rapidement le commentaire, dû à M. Stettler, de l'article 7 du nouveau code pénal concernant la détention avant jugement : «Vu que, de l'avis général, la détention traditionnelle en cellule a des répercussions négatives sur l'évolution des mineurs et qu'elle peut entraîner des dommages de nature psychique, il paraît légitime que l'on trouve dorénavant des règles minimales sur l'exécution de la détention avant jugement dans le droit fédéral. Dans le sens des principes fondamentaux énoncés à l'article 1, alinéa 1, les dispositions proposées visent à assurer la protection des mineurs contre les effets nocifs de la privation de liberté et à garantir que, dans la mesure du possible, ils ne seront pas du tout soumis à la détention en cellule.»
En conclusion, c'est la raison pour laquelle, en l'état de la réflexion, nous ne soutiendrons pas ce projet. Par contre, nous sommes d'accord de mettre l'accent sur des alternatives à la prison - qui ne doit être, comme l'indique le code pénal, que l'ultima ratio - à savoir un traitement des jeunes hors prison à vocation essentiellement pédagogique et un système de travail d'intérêt général.
M. Bernard Lescaze (R). Heureusement que, dans des années déjà anciennes, j'ai fait un peu de droit. Je suis donc fondamentalement convaincu de la nécessité d'un établissement comme La Clairière, même s'il ne répond pas encore à toutes les exigences que souhaite Mme Ruchat. Cela dit, plusieurs points me troublent dans ce projet. D'abord l'urgence, puisque M. le conseiller d'Etat chargé des travaux publics a indiqué qu'il y avait en effet une subvention fédérale. Je constate quand même que la dernière séance de la commission a eu lieu le 19 mai et que ce n'est qu'aujourd'hui, à fin novembre, que ce projet nous est présenté. Voyez-vous, Monsieur le conseiller d'Etat, si véritablement vous pensez que certains projets sont urgents en raison de la nécessité de subventions fédérales, vous devriez - car vous en avez les moyens, d'autant plus qu'il s'agit de vos amis politiques - faire accélérer certains travaux.
Maintenant, pour l'essentiel, je ne vais pas faire un commentaire sur le droit pénal des mineurs. Je ne pense pas que ce soit le lieu. Le département rapporteur est celui de l'aménagement, de l'équipement et du logement, il s'agit d'un crédit de transformation. Permettez-moi, malgré tout, de m'étonner du montant très important : 3,4 millions, Mesdames et Messieurs les députés, soit 150 000 F la cellule. 150 000 F, non pas pour construire une cellule mais pour la transformer et y adjoindre un cabinet de toilette comprenant W.-C. et lavabo. Je m'en étonne car je trouve réellement que ce montant est très important. Lorsque Mme Ruchat dit que les murs coûtent moins cher qu'un projet pédagogique, je la suis entièrement, mais permettez-moi, Madame la députée, de trouver que ces murs-là coûtent très cher.
Par ailleurs, le projet pédagogique est autre chose que La Clairière. Lorsque je compulse le tableau de la durée des séjours qu'a bien voulu adjoindre le rapporteur, je constate que la moitié des séjours est égale ou inférieure à cinq jours. Je ne suis pas persuadé qu'on puisse, en cinq jours, véritablement développer un programme pédagogique digne de ce nom, mais peut-être là-dessus fais-je erreur. Ce qui me fâche davantage, c'est d'apprendre à la lecture du rapport, confirmé par les propos de Mme Ruchat, qu'aucune étude des besoins pédagogiques - mais seulement une étude de la construction - n'avait été entreprise au mois de mai. Cela m'inquiète aussi.
Monsieur le président du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, je vous dis franchement qu'il est possible qu'au point de vue de la construction il y ait urgence pour pouvoir toucher une subvention fédérale, mais qu'il est véritablement regrettable que vous n'ayez vu que cette urgence-là, alors que bien évidemment ce qui compte, c'est le but pour lequel La Clairière est transformée et aménagée. On s'étonne d'apprendre que de ce point du vue là les urgences auraient été quelque peu négligées.
Dans ces conditions, pour ma part - connaissant les besoins actuels en matière de droit pénal des mineurs - j'accepterai du bout des lèvres de voter ce projet. Je maintiens qu'en tout cas l'urgence a été mal préparée, car une urgence qui n'est que purement financière et pour des montants de travaux aussi importants (je le répète : une cellule transformée à 150 000 F), toute personne qui a les pieds sur terre peut s'en étonner. Malgré cela je le voterai, en regrettant que ce projet n'ait pas été mieux préparé quant au fond. Je ne doute pas qu'en ce qui concerne les murs et les lavabos ce soit le cas, mais, quant au fond, je rejoins malgré tout les propos tenus sur ma gauche.
Mme Christine Sayegh (S). Les circonstances veulent qu'aujourd'hui, journée internationale du droit de l'enfant, nous soyons amenés à parler d'enfermement des mineurs et plus particulièrement des conditions de cet enfermement. Je vous rappelle que la convention des droits de l'enfant a été signée le 20 novembre 1989. Elle n'a été ratifiée par la Suisse qu'en février 1997. Dans une optique idéale, l'enfermement des mineurs devrait disparaître. Et, comme la députée Mme Ruchat, on peut s'interroger sur les raisons de la construction d'une prison pour jeunes alors que la tendance est à la suppression de la détention au profit de travail d'intérêt général.
Bien que ces principes soient justes, leur concrétisation n'est toutefois pas encore suffisante pour renoncer à l'enfermement. Le principe de la justice négociée en droit des mineurs est efficace, mais a ses limites et ne peut exclure les mesures d'enfermement. Le projet de loi 7822 est d'une importance manifeste, car il améliore les conditions de vie en détention conformément aux directives internationales. Il permet, en prévoyant la mixité dans l'établissement, de répondre enfin à l'égalité de traitement entre les filles et les garçons. En effet, s'il y a enfermement, il y a lieu d'avoir un appui socio-éducatif immédiat pour toutes les adolescentes et tous les adolescents. Cet appui est essentiel, car je vous le rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, les adolescents passibles de condamnations pénales ne sont pas encore insérés dans la société et c'est, contrairement aux adultes, des mesures d'insertion et non des mesures de réinsertion qu'il faut prendre, en se rappelant que l'abaissement de l'âge de la délinquance nous met devant un constat : il s'agit de prendre en charge de plus en plus d'enfants, soit des mineurs de moins de 15 ans.
La prise en charge rapide et adéquate de jeunes en dérive, que ce soit sur le plan civil et plus particulièrement sur le plan pénal, est garante d'une lutte efficace contre la violence. Genève a été pionnière dans la lutte contre la délinquance juvénile et peut se targuer, malgré certaines critiques, d'un excellent résultat, de peu de récidives et de mesures d'enfermement à titre exceptionnel. Aussi, il y a lieu de mettre en oeuvre un projet adapté à l'évolution des critères de détention et d'offrir, tant au personnel compétent, dévoué, motivé, qu'aux délinquants mineurs, filles et garçons, un lieu propice à l'insertion sociale. Le coût de cette opération est modeste en regard des résultats qu'elle va générer en termes d'ordre public, de qualité de vie pour nous tous, mineurs et majeurs. Le groupe socialiste soutient ce projet et vous invite à le voter.
M. Alain-Dominique Mauris (L). En écoutant les propos de Mme Ruchat, je n'ai pas tout à fait eu l'impression d'avoir assisté aux mêmes séances de commission. Il me semblait entendre plutôt «Les Misérables» de Victor Hugo. Notre commission des visiteurs avait un but, il est vrai, celui de voir la grandeur des fenêtres, mais un deuxième but également : connaître l'encadrement psychosocial. L'isolement dont vous parlez n'avait pas la même définition pour nous, puisque les éducateurs qui nous ont reçus nous ont clairement expliqué que cette phase d'isolement est réduite à son minimum. Il s'agit non pas d'isolement mais d'observation.
Monsieur Lescaze, je vous rassure. Mme Facelli, qui représente l'Office fédéral de la justice, a éclairé la commission des visiteurs de ses conseils et nous a dit qu'un concept socio-pédagogique était actuellement en cours.
Certes, la prison n'est pas la panacée. Mais que faire lorsqu'un individu - fût-il jeune ou moins jeune - devient un danger pour notre société ? Bien entendu, Madame Ruchat, cet enfermement s'accompagne d'un encadrement psychosocial. Vous ne pouvez pas le nier. Nous l'avons vu, nous l'avons constaté. Son but est bien entendu de rééduquer les délinquants. Le professeur Nils Robert, qui a été chargé à Berne de revoir le code pénal, cher aussi à vos milieux, reconnaît lui-même que la détention doit exister, mais n'être que l'ultima ratio. Il nous a confortés dans notre opinion que La Clairière aujourd'hui ne répond plus aux normes internationales et que le statu quo est inacceptable, notamment pour les délinquants adolescents.
Dès lors, si les préoccupations liées à l'encadrement socio-pédagogique nous interpellent tous, nous refusons, nous les libéraux, que la durée de cette étude pénalise les jeunes délinquants qui continueront d'être enfermés à La Clairière pendant le temps de nos nombreuses réflexions, avec en plus le risque de perdre la subvention fédérale qui est toujours la bienvenue.
Ce projet correspond en tous points à ce que les normes internationales demandent. L'équipe de La Clairière n'est pas formée de gardiens, de matons, mais bien d'éducateurs spécialisés et motivés qui tentent en quelques jours de remettre en piste ces jeunes désorientés ou du moins de les adresser dans les services sociaux concernés. M. Frankhauser, responsable de La Clairière a été convaincant. Les risques de récidive sont actuellement de l'ordre de 10%. Nous sommes d'accord de réfléchir et de faire évoluer un projet innovateur socio-pédagogique, mais sans le faire au détriment des conditions d'incarcération.
Il est inacceptable qu'à Genève des adolescents continuent à être enfermés dans des prisons avec des adultes. L'exemple de Riant-Parc est intolérable. Personnellement, j'ai entendu dire, lorsque j'ai visité cet endroit, que des adolescentes sont mélangées avec les adultes pour des travaux de cuisine de même que pour d'autres tâches. Le seul encadrement à Riant-Parc, ce sont les gardiens. C'est tout aussi intolérable. L'effet de contamination par la délinquance adulte est souvent irréversible. C'est pourquoi le groupe libéral vous invite à voter ce projet, afin d'offrir un cadre adéquat à la jeunesse délinquante du canton.
M. Rémy Pagani (AdG). Nous devons malheureusement constater que plus la crise touche les adolescents, plus les emprisonnements augmentent. La situation est grave et je ferai juste une parenthèse : alors que l'on devrait s'attacher à comprendre la crise de l'adolescence, certains décident de quitter la commission d'enquête parlementaire qui a été mise sur pied après les événements de l'OMC. Je trouve regrettable de devoir augmenter la place dans les prisons alors que la jeunesse, et notamment les filles qui fréquentent nos écoles et vivent dans notre société, vivent réellement une transformation sociale. Celle-ci a des causes bien précises qui font l'objet d'études nationales et internationales et qui pourraient nous orienter dans un travail de prévention. Je préfère, ainsi que mon groupe, investir deux millions dans la prévention, dans l'aide personnalisée aux femmes en détresse après l'accouchement d'un enfant, plutôt que d'investir ces deux millions dans des prisons qui, de toute manière, ne sont pas là pour aider les adolescents mais pour les enfermer et les réprimer.
Il m'apparaît regrettable qu'aujourd'hui on décide, même si cela coûte fort cher, d'installer des lavabos et des robinets en or pour ces adolescents, alors qu'il s'agirait de se pencher réellement sur les raisons de leurs problèmes : la crise économique, la misère qui s'introduit dans nos sociétés, le désarroi de parents au chômage, humiliés, isolés dans leur appartement car n'osant plus sortir. Favoriser le maintien de ces enfants au sein de la famille, plutôt que de voter précipitamment ce projet afin d'obtenir la subvention, tel est notre objectif.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Dans ce dossier, je tiens à dire que le retard qui a été mentionné n'est pas dû au président du département mais à moi-même, cela pour des raisons personnelles que je ne veux pas exposer ici. Je prends à ma charge ce retard, Monsieur Lescaze.
D'autre part, j'aimerais dire à Mme Ruchat que ce rapport a été rédigé bien avant que je visite avec elle la prison de Riant-Parc. Il est vrai que j'ai pu constater que les grillages mentionnés dans mon rapport ne séparaient pas les adolescentes des adultes. Cela avait été confirmé par Mme Comte-Fontana et j'ai ajouté ses dires au rapport de la commission des visiteurs.
La commission des travaux recommande, dans les pages 8 et 9 de son rapport, de se pencher sur bien des aspects que Mme Ruchat vient d'évoquer, notamment la philosophie de la prise en charge des jeunes et la question de l'isolement cellulaire comme moyen éducatif. Cela, malgré le fait que nous ayons voté ces travaux, qui sont nécessaires pour une question de dignité humaine, afin que ces personnes puissent bénéficier de sanitaires individuels et non communs comme c'est le cas actuellement. D'autre part, Monsieur Pagani, il ne s'agit pas ici de faire la révolution, mais simplement, dans un temps, de préserver la dignité humaine. Enfin, la commission des travaux a souhaité que les recommandations faites par Mme Ruchat soient prises en compte lorsque les travaux seront effectués, s'il était possible de modifier le projet. Le président du département nous le confirmera tout à l'heure.
Mme Martine Ruchat (AdG). J'aimerais souligner encore une fois la question de la cellule comme unique concept pédagogique de La Clairière. Je ne suis pas d'accord avec ce qui a été dit tout à l'heure par M. Mauris, parce que nous avons plutôt entendu un constat, un aveu de Mme Facelli selon lequel le concept n'avait pas encore été défini. Et je m'étonne qu'un concept qui devrait être à la base de tels travaux n'ait pas été pensé avant même que l'on construise. Dans ces conditions, on ne peut que reconstruire quelque chose à l'identique; évidemment, et tant mieux pour ceux qui seront enfermés, cet identique sera de meilleure qualité.
J'ai ici un article du «National Institute of Justice» qui date de juillet 1998, dans lequel, en faisant l'inventaire des recherches qui ont eu lieu sur la prise en charge des mineurs, l'auteur met en avant une étude qui montre que l'arrestation provoque, par la suite, plus de délinquance qu'un simple avertissement ou que la pratique d'autres alternatives. Une autre recherche montre aussi que l'incarcération pour une courte période en début de peine provoquerait plus de récidives que le placement de semblables délinquants sous la simple supervision de la communauté. J'aimerais rendre l'assemblée consciente du fait que le chemin que nous prenons est un chemin totalement obsolète, qui va vers davantage de répression plutôt que vers une prise en compte psycho ou socio-pédagogique des jeunes.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Il est nécessaire que dans ce parlement des voix telles que celle de Mme Ruchat s'élèvent. Il est nécessaire qu'à chaque fois que nous parlons de prison il y ait parmi vous quelqu'un qui dise que la prison est, reste et restera un instrument à limiter le plus possible, à combattre et je dirais, dans l'idéal, à détruire. Si cet idéal doit toujours être présent parmi nous - parce qu'enfermer un être humain ne saurait jamais être acceptable - la tâche de gouverner impose aussi de ne pas tomber dans l'angélisme. Cela signifie qu'il nous faut reconnaître qu'il existe un certain nombre de situations où, dans l'intérêt général de la société, des êtres humains doivent être privés de leur liberté. A partir de là, il convient bien évidemment que les conditions de détention, en particulier lorsqu'il s'agit de jeunes détenus, soient les meilleures possibles.
Vous avez, Madame Ruchat, critiqué l'absence de concept. Je ne peux malheureusement pas vous donner raison. Vous avez lu que la Fondation de la jeunesse avait travaillé longtemps sur ce projet. Le Tribunal de la jeunesse en a fait de même ainsi que l'Office fédéral de la justice. Vous avez entendu les représentants de ces différentes institutions. Lorsque j'étais encore avocat, j'ai aussi eu de longues discussions avec le Tribunal de la jeunesse qui portaient précisément sur les aménagements urgents de La Clairière, urgents non pas pour les raisons financières évoquées, mais parce que véritablement on ne peut plus laisser cette maison dans l'état actuel.
Les travaux qui vous sont proposés ont pour effet de remettre cet établissement aux normes fédérales et internationales de détention des mineurs. Ils ont pour effet d'assurer le meilleur traitement possible des adolescentes et, en particulier, d'éviter tout risque effectivement de mélange avec des condamnés ou des détenus adultes qui peuvent être dangereux. Nier, Madame Ruchat, le risque d'effet de contagion pour la récidive est malheureusement une erreur. Il convient également d'assurer la mixité de cet établissement. Même M. Christian Nils Robert, dont nous savons tous à quel point il déteste la prison, admet que la mise à niveau - puisqu'il faut l'appeler ainsi - de La Clairière est une véritable nécessité. Je veux croire que cette transformation n'est pas faite pour multiplier les détentions. Je sais que les magistrats du Tribunal de la jeunesse recourent le moins possible aux mesures privatives de liberté à l'égard des jeunes et des adolescents.
Nous savons aussi que le système genevois fonctionne bien en la matière puisque, fort heureusement, le taux de récidive est faible parmi les jeunes qui passent au Tribunal de la jeunesse. Tous ceux qui passent par ce tribunal ne sont pas, fort heureusement, dirigés ensuite à La Clairière. Comme vous l'avez dit, Madame Ruchat, beaucoup sont admonestés, sont encadrés, sont aidés et les cas de détention une fois encore sont rarissimes.
Un dernier mot, Monsieur Lescaze, sur le coût par cellule. C'est comme le coût par place de parc : on ne met pas la totalité du montant dans chacune des cellules. C'est bien évidemment le coût total des travaux divisé par le nombre de cellules qui aboutit à ce chiffre absurde. Soyez rassuré, à ma connaissance, il n'est pas question de robinetterie en or.
Mesdames et Messieurs, je remercie M. Velasco, Mme Sayegh, M. Mauris et tous ceux qui ont tenu le discours, je dirais, contingent des nécessités que nous avons. Je remercie aussi Mme Ruchat d'avoir rappelé que la prison n'est pas une solution que nous devons accepter telle quelle.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2 à 6.
Le président. Madame Ruchat, vous avez la parole.
Mme Martine Ruchat (AdG). Je propose un amendement portant sur un article 7 nouveau : «Le Conseil d'Etat est chargé de modifier le projet de transformation d'ici le début des travaux principaux en remplaçant l'essentiel des cellules par des chambres et des locaux communs correspondant à un concept socio-éducatif cohérent».
M. Claude Blanc (PDC). Cet amendement de dernière minute, d'une portée aussi considérable, est tout simplement inacceptable en l'état. Nous sommes en face de deux alternatives : soit la majorité de ce Grand Conseil accepte de prendre en considération cet amendement et retourne le projet en commission, car l'essentiel de l'opération est remis en question; il faudrait en l'occurrence s'assurer que cela est conforme aux dispositions de la loi sur l'organisation judiciaire. Soit nous rejetons cette disposition. Je serais étonné que le Conseil d'Etat puisse accepter un tel amendement, qui est très probablement contraire aux dispositions de l'organisation judiciaire.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je ne peux pas accepter cet amendement pour mille et une raisons. La première : vous persistez à dire, Madame, qu'il n'y a aucun concept, aucune réflexion à la base de ce projet de loi. C'est inexact. Je peux comprendre que vous ne partagiez pas cette conception, mais cependant elle existe. Deuxièmement : il n'appartient pas au Conseil d'Etat de fixer des conceptions en la matière, étant précisé que le droit pénal des mineurs est, pour l'essentiel, du ressort fédéral. Troisièmement : le Conseil d'Etat a beaucoup de compétences, il est vrai, mais pas encore en cette matière qui est délicate et où le Tribunal de la jeunesse, la Fondation de la jeunesse et d'autres milieux spécialisés oeuvrent et ont oeuvré à l'élaboration de ce projet de loi. Quatrième raison : on ne corrige pas un programme de travaux en quelques jours, comme ça, sur le coin d'une table.
Je préfère, Madame Ruchat, que vous nous disiez que vous ne voulez pas de ce projet - cela je peux le concevoir - mais pas au moyen d'un tel amendement qui, une fois encore, est impraticable et équivaut à dire, ni plus ni moins, que les travaux projetés n'auront pas lieu. Alors votez non, je crois que ce serait plus simple.
Mme Martine Ruchat (AdG). Il a clairement été dit que les cellules de La Clairière ne correspondent plus aujourd'hui aux normes européennes pour des questions de surface et du fait qu'il n'y a pas de W.-C. Cela fait de nombreuses années que La Clairière est critiquée, non seulement à cause de ces questions matérielles, mais aussi à cause du manque de concept socio-pédagogique autre que la détention. Nous avons l'occasion aujourd'hui de modifier cela en bénéficiant effectivement de subventions et en faisant des travaux. Faisons des travaux qui n'enferment pas les jeunes et qui ne nous enferment pas non plus dans une politique répressive. Lorsque les murs seront construits, il sera assez difficile de les abattre. Dans ce sens, mon amendement vise à avoir une structure qui corresponde mieux à une conception moderne de la prise en charge des jeunes.
Mme Esther Alder (Ve). Je comprends bien le sens de l'amendement proposé par Mme Ruchat. Du côté des Verts, nous pensons que cela correspond à ce que nous avons discuté au préalable par rapport au concept pédagogique. Nous ne soutiendrons toutefois pas pour l'instant cet amendement; nous estimons préférable de nous pencher en commission sur ce que les éducateurs font avec les jeunes à La Clairière.
M. Rémy Pagani (AdG). Suite à l'intervention de M. Moutinot, je dirai qu'on ne peut pas prétendre que l'architecture est une chose et que la vie sociale, les décisions politiques en sont une autre. Le fait de construire des murs implique qu'il y a des idées derrière. C'est à une conception que nous avons affaire, à un concept, quoi qu'en disent certains architectes. Dans chaque projet qui nous est présenté, il y a des idées, il y a des gens, et il y a aussi des gens qui doivent vivre dans ces idées. De ce point de vue là, la proposition d'amendement de Martine Ruchat est tout à fait conforme au projet qu'elle défend, un projet pédagogique qui a un autre sens que l'enfermement de jeunes de 12 ans. C'est pourquoi, au vu de la discussion, je propose le renvoi en commission pour réétudier la proposition de ma collègue. Cela d'autant plus que j'estime tout à fait inapproprié de justifier la rapidité de cette décision par la subvention fédérale de 1 300 000 francs.
Mme Christine Sayegh (S). Si je comprends également le projet d'amendement de Mme Ruchat, c'est effectivement - comme vient de le relever le député Pagani - un projet pédagogique et j'estime qu'il n'a rien à faire dans un projet de loi ouvrant un crédit d'investissement. Ce n'est pas bon de mélanger les genres. Vous aurez l'occasion de modifier d'autres lois si vous voulez poursuivre ce concept. Ce sera certainement beaucoup plus efficace et il n'y aura pas de problème de séparation des pouvoirs.
Le président. Je vous propose de voter sur le renvoi en commission de ce projet de loi.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet de loi en commission est rejetée.
Le président. Nous mettons aux voix l'amendement présenté par Mme Ruchat, ainsi libellé :
«Article 7 (nouveau). Le Conseil d'Etat est chargé de modifier le projet de transformation d'ici le début des travaux principaux en remplaçant l'essentiel des cellules par des chambres et des locaux communs correspondant à un concept socio-éducatif cohérent.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7822)
ouvrant un crédit d'investissement pour les travaux de transformationet d'aménagement du bâtiment "; La Clairière " à Montfleury (Satigny)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit d'investissement
1 Un crédit de 2 098 900 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour les travaux de transformation et d'aménagement du bâtiment "; La Clairière " à Montfleury (Satigny).
2 Il se décompose de la manière suivante :
• terrain, constructions, travaux 2 589 300 F
• honoraires, essais, analyses 570 150 F
• TVA 207 416 F
• attribution au fonds de décoration 31 600 F
• renchérissement 13 900 F
• sous-total 3 412 366 F
• déduction subvention fédérale 1 313 466 F
Total 2 098 900 F
Art. 2 Budget d'investissement
Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 1998 sous la rubrique 45.03.00.503.06.
Art. 3 Subvention fédérale
Une subvention fédérale, comptabilisée sous la rubrique No 45.03.00.660.06, est prévue, selon le décompte suivant :
• montant retenu pour la subvention 3 412 366 F
• subvention 1 313 466 F
• montant à charge de l'Etat de Genève 2 098 900 F
Art. 4 Financement et couverture des charges financières
Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du plan directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels, dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.
Art. 5 Amortissement
L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.
Art. 6 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
La Commission des travaux s'est réunie les 29 septembre et 6 octobre 1998 pour étudier ce projet de loi en présence des conseillers d'Etat Moutinot et Lamprecht, de même que des cadres du DAEL, MM. Reinhard, Andrié et Moglia. La commission a également entendu M. P. Moia du bureau d'ingénieur Trembley et M. J.-M. Revaz, de la direction de Palexpo.
Les enjeux de l'agrandissement de Palexpo, tels qu'ils sont décrits dans ce projet de loi, ont été rappelés par tous les interlocuteurs présents.
Télécom 2003 est un objectif prioritaire du Conseil d'Etat, représenté pour ce projet par trois départements, ceux de l'aménagement (DAEL), de l'économie (DEAE) et des finances (DF).
L'Union internationale des télécommunications (UIT) a d'ores et déjà indiqué que seul l'agrandissement de la surface actuelle d'exposition de 60 à 80 000 m2 permettrait de maintenir cette manifestation à Genève.
Télécom génère tous les 4 ans des retombées économiques à Genève de l'ordre de 400 millions de francs, soit autant que le Salon de l'automobile sur la même période.
Globalement, les retombées financières des 250 événements annuels qui ont lieu à Palexpo génèrent entre 400 et 600 millions de francs par an, selon une étude conduite par l'Université de Genève.
Jusqu'à ce jour, l'Etat de Genève a dépensé 100 millions de francs sur un investissement total de 250 millions. Cette dépense est rémunérée par un rendement de l'ordre de 4 %.
Des organisateurs de manifestations qui ont dû être déplacées, notamment à Bâle, vu le manque de surface disponible à Genève, ont déjà fait savoir leur intérêt à revenir dans notre canton.
De plus, le besoin en salles de conférences de surfaces modulables se fait également sentir, raison pour laquelle leur construction est prévue dans une deuxième phase du projet.
La question de solutions alternatives a aussi été discutée. Des halles provisoires coûteraient des millions de francs à fonds perdus et l'implantation d'une nouvelle halle sur la parcelle Tissot rencontrerait des difficultés insurmontables, telles que l'opposition de la commune du Grand-Saconnex ou le déclassement, puis l'achat des terrains.
La "; sous-occupation " de la halle 7 a également été abordée. La raison en est précisément le fait que cette halle, située de l'autre côté de l'autoroute, est décentrée par rapport au coeur de Palexpo, et par conséquent, moins prisée par les organisateurs. L'implantation d'une nouvelle halle 6 permettrait une meilleure rentabilité de la halle 7, en la "; rapprochant " de l'ensemble.
Pour ce qui est du projet lui-même, il s'agit donc d'une plate-forme de 39 000 m2 réalisée au-dessus de l'autoroute, qui serait construite en deux étapes, soit une halle de 21 500 m2 avant 2003, puis un centre de congrès de 2500 places en 2007.
Ces indications sont provisoires et pourront être modifiées en fonction de l'étude qui sera conduite, si le crédit est approuvé.
Techniquement, il faudra aussi faire face au problème de l'interruption de la ligne à haute tension qui se situe à l'emplacement prévu de la halle 6. Selon la variante qui sera retenue (enterrement total ou partiel, pose sur le toit de la halle), les coûts varieront entre 10 et 50 millions de francs.
L'augmentation des places de parcage a été abordée, elle dépendra également du sort qui sera réservé à l'actuel Musée de l'automobile, aujourd'hui en sursis, et qui dispose d'une surface de 14 000 m2.
C'est pour toutes ces bonnes raisons que la Commission des travaux, par 8 voix favorables (1 L, 2 R, 2 DC, 3 S) et 3 abstentions (AdG), vous enjoint, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce crédit d'étude.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Dans sa séance du 6 octobre 1998, la majorité de la Commission des travaux à procédé au vote du projet de loi 7878 sans tenir compte de l'absence de réponse à la lettre du 24 septembre 1998 de l'Alliance de gauche au Conseil d'Etat. Celle-ci posait 9 questions essentielles pour l'acceptation de crédit d'étude de 7 557 000 F pouvant déboucher en 1re étape sur une dépense d'environ 140 millions et en 2e étape de 75 millions supplémentaires. A ajouter l'enterrement ou le déplacement de la ligne haute tension, soit environ 5 à 12 millions, selon la solution retenue.
Considérant que le rapporteur de majorité a relaté les travaux de la commission, je n'y reviens pas, mais pour plus de clarté, vous trouverez ci-joint la correspondance échangée entre l'Alliance de gauche et le conseiller d'Etat chargé du DAEL. En regrettant que les délais ne nous aient pas permis de prendre connaissance de ce volumineux dossier, je souhaite que le Grand Conseil reçoive des compléments d'informations avant que ce projet de loi ne passe devant le plénum, afin qu'il puisse se prononcer en toutes connaissances de cause, car l'ensemble représente, pour le moins, environ 230 millions de francs.
Annexe
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Premier débat
Le président. Quelqu'un peut-il remplacer le rapporteur de majorité, M. Visseur, qui n'est pas dans la salle en ce moment ? On me dit que ce sera M. Lescaze. Monsieur Lescaze, avez-vous quelque chose à ajouter au rapport ?
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. Non, rien, Monsieur le président.
Le président. Je passe la parole au rapporteur de minorité, M. Meyll.
M. Pierre Meyll (AdG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, on ne va pas envoyer M. Lescaze à la case, mais il n'est pas membre de la commission : il a siégé en tant que remplaçant. Je veux bien qu'il défende ce projet, mais il s'agit d'une entorse au règlement que nous tenons à relever par rapport à M. Lescaze qui est très à cheval sur l'application du règlement. Cela dit, dans mon rapport, j'étais très honnête et très en dessous de la réalité puisque je chiffrais... (Remarque.) Comme toujours, Monsieur Lescaze. Je ne joue pas à double jeu, moi, ni recto-verso - puisque j'étais resté à 265 millions s'agissant de la somme que devrait coûter cette réalisation. Je constate en fait que certaines questions posées par l'Alliance de gauche n'ont toujours pas reçu de réponses. Cela n'est pas sans nous poser certains problèmes quant à l'acceptation de ce projet.
D'autre part, ce projet a été déposé en début d'année, me semble-t-il. Je suis étonné que, malgré ce laps de temps, certaines questions n'aient pas pu être précisées et figurer à l'ordre du jour de la commission des travaux beaucoup plus rapidement, ce qui nous aurait permis d'arriver à des discussions beaucoup plus sereines.
En commission, bien entendu, les décisions ont été à nouveau enlevées au sprint. Cette façon de faire est toujours assez désagréable lorsque, poussé par les événements, on veut absolument arriver à faire voter un projet avant de connaître les réponses. Ces réponses sont arrivées deux jours avant; mon rapport était déjà déposé. Au vu du pavé qui nous est parvenu, il nous était difficile de séparer l'ivraie du bon grain.
M. Chaïm Nissim (Ve). La question de Palexpo est difficile. Je confirme ce que vient de dire le rapporteur de minorité sur la méthode de travail employée en commission des travaux pour traiter ce crédit d'étude, qui doit déboucher sur une somme de plus de 200 millions, si on tient compte de la première et de la deuxième étape avec le déplacement de la ligne à haute tension. Nous avons travaillé deux heures sur le sujet, dont trois quarts d'heure étaient consacrés à l'exposé du projet. Nous avons pu ensuite poser des questions pendant une demi-heure et, à la séance suivante, pendant une demi-heure encore. Je trouve que cette méthode tient beaucoup plus, Monsieur Moutinot et Monsieur Hausser, du coup de force que du dialogue et de l'information. On ne peut pas travailler de cette façon, même s'il est vrai qu'il y a des projets urgents. Je peux comprendre qu'il y ait des urgences, mais il y a toujours moyen de discuter ces projets en priorité dans les commissions et de faire mieux, afin d'accomplir un véritable travail. Là, ce n'est pas du travail.
Nous avons posé plusieurs questions en commission, que je voudrais répéter ici et qui figurent d'ailleurs dans le rapport de mon collègue Pierre Meyll. Il y a d'abord la question budgétaire, que nous avons à peine effleurée en commission. Quand on s'apprête à dépenser 200 millions, on ne peut pas effleurer les questions, il faut travailler à fond. On sort d'une époque, la fin des années 80, où ont été construits le Bachet, la zone sud de l'hôpital, les Cheneviers, l'Hôtel de police. Tout a été construit trop grand et maintenant on se montre circonspect. On a vu dans le rapport de minorité que, par exemple, le taux d'occupation de Palexpo pour 1997 a été de 31% et de 47% si l'on tient compte des jours creux. Cela ne représente pas un très haut taux d'occupation. Il est vrai que ce taux est sujet à des fluctuations et que l'année prochaine sera peut-être mieux remplie, mais il y a des questions que l'on doit se poser quand on s'apprête à dépenser 200 millions.
Il y a ensuite une question d'attitude, Monsieur Moutinot, l'attitude que vous avez eue dans plusieurs dossiers. J'ai souffert, Monsieur Moutinot, lorsque à propos du CERN, vous avez traité par-dessous la jambe certaines questions que nous voulions poser. J'ai souffert aussi quand j'ai lu dans les journaux la façon dont vous avez traité le dossier du goulet de Chêne-Bougeries. Tout cela fait qu'il y a une certaine méfiance entre les «rêve-volutionnaires» dont je fais partie et les gens comme vous. Il y a un problème de communication entre nous, Monsieur Moutinot, qu'il faut absolument régler parce que, sinon, nous n'aurons plus confiance. Et, dans des projets comme celui-là, lorsque l'on doit voter à la va-vite, il y a des tas de choses qui coincent.
Je voudrais vous donner un exemple de problème de communication. Je sais que Jacqueline Fendt, directrice d'Expo 01, est venue vous voir pour vous proposer de recycler les structures en acier des plates-formes qui vont être aménagées sur le lac de Morat, ou celui de Neuchâtel. Sa proposition était de recycler une partie de ces structures, ce qui semble une excellente idée du point de vue écologique. Apparemment, vous ne pouvez pas retenir cette proposition. J'aimerais bien savoir pourquoi. J'aurais voulu pouvoir en discuter en commission. Est-ce trop cher ? Est-ce une question de délais ? Y a-t-il d'autres problèmes ? Je veux bien vous croire, mais dites-nous ce qu'il en est.
Cela pour vous dire que je suis prêt, Monsieur Moutinot, à voter ce projet de loi, mais je voudrais que la communication fonctionne, que vos méthodes ne tiennent pas du coup de force, mais qu'elles tiennent davantage du dialogue, et que l'on prenne le temps de s'expliquer, d'examiner les problèmes. Il n'est pas possible de continuer à travailler comme nous l'avons fait pour ce projet.
M. Nicolas Brunschwig (L). Je crois qu'il s'agit aujourd'hui de se concentrer plutôt sur le fond du projet, et non sur la forme et sur la manière dont celui-ci a été étudié en commission. Les questions essentielles pour nous sont : est-ce un bon projet ? Est-ce un projet utile pour Genève ? Les libéraux répondent résolument oui à ces deux questions, en rappelant que c'est un outil important par rapport à la promotion économique liée aux congrès et aux différentes foires; on sait l'importance de ceux-ci dans l'économie genevoise. Un article de la «Tribune de Genève» rappelle ces chiffres, qui sont spectaculaires, et les retombées économiques que l'on peut attendre soit de Telecom tous les quatre ans, soit de l'ensemble des manifestations qui ont lieu annuellement dans notre ville. Dans ce sens, l'aéroport est aussi un outil important et il est étonnant de constater que plusieurs groupes de ce parlement - qui sont pourtant en théorie favorables à la promotion économique - sont toujours opposés ou réticents à accepter les projets de lois qui concernent ces infrastructures, en ayant chaque fois des réactions négatives sur les moyens, la manière, les coût, les timings de ces différents projets.
Quant à nous, nous faisons confiance au Conseil d'Etat pour que ce crédit d'étude soit piloté avec diligence et pour qu'il en ressorte effectivement un bon projet. Je pense qu'il est difficile de demander à une commission parlementaire de savoir très exactement quelle est la meilleure architecture, quel est le meilleur emplacement, quelle est la meilleure technologie, quelles sont les meilleures liaisons pour une infrastructure de ce style. Il y a des professionnels à la tête de Palexpo qui ont pour mission et pour tâche quotidienne d'organiser, de gérer et de répondre aux souhaits des utilisateurs desdites infrastructures. Il est clair qu'il faut, dans une certaine mesure, leur faire confiance.
Nous aimerions ajouter que, bien évidemment, les timings sont serrés, mais que Palexpo et Telecom sont bien plus importants que les seules retombées liées aux manifestations qui se déroulent dans ce site. En effet, nous avons l'extraordinaire chance de développer en ce moment un site d'excellence pour tout ce qui est télécommunications. Nous voyons, semaine après semaine, des annonces d'implantation de sociétés. Il est tout à fait certain que la présence de l'UIT, qui a son siège à Genève, et de Telecom, qui pour l'instant a lieu à Genève - il s'agit de faire des efforts soutenus pour conserver cette manifestation - sont des facteurs extrêmement importants qui influencent les décisions d'implantation de ce type de sociétés à Genève. C'est une technologie et un secteur de l'économie en pleine croissance. Peut-être est-ce celui qui a le plus grand potentiel, et nous ne devons absolument pas laisser passer ces opportunités.
Dès lors, nous sommes totalement favorables à ce projet et nous attendons du Conseil d'Etat qu'il nous donne des réponses plus précises, plus claires, lorsque ce crédit d'étude aura abouti dans sa finalité, afin que nous puissions voter le crédit d'investissement nécessaire à la réalisation de cet outil fort important pour Genève.
M. Hervé Dessimoz (R). Je ne vais pas faire une déclaration au nom du groupe radical, mais je voudrais qu'il soit consigné que les députés Spinucci, Büchi et Dessimoz, qui sont concurrents dans le concours organisé par le DAEL pour cet objet, ne participeront pas au débat ni au vote.
M. Christian Grobet (AdG). M. Brunschwig a tout à fait raison de porter le débat sur le problème de fond. Il est évident que beaucoup de projets sont utiles à Genève. Le problème qui nous préoccupe, nous Alliance de gauche, c'est de savoir si, face à la situation très préoccupante des finances de l'Etat, nous avons les moyens de financer un projet de cette envergure. J'aimerais rappeler que ce projet en deux étapes va coûter au minimum 230 à 250 millions de francs, peut-être même davantage parce que les indications sur le coût de la mise en galerie souterraine de la ligne EOS sont extrêmement variables. Je relève au passage que la direction de Palexpo, dont on vante tant les mérites, est au courant de ce problème depuis plus de huit ans. Je constate qu'aujourd'hui on n'est toujours pas en mesure de nous proposer une solution, ni de nous indiquer le prix d'une telle opération, ce qui, au niveau du sérieux de l'étude conduite par Palexpo, m'amène déjà à émettre de très sérieux doutes.
La halle supplémentaire de 20 000 m2 de plancher va augmenter d'un cinquième seulement la surface de plancher actuelle, qui est de 80 000 m2; on va passer de 80 000 à 100 000 m2 pour un coût estimé à 170 millions plus bien entendu la mise en souterrain de la ligne EOS, c'est-à-dire environ 200 millions de francs. Nous ne sommes pas très loin, pour ces 20 000 m2, Mesdames et Messieurs, du coût des 80 000 m2 déjà réalisés. Cela démontre le coût complètement délirant, je n'ai pas d'autres termes, de ce projet.
Une voix. Le Bachet de Pesay !
M. Christian Grobet. Je ne dirai qu'une seule chose : pour le Bachet de Pesay, vous interrogerez mes prédécesseurs, M. Vernet et M. Fontanet, c'était leur projet ! (Protestations.) Je comprends, Monsieur Vaucher, que cela vous gêne beaucoup d'évoquer un projet conçu par un magistrat de votre parti et par un magistrat PDC, et voté par le Grand Conseil.
Pour revenir au problème du Palais des expositions, je citerai un architecte - ce n'est pas celui qui vient de se lever, mais quelqu'un qui a également participé à ces procédures assez extraordinaires et particulièrement coûteuses qui sont de mise aujourd'hui pour l'attribution de mandat d'architecte, soit les mises au concours - cet architecte m'a dit : «Mais il n'y a plus qu'à Genève qu'on peut imaginer un pareil projet, avec une dalle par-dessus l'autoroute qui va coûter 1 000 F le m2, soit 40 millions rien que pour la dalle !». En l'occurrence, il est assez intéressant d'entendre des gens de la profession s'étonner qu'on prenne des partis architecturaux pareils.
Je tiens par ailleurs à souligner - puisqu'on a parlé du sérieux de ces Messieurs à la tête de Palexpo - que, lorsque sur leur demande, le projet de la halle 7 a été envisagé comme une halle indépendante et qu'après ils ont changé d'avis pour demander à l'époque l'extension du bâtiment principal qui nous est proposée aujourd'hui, il avait été dit que cela coûterait mois cher, soit 35 millions. Palexpo demandait que l'on abandonne le projet de la halle séparée qui est revenue finalement à près de 50 millions. Mais aujourd'hui on ne parle pas de 50 millions pour 20 000 m2 de plancher, Mesdames et Messieurs les députés, on parle de quatre fois plus, de 200 millions pour la même surface de plancher.
Il faut aussi savoir que, quand on construit une halle par-dessus l'autoroute, on doit tenir compte des éventuels problèmes d'incendie à l'intérieur de cette halle, qui étaient déjà, il y a bien des années, une préoccupation des services de sécurité du département des travaux publics. Il était déjà question, à l'époque, de limiter le nombre des visiteurs du Salon de l'automobile durant le week-end car, en cas de sinistre, il pouvait y avoir des problèmes d'évacuation dans une halle de cette dimension, avec des armatures en fer qui sont beaucoup plus dangereuses en cas d'incendie que des armatures en bois comme celles qui ont été mises dans la halle 7. Le problème est encore différent avec une halle qui enjambe l'autoroute. Chacun doit comprendre que, s'il faut évacuer la halle, on ne va pas sauter dix mètres plus bas sur l'autoroute. Il faut par conséquent prévoir une dalle - à 1 000 F le m2 - beaucoup plus large que le bâtiment pour assurer une sécurité minimale en cas d'incendie, dont on n'est même pas certain qu'elle puisse être garantie.
Ainsi que je l'ai dit lors du débat d'entrée en matière à M. Moutinot, j'ai beaucoup de doutes sur le concept. Je tiens à vous dire, Monsieur Moutinot, qu'après avoir discuté avec un certain nombre de spécialistes, ce ne sont pas des doutes que j'ai aujourd'hui : je pense que la solution proposée, qui avait déjà été fortement critiquée il y a huit ans, est tout simplement aberrante au niveau des coûts et de la conception de l'ouvrage. La moindre des choses aurait été de susciter un concours proposant les deux alternatives : la solution enjambant l'autoroute et la solution d'une halle sur les terrains à côté, propriété des consorts Tissot, qui peuvent fort bien être mis en zone d'équipement public et, le cas échéant, expropriés. Je rappellerai pour ceux qui ne le savent pas que les terrains des consorts Tissot étaient même soumis, puisqu'ils étaient en zone agricole, à une réduction de prix de moitié en cas de construction. Ce sont des terrains qui peuvent être acquis à bon prix et en tout cas bien meilleur marché que les 1 000 F le m2 de la dalle, plus tous les surcoûts qu'implique une construction au-dessus d'une autoroute. Nous nous engageons donc vers une construction extrêmement onéreuse.
Maintenant, si effectivement, Monsieur Brunschwig, la construction est rentable, pourquoi jeter de l'argent par les fenêtres ? Bien entendu, on peut tout imaginer, cela fait sans doute marcher l'industrie de la construction. Mais ce que nous voulons savoir, c'est si la rentabilité de Palexpo permet de financer un tel investissement. A cet égard, il faut savoir quel est aujourd'hui le bénéfice retiré par l'exploitation de Palexpo. On ne le connaît pas. Je vous rappelle que l'exploitation est confiée à Orgexpo et que, dans les documents qui ont été remis pas le Conseil d'Etat à notre demande, nous n'avons que les documents de la Fondation du Palais des expositions qui, comme le Conseil d'Etat le sait fort bien, ne donnent aucune indication. Et je suis quand même un peu étonné qu'aujourd'hui le Conseil d'Etat semble refuser - et c'est grave - de communiquer les comptes d'Orgexpo, qui permettraient concrètement de savoir si l'affaire est rentable avec le taux actuel d'utilisation du palais qui n'est que de 30%. Je trouve d'ailleurs, Monsieur Nissim, que vous êtes bien généreux de parler d'un éventuel 47% en tenant compte des périodes où on ne peut pas occuper les lieux.
Quand on construit un bâtiment de cette nature, il faut effectivement penser à trouver des possibilités d'occupation sur toute l'année. Or les expositions n'ont pas tellement augmenté. On nous parle d'une nouvelle grande exposition qui viendrait. De quoi s'agit-il ? Cela me fait un peu penser aux arguments qui ont été développés concernant la SWA, où on nous a promis beaucoup de choses. A lire la presse aujourd'hui, les promesses sont loin d'être ce que l'on pouvait escompter. Alors, aujourd'hui, il faut nous dire clairement quelles sont les possibilités de rentabilité de ce bâtiment, dont le taux d'occupation est faible, et nous communiquer les comptes à ce sujet. En ce qui nous concerne, nous disons que le Palais des expositions a été agrandi deux fois de suite à la demande de Telecom. Une première fois avec l'achèvement du bâtiment principal qui a coûté 30 millions. Une deuxième fois, huit ans plus tard, avec la halle 7 qui a coûté 50 millions. Maintenant on nous demande un troisième agrandissement de 20 000 m2 pour 200 millions, alors que la halle 7 est notoirement sous-occupée. Il ne faut pas nous dire que c'est parce qu'elle est séparée de 100 m de la halle principale, alors qu'elle y est reliée par une passerelle couverte. La réalité, c'est qu'il n'y a pas de nouvelles grandes expositions qui sont venues à Genève. On le voit dans les chiffres figurant dans les documents qui nous ont été remis. Quelles sont les garanties que les nouvelles surfaces qui seront créées pour Telecom seront utilisées en dehors de cette exposition qui a lieu une fois tous les quatre ans ?
En conclusion, nous ne doutons pas qu'il y ait des retombées économiques avec Telecom. On nous parle de 400 millions, ce qui nous semble énorme. Il paraît même que ces 400 millions seraient en dessous de la réalité et qu'il pourrait s'agir d'un montant supérieur. Qu'on nous dise alors quels sont les bénéficiaires de ces retombées économiques. Ils pourraient ainsi être mis à contribution. Si effectivement l'Etat n'était pas la seule vache à lait dans cette affaire, mais que les bénéficiaires des retombées économiques participent, conformément au concept que vous soutenez en général de prise en charge par l'économie privée des phénomènes économiques, la situation serait différente. On pourrait même envisager une participation des exposants au coût de construction, si l'UIT ne fixait pas des ukases dans ce domaine. Je demande donc que le Conseil d'Etat dise très clairement quels sont les secteurs qui vont bénéficier des retombées économiques et si, par exemple, les milieux hôteliers, qui sont vraisemblablement les premiers intéressés, sont prêts à mettre de l'argent sur la table pour financer ce projet qui doit servir l'économie genevoise.
M. Dominique Hausser (S). Mon intervention se divisera en deux parties. La première : la position du groupe socialiste. La deuxième : en tant que président de la commission des travaux, ce sera très court. Le groupe socialiste tient à rappeler qu'il s'agit ici d'un crédit d'étude et pas encore de la réalisation de la halle 6 de Palexpo. Le groupe socialiste considère que certaines des questions soulevées par le courrier de l'Alliance de gauche adressé au Conseil d'Etat sont justifiées. Le groupe socialiste considère qu'il sera répondu à une bonne partie de ces questions suite à l'étude de ce projet, en particulier à la question financière et je dirais, même si ce n'est pas explicite dans le titre de ce projet, y compris à la question de son implantation. Il est évident que, s'il devient impossible de réaliser dans des conditions financières acceptables ou dans des conditions techniques acceptables une halle par-dessus l'autoroute, la recommandation du Conseil d'Etat, suite à l'étude, sera bel et bien de ne pas construire, si c'est irréalisable. Je serais extrêmement déçu de voir le Conseil d'Etat essayer de persister, comme il a tenté de le faire pour d'autres projets dans les législatures précédentes.
Il est vrai que Palexpo joue un rôle important sur la place de la Genève internationale, en parallèle au rôle de Genève pour les organisations internationales. Il est nécessaire de développer ce projet; c'est un choix prioritaire que nous acceptons de faire. Nous savons que cela a des conséquences potentielles sur d'autres crédits d'investissement, mais nous sommes prêts à prendre ce pari, en tout cas aujourd'hui au niveau du crédit d'étude. Au vu des résultats, nous déciderons s'il y a lieu de poursuivre en votant un crédit de réalisation.
En ce qui concerne la procédure de travail de la commission des travaux, celle-ci a procédé de la même manière qu'elle l'a fait pour tous les crédits qui lui sont soumis : elle a entendu les personnes à auditionner, soit à la demande des groupes, soit à la demande des commissaires. Elle a entendu les présentations du département. Elle a ensuite débattu et, à partir du moment où plus aucun commissaire n'estimait nécessaire de prendre la parole, le vote d'entrée en matière a eu lieu et s'est déroulé selon les règles habituelles de fonctionnement de n'importe quelle commission.
S'il s'était agi d'un débat tenu au début de ma présidence, j'aurais pu imaginer que les députés membres de la commission ne connaissaient pas la procédure de travail, mais, après dix mois, la procédure n'a pas changé, elle a toujours été la même et je ne crois pas que la manière de travailler de la commission des travaux constituait une surprise.
M. Claude Blanc (PDC). J'enchaînerai sur ce que vient de dire M. Hausser pour confirmer que la commission des travaux a effectivement travaillé dans des conditions normales et pour vous dire combien j'ai été navré en constatant l'indigence des deux rapports qui nous sont soumis aujourd'hui. La commission des travaux a tout de même fait autre chose que cette page d'énumération que le rapporteur de majorité nous livre aujourd'hui. Il n'est pas là ce soir, peut-être avait-il peur qu'on le lui rappelle ? Nous avons notamment pris la peine de recevoir M. Revaz de la direction de Palexpo, cela figure en une demi-ligne dans le rapport de majorité. M. Revaz nous a expliqué toute la problématique : la nécessité de l'agrandissement de Palexpo, tout ce qui a été fait jusqu'à présent, tout ce qui est encore à venir, les perspectives du Palais des expositions. Il a convaincu la commission, si besoin était, car nous avions déjà été invités une première fois par Palexpo au Palais des expositions, où les députés qui le souhaitaient ont pu être informés sur tous les projets de Palexpo et sur son devenir.
Puisque j'ai critiqué le rapport de majorité, je voudrais dire que le rapport de minorité est encore plus indigent. Il ne dit rien du tout. Je suppose que M. Grobet n'a pas eu le temps de dicter à M. Meyll ce qu'il devait écrire. C'est pour cela que M. Grobet vient de l'exposer maintenant. Si nous avions pu le lire, cela nous aurait évité des diatribes !
Cette discussion de marchands de tapis au sujet de Palexpo initiée par M. Grobet me fait beaucoup de peine. M. Grobet, après avoir dû - à son insu - construire l'autoroute, s'est transformé en démolisseur. Il veut absolument démolir Genève. Chacun sait que Palexpo, c'est le poumon de Genève. Quand M. Grobet vient ergoter en disant que les seuls bénéficiaires de Palexpo, ce seront les hôteliers, il fait semblant de nous prendre pour des imbéciles. M. Grobet veut nous faire croire qu'il n'a rien compris, alors qu'il a compris mieux que les autres parce qu'il est plus malin que les autres. Mais il faudra que M. Grobet arrête de nous abuser.
Tout le monde sait que les expositions qui ont lieu à Palexpo n'ont pas des retombées uniquement sur les chambres d'hôtels. C'est toute une promotion économique de Genève sur le plan notamment des industries à haute valeur ajoutée; c'est tout un effort qu'il faut faire pour sortir Genève de son marasme. Il est facile de vouloir voter des crédits pour améliorer l'aide aux chômeurs. C'est vrai que cette aide est nécessaire, mais il faut surtout prendre des mesures concrètes pour diminuer l'aide que nous sommes obligés d'apporter aux chômeurs. Quel meilleur moyen de lutter à la source contre le chômage que d'investir dans des réalisations qui permettront à Genève de sortir la tête de l'eau, en s'imposant sur le marché international de l'exposition et notamment dans le domaine des télécommunications ?
M. Revaz nous a expliqué - c'est dommage que cela n'apparaisse pas dans le rapport - que les véritables concurrents de Genève sont les grandes villes. Elles ne sont pas très nombreuses, mais elles sont très puissantes. Il se trouve qu'aujourd'hui nous sommes en mesure de tenir tête aux plus grandes villes dans ce domaine. C'est à mon avis un des seuls moyens à notre disposition pour que notre économie sorte de son marasme, pour qu'elle retrouve son aspect florissant et que nous puissions assumer tous les engagements que nous avons pris dans ce Grand Conseil - parfois la tête dans un sac - mais qui aujourd'hui nous accablent d'une dette de dix milliards.
Je ne peux pas comprendre que ceux qui se targuent de défendre les chômeurs et la classe ouvrière puissent aujourd'hui venir nous dire que cet investissement est superfétatoire, qu'il est possible de le faire autrement, en expropriant les terrains Tissot, d'une part, et en faisant appel aux privés, d'autre part. M. Grobet sait très bien que si l'on exproprie, ce n'est pas pour une mise à disposition de privés. Il le sait mieux que personne, mais il le dit quand même, parce qu'il avance n'importe quel argument en espérant que le Grand Conseil le croira. Nous ne vous croyons plus, Monsieur Grobet !
M. Roger Beer (R). C'est vrai que nous avons ce soir un débat un peu irréaliste. Je dois dire qu'en vous écoutant, Monsieur le député Grobet, j'ai l'impression que vous donnez tous les arguments montrant combien vous regrettez de ne pas avoir construit vous-même cette halle 6.
Je comprends, vous étiez un constructeur, je comprends que vous regrettiez. Mais, aujourd'hui, ce n'est plus votre tour, et finalement nous avons entendu M. Hausser qui nous donne l'évolution du parti socialiste, en acceptant le crédit d'étude. Parce que, Monsieur Grobet, ce soir nous allons voter un crédit d'étude. Ce crédit d'étude de sept millions, c'est important, permettra de savoir ce que nous allons faire de la Genève de demain.
Je crois que cette halle 6 au-dessus de l'autoroute - mis à part le côté innovateur au niveau technologique d'une halle d'une telle importance au-dessus d'une autoroute - permet d'amener un souffle d'oxygène à Palexpo. Aujourd'hui, nous devons développer Genève. Nous devons favoriser et développer l'attractivité de la Genève internationale et cela passe par cette construction.
Vous préconisez une solution qui pourrait être moins chère que les 100 ou 150 millions - on avance encore d'autres chiffres, mais on n'en sait rien puisque les sept millions permettront précisément de chiffrer cet investissement - mais vous savez très bien que l'expropriation et le déclassement impliquent généralement des procédures tellement compliquées qu'on ne va en tout cas pas réussir à réaliser l'équipement nécessaire pour le prochain Telecom.
Pour cette raison, je pense qu'il faut remercier le Conseil d'Etat d'avoir rapidement présenté le crédit d'étude. Il faut remercier la commission d'avoir engagé les travaux rapidement. Je reconnais que M. Blanc a eu raison de se gausser des rapports. C'est vrai que les deux rapports sont relativement brefs, mais finalement c'est peut-être parce qu'ils vont à l'essentiel.
Concernant le rapport de M. Pierre Meyll qui fait à peu près cinq lignes et qui reprend la lettre de M. Ferrazino, j'ose espérer ce soir que M. Moutinot aura un certain nombre de réponses aux neuf questions qui sont posées. C'est vrai, Monsieur Ferrazino, ces questions sont pertinentes. Mais je n'arrive pas à imaginer qu'on demande un crédit de sept millions sans qu'il ait été répondu à ces différentes questions, en tout cas en commission, voire dans cet immense département anciennement des travaux publics, et qu'on se lance dans un crédit d'étude sans avoir éclairci toutes les questions que vous vous plaisez à poser et que M. Meyll reprend très gentiment dans son rapport de minorité.
Mesdames et Messieurs, nous discutons, mais nous devons voter ce crédit, nous devons aller de l'avant. Telecom, c'est demain. L'avenir de Genève passe par là et nous n'avons pas le choix ce soir. Je vous remercie de voter ce crédit.
M. Bernard Annen (L). Suite à la critique un peu sévère de M. Blanc, j'aimerais remettre l'église au milieu du village, dans la mesure où s'il est vrai que ces rapports sont succincts, c'est que tout simplement le temps pressait. On ne peut pas à la fois remercier quelqu'un qui arrive à rédiger un rapport en vingt-quatre heures et fusiller d'autres, ceux qui sont obligés de rendre des rapports rapides en raison du délai imparti. Cela étant, je pense que tout l'enjeu que nous débattons aujourd'hui était connu. Le débat de préconsultation avait déjà posé les jalons autour de ce projet. A cet égard, il est incroyable de constater avec quel aplomb M. Grobet peut avancer un certain nombre de contrevérités. Lors du débat de préconsultation, il m'avait dit que la halle 7, ce n'était pas lui, c'était M. Jaques Vernet. J'avais été un peu impressionné, parce que lorsque M. Grobet intervient avec un tel aplomb, on est pratiquement sûr qu'il dit la vérité. Puis j'ai vérifié : la halle 7, c'est bel et bien celle de M. Grobet !
Il reste à se poser la question de savoir pourquoi on parle de halle 7. Il y avait cinq halles, M. Grobet en fait une de plus, pourquoi s'appelle-t-elle halle 7 et pas halle 6 ? A l'époque, je faisais partie de la commission des travaux. Le département des travaux publics avait imaginé de construire une halle au-dessus de l'autoroute - M. Nissim qui faisait partie de la commission est en train de me donner raison là-dessus - et s'est trouvé à un certain moment devant une impossibilité. C'était effectivement - et là M. Grobet a raison - la ligne haute tension. Il y a eu de la part d'EOS une fin de non-recevoir catégorique. M. Grobet nous a dit à l'époque de ne pas nous inquiéter, que dans quelques années cette réalisation serait possible. C'est la raison pour laquelle on l'a appelée halle 7, en attendant de finir complètement le complexe grâce à la halle 6, celle que nous sommes en train de prévoir aujourd'hui.
Je vais plus loin : la passerelle, c'est encore M. Grobet qui nous l'a fait avaler. Nous étions un peu sceptiques, à la commission des travaux, en disant à M. Grobet que s'il voulait construire la halle 6 à côté de cette passerelle, cela allait entraîner des dépenses invraisemblables dans la mesure où cette passerelle devrait être démolie pour construire ladite halle. Aujourd'hui, ainsi que M. Grobet l'avait prévu, la passerelle ne gênera pas puisque déjà à l'époque il était prévu de la conserver si nous construisions la halle 6. Là, M. Grobet avait raison.
Il faut à un moment donné dire les choses telles qu'elles sont. Je ne peux pas laisser M. Grobet souligner que cet investissement entraîne des dépenses extraordinaires. En effet, prenons l'autoroute de contournement - il dira que ce n'est pas lui et c'est vrai qu'il y était opposé en tant que député lors de son premier mandat, mais il l'a construite. Mesdames et Messieurs, vous avez tous, les uns et les autres, emprunté une fois l'autoroute de contournement. Vous avez tous été surpris par la beauté de cette autoroute, par la décoration des tunnels. Le carrelage à l'intérieur, nous le devons à M. Grobet, seul tunnel au monde où il y a du carrelage décoratif. Bravo, Monsieur Grobet, en matière de dépenses extraordinaires, vous étiez le premier à les proposer et à les défendre. Je ne citerai pas l'Arena dont j'ai suffisamment parlé, mais ne venez pas nous donner des leçons sur les investissements qui rapportent, parce que, à la lecture des procès-verbaux, je puis vous ressortir tout ce que vous nous avez dit sur l'Arena en matière d'investissement et de rentabilité. Tout cela s'avère complètement faux. Alors, s'il vous plaît, montrez un peu de raison, car finalement je crois que, vous aussi, vous avez le respect de l'avenir de Genève - même si vous êtes avocat et si, lorsque vous voulez faire de la politique politicienne, vous êtes le maître en la matière.
Il y a des catégories d'investissements qui entraînent des frais d'exploitation. Celui-ci est par définition un investissement qui génère des recettes d'exploitation, dans le sens large du terme, pour l'avenir de Genève. On ne peut pas défendre, les uns et les autres, «Smart Geneva», qui est un réseau de télécommunications, désirer être à la pointe des télécommunications et, a contrario, enterrer un projet tel que celui de la halle, qui nous est proposé - ainsi que je l'ai dit maintes fois - sur la demande de Telecom. Les télécommunications, c'est l'avenir de la haute technologie sans laquelle Genève ne peut pas vivre. Vous en connaissez les retombées dans le secteur de l'hôtellerie, du commerce, que vous défendez au même titre que l'ensemble des retombées économiques issues du développement de ce canton.
A la commission des travaux, l'Alliance de gauche a été raisonnable. Elle s'est abstenue, avec un certain nombre de commentaires, il est vrai. Elle a admis qu'il fallait au moins accepter le crédit d'étude, de manière à être fixé sur l'ensemble des questions auxquelles nous n'avons pas encore répondu. Je crois qu'on ne peut pas hypothéquer l'avenir. Les commissaires de l'Alliance de gauche y ont été sensibles, ils se sont abstenus. J'espère que l'ensemble de ce parlement soutiendra ce soir ce projet d'étude.
M. Pierre Meyll (AdG), rapporteur de minorité. Il faut que je rectifie ce qu'a dit M. Annen. Il y a eu deux abstentions de l'Alliance de gauche et une opposition, la mienne. Je ne sais pas m'abstenir. Lorsqu'on ne répond pas aux questions qui sont posées, je me refuse à voter le projet. Sachez que je n'ai pas eu, dans la vie, l'habitude de m'abstenir et cette fois non plus. M. Hausser, dans le cadre de la commission des travaux, nous a habitués à une façon de conduire les travaux un peu plus fouillée, qui répondait à ce que l'on peut attendre d'un président de la commission des travaux. Il est entendu que, dans le cas présent, il a été mis sous pression et que le temps manquait. Mais le projet était prêt et il aurait été possible d'en discuter avant. M. Hausser nous a habitués à mieux.
Je voudrais répondre à M. Blanc, qui prétend que mon rapport a été dicté : je vous l'ai déjà dit, vous ne l'avez peut être pas compris, mais vous commencez à devenir un peu sclérosé. Il n'est pas nécessaire que quelqu'un me dicte un rapport. Le problème est que j'ai reçu les documents trop tard et que je ne pouvais plus les commenter. M. Moutinot m'avait proposé de retarder le rapport jusqu'au début novembre pour avoir le temps de répondre. Lorsque j'ai reçu les réponses, le rapport était déjà rédigé. Je suis navré.
Par ailleurs, je suis surpris que vous soyez toujours en train de critiquer Grobet, car que feriez-vous sans lui ? A toute occasion, vous évoquez le passé, vous faites des historiques. C'est extraordinaire d'entendre ça ! M. Annen, lui, se trompe en parlant de la halle 6 et de la halle 7. A l'époque ce n'était pas seulement EOS qui disait non, il y avait aussi l'Office fédéral des routes, ainsi que divers autres problèmes. Il est vrai que nous avions pensé à relier les deux bâtiments d'une autre manière, mais cela coûtait beaucoup moins cher qu'aujourd'hui. L'enterrement de la ligne haute tension et tous les autres problèmes ont été examinés... (Commentaires.) Il faut dire que sans M. Grobet, vous n'auriez plus l'occasion de discuter dans ce Grand Conseil, ce serait regrettable !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il est 22 h 45, je vous demande de résumer vos interventions de manière que nous puissions avancer nos travaux, et surtout de faire silence et d'écouter les orateurs.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. Le projet de la halle 6 est effectivement un projet dont on parle depuis plusieurs années. On peut penser que tous les députés, et pas seulement ceux de la commission des travaux, avaient une certaine connaissance de ce que pouvait être ce projet. L'ampleur des discussions, ce soir, montre qu'au-delà du rapport de mon excellent collègue Pierre-Pascal Visseur et du rapport fait par un nouveau député qui n'avait peut-être pas cette mémoire collective, il existe une mémoire bien vivante dans ce parlement.
Contrairement à ce qui a été dit, ce soir, nous avons le choix. En votant ce crédit d'étude de sept millions, nous avons le choix d'accepter que Genève devienne une petite réserve d'Indiens ou que Genève continue un certain développement. Tout à l'heure, il a été dit qu'il s'agissait de savoir si ces dépenses étaient utiles. Il y a à Genève beaucoup de bonnes dépenses, utiles, pour les écoles, pour les hôpitaux pour lesquels nous n'avons pas hésité, il y a quelques années, à dépenser des centaines de millions. Et parmi ces dépenses utiles, il y a celles pour Palexpo qui ont le mérite supplémentaire de rapporter, peut-être pas de manière à couvrir tous les frais, mais, ce qui est certain, de rapporter bien davantage en argent comptant que certaines autres dépenses d'infrastructure que personne ici n'a jamais contestées.
En ce qui concerne la sécurité, c'est un argument sur lequel personne n'est revenu, mais qui a été intelligemment évoqué au début de la séance, avant que les quolibets ne remplacent une analyse sérieuse. Sur le plan concret, autour de cette halle, il y aura sur terre ferme - permettez-moi l'expression - des plates-formes de déchargement des camions. Chacune de ces plates-formes est à cinq minutes au maximum du centre de la halle. En conséquence, l'évacuation sera relativement aisée. D'autre part, j'aimerais rappeler - sans être architecte - que la construction et l'exploitation des gratte-ciel posent aujourd'hui des problèmes de sécurité autrement plus importants que ceux d'une halle.
Enfin, dernier exemple qui est peut-être le plus proche de celui d'une halle d'exposition : Greenwich où se construit en ce moment, pour le prochain millénaire, un immense dôme, le millénium. Savez-vous que, lorsque vous serez au centre de ce dôme, vous devrez parcourir plusieurs centaines de mètres pour trouver la sortie ? Le centre est à plusieurs centaines de mètres des issues. Il faut croire que les Anglais courent plus vite que nous ! Je pense donc que les problèmes de sécurité peuvent être résolus et pour cela je fais confiance aux solutions techniques qui seront présentées et que, bien entendu, les éventuels spécialistes de la commission des travaux pourront discuter.
Le problème du remplissage de Palexpo a également été évoqué. On le considère d'un point de vue purement arithmétique, en termes de jours, en disant que la moyenne est de 31%, de 40%... Il s'agit bien entendu de pondérer. Les dix jours du Salon de l'Auto font une part très importante. Les dix jours de Telecom tous les quatre ans forment une part capitale de l'exploitation. Bien entendu, on ne peut pas imaginer qu'un établissement comme Palexpo puisse enregistrer 365 jours par an l'affluence qu'il y a lors de Telecom ou du Salon de l'Auto, sinon ce serait tout simplement invivable pour Genève. Il s'agit donc de pondérer et de considérer que ces équipements sont absolument nécessaires à notre cité.
On peut discuter de certains bien-fondés, mais c'est en réalité toute la politique de promotion économique et, finalement aussi, toute une certaine politique de lutte ou de résorption d'un certain chômage qui est mise ici en difficulté par le refus de ce crédit. Je pense ne pas trahir mon collègue Pierre-Pascal Visseur en disant que le vote de ce crédit d'étude est absolument nécessaire. Effectivement, en choisissant aujourd'hui de le voter, vous prenez une option sérieuse sur la construction de la halle 6, mais ce n'est pas encore une option définitive. Si vous voulez conserver à Genève un certain dynamisme - on ne vous parle pas de surchauffe, plus personne n'en parle aujourd'hui - vous voterez ensuite les crédits de construction.
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Nous n'avons pas eu le choix, a-t-il été dit à plusieurs reprises. En effet, il ne s'agit pas de choisir entre la Genève réserve d'Indiens ou la Genève internationale; c'est faire preuve de mauvaise foi que de poser la question en ces termes. Nous n'avons pas eu la possibilité de choisir entre différents projets. La seule question à laquelle nous devrions répondre ce soir est la suivante : le projet proposé est-il bon ? Un bon projet a, en plus d'une destination utile - ce qui est le cas sans aucun doute dans ce dossier - un bon rapport coût/rendement. C'est sur ce point que nous avons des réticences.
Nous ne sommes pas réticents à ce que Genève joue un rôle de pôle de communications et nous sommes favorables au maintien de Telecom à Genève. En revanche, nous sommes réticents à épuiser les ressources d'investissements en un seul projet, alors que la même somme aurait certainement permis d'en réaliser plusieurs. On nous demande de voter un crédit d'étude au pas de charge pour un seul projet déjà programmé. Ce n'est pas un choix. Nous nous engageons, par ce crédit, sur une voie dont nous ne pourrons plus nous écarter. Lorsqu'il s'agit de très grandes surfaces, comme c'est le cas aujourd'hui, celles-ci devraient avoir un rapport coût/surface beaucoup plus bas que les espaces précédents. Or, la dernière surface qui devrait se construire à Palexpo sera la moins utilisée à l'évidence et sera pourtant la plus chère. Peut-être ne sera-t-elle même utilisée qu'une seule fois ! Il aurait été possible de nous proposer d'autres choix. Par exemple, une halle provisoire démontable, qui n'aurait pas nécessité les dépenses exorbitantes imposées par l'emplacement choisi.
Nous n'avons effectivement guère eu le temps d'approfondir la question en commission, puisque tous ces débats ont été menés au pas de charge. Il a même été difficile d'ailleurs de poser des questions. Certaines catégories de travaux génèrent des recettes, avez-vous dit. Nous pensons que nous pourrions obtenir ces recettes avec un projet beaucoup moins démesuré. C'est pourquoi, pour ma part, je refuserai ce projet.
M. Christian Grobet (AdG). Je donnerai satisfaction à M. Meyll et à M. Annen en reprenant la parole. J'aimerais dire au rapporteur de majorité que nous n'avons pas du tout dit que nous allions refuser ce crédit d'étude. Nous avons très clairement indiqué que nous nous abstiendrions, ainsi que je l'ai souligné au début de mon intervention. Nous ne sommes pas convaincus par le projet qui nous est présenté, il suscite de notre part beaucoup de réserves. Cela dit, je ne peux pas laisser passer certaines élucubrations dont M. Blanc est un habitué. Sauf erreur de ma part, Monsieur Blanc, vous étiez au Conseil administratif de Meyrin lorsque celui-ci est intervenu auprès du Conseil d'Etat pour appuyer la demande d'expropriation de terrain pour les besoins des entrepôts Coop, dans la zone industrielle de Meyrin-Satigny. Vous êtes parfaitement au courant, Monsieur Blanc, de ce projet de la Coop et quand vous avez osé dire... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
M. Claude Blanc. N'importe quoi ...
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés, un peu de silence !
M. Christian Grobet. Monsieur Blanc, c'est vous qui dites n'importe quoi quand vous osez prétendre qu'on ne peut pas exproprier des terrains pour un projet privé. Premièrement, Palexpo n'est pas un projet privé, puisque c'est une fondation de droit public, ce que vous savez. Deuxièmement, l'expropriation est parfaitement admise pour des projets privés dans la mesure où ils sont reconnus d'intérêt public. Tel a été le cas, par exemple, pour les entrepôts de la Coop à Satigny; tel a été le cas, par exemple, lors de construction de logements sociaux par des privés, pour l'expropriation de servitudes votée du reste par ce Grand Conseil au détriment de privés.
Monsieur Blanc, vous êtes soit frappé d'amnésie, soit une fois de plus totalement de mauvaise foi ! Je n'ai pas déclaré - et vous le savez fort bien - que les retombées de Palexpo bénéficiaient uniquement à l'industrie hôtelière. Je suis convaincu qu'il y a beaucoup de retombées notamment dans l'industrie hôtelière. J'ai posé la question de savoir quels étaient les bénéficiaires de retombées économiques qui seraient prêts à participer financièrement à ce projet. J'ai cité, bien entendu, l'industrie hôtelière en tant que première bénéficiaire, mais ce n'est pas la seule.
En ce qui concerne les expropriations, M. Beer a été beaucoup plus courtois, parce qu'il s'est posé certaines questions. Une fois la clause d'utilité publique votée par le Grand Conseil - ce qui est le cas systématiquement lorsqu'il s'agit de crédits grands travaux - l'expropriation est extrêmement rapide. Douze ans d'expérience me permettent de l'affirmer. Contrairement à mon prédécesseur, j'ai eu très peu recours à l'expropriation, mais quand cela est nécessaire, vous bénéficiez très rapidement de la prise en possession anticipée du terrain, ce n'est pas un obstacle.
Ce que je reproche à ce projet, c'est l'absence d'étude comparative entre une solution très onéreuse et une solution sur un terrain voisin. Monsieur Annen, quand vous dites que nous aurons les réponses à travers le crédit d'étude, c'est faux, car aucune alternative n'a été prévue.
Ceci m'amène à répondre aux propos totalement délirants de M. Annen. A moins d'avoir fait un laspus linguae, je n'ai en tout cas pas prétendu que la halle 7 était un projet de M. Vernet. Votre déclaration, c'est n'importe quoi ! Le projet de la halle 7, ce n'est pas non plus le fait de M. Grobet. Celle-ci a été demandée par M. Maitre pour le compte du Palais des expositions. Et c'est le Palais des expositions qui avait choisi, dans un premier temps, le terrain où se trouve la halle 7, car c'était le terrain le plus facilement constructible. Au moment de présenter le crédit devant le Grand Conseil, la fondation a alors demandé de revenir au projet initial du Palais des expositions - c'est peut-être en cela qu'il a été fait allusion à M. Vernet - d'une construction par-dessus l'autoroute, qui était une idée de l'architecte qui a conçu Palexpo. Ce n'est pas moi, mais les services du département des travaux publics qui ont souligné le coût particulièrement élevé de cette construction. Le Conseil d'Etat a été convaincu qu'il ne fallait pas, en tout cas à l'époque, retenir cette solution. Il est clair que nous avions réservé cette possibilité et c'est pour cela que Palexpo - et pas M. Grobet, Monsieur Annen; vous êtes de totale mauvaise foi, vous savez très bien que c'est l'utilisateur qui dénomme les bâtiments - c'est pour cela que Palexpo a donné le N° 7 à cette halle, parce qu'il voulait réserver d'ores et déjà la possibilité d'une halle 6 par-dessus l'autoroute. Monsieur Beer, je tiens à vous rassurer : je n'aurais pas voulu la réaliser car je trouve que ce projet est exagéré. Je suis parfaitement à l'aise à cet égard.
Je sais, Monsieur Annen, que vous êtes passé maître dans l'art de dénigrer un certain nombre de personnes, dont moi. Ce que vous avez déclaré à propos des catelles - dont vos milieux professionnels se sont félicités - est parfaitement grotesque. Les catelles dans les tunnels de Genève ne sont nullement les premières. C'est un matériau de revêtement qui a été posé dans d'autres pays et, avant Genève, dans le tunnel du Gothard en Suisse. Ce revêtement permet une meilleure visibilité dans les tunnels, qui se salissent très rapidement, et permet surtout de réduire les coûts d'entretien. C'est pour cette raison que, non pas M. Grobet, mais l'Office fédéral des routes nationales a souhaité que ces catelles soient posées. Dans certains tunnels, la pose de ces catelles a permis - sans supplément de coût - de réaliser une certaine décoration que l'on peut voir dans des tunnels dans d'autres pays.
Monsieur Annen, je dois dire que vous avez un certain culot. Vous savez bien tout cela. Dans les milieux du bâtiment, vous êtes encore au stade de réclamer des travaux pour vos amis car vous êtes le champion du corporatisme. Si bien qu'à l'époque vous ne critiquiez pas la pose de ces catelles, qui a été considérée comme extrêmement bienvenue par un corps de métier qui n'avait pas pu participer aux travaux de l'autoroute.
Pour terminer, Monsieur Lescaze, je dirais que nous sommes conscients du fait qu'il faut un Palais des expositions qui soit à même d'accueillir un certain nombre de manifestations. Le problème est de savoir jusqu'à quelle taille nous pouvons aller. Là se pose la question. Il n'est pas possible de concevoir, Monsieur Lescaze, un Palais des expositions dimensionné pour une manifestation qui a lieu tous les quatre ans. S'il est vrai qu'il n'est pas toujours possible de le remplir, il faut tout de même qu'il soit dimensionné pour l'usage normal et non pour des situations de pointe exceptionnelles. Aujourd'hui, nous ne sommes pas convaincus par ce projet. Ce dont nous sommes convaincus, c'est qu'avec 200 millions de francs investis dans des projets qui viendraient en aide aux petites et moyennes entreprises, de manière durable, nous serions plus efficaces au niveau de l'emploi qu'avec le projet qui nous est proposé ce soir.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a encore trois orateurs inscrits. Le bureau vous propose de clore la liste des orateurs et de passer ensuite au vote.
M. Olivier Lorenzini (PDC). Monsieur le président, j'ai écouté attentivement votre discours d'entrée en présidence hier soir. Vous nous disiez qu'il y a dix ans le Mémorial comptait 4 000 pages par année et que, dix ans plus tard, il en compte 11 000. Evidemment, si l'on continue de raconter les 4 000 pages précédentes, le nombre de pages du Mémorial ne cessera d'augmenter...
Cela dit, M. Grobet, M. Annen et M. Blanc nous ont fait un excellent cours d'histoire. J'en retiens que Palexpo est un site fondamental pour notre République et, visiblement, bien que vous parliez du passé - des tunnels, des catelles, etc. - vous en êtes tous convaincus, mais vous n'arrivez pas à l'exprimer. Vous êtes obligés de parler du passé pour montrer qui en a fait un peu, qui en a fait beaucoup. Monsieur Grobet, vous en avez fait beaucoup. Il faut reconnaître que, sous l'ère de M. Grobet, il y a eu de nombreuses réalisations, mais il faut arrêter de le regretter et en considérer l'aspect positif.
M. Brunschwig a dit quelque chose d'intéressant au début de ce débat : est-ce un bon projet pour Genève ? Genève en a-t-elle besoin ? Nous sommes obligés de répondre par l'affirmative à ces deux questions. Il est vrai que ce projet est cher, mais nous avons un site prévu à cet effet. Malheureusement, Monsieur Grobet, un hôtel a été construit à côté - ce n'est pas M. Blanc qui l'a autorisé, ni M. Annen - et il eût été peut-être plus simple d'agrandir le site de Palexpo à la place d'Holiday Inn. Aujourd'hui, il nous reste l'emplacement au-dessus de l'autoroute pour cet agrandissement.
Un mot enfin en ce qui concerne l'avenir - même si cela fait deux heures que vous nous pompez sur ce qui s'est fait ces vingt dernières années. Monsieur Grobet, il y a dix ans que je suis entré en politique; d'abord au Conseil municipal et ensuite, durant cinq ans, dans ce Grand Conseil. Je peux vous dire que l'on ne peut plus faire grand-chose pour l'avenir de Genève, à part Palexpo. En revanche, tout ce que l'on doit faire maintenant - et le paquet ficelé en est une démonstration - c'est le remboursement des TPG, le remboursement de l'Hôtel de police, le remboursement de la halle de fret et celui de votre footing pour l'inauguration de l'autoroute de contournement ! Laissez-moi quand même vous dire que l'agrandissement de Palexpo, c'est peu de chose part rapport à cela. (Applaudissements.)
M. Claude Blanc (PDC). Décidément M. Grobet dit n'importe quoi quand il est à court d'arguments. Il pense qu'il peut le faire, parce que personne n'est à même de vérifier ses allégations. Preuve en est, lorsqu'il m'accuse de lui avoir demandé l'expropriation des terrains nécessaires à la construction de la Coopérative à Satigny alors que j'étais conseiller administratif à Meyrin. J'étais à même de savoir qu'il mentait. Il ment toujours en pensant que vous le croirez. Arrêtez de le croire, je vous en prie ! (Protestations).
Le président. Mesdames et Messieurs, je me permets de vous rappeler qu'il est question d'un crédit d'étude pour Palexpo. J'aimerais que l'on revienne sur ce sujet. (Applaudissements.)
M. Claude Blanc. Monsieur le président, vous avez laissé dire des insanités à M. Grobet. Vous me permettrez tout de même de répondre !
Le président. Monsieur le député, je souhaite que l'on arrête les dérapages et que l'on traite des sujets qui sont à l'ordre du jour. Je vous laisse continuer, mais parlez-nous du projet de manière que nous puissions nous faire une opinion et voter le plus rapidement possible.
M. Claude Blanc. Monsieur le président, je ne peux pas accepter ce qui a été dit tout à l'heure par M. Grobet. Quand il prend comme exemple la Coopérative à Satigny, il oublie de dire que c'était en vertu de la loi sur la Zimeysa, pour laquelle l'Etat avait fait d'importants investissements en contrepartie desquels il s'était réservé le droit de disposer des terrains. M. Grobet ne dit les choses qu'à moitié ou en dit de complètement fausses. Je ne peux pas continuer à les accepter.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je remonterai encore plus loin dans l'Histoire que M. Blanc et que M. Grobet pour vous rappeler que les foires de Genève ont fait la richesse de notre cité jusqu'au moment où la concurrence de Lyon les a ruinées. A l'époque, la concurrence était facile, le roi de France donnait des ordres. Aujourd'hui, la concurrence dans la guerre économique revêt d'autres formes. Devant l'ampleur des questions que vous avez débattues, j'espère n'en oublier aucune, tout en étant le plus synthétique possible.
En ce qui concerne la méthode de travail, je ne peux pas laisser dire que j'ai exercé des pressions, que j'ai été autoritaire ou dictatorial dans les travaux de la commission des travaux, ce d'autant plus que votre commission est formée de députés qui, jusqu'à nouvel avis, ne laissent pas le Conseil d'Etat leur dicter la manière de travailler. A la sortie des travaux de la commission, il n'y avait aucune demande d'audition refusée, il n'y avait aucune question qui n'ait été posée et qui soit restée sans réponse. Il est vrai qu'il y a eu une méthode un peu curieuse, dans ce dossier, qui a consisté à essayer de l'instruire, non pas en commission, mais par des échanges de correspondance. Cela s'est avéré être une erreur et, fort heureusement, cela ne se reproduira pas. Il va de soi que l'on ne peut pas instruire un dossier par le biais de correspondances avec chacun des partis qui, cas échéant, poserait des questions différentes. Depuis, il a été donné réponse, je crois, à toutes ces questions.
J'aimerais attirer cependant votre attention sur le fait que nous sommes en présence de deux logiques différentes : si aujourd'hui nous n'avions pas la garantie que Telecom 2003 vienne dans l'hypothèse de la construction d'une halle 6, il est quasiment certain que nous ne vous proposerions pas cet équipement et qu'à partir de là se poserait la question d'autres investissements possibles. L'intérêt fondamental de la construction de la halle 6, c'est Telecom 2003. L'équation est simple : sans la halle 6, il n'y a pas Telecom 2003. D'où la question : est-ce suffisant pour accepter cet investissement ? Le Conseil d'Etat répond oui, sachant qu'en plus de Telecom 2003 nous avons de bonnes chances d'obtenir Telecom 2007, sans compter les Telecom interactifs dans l'intervalle. Nous avons des possibilités avec le Salon de l'Auto et nous espérons d'autres possibilités. Ne me demandez pas de vous dire avec précision lesquelles, car aucun organisateur de foires, de conférences ou d'expositions ne va s'engager aujourd'hui pour 2003 pour une halle qui n'est pas encore construite.
Vous avez indiqué, comme un élément de réflexion, Madame Dallèves-Romaneschi, que nous aurions dû penser à une solution provisoire. Nous l'avons fait. La solution provisoire avait comme inconvénient majeur celui de jeter des millions par les fenêtres, car il s'agissait véritablement de millions. Dresser une petite tente pour quelques convives, c'est facile et pas trop cher, mais aménager quelques dizaines de milliers de m2 sous tente, ce sont des travaux considérables et un tel investissement en pure perte n'en valait pas la peine.
Il a aussi été question évidemment de la solution alternative consistant à construire à côté de Palexpo et non pas sur l'autoroute. Cette possibilité avait trois défauts : un défaut sur le plan de l'exploitation, de la cohérence entre les halles 1, 5, la halle 7 de l'autre côté et la halle 6 sur le terrain de La Suzette qui, du point de vue de l'utilisateur, n'était pas très acceptable. On aurait pu passer outre cette objection. Plus sérieuse, l'objection fondamentale de la commune du Grand-Saconnex qui ne voulait pas de cet équipement à cet endroit. Enfin, la difficulté d'acquérir des terrains privés. Je suis d'accord, Monsieur Grobet, que l'expropriation existe, mais cela ne se fait pas toujours si vite et si bien. Par conséquent, cette solution, qui aurait pu être une alternative, n'a pas été considérée comme satisfaisante.
Vous m'avez adressé une critique, Monsieur Nissim, sur le fait que j'aurais, d'ores et déjà, tenu compte ou pas tenu compte des avantages respectifs de tel ou tel projet déposé au département. Vous fantasmez complètement. Les projets qui sont en concours sont examinés sur la base de critères objectifs. Les résultats seront publiés, chacun des concurrents connaît ces critères, connaîtra la manière dont il est évalué. On ne peut pas tout d'un coup inventer des positions que j'aurais prises sur tel ou tel dossier. Je vous signale, entre parenthèses - et c'est une expérience nouvelle pour moi - que c'est la première fois, évidemment vu l'importance de ce chantier, que je reçois un nombre de téléphones, amicaux bien entendu, aussi considérable pour me recommander tel ou tel projet. Plus j'en reçois, plus cela m'est en définitive indifférent.
La question fondamentale, Mesdames et Messieurs, c'est évidemment celle du coût. Nous sommes tout à fait certains que, si la totalité du coût de cet ouvrage devait être à charge du contribuable genevois, l'exercice serait difficile. Nous entendons parvenir à une répartition qui soit d'un tiers pour l'Etat, d'un tiers pour la Confédération et d'un tiers pour les privés. Nous pouvons vous annoncer d'une manière tout à faire sûre que la Confédération entre en matière sur ce schéma. Restent par conséquent les privés. Monsieur Grobet, vous parlez des hôteliers, c'est une excellente idée. Bien entendu, d'autres milieux qui bénéficient d'une telle infrastructure devront également participer. Je ne suis pas en mesure aujourd'hui de vous donner plus de détails, mais le jour où le Conseil d'Etat reviendra avec un crédit de construction, il est évident que ce ne sera pas avec un crédit correspondant au montant total des travaux tels qu'ils sont décrits aujourd'hui, mais avec un crédit qu'il espère être de l'ordre du tiers. Etant rappelé que le chantier se déroule sur plusieurs années, si on admet un volume d'investissements qui devrait rester stable pour soutenir l'économie genevoise, le tiers du coût total de cet investissement est dès lors parfaitement raisonnable et supportable.
Mesdames et Messieurs les députés, c'est un dossier qui peut se prêter à de fort longs débats, on le voit, on l'a vu et on le verra. J'espère n'avoir oublié aucun élément essentiel du débat. Je vous répète que, d'une part, c'est un investissement qui se justifie par Telecom et ses dérivés et que, d'autre part, nous arriverons à vous présenter un financement qui ne mette à charge de l'Etat de Genève que le tiers, nous l'espérons, de l'investissement total. C'est la raison pour laquelle je vous demande de voter ce crédit d'étude.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7878)
ouvrant un crédit d'étude en vue de la réalisation d'une plate-forme par-dessus l'autoroute et de la construction d'une nouvelle halle du Palais des Expositions au Grand-Saconnex
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit d'étude
1 Un crédit d'étude de 7 557 000 F (y compris renchérissement et TVA) est ouvert au Conseil d'Etat pour l'étude en vue de la réalisation d'une plate-forme par-dessus l'autoroute et de la construction d'une nouvelle halle du Palais des Expositions au Grand-Saconnex.
2 Le montant indiqué à l'alinéa 1 se décompose de la manière suivante :
étude de la plate-forme par-dessus l'autoroute
et de la halle d'exposition y compris le devis général 4 960 000 F
étude partielle de la 2e étape de la halle comprenant
le hall d'accueil, le restaurant, le centre de congrès,
les salles de conférences et le parking jusqu'à la requête
en autorisation de construire 2 070 000 F
TVA 457 000 F
renchérissement 70 000 F
Total 7 557 000 F
Art. 2 Budget d'investissement
Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 1999 sous la rubrique 79.90.00.508.09.
Art. 3 Financement et couverture des charges financières
Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt dans le cadre du volume d'investissement "; nets-nets " fixé par le Conseil d'Etat, dont les charges financières en intérêts et en amortissement sont à couvrir par l'impôt.
Art. 4 Amortissement
L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.
Art. 5 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
Vu les dispositions de la loi sur l'exercice des droits politiques donnant la possibilité à des partis et des groupements de déposer des prises de position à l'occasion des votations cantonales leur donnant le droit de faire connaître leur recommandation de vote dans la brochure explicative envoyée par l'Etat aux citoyennes et citoyens et de bénéficier d'un droit d'affichage sur les emplacements spéciaux mis à disposition des dépositaires de prises de position, qui sont répartis proportionnellement entre ces derniers de manière à ce que chaque groupement bénéficie d'un nombre égal de places d'affichage.
Vu la décision du Conseil d'Etat de publier une édition spéciale de la Feuille d'avis officielle à l'occasion de la votation du 20 décembre portant sur l'article constitutionnel sur l'assainissement des finances cantonales, du fait de l'importance de cette votation.
Attendu que cette innovation, qui s'inspire de la Feuille d'avis officielle publiée à l'occasion des élections et accordant à chaque dépositaire de liste une place égale pour présenter ses candidats et son programme, a été saluée favorablement en tant que démarche favorisant le débat démocratique et, par là, la participation de la population aux prises de décisions soumises en votation populaire, ce d'autant plus que nombre d'associations ont des moyens financiers modestes, qui ne leur permettent pas, contrairement à certains milieux économiques, de mener campagne.
Attendu que le Conseil d'Etat a, toutefois, décidé que l'édition spéciale de la FAO comporterait une page pour les partisans de l'article constitutionnel et une page pour ses opposants, ce qui constitue une inégalité de traitement manifeste entre les dépositaires de prises de position, puisque seuls six d'entre eux recommandent de voter OUI et que 17 d'entre eux recommandent le NON.
Que la décision prise par le Conseil d'Etat a pour conséquence de donner trois fois plus d'espace dans la FAO à chaque groupement recommandant le OUI pour exprimer ses arguments qu'à chacun des groupements préconisant le NON, ce qui est inacceptable et contraire au principe de l'égalité de traitement qui s'impose tout particulièrement en matière de votations et d'élections.
Que cette décision est d'autant plus choquante qu'on vient d'apprendre - ce qu'on ne pouvait pas s'imaginer lorsque le Conseil d'Etat a annoncé la parution d'une FAO spéciale destinée à présenter les points de vue des divers groupements intéressés - que ce dernier allait s'accorder une page entière de cette FAO pour présenter ses arguments, aggravant ainsi encore davantage le déséquilibre entre partisans et adversaires de l'article constitutionnel, lequel avait déjà été rompu dans la brochure explicative adressée aux électrices et électeurs dont les 3/4 du contenu portent sur les arguments en faveur de l'objet mis en votation.
Que les opposants à l'article constitutionnel ont des motivations très diverses, que le Conseil d'Etat avait du reste invoquées pour tenter de justifier son refus initial de donner une place aux opposants dans la brochure explicative envoyée aux électrices et électeurs, ce qui justifie d'autant plus la revendication de 15 groupements préconisant le NON de bénéficier proportionnellement de la même place rédactionnelle que les groupements favorables au projet mis en votation et leur décision de saisir le Tribunal administratif d'un recours à cet effet, utilisant ainsi les droits que leur accorde la loi.
Que ces 15 organisations ont de plus rédigé leur texte dans le délai imparti en les regroupant dans une mise en page commune, selon une des suggestions du Conseil d'Etat, ce qui a exigé beaucoup de travail en raison du délai particulièrement bref (une semaine !) pour remettre les textes à la chancellerie.
Que c'est avec stupéfaction que ces organisations ont appris au moment de la remise de leurs textes que le Conseil d'Etat avait décidé d'annuler l'édition d'une FAO spéciale pour la votation du 20 décembre, en tentant de leur en imputer la responsabilité.
Que cette décision, qui vise à priver les opposants à l'article constitutionnel mis en votation de faire connaître leur opinion dans le seul média officiel, servant en temps ordinaire à véhiculer les messages du Conseil d'Etat, est inadmissible.
Le GRAND CONSEIL,
par ces motifs
invite le Conseil d'Etat
- à respecter les engagements qu'il a pris et à publier, comme prévu, l'édition spéciale tous ménages de la Feuille d'avis officielle consacrée à la votation du 20 décembre 1998 en donnant dans celle-ci à chaque dépositaire de prise de position une surface rédactionnelle égale pour exprimer ses arguments.
Débat
M. Pierre Vanek (AdG). Il est certain que cette motion ne demande guère à être défendue. J'aurais pu m'abstenir, mais je dirais quand même quelques mots à ce propos. Cette motion concerne la publication d'un supplément tous ménages de la «Feuille d'avis officielle» à l'occasion de la votation du 20 décembre 1998. Je ferai un peu d'Histoire en ne remontant que huit jours en arrière. Il y a huit ou neuf jours, un certain nombre d'organisations, de partis, de groupements qui avaient pris position sur cet objet de votation ont reçu une lettre du chancelier indiquant que le Conseil d'Etat avait décidé de publier, dans l'intérêt du débat et de l'information des citoyens autour de cet objet important, une Feuille d'avis officielle pour permettre à chacun de s'exprimer. Certes, le Conseil d'Etat n'était nullement obligé de prendre une telle mesure. Cela ne se fait normalement pas en matière de votation. Cela se fait en matière d'élection où toutes les listes ont droit à un espace pour expliquer leur programme de manière très résumée.
Cette décision en soi était effectivement quelque chose que l'on pouvait saluer, même si on pouvait regretter que la communication de cette décision n'ait eut lieu qu'il y a huit jours. L'information aurait pu nous être transmise il y a un mois, au moment où nous avons adopté le projet de loi constitutionnelle en question et nous n'aurions pas été, ce soir, dans l'urgence pour débattre des conditions de cette publication.
La décision du Conseil d'Etat exprimée par le chancelier a été adressée à vingt-trois groupements ou partis de cette République. Ces vingt-trois groupements ou partis sont ceux qui ont pris position dans les délais, certes extrêmement brefs, mais officiellement dans les délais impartis et, pour la majorité d'entre eux, avec bien entendu cinquante signatures de citoyennes et de citoyens à l'appui de cette prise de position. Nous avons voté un jeudi ou un vendredi ce projet de loi constitutionnelle et, le lundi suivant en huit, le 2 novembre, il fallait déposer cette prise de position. Parmi ces prises de position, il y avait bien entendu celle de l'ensemble des partis de ce Grand Conseil, mais aussi d'un certain nombre de groupements extérieurs au parlement; il est parfaitement normal que ceux-ci veuillent pouvoir se faire entendre. C'est d'ailleurs dans cet esprit-là, j'avais cru le comprendre, que le Conseil d'Etat à l'époque avait convoqué la table ronde, en disant que la société civile, en dehors des partis dans l'enceinte de ce parlement, devait pouvoir s'exprimer. Tout cela s'est ratatiné par la suite et l'accord final a été signé entre les partis. Puis, le projet de loi a été voté par un certain nombre de partis dans cette enceinte, mais il est normal qu'au moment où on passe au vote populaire, un certain nombre d'organisations veuillent s'exprimer.
Le problème est que la décision prise comportait une part d'arbitraire que je qualifierai de scandaleuse et d'inacceptable. Le Conseil d'Etat a décidé - non pas dans sa grande sagesse, mais dans sa grande arrogance - que les partisans du oui, donc les quelque six partis et groupements de cette République qui ont pris position en faveur du oui, auraient droit dans cette édition spéciale de la Feuille d'avis, Mesdames et Messieurs, à plus de trois fois l'espace octroyé aux autres groupements, partis ou associations qui ont pris position pour le non. Cette manière de faire est parfaitement inacceptable... (Brouhaha. La salle se retrouve dans l'obscurité. Le micro est coupé. Durant un instant, M. Pierre Vanek poursuit son intervention hors micro. Le son est rétabli.)
(L'orateur est interpellé.)
M. Pierre Vanek. Ça sort du coeur, Monsieur Annen, c'est pour cela que je parle fort. Je vais parler tout doucement si cela vous dérange. Je disais que M. Ramseyer, qui, je présume, représentait le Conseil d'Etat en la matière, a décidé tout simplement d'annuler, tant pis pour le débat démocratique. Cela est inadmissible sur le fond, d'autant que le Conseil d'Etat se comporte, ainsi que le disait mon ami John Dupraz du dernier Conseil d'Etat, comme une poule qui traverse la route : il voit un truc, il va dans un sens, il en voit un autre, il va dans l'autre sens. D'après lui, il y a une semaine, c'était utile et nécessaire de publier une FAO, aujourd'hui ça ne l'est plus ! Ce n'est pas très sérieux et cela donne une image un peu déplorable de notre gouvernement. C'est aussi particulièrement scandaleux, parce qu'un certain nombre d'associations et de groupements ont travaillé, se sont concertés, conformément aux recommandations que nous avions reçues du chancelier. Pour publier ce texte dans la FAO, les gens se sont rencontrés, des militants, des bénévoles ont écrit des textes, les ont rabotés pour les insérer dans le petit espace prévu. Ils ont pris la peine de faire faire la mise en page de ce matériel que j'ai là en réduction, et c'est moi-même d'ailleurs qui étais chargé de mettre cela en page pour les quinze groupements... (Chahut. Le président agite la cloche.)
Le président. Nous avons le temps, Mesdames et Messieurs les députés, mais je vous propose tout de même d'être un peu plus efficaces. Vous avez épuisé votre temps de parole, Monsieur Vanek, je vous prie de conclure en quelques mots et ensuite nous passerons la parole aux orateurs suivants. Mesdames et Messieurs, essayez de rester calmes et d'écouter. Je ne suis pas sûr que ceux qui ont éteint la lumière aient accéléré les travaux...
M. Pierre Vanek. La décision du Conseil d'Etat n'a pas été communiquée à ces groupements et partis. J'en ai été informé par hasard. A l'occasion d'un coup de téléphone que j'ai passé à la chancellerie pour dire que nous allions déposer ce matériel, une secrétaire m'a dit que le Conseil d'Etat avait annulé. C'est scandaleux. Les groupements qui ont pris position pour ce non de gauche, à l'exception d'un qui est un groupement ad hoc comme celui de M. Rodrik, ne sont pas des groupements qui ont été multipliés pour l'occasion, ce sont des partis, des syndicats, des associations qui font un travail régulier et constant sur un certain nombre de questions sociales...
Le président. Monsieur Vanek, je vous prie de conclure...
M. Pierre Vanek. Mesdames et Messieurs, cette motion invite simplement le Conseil d'Etat à respecter les engagements qu'il a pris et à publier comme prévu l'édition spéciale de la FAO...
Le président. Monsieur Vanek, je vous interromps, votre intervention est terminée. Je donne la parole à M. Albert Rodrik.
M. Albert Rodrik (S). Décidément la vie politique dans ce canton est pleine de péripéties. Chaque semaine amène son lot et cette semaine nous avons eu droit au vaudeville du Conseil d'Etat. Effectivement, ce que le Conseil d'Etat nous a servi cette semaine, c'est du vaudeville. On claque les portes. «Les portes claquent», vous connaissez au Conseil d'Etat ? C'est exactement ça. Dans votre sagesse vous aviez trouvé que l'enjeu du 20 décembre valait une Feuille d'avis supplémentaire et que ce même enjeu pour Genève méritait que le citoyen soit informé. C'était une excellente initiative. Mais souvenez-vous ! Vous ne vouliez pas donner de la place aux opposants dans la brochure officielle en prétextant qu'il y aurait la FAO.
Il a fallu des interpellations urgentes pour vous rappeler que l'une et l'autre n'étaient pas identiques. Vous en êtes convenus, vous avez trouvé une solution pour la brochure officielle. Aujourd'hui, la politique d'information devient la «crisette». La crisette du président du Conseil d'Etat n'est pas une politique et en tout cas n'a aucun rapport avec l'importance de l'enjeu. Quand j'ai reçu - comme déposant de liste - la lettre de la chancellerie, je me suis dit : «Que voilà une jubilation technocratique !». Il y avait 1/17e pour les opposants, 1/6e pour ceux qui disaient oui, et puis - l'informatique étant odieuse - on donnait le nombre de caractères, on donnait la dimension de l'écran. Toutes ces choses nous ont beaucoup éloignés de l'égalité de traitement et du besoin de laisser aux citoyens la possibilité de s'exprimer.
Je ne suis pas sûr fondamentalement d'être d'accord avec l'égalitarisme arithmétique de l'Alliance de gauche, mais ce n'est pas pour ça que je me suis levé, c'est pour dire : Mesdames et Messieurs du Conseil d'Etat, si vous êtes à peu près convaincus de l'importance de l'enjeu du 20 décembre, vous ne pouvez pas vous comporter comme cela, parce que c'est ridicule. Cette Feuille d'avis est le minimum dont les citoyens ont besoin pour se déterminer quand, chez eux, ils vont remplir le bulletin. Cela dit, je le répète, je ne suis pas personnellement convaincu que la formule proposée à hauts décibels par notre ami Vanek pour traiter cela équitablement, soit la bonne.
Peut-être avons-nous besoin d'une jurisprudence et, surtout, nous avons besoin probablement de quelques lignes de conduite que seul le Tribunal administratif peut nous donner, mais de grâce, quel que soit le nombre de signes et la grandeur de l'écran, que cet acte d'information civique ait lieu ! Trouvons un système simple qui permette à chacune de ces listes de dire ce qu'elle a à dire. Est-ce que la dimension, les centimètres et les caractères ont plus d'importance que l'enjeu de ce que l'on veut défendre ? Est-ce que vous croyez moins que nous ou moins que les opposants à l'enjeu du 20 décembre ? Rendez-vous compte de la stupidité de l'équilibre parfait par rapport à l'importance de ces affaires. Que cette feuille sorte, qu'il y ait une place pour tout le monde et finissons-en avec ce genre de vaudeville. La présidence du Conseil d'Etat va changer. J'espère que nous aurons d'autres formes de comportement. (Applaudissements.)
M. Roger Beer (R). Après les trois minutes de M. Rodrik et les quarante-cinq minutes de M. Vanek, je serai très bref. En ce qui me concerne, je pense que les gens ne vont pas lire cette Feuille d'avis et j'étais plutôt d'avis de saluer la mesure concrète de notre Conseil d'Etat en vue d'économiser enfin quelque chose avant la votation ! (Rires.)
Le président. Je reçois une motion d'ordre proposant de cesser le débat et de passer au vote. Cette motion d'ordre, pour entrer en vigueur, doit être approuvée à la majorité des deux tiers.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est adoptée.
La proposition de motion est mise aux voix.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Cette proposition de motion est rejetée par 39 non contre 35 oui.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Il n'est pas nécessaire d'exposer ici en long et en large les motifs pour lesquels cette résolution est déposée ce soir en urgence, il nous suffit en effet à toutes et à tous de lire la lettre bouleversante de Mme Azra Ramic qui a été adressée à tous les députéEs par l'entremise de l'EPER (Entraide Protestante) et de rappeler que, pour les quatre enfants qui y ont vécu pendant quatre ans, leur véritable maison est à Versoix.
La famille Ramic ne demande aucune aide financière, elle dispose de sa propre voiture pour rentrer à Genève et peut entièrement s'assumer une fois de retour ici. De nombreuses personnes se sont déjà déclarées prêtes à se porter garantes de cette famille. La paroisse de Versoix s'engage par ailleurs à rembourser à l'Etat la totalité du montant qui avait été déboursé comme "; aide au départ ".
Les Bosniaques ont été dupés par cette illusoire ";aide au départ" attribuée par la Confédération. La démonstration de l'échec catastrophique du rapatriement dans leur pays d'origine de la famille Ramic, rapatriement pourtant "; garanti depuis la Suisse ", nous oblige à les aider par une solution rapide, digne de notre responsabilité et de notre devoir d'assistance. Il y a eu abus de confiance, à nous de réparer cette inhumanité en leur donnant sans plus tarder le droit de séjourner en Suisse sans restriction aucune, par l'octroi d'un permis de séjour ou d'un permis B humanitaire.
C'est pourquoi nous vous invitons à voter cette résolution sans aucune hésitation.
Débat
Mme Jeannine de Haller (AdG). Nous avons déposé cette résolution... (Brouhaha.) Il s'agit d'une situation humainement très douloureuse et je trouve que vous pourriez vous taire pour écouter ce qui suit. Nous avons déposé cette résolution pour que la famille Ramic, rentrée en Bosnie avec une aide au retour totalement illusoire, puisse revenir au plus vite à Genève afin de retrouver ici une vie décente, afin qu'elle puisse retrouver un logement et du travail et que leurs quatre enfants puissent retourner à l'école. En guise de rappel, je voudrais juste citer quelques extraits de la lettre bouleversante que Mme Ramic a envoyée à Genève et que vous avez tous reçue.
«En 1997, nous avons reçu des lettres de Berne, des avertissements pour le retour en Bosnie avec des informations sur l'aide à la réinstallation. Dans chaque lettre, il était indiqué que tous les réfugiés devaient rentrer au plus tard à la fin 1998. Celui qui ne s'annonçait pas devait quitter la Suisse, mais sans aide. Nous craignions que la police nous chasse par la force. Nous n'aurions pas supporté de nous faire chasser pour la deuxième fois, de nous faire expulser de force comme du bétail. C'était difficile de quitter l'appartement à Versoix; nous étions à la maison. Notre ville en Bosnie n'est pas une ville ouverte. Depuis que nous y sommes, nous ne pouvons pas retourner dans notre ville d'origine. C'est trop risqué. Nous ne savons où vivre. Mes enfants n'ont pas pu être inscrits à l'école cette année car les écoles sont divisées par ethnie. Les maisons n'ont pas d'eau, pas d'électricité, pas de fenêtres, pas de portes. Arrivés dans la maison, vous réparez et peu après le propriétaire de la maison réapparaît accompagné de la police et vous expulse. Du travail, il n'y en a pour personne.» Elle termine en disant : «Nous ne demandons pas d'aide financière, tout ce que nous demandons est un permis de séjour dans votre pays. Permettez-nous de rentrer pour que mes enfants puissent continuer leur scolarité, pour que je puisse retrouver le sourire sur leur visage. Avec mon mari, nous trouverons du travail pour subvenir à nos besoins. Cette lettre est notre dernier espoir.»
M. Michel Halpérin (L). Il y a des histoires qui crèvent le coeur, celle-là en est une. Simplement, je trouve qu'il y a un peu de confort moral à se faire le porte-parole irresponsable - et j'expliquerai pourquoi je choisis ce terme d'irresponsable - de ce type de démarche. Nous savons tous que la responsabilité réelle de ce genre de décision ne nous appartient pas. Par conséquent, nous nous offrons ce luxe de nous donner bonne conscience en faisant faire des choix aux autres, qu'ils font sur la base d'autres critères que ceux que nous leur demandons; nous nous mettons simplement en règle avec nous-mêmes à très bon marché et sans aucun effort de réflexion réelle. Une chose est ici, dans cette enceinte, d'essayer de conduire une politique cohérente en matière d'accueil de réfugiés et de droits de l'homme, une autre chose me paraît être de s'ingérer directement dans la responsabilité exécutive en faisant au cas par cas cette résolution-ci, la prochaine et puis toutes celles que vous voudrez, démarches individuelles qui toutes méritent notre attention, mais dont aucune ne relève de notre compétence.
M. Pierre Meyll (AdG). Suite à mon intervention auprès du Conseil municipal de Versoix, nous avons recueilli les signatures de onze conseillers municipaux et de deux conseillers administratifs qui se sont adressés au Conseil d'Etat. De nombreuses lettres ont été adressées au Conseil d'Etat concernant cette famille. J'ai reçu de nombreux téléphones promettant d'apporter de l'aide, des parrainages, des dons de groupements, de paroisses. Je pense que je vais remettre tout ça en main de l'EPER afin qu'elle puisse mieux gérer le dossier que je ne saurais le faire. Je suis un peu débordé par le nombre de téléphones et de lettres.
Il faut quand même admettre que cette situation est le résultat d'un abus de confiance : on renvoie des gens qui n'ont ensuite aucun moyen de subsister sur place, qui ne retrouvent plus rien, ni leurs marques, ni leur terre. Il est entendu que l'on pourra se trouver face à de nombreuses personnes dans cette situation, mais je crois qu'il est de notre devoir - c'est ainsi que je le ressens - d'ouvrir la porte à ceux qui ont été nos voisins, qui n'ont demandé que le minimum de secours, qui peuvent être accueillis par leurs familles encore ici. Je crois que, là, on doit ouvrir la porte à celui qui frappe.
Il est bien entendu que nous ne pourrons pas accueillir tout le monde, mais accueillons au moins ceux qui se permettent de frapper, qui osent frapper, qui ont fait partie de notre communauté. J'ai des gosses à Versoix et vraiment je ne comprends pas la loi, sur ce plan je suis contre la loi et je crois qu'il faut faire ce qui est en notre pouvoir. Cette demande n'est peut-être pas dans les normes habituelles du cheminement que doit suivre un dossier, mais que le coeur parle, s'il vous plaît ! (Applaudissements.)
M. Luc Gilly (AdG). J'aimerais dire à M. Halpérin que, s'il a partiellement raison dans son analyse, ce n'est en tout cas pas ce soir que nous allons entamer un débat sur la politique d'asile et la violence sur la planète. Monsieur Halpérin, vous devez savoir - ou le parlement en général - que passablement de personnes ont été forcées de rentrer; elles n'auraient pas de problèmes, leur a-t-on assuré. Elles ont reçu 2 000 francs d'argent de poche - c'était peut-être trop - mais le résultat est que ces gens n'ont rien trouvé en arrivant et continuent à ne rien trouver; de plus, ils sont pourchassés.
J'aimerais rejoindre ici tous les amis qui soutiennent cette résolution. J'espère que nous n'aurons pas d'abstention, ni de non sur cette question. C'est une histoire de coeur, de compréhension. Ces gens ont été trompés par les autorités suisses, entre autres, qui leur assuraient que tout allait bien se passer, alors que certains rapports affirmaient le contraire - mais évidemment lorsque ce sont les petits qui donnent des informations ils ont toujours tort. Nous savions par les associations sur place que les renvois étaient dangereux, qu'ils étaient délicats, qu'il fallait faire attention et prendre des mesures. La Suisse officielle a démenti ces informations en disant que ces gens pouvaient rentrer; le voyage leur a été payé. Conclusion : c'est la misère. D'autres personnes vont peut-être venir frapper à notre porte, mais dites oui aujourd'hui dans ce cas, s'il vous plaît.
Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat.
Elle est ainsi conçue :
Résolution(389)
pour le retour immédiat de la famille Ramic à Genève
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant:
- la situation désespérée dans laquelle se trouvent actuellement Azra et Mirzad Ramic ainsi que leurs quatre enfants, suite à leur retour "; volontaire " en Bosnie au mois de juin 1998: à la veille de l'hiver, ils n'ont ni logement ni travail et les enfants n'ont aucune possibilité d'aller à l'école ;
- les garanties de logement données par les autorités fédérales à cette famille et à toutes les personnes qui ont cédé à l'énorme pression exercée sur elles d'accepter l'aide au départ, alors même que sur place, en Bosnie, les maisons promises n'existent pas ;
invite le Conseil d'Etat
- à demander à Berne d'octroyer avant la fin du mois de novembre un permis de séjour à la famille Ramic ;
- à octroyer lui-même un permis B humanitaire à la famille Ramic au cas où Berne n'accéderait pas à sa demande ;
- à tout mettre en oeuvre pour que cette famille puisse se retrouver au plus vite dans la situation précédant son départ de Suisse.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Ce n'est pas la première fois que vous recevez une telle résolution urgente, et ce ne sera, hélas, pas la dernière.
Il y a urgence, parce qu'une fois de plus une famille qui vit à Genève depuis de longues années - il est vrai au noir - est menacée d'expulsion dans les prochains jours.
Depuis plusieurs années, l'association "; Terre des femmes, terre des enfants, tous respectés ", dirigée par Mme Geneviève Piret, a alerté les autorités cantonales et fédérales sur la situation de cette famille d'origine péruvienne.
Celle-ci se compose d'un père, d'une mère et de trois enfants.
Le père et son épouse résident à Genève depuis 1991 avec leur fillette, qui suit actuellement sa 5e année. Leurs deux autres fils ne les ont pas accompagnés lorsqu'ils se sont enfuis du Pérou pour échapper au terrorisme, à la subversion, à l'inégalité, à l'injustice, afin de chercher un avenir meilleur pour eux et pour leurs enfants. Ils vivent actuellement chez leur grand-mère au Pérou.
La famille est arrivée en Suisse, où elle a des attaches, en 1991. Ces attaches sont multiples et bien établies. Le père a une grand-mère suisse, et deux soeurs vivant en Suisse, de nationalité suisse ou mariée avec un citoyen suisse. Chacune a deux filles. La mère a une soeur vivant à Genève, où elle est mariée avec un citoyen espagnol. Le couple a également deux filles.
Le père a d'abord commencé à suivre des cours à la Faculté des sciences de l'Université de Genève en qualité d'auditeur libre. Passionné d'horticulture et de botanique, il s'est inscrit à l'Association des amis du Jardin botanique.
Parallèlement, il a travaillé à Genève dès 1991 dans une entreprise de nettoyage. Son épouse a commencé à travailler en 1993 dans la même entreprise où ils ont été tous les deux très appréciés. Ils ont payé régulièrement leurs impôts, leurs cotisations sociales et leurs assurances. De nombreuses lettres de recommandation d'employeurs, comme celle de notre ancien collègue M. Pierre Kunz, ou celle du pasteur Sordet, font l'éloge de la ponctualité, du dévouement et de la qualité du travail du père.
L'association de Mme Piret s'est portée garante de cette famille et l'a hébergée. Son action a porté des fruits puisque le père avait obtenu d'entrer le 19 octobre 1998 au Centre de Lullier qui l'avait inscrit dans son école d'ingénieurs pour une formation d'ingénieur agronome HES orientation "; Production horticole ". Ses études devaient durer, comme en témoigne l'attestation de préinscription obtenue par le père, jusqu'au printemps 2002. Son inscription était évidemment conditionnée à l'obtention d'un permis de séjour. Au lieu de cette perspective, et malgré une pétition, des lettres aux autorités, des interventions du conseiller national Peter Tschopp à Berne, etc., le père a été placé en 1997 dans un avion pour Lima et sa femme et sa fillette sont restées seules à Genève. Le recours interjeté par le père contre la mesure qui le frappait n'a pas eu d'effet suspensif.
Aujourd'hui, c'est la mère et sa fillette qui sont à leur tour menacées d'expulsion.
La fillette a pourtant ses racines à Genève, une grande partie de sa vie d'enfant, toute sa scolarisation, ses tantes et ses six cousines. Elle est très bien intégrée à Genève où elle participe régulièrement à la Course de l'Escalade, fait de l'athlétisme et suit des cours de piano.
La mère, qui a été abusée à l'âge de quatre ans par un membre de la famille de sa mère, suit actuellement un traitement chez un psychologue de notre ville.
Le père sait que sa seule chance de poursuivre des études qui le mèneront à une profession est désormais à Genève et il attend notre décision pour y revenir.
Travaillant à Genève depuis sept ans, une grand-mère suisse, des soeurs mariées en Suisse, une fillette grandie en Suisse..., la loi et la politique des trois cercles ne veulent pourtant pas de cette famille. Nous proposons au Grand Conseil, en raison de la situation très particulière de cette famille, de ses liens avec notre pays, de l'ampleur du soutien qu'elle a reçu, de demander au Conseil d'Etat d'octroyer au père un permis humanitaire de formation ou un permis B d'étudiant, qui lui permette d'accomplir ses études à Genève et d'y conserver près de lui son épouse et sa fillette.
Nous vous remercions d'accepter notre proposition.
Débat
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). Vous avez tous lu les considérants et l'exposé des motifs de cette invite demandant au Conseil d'Etat de régler la situation de cette famille. C'est d'une demi-famille d'ailleurs dont il est question : le père a été expulsé il y a une année après sept ans passés dans notre pays comme travailleur péruvien au noir. Sa femme et sa fillette sont toujours ici. Cette dernière a passé une grande partie de son enfance chez nous et est régulièrement scolarisée. Cette famille a des attaches en Suisse par la grand-mère et par trois soeurs mariées en Suisse. Les conditions étaient remplies pour que cette famille se regroupe en Suisse. La famille avait décidé que le père ferait des études. Il était pré-inscrit au centre horticole de Lullier pour suivre une formation d'ingénieur-agronome. Il appartient à tout étranger d'obtenir le droit de poursuivre des études en Suisse, pour autant qu'il reçoive un permis B lui octroyant le statut d'étudiant ou éventuellement, si on le juge nécessaire, un permis B humanitaire de formation.
C'est ce que nous demandons aujourd'hui de faire. Au-delà du cas individuel, Monsieur Halpérin, dont je vous accorde bien volontiers qu'ils sont en train de se multiplier, il y a eu autour de cette famille une énorme mobilisation à Genève, non seulement parmi les habitants du quartier, mais également à l'école. Il y a eu une énorme mobilisation également de la presse au moment de l'expulsion du père. Cette histoire est tellement ancienne maintenant ! Le père a fait la preuve qu'il pouvait être accepté par ses résultats scolaires dans cette école.
Nous demandons au Conseil d'Etat d'octroyer ce permis d'étudiant ou ce permis humanitaire. Le permis d'étudiant est octroyé quotidiennement à des étrangers qui arrivent, je vous l'accorde, parfois plus légalement en Suisse. Le père était là depuis sept ans mais il s'est comporté depuis sept ans comme un citoyen extrêmement honorable. Toutes les attestations de travail le prouvent, y compris celle de notre ancien collègue, Pierre Kunz, qui n'avait pas l'habitude de protéger comme nous, régulièrement, les étrangers en situation illégale. Je vous demande ce soir avec les autres signataires de ce projet de résolution de nous entendre.
Mise aux voix, cette résolution est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat.
Elle est ainsi conçue :
Résolution(390)
en faveur d'un permis de séjour pour la famille concernée
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève considérant:
- la longue durée de la présence de la famille concernée à Genève ;
- la régularité de sa situation de travailleur du père et celle de sa femme certes au noir, mais s'acquittant de ses impôts, de ses contributions sociales ;
- la préinscription du père comme étudiant au Centre de Lullier ;
- l'intégration de sa fillette à l'école ;
- l'émotion suscitée parmi ceux qui la connaissent, par le sort de cette famille,
- le caractère d'urgence humanitaire de cette situation,
invite le Conseil d'Etat
à régulariser la situation de cette famille pour le temps nécessaire aux études du père au Centre de Lullier, et à octroyer au père, à son épouse et à sa fillette un permis de séjour à Genève.
La séance est levée à 23 h 55.