République et canton de Genève

Grand Conseil

No 55/IX

Jeudi 4 décembre 1997,

nuit

Présidence :

M. René Koechlin,président

La séance est ouverte à 20 h 45.

Assistent à la séance : MM. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat, Claude Haegi, Olivier Vodoz, Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

Le président. Je vous prie de rester debout, Mesdames et Messieurs les députés, et de bien vouloir observer un instant de silence à la mémoire des victimes du drame de Louxor. (Les députés observent une minute de silence.) Je vous remercie.

2. Personnes excusées.

Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Philippe Joye, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes Marianne Grobet-Wellner, Véronique Pürro, Elisabeth Reusse-Decrey et Micheline Spoerri, députées.

3. Annonces et dépôts :

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Néant.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

RD 286
4. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur l'exercice 1996 de la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI). ( )RD286

Il est rappelé en préambule que la Fondation des terrains industriels Praille et Acacias (FIPA) est devenue la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI) à la suite d'un changement de raison sociale, intervenu aux termes de la loi du 10 octobre 1996.

L'activité de la Fondation au cours de l'exercice 1996 est décrite dans le rapport de gestion ci-joint, approuvé par le Conseil d'Etat le 16 juin 1997.

La situation financière de la FTI est bonne.

- Le résultat d'exploitation, avant les attributions statutaires aux fonds d'amortissements, de renouvellement et d'acquisition de terrains industriels, s'élève à 8 442 827,13 F (8 316 274,58 F en 1995).

- Le solde du résultat d'exploitation après les attributions statutaires, de 5 800 000 F, constitue la rétribution de la dotation de l'Etat de Genève (5 600 000 F en 1995).

La Fondation a poursuivi en 1996 l'exécution des mandats qui lui ont été confiés:

- par l'Etat de Genève,

 en vue de l'équipement, de la mise en valeur et de la gestion des zones industrielles de Meyrin-Satigny (parties reliées au rail et non reliées au rail), de Plan-les-Ouates et de Vernier/Mouille-Galand, et

 en vue de fournir au Conseil d'Etat des préavis circonstanciés lors de l'application éventuelle du droit de préemption de l'Etat de Genève, dans les zones précitées, en cas d'aliénation d'immeubles (L 1 45),

- par la Ville de Genève,

 en vue de la gestion des terrains industriels qu'elle possède à Vernier, entre la cité du Lignon et l'ancienne usine à gaz.

Le Conseil d'Etat vous recommande d'approuver le rapport de gestion de la FTI pour l'exercice 1996.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

PL 7714
5. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur la police (F 1 05). ( )PL7714

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article unique

La loi sur la police, du 26 octobre 1957, est modifiée comme suit:

Art. 6, al. 1, lettres m et n (nouvelles, les lettres m et n anciennes devenant les lettres o et p)

m) le service de coordination et de gestion des systèmes d'information de la police;

n) un officier chargé de la sécurité des systèmes d'information;

Art. 36, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Les peines disciplinaires qui peuvent être infligées aux fonctionnaires mentionnés à l'article 6, alinéa 1, lettres a à o, sont, suivant la gravité du cas:

a) l'avertissement;

b) le blâme;

c) les services hors tour;

d) la suspension pour une durée déterminée, sans traitement;

e) la rétrogradation au rôle matricule;

f) la dégradation;

g) la révocation.

Art. 45, lettres a et e (nouvelle teneur)

Les traitements sont fixés comme suit:

a) chef de la police, chef d'état-major, chef de la sûreté, commandant de la gendarmerie et commissaire:

 le traitement est fixé par le Conseil d'Etat, en application des articles 4, alinéa 2, 11 et 12 de la loi citée à l'article 44, alinéa 1;

e) officier de presse  cl. 20 (dès pos. 6)

 officier psychologue  

 officier chargé de la sécurité  des systèmes d'information  cl. 22 (pos. 7 à 11)

 officier de prévention   cl. 18 (pos. 9 à 11)

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. Introduction

La présente modification a pour but de formaliser au sein du corps de police par la voie légale l'existence d'un service de coordination et de gestion des systèmes d'information de la police dont la mission sera, dans le cadre de la restructuration issue de la réforme Symphonie, de jouer le rôle de service d'assistance à la maîtrise d'ouvrage au niveau opérationnel. Ce nouvel organe s'inscrit dans le droit fil de la réforme et son objectif sera de mettre en valeur les systèmes d'information dans le but de rendre la police plus efficace, de développer de nouvelles prestations liées aux technologies du traitement et de la diffusion de l'information. Elle tend aussi à créer un poste d'officier chargé de la sécurité des systèmes d'information dont les tâches seront liées au respect de la confidentialité des données et de leur traitement qui incomberont - avec la centralisation au Centre d'exploitation de technologies de l'information (CETI) - à la police elle-même ainsi qu'aux activités liées au contrôle des dispositifs de sécurité mis en place par le CETI.

2. Commentaire article par article

Article 6, alinéa 1, lettres m et n (nouvelle teneur)

L'introduction du nouveau service et la création de la fonction nouvelle d'officier chargé de la sécurité des systèmes d'information nécessitent une modification de l'article 6 qui définit les divers services qui composent le corps de police ainsi que les fonctions qu'il comporte. L'introduction des deux lettres m et n se justifie par l'obligation de séparer le service de coordination et de gestion des systèmes d'information de la police de la fonction d'officier chargé de la sécurité des systèmes d'information dans la mesure où ce dernier ne peut être à la fois juge et partie.

Article 36, alinéa 1 (nouvelle teneur)

La modification de l'article 6, par l'introduction des lettres m et n, implique nécessairement la modification de l'article 36 qui définit les fonctionnaires passibles des sanctions disciplinaires décrites dans la loi sur la police. Ainsi, les fonctionnaires rattachés au service de coordination et de gestion des systèmes d'information de même que l'officier chargé de la sécurité des systèmes d'information seront passibles des mêmes sanctions que tout autre fonctionnaire de police en cas de manquement à leurs devoirs.

Article 45, lettres a et e (nouvelle teneur)

Les modifications proposées réparent 2 errata (lettre a) et introduisent la fonction d'officier chargé de la sécurité (lettre e). S'agissant des errata, l'une concerne l'oubli de la mention de la fonction de chef d'état-major dont le traitement est également fixé par le Conseil d'Etat, l'autre a trait au renvoi à l'article 44, alinéa 1, qui a remplacé l'article 30 B, alinéa 1, lors du changement de numérotation des articles de ladite loi lors de la révision du 26 avril 1996 et qui avait échappé à l'époque.

Compte tenu des responsabilités ainsi que des tâches importantes qui seront conférées à l'officier chargé de la sécurité des systèmes d'information, il convient de prévoir sa classe de traitement au même niveau que celui arrêté pour l'officier de presse et l'officier psychologue.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.

Personne ne demande la parole en préconsultation.

Ce projet est renvoyé à la commission judiciaire.

PL 7533-A
6. Rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier le projet de loi de MM. Olivier Lorenzini, Pierre-François Unger et Bénédict Fontanet modifiant le code de procédure pénale (indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort) (E 3 5). ( -) PL7533
Mémorial 1996 : Annoncé, 5729. Projet, 7656. Renvoi en commission, 7663.
Rapport de M. Christian Grobet (AG), commission judiciaire

La commission judiciaire a traité du projet de loi déposé le 11 octobre 1996 par les députés Olivier Lorenzini, Pierre-François Unger et Bénédict Fontanet lors de ses séances des 6 mars, 10 et 17 avril 1997.

Rappelons que ce projet de loi avait été déposé à la suite de certaines décisions de la Cour de justice confirmées par le Tribunal fédéral, allouant des indemnités à des personnes détenues à tort paraissant insuffisantes par rapport à la durée d'emprisonnement des personnes en cause, qui avait atteint plusieurs mois, alors que, par la suite, elles avaient été acquittées en audience de jugement.

Les décisions avaient été rendues sur la base de l'article 379 du code de procédure pénale, introduit dans le nouveau code de procédure adopté le 29 septembre 1977 par le Grand Conseil. Le principe de l'octroi d'une indemnité à la personne détenue à tort, même en l'absence de faute d'un juge, constituait à l'époque, indiscutablement, une nouveauté bienvenue et courageuse. Le législateur avait, toutefois, exprimé certaines craintes face à cette nouveauté dont il ne pouvait mesurer les conséquences financières éventuelles pour l'Etat. C'est la raison pour laquelle le Grand Conseil, en l'absence d'une casuistique qui aurait pu le guider, a considéré préférable de prévoir à l'alinéa 2 de l'article 379 LPP une restriction à l'ampleur de l'indemnité pouvant être allouée à la personne ayant été détenue à tort, en stipulant «le juge détermine l'indemnité en observant les limites fixées par le Conseil d'Etat».

Ce dernier adopta le 6 juillet 1983 un règlement prévoyant des indemnités maximales selon les cas pouvant donner lieu à une indemnisation maximale de 10 000 F, laquelle pouvait toutefois être majorée dans certains cas exceptionnels. Le Conseil d'Etat décida, toutefois, de supprimer cette possibilité et modifia en conséquence son règlement avec effet au 16 avril 1992.

Mme Antoinette Stalder, présidente de la Chambre pénale de la Cour de justice, entendue par la commission judiciaire, devait préciser que c'est à la suite de cette modification réglementaire que la Cour de justice, par réaction, adopta comme principe d'indemnisation l'octroi d'un montant forfaitaire de 100 F par jour de détention à tort, quelle que soit la situation de la personne en cause, mais jusqu'à un montant maximum de 10 000 F (conformément au règlement du Conseil d'Etat), de sorte que les personnes détenues pour une durée de temps supérieure à 100 jours n'étaient plus indemnisées au-delà de 10 000 F. Mme Stalder ne cacha pas que la Cour de justice avait retenu ce «tarif» dans l'espoir que le Tribunal fédéral casserait l'une de ses décisions et simultanément le règlement du Conseil d'Etat, ce qui ne fut pas le cas, puisque le Tribunal fédéral confirma systématiquement (et tout récemment encore) les désisions d'indemnisation de la Cour de justice, même lorsque la période de détention à tort avait été particulièrement longue.

Il faut reconnaître que la question est délicate à résoudre, du fait que l'article 379 LPP prévoit une indemnisation non seulement pour les détentions illicites, ce qui implique une faute de la part d'un magistrat judiciaire, mais également pour les détentions injustifiées, ou qui seraient devenues injustifiées avec le temps, ce qui va bien au-delà de la responsabilité civile ordinaire, fondée sur la faute, qui peut dans ce second cas être couverte par l'assurance-responsabilité civile contractée par l'Etat.

Mme Christine Junod, présidente du Collège des juges d'instruction, également entendue par la commission judiciaire, a fort bien résumé la situation par rapport à la détention préventive, qui est principalement en cause dans le cadre des cas de détention à tort. Voici ce que Mme Junod a déclaré: «Les magistrats en charge des dossiers pénaux ne sont pas totalement libres, notamment en ce qui concerne la détention préventive. Cette dernière n'est, en effet, pas une décision arbitraire, mais une décision motivée par la qualification du Parquet. Ce dernier peut demander:

- une enquête de police;

- une instruction, laquelle permet une arrestation.

Mme Junod rappela que le code de procédure pénale genevois est le plus libéral de Suisse. Il ne laisse pas beaucoup de choix au juge d'instruction. Quand ce dernier doit se déterminer sur les charges contre une personne détenue et si les charges sont suffisantes, il a l'obligation d'inculper cette personne. La raison en est que l'inculpation rend le débat contradictoirepour toutes les parties (c'est-à-dire accès au dossier, assistance d'un avocat, instruction à charge et décharge). Dès ce moment, les inculpés peuvent être mis en détention préventive. Les critères sont:

- la gravité de l'infraction;

- le risque de réitération;

- le risque de collusion;

- le risque de fuite.

Mme Junod estime que la détention ne constitue pas une solution de facilité. C'est la même chose pour la Chambre d'accusation, laquelle est composée de deux juges laïcs assesseurs. La Chambre d'accusation peut intervenir à plusieurs moments pendant l'instruction. Toute personne détenue a en effet le droit de demander sa mise en liberté en tout temps.

Mme Junod a relevé que des motifs de sécurité peuvent inciter un magistrat à faire détenir quelqu'un: ça n'est donc pas un motif de «facilité». Par exemple, le juge d'instruction peut entreprendre des contrôles bancaires ou fiscaux, ce qui peut - à terme - éventuellement entraîner un dommage. Car, jusqu'au jugement, l'inculpé demeure détenu à raison de charges suffisantes. En revanche, c'est la présomption d'innocence qui prévaut au moment du jugement; ainsi, s'il existe un «doute raisonnable», il n'y a pas d'autre solution que l'acquittement. La notion de «charges suffisantes» est donc tout à fait indépendante de celle de «culpabilité».

Mme Junod en conclut que, sans être reconnu coupable à terme, quelqu'un peut être lésé dans ses intérêts.

Quant à la disposition du code de procédure pénale qui fait l'objet du projet de loi 7533 Mme Junod précise que le but de la loi est l'allocation d'une indemnisation, mais non d'une réparation. La question est donc de savoir jusqu'où on va. Le projet de loi veut déplafonner le système.

Mme Junod souligne qu'un des éléments qui causent le dommage à une personne est constitué des informations qui ressortent de la presse. Les seules personnes qui sont tenues au secret sont en effet les magistrats et les policiers. Ainsi, les parties n'ont pas l'interdiction d'alerter la presse ou de faire de la publicité. Or, cette permissivité est un des facteurs qui peuvent causer un dommage à l'inculpé. A ce sujet, on pourrait réfléchir à la nécessité d'étendre le secret de l'instruction à l'ensemble des parties.

Mme Antoinette Stalder, dont l'audition était particulièrement intéressante comme présidente de la juridiction appelée à statuer sur les demandes d'indemnités, précisa que les détentions illégales étaient très rares et que la plupart des cas, pas si nombreux, ayant donné lieu à indemnisation étaient des détentions injustifiées.

Selon elle, le nombre des indemnisations allouées ces dernières années est le suivant:

1993: 17

1994: 8

1995: 15

1996: 18

Quant au montant total des indemnités allouées, le département de justice et police et des transports a donné les indications suivantes:

Dédommagements et indemnités à des tiers

Rubrique budgétaire 410100.319.71

Evolution de 1990 à 1996

 1990 1991 1992 1993 1994 19951 19962

 100 409,40 F 65 607,40 F 180 084,15 F 75 970,25 F 224 541, F 520 349,65 F 227 378,35 F

1 Montant sans le report du dépassement 1994 (174 541, F) et l'affaire OPF (2 031 764,75 F).

2 Montant provisoire au 10 décembre 1996.

Mme Antoinette Stalder devait, toutefois, préciser que, dans la grande majorité des cas, les indemnités allouées étaient inférieures au maximum autorisé et que seules quelques indemnisations avaient été allouées pour un montant supérieur à 10 000 F avant que le règlement du Conseil d'Etat ne soit modifié, étant précisé qu'il n'a pas eu d'effet rétroactif, de sorte qu'un certain nombre de demandes ont été jugées, après le 16 avril 1992, en vertu de l'ancien droit, dont celle de M. Hoyos.

C'est la raison pour laquelle Mme Antoinette Stalder, qui a peur des conséquences financières pour l'Etat du projet de loi 7533, préconise - comme Mme Junod - d'en revenir au régime précédent qui donnait toute satisfaction et donnait une large latitude au juge quant aux circonstances à prendre en considération dans le cadre de l'octroi d'une indemnité pour détention à tort. A défaut, elle recommande de légiférer en s'inspirant de l'article 122 de la loi fédérale de procédure pénale. Cette position est également partagée par l'Association des juristes progressistes qui, lors de son audition, a fait part de son désaccord avec le projet de loi 7533 et de son souhait de maintenir les articles 379 et 380 LPP actuels avec un déplafonnement de la limite de 10 000 F, tout en accordant ses faveurs à un tarif d'indemnisation de 100 F par jour pour mettre tout le monde sur un pied d'égalité

En définitive, la majorité de la commission judiciaire refusa le projet de loi 7533 par 6 voix (2 R, 1 Ve, 3 AdG) contre 4 (2 DC, 2 L) et 4 abstentions (3 L, 1 S) au profit d'un amendement à l'alinéa 2 de l'article 379 LPP accepté par 9 oui (3 L, 2 R, 1 Ve, 3 AdG) contre 3 non (2 L, 1 DC) et 2 abstentions (1 S, 1 DC) et ayant la teneur suivante:

«Le juge détermine l'indemnité dont le montant ne peut dépasser 10 000 F. Si des circonstances particulières l'exigent, notamment en raison d'une détention prolongée, d'une instruction compliquée ou de l'ampleur des débats, l'autorité de jugement peut - dans les cas de détention - allouer à titre exceptionnel une indemnité supplémentaire.»

Cet amendement apporté à l'article 379 LPP actuel revient, en fait, à l'ancien régime, mais en insérant la limite de 10 000 F dans la loi plutôt que dans un règlement pouvant être modifié à l'initiative du seul Conseil d'Etat. Le montant maximum de l'indemnité, qui s'est avéré suffisant dans la très grande majorité des cas, est donc maintenu. La loi précisera, toutefois, comme le règlement le faisait jusqu'en 1992, que le juge peut, dans des circonstances exceptionnelles, notamment lors d'une détention très longue, octroyer une indemnité supplémentaire, mais dans les cas de détention uniquement. A noter que la commission judiciaire n'a pas voulu instituer dans la loi un tarif de 100 F par jour de détention, selon le système appliqué depuis 1993 par la Cour de justice.

La commission n'a donc pas voulu admettre le principe d'une indemnité pleine et entière en cas de détention à tort, qui aurait pu conduire au versement d'indemnités très importantes, sans même atteindre les montants hallucinants octroyés dans de tels cas aux Etats-Unis, mais s'est ralliée au principe de l'indemnité équitable, qui tiendra compte des circonstances du cas d'espèce. La commission a, en outre, complété cette règle d'une disposition complémentaire susceptible de favoriser une aide en nature, qui pourrait compléter ou remplacer l'octroi de l'indemnité financière à la personne intéressée, car il est apparu, notamment à l'audition de M. Giovanni Chicherio, du service social de la prison, que c'était souvent d'un appui psychosocial que les détenus avaient prioritairement besoin tant en prison qu'à leur sortie de celle-ci. L'alinéa 2 est complété du texte suivant:

«Le juge peut décider d'un autre mode de réparation du préjudice subi ou de tout autre appui nécessaire au requérant.»

C'est finalement à l'unanimité que la commission judiciaire, convaincue après les auditions rappelées ci-dessus qu'il convenait de maintenir les règles actuelles d'indemnisation des personnes détenues à tort en intégrant simplement dans la loi la disposition réglementaire du plafonnement de l'indemnité à 10 000 F, avec la possibilité toutefois d'allouer une indemnité complémentaire dans les cas exceptionnels où cela se justifierait, vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter les articles 114 B, alinéa 4, 379 et 380 LPP ci-après, adaptés au complément précité et complétés d'une disposition transitoire selon le projet de loi ci-après, en lieu et place du projet de loi 7533 dont elle recommande le rejet.

(PL 7533)

PROJET DE LOI

modifiant le code de procédure pénale

(indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort)

(E 3 5)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Le code de procédure pénale du 29 septembre 1977 est modifié comme suit:

Art. 114 B, al. 4 (nouvelle teneur)

4 Il peut allouer une indemnité équitable en observant les limites fixées par l'article 379.

Art. 379, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Le juge détermine l'indemnité dont le montant ne peut pas dépasser 10 000 F. Si des circonstances particulières l'exigent, notamment en raison d'une détention prolongée, d'une instruction compliquée ou de l'ampleur des débats, l'autorité de jugement peut - dans les cas de détention - allouer à titre exceptionnel une indemnité supplémentaire. Le juge peut décider d'un autre mode de réparation du préjudice subi ou de tout autre appui nécessaire au requérant.

Art. 380, al. 2 et 3 (nouvelle teneur)

2 La demande est instruite selon les règles de la procédure civile accélérée. La cour établit d'office les faits.

3 La demande est formée par une requête déposée au greffe, en double exemplaire, par l'accusé ou ses ayants droit.

Art. 2

La présente loi est applicable avec effet rétroactif aux demandes sur lesquelles il n'a pas encore été définitivement statué.

ANNEXE

Secrétariat du Grand Conseil

Proposition de MM. Olivier Lorenzini, Pierre-François Unger et Bénédict Fontanet

Dépôt: 11 octobre 1996

PL 7533

PROJET DE LOI

modifiant le code de procédure pénale(indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort)

(E 3 5)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Le code de procédure pénale, du 29 septembre 1977, est modifié comme suit:

Art. 114 B, al. 4 (nouvelle teneur)

4 Il peut allouer une indemnité équitable en tenant compte notamment du dommage économique et moral subi par le plaignant.

Art. 379, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Le juge détermine l'indemnité en tenant compte notamment du dommage économique et moral subi par l'accusé, ainsi que du nombre de jours de détention.

Art. 2

La présente loi est applicable avec effet rétroactif aux plaintes et aux requêtes sur lesquelles il n'a pas encore été statué.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames etMessieurs les députés,

Vous avez certainement été frappés par certaines décisions récentes de la Cour de justice de Genève, confirmées par le Tribunal fédéral et portant sur l'indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort; ces décisions ont fait l'objet à juste titre de nombreux articles critiques dans la presse.

Le principe de l'indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort est prévu par l'article 379 du code de procédure pénale qui renvoie au Règlement du 6 juillet 1983 (modifié le 1er avril 1992) du Conseil d'Etat fixant la limite de diverses indemnités prévues par le code de procédure pénale (ci-après: le Règlement).

Le Règlement (article 1) fixe une échelle d'indemnisation des personnes poursuivies ou détenues à tort allant de 1 000 F à 10 000 F, selon la juridiction qui a prononcé un acquittement ou un non-lieu.

La Cour de justice de Genève a jugé qu'une telle distinction viole le principe de l'égalité de traitement et que le maximum de 10 000 F doit s'appliquer, quelle que soit l'autorité pénale qui a statué.

La jurisprudence a en outre consacré la solution selon laquelle toute détention indue (absence de vice formel, mais procédure se terminant par un acquittement ou un non-lieu) entraîne à elle seule une indemnisation de base de 100 F par jour, cette indemnité journalière étant, conformément à l'article 36 de la constitution genevoise, de 150 F en cas de détention illicite (vice formel tel qu'absence de titre valable de détention).

A relever que le problème de la détention n'est qu'un des aspects entrant en ligne de compte le cas échéant lorsqu'il s'agit de fixer l'indemnité revenant à une personne poursuivie à tort. Il se trouve que nombreux sont les cas dans lesquels une indemnisation de 10 000 F paraît d'une part dérisoire au regard du préjudice économique (perte d'un emploi, de sa situation, frais de justice et d'avocats) et moral (atteinte à la dignité, à la vie privée) subi, et d'autre part injustice et constitutif de violation du principe de l'égalité de traitement et de l'interdiction de l'arbitraire.

Les deux exemples (réels) qui suivent tendent à démontrer le résultat choquant découlant du système actuellement en vigueur:

1. Monsieur X, soupçonné d'avoir été l'auteur d'actes d'ordre sexuel, fut poursuivi par la justice pénale genevoise, procédure dans le cadre de laquelle il fut détenu à titre provisoire pendant 140 jours.

 Durant son séjour en prison, il a fait l'objet d'articles de presse le décrivant sous un jour déshonorant. Il demanda à deux reprises - mais en vain - sa mise en liberté provisoire par-devant la Chambre d'accusation.

 En outre, il subit une importante perte de salaires (plus de 25 000 F) durant toute cette période et dut prendre en charge les frais et honoraires de son avocat (plus de 50 000 F).

 Monsieur X fut acquitté (mis totalement hors de cause) par arrêt de la Cour correctionnelle siégeant avec le concours du jury, en date du7 décembre 1995.

 Le tort moral de Monsieur X (compte non tenu du facteur de la détention) peut être raisonnablement estimé à 50 000 F.

 Si la demande d'indemnisation de Monsieur X - actuellement pendante - est accueillie favorablement, il obtiendra dans le meilleur des cas un montant de 10 000 F qui ne couvrira même pas l'indemnité de base de 14 000 F découlant des seuls 140 jours de détention indument subis(140 jours au tarif de 100 F par jour).

 Quid du solde de 4 000 F découlant - selon la jurisprudence - de la seule détention indue ?

 Quid du tort moral subi par Monsieur X (environ 50 000 F) ?

 Quid de son dommage économique (environ 75 000 F) ?

2. Monsieur Y, soupçonné d'avoir commis 6 brigandages, est poursuivi à Genève pour ces infractions.

 Il fut détenu durant 250 jours, avant d'être acquitté par arrêt de la Cour de cassation du 15 juin 1993 (annulant l'arrêt rendu le 25 janvier 1993 par la Cour correctionnelle siégeant sans le concours du jury et l'ayant condamné à une peine de 30 mois d'emprisonnement).

 Il subit en outre une perte de salaire durant cette période (environ 35 000 F) et dut assumer des frais d'avocats non négligeables pour sa défense (environ 10 000 F).

 Monsieur Y subit de plus un tort moral du fait qu'il a été considéré comme un criminel par l'opinion publique.

 Sa demande d'indemnisation fut accueillie favorablement sur le plan du principe. Toutefois, Monsieur Y n'obtint qu'une indemnisation totale de 10 000 F par arrêt de la Chambre pénale du 30 juin 1995.

 Ainsi, cette indemnité ne couvre que les 100 premiers jours de détention, les 150 jours suivants étant effectués «gratuitement», pour ne s'en tenir qu'au seul problème de la détention indue.

 Inutile de dire qu'au surplus une telle solution fait totalement abstraction du préjudice économique et moral subi par Monsieur Y.

Ces deux exemples démontrent combien la situation actuellement préconisée par le Règlement du Conseil d'Etat est choquante.

Selon le système en vigueur, une personne détenue indûment durant une période de 100 jours recevra le même maxium de 10 000 F qu'une autre qui a effectué, par exemple, deux ans de prison préventive pour rien; c'est déjà insupportable.

Mais il est à proprement parler intolérable que quelqu'un poursuivi à tort et reconnu innocent, et qui aurait par hypothèse perdu sa situation, ne se voie octroyer qu'une aumône de 10 000 F pour solde de compte.

Justice doit rimer avec responsabilité; si l'Etat poursuit et emprisonne sans raison, il doit en assumer toutes les conséquences; il n'est pas admissible d'en faire supporter une partie à celui ou celle qui a été lavé des soupçons pesant sur lui.

Le Tribunal fédéral, il est vrai, considère qu'il n'est «pas contraire au droit à l'égalité de traitement d'opérer une distinction selon le montant à allouer et d'admettre qu'en dessus du seuil ainsi fixé, ledit objectif(ndlr: protéger des finances publiques contre les conséquences d'une indemnisation) exclut une indemnisation proportionnée et adaptée aux circonstances propres de chaque cas» (arrêt paru dans la «Semaine judiciaire», 1995, pages 285 et suivantes, en particulier page 291).

Ainsi, l'Etat a le privilège de priver une personne de sa liberté, soit de l'un des droits les plus fondamentaux, et de causer des dommages importants, sans par la suite être tenu de le réparer.

Rappelons tout de même que nous vivons dans un Etat de droit où règne le principe selon lequel celui qui cause un préjudice doit le réparer !

Le Tribunal fédéral, sans remettre toutefois en cause la décision citée ci-dessous, a tout de même admis que «(...) dans le canton de Genève, le citoyen poursuivi et détenu à tort pour être ensuite libéré se voit imposer par l'Etat une contribution particulièrement lourde - en raison de la compensation relativement faible qu'il peut espérer obtenir - si on la compare au traitement beaucoup plus favorable qui lui est assuré dans de nombreux autres cantons qui couvrent les frais de procès du prévenu libéré et lui reconnaissent des indemnités sans maximum pour sa détention. En l'état toutefois, le droit fédéral ne s'y oppose pas et seule une intervention législative cantonale pourrait mettre un terme à cette disparité» (ATF S. du 17 octobre 1995 pages 8 et suivantes, c'est nous qui soulignons).

Mesdames et Messieurs les députés, il ne fait pas de doute que la balle est aujourd'hui dans notre camp et qu'il nous appartient d'être fidèles à nos valeurs et d'assumer la responsabilité qui est la nôtre en mettant un terme à une situation pour ainsi dire absurde.

Parallèlement à la question pratique de l'indemnisation, il est aussi d'autres considérations qu'il sied également de relever.

En effet, il ne faut pas oublier que la poursuite et la détention à tort résultent de décisions prises par des juges sur la base de dossiers parfois fragiles, même si le métier qu'ils font n'est souvent pas facile, loin s'en faut.

Ces décisions, même prises à tort, n'ont a priori aucune conséquence pour des magistrats à qui il arrive de choisir la solution de facilité et de sécurité en ordonnant la poursuite ou la détention.

Si l'Etat devait indemniser, soit dans nombre de cas de manière plus généreuse qu'actuellement, les juges deviendraient certainement plus prudents, notamment en matière de mise et de maintien en détention, et notre système judiciaire, plus respectueux des droits fondamentaux des intéressés.

Qu'il s'agisse de poursuite ou de détention à tort, ou d'interventions de la police, les problèmes causés par la situation en vigueur et les arguments développés ci-dessus sont comparables, raison pour laquelle le projet deloi qui vous est soumis vise les trois situations, soit la modification de l'arti-cle 114 B) et de l'article 379 CPPG.

Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui tendent à éclairer et à motiver ce projet de loi, et en vertu desquelles nous espérons que ce dernier sera accueilli favorablement.

Premier débat

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Ce rapport nécessite quelques remarques complémentaires que je me permets d'ajouter. Nous devons nous prononcer sur une question délicate.

En 1977, lors de l'adoption du nouveau code de procédure pénale, le Grand Conseil avait admis le principe d'une indemnisation pour les personnes détenues ou poursuivies à tort. Cette nouveauté dans notre législation était importante. Toutefois, il était difficile d'estimer l'impact financier de cette indemnisation. A l'époque, le Grand Conseil avait considéré plus sage de laisser le Conseil d'Etat régler cette question par voie réglementaire, ce que fit ce dernier, le 6 juillet 1983, en adoptant un règlement prévoyant des indemnités ne dépassant pas la somme de 10 000 F, quelle que soit la durée de détention à tort. Cependant, dans certains cas exceptionnels, il était possible qu'une indemnité plus importante soit accordée par l'autorité judiciaire. Ce système fut appliqué pendant un certain nombre d'années.

J'ignore si les sommes allouées par l'autorité compétente - en l'occurrence, la Cour de justice - furent trop élevées dans certains cas, mais le Conseil d'Etat a considéré devoir modifier son règlement en limitant le montant à un maximum de 10 000 F sans possibilité de dérogation. Cette modification réglementaire, intervenue en 1993, sauf erreur, a mis la Cour de justice dans l'embarras, car il s'est avéré que cette limite absolue était trop stricte pour un certain nombre de cas.

Mme Antoinette Stalder, présidente de la section traitant ce genre de situations, a imaginé de fixer un tarif forfaitaire de 100 F par jour de détention, quelle que soit la nature de cette dernière - si vous me permettez cette expression - et quelle que soit la personne en cause. Cette solution paraît équitable. Toutefois, il est vrai que le préjudice n'est pas le même selon les situations. En effet, si un artisan est emprisonné à tort et que son entreprise doit ensuite être fermée, le dommage n'est pas le même que pour un employé.

Cette indemnité forfaitaire a posé des problèmes, étant donné que, de surcroît, la somme maximale de 10 000 F était atteinte après un certain temps d'emprisonnement. Par conséquent, selon ce système, certaines personnes auraient pu bénéficier d'une indemnité supplémentaire, mais elles ne le pouvaient pas en raison de cette limite maximale.

Le Tribunal fédéral a été saisi de plusieurs recours qu'il a systématiquement rejetés. Cette attitude a provoqué le dépôt d'un projet de loi par nos collègues, MM. Lorenzini, Unger et Fontanet, qui ont voulu changer ce système et donner la possibilité d'indemniser - d'une façon relativement généreuse - les personnes détenues ou poursuivies à tort.

Après de longues discussions en commission et suite à l'audition de deux magistrats - Mme Junod, présidente du Collège des juges d'instruction, et Mme Antoinette Stalder, présidente de la Cour de justice - il est apparu que la solution la plus simple était de revenir dans la loi à la situation antérieure qui prévalait sous forme de règlement, c'est-à-dire de maintenir le plafond de l'indemnisation à 10 000 F, mais de prévoir qu'elle pouvait dépasser ce montant dans des cas exceptionnels.

Par ailleurs, sur la suggestion de Mme Fabienne Bugnon, il a été prévu d'introduire dans le projet de loi, en dehors de l'indemnisation financière, d'autres formes de dédommagement en nature, ajoutant ainsi un complément au régime antérieur.

Les membres de la commission n'ont pas voulu se prononcer sur le maintien ou non du système mis en place par la Cour de justice, à savoir un montant forfaitaire de 100 F par jour pour toute personne détenue à tort, système mis en pratique - nous a expliqué Mme Stalder - avec l'arrière-pensée qu'il permettrait au Tribunal fédéral de casser l'ancien règlement du Conseil d'Etat.

En commission, une majorité favorable à la fixation d'une somme forfaitaire d'indemnisation par jour de prison ne s'est pas dégagée. Il nous a donc paru plus sage de laisser la Cour de justice apprécier, de cas en cas - puisqu'elle dispose de la possibilité d'évaluer les critères concernant l'octroi d'une indemnité - si une telle indemnité doit être versée, ce droit n'étant pas absolu.

Je vous invite à voter la solution adoptée par la majorité de la commission.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Je remercie M. Grobet d'avoir rappelé dans son rapport que la discussion en commission avait porté sur l'aspect de la réparation morale et de l'aide à l'insertion, plutôt que sur la réparation financière.

En ce qui concerne cette dernière, notre groupe se rallie à la position de la commission, convaincu par les différentes auditions et rassuré par les propos entendus. Légiférer ainsi que le proposait le groupe démocrate-chrétien n'a pas lieu d'être. En effet, comparer le préjudice financier à la perte financière impliquerait forcément d'instaurer un système de réparation inégal et une justice à deux vitesses. Par contre, l'idée d'assouplir le barème de plafonnement de 10 000 F, en raison de circonstances particulières, nous semble bienvenue et pouvant répondre à la question des détentions injustifiées et longues.

On pense bien sûr à l'affaire Hoyos. A ce sujet, Monsieur le rapporteur, Monsieur le président, il faut apporter une rectification au rapport. En effet, la famille de M. Hoyos nous a contactés en nous rappelant que la demande de M. Hoyos n'avait pas encore été jugée, bien qu'il soit fait état du jugement de cette demande dans le rapport. La famille tient beaucoup à ce que soit précisé le fait que cette demande n'a toujours pas été jugée.

En ce qui concerne la réparation morale qui ne faisait pas partie de la proposition du projet de loi, mais dont les membres de la commission judiciaire ont accepté de débattre, nous sommes satisfaits qu'elle ait pu être prise en compte, même si nous aurions souhaité aller plus loin et proposer des mesures de réinsertion plus claires. L'audition de l'ancien assistant social de la prison nous a confirmé que l'argent seul ne pouvait être une réparation suffisante en regard du préjudice subi. En effet, une aide sociale et un soutien psychologique sont autrement plus adaptés aux besoins des détenus, tant en prison qu'à leur sortie. Ce constat étant valable pour les personnes détenues à tort, comme pour les autres d'ailleurs.

L'ajout décidé par la commission dans l'article 379, alinéa 2, nouvelle teneur libellé ainsi : «Le juge peut décider d'un autre mode de réparation du préjudice subi ou de tout autre appui nécessaire au requérant.» nous paraît être une bonne formule. Bien qu'elle n'ait pas rencontré l'enthousiasme des juges, nous espérons qu'ils n'hésiteront pas à en faire usage.

M. Michel Halpérin (L). Le rapport de la commission judiciaire sur ce projet relatif à l'indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort est, à mon sens, un des grands échecs psychologiques et moraux de notre travail parlementaire.

La présentation, qui vous en a été faite par M. Grobet, est exacte. Toutefois, je suis surpris - comme je l'ai été en commission - d'entendre, par exemple, Mme Bugnon - qui se félicite, à bon droit, de ce que l'on ait complété les mesures réparatrices d'une réflexion et d'une ouverture sur d'autres possibilités que celles financières - estimer qu'ainsi le projet va.

Je me souviens, Madame, que, lors du débat de préconsultation, il y a environ un an, vous aviez qualifié ce projet de modeste. Dans votre esprit, il l'était en raison du manque de ces mesures d'accompagnement. Mais il me semble qu'il l'était aussi, car il paraissait tellement évident à chacun d'entre nous, comme, par exemple, aux auteurs du projet, nos collègues du parti démocrate-chrétien, qu'il était temps que justice rime avec responsabilité. Je pense reprendre fidèlement les mots d'un des auteurs du projet, le député Fontanet.

A la même occasion, la représentante du parti socialiste avait dit : «Ce projet est bienvenu, car il mènera enfin à la mise en conclusion d'un véritable scandale.» Et voilà que, aujourd'hui, le scandale ne dérange plus personne. Quoi, Mesdames et Messieurs, dans cette ère où nous vivons, où chacun est responsable, de plus en plus, de ce qu'il fait et de ce qu'il ne fait pas, nous avons décidé, essentiellement pour des motifs financiers qui consistent à préserver la caisse de l'Etat - objectif louable en tous les cas de mon point de vue - qu'il n'était pas nécessaire ni raisonnable de faire supporter à la justice de notre pays - qui n'est pourtant pas mauvaise - la responsabilité des décisions qu'elle prend !

Ainsi, là où n'importe quel conducteur de tram ou d'automobile assume les responsabilités qui sont liées à l'exercice d'une activité difficile et parfois dangereuse pour les autres, les juges, qui ont un pouvoir littéral de vie ou de mort sur chacun d'entre nous, car ils ont la faculté en décidant de nous arrêter, à tort ou à raison, de briser définitivement nos destins - quand je parle de destin je ne pense pas seulement au destin matériel, mais au destin familial, social remis en question. On peut tout briser en un instant pour une erreur d'appréciation de jugement, et il n'y a plus de réparation à la mesure de cela. Quoi, face à une injustice de cet ordre, nous venons corriger un règlement qui nous paraissait honteux il y a un an, en disant que, finalement, 10 000 F, pour des gens qui ont été victimes d'un enfermement long, passibles de la Cour d'assise, est une réparation satisfaisante !

Madame Bugnon, vous avez cité, tout à l'heure, le cas de M. Hoyos. Mais sans aller dans ces extrémités où, si j'ai bonne mémoire, un homme est resté quatre ans en prison avant d'être acquitté, nous avons des dizaines d'exemples de personnes qui restent des jours, des semaines ou, parfois, des mois en détention préventive qui ne sera pas sanctionnée par un jugement de culpabilité.

Nous acceptons que ces gens qui ont été arrachés à leur milieu familial, à leurs entreprises, perdent du même coup leur salaire, parce que la moindre des choses pour un employeur est de se fier à l'appréciation d'un juge et, par conséquent, de sanctionner par cette autre aggravation qu'est la perte de l'emploi celui qui a apparemment démérité !

Eh bien, tout cela ne compte pour rien, et nous trouvons aujourd'hui benoîtement, le coeur en fête, que 10 000 F avec une petite augmentation ou une grande augmentation si les circonstances l'exigent, c'est acceptable. Mais c'est une honte, Mesdames et Messieurs les députés ! C'est le contraire d'une société civilisée. Alors quoi, nous donnons des responsabilités à des magistrats qui sont formés pour cela, qui sont assermentés pour cela; nous leur permettons d'exercer sur nous les pouvoirs que j'ai décrits et quand ils se trompent - parce que malheureusement cela arrive parfois - nous nous satisfaisons de cette espèce d'accident de la vie ! C'est la faute à pas de chance ! C'est comme de ne pas attraper un cancer au mauvais moment. Finalement, on est tombé entre les pattes d'un magistrat quand il ne fallait pas. On y a contribué ou on n'y a pas contribué. C'est une erreur ou ce n'en est pas une. C'est légitime ou c'est illicite, mais c'est tant pis. Allez vous rhabiller ! Si la Cour est sympathique, elle augmentera le plafond que nous fixons à 10 000 F... En réalité tout ce que nous avons fait dans ces travaux de la commission est de dire que le plafond de 10 000 F serait fixé par nous au lieu du Conseil d'Etat et qu'il pourrait être dépassé dans les cas exceptionnel.

Mais, Mesdames et Messieurs, n'estimez-vous pas avec moi que pour n'importe quel employé de catégorie modeste, passer deux mois en prison, cela vaut plus que 10 000 F. Si vous n'êtes pas de cet avis, votez le rapport de la majorité ! Si vous partagez mon sentiment et mon indignation, je vous invite à renvoyer ce texte à la commission judiciaire pour qu'elle se mette sérieusement à travailler sur un problème fondamental.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je n'ai pas l'intention de répondre à Me Halpérin, dont les connaissances sont bien connues. Je désire faire une simple remarque.

Cette loi ne prévoit pas de réparer un dommage, mais d'accorder une indemnité. C'est cette précision que Mme Junod est venue apporter en commission. D'ailleurs, le Conseil d'Etat s'était ému de cette situation. Peu de temps avant que ne soit déposé ce projet de loi, nous avions interpellé le Palais pour discuter et remettre en question cette indemnisation, qui, dans certains cas, nous paraissait choquante. Mais, après ce que M. le député Halpérin vient de dire, on se demande si cette loi est bien celle qu'il faut transformer. Car celle-ci ne prévoit pas de réparer un quelconque dommage subi. D'autres voies de droit existent pour s'en prendre à l'Etat, au cas où quelqu'un estimerait avoir subi un dommage.

Le travail en commission n'a porté que sur cette indemnisation, ceci avec deux différences essentielles. La première concerne le dépassement du plafond de 10 000 F; la deuxième, la mise à disposition du lésé d'autres mesures que l'argent en réparation du mal causé. Voilà le dilemme ! Je vous engage à voter ce projet de loi tel qu'il vous est proposé, car il reflète bien le travail en commission. Si l'on veut ouvrir un débat sur le problème de la responsabilité de l'Etat face aux justiciables qui, par hypothèse, auraient été mal jugés et auraient subi un dommage, il s'agit d'un autre problème - celui de la réparation des dommages - et tel n'est pas notre propos, ce soir.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Je confirme les dires de M. Ramseyer. Monsieur Halpérin, il ne s'agit pas de cas impliquant la magistrature en ce qu'elle aurait pu commettre une faute - ceux-là pourraient éventuellement tomber sous le coup de la loi sur la responsabilité de l'Etat - mais il s'agit de cas de personnes détenues, sans qu'aucune erreur de la part de cette dernière n'ait été commise. Comme vous le savez, il existe des cas où, par suite de procédure, un détenu réussit à atteindre la prescription et n'est pas condamné.

Comme les juges l'ont exprimé, une personne peut être emprisonnée à titre provisoire. A Genève, ce genre d'emprisonnement est sujet au contrôle de la Chambre d'accusation. Ainsi, une personne arrêtée n'est pas à la merci de la décision d'un juge. Ces cas sont relativement complexes et il est assez facile de faire un plaidoyer tel que le vôtre.

La commission est convaincue du fait que la limite fixée à 10 000 F n'est pas satisfaisante et, de l'avis des juges, qu'elle a conduit à l'application d'un régime paralysant. La réintroduction de l'ancien système permettrait de résoudre les cas particuliers, dont le nombre - il faut bien le dire - est restreint. En effet, il serait faux de laisser croire en ces lieux que les cas où des personnes ont été emprisonnées, à tort pendant plusieurs années, sont nombreux. Le cas Hoyos en est un, c'est vrai. Toutefois, ce dernier a finalement été acquitté sur la base des indications données par un magistrat. Je pensais que son cas avait été réglé et je prends acte, au passage, qu'il ne l'est pas. Par voie de conséquence, la disposition transitoire prévue dans la loi sera applicable - avec effet rétroactif - aux plaintes et aux requêtes sur lesquelles il n'a pas encore été statué. D'ailleurs, il serait bon de compléter cette disposition transitoire en notant : «...sur lesquelles il n'a pas encore été statué à la date du 4 décembre 1997», date à laquelle nous voterons cette loi. On pourrait soutenir également que la date de son entrée en vigueur, dans deux mois ou deux mois et demi, pourrait faire foi, mais ce serait déjà dommage.

Il est intéressant de noter que les magistrats auditionnés devant la commission ont déclaré que l'ancien texte leur donnait entière satisfaction. A ce sujet, j'avoue ne pas comprendre les propos de M. Ramseyer lorsqu'il dit avoir débattu de cette question avec le pouvoir judiciaire. Monsieur Ramseyer, le Conseil d'Etat pouvait, de longue date, modifier de lui-même ce règlement. C'est parce que vous n'avez rien fait que des députés ont déposé un projet de loi qui a conduit à la modification législative proposée ce soir. Alors, pourquoi modifier le texte précédent puisqu'il donnait satisfaction ?

Il est bien entendu, Monsieur Halpérin, que si, dans un an ou deux, le texte que nous allons voter ne donne toujours pas satisfaction, sa révision pourra être envisagée. En l'état, il nous paraît plus sage de réintroduire l'ancienne règle qui avait permis de règler, de manière satisfaisante, les demandes d'indemnité.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). En réponse à votre leçon de morale, je vous dirai, Monsieur Halpérin, que vous avez bonne mémoire et que, en effet, j'ai dit en débat de préconsultation que ce projet était modeste, et je l'ai répété ce soir. J'ai exprimé ma satisfaction de constater que ma proposition avait été prise en compte : celle d'offrir d'autres mesures qu'un simple dédommagement financier pour la réparation du tort moral.

Je ne parviens pas à comprendre pourquoi ce projet - qui fut déposé à grands renforts médiatiques par MM. Lorenzini, Unger et Fontanet - n'a jamais été défendu par eux en commission. Jamais on ne les y a vus et ils ne sont pas là ce soir. S'ils y sont, on ne les a pas entendus. Quant à vous, Monsieur Halpérin, je n'ai aucun souvenir d'avoir ouï pareilles envolées en commission. Je trouve la leçon de morale un peu excessive.

Une voix. Bravo !

M. Michel Halpérin (L). Madame la députée Bugnon, je ne peux pas grand-chose pour aider à votre mémoire, mais j'ai voté contre ce projet avec la décence que commandaient mes fonctions de président de la commission.

Le problème est bien celui évoqué par M. Grobet, à savoir la différence entre une indemnisation et une réparation. Elle tient tout simplement dans le fait que les juges ont un devoir de fonction. Si un juge d'instruction a le sentiment qu'un homme a commis une infraction, il doit l'inculper. S'il pense qu'il est dans une situation de réitération ou de danger de fuite, il doit l'arrêter ou, en tout cas, il peut le faire. Si le juge s'aperçoit qu'il s'est trompé, trois semaines, deux mois ou un an et demi plus tard et que, avec lui, s'est trompée la Chambre d'accusation, la vie de l'homme en question est broyée. On lui explique alors qu'il a droit à une indemnité parce que le juge accomplit un devoir de fonction et qu'accomplir un devoir de fonction n'est pas une faute.

Mesdames et Messieurs les députés, c'était justement le coeur du débat. Lorsque les auteurs du projet ont voulu que l'on instaure une indemnité équitable qui tienne compte, je cite approximativement et de mémoire : «du dommage économique et moral» c'était dans l'idée que l'on répare et non pas simplement que l'on indemnise. En effet, il est facile de s'excuser après coup en disant : «Je me suis trompé; vous avez fait un an de taule et je vous indemnise.» On sait que la réparation n'est pas possible...

Lorsqu'un architecte se trompe dans ses calculs et que le bâtiment s'effondre, il en est responsable. Bien sûr, il ne l'a pas fait exprès - tout comme le juge qui ne fait pas exprès de martyriser son détenu - mais le résultat est là. Je ne vois pas comment, face à des actes d'autorité, on peut se montrer moins exigeant qu'à l'égard des actes de compétence ordinaires de l'architecte, de l'ingénieur, du médecin ou de tout autre qui assume la responsabilité de ses actes au quotidien.

Par conséquent, nous devons dire à la commission judiciaire que ce n'est pas ce que nous attendions d'elle. Bien sûr, Monsieur Grobet, il n'y a pas eu trop de cas. On en a compté environ une quinzaine par an. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, quinze destins individuels comptent pour vous ou vous sont-ils indifférents ? Dans mon esprit, ils comptent !

Par conséquent, si nous proposions à la présidente de la Cour de justice et aux autres magistrats la possibilité de dépasser la somme de 10 000 F pour ces quelques destins individuels - c'est ce qu'ils désiraient - et, en sus - comme l'a demandé Mme Bugnon - on leur accorderait les moyens d'une réparation d'une autre nature, je ne vois pas en quoi nous les briderions, Monsieur Grobet ? Nous ne diminuerions pas leur pouvoir; au contraire, nous l'augmenterions. Mais nous ne donnerions pas l'image ridicule d'être à peu près la seule République d'Europe où l'on considère encore que c'est un mal nécessaire de pouvoir être traité ainsi par des magistrats...

M. Jean Opériol (PDC). Je ne suis pas membre de la commission qui a traité ce projet de loi et je ne suis pas juriste, mais je trouve honteux de douter des intentions des auteurs du projet de loi. A mon sens, ce débat ne doit pas se situer dans une perspective droite/gauche, mais sur les plans humain et de la justice. Personnellement, je me fiche des arguties juridiques, mais j'écoute avec infiniment de plaisir le discours de M. Halpérin.

Il faut, Mesdames et Messieurs les députés, placer ce débat sur le plan humain. Un homme, victime d'une erreur judiciaire, emprisonné à tort, ressort meurtri du cachot. Il subit un préjudice moral, d'abord - le plus grave - et, ensuite, économique, comme l'a relevé M. Halpérin. Il est «grillé», car il a été en prison. Il a été suspecté, et toute la population a un doute le concernant. Par exemple, on dira peut-être demain que M. Grobet est un voleur. Vous serez blanchi, Monsieur Grobet, mais la moitié de la population aura des doutes à votre sujet et votre réputation sera définitivement entachée; cela sur la base d'une simple erreur.

Sincèrement, ce débat doit être un débat d'hommes et de femmes responsables d'une justice sereine. Le moins que l'on puisse faire, ce soir, est de suivre la démarche des auteurs du projet de loi et, en tout cas, de le renvoyer en commission, car la dimension humaine qu'il recouvre n'a été que très partiellement prise en compte.

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Actuellement, un certain nombre de personnes revendiquent une indemnité supérieure à 10 000 F. Elles vont certainement être déboutées par le Tribunal fédéral, mais cette loi peut leur permettre de l'obtenir. En reportant cette décision - alors que nous avons été saisis du projet de loi de MM. Lorenzini, Unger et Fontanet le 11 octobre 1996, il y a plus d'un an - vous risquez de les empêcher de toucher une indemnité supérieure à 10 000 F. Je regrette que ce projet de loi n'ait pas pu être voté au mois de septembre, malgré son caractère d'urgence évident. Toutefois, si ce projet de loi s'avère insuffisant, il sera toujours possible d'en proposer un autre, à l'avenir.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce rapport à la commission judiciaire est rejetée.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1 (souligné).

Art. 2 (souligné)

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Je propose de compléter l'article 2, de la manière suivante :

«La présente loi est applicable avec effet rétroactif aux demandes sur lesquelles il n'a pas encore été définitivement statué à la date de son acceptation le 4 décembre 1997.»

Le président. A quelle page figure votre amendement ?

M. Christian Grobet, rapporteur. Il figure à la page 7; je vous le fais apporter, Monsieur le président.

Afin de s'assurer, Monsieur Vaucher, que toutes les demandes sur lesquelles il n'a pas été statué, à ce jour, soient prises en compte. La loi n'entrant en vigueur que dans deux mois, l'idée est qu'elle soit applicable, dès aujourd'hui, 4 décembre 1997, à toutes les demandes sur lesquelles il n'a pas été statué à ce jour. Ceci dans l'intérêt des demandeurs d'indemnités.

Le président. Je mets donc aux voix l'amendement proposé par M. Grobet, dont la teneur est la suivante :

«La présente loi est applicable avec effet rétroactif aux demandes sur lesquelles il n'a pas encore été définitivement statué à la date de son acceptation le 4 décembre 1997.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 2 (souligné) ainsi amendé est adopté.

Troisième débat

M. Michel Halpérin (L). Je n'abuserai pas de la patience de cette assemblée, mais je suggère au Conseil d'Etat de revoir d'urgence sa copie, car même avec la loi que vous venez de voter, Mesdames et Messieurs les députés, le règlement n'est pas satisfaisant.

En effet, il plafonne par juridiction. Ainsi, celui qui est victime d'une intervention injustifiée de la police a droit à 1 000 F au maximum; celui qui est acquitté par le Tribunal de police à 2 500 F; par la Cour correctionnelle à 5 000 F. Tout cela est archaïque et n'a aucun sens.

Le Conseil d'Etat devrait diminuer les catégories et se contenter de prendre acte de notre volonté. Il faut que l'indemnisation soit proportionnelle à la détention et non pas à la juridiction devant laquelle on se trouve.

Ensuite, je propose, toujours respectueusement, au Conseil d'Etat, s'il doit faire une liste des juridictions concernées, d'y inclure le Tribunal de la jeunesse parce que les jeunes aussi, Mesdames et Messieurs les députés, ont le droit d'être indemnisés si on les maltraite.

Une voix. Très bien !

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Je souscris aux propos de M. Halpérin. En effet, la loi l'emporte sur le règlement. Toute cette question était régie par voie réglementaire, Monsieur Halpérin. La question se trouve incluse dans la loi et la loi l'emporte sur le règlement.

A mon avis, les dispositions réglementaires que vous venez de citer - qui feraient une distinction en matière de détention sur la nature de la juridiction - ne sont pas compatibles avec le texte de loi. L'ayant droit peut demander une indemnité pour toute détention à tort, quelle que soit la juridiction. M. Halpérin a raison, il faut que le Conseil d'Etat modifie son règlement, mais, même en l'absence de modification - je le dis pour le Mémorial et pour l'autorité judiciaire - notre volonté est celle que vous venez d'indiquer. A mon avis, l'autorité de justice devra tenir compte de la loi et non pas d'un règlement devenu obsolète.

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7533)

LOI

modifiant le code de procédure pénale

(indemnisation des personnes détenues ou poursuivies à tort)

(E 3 5)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Le code de procédure pénale du 29 septembre 1977 est modifié comme suit:

Art. 114 B, al. 4 (nouvelle teneur)

4 Il peut allouer une indemnité équitable en observant les limites fixées par l'article 379.

Art. 379, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Le juge détermine l'indemnité dont le montant ne peut pas dépasser 10 000 F. Si des circonstances particulières l'exigent, notamment en raison d'une détention prolongée, d'une instruction compliquée ou de l'ampleur des débats, l'autorité de jugement peut - dans les cas de détention - allouer à titre exceptionnel une indemnité supplémentaire. Le juge peut décider d'un autre mode de réparation du préjudice subi ou de tout autre appui nécessaire au requérant.

Art. 380, al. 2 et 3 (nouvelle teneur)

2 La demande est instruite selon les règles de la procédure civile accélérée. La cour établit d'office les faits.

3 La demande est formée par une requête déposée au greffe, en double exemplaire, par l'accusé ou ses ayants droit.

Art. 2

La présente loi est applicable avec effet rétroactif aux demandes sur lesquelles il n'a pas encore été définitivement statué à la date de son acceptation le 4 décembre 1997.

PL 7662-A
7. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat instituant une garantie pour un ou plusieurs prêts en faveur de la Fondation pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement à hauteur de 40 000 000 F pour la consolidation d'opérations en cours. ( -) PL7662Rapport de M. Bernard Annen (L), commission des finances
Mémorial 1997 : Projet, 3428. Renvoi en commission, 3431.
Rapport de M. Claude Basset (L), remplacé par M. Bernard Annen (L) commission des finances

La commission des finances, sous la présidence de M. Claude Basset, a étudié ce projet de loi lors de sa séance du 25 juin 1997. Les personnes suivantes ont assisté à cette séance.

- - M. .

- MM. M. Jacquet et R. Borel, représentants de la Fondation des parkings;

- M. A. Agad, secrétaire adjoint du département de justice et police et des transports.

Préambule

Lors de la création de la Fondation des parkings en 1969, le Conseil d'Etat l'a dotée d'un capital de dotation de 2 000 000 F. Des subventions d'investissement ont été versées à plusieurs reprises pour atteindre un montant de 29 400 000 F. Il y a lieu, en outre, d'ajouter à cet apport de l'Etat des prêts hypothécaires négociés par la Fondation pour un montant global de 42 000 000 F. Ces crédits, étant garantis par des gages immobiliers, sont grevés d'intérêts (5¼%-5½% l'an), par rapport aux prêts accordés aux collectivités publiques (ex. TPG, aéroport).

Le présent projet de loi s'applique à des opérations anciennes ou en cours, une réflexion devant avoir lieu sur l'avenir de la Fondation et ses modes de financement futurs.

Dès lors, la Fondation des parkings s'est posé la question de savoir à quelles conditions elle pourrait bénéficier du même traitement. Des trois options étudiées, le département de finances a opté pour la garantie de l'Etat envers les banques prêteuses. Celles-ci se sont déclarées d'accord. De sorte qu'en cas de réalisation du projet, l'économie globale annuelle serait de l'ordre de 600 000 F à 800 000 F.

Au stade actuel, les banques créancières n'ont pas été en mesure d'ap-pliquer des taux d'intérêts correspondant à un prêt (global de 40 000 000 F) bénéficiant de la garantie de l'Etat, mais elles ont accordé des taux flottants conformes au marché, ce qui représente déjà une amélioration non négligeable. La référence du taux interbancaire sera appliquée aussitôt le projet de loi adopté.

Vote du projet de loi

Vote:Mentrée en matièreMMMMM8 OUI

Vote:Mentrée en matièreMMMMM1 abstention (R)

Vote:MensembleMMMIMMMMM8 OUI

Vote:MensembleMMMIMMMMM1 abstention

A noter que l'abstention provient d'un commissaire, collaborateur d'une des banques prêteuses, donc partie prenante en l'occurrence.

Conclusions

La proposition du Conseil d'Etat, suite aux réflexions et études de la Fondation des parkings, a pour but immédiat une amélioration des conditions de prêts relatives aux opérations en cours (parkings actuellement exploités). De plus, le marché actuel des capitaux étant particulièrement favorable (taux bas à court, à moyen et à long terme), il convient d'en profiter sans délai et c'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, la commission des finances vous recommande de suivre son vote et d'accepter ce projet de loi.

Premier débat

M. Bernard Annen (L), rapporteur. Je n'aurai pas l'outrecuidance d'ajouter quoi que ce soit à l'excellent rapport présenté par notre ancien collègue Basset, si ce n'est pour dire que ce projet de loi a été voté à la quasi-unanimité et, en tout cas, par l'ensemble des groupes présents lors de la commission des finances. Nous pouvons d'ores et déjà entrer en matière sur ce projet.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

instituant une garantie pour un ou plusieurs prêts en faveurde la Fondation pour la construction et l'exploitation de parcsde stationnement à hauteur de 40 000 000 F pour la consolidation d'opérations en cours

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

Garantie

Le Conseil d'Etat est autorisé à garantir le remboursement d'un ou plusieurs prêts à hauteur de 40 000 000 F en faveur de la Fondation pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement (ci-après: Fondation des parkings) pour la consolidation d'opérations en cours.

Art. 2

Base légale

Cette garantie est octroyée sur la base de l'article 4 des statuts de la Fondation des parkings, du 25 octobre 1968.

Art. 3

Couverturefinancière

Un éventuel appel de la garantie est financé par une demande de crédit supplémentaire.

Art. 4

Organe de

contrôle

L'inspection cantonale des finances est chargée de veiller au respect des conditions stipulées dans la présente loi.

Art. 5

Loi sur lagestionadministrativeet financièrede l'Etat de Genève

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi surla gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du7 octobre 1993.

M 1125-A
8. Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Andreas Saurer, René Longet, Micheline Calmy-Rey, Elisabeth Reusse-Decrey, Jean Spielmann et Christian Grobet concernant l'amélioration de la desserte ferroviaire Genève-Mâcon. ( -) M1125Rapport de M. Bernard Lescaze (R), commission des transports
Mémorial 1997 : Développée, 5021. Renvoi en commission, 5045.
Rapport de M. Michel Ducret (R), remplacé par M. Bernard Lescaze (R) commission des transports

C'est sous la présidence de M. Pierre Ducrest que la commission s'est réunie le 26 août et le 9 septembre 1997 pour examiner cette proposition qui lui a été renvoyée lors de la séance du Grand Conseil du 26 juin 1997 et émanant de députées et députés qui s'inquiétaient que le projet de TGV (train à grande vitesse) Léman-Mont-Blanc soit disproportionné en regard des moyens à disposition et des buts à poursuivre.

M. le conseiller d'Etat en charge du département de justice et police et des transports. Frédy Wittwer, directeur de l'office des transports et de la circulation (OTC). M. Bernard Deshusses prenait là son dernier procès-verbal, étant atteint par la limite d'âge; c'est donc ici l'occasion de le remercier pour son travail toujours soucieux de soin et de précision.

1. Présentation de l'état du projet

M. le conseiller d'Etat Gérard Ramseyer relève tout d'abord que chacun semble vouloir la même chose et que les divergences ne portent finalement que sur la manière de l'obtenir. Le problème posé est de savoir si l'amélioration de la ligne dite «des Carpates» via Nantua, soit Bourg-en-Bresse-La Cluse-Nurieux-Châtillon-Bellegarde, est une étape, ou se substitue au projet de ligne nouvelle telle qu'elle a été présentée dans la brochure émanant du DJPT et présentant les études techniques effectuées en commun par Sofrerail (actuellement SISTRA, bureau d'étude spécialisé filiale de la SNCF) et le bureau d'études Bonnard et Gardel en 1990, lesquelles fondent l'inscription de ce barreau Mâcon-Genève au schéma directeur national français des liaisons ferroviaires à grande vitesse le 14 mai 1991 au titre de «connexion nécessitant des accords internationaux» ainsi que l'approbation par le peuple suisse en votation populaire le 27 septembre 1992 de l'arrêté fédéral sur le transit alpin qui prévoit explicitement ce raccordement. A ces données s'ajoutent les études de financement avec 80% de fonds privés effectuée par la SBS dès 1990 et actualisées pour la dernière fois en 1993.

Le chef du département explique qu'il est essentiel que cette ligne nouvelle soit à même d'attirer un surplus de trafic suffisant pour en assurer la rentabilité et, par là même, qu'elle suscite un transfert modal à la fois depuis l'automobile (qui bénéficie maintenant d'une autoroute performante sur ce tracé) et surtout depuis l'avion, afin de parer à l'inéluctable saturation de l'espace aérien européen si on ne transfère pas le trafic à courte et moyenne distance sur le rail rapide. Ce dernier but ne peut être atteint que si le temps de parcours Genève-Paris est ramené à une durée maximale d'environ2 heures et demie, soit une bonne heure de moins qu'actuellement en utilisant le tracé le long du Rhône par Culoz.

Parmi les données nouvelles concernant ce projet, M. Ramseyer relève encore que la région Rhône-Alpes, qui s'attache à l'énorme projet de relation ferrée à grande vitesse Lyon-Turin, reconnaît maintenant l'importance de la relation Mâcon-Genève pour la Haute-Savoie, et de la vallée de l'Arve en particulier, cela tant sous l'aspect touristique que sur le plan économique. Le croisement à Bourg-en-Bresse avec la ligne du TGV Rhin-Rhône, qui pourrait être tracé par Dijon en évitant Dôle, accroît encore l'attrait de la réalisation du Léman-Mont-Blanc en assurant une relation plus rapide supplémentaire vers Lyon (48 minutes de mieux) et le sud de l'Europe (20% de la demande de trafic, contre 80% vers le nord).

Déplorant l'intérêt mitigé que semble porter l'administration fédérale au raccordement Mâcon-Genève, M. Ramseyer exhorte encore les Genevois à parler d'une seule voix à l'égard des autorités fédérales, cela d'autant que ce dossier gagne en crédibilité auprès des pouvoirs publics français.

En ce qui concerne la réutilisation de la ligne des Carpates, M. Frédy Wittwer montre quelques images de l'état actuel de cette ligne désaffectée. En tout état de cause, même sur le tronçon Bourg-en-Bresse-La Cluse(-Oyonnaz) encore en exploitation, il s'agit d'une ligne à voie unique, aux caractéristiques impropres à l'exploitation par des trains à grande vitesse, même en version pendulaire: la voie est non électrifiée, donc a un gabarit insuffisant, notamment des ouvrages d'art (tunnels, passages sur voie), présente des caractéristiques géométriques défavorables avec un tracé sinueux, et est trop faiblement armée, cela sans parler des nombreux passages à niveau.

La réutilisation du tronçon central Nurieux-Châtillon, telle que montrée dans le projet initial du Léman-Mont-Blanc, est possible en première phase dans la mesure où on ne gagnerait sur ce tronçon, avec une ligne entièrement nouvelle, que 12 minutes pour une dépense de 3 milliards de francs français. Par contre, un tracé passant plus ou moins par l'ancienne ligne via Bellegarde ne semble pas facilement être réalisable. La géométrie et la situation de la gare de Bellegarde ne se prêtent pas à une liaison directe vers Genève. Quant à un nouveau tracé dans ce secteur, il générerait des dépenses disproportionnées avec les avantages à en attendre.

Interrogé à propos du barreau de liaison de Genève par le sud du canton, M. Wittwer précise encore que l'OTC suit attentivement le dossier du raccordement La Praille-pied du Salève. Un cahier des charges a été établi par la DDE française, à la demande du Comité régional franco-genevois, pour un montant de 1,5 million de francs français. Sur cette base, une étude d'amélioration de la ligne du pied du Salève, regroupant les trafics régionaux, intercités, internationaux et marchandises, pourrait être conduite avec l'aide éventuelle de fonds INTERREG.

Enfin, la présentation d'un film vidéo émanant du constructeur ferroviaire GEC-Alsthom, intitulé «Le train pendulaire», a permis aux commissaires de mieux comprendre le fonctionnement d'un tel système.

2. Audition de la Chambre de commerce et d'industrie de Genève (CCIG), du bureau d'études Bonnard et Gardel SA (B&G)et de la Société de Banque Suisse (SBS)

La commission a procédé à l'audition des promoteurs du projet de TGV Léman-Mont-Blanc, soit MM. Gilbert Coutau, président, et Hans-Peter Graf, secrétaire, pour la CCIG, Alain Pirat pour B&G et Raoul Monnay, de la SBS.

2.1 Bureau d'étude Bonnard et Gardel SA

M. Pirat rappelle tout d'abord quelques données déjà évoquées par M. le conseiller d'Etat Gérard Ramseyer (voir plus haut), ajoutant que les études menées en commun en 1990 et 1993 avec Sofrerail ont démontré la possibilité d'effectuer le trajet Genève-Paris en 2 heures un quart, avec un potentiel de passagers annuels de 8 millions.

Par rapport aux possibilités de phasage, il relève que la ligne dite «des Carpates», d'une longueur d'environ 65 km et qui n'est plus exploitée depuis quelques années, comporte de nombreuses courbes de faible rayon et des pentes de 28%, et n'autorisait une vitesse maximale que de 60 km/h. Il faut encore relever le très grand nombre de passages à niveau qui, au sens de la loi française, limitent la vitesse maximale praticable sur la voie ferrée concernée.

Sur le tronçon «central» Nurieux-Châtillon, la première phase du projet initial prévoit de toute façon la réutilisation et l'amélioration de la ligne «des Carpates», ce qui n'est pas envisagé pour les deux autres tronçons Bourg-en-Bresse-Nurieux et surtout Châtillon-pied du Salève, lequel évite complètement le rebroussement de Bellegarde. En investissant dans une deuxième phase environ 3 milliards de francs français, on pourrait gagner ultérieurement 12 minutes sur le trajet Bourg-en-Bresse-Genève.

Il relève encore que de nouvelles technologies de train à grande vitesse pendulaire à l'étude auprès du fabricant du TGV GEC-Alsthom pourraient contribuer à diminuer quelque peu les contraintes géométriques et à modifier les possibilités de phasage. En tout état de cause, le gain de temps apporté par la technologie pendulaire ne saurait toutefois dépasser 10%.

A la question d'un commissaire s'inquiétant de la suite des études, M. Pirat rappelle que la responsabilité en incombe maintenant, d'une part, au Ministère français des transports ainsi que, de l'autre, à l'office fédéral des transports (OFT).

Par rapport à l'évaluation d'un montant de 250 millions de francs suisses nécessaires, selon la SNCF, pour la simple réhabilitation de la ligne Bellegarde-La Cluse pour les besoins internes à la France, M. Pirat souligne qu'il ne serait pas pensable de se lancer dans une telle opération sans supprimer l'hypothèque du rebroussement en gare de Bellegarde.

2.2 Société de Banque Suisse (SBS)

M. Monnay précise que la SBS s'intéresse au projet depuis 1990, car cet établissement apprécie le financement de ce type de projet. Sur mandat de l'OFT, pour étudier la rentabilité d'une infrastructure nouvelle permettant de gagner une heure entre Genève et Paris, une étude conjointe avec la BNP menée en 1993 a déterminé la faisabilité technico-financière de ce projet de TGV, en relation avec l'investissement de fonds privés à hauteur de 80% du financement global.

Il donne connaissance d'une lettre du 23 octobre 1995, adressée au directeur de l'OFT, M. Max Friedli, et signée par deux directeurs généraux de la SBS. La banque y marque son intérêt pour le projet. Elle confirme que, si les autorités suisses et françaises aboutissaient à une conclusion positive sur la réalisation de ce projet, cohérente avec le concept de projet phasé étudié en février 1993, et si l'actualisation des études de faisabilité devait confirmer son taux de rentabilité attractif, la SBS serait prête à assumer le mandat de mobiliser sur les marchés internationaux la partie du financement privé dudit projet.

La banque demande donc un «feu vert» de la part des responsables administratifs et politiques. A l'égard de la responsabilité assumée par la SBS, il souligne qu'elle est d'abord morale, mais certaine quant au sérieux du montage financier de l'opération. C'est la conclusion des études, ainsi que la nature et la durée de la concession qui permettront une judicieuse répartition des risques économiques.

M. Monnay précise encore qu'une réactualisation de l'étude est maintenant nécessaire. Les données techniques et financières ont évolué depuis sept ans et modifient ainsi les conditions-cadres pour le financement envisagé. Elles devront donc être revues, si ce n'est l'impérative nécessité de gagner une heure sur le temps de parcours actuel pour assurer la rentabilité du projet.

A la question d'un commissaire, il précise qu'après le premier travail qui lui avait été confié par l'OFT, la SBS n'est plus, pour l'heure, chargée d'aucun mandat, et que, de par sa nature, l'OFT lui-même n'est pas habilité à prendre des initiatives à l'étranger.

M. Pirat ajoute que de tels modes de financements privés sont conformes aux directives de l'Union européenne, qui prévoient la séparation entre entreprises d'infrastructures et sociétés prestataires de services de transports. On pourrait ainsi imaginer par exemple une concession de travaux publics assortie d'une structure d'exploitation autonome.

2.3 Chambre de commerce et d'industrie de Genève (CCIG)

Au nom de la CCIG, M. Gilbert Coutau - par ailleurs mandaté par l'Etat pour promouvoir ce dossier de TGV Léman-Mont-Blanc - remercie la commission pour cette audition qui lui permet d'exprimer son intérêt pour rattraper l'erreur historique qui a laissé Genève en marge du réseau ferroviaire international. Or, l'accessibilité à une ville est primordiale puisqu'elle est le deuxième facteur en ordre d'importance pour l'implantation de sociétés et, outre l'aéroport, seul le train est à même aujourd'hui de la garantir. L'intérêt de la CCIG pour les relations Genève-Paris et Genève-Lyon est très grand. Le dossier est complexe et les intérêts des uns et des autres ne sont pas toujours convergents.

Par rapport aux possibilités d'action du canton de Genève pour faire avancer ce projet, M. Coutau relève que la Confédération envisage, dans le cadre du «paquet» portant sur les grands projets ferroviaires et leur financement, la mise à disposition de 1 200 millions de francs suisses pour le raccordement de la Suisse au réseau européen à haute performance. Vu les risques de blocage et d'échec de ce «paquet» au niveau fédéral, il serait à son avis judicieux de séparer ce projet Genève-Mâcon de l'ensemble des NLFA qui prennent du retard. Le canton de Genève avait envisagé de consentir une avance de fonds sur les crédits d'études, mais la Confédération n'est, pour l'heure, pas entrée en matière.

Mais, pour M. Coutau, le message principal de la CCIG est qu'il ne faut rien empêcher dans ce dossier dont la crédibilité dépend essentiellement de la cohésion des Genevois face à leurs partenaires suisses et français.

3. Audition de l'association Alp-Rail

A la demande de son président, M. Sig Maxwell, enseignant, cette association est auditionnée. Il se présente accompagné de MM. Comte (ingénieur au CERN) et Gallay (cheminot à la SNCF).

M. Maxwell a démontré que, selon lui, Genève est enclavée du point de vue ferroviaire, sans accès au réseau TGV. La liaison Genève-Mâcon pourrait constituer le maillon manquant, lui permettant de devenir un noeud international, croisement entre les trafics nord-sud et est-ouest. Il déplore que «Genève soit actuellement une gare de passage et, pire encore, un terminus en cul-de-sac pour les trains Intercity, Pendolini et TGV, ce qui signifie à son sens qu'elle sera à terme promue au rang de banlieue de Zurich, Paris et Milan» (sic).

M. Comte relève que le TGV Genève-Paris utilise actuellement 178 km de voies anciennes où la vitesse est limitée et que le passage par Nantua compte 70 km de moins. D'autre part, pour lui, l'entrée sud dans le canton de Genève sera une opération très coûteuse, alors que l'on pourrait réaménager la ligne passant par La Plaine-Meyrin. A son sens, l'entrée sud n'offre donc aucun intérêt.

Il partage avec M. Gallay le point de vue que la remise en état de la ligne des Carpates aurait l'avantage de gagner 15 à 20 minutes sur le trajet Genève-Paris pour une dépense moins élevée que le projet visant à gagner une heure, ajoutant l'intérêt d'une relation entre deux villes importantes du département de l'Ain qui pourrait susciter l'intérêt du Conseil régional.

Globalement, les personnes auditionnées semblent donc être favorables à la réalisation d'un raccordement direct par Nantua, mais le représentant français rejoint ses collègues pour le placer sous le signe des moindres frais en espérant ainsi susciter la réactivation d'une ligne aujourd'hui abandonnée par les pouvoirs publics de son pays.

4. Conclusions

La présentation du projet et la discussion ont permis aux commissaires de mieux distinguer où se situent les problèmes essentiels posés par le dossier du raccordement de la Suisse occidentale au réseau TGV.

En ce qui concerne le raccordement de Genève par le sud, un large consensus se dessine pour admettre qu'il est probablement favorable pour la liaison TGV Genève-Mâcon, mais surtout qu'il est, en sus, la seule solution crédible permettant, dans la même opération, de réaliser un lien ferré entre les réseaux suisse et haut-savoyards, ouvrant ainsi la possibilité de relations directes vers le Chablais, la vallée de l'Arve et même Annecy, tout en ménageant à terme la possibilité de créer un «Sillon alpin» qui sera peut-être d'actualité dans l'Europe de demain.

Un large consensus s'est dégagé pour envisager de manière pragmatique, en première étape, l'étude, voire la réalisation, de la réhabilitation de la ligne dite «des Carpates». Toutefois, il est reconnu que les problèmes posés, en particulier celui du raccordement à Bellegarde, méritent études, mais qu'ils ne sont pas forcément une solution. Dans cette perspective, en étant intéressée à une diminution éventuelle des coûts du Léman-Mont-Blanc, la motion a été réexaminée et amendée, d'entente avec les proposants et la collaboration de la CCIG, en vue des susciter les études nécessaires afin de faire avancer le dossier dans son ensemble vers des réalisations.

Sous cette forme amendée, cette motion est acceptée par la commission à l'unanimité des présents (4 L, 2 R, 1 PDC, 2 S, 1 AdG).

Aussi, la commission des transports vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à lui faire le meilleur accueil pour souligner fermement la convergence de vues des Genevois envers l'avenir de leur intégration au réseau ferroviaire à grande vitesse européen.

Débat

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. La motion qui figure aux pages 9 et suivantes a été adoptée à l'unanimité des présents de la commission de tous les partis présents.

M. Pierre Ducrest (L). Les invites premières de cette motion - présentée par quelques députés de l'ancienne minorité devenue majorité - ne pouvaient pas nous satisfaire.

Après moult discussions et interventions de groupe ayant intérêt à ce que Genève ne soit pas une gare terminus, mais s'ouvre à l'Europe - si ce n'est à la zone frontalière - il est apparu qu'il fallait modifier cette motion. Ainsi fut fait.

Au départ, cette motion consistait à privilégier la desserte sur Mâcon par la ligne dite «des Carpates» au détriment du grand projet Genève-Mâcon. D'autre part, elle ne prenait pas en compte certains éléments ferroviaires, tels que la liaison sud de notre canton entre La Praille et Archamps.

L'unanimité a été faite, Mesdames et Messieurs les députés, car le but principal de cette motion était de voir Genève et le parlement genevois parler d'une même voix vis-à-vis de Berne, afin de montrer les intentions des Genevois en faveur de la Suisse.

La commission des transports a trouvé un consensus, afin de privilégier les liaisons ferroviaires, comme l'indiquent les quatre invites finales de la motion que je vous invite à renvoyer au Conseil d'Etat.

Pour le Mémorial, le dernier considérant de la motion comporte une erreur. Il ne faut pas lire (R.S. 734.42) qui est une loi fédérale, mais (R.S. 742.32).

Une voix. Bravo, c'est précis !

Mme Liliane Charrière Urben (S). Les mentalités évoluent, les opinions changent. Il y a quelque temps existait une alternative entre, d'une part, la ligne TGV Genève-Paris et, d'autre part, une variante consistant en l'amélioration de la ligne dite «des Carpates» qui est en très mauvais état. Le choix est difficile. Dans l'idéal, tout le monde préférerait une ligne TGV, car on y gagne beaucoup plus de temps, mais faut-il courir plusieurs lièvres pour être sûr d'en n'attraper aucun ?

Au cours des discussions relatives à ce choix - les majorités ayant changé, pas seulement dans ce Grand Conseil mais aussi dans le pays limitrophe - nous nous sommes rendu compte que la rénovation de la ligne dite «des Carpates» ne ferait pas gagner suffisamment de temps sur ce trajet. Toutefois, elle aurait le mérite de mettre en exergue l'importance de cette ligne et de favoriser le transfert modal par rapport à l'aviation. Cette rénovation a donc un grand intérêt. C'est un premier pas, une étape vers une ligne qui, nous l'espérons, sera bientôt une véritable ligne TGV Genève-Paris. Allons-y à petits pas, pourvu qu'on en fasse un !

Dans toutes les discussions que nous avons... (M. Blanc intervient.) décidément, M. Blanc est un mauvais élève !

Une voix. C'est un sexiste !

Mme Liliane Charrière Urben. Oh, alors ça ce n'est pas une nouvelle !

Le président. Poursuivez, Madame la députée !

Mme Liliane Charrière Urben. La rénovation de la ligne dite «des Carpates» s'effectuera dans un délai raisonnable et nous paraît être une très bonne solution. Cette motion que vous avez votée à l'unanimité - c'est assez intéressant pour qu'on le souligne et qu'on l'encadre - prévoit également d'autres parcours que je n'énumérerai pas. Je n'en prendrai qu'un pour exemple : le tronçon Genève-Lyon. Actuellement il faut deux heures pour le parcourir. Si l'on gagne un peu plus de quarante minutes sur ce dernier, cela représente un gain de temps important. Si on peut faire ce trajet en une heure et quart ou une heure et demie, j'ai le sentiment que beaucoup d'automobilistes renonceront à prendre l'autoroute. Ils auront tout intérêt, compte tenu du confort qui existera sur cette ligne, à prendre le train Genève-Lyon, plutôt que de prendre l'autoroute.

Le barreau sud est un des sujets abordés dans les propositions de la motion. Je souligne l'efficacité du travail effectué en commission à propos de tous ces parcours. Quand on veut, on peut ! Vis-à-vis de la Confédération, mais aussi de nos partenaires français, nous avons intérêt à montrer que lorsque Genève veut, elle s'y met et d'une seule voix. C'est bientôt l'Escalade ! Nous nous prononçons pour cette amélioration des voies ferroviaires en direction de la France, notamment sur Genève-Mâcon. Votons cette motion dans l'allégresse et dans le plaisir.

M. John Dupraz (R). Le groupe radical accueille avec satisfaction cette motion. Il se félicite de l'heureux consensus trouvé entre tous les groupes dans le but d'améliorer notre liaison ferroviaire avec la France et Paris. Toutefois, une question subsidiaire - à quatre sous - me vient à l'esprit. Que fait le Conseil d'Etat pour raccourcir le temps des transports entre Genève et Berne par voie ferroviaire ? (Rires.)

M. Pierre Meyll (AdG). J'apporte une note discordante dans cet ensemble un peu trop parfait. (Des voix désapprobatrices s'élèvent.) Non, rassurez-vous, je ne demanderai pas un raccordement direct Genève-Versoix ! Mais, nous aurions dû nous laisser une chance supplémentaire d'étudier la possibilité du fameux raccordement Eaux-Vives-La Praille. En effet, il s'agit de la seule façon de se relier au Valais par la future boucle autour du Léman. A mon avis, ne pas en tenir compte dans le rapport n'est pas constructif. Il faut bien se rendre à l'évidence, on aura des difficultés à faire passer cette liaison du côté de la sortie sud, étant donné les blocs de béton que l'on y a coulé. Avec les moyens dont on dispose, une liaison Genève-La Praille-Eaux-Vives serait probablement beaucoup plus simple à réaliser que ce que vous ne pensez et avec beaucoup moins d'incertitudes que sur les lieux choisis dans ce rapport.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Je me bornerai à dire deux choses. La première pour relever avec quelle satisfaction nous enregistrons l'unanimité de la commission des transports et la deuxième pour vous indiquer que l'invite 3 est d'ores et déjà partiellement dépassée. A Berne, la semaine dernière, il m'a été confirmé que le groupe de travail - dont on parle dans ladite invite - s'était déjà mis au travail et que le dossier évoluait de manière convenable. Je remercie encore la commission des transports d'avoir voté cette proposition à l'unanimité.

Mise aux voix, cette motion corrigée (dernier considérant) est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

MOTION

concernant l'amélioration

de la desserte ferroviaire Genève-Mâcon

- le rôle essentiel des relations ferroviaires internationales pour l'avenir de Genève;

- l'arrêté fédéral sur le transit alpin, approuvé par le peuple suisse le 27 septembre 1992, qui prévoit en son article 7 que «la Confédération s'emploie à promouvoir l'intégration de la Suisse occidentale au réseau européen à haute performance et fait en sorte que le tronçon Genève-Mâcon et le raccordement de Bâle soient construits et modernisés»;

- la décision du Conseil fédéral d'inclure les liaisons ferroviaires entre la Suisse occidentale et le réseau TGV dans l'ensemble des projets concernés par la réalisation et le financement de l'infrastructure des transports publics («Rail 2000», «NLFA», mesures antibruit - message du 26 juin 1996);

- la prolongation des débats parlementaires sur cet ensemble de projets et les aléas de la décision du peuple et des cantons à qui ils seront soumis;

- le retard sur son calendrier du Groupe de travail franco-suisse qui a été institué en juin 1994 par les ministres des transports français et suisse pour étudier les différents projets de raccordement de la Suisse occidentale au réseau à grande vitesse européen;

- le caractère spécifique de la liaison TGV Genève-Mâcon (tronçon essentiellement sur territoire français, nécessité d'une convention internationale, possibilités de phasage, recours éventuel à des capitaux privés, notamment);

- le report, par les autorités françaises régionales, du projet de liaison Genève-TGV par le «Sillon alpin» (via Annecy-Chambéry);

- l'offre faite en automne 1996 par un groupement d'entreprises privées françaises et suisses, disposées à préfinancer, moyennant une garantie de l'Etat de Genève, pour un montant de 20 millions de francs suisses, les études «d'avant-projet sommaire» pour un projet phasé à financement mixte mettant Genève à 2 heures 27 minutes de Paris et à 1 heure 15 minutes de Lyon, intitulé «projet de TGV Léman-Mont-Blanc»;

- les réactions du Groupe de travail franco-suisse à cette proposition, jugeant que l'insertion du projet et des études proposées dans la procédure française exigera au préalable un mise à jour sommaire des études existantes;

- la résolution du Comité du Conseil du Léman qui réaffirme «à l'unanimité son soutien à la réalisation d'une ligne ferroviaire à grande vitesse Mâcon-Bourg-en-Bresse-Genève, également dénommée TGV Léman-Mont-Blanc, demandant dans un premier temps que l'amélioration de la ligne dite «des Carpates» soit examinée le plus rapidement possible en intégrant la technologie pendulaire» (Annecy, le 13 mai 1997);

- l'intérêt manifesté récemment, aussi bien par les CFF (Chemins de fer fédéraux suisses) que la SNCF / RFF (Société nationale des chemins de fer français / Réseau ferré de France) et la Région Rhône-Alpes, d'envisager à courte échéance une remise en service de la ligne ferroviaire désaffectée existante via Nantua, dite «des Carpates», qui permettrait de réduire le temps de parcours de Genève à Bourg-en-Bresse par une diminution de la distance de 70 km par rapport au tracé utilisé actuellement (via Culoz);

- le fait que la réhabilitation du tronçon central de la ligne «des Carpates» entre Nurieux et Châtillon fait également partie du phasage prévu par le projet de TGV Léman-Mont-Blanc;

- la déclaration commune des délégations française et genevoise, à l'occasion du paraphe de l'accord-cadre pour le métro léger de surface transfrontalier, qui lie ce dernier à la complémentarité avec la desserte ferroviaire de l'agglomération franco-genevoise et qui demande le lancement rapide des études transfrontalières de faisabilité du projet de barreau ferroviaire entre la gare de La Praille et la ligne SNCF du pied du Salève;

- le fait que ce barreau constitue à la fois un premier tronçon du futur TGV Léman-Mont-Blanc et une liaison régionale et intervilles, représentant ainsi le seul projet réaliste à même d'assurer une jonction efficace du réseau ferré suisse avec le réseau français de la Haute-Savoie;

- le fait que cette liaison remplit ainsi les objectifs de la loi fédérale et de la Convention de 1912 portant sur le développement du réseau des CFF sur territoire genevois (R.S. 742.32), et prévoyant le cofinancement à parts égales par la Confédération, les CFF et le canton de Genève d'une liaison prévue alors entre les gares genevoises de La Praille et des Eaux-Vives,

1.  de veiller à ce que le Groupe de travail franco-suisse, chargé d'examiner lesdites liaisons entre la Suisse occidentale et le réseau TGV, conduise ses travaux avec diligence selon le programme qui avait été convenu;

2.  de privilégier l'étude et la réalisation - comme première étape de la liaison TGV Genève-Mâcon prévu par l'arrêté fédéral sur le transitalpin - de l'amélioration de la ligne Genève-Bourg-en-Bresse (via Nantua);

3.  de porter au niveau franco-suisse l'étude d'une liaison entre les réseaux ferrés suisse et français par un nouveau tronçon La Praille-pied du Salève;

4.  de libérer, pour concrétiser ces demandes, une contribution fédérale.

P 1087-A
a) Pétition pour des transports publics performants. ( -) P1087Rapport de majorité de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission des transportsRapport de minorité de M. David Hiler (Ve), commission des transports
Rapport de majorité de M. Jean-Claude Genecand (DC), commission des transports
Rapport de minorité de M. Andreas Saurer (Ve), commission des transports
P 1119-A
b) Pétition pour le développement des transports publics dans la région franco-genevoise. ( -) P1119Rapport de majorité de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission des transportsRapport de minorité de M. David Hiler (Ve), commission des transports
Rapport de majorité de M. Jean-Claude Genecand (DC), commission des transports
Rapport de minorité de M. Andreas Saurer (Ve), commission des transports
P 1122-A
c) Pétition pour l'accélération du programme des transports publics. ( -) P1122Rapport de majorité de M. Jean-Claude Vaudroz (DC), commission des transportsRapport de minorité de M. David Hiler (Ve), commission des transports
Rapport de majorité de M. Jean-Claude Genecand (DC), remplacé par M. Jean-Claude Vaudroz (DC) commission des transports
Rapport de minorité de M. Andreas Saurer (Ve), remplacé par M. David Hiler (Ve) commission des transports

9. Rapport de la commission des transports chargée d'étudier les objets suivants :

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

La commission des transports, sous la présidence de M. Pierre Ducrest et en présence du conseiller d'Etat auprès du département de justice et police et des transports (DJPT), M. Gérard Ramseyer, et de MM. François Brutsch, secrétaire adjoint du DJPT, Fredy Wittwer, directeur de l'office des transports et de la circulation (OTC), Christophe Stucki, directeur général des Transports public genevois, a débattu des trois objets en même temps. Les procès-verbaux sont tenus par M. Bernard Deshusses.

Si la réalisation des transports publics dépendait des kilos de papier produits, il aurait été judicieux de suivre la minorité des députés qui souhaitaient un renvoi de ces objets au Conseil d'Etat, afin qu'il rédige à nouveau ce qu'il vient d'écrire.

Pour des pétitionnaires, il est frustrant de ne pas obtenir une réponse personnalisée mais, d'un autre côté, l'inflation de documents ne contribue pas à davantage de clarté. Depuis le rapport RD 240 du printemps 1995, il y a eu deux rapports du Conseil d'Etat répondant à de nombreuses motions et pétitions. D'autre part, le 26 juin dernier, nous avons eu un large débat sur la question des transports qui fut, d'ailleurs, suivi par une petite chambrée du Grand Conseil. Ajoutons à cela l'accord-cadre, paraphé le 25 juin 1997 entre le Conseil d'Etat et les autorités françaises, qui fera l'objet du projet de loi au terme du délai de consultation des communes. De plus, nous sommes gratifiés périodiquement de documents papier glacé ou polycopiés, par exemple l'exposé de M. Ramseyer au Congrès ferroviaire international à Lucerne.

Les questions pertinentes et pétitionnaires ont donc reçu des réponses dans les documents précités. Cependant, il est utile de transcrire les considérants et les invités, respectivement les propositions de celles-ci, et tenter d'apporter quelques éléments de réponses obtenues. Trois domaines essentiels sont abordés par les pétitionnaires:

- les lignes à grande vitesse - LGV;

_ le métro léger transfrontalier et l'extension du réseau de tramway (La  Praille-place des Nations);

- Priorité au tronçon Meyrin-Cornavin ;

- le financement.

1.   LGV - Notre réseau ferroviaire a pris un coup de vieux, même s'il a été modernisé. Depuis 1858, le tracé n'a pas été modifié et surtout la liaison avec le réseau savoyard attend toujours sa jonction avec Cornavin. Lorsque vous mettez plus de trois heures entre Genève et Chamonix, ce transport ressemble davantage à la diligence qu'au TGV. Nos autorités nous exposent depuis quelques années comment renforcer les liaisons express avec les pays européens. Il s'agirait de construire le barreau sud La Praille-pied du Salève et de raccourcir le tracé entre Bourg-en-Bresse et Genève de quelque 70 km. Mais voilà, les centres de décisions se trouvent à Berne et à Paris et ceux-ci ne partagent pas les mêmes priorités. Bien sûr, la Confédération a une dette envers Genève, l'abandon de La Praille-Eaux-Vives doit être compensé, de même que le projet des NLFA (transversales alpines) comprend la liaison avec le réseau européen à grande vitesse, depuis Genève. Paris, de son côté, mise de moins en moins sur le TGV actuel et concentre ses recherches sur la technique de pendulation qui permet d'utiliser les lignes classique existantes. Cependant, le TGV Paris-Genève circule actuellement sur 178 km de voies anciennes, il est donc nécessaire d'améliorer ce tracé en aménageant partiellement la ligne des Carpates comme première étape, ce qui est moins coûteux: 500 millions de francs au lieu de 3 milliards. Pour éviter l'enlisement de cette situation, la tendance au niveau européen est de faire appel aux capitaux privés. A ce propos, nous avons auditionné pour la première fois et avec un grand intérêt la Chambre de commerce et d'industrie de Genève (CCIG), ainsi que la Société de Banque Suisse (SBS). Les préétudes laissent entrevoir une rentabilité, à terme, de l'aménagement de la ligne Genève-Paris à condition que le gain de temps soit d'une heure. Pour confirmer cette préétude, il siérait que les mandataires obtiennent un crédit de 20 millions pour une étude approfondie, mais, pour l'heure, ni l'office fédéral des transports (OFT) ni Paris n'ont donné de mandat; suggestion est faite que le gouvernement genevois avance 20 millions de francs. Même si les perspectives ne sont pas attrayantes, il convient que nos autorités s'emploient sans relâche à défendre les intérêts de Genève afin d'éviter que notre canton ne se trouve écarté du réseau européen et, pour ce faire, il serait temps que nos représentants politiques et économiques parlent d'une seule voix à Berne, ou ailleurs, comme savent le faire les autres cantons romands.

2.   Le métro léger - Tout a été dit sur ce projet. Ce qui s'est modifié, c'est la position de nos autorités. L'option du début de choisir les Eaux-Vives-Annemasse comme premier tronçon s'est transformée en une étude du CERN-Annemasse en précisant que les travaux commenceront sur le tronçon débarrassé de toutes entraves. Le récent accord-cadre entre les autorités genevoise et française va permettre une coopération transfrontalière très attendue. Il s'agit d'une première étape importante qui définit le cadre et le planning; le comité de pilotage qui sera constitué sera chargé de présenter avant le 30 juin 1998 une proposition d'un montage juridico-financier. Ce comité sera notamment chargé d'organiser la poursuite de l'étude et des procédures jusqu'à l'octroi des concessions, à l'approbation des plans et à la déclaration d'utilité publique. La charge financière de cette étude se répartira à raison de 14,5% au total pour les parties françaises et 85,5% pour la partie genevoise. Ce premier pas, dans la bonne direction, ne doit pas masquer les écueils à surmonter ni l'épreuve du temps à l'aboutissement du projet. La grande majorité des député(e)s souhaitent, dans l'attente du métro léger, le prolongement de la ligne 13, place des Nations et La Praille-Pont-Rouge, depuis le début de l'année; les plan définitifs de ces deux branches ont été confiés à deux bureaux d'ingénieurs et les résultats des études promis pour l'été ne devraient pas tarder. La décision politique sera du ressort du prochain Grand Conseil.

3.   Le financement est un peu notre talon d'Achille, les déclarations et les études sur ce sujet son quasi inexistantes et les démarches auprès de la Confédération restent vaines et pourtant celle-ci devrait participer à hauteur de 40% pour la construction d'infrastructures lourdes. En 1992, le Conseil d'Etat avait commandé une étude sur le financement des transports publics, à l'horizon 2005, s'intitulant Transpofinance. Cette étude faisait appel aux fonds privés et permettait un étalement du remboursement et un intéressement des entreprises mandatées pour les travaux.

Pourquoi le Conseil d'Etat ne fait-il pas preuve d'initiative en la matière ? Les plus beaux projet ne pourront se réaliser qu'avec un financement. Cette vérité de M. de la Palice ne semble pas être partagée par nos autorités.

En conclusion, les débats sur ces trois pétitions n'ont duré qu'une demi-heure et ont porté non pas sur le fond, mais sur l'opportunité de les renvoyer au Conseil d'Etat. La majorité a choisi le dépôt sur le bureau du Grand Conseil par 5 voix pour, 4 voix contre et 1 abstention

Comme exposé ci-avant, il ne s'agit pas d'un jugement de valeur sur ces démarches démocratiques mais d'éviter d'exiger un nouveau rapport du Conseil d'Etat sur des objets qui ont été largement débattus. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous recommandons de suivre le choix de la majorité.

(P 1087)

PÉTITION

pour des transports publics performants

La route de Meyrin et la rue de la Servette connaissent un trafic intense, notamment aux heures de pointe, c'est-à-dire aux heures où la majeure partie des personnes actives se rendent à leur travail ou en reviennent. Pour les riverains de ces deux axes routiers et, aussi, pour tous les habitants de la ville de Genève, ce trafic signifie pollution, bruit et danger. Nous pensons qu'un moyen de réduire ces nuisances est de permettre aux pendulaires d'utiliser les transports publics plutôt que leur voiture. Pour cela, les prestations des transports publics entre Saint-Genis, Meyrin et la ville de Genève doivent s'améliorer substantiellement.

 En conséquences, nous soussignés, habitants des communes suisses de Genève, Meyrin et Vernier et des communes françaises de Saint-Genis-Pouilly, Sergy et Thoiry demandons aux autorités citées en en-tête de faire en sorte que, dès maintenant et jusqu'à la mise en service du métro léger,

- le nombre ou la capacité des bus desservant la cité de Meyrin augmente quand nécessaire de manière que tous les passagers puissent y trouver place et voyager dans des conditions agréables ;

- des bus circulent directement (sans passer par la cité de Meyrin) entre Saint-Genis et Cornavin avec, pendant les heures de pointe, des cadences de 6 minutes ;

- un parking d'échange soit aménagé à la frontière nationale entre Meyrin et Saint-Genis ;

- le système de voies de bus et de feux préférentiels sur la route de Meyrin et la rue de la Servette soit renforcé pour permettre aux véhicules des transports publics de circuler rapidement ;

- les subventions aux entreprises de transports publics soient augmentées pour couvrir les dépenses liées à ces prestations supplémentaires.

 Nous demandons également que la ligne de métro léger susmentionnée qui constitue un des éléments du réseau des transports publics 2005 soit réalisée sans délais et tout de suite prolongée jusqu'à Saint-Genis.

  N.B. : 1 800 signatures

  Les Verts

  Parti écologiste meyrinois

  p.a. Pierre-Alain Tschudi

  Conseiller municipal

  41, rue des Lattes

  CH-1217 Meyrin

(P 1119)

PÉTITION

pour le développement des transports publicsdans la région franco-genevoise

Principes

La Coordination économique et sociale transfrontalière (CEST) reconnaît que l'essor économique, social et culturel du Genevois est intimement lié à la qualité des modes de transports et de communication, et cela aussi bien à l'intérieur de son territoire qu'entre celui-ci et la Région, et avec les métropoles européennes. C'est pourquoi la CEST privilégie le développement des transports collectifs, étant donné les avantages importants qu'ils apportent à la collectivité en termes de:

- amélioration de la mobilité pour tous, y compris les plus démunis (avec une aide de l'Etat, lorsque nécessaire, pour les chômeurs et les aînés par exemple);

- protection de l'environnement, utilisation rationnelle de l'énergie et de l'espace;

- plus grande sécurité des déplacements.

Constat, état des lieux

- LGV: Il manque une liaison rapide (environ 200 km/h entre le Genevois et le réseau européen à grande vitesse).

- Intercités Romandie/Chablais - Lyon et Sillon alpin (Chambéry/Valence): la desserte laisse à désirer (horaire, fréquence, matériel, correspondance, rapidité). Genève est la gare en cul-de-sac de 2 réseaux (CFF et SNCF) sans interpénétrations (sauf ";Pablo-Casals" espagnol).

- Desserte régionale Genève-Chablais/Vallée de l'Arve. La situation actuelle est totalement insatisfaisante. Conséquence du tout à la voiture, la part modale du rail ne dépasse guère les 2% en Haute-Savoie.

- Axe Genève-Romandie: saturation de l'autoroute et du rail.

- Passage de la frontière pénalisant pour l'usager. Genève est probablement la dernière gare d'Europe qui oblige les voyageurs à descendre du train pour passer la douane. Surprenante incapacité des autorités à régler ce problème d'effectif.

Objectifs/Stratégies/Actions

- LGV (ligne à grande vitesse): réaliser rapidement une première étape Genève-Bourg permettant de gagner 70 km entre Genève et le réseau à grande vitesse. Lancer un débat public sur les enjeux et les variantes LGV.

- Lyon-Romandie: introduire des trains ";Pendolino" entre Lyon/Turin et la Romandie (sans rupture de charge à Genève). Dès 1996, des ";Pendolini" relieront Genève à Milan.

- Sillon alpin (Genevois-Chambéry-Valence): continuer à améliorer l'offre ferroviaire sur le Sillon alpin afin qu'elle devienne attractive.

- Liaison Genève-Vallée de l'Arve/Chablais: améliorer la desserte ferroviaire à partir de l'Etoile d'Annemasse. Etudier une offre ferroviaire sans transbordement entre Bellegarde et Saint-Maurice et entre Evian et Sion.

- Réseau urbain et interurbain: développer fortement l'offre de transports entre le Pays de Gex (Cern en première étape) et Annemasse passant par le centre de Genève avec la mise en place d'un métro léger (super tram). La branche de Meyrin est prioritaire étant donné le potentiel déjà existant. L'offre du côté d'Annemasse doit concilier une desserte fine et le nécessaire développement du rail.

Propositions

1. Région

- Développement du réseau ferré haut-savoyard, notamment de l'Etoile d'Annemasse: Evian-Genève-Saint-Gervais/Chamonix-Bellegarde, par le doublement de la voie où cela est possible, l'augmentation de la vitesse, la rectification des courbes et la modernisation de l'exploitation.

- Inclure Genève dans le réseau Intercités de la Région Rhône-Alpes.

- Introduction de ";Pendolini" Turin-Chambéry-Genève et Lyon-Genève.

- Revitalisation de l'axe Genève/Genevois/Chablais-Chambéry/Valence (TER, Intercités) pour en faire un Sillon alpin régional.

- Développement du partenariat franco-suisse, sur le modèle des lignes D et H des TPG, notamment en ce qui concerne la communauté tarifaire.

- Poursuite et développement du conventionnement dans Rhône-Alpes.

2. Tonkin-Rive sud du Léman

- A court terme, maintien de la ligne touristique du Tonkin.

- A moyen terme, réouverture de la ligne Evian-Saint-Gingolph.

- A terme, création de 2 lignes régionales Evian-Sion et Lausanne-Saint-Maurice, en remplacement de la ligne Lausanne-Sion (voir étude de l'EPFL-Lausanne).

3. Métro léger transfrontalier

- La mise en place du métro léger Meyrin/Cern-Cornavin-Annemasse, avec une première étape Centre-Ville-Meyrin/Cern.

- Continuation des études de la branche d'Annemasse et étude de la préservation de l'avenir du rail entre Genève, Annemasse et le Chablais/vallée de l'Arve. La liaison ferroviaire Eaux-Vives-Annemasse ne doit pas être supprimée sans garantie qu'une liaison de remplacement est mise en place.

4. Chaîne de transports

- Des interconnexions efficaces dans la chaîne des transports. Des réseaux urbain (tram, bus) et interurbain (bus régionaux, métro léger) au TGV, en passant par le réseau ferroviaire régional, sans oublier les parcs d'échange, y compris en France.

- La mise en correspondance des réseaux LGV et régional (voir TGV Nord).

- Un passage de la frontière à Cornavin qui ne soit pas dissuasif pour les utilisateurs, et des Intercités qui traversent Genève.

- Complémentarité des modes de transports avec priorité au rail.

5. Fret

- Transfert des marchandises sur le rail, dans l'esprit de l'Initiative des Alpes.

6. Ligne à grande vitesse LGV

- (Léman-Mont-Blanc ou Sillon alpin);

- en première étape, revitalisation de la ligne des Carpates (Bellegarde-La Cluse-Bourg-en-Bresse).

Mesures d'accompagnement

Les mesures d'accompagnement suivantes devront être incluses dans le dossier LGV et ainsi faciliter son acceptation par tous les acteurs en présence:

- véritable transfert modal de la route et de l'avion au rail;

- impact sur l'environnement des régions traversées réellement prises en compte;

- maintien des lignes régionales transfrontalières de Vallorbe, de Pontarlier, de Besançon (via Le Locle) ainsi que réouverture de celle de Delle;

- liaison entre les réseaux suisse et français par la ligne nouvelleLa Praille-Pied-du-Salève;

- gare principale à Genève-Cornavin, avec une antenne Genève-Sud à Annemasse (liaison avec le métro léger) et non une gare bis hors agglomération de type SNCF.

De plus, le projet de la variante Léman-Mont-Blanc doit inclure:

- la prise en compte de l'amélioration de la desserte Genève-Chambéry-Grenoble et Genève-Annecy (Sillon alpin régional) et de

- la complémentarité avec la ligne TGV Lausanne-Vallorbe-Dôle.

Alain Rouiller

Coordination économiqueet sociale tranfrontalièreAin-Genève-AnnemasseSITRue des Chaudronniers 161204 Genève

(P 1122)

PÉTITION

pour l'accélération du programme des transports publics

Considérant (TC2005):

- le vote du 9 juin 1996 contre la traversée routière de la Rade;

- le plan TC2005 (transports collectifs 2005) adopté par le Grand Conseil en 1993 suite au vote populaire de 1988;

- la nécessité d'améliorer rapidement l'offre de transports publics dans la région genevoise;

- que les lignes 13bis (Lancy - Cornavin - Nations) et 13ter (Lancy - Place Neuve - Trois-Chêne) ne sont pas encore programmées;

- que le métro léger CERN - Cornavin - Annemasse n'a pas encore de financement;

- que la construction du métro léger et des trams bénéficie en principe de subventions fédérales de l'ordre de 40% (séparation des trafics);

Considérant (TGV):

- que les 2 projets TGV (Alpes - Léman-Mont-Blanc via Mâcon et Sillon alpin via Chambéry) prévoient tous deux d'utiliser le tracé par le sud du canton;

- que le Grand Conseil a lié la mise en place de la branche d'Annemasse du métro léger à la création d'une ligne ferroviaire entre les réseaux suisse et français (voir RD240-A);

- la convention de 1912 prévoyant que la Confédération prendra en charge la liaison entre les réseaux suisse et français;

- le projet des NLFA (transversales alpines), adopté très nettement en votation populaire par le peuple suisse, comprend la liaison avec le réseau européen à grande vitesse à Genève;

- que la liaison La Praille - Pied-du-Salève aura une importance régionale et internationale et peut donc être lancée avant de connaître l'issue des discussions avec la France,

la Coordination transports demande:

TC2005:

- l'accélération du programme TC2005, en particulier les lignes 13bis et 13ter (branches des Acacias et des Nations), sous forme de métro léger (site propre, quais à niveau, priorité aux carrefours, etc.), dans la partie nouvelle;

- la confirmation que le projet de prolongation du tram 13 aux Palettes, prévue pour juin 1997, ne sera pas à nouveau retardé;

- d'affecter les montants prévus pour le tunnel de Frontenex à la construction du métro léger (CERN - Annemasse) et à la trans-formation des lignes 13bis et 13ter en métro léger au lieu de trams classiques;

- de donner la priorité à la branche de Meyrin du métro léger qui occasionne moins de problèmes;

- de lancer rapidement la concertation, comme le prévoit la loi sur les transports publics;

Liaison TGV:

- que les terrains nécessaires entre La Praille et le Pied-du-Salève soient réservés et affectés à la zone ferroviaire;

- que les études soient affinées et le projet mis à l'enquête rapidement (liaison Cornavin - La Praille) et lancées sans délai (La Praille - Pied-du-Salève);

- de lancer le débat public afin d'obtenir un soutien populaire.

Coordination transports

16, rue des Chaudronniers1204 Genève

Disquette

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Rapporteur: M. Andreas Saurer.Erreur! Signet non défini.

La commission s'est donc réunie à 8 reprises entre le 4 mars 1997 et le 26 août 1997 pour discuter les deux problèmes essentiels soulevés par ces pétitions, à savoir :

- Faut-il commencer par la revitalisation de la ligne des Carpates ou par la construction d'une nouvelle ligne TGV Mâcon-Genève pour améliorer la liaison TGV Paris-Genève ?

- Faut-il donner la priorité au tronçon de Meyrin ou commencer par le tronçon Eaux-Vives-Annemasse lors de la construction du métro léger ?

Huit séances pour conclure qu'il faut continuer à ne rien faire... jusqu'au moment où la Chambre de commerce et d'industrie se réveille et se rend compte que les liaisons de transport nationales et internationales jouent un rôle central dans le choix d'implantation des grandes entreprises (pour 52% des entreprises) et que le critère des transports est nettement plus important que celui de la fiscalité qui n'intervient qu'en 5e position avec 36%. Ainsi, dans la 9e séance - mais nous avions déjà terminé les travaux concernant les pétitions - tout d'un coup, la majorité change d'avis et décide, à notre grande satisfaction, de donner la priorité à la revitalisation de la ligne des Carpates.

Ce mode de fonctionnement est très symptomatique des partis de l'Entente en matière de circulation. En effet, il n'est pas rare que qu'on trouve un consensus en commission avec les commissaires PDC et radicaux. Malheureusement, ce genre de consensus est souvent de courte durée, car il suffit que le parti libéral se mette à rugir en coulisses pour que tout le travail consensuel s'écroule, comme c'était le cas lors des débats sur les 30 km/h ou sur les parkings d'échange. Mais, le vrai décideur en matière de circulation - comme, par ailleurs, dans bien d'autres domaines également - n'est pas le parti libéral mais la Chambre de commerce. Ainsi, il a suffi que cette dernière change d'avis en matière de TGV pour que nos vaillants députés de l'Entente deviennent des fervents défenseurs de la proposition de l'Alternative.

Nous nous réjouissons évidemment que la Chambre de commerce et, par conséquent, aussi les partis de l'Entente aient changé d'avis et reprennent maintenant notre proposition concernant la revitalisation de la ligne des Carpates.

Malheureusement, en ce qui concerne la priorité du tronçon de Meyrin, la Chambre de commerce n'a pas encore donné de signe aux partis de l'Entente et, par conséquent, rien ne peut se faire tant que nous avons la même majorité parlementaire et gouvernementale.

Rappelons le principaux éléments justifiant la nécessité de donner la priorité au tronçon de Meyrin:

- seulement quelques pour-cent des habitants de la Savoie ont pris l'habitude d'utiliser les transports publics contre 25% des Meyrinois;

- malgré un potentiel très important du côté de la Savoie - plus de 90% de la population est ";obligée" d'utiliser la voiture -, il n'y a aucune demande, ni de la part de la population, ni de la part des autorités de développer les transports publics;

- il n'existe pas de projet de parking d'échange à la gare d'Annemasse, un maillon indispensable si on veut favoriser l'utilisation des transports publics;

- le tracé du métro léger n'est pas réglé entre Eaux-Vives et Annemasse; en effet, faut-il le mettre en lieu et place de la Micheline ou faut-il prévoir une prolongation du tram 12 ?

- aussi bien les autorités que la population - pratiquement 2000 meyrinois ont signé la pétition des VERTS de Meyrin - demandent avec insistance une augmentation de l'offre en matière de transports publics entre Meyrin et Genève;

- la demande de réaliser en priorité le tronçon de Meyrin est également soutenue par l'Association des communes genevoises.

Par conséquent, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adresser ces pétitions au Conseil d'Etat.

Débat

M. Jean-Claude Vaudroz (PDC), rapporteur de majorité. Les domaines abordés par les pétitionnaires sont essentiellement : les lignes à grande vitesse; le métro léger transfrontalier et l'extension du réseau de tramway ainsi que le financement.

La majorité de la commission a essayé d'éviter au Conseil d'Etat de fournir un nouveau rapport sur des objets qui ont été très largement débattus. En effet, cela fait seize ans que le Grand Conseil parle d'une liaison Meyrin-gare des Eaux-Vives. Je ne peux énumérer les rapports sur ce sujet, tant ils sont nombreux. Toutefois, un fait nouveau réside dans le projet de loi 7758 qui demande de modifier la loi sur le réseau des transports publics et obligera la commission à rediscuter de l'ensemble de ces projets. Pour cette raison, je vous propose de suivre la conclusion de la majorité de la commission, soit le dépôt du rapport sur le bureau du Grand Conseil.

M. David Hiler (Ve), rapporteur de minorité. Le but des pétitionnaires et de la minorité de la commission n'est pas de recevoir des rapports supplémentaires, mais bien - Monsieur Vaudroz, vous semblez l'avoir oublié - d'infléchir la politique suivie depuis quatre ans. Pour cette raison, nous souhaitons renvoyer ces pétitions au Conseil d'Etat. Même abordées, les questions seront, par ailleurs, traitées dans le cadre d'un projet de loi. Certaines personnes ont usé des droits démocratiques et populaires pour donner leur point de vue. La minorité partage leurs opinions pour l'essentiel. Par conséquent, la logique en politique veut que nous renvoyions ces pétitions au Conseil d'Etat en le priant de leur donner suite. Je vous invite donc à adresser ces pétitions au Conseil d'Etat, comme le prévoyait le rapport de minorité.

Mme Liliane Charrière Urben (S). Je suis d'accord avec les propos de M. Hiler, mais la solution de déposer ces trois objets sur le bureau du Grand Conseil est trop polie. En effet, déposer, archiver, classer, cela signifie : «jeter» en matière de pétition ! N'y voyez pas de méfiance envers quiconque, mais nous souhaitons que ces trois objets soient renvoyés au Conseil d'Etat, ne serait-ce que par égard pour les pétitionnaires.

Les événements évoluent rapidement. Par exemple, le rapport de l'automne 96, n° 268, et celui de mai 97, n° 276, faisant le point de la situation sur l'évolution de la politique du Conseil d'Etat en matière de transport sont déjà dépassés. Cela signifie que le point du rapport n° 276, déposé en mai 97, a été traité au printemps 97; cela fait presque un an...

Nous souhaitons que ces trois objets soient renvoyés au Conseil d'Etat pour complément d'explications par égard pour les nouveaux députés qui doivent déjà s'adapter à leurs nouvelles tâches. Il n'est pas nécessaire que ce rapport soit exhaustif et comprenne quatre-vingts pages. Toutefois, il serait intéressant que nous sachions, par exemple, ce qu'il advient des tractations ayant lieu à propos de la ligne du Tonkin ? Des gens souhaitent la voir revitalisée. Même si cette ligne n'est pas sur notre territoire, nous sommes tout de même concernés par la desserte de la région.

Par ailleurs, dans le rapport n° 276 à la page 4, je cite : «sur le plan cantonal, le financement - donc la politique des transports - est de 30 millions inscrits au budget d'investissement de l'Etat.» La moitié seulement de cette somme y a été inscrite, cela pour différentes raisons qu'il serait intéressant de trouver explicitées quelque part. Je vous propose de renvoyer ces objets au Conseil d'Etat, suivant en cela le rapport de minorité.

M. Pierre Ducrest (L). Il est étrange d'entendre le rapporteur de minorité prendre au bond la place de M. Saurer qui avait, dans un baroud d'honneur, décidé de ne pas admettre le renvoi de ces pétitions sur le bureau du Grand Conseil, mais d'en renvoyer une au Conseil d'Etat.

Ces pétitions ont pris de l'âge. Que se passe-t-il ? Pendant quatre ans, le Conseil d'Etat a prouvé par toutes ses actions qu'il avait été dans le sens des pétitionnaires, soit par des actions soit par des volontés en mettant au point toute une stratégie qui a débouché sur différents projets et rapports soumis à la commission des transports. Cette dernière a pris acte de ces rapports et vous, Mesdames et Messieurs les députés, vous avez pris acte dans ce parlement de ces rapports dans lesquels étaient incluses toutes les demandes ou toutes les explications relatives à ces pétitions.

A quoi vous sert-il, alors que vous avez la majorité, de renvoyer ces pétitions au Conseil d'Etat, puisque déjà vous affirmez votre majorité par un projet de loi 7758 qui va changer bien des choses dans les desiderata du parlement relativement au métro léger entre autres.

A mon avis, il faudrait faire table rase et repartir à zéro. Mais, si tant est que la volonté de la nouvelle majorité est de mettre au point différentes stratégies de transport, qu'elle ne soit pas ringarde et ne revienne pas en arrière avec un projet dépassé !

M. Jean-Claude Vaudroz, rapporteur de majorité. Mais, il veut encore dire quelque chose !

M. David Hiler (Ve), rapporteur de minorité. Oui, Monsieur Vaudroz, je veux encore ajouter quelque chose. Pour vous, il est toujours question de procédure et jamais de politique, n'est-ce pas ? Il est donc bon de rappeler les enjeux. Pendant les quatre dernières années, ce qui forme aujourd'hui la nouvelle majorité - la minorité d'autrefois - n'était pas particulièrement satisfaite du rythme d'avancement des travaux. Des rapports, c'est vrai, Monsieur Ducrest, nous en avons reçu des kilos, mais, sur le terrain, vous nous permettrez d'avoir été un peu moins satisfaits. Je ne suis pas sûr que les pétitionnaires, même si leurs désirs ont «pris de la bouteille», soient plus satisfaits aujourd'hui. Par conséquent, nous sommes d'avis que leurs protestations méritent une certaine considération. Nous ne sommes pas satisfaits non plus, et vous le savez, puisqu'un projet de loi a été déposé récemment. Depuis longtemps déjà, nous insistons pour que l'on commence par le tronçon Meyrin-Rive.

Le but n'est pas de bloquer l'administration avec des rapports savants, mais de changer de politique. Généralement, Monsieur Ducrest, pour changer de politique, une page A4 suffit. Les pétitionnaires et la nouvelle majorité attendent un changement. Je comprends vos arguments visant à dire que le sort des pétitions est de déboucher sur du papier, car c'est ce qu'a fait pendant quatre ans le gouvernement que vous souteniez. Les pétitions n'ont jamais abouti à autre chose; jamais il n'y eut de réalisation sur le terrain.

A l'avenir, nous souhaitons qu'il en soit autrement. Nous faisons confiance - sous réserve d'examen - à ce nouveau Conseil d'Etat. Nous pensons qu'il sera un peu plus rapide et qu'il suivra une politique un peu plus réaliste. Mais, pour l'heure, à titre de recommandation, nous lui renverrons, si vous êtes d'accord, Mesdames et Messieurs les députés, ces pétitions pour examen.

Le président. Je mets aux voix les conclusions du rapport de majorité.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

Le sautier compte les suffrages.

Mises aux voix, les conclusions du rapport de majorité de la commission des transports (dépôt des pétitions sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont rejetées par 49 non contre 37 oui.

Mises aux voix, les conclusions du rapport de minorité de la commission des transports (renvoi des pétitions au Conseil d'Etat) sont adoptées.

P 1150-A
10. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition déposée par les voisins du café-restaurant Le Marchand de Sable à Carouge. ( -) P1150
Rapport de Mme Janine Hagmann (L), commission des pétitions

En date du 4 avril 1997, les locataires des immeubles 13 et 15, rue de la Filature et 4, rue Vautier, à Carouge ont demandé à l'ASLOCA d'adresser aux autorités cantonales une pétition concernant les nuisances provoquées par la clientèle de l'établissement Le Marchand de Sable. Après l'avoir enregistrée, le Grand Conseil la renvoya à l'examen de la commission des pétitions. Cette dernière, sous la présidence de M. Luc Barthassat, la traita lors de ses séances des 16, 30 juin, 26 août et 20 octobre 1997. La teneur en est la suivante:

(P1150)

PÉTITION

contre les nuisances occasionnées par la clientèledu Marchand de Sable

Les locataires des immeubles 13 et 15, rue de la Filature et 4, rue Vautier, à Carouge, doivent subir, depuis trois ans en tout cas, des nuisances inadmissibles du fait de la clientèle de l'établissement Le Marchand de Sable. La cour, sur un des côtés de l'établissement, est régulièrement investie par cette clientèle pendant la nuit.

Outre le tapage nocturne, qui nous oblige à fermer nos fenêtres même en été, nous avons, pendant la journée, une vue sur une cour encombrée de bouteilles cassées, déchets, préservatifs, vomissures, urine. Il s'ensuit une odeur nauséabonde sur cour.

Toutes les démarches entreprises auprès de l'établissement Le Marchand de Sable et la régie Moser & Cie (qui gère les immeubles 13, rue de la Filature et 4, rue Vautier) n'ont abouti à aucun résultat. Nous demandons que les pouvoirs publics interviennent maintenant d'urgence pour faire cesser définitivement ces nuisances.

Nous remettons cette pétition à l'ASLOCA, Association genevoise de défense des locataires, pour qu'elle la transmette aux autorités compétentes.

1. Audition des pétitionnaires (16 juin 1997)

M. Molo représente l'ASLOCA-Rive et remplace M. De Dardel. Les locataires des immeubles 13 et 15, rue de la Filature ainsi que ceux du 4, rue Vautier se sont adressés à l'ASLOCA pour qu'elle transmette une pétition au Grand Conseil qui exprime leur mécontentement, car ils n'arrivent pas à faire cesser les nuisances occasionnées par les utilisateurs du bar dénommé Le Marchand de Sable. Ils se sont adressés au département de justice et police et des transports pour que la police prenne des mesures. M. Ramseyer a très bien accueilli leurs revendications et a affirmé qu'il allait entreprendre quelque chose rapidement. Pourtant la situation ne cesse d'empirer sans aucun changement depuis plus de trois ans. Il ne s'agit pas d'une simple querelle de voisinage, les voisins du Marchand de Sable ont leur vie réellement empoisonnée par les clients de l'établissement. M. Ramseyer a conseillé d'agir devant un tribunal civil, mais l'ASLOCA souhaite trouver une procédure plus rapide. Le principal problème des locataires se situe dans la cour intérieure de leur immeuble, cour dans laquelle les jeunes viennent boire et se soulager. Il y a bien une grille qui en barre l'accès, mais elle ne fait qu'un mètre de hauteur, il est donc facile de passer par-dessus. Il suffirait de mettre une grille plus élevée ainsi qu'un portail pour que l'accès à la cour ne soit plus possible. Les travaux pour cette installation sont estimés à 5 000 F, somme qui devrait être assumée par la tenancière de l'établissement incriminé.

Mme Ducret, Mme Lachat et M. Grandjean expliquent que leur situation est devenue intenable. Ils estiment que les limites de l'acceptable ont été franchies, qu'il est temps de réagir, mais personne n'est d'accord de débourser le moindre sou pour améliorer la situation, ni le propriétaire, qui voit pourtant son immeuble se dégrader, ni la régie, qui refuse de prendre à sa charge les travaux demandés pour empêcher l'accès à la cour, ni la gérante de l'établissement, personne n'accepte de payer ces travaux. Les désagréments peuvent donc continuer encore longtemps. Les jeunes sont responsables d'actes de vandalisme qui dépassent l'enceinte du Marchand de Sable. Certains soirs, plus de 200 jeunes sont regroupés sur le trottoir devant ce bistrot où la bière est consommée en grande quantité. Les effets secondaires sont inévitables et Le Marchand de Sable n'est équipé que d'un seul cabinet. Les locataires éprouvent un sentiment d'insécurité et redoutent même quelque intrusion chez eux.

M. Escanez n'habite pas à cet endroit, mais travaille dans la boutique voisine du bar. Il s'occupe de la maison Escanez Piano. Tous les matins, sa vitrine est souillée, le trottoir devant chez lui recouvert de débris de verres cassés, les murs peints de graffitis et, comme la voirie ne passe que plus tard, il est obligé de nettoyer devant chez lui avant de commencer sa journée de travail. Sa vitrine a déjà été cassée à plusieurs reprises. S'il demande une intervention à la police, les gendarmes répondent qu'ils ne veulent pas venir parce qu'ils ne peuvent rien faire; ils ont peur de venir mettre de l'ordre; le mieux serait de fermer ce bar qui crée beaucoup de problèmes. Il constate qu'il manque une véritable terrasse devant cet établissement, raison qui oblige les jeunes à se tenir sur la route. Il craint l'éventualité d'un accident. Le but de la pétition est de faire bouger les choses.

2. Audition des représentants de la régie Moser & Cie (30 juin 1997)

Mme Lahlou, M. Carco

Mme Lahlou travaille dans le service juridique de la régie Moser alors que M. Carco s'occupe du service technique. Ce dernier rappelle la situation du Marchand de Sable. Le bar est divisé en deux salles qui ne sont reliées que par la cuisine. Il n'y a qu'un seul WC qui se trouve dans la salle où il n'y a pas de tables. Les clients qui consomment dans l'autre salle sont donc obligés de sortir pour se rendre aux toilettes. Il est techniquement impossible de relier les deux parties du bar pour faciliter l'accès aux toilettes.

La régie a décidé de prendre des mesures. Le portail de la cour est maintenant fermé dès 19 heures; il sera même rehaussé et des barreaux seront installés à la fenêtre qui donne sur la cour, ce qui ne permettra plus aux clients d'enjamber la fenêtre pour se rendre dans la cour. Le propriétaire a accepté de prendre ces travaux à sa charge.

Le problème du Marchand de Sable est le même que pour les autres bistrots de Carouge qui ont tous beaucoup de succès et peu de place pour accueillir la clientèle. Le problème de la voie publique est donc un problème commun à tous les cafés de Carouge. Dans le cas exposé à la commission des pétitions, la seule chose que puisse régler la régie est de faire bloquer la cour. Mme Ducret, qui est à l'origine de la pétition, a entamé une action en justice contre la régie. Elle demande des dédommagements. En conséquence, la régie s'est retournée contre la locataire. Cet immeuble est déficitaire, il ne rapporte rien tant les frais d'entretiens sont élevés. La régie s'occupe de faire régulièrement nettoyer la cour ainsi que la cage d'escalier mais refuse de faire le travail de la police sur la voie publique. Elle a fait des suggestions d'amélioration à la gérante du bar qui ne veut rien entreprendre, estimant que les autres établissements publics de la rue Vautier occasionnent autant de nuisances que son propre bar. La régie annonce qu'elle va entreprendre la réfection complète de la cage de l'escalier tellement elle est détériorée. Elle espère qu'une solution sera trouvée pour régler ce problème.

3. Audition de Mme Pont, gérante du Marchand de Sable (30 juin 1997)

Mme Pont fait savoir que le problème lié à la pétition, c'est-à-dire la cour de l'immeuble, est sur le point d'être réglé en conciliation des baux et loyers. La régie a accepté de prendre en charge le rehaussement du portail et la pose des barreaux aux fenêtres qui donnent sur la cour (pose qui doit encore être acceptée par la commission du Vieux-Carouge). Pour ce qui est de la voie publique, elle ne veut pas porter le chapeau pour tous les établissements de Carouge. Elle signale qu'une épicerie qui est ouverte jusqu'à 2 heures du matin s'est installée à côté du Chat Noir et que les jeunes vont y faire des emplettes qu'ils consomment ensuite sur la voie publique. Son établissement est ouvert 7 jours sur 7, de 19 heures à 1 heure du matin en semaine et de19 heures à 2 heures du matin le vendredi et le samedi. Elle est satisfaite de sa clientèle.

4. Discussion de la commission

Les commissaires, dans un premier temps, pensent qu'il faut remettre les choses à leur place. Carouge a toujours été une ville de fête et cela ne doit pas changer. Souvent, les habitants de Carouge ne quitteraient pour rien au monde cette commune sympathique et pleine de charme à laquelle ils sont attachés. Mais habiter Carouge, c'est aussi accepter les nuits carougeoises ! Dans tout le canton, les bistrots qui marchent sont bruyants et il y a bien souvent des protestations. Ce n'est pas le rôle de la commission des pétitions de contrôler comment les bars sont tenus. Il semble que le problème est un problème de l'été qui revient chroniquement à Carouge et que certains tenanciers tiennent mieux leur établissement que d'autres. Il faut tout de même laisser vivre Carouge !

Dans un second temps, certains commissaires pensent que la police devrait être plus présente, jouant un rôle de prévention et non de répression, en incitant les jeunes à mieux se comporter. Ils estiment que le danger sur la voie publique est réel et ils ne voudraient pas qu'un accident, faute de recommandations, se produise.

En date du 28 août 1997, le président de la commission recevait un courrier de l'ASLOCA indiquant que des éléments nouveaux étaient intervenus dans le dilemme opposant Mme Ducret et la régie Moser . Par une décision du 20 juin 1997 de la commission de conciliation, Mme Ducret a obtenu que la régie Moser & Cie effectue, aux frais de la bailleresse, une surélévation de la barrière séparant la cour de la rue Vautier, ainsi que le placement de barreaux aux fenêtres de l'établissement Le Marchand de Sable.

De plus, la locataire a obtenu une réduction de loyer de 25% pour la période du 1er septembre 1996 au 15 juillet 1997.

En définitive, la surélévation de la barrière a été effectuée fin juillet 1997 / début août 1997.

Il apparaît cependant à la plaignante que les mesures prises par la régie ne sont pas suffisantes et que des importuns continuent de pénétrer dans cette cour pendant la nuit, la largeur des barreaux permettant de passer entre deux barreaux (voir annexe : lettre de Mme Ducret, du 2 octobre 1997).

5. Vote

Le 25 août 1997, avant la réception des informations de l'ASLOCA, les commissaires de la commission des pétitions ont décidé de vous proposer, par 7 voix (4 L, 2 R, 1 PDC) contre 5 (2 AdG, 2 PS, 1 Ve) et 1 abstention (PDC), Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement

ANNEXE I

ANNEXE II

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.

RD 287-1
11. Rapport de la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil pour l'année 1997. ( -) RD287
Rapport de Mme Geneviève Mottet-Durand (L), commission des visiteurs officiels

I. Introduction

La commission des visiteurs officiels (ci-après: la commission) s'est réunie à treize reprises, a tenu 5 séances et visité 6 établissements, le centre LAVI et le service du patronage.

Mme Mireille Gossauer-Zürcher en a assuré la présidence, assistée de Mmes Sylvia Leuenberger, vice-présidente, et Geneviève Mottet-Durand, rapporteur. Le bureau du Grand Conseil était représenté par Mme Nelly Guichard.

La commission adresse ses vifs remerciements à :

- M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat chargé du département de justice et police et des transports (DJPT);

- M. Alexandre Agad, secrétaire adjoint chargé du domaine pénitentiaire;

- M. Jacques Reymond, directeur du service de l'application des peines et mesures (SAPEM);

- M. Georges La Praz, directeur adjoint du SAPEM.

Ils ont assisté la commission d'une manière soutenue et donné à chaque fois les informations et explications utiles à son bon et efficace fonctionnement.

Elle exprime également sa profonde gratitude à MM. Armand Obrist et Jean-Michel Sallin, respectivement chef de service et adjoint au chef de service du Grand Conseil qui ont organisé les visites et les déplacements avec efficacité, et à M. Jean-Luc Constant, nouveau procès-verbaliste, pour la très grande qualité de son travail.

Enfin, elle remercie chaleureusement les personnes suivantes ainsi que leurs collaborateurs, pour leur accueil, leur disponibilité et les renseignements fournis:

- M. Laurent Walpen, chef de la police et ses collaborateurs;

- MM. Denis Choisy et Guy Savary, respectivement directeur et directeur adjoint de Champ-Dollon, et M. Henri Thomet, gardien-chef;

- Mme Marie-Jeanne de Montmollin, directrice de la Pâquerette;

- Mme Marianne Heymoz, directrice du pénitencier de Hindelbank,M. Martin Lachat, vice-directeur, M. Michael Imhof, collaborateur scientifique de l'office de la privation de liberté et des mesures d'encadrement, Mme Hedwige Ramseyer, responsable au sein du pénitencier;

- M. Armando Ardia, directeur du pénitencier de la Stampa, etM. Colombo, chef du service d'exécution des peines;

- M. Denis Pieren, directeur des Etablissements de la Plaine de l'Orbe,M. André Valloton, chef du service pénitentiaire vaudois, et M. Jean-François Madörin, directeur adjoint;

- M. Henri Nuoffer, directeur du pénitencier de Bellechasse,MM. Andréas von Kaenel et Paul-André Morandi, adjoints du directeur;

- M. Jean-Michel Claude, directeur du service du patronage;

- Mme Jacqueline Horneffer-Colquhoun, directrice du service de protection de la jeunesse;

- Mme Claire Rihs, adjointe à la direction de l'office de la jeunesse;

- M. Martin Stettler, doyen de la faculté de droit de l'université deGenève;

- M. André D. Schmidt, ancien juge à la Cour de justice;

- Mme Colette Fry, responsable du centre LAVI, et Mme Gisèle Gampert-Péquinot, présidente de l'Instance d'indemnisation.

II. Activités de la commission

a) Les visites d'établissements

1. La prison de Champ-Dollon (4 mars-2 septembre 1997)

Le taux d'occupation a été très fluctuant; toutefois, la moyenne s'élève à 103% alors que l'établissement a connu une certaine accalmie durant les3 années précédentes; 84,4% des détenus sont entrés en 1997, 14,8%, soit36 personnes dont 22 n'ont pas encore été condamnées, sont arrivés en 1996. Ces chiffres confirment qu'il n'y a pas de détenus qui stagnent en préventive depuis plusieurs années. M. Gérard Ramseyer, président du DJPT, dont la présence a été appréciée lors de la séance du 2 septembre 1997, constate qu'aucun problème particulier n'est à relever à la prison. Cette dernière est bien dirigée et bien tenue. Il fait part d'une décision du Tribunal fédéral qui consiste en un réaménagement des locaux pour l'hébergement des requérants d'asile.

Si le coût des rénovations proposées s'avère trop onéreux, d'autres solutions devront être envisagées, comme, par exemple, une solution commune au niveau aéroportuaire international.

Au nom de la commission des visiteurs officiels, Mme la présidente a remercié chaleureusement MM. Choisy et Thomet qui quitteront prochainement leurs fonctions.

A chaque visite, ils ont accueilli la commission avec un intérêt certain, dans le souci de transparence et d'efficacité.

Lors de son audition, Mme Marie-Jeanne de Montmollin, directrice de la Pâquerette, relève que l'une des principales difficultés de cette section réside dans l'exiguïté des locaux, en particulier au niveau des ateliers, et que, pour des raisons de sécurité, il est important de pouvoir disposer de suffisamment d'espace. L'idée d'implanter un baraquement préfabriqué près de l'atelier existant doit être reprise rapidement car elle n'engage pas de gros frais, ni de personnel supplémentaire.

Mme la directrice souligne la bonne collaboration entretenue entre la Pâquerette et les écoles de commerce et signale que le DASS lui a accordé deux postes de sociothérateutes.

Dans le cadre de sa visite à Champ-Dollon, le 2 septembre 1977, la commission a reçu M. le juge André D. Schmidt qui est chargé d'examiner les cas d'arrestation ayant nécessité l'usage de la force, indépendamment de toute plainte. Après quelques malentendus dans la communication des dossiers qui sont apparus lors de ses premières interventions, M. André D. Schmidt relève qu'il reçoit tous les dossiers où l'usage de la force est mentionné, ce qui indique que la procédure de transmission des dossiers mise au point en 1996 (voir rapport 1996, ch. 5.1) fonctionne de façon satisfaisante. Le mandat de M. André D. Schmidt est particulier car il n'a aucun pouvoir décisionnel, mais a pour mission de signaler à la présidence du DJPT les affaires qui justifient, selon lui, l'ouverture d'une enquête disciplinaire. Ce sont en moyenne dix à quinze dossiers qui lui sont remis mensuellement. M. André D. Schmidt informe régulièrement le département de l'état de ses travaux.

2. Le pénitencier de Hindelbank (22 avril 1997)

La détention de femmes a débuté en 1896, dans ce château cédé à l'Etat de Berne en 1866 qui l'a tout d'abord transformé en établissement de charité pour femmes. Les établissements propres à la détention ont été construits dans les années 50, à côté du château qui, lui, accueille l'administration. Ce pénitencier est divisé en 6 sections dont 5 sont actuellement ouvertes; 3 sont destinées à l'exécution normale des peines, les autres sont des sections spéciales, une constitue le projet «Haus im Grünen», une est destinée aux interventions de crises et une autre aux mères et enfants. Une section semi-liberté a été ouverte à Berthoud.

La consommation de stupéfiants dans l'établissement à laquelle est lié un taux élevé de séropositivité - 20% des détenues étaient séropositives en 1992-1993 - a conduit le service médical du pénitencier à mettre en place un programme d'information et de distribution de seringues stériles. Ces seringues sont à disposition dans un automate. Il est précisé que les détenues qui bénéficiaient d'un programme de méthadone avant leur arrivée peuvent le poursuivre au sein de l'établissement et que la consommation de stupéfiants a diminué depuis une année.

Un apprentissage peut être envisagé dans les ateliers de cartonnage, couture, poterie.

Le projet «Haus im Grünen» est une section spéciale, qui accueille des personnes en fin de peine, motivées et qui bénéficient de congés. Elles assurent tout le service quotidien dans une maison qui reste ouverte, située à quelques kilomètres du pénitencier.

Afin de responsabiliser davantage les détenues, le service social, auparavant centralisé, est aujourd'hui intégré dans les différentes sections.

L'établissement offre la possibilité de suivre des cours de langues donnés par des enseignants extérieurs ainsi qu'un programme d'éducation.

Le séjour moyen dans ce pénitencier se situe entre 2 et 4 ans, les condamnations se montent donc en moyenne à 6 ans.

3. Le pénitencier de la Stampa (29 avril 1997)

Vu l'exiguïté du territoire tessinois et son isolement du reste de la Suisse, l'établissement est muni de toutes les structures pénitentiaires - préventive, exécution de peine, haute sécurité, semi-liberté, semi-détention. Il compte, en moyenne 160 détenus - hommes, femmes - par jour. Sa population correspond à celle des autres établissements suisses, avec plus de détenus de nationalité italienne.

La Stampa dispose de moins de moyens que les autres établissements du pays. L'encadrement y apparaît plus flexible. Les gardiens et la direction disposent de leur propre façon de vivre avec la population carcérale, ils n'insistent sur la rigidité que là où elle s'avère nécessaire.

A l'instar de Genève, le canton du Tessin est doté d'une école cantonale de gardiens de prison qui précède la formation dispensée par l'école suisse des gardiens de prison.

Cette prison qui ne connaît pas de surpopulation compte 4 sections qui sont séparées par des ateliers; il n'y a pas de quartier d'isolement. Le service médical est performant; il se compose d'un médecin attaché à l'établissement et assisté de 3 aides-infirmiers. Les programmes de méthadone peuvent se poursuivre pour les courtes peines, ils sont interrompus dans les cas de longues détentions. La distribution de seringues stériles n'a pas cours au pénitencier de la Stampa. De manière générale, la politique de l'établissement vis-à-vis des stupéfiants est plus répressive qu'ailleurs en Suisse.

Un congé interne est accordé après 2 ans de détention. Les détenus ont la possibilité de passer quelques heures, 1 fois tous les 2 mois dans une petite maison située à quelques mètres du pénitencier. Ils peuvent y accueillir des personnes de l'extérieur. Annuellement, La Stampa reçoit un ou deux détenus genevois. Il s'agit en général de détenus dangereux.

4. Etablissements de la Plaine de l'Orbe (EPO) (3 juin 1997)

Les EPO traversent actuellement une période de mutation dans le domaine pénitentiaire et dans le domaine agricole. Ce dernier, qui demeure un outil nécessaire pour les détenus, verra une modernisation dont l'un des objectifs est l'auto-approvisionnement des établissements. Par ailleurs, des cultures proches de la nature seront mises en place.

Le domaine pénitentiaire est, quant à lui, confronté à un important problème dû à une augmentation des délinquants à caractère sexuel dont l'évolution a été particulièrement marquante au cours de ces deux dernières années.

Cette population carcérale nécessite un cadre sécuritaire élevé et les EPO ne sont pas dotés de l'équipement adéquat suffisant. Dès lors, des dispositions supplémentaires devront être prises. Certains de ces détenus purgent de longues peines, un secteur d'accueil leur est réservé et permet de les faire entrer dans un programme évolutif avec, quelquefois, des échanges avec des autres établissements fermés de Suisse, lorsque les risques apparaissent trop élevés.

5. Etablissements de Bellechasse (28 août 1997)

La nouvelle loi relative aux Etablissements de Bellechasse, entrée en vigueur le 1er mars 1997, modernise les anciennes dispositions légales et complète celles relatives aux établissements. Ceux-ci constituent une personne morale de droit public, dirigée par un organe supérieur de type conseil d'administration et par une direction. La principale innovation de cette loi est la création d'une commission consultative du personnel, instaurée à l'initiative de la direction, dont le président est également membre de droit à la commission administrative.

Les travaux de restructuration et de modernisation des bâtiments se poursuivent en parallèle à certains efforts menés également dans le secteur agricole. L'abandon du projet EEP 2000 touche également l'avenir de Bellechasse. Bien que comptant 17 places supplémentaires dans le bâtiment cellulaire, cet établissement n'est pas à même de proposer un régime sécurisé sans aménagements particuliers.

Genève conserve toujours une proportion importante de détenus dans ce pénitencier puisqu'elle s'élève parfois à 45%.

b) Autres visites

1. Le centre LAVI ( 25 février 1996)

Bien que n'étant pas directement concernés par la LAVI ou le centre d'indemnisation, les commissaires ont souhaité recevoir une information un peu plus approfondie sur les prestations diverses qui sont offertes aux victimes répondant aux critères de la loi. Cette instance travaille en étroite collaboration avec la police, les différents services sociaux, les hôpitaux et est à la disposition des victimes, 24 heures sur 24, tous les jours de la semaine.

L'instance d'indemnisation intervient pour une réparation d'un préjudice subi d'une part, et d'autre part pour une réparation morale.

2. Service du patronage (24 juin 1997)

Aujourd'hui, ce service se trouve en sous-effectif important compte tenu de la charge de travail continuellement croissante. Il y a 10 ans, M. Michel Porcher, ancien directeur, tirait déjà la sonnette d'alarme en demandant des forces et des moyens supplémentaires au vu de la dégradation de la situation sociale et économique de notre population.

M. Jean-Michel Claude, nouveau directeur, s'est astreint, dès son entrée en fonction en avril 1996, à une analyse précise et approfondie de la mission de son service, des objectifs à réaliser à court et à moyen terme, et des moyens dont il disposait pour répondre à ces exigences. Force est de constater que la charge de travail par poste a beaucoup augmenté ces dernières années, qu'en période difficile, il serait préférable d'intervenir socialement et de proposer un accompagnement soutenu aux personnes en difficulté, en constante augmentation.

En 1996, le centre a reçu 600 personnes, 40% sont sous mandat et 60% se sont présentées spontanément. L'aide qui leur est apportée est de tous ordres: gestion des affaires personnelles, recherche de logement, orientation des toxicomanes dans des lieux d'accueil, accompagnement dans la recherche d'un emploi, gestion de l'assurance-maladie, des frais médicaux. On constate donc que les assistants sociaux consacrent davantage de temps à régler des problèmes administratifs des usagers qu'à les assister socialement; les cas sont de plus en plus lourds, les situations personnelles plus complexes qui requièrent de plus en plus de temps et de moyens.

3. Visites non annoncées de postes de police (24 avril-12 mai 1997)

Le 24 avril 1997 à 15 h, une délégation de la commission a été reçue au poste de police du boulevard Carl-Vogt. MM. Rechsteiner, Guglielmetti et Théraulaz ont fait visiter aux 3 députés les violons. Il y a 14 cellules dont une double mais qui n'est jamais utilisée par plus d'une personne. Ce poste de police reçoit toutes les personnes faisant l'objet d'un mandat d'amener sur le territoire cantonal. Les cellules sont par conséquent souvent toutes remplies, de sorte que certains postes gardent plus longtemps que prévu les détenus. Les personnes arrêtées reçoivent de la nourriture aussi souvent qu'elles le désirent et bénéficient d'une couverture propre.

Selon M. Rechsteiner, chef de la police de sûreté, la police recourt rarement à l'usage de la force à l'égard des personnes détenues dans les violons. Si des lésions sont constatées, elles sont protocolées dans un rapport qui est directement transmis par l'état-wajor de la police à M. le juge André D. Schmidt. A l'inverse, l'usage de la force est plus souvent nécessaire lors des arrestations.

Le 12 mai 1997, une autre délégation de la commission a été reçue au poste de police de l'aéroport par M. Jean-Claude Ducrot, commissaire de police et chef de la police de l'aéroport. La discussion s'est plus particulièrement axée sur le problème des requérants d'asile dont la prise en charge incombe aussi à ce poste. Une restructuration des locaux est prévue pour la fin de cette année: le poste de police sera déplacé à Blandonnet, le SARA (service de l'asile et du rapatriement de l'aéroport) occupera les locaux de l'actuel poste de police et la police de l'aéroport se situera à l'intérieur de l'aéroport. Les commissaires ont visité les locaux, dont les violons composés de 2 cellules et 3 dortoirs de 6 places chacun, réservés aux requérants ou aux personnes en attente de refoulement.

Deux députées (Ve, S) souhaitent que la procédure concernant les visites des violons soit simplifiée afin que les hautes instances de la police n'aient pas à se déplacer pour accueillir la délégation.

III. Délinquants sexuels

Les travaux de la commission en vue de protéger les mineurs contre les délinquants sexuels se sont poursuivis en 1997 par l'audition de plusieurs personnes concernées par ce thème dont: : M. Martin Stettler, doyen de la faculté de droit de l'université de Genève, Mme Jacqueline Horneffer-Colquhoun, directrice du service de protection de la jeunesse, et Mme Claire Rihs, adjointe à la direction de l'office de la jeunesse. Ces travaux sont à l'origine de la résolution 331 concernant certaines mesures à prendre en vue de lutter contre la criminalité sexuelle et devaient également permettre l'élaboration d'un projet de loi introduisant dans la législation cantonale des mesures permettant d'interdire aux pédophiles d'exercer des professions ou d'avoir des activités les mettant en contact direct avec les enfants. Toutefois, conformément à la dernière invite de la motion 1088 concernant les mesures prises en matière de lutte contre la criminalité sexuelle s'agissant notamment des enfants, il appartiendra au Conseil d'Etat de proposer prochainement une telle modification légale qui, selon certains cadres du département de l'instruction publique auditionnés, devrait toucher la loi sur le placement des mineurs hors du foyer familial, du 27 janvier 1989 (J 6 25).

IV. Modifications légales et réglementaires intervenuesen 1997 dans le secteur pénitentiaire

Modification de la loi sur l'exécution des peines, la libération conditionnelle et le patronage des détenus libérés (E 4 50) et du règlement sur la libération, la réintégration et le patronage des condamnés et des internés (E 4 50.12)

Profitant d'un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat qui avait pour but de modifier la composition de la commission de libération conditionnelle afin que celle-ci puisse satisfaire aux exigences posées par le nouvel article 98a OJF, le Grand Conseil a décidé de revoir le fonctionnement du système de libération conditionnelle à Genève en réfléchissant à une meilleure gestion des risques des condamnés libérés. Pour y parvenir, les modifications suivantes ont été introduites:

- décharger la commission de libération conditionnelle des cas «bagatelles» (peines de moins de 3 ans) et confier ces cas au chef du département de justice et police et des transports (lequel peut décliner sa compétence s'il estime que le détenu présente malgré tout un risque particulier);

- assurer une composition pluridisciplinaire à la commission de libération conditionnelle (un juge, un médecin, un avocat, un travailleur social et trois laïcs);

- assurer la représentativité politique des membres laïcs (afin que la sensibilité populaire du moment soit également représentée);

- ouvrir, pour les cas les plus lourds (peines supérieures à 3 ans), le recours au tribunal administratif pour le détenu et pour le département de justice et police et des transports si ce dernier craint que l'élargissement du condamné présente un danger pour la sécurité publique;

- permettre au procureur général et au service de l'application des peines et mesures d'assister aux débats de la commission de libération conditionnelle avec voix consultative.

Ces modifications visant notamment à ce que la commission de libération conditionnelle se consacre pleinement aux cas les plus lourds devraient permettre de mieux apprécier et gérer les risques liés aux décisions de libération conditionnelle. C'est ce même souci qui a conduit le Conseil d'Etat a adopter, dans son règlement d'application (art. 5), la règle selon laquelle l'examen des dossiers de délinquants présentant un danger particulier ne doit pas être confié à un seul rapporteur. Il convient que de tels dossiers fassent l'objet d'un examen de la part de tous les membres de la commission. Il est en effet notoire que certains psychopathes sont extrêmement convaincants, manipulateurs, voire sympathiques. Certains ont une intuition aiguë pour détecter les points faibles de leur interlocuteur et les exploitent habilement. En confiant l'examen préalable du dossier à une seule personne on court le risque qu'elle soit séduite ou manipulée. L'examen par la commission plénière offre à cet égard la garantie d'une meilleure objectivité.

V. Rapport du CPT suite à sa visite en Suisse en 1996

Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a effectué sa deuxième visite périodique en Suisse du 11 au 23 février 1996. A cette occasion, il a inspecté, dans les cantons de Berne, de Genève, du Tessin, de Vaud, du Valais et de Zurich, une trentaine d'établissements consacrés à la garde à vue, à la détention préventive, à l'exécution des peines et mesures, aux soins psychiatriques et à l'accueil des requérants d'asile. Dans son rapport notifié au Conseil fédéral au début octobre 1996 et rendu public le 26 juin 1997, le CPT expose les constatations faites durant sa visite et formule à l'attention des autorités suisses un certain nombre de recommandations, commentaires et demandes d'informations, sur lesquels le rapport intérimaire du Conseil fédéral se détermine. Les prises de position des cantons concernés par la visite y sont notamment reprises.

De façon générale, le CPT se déclare satisfait de sa visite en Suisse. Il n'a recueilli aucun indice de torture dans notre pays. Il rapporte toutefois des cas dans lesquels des personnes allèguent avoir été, dans certains cantons, maltraitées par des membres du corps de police. Il formule aussi des remarques critiques relativement à certaines pratiques lors de l'arrestation de suspects, à la prise en charge de détenus souffrant de troubles psychiques graves (hôpital de Mendrisio, TI), aux possibilités restreintes de promenade (minimum 1 heure d'exercice en plein air par jour) et de loisirs en prison préventive (prison régionale de Berne) et aux examens corporels effectués dans un environnement inapproprié (aéroport de Zurich-Kloten). Mais ce sont surtout les conditions dans lesquelles les détenus sont transportés par train qui ont été jugées très problématiques par le Comité (cellule de 1,3 m2/absence d'accompagnement). Celui-ci revient par ailleurs sur des questions de principe déjà soulevées dans son premier rapport. Il s'agit notamment du droit invoqué de toute personne interpellée par la police d'être assistée par un avocat, de consulter un médecin de son choix et d'avertir de son arrestation un proche ou un familier, et ce dès le début de la garde à vue.

S'agissant de l'accès à un avocat dès le début de la garde à vue, le Conseil fédéral est d'avis que cette recommandation s'oppose aux intérêts de la poursuite pénale. Des contacts prématurés avec un avocat seraient susceptibles de compromettre l'enquête et se justifieraient d'autant moins que la garde à vue est de courte durée. Le Conseil fédéral constate par ailleurs que ce droit n'est garanti ni par la constitution, ni par la CEDH. Le Conseil fédéral laisse cependant une porte ouverte en indiquant qu'il conviendra de se pencher à nouveau sur cette question au moment des travaux législatifs tendant à l'unification de la procédure pénale en Suisse. Dans sa prise de position, le Conseil fédéral a fait savoir au CPT que l'exigence que toute personne arrêtée soit immédiatement présentée à un médecin ne se laisse pas non plus déduire de la constitution fédérale ou de la CEDH. En revanche, si une personne pouvait avoir été blessée, par exemple au cours de son arrestation, il convient d'ordonner d'office un contrôle médical immédiat (affaire Huarto c/ Suisse, rapport de la commission européenne du 8 juillet 1993). Selon le Conseil fédéral, on ne peut toutefois en déduire aucune prétention générale à un contrôle médical immédiat, obligatoire. Le Conseil fédéral a en outre rappelé que le principe selon lequel toute personne privée de sa liberté a le droit d'informer un proche, voire un tiers de confiance de son choix, du fait de sa détention est admis de façon générale en Suisse. La quasi-totalité des législateurs cantonaux l'ont inscrit dans leur code de procédure pénale sous des formes plus ou moins large. Le Conseil fédéral a également rappelé que le Tribunal fédéral a consacré le droit pour le détenu de bénéficier d'une heure de promenade par jour. Demeurent réservés les cas des détenus particulièrement dangereux ou purgeant une peine disciplinaire d'arrêts.

Pour ce qui est du transfert des détenus par train, la Conférence des chefs de départements de justice et police (CCDJP) et le Conseil fédéral admettent que celui-ci doit être revu. Il s'agit de remettre en cause fondamentalement le système actuel de transport. Il aurait de toute façon fallu s'y atteler prochainement vu que les nouveaux trains à deux étages et à inclinaison ne disposeront plus de compartiment cellulaire. La CCDJP a donc mandaté un bureau-conseil externe afin de trouver une alternative au transport en train. A titre transitoire, des wagons SNCF ont été transformés et mis en service pour assurer le transport de détenus dans de meilleures conditions et des directives ont été édictées, interdisant notamment de transporter plus d'un détenu par cellule.

Le CPT a également inspecté en 1996 certains établissements déjà visités en 1991. Il a pu alors constater avec satisfaction que les conditions matérielles de détention s'étaient améliorées.

Le département fédéral de justice et police établira, à fin octobre de cette année, un rapport de suivi portant sur la mise en oeuvre des recommandations du CPT, ainsi que sur d'autres mesures prises au niveau de la Confédération et des cantons pour améliorer la situation des personnes détenues.

S'agissant plus particulièrement du canton de Genève, où une délégation du CPT s'est rendue les 15 et 16 février 1996, il convient de relever ce qui suit :

Tous les cas d'allégations de mauvais traitements cités dans le rapport du CPT ont fait l'objet d'une information détaillée de la part des autorités genevoises décrivant l'état de la procédure. Il va de soi que ce document n'a pas été publié pour des motifs relevant de la protection des données. A ce propos, on peut toutefois signaler que les autorités genevoises relèvent que la majorité des cas cités n'ont pas fait l'objet d'une plainte pénale de la part des prétendus lésés, de sorte que les allégations mentionnées dans les constats de lésions traumatiques ne sont pas confirmées. Par ailleurs, dans les cas où il y a eu plainte pénale, l'examen de celle-ci a révélé le plus souvent que les fonctionnaires de police ont agi de manière légitime et conforme au droit, de sorte que le procureur général a prononcé un classement. Enfin, les autorités genevoises rappellent que, chaque fois que des constats de lésions traumatiques sont établis, les rapports sont transmis par l'état-major de la police au procureur général, à la présidence du DJPT, ainsi qu'au juge André D. Schmidt pour déterminer si une suite pénale ou administrative se justifie. Le rapport du Conseil fédéral signale au demeurant que le nouvel article 38 de la loi sur la police, entré en vigueur le 22 juillet 1996, crée la base légale de la mission confiée depuis plusieurs années à M. André D. Schmidt.

Le CPT a salué les innovations introduites par le projet de loi 6957 s'agissant des garanties contre les mauvais traitements des personnes détenues (notamment, information d'un proche, accès à un médecin) et recommande aux autres cantons d'adopter des mesures analogues. Il formule une recommandation identique s'agissant d'un contrôle externe de la détention et se félicite que de telles visites de lieux de privation de liberté soient effectuées dans notre canton par la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil (à noter que les autorités tessinoises étudient la possibilité de créer une commission semblable et que Zurich dispose d'une commission d'exécution des peines constituée de députés et de magistrats exerçant un contrôle sur les lieux de détention).

La visite par le CPT du nouvel Hôtel de police, des locaux de la police à l'aéroport, et ainsi que du poste de police de Pécolat, n'a pas suscité de remarques particulières dans la mesure où les violons qui s'y trouvent satisfont aux normes du CPT.

Lors de la visite du commissariat de police sis boulevard Carl-Vogt, le CPT s'est réjoui que, par rapport à sa précédente visite, des mesures visant à améliorer les conditions de détention ont été prises dont le principe a également été ancré dans la loi sur la police (équipement minimum des cellules, registre des violons). Le CPT déplore toutefois l'absence de lumière naturelle dans ces locaux qui ne sont cependant destinés qu'à la détention de courte durée.

Suite à sa visite du Centre d'enregistrement des requérants d'asile à Genève (CERA), le CPT a relevé que les personnes hébergées n'ont eu aucune critique d'aucune sorte à formuler à l'encontre du personnel travaillant dans ce centre. Il a en outre jugé que les conditions matérielles y étaient «globalement acceptables» bien que le taux d'occupation lui semblât élevé dans certaines chambres. Le Conseil fédéral est toutefois d'avis que le taux d'occupation est acceptable dans la mesure où il ne s'agit que de dortoirs pour la nuit. Le CPT a invité les autorités compétentes à améliorer l'activité récréative mise à disposition des personnes hébergées au CERA. A relever que la délégation du CPT a été «favorablement impressionnée par les soins médicaux assurés aux personnes hébergées au Centre».

VI. Introduction de la mixité à «La Clairière»

Depuis plusieurs années, le Tribunal de la jeunesse, la Fondation officielle de la jeunesse, ainsi que plusieurs organismes chargés de l'éducation spécialisée, sollicitent l'ouverture de «La Clairière» à la mixité. Rappelons que, depuis 1963, les garçons privés de liberté sont placés à «La Clairière», alors que les jeunes mineures, ne disposant pas à ce jour d'un établissement approprié dans notre canton, sont placées par le Tribunal de la jeunesse soit à la maison d'arrêt pour femmes de «Riant-Parc», soit - pour les observations en milieu fermé - au Centre communal pour adolescents de Valmont (à Lausanne) dont le coût de la prise en charge est très élevé. Afin de remédier à cette situation qui constitue une inégalité de traitement entre adolescents et adolescentes, le département de justice et police et des transports a demandé à la Fondation des Foyers Feux-Verts de se déterminer sur la faisabilité d'un scénario consistant à transformer l'actuel bloc de Montfleury en établissement mixte pour mineurs et à affecter l'actuel bâtiment occupé par «La Clairière» à la détention administrative (LMC). La Fondation des Foyers Feux-Verts a donné son accord de principe au printemps 1996 et les études ont pu débuter. L'office fédéral de la justice a, quant à lui, donné son assentiment au principe de l'aménagement de l'institution en automne 1996 et a fait connaître le montant des subventions fédérales fin février 1997. Dès qu'il sera possible de chiffrer de manière précise le coût de la construction, le Conseil d'Etat déposera un projet de loi pour un crédit de construction, ce qui devrait intervenir avant la fin de l'automne 1997.

VII. Mesures de contrainte

Suite à une décision prise par le Conseil d'Etat, la Maison d'arrêt de Favra est affectée exclusivement à la détention administrative (LMC) depuis le mois de janvier 1997: cet aménagement interne permet d'éviter tous les problèmes liés à la gestion simultanée de deux types de populations (pénale et administrative) dans un même établissement.

Depuis le 1er février 1997, échéance fixée pour l'adoption de dispositions cantonales d'application de la LMC, les autorités genevoises n'ont plus la possibilité de détenir administrativement des étrangers en vue de leur refoulemen: le règlement transitoire du Conseil d'Etat qui permettait de le faire a dû être abrogé et les dispositions nécessaires n'ont pas encore été introduites dans le droit cantonal.

Cette particularité perdurera jusqu'à l'entrée en vigueur, prévue pour septembre 1997, de la loi modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (F 2 10 - 7517) votée par le Grand Conseil le 19 juin 1997.

Pendant cette période transitoire, des travaux destinés à adapter la Maison d'arrêt de Favra à sa nouvelle affectation ont été entrepris. Parallèlement, la capacité d'hébergement de l'établissement a été mise à disposition des cantons romands ayant déjà adopté des dispositions d'exécution de la LMC.

En attendant la réalisation du projet d'établissement LMC «Montfleury-La Clairière», qui sera géré par une fondation concordataire (voir Concordat pour l'exécution de la détention administrative, du 4 juillet 1996), les détenus administratifs genevois seront placés à la Maison d'arrêt de Favra, expressément désignée par la loi cantonale précitée comme centre de détention administrative provisoire.

VIII. EEP 2000

Il convient de déplorer le refus d'entrée en matière du parlement vaudois sur l'exposé des motifs et projet de décret qui lui a été soumis par le Conseil d'Etat vaudois s'agissant de l'ouverture d'un crédit d'étude portant sur la construction d'un nouveau pénitencier à Orbe. Cette décision est d'autant plus regrettable que le CPT a, dans son dernier rapport, recommandé qu'une haute priorité soit accordée au projet EEP 2000. A la suite de ce vote, le Conseil d'Etat genevois a retiré le projet de loi 7667, devenu sans objet.

Rappelons que le projet avait été lancé conjointement avec le canton de Genève qui aurait dû prendre en charge un tiers des frais d'étude et de construction du nouveau pénitencier. Pour les autorités valdo-genevoises, le pénitencier de Bochuz, construit en 1929, n'offre plus les garanties de sécurité nécessaires. Cela résulte du vieillissement des bâtiments (notamment ceux concernant la partie sécurisée des EPO), de leur structure obsolète qui n'est plus adaptée pour faire face aux changements importants intervenus dans la population carcérale, ainsi que du manque de places sécurisées ou spécialisées. Le projet EEP 2000 devait notamment permettre d'offrir un nombre suffisant de places pour les détenus nécessitant un encadrement particulier (délinquants sexuels, détenus dangereux et récidivistes) ou atteints d'une maladie psychique. Dans le cadre de la situation actuelle, ni le canton de Genève, ni le canton de Vaud ne peuvent pleinement respecter leurs obligations concordataires.

Après l'échec de ce projet, les autorités compétentes sont à la recherche de nouvelles pistes pour répondre aux besoins les plus pressants en matière d'exécution des peines (délinquants sexuels, détenus dangereux ou atteints d'une maladie psychique). A noter que les autorités vaudoises viennent pour leur part de décider de l'aménagement d'un quartier de sécurité renforcé pour détenus dangereux (6 places). Le Conseil d'Etat vaudois a ainsi notamment accepté la création de 11 nouveaux postes de gardiens aux EPO, étant rappelé que dans le canton de Vaud la proportion de gardiens par rapport au nombre des détenus est l'une des plus basses de Suisse.

IX. Conclusions et recommandations

A la suite de ses visites et de ses discussions, la commission présente les conclusions et recommandations suivantes:

1. Au travers des visites d'établissements et des auditions de détenus, la commission a pu se convaincre que les conditions de détention sont bonnes dans les lieux de privation de liberté visités. La commission n'a notamment pas recueilli de doléances concernant d'éventuels mauvais traitements. La commission se plaît en particulier à relever la motivation et le dévouement dont font preuve la direction et le personnel des établissements visités.

2. La commission déplore le refus du parlement vaudois d'octroyer un crédit d'étude pour le projet EEP 2000. Il conviendrait de reprendre ce dossier en examinant de nouvelles pistes comme la réaffectation de structures existantes ou l'aménagement de nouvelles sections dans certains établissements afin de répondre aux besoins les plus pressants en matière d'exécution des peines (délinquants anormaux, délinquants sexuels). La recherche de telles solutions devrait avoir lieu au niveau concordataire.

3. S'agissant de la lutte contre les délinquants sexuels, la commission attend avec intérêts le rapport et les propositions que le Conseil d'Etat soumettra au Grand Conseil en réponse à la motion 1088.

4. La commission invite les autorités compétentes à étudier la possibilité d'étendre les ateliers du centre de sociothérapie de «La Pâquerette».

5. Convaincue de la nécessité d'introduire la mixité à «La Clairière», la commission invite le Conseil d'Etat à saisir le Grand Conseil des projets de loi nécessaires à la réalisation de ce projet.

Pour conclure, la commission réitère ses sincères remerciements à toutes les personnes qui lui ont permis de remplir au mieux sa mission. Elle invite le Conseil d'Etat et M. le procureur général à porter une attention particulière à ses conclusions et recommandations et vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir accepter le présent rapport.

TABLE DES MATIÈRES

___________

 Pages

Chap. I - Introduction   9608

Chap. II - Activités de la commission   9610

a) Les visites d'établissements   9610

1. La prison de Champ-Dollon    9610

2. Le pénitencier de Hindelbank   9611

3. Le pénitencier de la Stampa   9612

4. Les Etablissements de la Plaine de l'Orbe   9613

5. Les Etablissements de Bellechasse   9613

a) Autres visites   9614

1. Le centre LAVI   9614

2. Le service du patronage   9614

3. Visites non annoncées de postes de police   9615

Chap. III - Délinquants sexuels   9615

Chap. IV - Modifications légales et réglementaires intervenues

 en 1997 dans le secteur pénitentiaire   9616

Chap. V - Rapport du CPT suite à sa visite en Suisse en 1996 9617

Chap. VI - Introduction de la mixité à «La Clairière» 9621

Chap. VII - Mesures de contrainte 9621

Chap. VIII - EEP 2000 9622

Chap. IX - Conclusions et recommandations 9623

ANNEXE - Statistiques de la prison de Champ-Dollon 9626

** *

ANNEXE

20Débat

Mme Anita Cuénod (AdG). Tout en prenant acte des tâches accomplies par la commission des visiteurs officiels, notre groupe estime néanmoins que, durant cette présente législature, les titulaires devront faire preuve d'une approche plus circonstanciée des visites de prison.

En effet, l'observation des conditions de détention, ainsi que les entretiens avec les détenus doivent procéder de techniques de base qui peuvent être acquises et doivent être organisées. Un cours de formation de quelques heures, au moins, devrait permettre à cette commission d'accomplir son mandat de manière concrète, utile et plus efficace.

D'autre part, nous souhaitons la poursuite des visites non annoncées dans les postes de police. Il va de soi qu'une visite annoncée ne remplit pas vraiment les mêmes buts.

Pour terminer, en ce qui concerne les statistiques fournies par l'administration de Champ-Dollon en dernières pages de ce rapport, elles devront être complétées l'année prochaine par la répartition entre résidants et non résidants en Suisse, afin d'obtenir une interprétation plus cohérente entre le nombre de détenus nationaux et étrangers.

Mme Mireille Gossauer-Zurcher (S). Les visiteurs ont décidément bien du mal à remplir le nouveau mandat qui leur a été confié à la suite des travaux de la commission de l'ancienne législature - Mme Cuénod vient d'en parler - je veux, bien entendu, parler des «visites de violons».

Si j'ai bien compris l'intention de nos collègues - en me référant au rapport 1993 de Mme Damien - il s'agissait de renforcer la protection des droits de l'homme au stade des interventions de police, tout en reconnaissant que dans l'exercice de leurs fonctions et, en particulier, lors d'arrestations de personnes dangereuses, les fonctionnaires de police sont parfois tenus d'utiliser la force à des degrés divers.

Les compétences de la commission des visiteurs se sont élargies et le règlement spécifie, depuis l'automne 94 que, pour la «visite des violons», elle informe immédiatement le chef de la police ou, à défaut, l'officier de police de service. Elle est ensuite accompagnée par un officier de gendarmerie ou un chef de section de la sûreté.

En novembre 94, une procédure pour une visite non annoncée, et sortie de je ne sais où, stipule qu'il faut :

- téléphoner au chef de la police;

- l'avertir qu'une délégation de la commission veut visiter un poste à l'improviste;

- fixer un lieu de rencontre sans préciser le poste que la délégation veut visiter;

- partir, ensuite, dans le poste choisi accompagnés d'un officier de gendarmerie et d'un chef de section.

Dans la pratique - pour avoir effectué plusieurs visites - lorsqu'on atteint le chef de la police, il nous demande où nous allons et il avertit lui-même le responsable du poste de police. Lorsque nous arrivons sur les lieux, nous sommes chaleureusement reçus par le responsable du poste. Il nous est même arrivé d'être accueillis par trois hauts fonctionnaires de police. Les visites étaient chaque fois très intéressantes.

Mais je ne comprends pas la notion «d'improviste», et je suis gênée de faire perdre du temps à des fonctionnaires qui ont des tâches importantes à remplir. L'intention de nos collègues ne semble pas être respectée. Il ne s'agit pas de chercher à tout prix à dénoncer des violences policières, mais plutôt à contenir d'éventuelles «pertes de nerfs dans les violons». Si le policier de garde sait que des députés peuvent arriver à n'importe quel moment, peut-être contiendra-t-il ses pulsions.

D'autre part, notre rôle est aussi de rassurer la population en constatant qu'il n'est pas fait usage de la force dans les «violons».

M. Jean-Pierre Restellini (Ve). Comme jeune député, je me félicite des nouvelles tâches que s'est assignées depuis quelques années la commission des visiteurs, en particulier en ce qui concerne l'inspection des commissariats de police.

Toutefois - et je me réfère à mon expérience personnelle de l'inspection des commissariats de police, soit une bonne centaine à travers l'Europe - ce genre de visite doit être non notifiée. En effet, si l'officier responsable du poste est informé de la visite des députés, ne serait-ce qu'une heure à l'avance, il ne s'agit plus d'un contrôle parlementaire de la détention, tel que l'a voulu ce parlement, mais simplement d'une visite de courtoisie qui vise peut-être un but utile, mais non premier.

Il faut persévérer dans l'opération de lifting de cette vieille dame très digne qu'est la commission des visiteurs de prisons en continuant à s'inspirer du fonctionnement de la CTP - cette commission du Conseil de l'Europe que vous connaissez bien - qui cible, plus particulièrement, ses inspections sur les lieux dits sensibles, tels que les commissariats de police et, bien entendu, les centres de détention. Non pas parce qu'il s'y passe des choses horribles - tous en sont probablement convaincus dans cette enceinte - mais bien parce que c'est ce qui correspond le mieux aux attentes de la collectivité genevoise.

Les prérogatives de cette commission devraient être élargies aux lieux de détention publics. Savez-vous que sur notre territoire et canton de Genève une quinzaine de personnes font, en permanence, l'objet d'une privation de liberté décidée par le Tribunal tutélaire à des fins d'assistance ? Or, leur «enfermement» ne fait l'objet d'aucun contrôle de la part du conseil de surveillance psychiatrique...

Notre groupe vous proposera prochainement un projet de loi allant dans ce sens.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. On dirait que certains rapports, parce qu'ils sont positifs, en deviennent suspects. Madame Cuénod, vous pourriez vous alarmer s'ils étaient négatifs. Il se trouve - et M. Restellini vient d'en parler - que l'on doit s'inspirer des conclusions de la CPT. Cette dernière est venue à Genève et a présenté son rapport : néant, tout comme Amnesty et la commission des visiteurs de prisons. Je n'invente pas, docteur, je décris la réalité.

Par contre, mes services craignent énormément le rapport de l'inspectorat du travail sur les conditions dans lesquelles on travaille au poste de Rive. Il n'est pas normal que des policiers travaillent depuis des années dans un sous-sol sans lumière du jour. Cela étant, si vous désirez augmenter vos prérogatives, j'applaudis des deux mains. Je ne vois aucun inconvénient au fait que vous fassiez des visites à l'improviste. Mais ne venez pas me dire qu'il y a un problème lorsque, ayant voulu visiter un violon, vous n'y avez trouvé personne. On ne va tout de même pas vous inventer des détenus pour vous permettre une visite fructueuse ! (Rires.)

Depuis quatre ans, les rapports européens qui nous parviennent régulièrement sont en progrès et nous n'avons quasiment plus de problèmes avec Amnesty International. Les rapports de la commission des visiteurs officiels sont positifs. Chercher encore d'autres moyens d'accroître votre éventail d'investigations, cela m'est parfaitement équilatéral. Je connais exactement les progrès que nous faisons et c'est pourquoi, même si ce rapport positif vous inquiète, pour moi, c'est un bon point.

M. Jean-Pierre Restellini (Ve). Je comprends mal le courroux du conseiller d'Etat Ramseyer. Il nous a mal compris. Mon activité professionnelle me conduit assez souvent à l'intérieur des commissariats de police. Je témoigne que la situation est loin d'être catastrophique, mais si l'on veut que cette commission soit crédible, les visites effectuées dans ces commissariats de police ne doivent pas être notifiées. Je prends acte, Monsieur le conseiller d'Etat, que vous êtes tout à fait d'accord avec cette procédure et je m'en réjouis. Je partage votre point de vue selon lequel ce titre d'inspection doit permettre à notre parlement de se rendre compte également des difficultés de travail des professionnels dans ces lieux sensibles. Je connais relativement bien l'activité des policiers, et je suis convaincu que cette commission doit aller dans ce sens aussi.

Mis aux voix, ce rapport est approuvé.

RD 291
12. Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le budget de l'entreprise des TPG pour l'exercice 1998. ( )RD291

Le budget de fonctionnement et le budget des investissements de l'entreprise des TPG pour l'exercice 1998 ont été adoptés par le conseil d'administration de l'entreprise le 15 septembre 1997 et approuvés par notre Conseil le 15 octobre 1997.

Ce budget s'inscrit dans le cadre du contrat de prestations 1996-1998, négocié et conclu par le Conseil d'Etat et le conseil d'administration respectivement, approuvé par le Grand Conseil (loi 7387 du 28 juin 1996 qui détermine les montants qui en découlent au budget de l'Etat pour les exercices concernés). Conformément à l'article 36, alinéa 2, lettre a, de la loi sur les TPG, le budget adopté par l'entreprise et approuvé par le Conseil d'Etat fait l'objet du présent rapport au Grand Conseil à titre d'information.

En 1998, les prestations des TPG, exprimées en places-kilomètres offertes, s'établissent à 1 727 millions (1997: 1 710 millions).

Le budget de fonctionnement s'établit à 203 552 000 F de charges et 202 301 000 F de produits. Il en résulte un déficit de 1 251 000 F (couvert par un prélèvement sur le fonds de réserve constitué à cet effet), à comparer au déficit de 1 275 000 F envisagé par le contrat de prestations pour cet exercice.

L'entreprise a décidé, au budget 1997, 2 689 000 F d'investissements nouveaux. En 1998, les dépenses d'investissement s'élèveront à 14 222 700 F, soit 4,5 millions de francs pour les installations, 5,4 millions de francs pour les véhicules et de 4,3 millions de francs pour les objets mobiliers.

En ce qui concerne l'Etat, les montants suivants figurent à son budget en relation avec les TPG pour l'exercice 1998:

Budget de fonctionnement

F

- Subvention versée à l'entreprise sous forme d'enveloppe, conformément à la loi 7387 approuvant le contrat de prestations (c'est un produit dans le budget des TPG) 

102 000 000

- Acquisition d'abonnements pour les bénéficiaires de l'office cantonal des prestations aux personnes âgées, les députés, forfait annuel pour les courses scolaires et les déplacements des policiers (c'est un produit dans le budget des TPG) 

4 181 000

- Intérêt sur le capital de dotation fixé par la loi (c'est une charge dans le budget des TPG) 

1 000 000

- Charge d'intérêts et d'amortissement correspondant aux dépenses d'investissement à la charge du département de justice et police et des transports pour le complexe du Bachet-de-Pesay et le centre de maintenance de la Jonction; ce montant tient compte d'une économie nette de 2,5 millions de francs provenant d'un transfert des actifs entre l'Etat et les TPG qui est en cours de finalisation 

18 368 000

- Charges d'intérêts et d'amortissement correspondant aux dépenses d'investissement à la charge du département des travaux publics et de l'énergie conformément à la loi sur le réseau des transports publics, au cahier des charges relatif à l'utilisation du domaine public et au contrat de prestations (voir ci-après) 

9 528 000

Budget d'investissement

F

- Construction d'infrastructures nouvelles et d'aménagements divers (extension du réseau de tramway) 

15 000 000

- Entretien et remplacement d'infrastructures existantes (rails, lignes aériennes) 

4 000 000

- Frais d'études du réseau 

2 500 000

Cela représente au total 134 077 000 F de charges et 1 000 000 F de revenus au budget de fonctionnement et 21 500 000 F de dépenses au budget d'investissement.

Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à prendre acte du présent rapport.

Annexe: Budget 1998 des TPG en bref.

ANNEXE

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

I 1983
13. Réponse du Conseil d'Etat à l'interpellation de M. Gilles Godinat : Qu'est-il advenu des fiches de la police politique ? ( ) I1983
Mémorial 1997 : Annoncée, 2331. Développée, 6158.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. En date du 7 mai 1992, M. Bernard Ziegler a répondu à la lettre de l'Association pour l'étude de l'histoire du mouvement ouvrier - AEHMO - du 30 avril 1992. Il a constaté que cette interrogation était devenue sans objet depuis la décision de la Confédération de conserver les dossiers fédéraux. Par lettre du 9 juin 1992, l'AEHMO a réagi en insistant sur son souhait que soient conservés les dossiers en totalité et non seulement certains dossiers présentant un intérêt historique reconnu.

Après un échange de correspondance avec le préposé spécial au traitement des documents établis pour assurer la sécurité de l'Etat et sur proposition de mon prédécesseur, le Conseil d'Etat a décidé, selon un extrait du procès-verbal du 27 janvier 1993, que - je cite : «Les dossier relatifs à la protection de l'Etat, actuellement archivés à l'Hôtel de police, sont transférés aux archives d'Etat.»

De plus, en dérogation à la loi sur les renseignements et les dossiers de police ou la délivrance de certificats de bonne vie et moeurs - je cite à nouveau : «Les autres dossiers élaborés par la police dans le cadre de la protection de l'Etat sont transmis, une fois par année, aux archives d'Etat, au décès des intéressés, pour autant que les opérations d'enquête soient terminées.»

En application de la décision du 27 janvier 1993, la police a transmis aux archives d'Etat, en date du 9 décembre 1994, les dossiers relatifs à la protection de l'Etat archivés à l'Hôtel de police.

Ce sont donc les archives d'Etat qui sont maintenant dépositaires de ces dossiers. Leur consultation est régie par l'article 7, alinéa 3, de l'arrêté fédéral sur la consultation des documents du ministère public de la Confédération du 9 octobre 1992. Le délai est de cinquante ans pour les documents versés aux archives fédérales.

Rappelons, pour mémoire, la recommandation du préposé spécial au traitement des documents établis pour assurer la sécurité de l'Etat qui préconise une interdiction absolue de consulter d'au moins trente-cinq ans.

Nous partageons l'avis de M. Godinat selon lequel l'argument de la protection de la personnalité est résolu par l'article 18 du règlement d'application de la loi sur les archives publiques. Nous pensons que c'est effectivement le règlement cantonal qui fixe, entre autres, un délai de consultation de cent ans pour les données personnelles, qui doit prévaloir.

Le président. Monsieur Godinat, désirez-vous répliquer ?

M. Gilles Godinat (AdG). Je répliquerai lors d'une autre séance.

La réplique de M. Gilles Godinat à cette interpellation figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

I 1988
14. Interpellation de M. Laurent Moutinot : C'est pas le Pérou ! (renvoi de clandestins). ( )I1988

Le président. Cette interpellation est retirée en accord avec son auteur et conformément à l'indication de son chef de groupe.

Le Grand Conseil prend acte du retrait de l'interpellation 1988.

I 1992
15. Interpellation de Mme Marie-Françoise de Tassigny : Paiement des amendes d'ordre en travail d'intérêt général. ( )I1992

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Pourquoi tant de dossiers de recours en grâce concernent-ils des amendes d'ordre impayées et converties en jours d'arrêts ? Cet embouteillage de dossiers, relatifs à la circulation, risque de devenir inextricable en raison de l'augmentation du coût des amendes.

Suite aux difficultés sociales - chômage ou marginalisation - certains contrevenants ne recourent pas aux différentes dispositions qui leur permettraient de régler les montants dus. Or des délais de paiement - modalités accordées par l'autorité compétente - peuvent être proposés.

Il serait intéressant d'interroger le SAPEM - service de l'application des peines et mesures - sur sa pratique actuelle en matière de conversion des amendes d'ordre non acquittées en travail d'utilité publique. Pourquoi les personnes ne réglant pas leurs amendes, par volonté ou par défaut, ne recourent-elles pas à cette démarche ? L'information est-elle suffisante ? Le règlement ne devrait-il pas spécifier une automaticité avant la prescription de jours d'arrêts qui laisse la commission de grâce grandement perplexe en regard des réalités carcérales qui coûtent cher à la collectivité publique ?

Nous attendons du Conseil d'Etat une étude claire et précise, ainsi que des propositions sur les améliorations réglementaires et sur les problèmes du système légal en la matière.

M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Voici la pratique des autorités :

Le service des contraventions propose et conclut régulièrement des arrangements avec des personnes condamnées à des amendes. Ce même service ne recourt au rachat par une prestation en travail qu'à la demande expresse de l'intéressé et pour autant qu'il ne soit pas en situation de payer l'amende.

Si une personne refuse de payer son amende ou de la racheter par une prestation en travail, il se trouve, hélas, que le procureur général n'a d'autre choix que de convertir l'amende en jours d'arrêts.

C'est alors que le service d'application des peines et mesures propose différentes manières d'exécuter les peines : travail d'intérêt général et semi-détention.

C'est ce manque de latitude, dû au code pénal suisse, qui fait que les conversions en jours d'arrêts sont fréquemment prononcées, lesquelles aboutissent souvent à des recours en grâce. A tous les stades de la procédure, les intéressés sont systématiquement informés des possibilités de paiement.

Force est de constater que dans de nombreux dossiers les intéressés se refusent à payer, par principe, et qu'ils comptent sur une grâce du Grand Conseil pour échapper à toute forme de sanction. Une situation pour le moins choquante, vous l'avouerez !

Cela étant, je suis sensible à votre remarque, Madame la députée, sur ces amendes converties en jours d'arrêts. Je vous informe que mon département étudie présentement la possibilité d'obtenir une forme d'arrêts allant dans le sens de votre préoccupation.

Cette interpellation est close.

PL 7493-A
16. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi générale du Conseil d'Etat relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux (B 5 0,5). ( -) PL7493
Mémorial 1996 : Projet, 6330. Renvoi en commission, 6417.
Rapport de M. Bernard Lescaze (R), commission des finances

Introduction

Avec le temps, l'appréciation des choses se modifie souvent. Cette vérité d'évidence doit être rappelée au début d'un rapport concernant un sujet délicat entre tous, la révision du statut du personnel, et qui sent souvent la poudre.

Le dépôt, par le Conseil d'Etat, le 31 juillet 1996 de ce projet de loi provoqua le vif mécontentement de plusieurs associations représentatives du personnel qui en exigèrent le retrait. Le Conseil d'Etat ne céda pas. Le projet de loi fut débattu, en tour de préconsultation, le 7 novembre 1996 au soir. Il reçut un accueil franchement hostile de la part des partis d'opposition, plus favorable, quoique mitigé, de la part des partis soutenant le gouvernement, mais fut renvoyé à la commission des finances. Toutefois, lors de cette séance du Grand Conseil, le Conseil d'Etat, par la voix de M. Olivier Vodoz, chef du département des finances, signala avoir reçu plusieurs propositions d'amendements d'un certain nombre d'organisations, dont le Cartel intersyndical, et avoir convenu de constituer un groupe paritaire avec les partenaires sociaux pour en discuter. Il prenait l'engagement de défendre les accords auxquels ce groupe serait parvenu devant la commission des finances, incitée à ne pas commencer tout de suite ses travaux.

Il en a été ainsi fait. Ce n'est que le 8 janvier 1997 que la commission des finances a entrepris un premier examen des articles du projet de loi comportant un certain nombre d'amendements, suivi de nouvelles séances les 22 et 29 janvier 1997. L'avis des organisations représentatives du personnel a ensuite été sollicité, le groupe paritaire constitué en novembre s'est à nouveau réuni et ce n'est que le 5 mars 1997 que la commission des finances pouvait entériner les dispositions du projet de loi déjà agréées entre les partenaires sociaux. Aucun rapport de minorité n'était annoncé, ni déposé. La crise surgie du dépôt du projet de loi était résorbée. L'accord auquel les partenaires sont parvenus peut ne satisfaire ni les uns ni les autres dans le détail. Dans l'ensemble pourtant, il est acceptable pour chacune des parties car, pour faire bref, sans remettre en question le statut de la fonction publique, il permet une modernisation de ce dernier. Les rapports de service continuent de bénéficier de toutes les garanties propres au droit public: légalité, égalité de traitement, intérêt public, proportionnalité et interdiction de l'arbitraire.

Dans une administration qui se décentralise de plus en plus le statut de la fonction publique doit être un élément de cohésion.

Ce projet de loi remanié vise à dynamiser le fonctionnement de l'Etat et à adapter avec intelligence le statut de la fonction publique à une vision de l'Etat de 2010, comme l'avaient indiqué, lors du tour de préconsultation, deux députés aux idées opposées.

Il appartient au Conseil d'Etat de négocier avec les organisations représentatives du personnel. Bien que bastant, le Grand Conseil ne saurait trop s'immiscer dans l'alchimie délicate qui préside parfois aux négociations. C'est pourquoi le projet de loi final reprend quasi intégralement le texte sur lequel s'est mis d'accord la commission paritaire formée de trois conseillers d'Etat et de cinq délégués syndicaux.

Examen du projet de loi 7493

Le 11 décembre 1996, M. Olivier Vodoz informait la commission des finances que le Conseil d'Etat avait approuvé les propositions d'amendements au projet de loi 7493 élaborées par un groupe de travail paritaire, composé de la délégation de l'employeur ainsi que des différentes organisations représentatives du personnel.

Dès lors, le 8 janvier 1997, la commission entamait l'examen du projet de loi 7493 en présence de M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, de M. Benno Gartenmann, directeur général de l'office du personnel de l'Etat, et de M. Gabriel Aubert, professeur de droit à l'université de Genève.

M. Vodoz signale que le professeur Aubert a préparé, avec l'équipe interne du département des finances ainsi que les responsables de personnel de l'Etat, l'avant-projet, puis le projet, pour le compte du Conseil d'Etat, d'où sa présence ainsi que celle de M. Gartenmann, ce jour. Il s'agit, pour la commission des finances, de fixer la procédure qu'elle va suivre et elle aura certainement, par la suite, une demande d'audition du Cartel intersyndical. En exergue du projet de loi, quelques éléments sont à rappeler:

1. Dans la quasi-totalité des cantons, y compris dans la Confédération, des réformes du statut de la fonction publique sont en cours pour une adaptation aux conditions d'aujourd'hui. De nombreux cantons poursuivent leur étude ou l'ont achevée. D'autre part, ces réformes sont également induites par ce que l'on appelle en Suisse et à l'étranger le NPM (New Public Management) qui accorde plus de responsabilité dans la gestion.

2. Dans le fonds, il y a un certain nombre de grands principes qui sous-tendent l'ensemble des réformes des administrations sur les plans national et cantonal. Un des premiers éléments importants réside dans le fait que l'on reste dans des rapports de droit public et non pas d'imaginer que l'on pourrait avoir une sorte de statut de droit privé. Sur ce plan-là, l'on reste toutefois en pleine ambiguïté dans l'interprétation que certains ont donnée alors que l'Etat régit ses rapports, y compris avec la fonction publique, sous le droit public. Le deuxième élément est lié au fait que beaucoup d'administrations cantonales, dont Genève, ont abandonné la période administrative au profit de contrats de travail de durée indéterminée. Les réflexions qui se font sur le plan national portent sur les procédures de résiliation et de sanction. Genève n'y a pas échappé. D'autre part, les réformes portent également sur la problématique des procédures d'appréciation du personnel, procédures introduites dans certains secteurs ou généralisées. A cet égard, à Genève, les prestations du personnel sont appréciées dans une phase probatoire, avant l'engagement, mais une fois la personne engagée, il n'y a plus d'appréciation. A l'hôpital, une appréciation des prestations du personnel en fonction a été introduite et, à l'administration centrale, au niveau des cadres. Cela n'a pas été généralisé et le projet de loi y fait allusion.

3. S'agissant de la délégation des compétences à des départements ou à des grands services, le Conseil d'Etat a mandaté un groupe de réflexion, formé des chefs de personnel et dirigé par M. Gartenmann. A titre de rappel, le statut de la fonction publique est fondé sur une loi qui est un tronc commun et sur des lois spéciales. L'audit a fait précisément remarquer que les lois spéciales ne sont pas suffisamment développées et elles sont peu coordonnées les unes par rapport aux autres. Par exemple, au niveau de la sécurité de l'emploi, la loi sur l'instruction publique la garantit, ce qui n'est pas le cas dans la loi régissant l'administration centrale qui est quelque peu différente. Le professeur Aubert a apporté ses compétences dans ce domaine pour réfléchir aux modifications qui pourraient être faites. Sur la base de ce travail, un projet soumis d'abord au Conseil d'Etat a été ensuite soumis à consultation auprès des organisations représentatives de personnel qui ont fourni leurs remarques. Sur cette base, le Conseil d'Etat a ajusté son projet de loi. Toutefois, les associations représentatives de personnel ont estimé que le Conseil d'Etat aurait dû à nouveau les consulter sur sa deuxième mouture, d'où la polémique qui a abouti, à fin novembre, à la création du groupe paritaire et enfin à la signature du document, avalisé par les différentes parties.

M. Vodoz conclut son exposé en soulignant que le Conseil d'Etat ainsi que les organisations représentatives de personnel sont arrivés à un consensus qui a abouti au document remis à la commission des finances. Cette révision du statut du personnel a permis de clarifier une série de choses et d'aller de l'avant dans un certain nombre de modifications de dispositions. Autant M. Gärtenmann que le professeur Aubert ainsi que lui-même sont à disposition dans le cadre de l'étude du projet de loi.

M. Vodoz précise, pour la clarté des débats, que le projet du Conseil d'Etat soumis à consultation a fait l'objet d'amendements pour tenir compte des remarques des organisations représentatives de personnel. Puis, ce document a fait encore l'objet d'amendements par le groupe paritaire et, par conséquent, c'est la dernière mouture qui est en possession de la commission des finances. A chaque article où il y aura eu des corrections, ce sont les corrections du groupe paritaire qui figurent et elles ont été acceptées par le Conseil d'Etat et les associations de personnel.

La commission, n'étant saisie d'aucune proposition d'audition, décide d'engager un débat général sur le projet de loi.

M. Vodoz précise que les modifications ont touché essentiellement à la compréhension des termes et un certain nombre de mots ont été changés, voire complétés. D'autres aspects touchent davantage au fond. En revanche, par rapport au projet initial issu de la commission interne du département des finances, il a été renoncé à bon nombre de choses, notamment à une plus large délégation de compétence.

M. Vodoz ajoute que les propositions initiales du Conseil d'Etat interviendront certainement plus tard, par la force des choses. Aussi le projet de base a-t-il été largement modifié, suite à la consultation, puis corrigé quelque peu par le groupe paritaire. A titre de rappel, cette réforme ne touche que le tronc commun et n'aborde pas la problématique de la rémunération. De plus, toute une série de lois spéciales régissent les différents statuts, dont la police et le corps enseignant.

Un commissaire relève que le domaine reste excessivement technique et que la marge de manoeuvre de la commission des finances est bien réduite. La vraie question politique à se poser lui paraît être de se dire si l'on va assez loin avec cette réforme dans l'équilibre trouvé.

M. Vodoz pense qu'il s'agit d'abord de faire le tour du projet de loi avant de s'engager dans un débat, d'autant plus qu'il représente déjà un pas qui ne va pas précariser la fonction publique mais permettra plus de flexibilité. Les propositions d'Arthur Andersen vont beaucoup plus loin. Quant à sa propre position, elle irait dans le sens de statuts éclatés, soit que chaque corps de métier ait son propre statut, quitte à ce qu'il y ait des éléments communs. Il ne souhaite donc pas que l'Etat de Genève revienne à ce qui a été connu avant la grande réforme qui a permis d'avoir une commission d'évaluation et de classification, avec un retour à des situations égales mais rémunérées, tout à fait différemment d'un secteur à l'autre. En revanche, la diversification des tâches rend plus difficiles des mesures qui pourraient être adaptées dans un secteur par rapport à un autre. Comme le suggère l'audit, entre autres, il faudrait travailler davantage les lois spéciales. Il s'agirait également, sans modifier les classifications, d'avoir un système de rémunération qui aille davantage à l'intérieur des classes et que, par négociation, il y ait des aménagements plutôt que des automatismes.

M. Vodoz pense également que dans le statut de la fonction publique l'on doit se préoccuper davantage de la formation continue et des plans de carrières. Dans le domaine du secrétariat, par exemple, l'on va aboutir à des situations où il n'y aura plus besoin de secrétaires et c'est la machine qui se chargera du travail. Il faudra donc pouvoir orienter le personnel vers d'autres technologies et une prévision de moyens stratégiques doit pouvoir être encore mieux planifiée pour suivre l'évolution des métiers. Cet aspect n'est pas abordé dans le projet de loi. L'image de la fonction publique de demain devrait être plus flexible et permettre d'être en adéquation avec l'évolution de la situation de l'Etat et du travail qui est attendu de la part de l'administration. Pour l'heure, le projet de loi porte essentiellement sur les différentes fonctions, sur la problématique des sanctions, des licenciements, sur des entretiens périodiques. Contrairement à ce qu'il vient d'entendre, même si la commission des finances considère que sa marge de manoeuvre est étroite, il y a à terme une évolution sur laquelle elle peut s'exprimer.

M. Vodoz ajoute qu'il défendra le texte du groupe paritaire mais l'image que les députés se font de la fonction publique reste importante. Il ne s'agit donc pas de rester paralyser par l'accord paritaire sur un certain nombre de notions.

M. Gartenmann souhaiterait apporter le point de vue du responsable du personnel, en contact régulier, soit avec les départements, soit avec les chefs de service et le personnel de l'Etat. Ce qui est important, une fois qu'une personne est engagée dans une entreprise, qu'elle soit publique ou privée, c'est le suivi. A cet égard, il faut avoir une base qui permette de mettre l'accent sur les compétences professionnelles et sur les prestations des personnes. Il y a eu jusqu'à maintenant une lacune, en tout cas un manque au niveau de la législation, parce qu'on n'a pas insisté sur la formation, les compétences et le suivi régulier des prestations du personnel. C'est donc un des aspects développés ici et qui a été voulu par le Conseil d'Etat en tant qu'employeur, puis reconnu par les partenaires sociaux. Il y a ensuite l'autre aspect, celui de la rémunération et le Conseil d'Etat n'a pas voulu être partie prenante de cette réflexion, pour l'instant. L'accent a donc été mis sur les autres questions fondamentales.

M. Gartenmann souligne qu'un autre élément touche tous les problèmes que l'on peut rencontrer avec le personnel, mesures, sanctions, fixation de nouveaux objectifs, analyse des causes d'un échec et, le cas échéant, prise de décision d'une résiliation des rapports de service. Les motifs de résiliation des rapports de service ont donc été revus dans le cadre de cette réforme. Il s'agit là aussi d'un élément important que l'on retrouve d'ailleurs dans les réformes entreprises dans les autres cantons, parce que très souvent, dans les statuts, il y avait une garantie de l'emploi à travers la période administrative. A Genève, comme l'a rappelé M. Vodoz, l'on ne connaît pas la période administrative mais les «motifs graves» représentent une protection excessive de l'employeur, dans la mesure où le problème n'est pas analysé en fonction des prestations professionnelles mais en fonction de la garantie de l'emploi. Dans l'intérêt public, il s'agit de pouvoir compter sur des gens compétents et il faut analyser les choses objectivement. C'est la raison pour laquelle la réforme parle de «motifs objectivement fondés» et non plus de «motifs graves». Un problème est analysé objectivement par rapport à des prestations professionnelles et par rapport à une situation générale plus correcte vis-à-vis de l'intérêt public.

M. Gartenmann ajoute qu'il y a encore un dernier aspect dans la réforme, tout aussi important que les autres mais peut-être moins visible de l'extérieur, qui est la délégation vers les offices centraux, les départements et les services, ce qui implique en même temps une simplification des procédures. Aujourd'hui toute une série de décisions doivent être soumises au Conseil d'Etat, changement de taux d'activité, transfert d'un service à un autre, promotion, et elles sont extrêmement compliquées au niveau de l'administration. Le Conseil d'Etat a souhaité une simplification au niveau des décisions qui puissent être prises directement par les départements, ou l'office du personnel.

La commission entame ensuite une première lecture article par article.

A l'article 2, la commission s'interroge sur les notions de fonctions permanente et non permanente.

M. Aubert explique que le texte distingue les fonctions permanentes d'avec les fonctions non permanentes. Cette distinction n'a pas de véritable portée parce que ce qui est intéressant, lorsqu'une personne est engagée à l'Etat, c'est de savoir si elle est engagée pour une durée indéterminée ou déterminée et à quelles conditions les rapports de service risquent de prendre fin et, le cas échéant, pour quels motifs. La distinction entre fonctions permanentes et non permanentes est, à son sens, dépassée et ne correspond à rien. Ce qui peut intéresser les salariés de la fonction publique, c'est de savoir à quelles conditions les rapports de service prennent fin, mais la fonction publique a eu le frisson des masses face aux changements. Le texte ne correspondait pas à grand-chose, mais il a été ressenti comme une certaine sécurité. A partir de ce moment-là, le Conseil d'Etat a considéré que c'était faire preuve de sagesse que de maintenir cette distinction mais il faut être conscient qu'elle crée plus d'obscurité que de clarté dans le maniement du texte.

M. Vodoz ajoute que la fonction publique craignait qu'il n'y ait plus, à terme, de fonctions permanentes à l'Etat et que le Conseil d'Etat ne s'engage dans la voie des auxiliaires.

Aussi, le Conseil d'Etat a estimé que, si la paix pouvait être obtenue par rapport à cela, il réintroduirait l'élément «permanent».

M. Gartenmann signale qu'il y avait une confusion dans l'ancien texte entre les rapports de travail et la fonction permanente. Lorsque l'on parle de «personnel régulier», il s'agit de comprendre «fonction» et non pas «rapport de travail» qui sont deux choses différentes. Les fonctions permanentes touchent à l'organisation de l'Etat alors que les rapports de travail touchent aux rapports entre l'employeur et l'employé. Il n'y a donc plus cette confusion dans le texte actuel.

M. Vodoz rappelle que l'article 2 est un texte de base. Les articles suivants vont développer chacune des fonctions, fonctionnaire, employé, auxiliaire, agent spécialisé, etc. Il s'agit donc d'un article de définition.

Un commissaire souhaiterait savoir si le professeur Aubert n'a pas envisagé de définir de façon plus moderne la fonction publique et, notamment, d'introduire la «fonction d'autorité» par rapport à la «fonction de prestation». La notion de «permanent et non permanent» lui paraît également, à l'heure actuelle, totalement dépassée. L'introduction d'une fonction d'autorité par rapport à une fonction de prestation aurait déjà entraîné des conséquences différentes dans les autres articles, voire dans les autres lois. Pour l'instant, ce qui est proposé reste effectivement une meilleure réglementation des rapports de travail. Le groupe de travail s'est-il penché, même s'il n'a pas abouti, sur ce genre de réflexion?

M. Aubert répond, d'abord sur le plan de la technique, que le problème réside dans le fait de définir des choses qui sont inutiles par la suite. La question reste de savoir si l'on veut faire des définitions qui, après, sont utiles ou bien si l'on veut faire des définitions qui sont praticables. Le problème se pose pour les fonctions permanentes et non permanentes et, de la même façon pour les fonctions d'autorité et fonctions de prestations. La distinction entre fonction d'autorité et fonction de prestation date de l'époque où certains pensaient que, lorsque l'administration agit pour restreindre, elle doit bénéficier d'une base légale, alors que, lorsqu'elle intervient pour faire une prestation, elle n'en a pas besoin. Il y a déjà bien longtemps que cette théorie a été abandonnée, l'administration devant avoir une base légale, qu'elle restreigne ou quelle promeuve.

Un commissaire signale que l'on peut toutefois employer les mêmes mots mais avec d'autres sens. Entre un instituteur, d'une part, et un agent de police, de l'autre, ou un secrétaire général de département, il y a une différence. Le problème réside dans une vision politique des choses et cette distinction pourrait être introduite de façon à avoir des conséquences juridiques modernes.

M. Aubert relève qu'il se peut qu'en matière d'éligibilité, par exemple, il y ait des distinctions. Cela, toutefois, doit être réglé, le cas échéant, dans la loi sur les droits politiques. Pour ce qui est du contenu du statut, quelle serait la différence? Si l'on veut que les personnes qui exercent des fonctions d'autorité aient un statut plus rigide que l'actuel, qu'on le dise et que l'on précise en quoi ce statut doit être rigidifié. De la même manière, si l'on veut que les personnes qui effectuent des activités de prestation aient un statut plus souple que le statut actuel, qu'on le dise et que l'on précise en quoi ce statut doit être assoupli. Le groupe de travail s'est penché sur ce point, suite à la demande du Conseil d'Etat, mais il y a une difficulté pratique à distinguer la fonction d'autorité de la fonction de prestation. La liste de toutes les fonctions à l'Etat a été revue pour savoir si l'on pouvait passer une fonction de la colonne de gauche à celle de droite. Qu'en est-il de l'archéologue cantonal, fonction d'autorité ou de prestation? L'archéologue cantonal a des pouvoirs de police. Un professeur d'université qui met des notes appartient-il à la catégorie «autorité» ou «prestation». Il est donc apparu que faire le tri serait une entreprise énorme pour un résultat que le groupe n'est pas arrivé à percevoir.

M. Aubert ajoute que si l'on veut se dire maintenant que les fonctionnaires qui exercent une activité de prestation doivent être soumis à un statut plus souple, cela veut dire que l'on prévoit qu'ils peuvent être licenciés pour n'importe quel motif, économique ou disciplinaire. On «privatise» alors dans ce sens-là mais il n'est pas sûr que l'on arrive à un résultat satisfaisant. Le projet actuel permet une résiliation dans des conditions qui sont souples, sous réserve, naturellement, du respect des principes d'un état de droit. Il ne voit dont pas, pour l'instant, comment l'on peut rigidifier certaines fonctions d'autorité et assouplir des fonctions de prestations. Dans le dernier cas, l'Etat ne peut pas licencier pour un oui ou pour un non; il est obligé de respecter le principe d'égalité de traitement, l'interdiction de l'arbitraire, etc. Toute la bataille qui a d'ailleurs eu lieu sur les «motifs justifiés», «justes motifs», «raisons graves», etc., n'a été qu'une querelle de mots. Ce qui compte, en réalité, c'est de savoir si l'Etat agit de façon arbitraire ou non. Que l'intéressé accomplisse une activité d'autorité ou de prestations, il doit être soumis au même régime. Du point de vue de l'exercice des droits politiques, l'on peut très bien comprendre que cela puisse être un problème mais du point de vue de vue de la fonction publique, il reste difficile de voir les conséquences. D'où le fait de dire que l'article est un article de définition. L'on peut faire des définitions qui ont un but «sédatif» comme celle de fonction permanente ou non permanente mais on peut également faire des définitions «en sucre» pour ceux qui ont envie de définitions nouvelles.

M. Vodoz souligne que le Conseil d'Etat était effectivement parti, dans le mandat donné, dans l'idée que l'on pouvait faire une séparation. Certains cantons, d'ailleurs, l'ont fait. A Saint-Gall, n'est fonctionnaire que celui qui a une fonction d'autorité et les fonctionnaires ont été réduits au nombre de trois cents. Le Conseil d'Etat a déjà eu avec le professeur Aubert de longues discussions à cet égard et il a abouti à la question de fond parce que derrière ces définitions qui peuvent avoir un caractère «sédatif» il y a néanmoins des hommes et des femmes.

M. Vodoz ajoute qu'il est apparu essentiel au Conseil d'Etat que l'Etat n'ait pas à agir par rapport aux grands principes du droit, de manière différente dans le cadre d'une administration publique, comme dans le cadre du secteur privé. En revanche, dans la fonction publique, dès lors que quelqu'un, objectivement, ne répond pas aux prestations qu'il devrait faire pour des raisons x, y ou z, il serait anormal que l'on ne puisse pas, dans des termes reconnus, soit le déplacer, soit résilier les rapports de travail. Le Conseil d'Etat a donc préféré consacrer un certain nombre de règles à cela, de telle sorte que l'on puisse, lorsque c'est vraiment évident, se séparer d'un collaborateur plutôt que d'avoir, comme dans le statut actuel, des gens que l'on ne peut pas libérer, sinon dans des procédures qui prennent des mois et des années. La nécessité de garantir les collaborateurs contre l'arbitraire reste importante et c'est d'autant plus important dans la fonction publique que les gouvernements passent. Il ne s'agirait donc pas d'arriver, à l'image de l'administration américaine, à des changements lors de l'élection d'un nouveau président. En revanche, lorsqu'il y a des motifs fondés, il faut pouvoir prendre des décisions.

M. Vodoz tient à faire remarquer que les statuts particuliers dans la fonction publique permettent déjà de mettre des conditions qui sont bien différentes, notamment le droit de grève et autre. C'est la raison pour laquelle il prônerait l'éclatement des statuts, ce qui permettrait de différencier certaines fonctions d'autorité évidentes, comme le sont les fonctionnaires de la prison ou de la police, de celles de l'administration centrale et des enseignants. Il y a donc un travail important à faire sur les statuts particuliers pour avoir une meilleure adéquation entre les tâches.

Un commissaire pense que le problème de l'éligibilité des fonctionnaires du secteur public doit être posé au travers de la loi sur les droits politiques et non pas au travers de la révision de la loi sur le statut du personnel. Les réticences par rapport à l'éligibilité des fonctionnaires se situent dans le fait que de hauts fonctionnaires pourraient avoir une influence dans l'élaboration des budgets. C'est davantage un problème de discrimination à établir, verticale mais non horizontale et non pas en fonction des activités qu'exercent les gens mais en fonction du pouvoir de décision qu'ils ont à l'intérieur du secteur public.

Article 3

M. Vodoz explique que l'article 3 présente les types d'employés, fonctionnaire, employé, auxiliaire, agent spécialisé et personnel en formation.

Article 4

M. Vodoz souligne que le personnel régulier est censé exécuter une tâche essentielle et permanente de l'Etat. On est employé de l'Etat pendant la période probatoire.

Article 6

M. Vodoz signale qu'il y a une modification sur la durée. On sait que, dans la pratique, il y a eu un certain nombre de personnes qui ont été auxiliaires pendant une période beaucoup plus longue que celle qui avait été déterminée. Le Conseil d'Etat avait proposé que la relation de service ne puisse excéder une période maximale de quatre ans. Le groupe paritaire a souhaité trois ans et que soit ajouté «la durée d'engagement est prise en compte comme période probatoire en cas d'accès au statut d'employé».

Un commissaire s'interroge sur la durée de la période probatoire et où elle est définie.

M. Gartenmann répond qu'elle est de trois ans et qu'elle est définie dans le règlement. Toute une série de dispositions plus détaillées figurent dans ledit règlement et non dans la loi. A partir du moment où la loi est modifiée, il s'agira également de retravailler le règlement.

Un commissaire pose la question de savoir si, après une période de trois ans, il est obligatoire de licencier l'auxiliaire.

M. Vodoz répond que ce n'est pas forcément le cas. Il peut être engagé comme personnel régulier.

M. Gartenmann ajoute que, si le contrat se prolonge au-delà des trois ans, cela signifie que la personne sera mise au bénéfice du statut d'employé et elle aura encore une période probatoire d'une année, dans la mesure où il faut un temps d'observation plus officiel avant d'être nommé fonctionnaire. Un auxiliaire, au niveau du suivi de ses prestations, n'a pas la même régularité, la même intensité que s'il est engagé d'emblée comme permanent. C'est la raison pour laquelle il faut un temps de réflexion suffisant avant de passer du statut d'auxiliaire à celui d'employé régulier.

M. Gartenmann ajoute que la période probatoire peut être prolongée lorsqu'il y a eu des interruptions dues à des maladies ou à autre chose.

Une commissaire souhaite s'assurer qu'il n'est pas possible d'arriver à des situations telles que, à la fin d'un mandat de trois ans, plutôt que de nommer la personne, on réengage quelqu'un d'autre comme auxiliaire. L'Etat n'a pas forcément comme avantage de fonctionnariser la personne ou de la nommer.

M. Vodoz signale qu'il y a un terme important à la fin de l'alinéa qui stipule qu'il s'agit de «travaux temporaires». Il n'est donc pas possible de maintenir quelqu'un dans un statut d'auxiliaire ou de le remplacer à la fin des 3 ans par du personnel à nouveau auxiliaire. C'est une tâche qui devrait être terminée à un moment donné. Le Conseil d'Etat a voulu précisément clarifier cela parce qu'il ne veut pas tomber dans le système des engagements d'auxiliaires en les remplaçant, à la fin de leur mission, par d'autres auxiliaires. Aussi, l'engagement d'auxiliaires pour des travaux temporaires doit se terminer. Il s'agit donc d'une garantie supplémentaire pour pouvoir lutter contre l'idée de pouvoir renouveler du personnel au bout de 3 ans, par de nouveaux contrats d'auxiliaire.

M. Aubert signale qu'il s'agit d'un des aspects importants du projet dans lequel le Conseil d'Etat a voulu apporter à la fonction publique quelque chose qui la rassure et qui a été mal compris au départ. Lorsque la durée de 4 ans a été instituée, le Cartel a sauté au plafond alors qu'en réalité c'était dans l'intérêt de la fonction publique. Dans la plupart des systèmes qui sont trop rigides, il se crée des échappatoires par la multiplication des auxiliaires, avec des gens qui ne comprennent pas pourquoi ils sont là depuis longtemps, avec un statut d'auxiliaire, alors que d'autres personnes qui font le même travail ont un autre statut. L'idée était que, si le statut d'auxiliaire doit être limité aux travaux temporaires, il doit l'être aussi dans le temps, mais, parallèlement, les conditions de résiliation doivent aussi être assouplies. Un employé qui ne sert plus à rien parce que sa fonction disparaît doit être traité dans le cadre des dispositions sur la suppression de postes; celui qui ne donne pas satisfaction dans celui sur la résiliation des rapports de service. Ce qui est dangereux, c'est d'avoir des dispositions trop rigides qui induisent des perversions et des situations fausses.

M. Aubert tient également à relever que, si la fonction qui paraît devoir se déployer dans le temps, perd tout à coup de son importance, le poste peut être aussi supprimé. La loi le permet. Il vaut mieux faire une utilisation rationnelle des suppressions de postes que de créer des situations ambiguës. Pour reprendre la fluctuation des effectifs scolaires, l'on peut comprendre qu'à un certain moment il faut des auxiliaires; puis il apparaît que l'on a besoin de gens à plus long terme ou alors il faut supprimer les postes. Il s'agit donc de gérer en fonction des besoins. C'est la raison pour laquelle la notion de fonction permanente ou non permanente qui a été réintroduite est une fausse idée. Il y aura, certes, toujours la police, la prison, un office cantonal de l'emploi mais il n'est pas certain qu'il faille toujours les mêmes effectifs.

Un commissaire relève dans l'article 6, premier alinéa, que l'auxiliaire est engagé pour une durée déterminée ou indéterminée alors que ce n'est pas précisé dans le cadre de l'engagement d'un employé. Est-ce à dire que la période probatoire est entendue comme un contrat de durée déterminée ou indéterminée?

M. Aubert répond que la période probatoire est considérée en principe comme une période indéterminée dans la mesure où il peut toujours intervenir une cessation des rapports de service. De plus, la période probatoire est fixée dans le règlement. Lorsque l'employé arrive au terme de son statut d'employé pour devenir, le cas échéant, fonctionnaire, il n'y a pas de nouveaux rapports qui se créent. Ce sont des rapports qui se transforment.

M. Gartenmann signale que, lorsque l'on se réfère à la période probatoire, il s'agit d'un employé régulier. Un employé régulier a un contrat de durée indéterminée. La spécificité du contrat de durée indéterminée par rapport au contrat de durée déterminée est qu'il peut être résilié en tout temps, moyennant le respect des délais légaux. Ce qui est déterminé, c'est la durée de la période probatoire qui, actuellement, est de trois ans.

M. Aubert souligne que le rapport de travail doit être qualifié. S'il y a un auxiliaire qui est là depuis douze ans, sous l'étiquette d'auxiliaire, son supérieur doit savoir qu'en cas de litige le Tribunal le traitera comme un employé parce que la durée minimale a été largement dépassée.

Le 22 janvier 1997, l'examen article par article se poursuit en présence de M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, de M. Benno Gartenmann, directeur général de l'office du personnel de l'Etat, et du professeur Gabriel Aubert, expert.

TITRE II - Rapports de service

Article 10

M. Vodoz signale qu'il s'agit d'un article sur la délégation. Le Conseil d'Etat et le conseil d'administration pour les hôpitaux restent compétents comme autorité d'engagement et de nomination, puis, il y a une certaine délégation. Comme il y avait des questions d'interprétation, la colonne de droite représente le texte final tel qu'il est ressorti à la suite de la commission paritaire.

Article 11

M. Vodoz fait remarquer que l'alinéa 3 a été corrigé. «Les changements d'affectation à caractère exceptionnel» signifient qu'il y a des circonstances où l'on doit pouvoir contraindre les gens à changer de poste.

M. Gartenmann ajoute qu'il y a effectivement des cas où l'on n'est pas dans une situation suffisamment grave pour dire que des personnes sont inaptes pour leur fonction ou pour prendre d'autres sanctions de type disciplinaire. Ce sont des personnes qui n'ont peut-être plus la capacité d'assumer le poste qu'ils occupent, qui ont eu de la peine à suivre les changements de technique dans les méthodes de travail mais qui représentent un intérêt évident pour l'Etat. Par conséquent, pour pouvoir maintenir en emploi ces personnes, il a été admis, avec les partenaires sociaux, qu'il faut pouvoir les transférer et procéder à une adaptation de leur traitement.

M. Aubert explique que l'idée de base, lorsqu'un poste est supprimé, est de dire qu'il vaut mieux que l'intéressé retrouve un autre emploi, le cas échéant avec une rémunération adaptée au nouvel emploi, plutôt que de le perdre purement et simplement. I1 fallait donc qu'un changement de rémunération puisse suivre le changement d'affectation. Les représentants des salariés de la fonction publique ont craint que le Conseil d'Etat se mette à modifier toutes les fonctions pour déployer un pouvoir extraordinaire. Il a fallu trouver une formulation rassurante mais qui n'est pas archiclaire. Ou bien l'on peut réfléchir à une formulation plus claire ou le rapporteur fournit des explications en conséquence.

TITRE III - SANCTIONS DISCIPLINAIRES ET FINDES RAPPORTS DE SERVICE

CHAPITRE I - Sanctions disciplinaires

Article 14

M. Aubert signale qu'il y a là un point important, à savoir que, d'une manière générale, les catalogues de sanctions dans les lois régissant la fonction publique tendent à disparaître. Dans la nouvelle loi neuchâteloise, par exemple, il n'y a plus de catalogue de sanctions parce que ces catalogues sont d'un maniement assez difficile. De plus, l'on peut craindre que les tribunaux considèrent que, avant d'adopter une sanction forte, il faut faire la tournée de toutes les sanctions antérieures. L'idée à la base du projet était de dire que, était maintenu le catalogue des sanctions pour les personnes stabilisées mais que, en revanche, pour les employés, avant la période d'épreuve, le catalogue tombait. Ainsi, pour un motif objectif, l'administration pouvait mettre fin aux rapports de services. Il s'agit là d'un changement important résultant de la négociation entre le Conseil d'Etat et les partenaires sociaux.

CHAPITRE II - Fin des rapports de service

Section 1- Généralités

Article 16

M. Vodoz souligne qu'il a été précisé ce qui est déjà pratique courante, la période de seize semaines, portée à quatre semaines supplémentaires, en cas d'allaitement.

Section 2 - Fonctionnaires et employés

Article 20

M. Aubert signale que les représentants du personnel ont craint que l'article 20 ne soit pas dans leur intérêt, d'où leur demande de modification. En ce qui le concerne, il ne voit pas la différence dans la formulation.

M. Vodoz ajoute que la nouvelle rédaction permettait une meilleure compréhension de la part des partenaires sociaux. Puisque, sur le fond, cela ne changeait pas les choses, il a donc adopté la version qui est ressortie des discussions paritaires.

Article 22

M. Gartenmann fait remarquer qu'il y a une modification, soit la «suppression de postes». Les partenaires sociaux n'ont pas voulu que l'on puisse parler d'une modification substantielle de poste et que l'on retienne uniquement la variante «suppression de poste».

Un commissaire souhaiterait savoir ce que cela signifie concrètement.

M. Gartenmann répond que l'article s'applique essentiellement lors de la suppression d'un poste pour des motifs d'organisation, des raisons économiques mais, en fait, il s'agit vraiment d'une suppression de poste. Dans la variante intermédiaire, l'on parlait d'une «modification substantielle de poste» parce qu'il y a effectivement dans l'administration des postes qui évoluent comme dans le privé. Il y a parfois des difficultés pour certaines personnes à suivre l'évolution, raison pour laquelle l'article 11, où l'on parle de situations exceptionnelles, a été rediscuté avec les partenaires sociaux. Si ces derniers souhaitent que «la modification substantielle de poste» soit supprimée, il faut avoir la possibilité de s'occuper des cas particuliers qui ne sont pas des cas disciplinaires.

M. Vodoz souligne que la situation qu'il a fallu régler avec les associations de personnel était extrêmement simple. Ces dernières, toujours dans leur idée que le Conseil d'Etat était en train de créer une série de pièges, sur la base d'expériences qu'elles ont pu rencontrées, ont considéré que le Conseil d'Etat avait une trop grande possibilité de pouvoir prononcer la suppression de poste, ce qui signifie que la personne en question doit partir. En réalité, la suppression de poste n'était là que pour les besoins du départ de la personne et l'on orientait le poste différemment. Les articles négociés ont permis de régler les différents doutes des associations de personnel, certaines considérant que des articles pourraient être utilisés de manière abusive pour contraindre les gens à partir. Il a donc fallu clarifier les intentions du Conseil d'Etat qui n'étaient pas celles-là. Voilà pourquoi il y a eu tant de discussions sur cette question.

CHAPITRE III - Disposition de procédure et contentieux

SECTION 2 - Contentieux

Article 29

M. Vodoz signale qu'il y a eu là aussi des discussions qui ne portent pas essentiellement sur le fond.

TITRE IV - DISPOSITIONS FINALES ET TRANSITOIRES

Articles 32, 33, 34, 35 et 36

Un commissaire revient sur l'article 9 (Rapports de service) par rapport à l'article 7 concernant les agents spécialisés. Il a été prévu des «agents spécialisés» engagés pour une mission d'une durée déterminée, n'excédant pas quatre ans, renouvelable deux fois. Cela signifie qu'un conseiller d'Etat pourrait engager un collaborateur personnel pour douze ans. Que se passera-t-il si le conseiller d'Etat en question reste au pouvoir seize ans et que la titularisation de la fonction du collaborateur n'est pas souhaitée?

M. Vodoz rappelle que l'engagement des agents spécialisés intervient pour une période déterminée. Au maximum de cette période, ou bien cela devient une tâche permanente de l'Etat et, à ce moment-là, il faut engager la personne sous le statut de fonctionnaire, ou alors la mission se termine et la personne n'a pas un droit à continuer dans son activité d'agent spécialisé.

M. Vodoz souligne qu'il ne faut pas voir, au travers des agents spécialisés, un moyen d'engager un certain nombre de personnes dans les départements, comme c'est le cas des attachés de presse, des conseillers dans le cadre du Conseil fédéral. Cela pourrait créer une certaine tension entre l'équipe des cadres supérieurs qui, eux, ont choisi la carrière publique et les agents spécialisés entourant les présidents dans des tâches bien précises et complètes. C'est un problème délicat et il y a une opposition assez majoritaire face à l'idée de pouvoir avoir des statuts assouplis dans le cadre de l'Etat. A partir de là, les agents spécialisés représentent une forme d'engagement pour une durée déterminée avec prolongation.

M. Vodoz ajoute qu'il a lui-même préféré un secrétaire général à qui il pouvait confier un certain nombre de missions et qu'il a engagé à titre d'agent spécialisé. Ce dernier va donc avoir bientôt à se déterminer sur son orientation de carrière, à savoir si l'état hiérarchique tel qu'il existe dans le cadre de la fonction de secrétaire général est reconstitué ou alors s'il peut poursuivre dans une autre tâche. Il n'y donc aucun droit, après douze ans, au terme de la durée maximale, de conserver un agent spécialisé au sein de l'Etat.

Un commissaire estime qu'un conseiller d'Etat, en particulier, peut avoir besoin de collaborateurs spécialisés personnels, à quelque degré que ce soit, secrétaire général, agent de communication ou autre. S'il s'entend particulièrement bien avec lui et fait équipe, il devrait avoir le droit de les avoir seize ans, sans être obligé, après douze ans, de les titulariser ou de les mettre à la porte pour retrouver une autre fonction. Pour un cas de ce genre, la formulation de l'article 9 est-elle plus large ou plus étroite?

M. Gartenmann souligne que la définition de l'auxiliaire telle que formulée à l'article 7 est nouvelle par rapport à la loi actuelle. L'intention a été de situer l'agent spécialisé par rapport à cette nouvelle définition des auxiliaires, pour mieux préciser les choses, à la fois pour les auxiliaires et les agents spécialisés. Pour ces dernier, c'est plus particulier parce qu'ils ont une expérience et des connaissances spécifiques qui peuvent intéresser non seulement un conseiller d'Etat mais aussi l'administration pour des tâches particulières. A cet égard, le département des travaux publics et de l'énergie est le département qui a le plus souvent recours à ce type de personnel. Finalement, les quatre années avec un renouvellement de deux fois a été effectivement défini par rapport à un mandat politique.

M. Gartenmann ajoute qu'il a été estimé que les mandats politique n'excèdent pas douze ans. C'est peut-être une erreur mais il n'y aurait pas forcément un obstacle à changer «renouvelables trois fois» et non deux fois. Ce qui est important reste de montrer que les agents spécialisés apportent des connaissances et des qualifications tout à fait particulières.

M. Vodoz souligne les deux aspects de la question. On peut intellectuellement se dire que l'on a besoin d'une administration qui doit pouvoir assurer à la fois la gestion de l'Etat, et ce indépendamment de l'évolution politique des chefs de département et autres, et imaginer des hors-cadre impliqués dans un autre régime, autant dans le contrat d'engagement que dans le type de rémunération. Dans le système actuel tout est lié aux classes et à la catégorie. Lors du sondage fait dans l'Association des cadre supérieurs, s'est posée la question de savoir si cette catégorie était ressentie comme un besoin ou non. La réponse donnée de manière majoritaire a fait ressortir que les cadres considèrent qu'ils ont été engagés comme fonctionnaires dans des fonctions à responsabilité et qu'ils ne souhaitaient pas, nonobstant la qualité de travail qu'ils fournissent qu'il y ait en quelque sorte un travail à deux vitesses, d'aucuns pouvant être payés plus cher pour la même tâche parce qu'ils prendraient le risque de ne pas voir leur statut renouvelé après une période déterminée et les autres.

M. Vodoz relève que, si une tâche est bien exécutée et que l'on peut évoluer de manière différente dans le cadre de la carrière, cela devrait pouvoir être intéressant. Il a toutefois dû constater que la majorité des cadres supérieurs souhaitaient ne pas dépendre intégralement du pouvoir politique, comme dans l'administration américaine. De plus, ils craignaient l'instauration de cadres de deux natures, ceux qui plaisent au président ou chef de service en exercice et ceux qui ne s'entendent pas. C'est donc un problème délicat et difficile et, compte tenu de la réaction des cadres supérieurs et de la période actuelle, le Conseil d'Etat a jugé opportun de ne pas aller au-delà des modifications qui ont été apportées dans le projet de loi, tout en souhaitant pouvoir continuer à réfléchir et à aller plus loin. La réflexion a été intéressante dans la mesure où l'échelle des traitements à Genève fait apparaître que l'on a de bons salaires, compte tenu du bas de la pyramide, mais, à certains niveaux, il y a difficulté à trouver du personnel prêt à s'engager pour le type de salaire offert.

M. Vodoz, reprenant la notion d'agent spécialisé, souligne que dans le cadre des outils de gestion de l'Etat, se pose la question de savoir s'il ne faut pas, pour une période limitée de temps, engager quelqu'un qui soit en quelque sorte au-dessus des différents départements, connaissant bien les outils de gestion des grandes administration et autres pour pouvoir piloter, avec les cadres et responsables, les réformes au niveau, précisément, de ces outils de gestion. Une fois ces tâches terminées, la personne en question partirait. Le statut d'agent spécialisé permet de répondre à cela.

Un commissaire se référant aux articles 9 et 7, sans vouloir rallumer le brasier, s'étonne de la teneur de l'article 7, d'une rigidité telle qu'elle va au-delà des souhaits des intéressés. Comme vient de le relever M. Vodoz, le sondage a été fait dans le cadre de l'administration. Or, les agents spécialisés sont ailleurs et peut-être que le statut de l'article 9, tel qu'il existe actuellement, pourrait leur suffire.

M. Aubert souligne qu'il y avait une crainte, exprimée par les représentants de personnel, que ce projet soit utilisé pour examiner le statut des fonctionnaires et que ces derniers soient remplacés par des agents spécialisés. Ce n'est évidemment pas du tout l'optique du Conseil d'Etat. Toutefois, dans l'analyse, il faut penser aux critiques infondées qui pourraient être faites et le risque a été exprimé que le statut de la fonction publique devienne totalement flexible. Il est apparu alors qu'une limitation était opportune, que ce soit renouvelable deux fois ou trois fois. L'idée est quand même d'une certaine unité dans l'administration et il n'y a pas tellement de raisons qu'il y ait dans certains départements essentiellement des agents spécialisés et dans d'autres des fonctionnaires. Il faut, au contraire, assouplir le statut du fonctionnaire pour qu'il puisse être mis fin aux rapports de service, au besoin, plutôt que de créer des sous-catégories qui vont embarrasser la réflexion.

M. Vodoz relève que les statuts idéaux doivent permettent, d'une part, aux personnes engagées de savoir comment elles évoluent, avec un certain nombre de droits garantis et, d'autre part, d'être suffisamment flexibles pour des adaptations. C'est d'autant plus difficile que l'on se trouve dans une période en plein changement et l'on prête généralement aux gouvernements les pires intentions. L'expérience montre aussi qu'un certain nombre de personnes, tout en acceptant, au départ, l'idée du statut d'agent spécialisé, au fur et à mesure des années, souhaiteraient savoir ce qui va se passer. Après dix ou douze ans de tâche, quelle que soit la capacité d'accepter le changement dû au contrat, il n'est pas rare d'avoir des demandes de pouvoir régulariser les choses. C'est le même problème pour les auxiliaires qui voient leurs tâches évoluer de manière quasiment permanente et qui comptent là-dessus. Le statut d'auxiliaire peut convenir à défaut d'autre chose mais, au bout du compte, beaucoup de personnes demandent à être titularisées, en particulier dans le cadre du département de l'instruction publique (DIP). Les gens qui, au départ, acceptent un statut flexible, au fil des années, et au vu de la cohabitation avec des collègues qui ont un autre statut, demandent à changer de statut.

Un commissaire pose la question de savoir combien il y a d'agents spécialisés sur les 20 000 fonctionnaires, y compris les établissements hospitaliers.

M. Gartenmann répond, qu'à sa connaissances, de mémoire, il y a dans les départements. Dans les EPM, cinq ans en arrière, il y en avait quatre ou cinq et il ne semble pas que ce nombre ait beaucoup changé. Le chiffre de trente en tout devrait correspondre à la réalité.

Le conseiller d'Etat rappelle qu'en cas de changement proposé par la commission des finances, le Conseil d'Etat en informera les associations de personnel qui feront part de leur point de vue, le cas échéant, souhaiteront être auditionnées.

La commission passe ensuite au vote sur le projet de loi 7493.

PL 7493

Statut de la Fonction publique

Révision de la loi relative au personnel

(B 5 05)

Commissaires présents au moment du vote: 14

Entrée en matière

12 oui

2 abstentions (2 AG)

Article 1

Pas d'opposition

Article 2

Pas d'opposition

Il faudra renuméroter au vu des adjonctions d'alinéas

Article 3

Idem

Article 4

Idem

Article 5

Idem

Art. 6

Idem

Article 7

Il est proposé d'en rester à l'article 9 actuel, plus large que l'article 7 concernant les agents spécialisés. On fait remarquer que la version précédente est meilleure pour deux raisons. La première est d'ordre politique et consiste à dire que dans le texte actuel l'agent spécialisé est engagé pour ses connaissances particulières, pour accomplir une mission de durée déterminée. C'est la mission qui détermine la durée. Dans le nouveau texte, c'est le droit qui détermine la durée. La seconde raison est liée au fait que, dans des contrats de durée déterminée, en droit privé, lorsqu'ils sont en cascade, le Tribunal fédéral considère que l'engagement n'est plus un engagement de durée déterminée mais que la personne qui l'accomplit devient un agent fixe. Pour ces deux raisons, la deuxième disposition est moins bonne que la précédente.

Le président met aux voix l'amendement.

Article 7AmendementReprendre l'actuel article 9 pour en faire le nouvel article 7

10 oui2 non (2 S)2 abstentions (2 AG)

Article 8Pas d'opposition

Article 9Idem

Article 10Idem

Article 11Idem

Article 12

Les chiffres 2, 3, 4, et 5 du projet initial tombent. Dans le nouveau texte, négocié avec les partenaires sociaux, on a modifié ce qui regardait «l'appréciation» et rédigé un nouveau libellé relatif au «fonctionnement des services et qualité des prestations». Deux possibilités s'offrent: soit de rédiger un article 12 pour l'appréciation et un article 13 pour le fonctionnement des services et la qualité des prestations, soit de fondre les deux notions en un seul article 12. Il est précisé que l'appréciation n'a lieu que pour ceux qui ne sont pas fonctionnaires. En effet, les partenaires sociaux ont toujours refusé, depuis cinq ans, l'idée d'entretiens périodiques visant à l'appréciation du personnel. Pour la première fois, cette idée est enfin admise, mais en reformulant autrement la notion. Le principe même de la périodicité de l'appréciation est inscrit dans la loi pour les personnes qui ne sont pas fonctionnaires, donc pour les employés en période probatoire et les auxiliaires. En revanche, tout ce qui touche aux modalités d'application qui peuvent figurer dans le règlement a été enlevé. De plus, afin d'améliorer le bon fonctionnement des services et la qualité des prestations, il est mis en place un processus d'évaluation prévoyant des entretiens individuels comme des entretiens de services. Cette disposition concerne chacun, y compris les fonctionnaires. Là aussi, le principe est inscrit dans la loi alors que les modalités d'application seront inscrites dans le règlement.

Le conseiller d'Etat OlivierVodoz souligne que les associations de personnel s'opposent à l'évaluation du travail parce qu'elles considèrent qu'il s'agit d'un premier pas vers le «salaire au mérite». Pourtant, cela s'applique dans les hôpitaux et aux cadres de l'Etat depuis deux ans. Le Conseil d'Etat a soutenu l'idée qu'il puisse y avoir une procédure d'appréciation du personnel non seulement en période probatoire mais qu'elle se poursuive ensuite. D'où l'introduction du principe d'appréciation du personnel dans la loi. Un député ne comprend pas pourquoi les mécanismes d'appréciation diffèrent selon le type de statut du personnel et s'étonne de l'attitude à ce sujet tant du Conseil d'Etat que du Cartel.

Le conseiller d'Etat Olivier Vodoz aurait jugé plus logique un article général sur l'appréciation du personnel qui puisse s'appliquer à toutes les catégories de personnel, mais, compte tenu des réserves et des tensions, la solution retenue a paru plus appropriée. La commission constate que la différence avec le privé où les gens réclament souvent des évaluations, c'est que ces dernières ont pour but, souvent, un avantage décerné à qui est reconnu particulièrement performant alors que, de ce point de vue, le projet de loi présenté demeure plus négatif que positif puisqu'il ne débouche que sur d'éventuelles sanctions. Toutefois, M. Olivier Vodoz fait remarquer qu'à son avis l'appréciation du personnel est une chose très positive pour les employés de l'Etat. Dans certains services, les chefs ne s'intéressent guère aux personnes et par le biais de l'obligation d'avoir un entretien, le dialogue pourra être établi. Cette appréciation permettra aussi d'avoir une évaluation de carrière par rapport à une orientation future. Un député relève que, s'il y a demande d'évaluation, c'est également pour redéfinir les objectifs et atteindre un meilleur fonctionnement, ce qui donne en général une meilleure satisfaction au travail. Il faut donc que le principe s'inscrive dans la culture de l'administration. Il est décidé de garder l'article 12 nouvelle mouture et de passer ensuite à l'article 13, plutôt qu'un 12bis. Toutefois, dans le vote article par article, la terminologie 12 et 12bis est conservée.

Article 12Pas d'opposition

Article 12 (bis)Pas d'opposition

Article 13Pas d'opposition

TITRE IISANCTIONS DISCIPLINAIRES ET FINDES RAPPORTS DE SERVICE

Article 14Pas d'opposition

CHAPITRE II

SECTION IPrincipes et clauses protectrices

Articles 15, 16 et 17

Pas d'opposition

Articles 17 et 18

Actuellement, l'interdiction de licenciement est de 16 semaines après l'accouchement, plus 4 semaines supplémentaires en cas d'allaitement. Les partenaires sociaux ont souhaité que les 20 semaines soient inscrites dans la loi, ce qui ne change rien à la pratique actuelle.

Un député socialiste souhaiterait que l'interdiction de 20 semaines soit étendue à toutes les femmes, qu'elles allaitent ou non. En effet, à l'origine, les 4 semaines supplémentaires avaient été prévues pour favoriser le retour à l'allaitement maternel. De nos jours, seules les femmes qui ne le peuvent pas renoncent à l'allaitement. En allongeant la durée du délai, on éviterait, selon ce député, de prétériter les femmes qui ne peuvent allaiter. Il propose l'amendement suivant: «Une femme ne peut être licenciée pendant la grossesse et au cours des 20 semaines qui suivent l'accouchement». Le professeur Gabriel Aubert signale que le code des obligations prévoit la protection contre le congé durant la grossesse et les 16 semaines qui suivent l'accouchement. La proposition du député sort du cadre du code des obligations. L'amendement sera refusé par 4 oui contre 6 non sur 10 députés présents.

Article 17Pas d'opposition

Article 18Pas d'opposition

SECTION 2Fonctionnaires et employés

Article 19Pas d'opposition

Article 20Pas d'opposition

Le conseiller d'Etat souligne que la notion «n'est pas dans l'intérêt du bon fonctionnement de l'administration» contenue dans le projet d'origine a été considérée comme ouvrant la porte à tous les abus par les partenaires sociaux qui l'ont rejetée. L'article a donc été amendé pour tenir compte de leurs voeux, mais les points a), b), et c) précisant les motifs objectivement fondés restent inchangés.

Article 21, 22Pas d'opposition

SECTION 3Autres membres du personnel

Article 23Pas d'opposition

SECTION 4Retraite et invalidité

Articles 24 et 25Pas d'opposition

CHAPITRE lllDisposition de procédure et contentieux

SECTION 1Procédure pour sanctions disciplinaires et résiliation des rapportsde service

Article 26Pas d'opposition

M. Vodoz souligne que l'enquête administrative est souhaitée de part et d'autre.

Articles 27, 28, 29, 30, 31Pas d'opposition

Articles 31, 32, 33Pas d'opposition

Article 34Pas d'opposition

M. Vodoz relève que l'article est relatif aux dispositions du personnel manuel quant à leur retraite.

Article 36Pas d'opposition

En deuxième lecture, article par article, le projet de loi 7493 est donc achevé.

Comme la commission des finances a modifié le texte sur les agents spécialisés, il est proposé que le Conseil d'Etat présentera cette modification aux partenaires sociaux. Par ailleurs, M. Olivier Vodoz informe la commission que le professeur Aubert a quelques incertitudes face au libellé de l'article 11. Le texte arrêté, à teneur des jurisprudences actuelles, resterait trop flou. Pour le professeur Aubert, la loi actuelle précise qu'un «changement d'affectation ne peut, en principe, entraîner de diminution de salaire». Le Tribunal administratif a interprété cette disposition de façon très restrictive et il a considéré qu'il ne pouvait pas y avoir d'exceptions que dans des cas tout à fait particuliers, sans dire lesquels. D'une manière générale, le changement d'affectation ne peut entraîner de diminution de salaire.

Le professeur Aubert explique la proposition contenue dans l'alinéa 3 du projet du Conseil d'Etat, soit «est réservé le cas d'un changement d'affectation consécutif à une modification substantielle ou à une suppression de poste».

M. Aubert ajoute que les partenaires sociaux ont craint que le Conseil d'Etat ne modifie tous les postes de l'administration pour réduire les traitements. Ce dessein «machiavélique» n'est toutefois pas visé par le texte puisqu'il est dit «en cas de suppression de poste». Par ailleurs, la «modification substantielle» a été abandonnée. Le Conseil d'Etat ne peut donc pas supprimer tous les postes d'un coup pour les réductions de salaire. A la fin de la discussion à ce sujet, il est ressorti «sont réservées les cas particuliers de changement d'affectation à caractère exceptionnel», texte apparaissant dans la colonne de droite qui représente en fait un retour à la case départ, voire même un retour encore plus rigide. D'après le nouveau texte, un changement d'affectation ne permettrait que très difficilement une réduction de rémunération, avec comme conséquence que l'Etat risquerait de licencier au lieu de reclasser. L'idée exprimée sous chiffre 3 est, de la part des partenaires sociaux, le souhait qu'il n'y ait pas de valse de postes qui entraînent des réductions de rémunération, ce qui n'était pas, au départ, l'intention du Conseil d'Etat. En ce qui le concerne, il aurait préféré, sans imposer quoi que ce soit, «sont réservés les changements d'affectation à caractère individuel», cela pour bien montrer qu'il ne s'agit pas de changements d'affectation collectifs. Il serait également souhaitable que soit expliqué, dans le rapport accompagnant le texte, de quoi il s'agit, soit, comme le voulaient les partenaires sociaux, qu'il ne fallait pas laisser la porte ouverte, dans le cadre de cette disposition, à des changements d'affectation généraux dans l'administration mais que, dans l'intérêt des agents publics, un changement d'affectation pouvait, le cas échéant, entraîner une diminution de salaire en tant qu'alternative à une perte d'emploi.

L'article 22 du projet du Conseil d'Etat mentionnant la «modification substantielle» de poste a été supprimé parce que les partenaires sociaux ne voulaient précisément pas de cette «modification substantielle». Aussi l'article 11 a-t-il été rediscuté en tenant compte de situations individuelles puisque chacun s'accordait à considérer qu'il ne pouvait pas concerner des groupes. L'alinéa 3 a donc été rédigé en tenant compte de la suppression de l'article 22.

M. Aubert pense que la meilleure solution serait de reprendre l'article 22 en renonçant à la notion de «modification substantielle de poste» et de renoncer également à l'alinéa 3 de l'article 11 puisque la disposition spéciale déroge à la disposition générale, ce qui montrerait bien que le siège et la matière, ce sont les suppressions de poste et non pas le réaménagement plus ou moins arbitraire d'un poste.

M. Vodoz souligne que, sur tous les bords, personne n'a envie de voir le développement de voies de garage pour certaines personnes qu'il ne serait pas possible de reclasser dans une autre catégorie, en raison de l'importance du niveau et du salaire. Ce genre de situation crée des inégalités très choquantes, deux personnes faisant exactement la même tâche, mais l'une avec deux ou trois classes de plus par rapport à l'autre, sauf si la négociation est possible avec le collaborateur concerné. Ces situations touchent davantage les cadres intermédiaires que les petits revenus. Il devrait donc être possible de proposer un autre poste avec une modification de classe, cette dernière n'entraînant pas forcément une modification au niveau salarial, puisqu'il y a des degrés différents à l'intérieur des classes. Des cas de ce genre ont déjà pu être négociés, en particulier à la chancellerie, où des personnes ont dû être déclassées pour éviter des désaccords. C'est cette forme de flexibilité dans des situations individuelles que le Conseil d'Etat a voulu voir figurer dans le texte du projet de loi mais qui a abouti finalement à un texte trop rigide qui risquerait de geler ce type de négociation.

Le professeur Aubert rappelle qu'un rapport de service est un rapport individuel. Il estime surtout qu'entre l'article 12, alinéa 3 actuel, et l'article 11, alinéa 3 nouveau, il n'y a pas vraiment de différence car le changement souhaité par le Conseil d'Etat n'y trouve pas une expression suffisante. Comme le Tribunal administratif peut dire que les exceptions s'appliquent restrictivement, il s'agirait de préciser, de manière explicite, dans quels cas l'exception peu s'appliquer. Toutefois, le Conseil d'Etat maintient le texte sorti des négociations tout en remerciant le professeur Aubert d'avoir signalé d'éventuels problèmes d'application.

Le directeur de l'office cantonal de l'emploi relève un premier cas de figure. Lorsqu'une fonction est supprimée, il est en principe prévu de trouver une solution en interne, faute de quoi la personne est licenciée. Dans la situation actuelle, si une personne est transférée, automatiquement l'on doit lui garantir son niveau salarial. Il a été dit aux partenaires sociaux que cette situation entraînait dans certains cas des inégalités de traitement puisque l'on peut trouver deux personnes avec la même fonction mais un salaire différent. Dans ce type de situation, il paraissait souhaitable de donner une priorité à l'emploi, de renoncer à licencier la personne et de lui proposer un nouvel emploi, qu'elle peut d'ailleurs accepter ou refuser.

M. Gartenmann prend un deuxième cas de figure, celui de la personne qui commence à avoir de la peine dans sa fonction, en raison des changements intervenus dans les méthodes de travail, en raison de restructuration, de réorganisation, etc. Ces situations peuvent être tolérées pendant un certain temps mais il arrive un moment où la personne est mal à l'aise et la situation pourrit. Au lieu d'ordonner une enquête disciplinaire sur des motifs objectivement fondés, il reste préférable de considérer les compétences de la personne. Si elle peut trouver une autre fonction, peut-être moins bien rémunérée, on peut lui proposer une autre activité. Dans ce cas également, il s'agirait de donner priorité à l'emploi et de trouver des solutions dans la mesure du possible, le salaire dans ce cas pouvant être adapté. Ces situations ne sont toutefois pas fréquentes, mais c'est la raison pour laquelle l'article 11 a été discuté avec les partenaires sociaux qui ont parfaitement compris les situations.

La commission constate que sur le principe les partenaires sociaux sont d'accord. Il s'agit de savoir si la transcription retenue reflète ou non l'issue de la négociation. Le problème a surgi parce que les partenaires sociaux ont souhaité maintenir uniquement la «suppression de poste», d'où le retrait de l'article 22 du projet. Mais la suppression de l'article 22 entraînait une modification de l'article 11, alinéa 3, pour tenir compte de ces éléments. Comme le souligne le conseiller d'Etat Olivier Vodoz, l'enjeu de cette discussion est la probité intellectuelle. Suite à la suppression de l'article 22, il fallait que la commission des finances, à l'intention du Grand Conseil, clarifie l'interprétation de l'article 11, alinéa 3. Plutôt que de laisser tout en l'état, puisque juridiquement l'article 11 présenté est valable, il convient de le modifier pour le rendre explicite. Pour le professeur Aubert, la meilleure solution serait de mentionner à l'alinéa 3 de l'article 11: «... sont réservés les cas individuels de changement d'affectation» et de laisser tomber l'article 22. Toujours soucieux de défendre l'accord intervenu avec les associations représentatives du personnel, le conseiller d'Etat Olivier Vodoz suggère que la commission des finances interrompe ses travaux pour recueillir l'avis de ces organisations. Plusieurs parlementaires, tout en comprenant fort bien la position du gouvernement, émettent des regrets face à cette manière de court-circuiter les instances parlementaires qui n'auraient plus qu'à se soumettre à un accord réalisé en dehors du parlement. D'autres députés font remarquer que, si la loi actuelle est archaïque et grotesque, la proposition du Conseil d'Etat ne favorise la modification que dans un seul sens et que le résultat de la négociation peut lui aussi apparaître comme grotesque. Seul compte, finalement, l'accord résultant entre le Conseil d'Etat et le Cartel.

Finalement, le 29 janvier 1997, les travaux sont ajournés dans l'attente d'une réunion entre le Conseil d'Etat et les associations représentatives du personnel où les résultats et les discussions de la commission parlementaire seront présentés. La commission se rallie à ce mode de faire par 12 oui et 1 abstention.

Le 5 mars 1997, le conseiller d'Etat Olivier Vodoz, après avoir pris l'avis du groupe paritaire, réuni le 28 février 1997, présente une nouvelle rédaction de l'article 11, alinéa 3, qui a trouvé l'assentiment de tous les partenaires sociaux. Elle est ainsi libellée: «... sont réservés les cas individuels de changements d'affectation à caractère exceptionnel».

Le terme «individuel» a remplacé le terme «particulier». Personne ne pourra ainsi imaginer que, par le biais d'un libellé critiquable, on introduise la possibilité de licenciements collectifs pour proposer de nouvelles fonctions à des salaires inférieurs. La nouvelle formulation, acceptée par les deux parties, précise bien le caractère individuel, d'une part, et les changements d'affectation à titre exceptionnel, d'autre part. L'expert, le professeur Aubert, a également approuvé la nouvelle formulation.

Finalement, le nouvel article 11, alinéa 3, qui devient le nouvel article 12, dans la rédaction définitive de la loi est adopté à l'unanimité de la commission des finances. Les partenaires sociaux ne se sont pas opposés, par ailleurs, à la modification proposée et votée par la commission des finances sur la durée du mandat des agents spécialisés.

Il est décidé de traiter le projet de loi 7526 concernant la possibilité de réintégration d'un employé licencié par le Tribunal administratif, déposé par quelques députés séparément. En effet, la commission des finances a travaillé longuement sur le projet de loi 7493 pour trouver un accord consensuel. Certains députés jugent que ce projet ne va pas assez loin. Comme il est issu de négociations entre les partenaires sociaux et qu'il y a consensus sur le texte final soumis au Grand Conseil, une large majorité des députés ne souhaite pas modifier quoi que ce soit au texte approuvé tant par le Conseil d'Etat que le Cartel. Finalement, la commission décide de ne pas traiter le sujet qui fâche, et que les partenaires sociaux n'ont pas tenu à insérer dans le projet de loi 7493, afin d'assurer une large majorité parlementaire au nouveau statut de la fonction publique tel qu'il résulte des négociations entre le Conseil d'Etat et les associations représentatives du personnel, quelles que soient les réticences des uns et des autres, puisque les uns jugent que ce projet de loi ne va pas assez loin et les autres estiment au contraire qu'il va trop loin.

Vote final

Au vote final, le projet de loi 7493 est adopté par 9 oui (3 L, 2 R, 2 DC, 2 AdG, 1 S) contre 0 non et l abstention (V), 10 commissaires étant présents.

Conclusion

Pour les raisons susmentionnées et au vu des discussions auxquelles il a donné lieu, et en raison des accords conclus entre le Conseil d'Etat et les associations représentatives du personnel,, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter ce projet de loi tel qu'il vous est présenté.

TABLE DES MATIÈRES

Page

TITRE I: DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Art. 1 Champ d'application  9678

Art. 2 Autorité compétente  9678

Art. 3 Fonctions permanentes et non permanente - Rapports

 de service  9679

Art. 4 Catégories  9679

Art. 5 Fonctionnaire  9679

Art. 6 Employé  9680

Art. 7 Auxiliaire  9680

Art. 8 Agent spécialisé  9680

Art. 9 Personnel en formation  9680

TITRE II: RAPPORTS DE SERVICE

Art. 10 Autorité de nomination et d'engagement  9681

Art. 11 Délégation  9681

Art. 12 Affectation  9682

Art. 13 Appréciation  9682

Art. 14 Fonctionnement des services et qualité des prestations  9682

Art. 15 Domicile  9683

TITRE III: SANCTIONS DISCIPLINAIRES ET FIN

 DES RAPPORTS DE SERVICE

Chapitre I: Sanctions disciplinaires

Art. 16 Autorités compétentes et sanctions disciplinaires  9683

Chapitre II: Fin des rapports de service

Sanction 1: Généralités

Art. 17 Autorité compétente  9684

Art. 18 Non-licenciement d'une femme enceinte  9685

Art. 19 Non-licenciement pour fait syndical  9685

Art. 20 Délais de résiliation  9685

Section 2: Fonctionnaires et employés

Art. 21 Résiliation  9686

Art. 22 Motif objectivement fondé  9686

Art. 23 Suppression d'un poste  9686

Section 3: Autres membres du personnel

Art. 24 Résiliation  9687

Section 4: Retraite et invalidité

Art. 25 Retraite  9688

Art. 26 Invalidité  9688

Chapitre III: Dispositions de procédure et contentieux

Section 1: Procédure pour sanctions disciplinaires

 et résiliation des rapports de service

Art. 27 Etablissement des faits  9688

Art. 28 Suspension provisoire pour enquête  9689

Art. 29 Coordination avec d'autres procédures administrative,

 civile et pénale  9690

Section 2: Contentieux

Art. 30 Recours contre une sanction disciplinaire  9690

Art. 31 Recours contre une décision de résiliation des rapports

 de service  9690

Art. 32 Procédure  9691

TITRE IV: DISPOSITIONS FINALES

Art. 33 Disposition d'exécution  9691

Art. 34 Clause abrogatoire  9692

Art. 35 Entrée en vigueur  9692

Art. 36 Dispositions transitoires  9692

Art. 37 Modifications d'autres lois  9692

Premier débat

M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. Je rappelle simplement que la loi votée résulte d'un accord entre toutes les parties. Normalement, il appartenait au Conseil d'Etat et au Cartel de négocier, mais on nous a présenté un projet dont certains articles ont suscité des votes divergents. Finalement, il a été adopté par 9 oui contre aucun non et une seule abstention.

Par conséquent, j'en recommande l'approbation par ce Grand Conseil.

M. Daniel Ducommun (R). Le groupe radical a effectivement voté ce projet après avoir souligné, en préconsultation, que cette réforme, qui aurait dû être fondamentale, n'était qu'un timide toilettage.

Une fonction publique moderne ne peut pas se développer dans des structures aussi rigides. Nous l'affirmons et pour l'efficacité de l'employeur, et pour l'épanouissement de l'employé. Nous aurions dû oser la flexibilité des grilles salariales sur la base des compétences et des performances. Nous aurions dû oser la mise en place généralisée de rapports de qualification périodiques. Nous aurions dû oser la distinction entre administration d'autorités et administration de prestations, ce qui aurait pu lever partiellement les incompatibilités avec une élection au législatif cantonal. Tant pis, nous ferons mieux la prochaine fois !

Dès lors, l'intérêt du projet que nous voterons réside essentiellement dans la concertation des partenaires sociaux et dans l'élaboration du texte.

Respectueuse de ce partenariat social, la commission des finances n'a quasiment pas retouché ses propositions, car chaque mot modifié aurait provoqué une nouvelle réunion syndicale.

Néanmoins, restons positifs ! Outre la qualité du rapport de notre collègue Bernard Lescaze, nous relevons les quelques améliorations des règlements de service qui ouvrent de modestes brèches dans des textes actuellement trop restrictifs.

En conséquence, le parti radical votera cette nouvelle loi à l'unanimité.

M. Bernard Clerc (AdG). Comme nous l'avions dit en préconsultation, aucune négociation sérieuse n'a eu lieu avec les organisations syndicales, lors du dépôt du projet de loi. En revanche, il y a eu une volonté évidente de précariser le statut du personnel, notamment en supprimant la définition des fonctions permanentes et non permanentes.

Des appréciations périodiques au-delà de la période probatoire et un statut d'auxiliaire d'une durée prolongée à quatre ans étaient notamment prévus.

C'est suite au mouvement de grève d'automne 1996 que le Conseil d'Etat a enfin accepté de négocier avec les organisations syndicales. Le groupe de travail a abouti au compromis reflété par ce projet de loi, dont les points positifs sont :

- la réintroduction des définitions des fonctions permanentes et non permanentes, la durée du contrat d'auxiliaire ramenée à trois ans;

- la définition limitative de la notion d'agent spécialisé, laquelle aurait permis, effectivement, des engagements relativement prolongés;

- le renoncement aux diminutions de salaire en cas de changement d'affectation sauf dans des cas individuels exceptionnels.

Bien que positif dans son ensemble, ce projet comporte des points négatifs, tels ces entretiens périodiques après la période probatoire qui ne conduiront qu'à l'augmentation de la paperasserie, d'où un surcoût non évalué. De plus, un chef de service ou un chef de groupe n'ont nul besoin de ces entretiens pour savoir comment travaillent leurs subordonnés.

On note, dans ce projet, une absence de réintégration obligatoire en cas de licenciement abusif, d'où le projet de loi de l'Alliance de gauche traité en commission. Nous reviendrons donc sur cet objet.

Monsieur Ducommun, je ne partage pas votre vision de la modernité qui provoque, en général - je ne parle pas de la fonction publique - l'insécurité et la précarité dans les rapports de travail. Je comprends, dès lors, que vous vouliez aller dans ce sens. Il n'en a pas été ainsi, et c'est pourquoi nous voterons ce projet de loi basé sur un accord entre les partenaires sociaux.

M. Dominique Hausser (S). Ce projet de loi, issu des travaux de la commission, résulte finalement d'un accord passé entre le Conseil d'Etat et les organisations du personnel.

C'est en l'absence de toute concertation et négociation avec les organisations syndicales que le Conseil d'Etat avait déposé ce projet de loi en juillet 1996. Il a fallu la pression de la rue et une dure bagarre en commission pour que des négociations aient lieu, dans un climat stressé, et que la commission des finances adopte ce projet de loi en mars 1997.

Je reprocherai juste à M. Lescaze d'avoir tardé à déposer son rapport qui n'a été présenté qu'en septembre à ce parlement.

Ne souhaitant pas ce que M. Ducommun préconise, nous invitons le gouvernement à entrer rapidement en discussion et en négociation avec les organisations du personnel, afin de définir une politique allant dans le sens du partage du travail, de la responsabilisation du personnel, non sur la base du salaire au mérite, mais sur celle d'une réelle participation.

J'espère que ces négociations débuteront au 1er janvier 1998 et non à la fin de la prochaine législature.

M. Jean Spielmann (AdG). L'organisation de l'administration publique et de son personnel constitue l'enjeu majeur des années à venir. Nous avons tardé à mettre sur pied une réforme et nous avons souvent expliqué qu'il ne pouvait y avoir une meilleure gestion des affaires publiques et une meilleure mise à disposition du public de l'ensemble des prestations de l'Etat sans la participation de ses acteurs principaux, c'est-à-dire le personnel, et que l'utilisation intelligente de ces ressources humaines nécessitait un tel débat.

Les blocages, l'absence de discussions et les décisions prises unilatéralement ont conduit à des positions de repli et à des situations inextricables.

Nous ne remettrons pas en cause l'accord signé par les partenaires sociaux, mais permettez-moi de vous dire qu'il n'est pas satisfaisant à nos yeux, parce qu'il régresse en matière d'emplois et n'appelle pas à une plus grande participation du personnel qui s'en serait trouvé davantage motivé et responsabilisé. En définitive, on est en train de mettre en place un nouveau statut qui détruit certains acquis.

Cet accord ne correspond pas à ce que nous souhaitions. L'assouplissement des mesures de licenciement, la mise en place de certains éléments, ressortant du code des obligations, sur la protection contre les licenciements, ne vont pas dans le sens d'une responsabilisation plus grande et des droits des employés, pas plus que ne me semble adaptée à la situation actuelle une définition de la raison du licenciement.

Ce statut doit être renégocié dans son ensemble. Nous devons remettre l'ouvrage sur le métier et discuter avec les acteurs des services publics des moyens permettant d'offrir à la population les meilleures prestations possibles.

C'est là un point central sur lequel nous aurons l'occasion de revenir. Pour l'heure, signons ce qui est plus un armistice qu'une avancée sur le plan du droit ! Ce projet résulte d'une situation figée. Nous espérons qu'une discussion s'engagera de part et d'autre et que nous trouverons un statut à la fois favorable à la population et au service public.

M. David Hiler (Ve). J'ai été heureux d'entendre M. Spielmann appeler de ses voeux une nouvelle mouture de ce statut de la fonction publique qui date énormément, à bien des points de vue.

Je l'approuve quand il dit qu'une telle mutation ne peut se faire que dans un climat de confiance, un climat difficile à créer aujourd'hui pour toutes sortes de raisons.

Les arrangements cosmétiques apportés à ce statut permettent à l'ancien Conseil d'Etat et au Cartel de ne pas perdre la face. Il n'en demeure pas moins que les avancées sont très faibles.

Si on veut modifier ce statut, il faut le faire de manière équilibrée. Si l'on renonce à la gradation absurde des punitions prévues à l'article 16 - un avertissement, un blâme, une suspension d'augmentation de traitement pendant une durée déterminée, la réduction du traitement à l'intérieur de la classe, le retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de trois ans - pour revenir à une logique plus évidente, à savoir que l'on est bien obligé de se séparer d'un employé qui n'accomplit pas son travail, il faut abolir la période probatoire. Licenciement et période probatoire s'excluent réciproquement. En effet, on ne peut pas demander à un employé de réaliser son «chef-d'oeuvre» en trois ans, de prouver qu'il se situe au-dessus du commun des mortels, pour l'autoriser - chose incroyable ! - à entrer dans sa propre classe de rétribution et faciliter, en même temps, les procédures de licenciement.

On ne pourra pas garder la période probatoire - parce qu'elle fait économiser de l'argent - et assouplir les mesures de protection. Ce compromis ne marchera pas !

Nous avons besoin de relations de travail normales dans l'administration. C'est pourquoi il faut soutenir la proposition de l'Alliance de gauche qui, sur décision du Tribunal, rend obligatoire la réintégration d'une personne injustement licenciée.

La remise à jour du statut de fonctionnaire sera, certes, compliquée, et je ne pense pas que nous y parviendrons en 1998. Peut-être en 1999 ?

Quoi qu'il en soit, nous appelons de nos voeux un statut qui ne soit pas un règlement de pension pour jeunes filles ! La façon actuelle de définir ce que l'on a le droit de faire ou de ne pas faire, de graduer les sanctions, est terriblement désuète et n'a aucun sens !

Je voudrais tout de même rappeler qu'en matière de licenciements pour justes motifs le culturel l'emporte sur la loi. Vous pouvez changer la loi, il n'empêche que vous ne pourrez pas licencier une personne pour erreurs graves et répétées. Je vous donne un seul exemple, celui de l'instruction publique qui induit, parfois, des conséquences catastrophiques pour ceux qui suivent des cours. Oui, cela arrive !

C'est le même débat qu'en France. Vous n'y échapperez pas. J'espère que, d'entente avec les organisations syndicales, nous trouverons des solutions qui rendent ce statut plus «contemporain», mais de façon que chaque partie y trouve son compte et, subséquemment, la population dans son ensemble.

J'avoue m'être abstenu en commission. J'étais excédé, lors du débat en commission, par la teneur vieillotte du projet. Aujourd'hui, j'espère que nous repartirons sur d'autres bases. Les propos de M. Spielmann me rendent un peu de mon optimisme.

Notre groupe acceptera donc de ratifier un accord qui date sérieusement, parce que passé dans des conditions historiques particulières, mais en invitant le Conseil d'Etat, les organisations syndicales et ce qu'il est convenu d'appeler la nouvelle majorité, à remettre l'ouvrage sur le métier dans les plus brefs délais.

M. Pierre-François Unger (PDC). Comme l'ont dit tous mes préopinants, la loi issue de l'accord passé entre le Cartel et le Conseil d'Etat est intouchable et, pourtant, elle manque singulièrement d'ambition !

Mon groupe et moi-même sommes frappés qu'une loi générale, prévue pour le personnel de l'administration cantonale et des établissements médicaux, n'ait même pas d'article «chapeau» sur le sens et la grandeur de la mission du service public. Un article d'introduction générale, comme nous en voulions un pour le projet de la loi sur la culture, n'est pas prévu dans cette loi.

Je suis également frappé, tout comme M. Hiler, par l'absence de perspectives positives, corollaires de l'évaluation du personnel, aussi nécessaires que les perspectives négatives. Cinq articles se rapportent aux sanctions et pas un seul aux plans de carrière.

Ce projet manque d'ambition puisqu'il ne fait nulle référence à une incitation à la qualité, qu'il s'agisse d'individus ou de groupes. Comme vous le savez, je ne suis pas favorable au salaire au mérite, mais je pense que des groupes pourraient obtenir de bons résultats, s'ils étaient motivés soit financièrement soit autrement.

Enfin, je trouve que ce projet manque totalement de souplesse, ce qui n'est pas synonyme, Monsieur Clerc, de précarité, mais est synonyme de mobilité et d'une faculté d'adaptation qui a singulièrement fait défaut à notre administration. A cet égard, le groupe démocrate-chrétien votera ce projet, qui relève plus d'un accord que d'une loi, mais sans grand enthousiasme, tant il nous paraît manquer d'ambition.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je pourrais faire mienne une partie des propos tenus dans cette enceinte. Je vous souhaite bonne chance dans la définition de ce statut de la fonction publique qui, du centre à gauche et peut-être à droite, a l'air d'être merveilleusement préparé pour demain. Il sera souple, le licenciement sera de mise quand les personnes ne feront pas bien leur travail. Véritablement, j'ai l'impression d'être sur une autre planète !

Ce que vous avez oublié de dire - le travail effectué datant, il est vrai, de plus d'une année et demie - c'est que le projet du Conseil d'Etat, quelque peu différent, qui tentait d'ouvrir des pistes à des audaces certes bien modestes - Monsieur Unger, il faut beaucoup de temps pour essayer de faire passer certaines choses dans ce domaine - avait été soumis à la consultation de l'ensemble des organisations représentatives du personnel; qu'il y a eu plusieurs séances de négociations et que ce n'est qu'après ces consultations, avis et réponses écrites sur ces statuts, que le Conseil d'Etat, après en avoir fait la synthèse, a modifié certaines dispositions. Pour certaines, il jugeait bon d'aller dans le sens des remarques formulées, pour d'autres, il y a renoncé, estimant la direction erronée.

Ce fut un beau tollé quand j'ai présenté au Grand Conseil, contre vents et marées, le projet issu de ces consultations écrites et orales avec les organisations représentatives du personnel. Il n'a pas abouti à un consensus total, parce que l'on ne s'entendait pas sur un certain nombre de points.

Alors, vous avez dit que nous ne savions pas négocier. Que n'avons-nous d'ailleurs pas entendu durant ces huit dernières années ! Vous nous avez demandé de reprendre notre projet pour obtenir un consensus. Nous nous sommes remis au travail, comme je m'y étais engagé devant ce parlement. Finalement, un accord est intervenu et, pour qu'il aboutisse, il fallait que les deux parties cèdent.

Par conséquent, vous avez ce qui est ressorti de commission et qui donne des garanties à ceux qui craignaient la précarité du système - ce n'était pas du tout notre intention ! - et laisse une certaine amertume à ceux qui pensaient, comme moi, que l'on pouvait aller plus loin.

Dans une époque aussi difficile que la nôtre, où l'on demande beaucoup à notre administration, où l'on réforme tous azimuts, où l'on doit retenir sur les salaires et revenir sur ce que d'aucuns considéraient comme acquis, il est malaisé, Mesdames et Messieurs les députés, d'obtenir un consensus en une matière aussi délicate que la réforme du statut de fonction du personnel d'une grande collectivité publique, lequel touche des milliers de personnes.

J'ignore quel est le moment le plus propice pour négocier et aboutir. Quand tout va bien, on n'y pense pas. Quand tout va mal - et c'est humain - les gens s'accrochent à ce qu'ils ont. Dès lors, les démarches sont difficiles.

Ce projet n'est pas révolutionnaire. J'aurais souhaité tout autre chose. J'imaginais un statut différent pour la fonction publique sans aller aussi loin que d'autres cantons qui ont purement et simplement aboli le statut du personnel de la fonction publique, excepté celui de la police. Ce n'est pas la culture de Genève.

Ce projet de loi confirme, effectivement, l'accord intervenu après que chaque partie a dû céder sur un certain nombre de points, ce qui explique votre insatisfaction générale, mais l'essentiel est de voter maintenant ce statut. A partir de ces petites lucarnes - je me réjouis déjà de lire le Mémorial - vous mettrez en application les propositions de M. Spielmann curieusement interprétées par M. Hiler. Je ne suis pas sûr qu'ils se soient bien compris sur la portée d'un statut de la fonction publique qui ferait que l'on supprimerait toutes les sanctions au profit d'une simple appréciation sur la qualité du travail, laquelle pourrait priver le Conseil d'Etat ou des chefs de service d'un certain nombre de collaborateurs.

Je ne crois pas que vous aboutirez facilement, mais je vous souhaite bonne chance et vous demande de voter le projet de loi tel qu'il est ressorti de l'accord conclu voici plus d'une année.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

LOI

générale relative au personnel de l'administration cantonaleet des établissements publics médicaux

(B 5 05)

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

TITRE I

Dispositions générales

Article 1

1 La présente loi s'applique aux membres du personnel administratif, technique et manuel de l'administration cantonale, sous réserve des dispositions de l'article 120 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847.

2 La présente loi s'applique également au personnel des établissements publics médicaux. Demeurent réservées les dispositions particulières applicables au personnel médical énoncées dans les règlements des services médicaux adoptés par les établissements publics médicaux.

3 Les fonctions qui relèvent des lois:

a) sur l'instruction publique, du 6 novembre 1940;

b) sur l'université, du 26 mai 1973;

c) sur la police, du 26 octobre 1957;

d) sur l'organisation et le personnel de la prison, du 21 juin 1984;

font l'objet d'une réglementation particulière.

Art. 2

1 Les membres du personnel de l'administration cantonale relèvent de l'autorité du Conseil d'Etat.

2 Les membres du personnel de chaque établissement public médical relèvent de l'autorité du conseil d'administration.

3 Sont réservées les exceptions résultant de la présente loi.

Art 3

1 Existent au sein de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux des fonctions permanentes et des fonctions non permanentes.

2 Sont permanentes les fonctions exercées par le personnel régulier, fonctionnaires ou employés, pour assurer l'accomplissement des tâches dévolues de façon durable à l'administration ou aux établissements.

3 Sont non permanentes les fonctions exercées par les auxiliaires et les agents spécialisés pour permettre l'accomplissement de tâches dévolues occasionnellement à l'administration ou aux établissements, ou le remplacement temporaire du titulaire d'une fonction permanente.

4 Les rapports de service sont régis par des dispositions statutaires.

Art. 4

1 Le personnel de la fonction publique se compose de fonctionnaires, d'employés, d'auxiliaires, d'agents spécialisés et de personnel en formation.

2 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration précise les caractéristiques de chaque catégorie; il peut leur donner des dénominations particulières.

Art. 5

Est un fonctionnaire le membre du personnel régulier ainsi nommé pour une durée indéterminée après avoir accompli comme employé une période probatoire.

Art. 6

1 Est un employé le membre du personnel régulier qui accomplit une période probatoire.

2 Le Conseil d'Etat, le conseil d'administration ou la commission administrative arrête la durée et les modalités de la période probatoire.

Art. 7

1 Est un auxiliaire le membre du personnel engagé en cette qualité pour une durée déterminée ou indéterminée aux fins d'assumer des travaux temporaires.

2 Toutefois, la relation de service ne peut excéder une durée maximale de 3 ans. Cette limite ne s'applique pas à l'auxiliaire accomplissant des tâches intermittentes et de très courte durée.

3 La durée d'engagement est prise en compte comme période probatoire en cas d'accès au statut d'employé.

Art. 8

Est un agent spécialisé toute personnel engagé en cette qualité, en raison de ses connaissances particulières et de son expérience, pour accomplir une mission déterminée de durée limitée.

Art. 9

1 Est un apprenti le membre du personnel engagé en cette qualité pour acquérir une formation professionnelle définie dans un règlement fédéral ou cantonal d'apprentissage.

2 Est un stagiaire le membre du personnel engagé en cette qualité pour, notamment, acquérir ou compléter une formation professionnelle.

TITRE II

Rapports de service

Art. 10

1 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration est l'autorité d'engagement et de nomination.

2 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration nomme les fonctionnaires par un acte administratif soumis à l'accord de l'intéressé ou sollicité par lui.

Art. 11

1 Le Conseil d'Etat peut déléguer à l'office du personnel, agissant d'entente avec un département, ou aux services administratifs et financiers du département de l'instruction publique, la compétence de procéder à l'engagement de membres du personnel n'ayant pas la qualité de fonctionnaire et de fixer leur rétribution compte tenu des normes fixées dans la loi concernant le traitement et les diverses prestations allouées aux membres du personnel de l'Etat et des établissements hospitaliers, du 21 décembre 1973 (ci-après loi sur les traitements).

2 Le conseil d'administration peut déléguer à la direction générale de l'établissement la compétence de procéder à l'engagement de membres du personnel n'ayant pas la qualité de fonctionnaire et de fixer leur rétribution compte tenu des normes énoncées dans la loi sur les traitements.

3 Le Conseil d'Etat peut déléguer à l'office du personnel, agissant d'entente avec un département, ou aux services administratifs et financiers du département de l'instruction publique, la compétence de prendre toute décision, conformément à la loi, ayant fait l'objet d'un accord préalable avec le fonctionnaire.

4 Le conseil d'administration peut déléguer à la direction générale de l'établissement la compétence de prendre toute décision, conformément à la loi, ayant fait l'objet d'un accord préalable avec le fonctionnaire.

5 L'engagement d'agents spécialisés est réservé au Conseil d'Etat ou au conseil d'administration.

Art. 12

1 L'affectation d'un membre du personnel dépend des besoins de l'administration ou de l'établissement et peut être modifiée en tout temps.

2 Un changement d'affectation ne peut entraîner de diminution de salaire.

3 Sont réservés les cas individuels de changements d'affectation à caractère exceptionnel.

Art. 13

Chaque membre du personnel n'ayant pas le statut de fonctionnaire fait l'objet d'une appréciation qui porte notamment sur:

a) les capacités du titulaire et la qualité du travail effectué,

b) le maintien et le développement des compétences du titulaire,

c) les objectifs à atteindre et les dispositions à prendre pour la période à venir.

Art. 14

Aux fins d'améliorer le bon fonctionnement des services et la qualité des prestations, il est mis en place un processus d'évaluation prévoyant des entretiens individuels et de service.

Art. 15

1 Les membres du personnel occupant une fonction permanente et qui sont au bénéfice d'un engagement de durée indéterminée doivent avoir leur domicile et leur résidence effective dans le canton de Genève.

2 A la condition que l'éloignement de leur domicile ne porte pas préjudice à l'accomplissement de leurs devoirs de service, le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut accorder aux fonctionnaires des dérogations pour tenir compte de la propriété d'immeubles antérieure à l'engagement, de contraintes familiales graves, de la nationalité, du taux d'activité réduit ou de la fin prochaine des rapports de fonction d'un membre du personnel.

3 Le Conseil d'Etat peut déléguer cette compétence à l'office du personnel, agissant d'entente avec un département, ou aux services administratifs et financiers du département de l'instruction publique dans le cas de membres du personnel qui ne sont pas fonctionnaires.

4 Le conseil d'administration peut déléguer cette compétence à la direction générale de l'établissement dans le cas de membres du personnel qui ne sont pas fonctionnaires.

5 Sont réservés les cas des fonctionnaires exerçant leur activité dans un établissement situé hors du canton.

TITRE III

Sanctions disciplinaires et fin des rapports de service

CHAPITRE I

Sanctions disciplinaires

Art. 16

1 Les fonctionnaires et les employés qui enfreignent leurs devoirs de service, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, peuvent faire l'objet, selon la gravité de la violation, des sanctions suivantes:

a) prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef de service; au sein de l'établissement, par le supérieur hiérarchique:

1° l'avertissement;

2° le blâme;

b) prononcées, au sein de l'administration cantonale, par le chef du département ou le chancelier d'Etat d'entente avec l'office du personnel ou les services administratifs et financiers du département de l'instruction publique; au sein de l'établissement, par le directeur général:

3° la suspension d'augmentation de traitement pendant une durée déterminée;

4° la réduction du traitement à l'intérieur de la classe;

c) prononcées, à l'encontre d'un fonctionnaire, au sein de l'administration cantonale, par le Conseil d'Etat; au sein de l'établissement par le conseil d'administration:

5° le retour au statut d'employé en période probatoire pour une durée maximale de 3 ans.

2 Demeurent réservées les dispositions sur la résiliation des rapports de service pour un motif objectivement fondé.

CHAPITRE II

Fin des rapports de service

SECTION 1

Généralités

Art. 17

1 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration est l'autorité compétente pour prononcer la fin des rapports de service.

2 Le Conseil d'Etat peut déléguer cette compétence à l'office du personnel, agissant d'entente avec un département, ou aux services administratifs et financiers du département de l'instruction publique, pour toutes les catégories de membres du personnel n'ayant pas qualité de fonctionnaire.

3 Le conseil d'administration peut déléguer cette compétence à la direction générale de l'établissement pour toutes les catégories de membres du personnel n'ayant pas qualité de fonctionnaire.

Art. 18

1 Une femme enceinte ne peut pas être licenciée pendant la grossesse et au cours des 16 semaines qui suivent l'accouchement, période portée à 20 semaines en cas d'allaitement.

2 Les cas de licenciement avec effet immédiat sont réservés.

Art. 19

Nul ne peut être licencié pour activité syndicale.

Art. 20

1 Pendant le temps d'essai, d'une durée de 3 mois au plus, le délai de résiliation est de 15 jours pour la fin d'une semaine.

2 Après le temps d'essai et pendant la lre année d'activité, le délai de résiliation est d'un mois pour la fin d'un mois.

3 Lorsque les rapports de service ont duré plus d'une année, le délai de résiliation est de 3 mois pour la fin d'un mois.

4 Les cas de résiliation des rapports de service avec effet immédiat sont réservés.

SECTION 2

Fonctionnaires et employés

Art. 21

1 Pendant le temps d'essai et la période probatoire, chacune des parties peut mettre fin aux rapports de service en respectant le délai de résiliation; l'employé est entendu par l'autorité compétente; il peut demander que le motif de la résiliation lui soit communiqué.

2 Après la période probatoire:

a) le fonctionnaire peut mettre fin aux rapports de service en respectant le délai de résiliation;

b) le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut, pour un motif objectivement fondé, mettre fin aux rapports de service du fonctionnaire en respectant le délai de résiliation.

Art. 22

Est considéré comme objectivement fondé tout motif dûment constaté démontrant que la poursuite des rapports de service est rendue difficile en raison soit:

a) de l'insuffisance des prestations;

b) du manquement grave ou répété aux devoirs de service;

c) de l'inaptitude à remplir les exigences du poste.

Art. 23

1 Lorsque, pour des motifs d'organisation du service, un poste occupé par un membre du personnel régulier est supprimé, le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut résilier les rapports de service.

2 Le délai de résiliation est de 4 mois pour la fin d'un mois.

3 Un telle résiliation ne peut intervenir que s'il se révèle impossible de confier au membre du personnel régulier un autre poste correspondant à ses capacités.

4 Au sein de l'administration, l'office du personnel ou les services administratifs et financiers du département de l'instruction public, au sein de l'établissement la direction générale, entend préalablement le membre du personnel régulier.

5 En cas de résiliation des rapports de service, seul le fonctionnaire reçoit une indemnité égale à 6 fois son dernier traitement mensuel de base, plus 0,2 fois son dernier traitement mensuel de base par année passée au service de l'Etat ou de l'établissement, une année entamée comptant comme une année entière. Le nombre de mois d'indemnités versées ne peut excéder le nombre de mois restant à courir jusqu'à l'âge légal de retraite du fonctionnaire.

6 Aucune indemnité n'est due en cas de transfert du fonctionnaire dans une corporation publique genevoise, un établissement public genevois ou dans une fondation de droit public genevoise.

SECTION 3

Autres membres du personnel

Art. 24

1 Les rapports de service prennent fin à l'échéance du contrat conclu pour une durée déterminée.

2 Lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chacune des parties peut mettre fin aux rapports de service en respectant le délai de congé. L'intéressé est entendu par l'autorité compétente; il peut demander que le motif de la résiliation lui soit communiqué.

SECTION 4

Retraite et invalidité

Art. 25

1 Le membre du personnel prend d'office sa retraite à la fin du mois au cours duquel il atteint sa 65e année.

2 Le contrat conclu pour une durée indéterminée prend fin automatiquement .

Art. 26

1 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut mettre fin aux rapports de service lorsqu'un fonctionnaire n'est plus en mesure, pour des raisons de santé ou d'invalidité, de remplir les devoirs de sa fonction.

2 Il ne peut être mis fin aux rapports de service que s'il s'est avéré impossible de reclasser l'intéressé dans l'administration ou dans l'établissement.

3 L'incapacité de remplir les devoirs de service, à moins qu'elle ne soit reconnue d'un commun accord par le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration, la caisse de prévoyance et l'intéressé, doit être constatée à la suite d'un examen médical approfondi pratiqué par le médecin-conseil de l'Etat ou de l'établissement en collaboration avec le médecin de la caisse de prévoyance et le ou les médecins traitants.

CHAPITRE III

Disposition de procédure et contentieux

SECTION 1

Procédure pour sanctions disciplinaireset résiliation des rapports de service

Art. 27

1 Les dispositions de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, sont applicables, en particulier celles relatives à l'établissement des faits (art. 18 et suivants).

2 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut en tout temps ordonner l'ouverture d'une enquête administrative qu'il confie à un ou plusieurs magistrats ou fonctionnaires, en fonction ou retraités. Il doit le faire dans les hypothèses visées aux articles 16, alinéa 1, lettre c (retour au statut d'employé en période probatoire), 21, alinéa 2, lettre b, et 22 (résiliation pour un motif objectivement fondé).

3 L'intéressé est informé de l'enquête dès son ouverture et il peut se faire assister d'un conseil de son choix.

4 L'enquête doit, en principe, être menée à terme dans un délai de 30 jours dès son ouverture. En règle générale, il n'est procédé qu'à une seule audience au cours de laquelle les parties, ainsi que d'éventuels témoins, sont entendus.

5 Une fois l'enquête achevée, l'intéressé peut s'exprimer par écrit dans les 30 jours qui suivent la communication du rapport.

6 Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration statue à bref délai.

Art. 28

1 Dans l'attente du résultat d'une enquête administrative ou d'une information pénale, le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut, de son propre chef ou à la demande de l'intéressé, suspendre provisoirement le membre du personnel auquel il est reproché une faute de nature à compromettre la confiance ou l'autorité qu'implique l'exercice de sa fonction. Au sein de l'établissements, le président du conseil d'administration peut procéder, à titre provisionnel et sans délai, à la suspension de l'intéressé.

2 Cette décision est notifiée par lettre motivée.

3 La suspension provisoire peut entraîner la suppression de toute prestation à la charge de l'Etat ou de l'établissement.

4 A l'issue de l'enquête administrative, il est veillé à ce que l'intéressé ne subisse aucun préjudice réel autre que celui qui découle de la décision finale. Une décision de résiliation des rapports de service avec effet immédiat peut cependant agir rétroactivement au jour de l'ouverture de l'enquête administrative.

Art. 29

1 Lorsque les faits reprochés à un membre du personnel relèvent également d'une autre autorité disciplinaire administrative, celle-ci est saisie préalablement.

2 Lorsque les faits reprochés à un membre du personnel peuvent faire l'objet d'une sanction civile ou pénale, l'autorité disciplinaire administrative applique, dans les meilleurs délais, les dispositions des articles 16, 21 et 27, sans préjudice de la décision de l'autorité judiciaire civile ou pénale saisie.

SECTION

Contentieux

Art. 30

1 Le membre du personnel régulier qui fait l'objet d'un avertissement ou d'un blâme peut porter l'affaire dans un délai de l0 jours devant le chef du département ou le directeur général de l'établissement.

2 Il peut recourir au Tribunal administratif dans les autres cas de sanctions disciplinaires.

Art. 31

1 Peut recourir au Tribunal administratif pour violation de la loi tout membre du personnel dont les rapports de service ont été résiliés.

2 Si le tribunal retient que la résiliation des rapports de service est contraire au droit, il peut proposer à l'autorité compétente la réintégration.

3 En cas de décision négative de l'autorité compétente concernant un fonctionnaire, le tribunal fixe une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à 1 mois et supérieur à 24 mois du dernier traitement brut à l'exclusion de tout autre élément de rémunération.

Art. 32

1 Le recours au Tribunal administratif contre une sanction disciplinaire doit être exercé par une requête écrite, motivée sommairement et accompagnée des pièces justificatives pertinentes.

2 Un échange d'écriture n'est autorisé qu'exceptionnellement.

3 Le tribunal ordonne d'entrée de cause et à bref délai la comparution personnelles des parties. Il peut ordonner préalablement la production de pièces.

4 Les parties font citer leurs témoins par le tribunal. Les enquêtes suivent immédiatement la comparution personnelle.

5 Le tribunal statue à bref délai.

6 Le recours au Tribunal administratif contre une décision de licenciement s'instruit dans les formes prévues par la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985.

7 Les dispositions de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, sont applicables pour le surplus

TITRE IV

Dispositions finales

Art 33

Le Conseil d'Etat prend, par voie de règlements, les dispositions d'exécution de la présente loi.

Art. 34

La loi générale relative au personnel de l'administra-tion cantonale et des établissements publics médicaux, du 15 octobre 1987, est abrogée.

Art 35

Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

Art. 36

1 Les membres du personnel qui ont été engagés avant le 1er juillet 1976 et qui exercent des fonctions manuelles au Département des travaux publics et de l'énergie ou au département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales, par suite du transfert des services rattachés à la direction de l'assainissement et des exploitations à ce département, prennent leur retraite à 62 ans.

2 Le Conseil d'Etat peut déléguer au département désigné à l'alinéa 1 la compétence d'autoriser ces membres du personnel à poursuivre, à leur demande, leur activité au-delà de l'âge de 62 ans mais pas au-delà de celui de 65 ans.

Art. 37

1 La loi sur la statistique cantonale, du 11 mars 1993, est modifiée comme suit:

Art. 18, al. 3 (nouvelle teneur)

3 Indépendamment de l'amende prévue à l'alinéa 1, tout membre du personnel qui a violé le secret statistique est passible des sanctions disciplinaires prévues dans la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 4 décembre 1997 et de son règlement d'application, du 7 décembre 1987. Demeurent réservées les peines prévues à l'article 320 du code pénal.

**MM*

2 La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:

Art. 75A, al. 2, lettre d (nouvelle teneur)

d) d'engager, d'entente avec le Conseil d'Etat et dans le cadre de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements médicaux, du 4 décembre 1997, le personnel des services centraux et des greffes;

Art. 113 (nouvelle teneur)

Les greffiers et le personnel du greffe sont soumis à la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 4 décembre 1997, et à son règlement d'application.

3 La loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mai 1970, est modifiée comme suit:

Art. 8, al. 1, 8o (nouvelle teneur)

8° décisions de licenciement de membres du personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux (B 5 0,5,art. 30 et 31);

4 La loi sur l'organisation et le personnel de la prison, du 21 juin 1984, est modifiée comme suit:

Art. 1, al. 2 (nouvelle teneur)

2 Les articles 6 à 32 ne sont pas applicables aux personnes soumises notamment à la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 4 décembre 1997, et à son règlement d'application.

PL 7532-A
17. Rapport de la commission fiscale chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur l'imposition dans le temps des personnes physiques (LITPP) (D 3 12). ( -) PL7532Rapport de M. Nicolas Brunschwig (L), commission fiscale
Mémorial 1996 : Projet, 6479. Renvoi en commission, 6603.
Rapport de Mme Vérène Nicollier (L), remplacée par M. Nicolas Brunschwig (L) commission fiscale

Le Conseil d'Etat a déposé le 30 septembre 1996 un projet dont l'objectif est d'adapter la législation fiscale genevoise relative aux personnes physiques à la loi fédérale d'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, du 14 décembre 1990.

Ce projet a été renvoyé le 8 novembre 1996 à la commission fiscale.

La commission fiscale, sous la présidence de Mme Christine Sayegh, a examiné ce projet de loi au cours des séances qu'elle a tenues entre les mois de janvier et de septembre 1997. Elle a été assistée par MM. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat, président du département des finances, et Pietro Sansonetti, directeur des affaires fiscales de l'Administration fiscale cantonale, ainsi que, lors des dernières auditions, par Mme Diane Demierre, avocate-stagiaire auprès de la direction des affaires fiscales de l'Administration fiscale cantonale.

La commission a procédé à l'audition de divers représentants des milieux économiques et sociaux. Pour partie, ces auditions ont porté également sur d'autres objets pendant devant la commission fiscale. La première lecture du projet de loi sur l'imposition des personnes physiques a, quant à elle, débuté le 22 avril 1997 pour s'achever le 19 août 1997.

Au cours de sa séance du 26 août 1996, tant Mme Christine Sayegh que M. Olivier Vodoz ont suggéré à la commission de traiter en priorité les dispositions du projet de loi relatives à l'imposition dans le temps (en résumé, le passage au système annuel postnumerando). Le principe de cet examen fractionné du projet de loi sur l'imposition des personnes physiques a été approuvé à l'unanimité par la commission lors de sa séance du 2 septembre 1997. Une deuxième lecture des dispositions relatives à l'imposition dans le temps, regroupées sous la forme d'une loi autonome, a eu lieu lors de cette séance ainsi que lors de celle du 9 septembre 1997. La commission a adopté le projet de loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques, le 9 septembre 1997. Il fait l'objet du présent rapport.

Préambule

Sans vouloir procéder à des redites, mentionnées dans l'exposé des motifs du projet de loi sur l'imposition des personnes physiques (Mémorial 1996, page 6479) on rappellera toutefois qu'il fait partie du programme de modernisation du droit fiscal genevois et de son adaptation à la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (ci-après: LHID), du 14 décembre 1990, entrée en vigueur le 1er janvier 1993, et de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (ci-après: LIFD), du 14 décembre 1990 également, entrée en vigueur le 1er janvier 1995.

Il s'agit de la deuxième étape de la refonte du droit fiscal genevois, qui fait suite à l'adoption, le 23 septembre 1994, de la loi genevoise sur l'imposition des personnes morales (ci-après: LIPM - D 3 15) et de la loi sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales (ci-après: LIS - D 3 20).

Ces travaux de refonte se poursuivront ensuite par l'adaptation des règles relatives aux impôts immobiliers ainsi qu'à une adaptation des dispositions procédurales, relatives notamment à la taxation, figurant actuellement dans la loi générale sur les contributions publiques de 1887 (ci-après: LCP - D 3 05).

A terme, l'ensemble de ces nouvelles lois, auxquelles devraient se joindre les futures lois sur les droits de succession et de donation, d'une part, sur les droits de vente, d'enregistrement et de timbre, d'autre part, seront regroupées dans un code fiscal genevois.

Pour revenir à la LHID, rappelons que le but de cette dernière est de tendre vers une harmonisation horizontale des diverses législations fiscales cantonales de notre pays. Cette loi-cadre impose dès lors aux cantons d'adapter leur législation fiscale aux règles qu'elle énonce, d'ici au 31 décembre 2000, dans les domaines suivants:

a) impôts sur le revenu et sur la fortune des personnes physiques;

b) impôts sur le bénéfice et le capital des personnes morales;

c) impôt à la source;

d) impôt sur les gains immobiliers.

En cas d'omission, partielle ou complète, par les cantons d'adapter leur législation dans le délai imparti à l'article 72, alinéa 1, LHID, le droit fédéral deviendrait alors directement applicable en lieu et place des dispositions cantonales divergentes.

La LHID et la LIFD ne laissent désormais aux cantons plus guère le choix qu'entre deux systèmes d'imposition dans le temps pour les personnes physiques, à savoir: le système dit bisannuel praenumerando et le système annuel postnumerando.

Genève pratiquant l'imposition annuelle selon - il est vrai - le système praenumerando, il ne saurait être question de revenir à un système bisannuel. Seule reste ouverte, dès lors, la question impliquant le passage au système postnumerando. Pour des raisons pratiques évidentes, un tel changement de système doit se faire également - et simultanément - en matière d'impôt fédéral direct.

Il s'agit de la mise en oeuvre du principe de l'harmonisation verticale entre la législation fiscale fédérale et cantonale.

On rappellera à cet égard que l'impôt fédéral direct étant perçu actuellement sur une base bisannuelle (praenumerando) et la première année de la période fiscale étant une année impaire, un changement en faveur d'un système annuel postnumerando ne peut intervenir qu'au début d'une année impaire également.

Les raisons d'un traitement fractionné

Le nombre de questions complexes soulevées lors de la première lecture du projet de loi 7532 relatives notamment à la problématique de l'imposition de la famille, aux déductions sociales et à la valeur locative, le temps que prendraient encore la deuxième lecture et le vote de l'ensemble des dispositions (une bonne soixantaine) rendaient difficile, voire impossible, une adoption de la loi au cours de la présente législature encore. Ce sont ces raisons qui ont incité la commission à décider d'un traitement fractionné.

Constatant que les dispositions relatives à l'imposition dans le temps, regroupées dans un chapitre distinct et homogène du projet de loi, ne soulevaient pas de questions de principe et que leur mise en oeuvre pourrait intervenir de manière autonome par rapport au reste des nouvelles normes relatives à la fiscalité des personnes physiques, décision a été prise d'adopter d'ores et déjà les articles 61 à 67 du projet de loi examiné par la commission. Le contenu des articles en question a dès lors été inséré dans une fraction du projet de loi initial, qui a été intitulé «loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques» (en abrégé, LITPP).

La question de l'imposition dans le temps

Etant donné l'importance que revêt une bonne compréhension des principes de base régissant l'imposition dans le temps, on se permettra de reprendre ci-après la teneur du chiffre III de l'exposé des motifs du projet de loi sur l'imposition des personnes physiques.

L'harmonisation de l'imposition dans le temps est l'un des mandats confiés à la Confédération. Sa réalisation a connu des fortunes diverses. Elle mérite un exposé préalable car elle constitue un élément essentiel de l'adaptation de la législation fiscale genevoise à la LHID, tant pour ce qui concerne l'impôt sur le revenu des personnes physiques que l'impôt sur le bénéfice et le capital des personnes morales.

A. Les notions de période fiscale, de période de taxation et de périodede calcul

L'impôt sur le revenu et la fortune des personnes physiques, de même que l'impôt sur le bénéfice et le capital des personnes morales, est perçu périodiquement, c'est-à-dire à intervalles réguliers.

La période pour laquelle l'impôt est dû est appelée période fiscale. N'est redevable des impôts afférents à une période fiscale donnée que celui qui remplit les conditions d'assujettissement pendant cette même période (exemple: celui qui est domicilié dans le canton en 1997 doit y payer les impôts sur le revenu et la fortune pour cette même année). La période fiscale peut couvrir une, voire deux années.

Pour les impôts genevois sur le revenu des personnes physiques perçus actuellement selon les dispositions de la LCP, la période fiscale correspond à l'année civile.

En matière d'impôt fédéral direct sur le revenu des personnes physiques, la période fiscale est actuellement de deux ans. Il est prévu d'adopter le système de la période fiscale annuelle, comme la LIFD en laisse la faculté aux cantons.

La notion de période de calcul définit le laps de temps au cours duquel se forme le revenu déterminant pour le calcul de l'impôt. En d'autres termes, la période de calcul est celle dont le revenu sert d'assiette à l'impôt. Elle est d'une année ou de deux ans.

La période de taxation est celle pendant laquelle l'autorité fiscale procède aux opérations administratives nécessaires à la détermination des éléments imposables et au calcul de la créance d'impôt. Il s'agit là d'une notion administrative.

Les législations fiscales de notre pays utilisent, pour déterminer les rapports entre période de taxation, période de calcul et période fiscale deux méthodes:

1. Le système praenumerando se caractérise par le fait que l'impôt est fixé avant la fin de la période fiscale, quelle soit annuelle (impôts genevois sur le revenu) ou bisannuelle (impôt fédéral direct, actuellement). Dans un tel système, le calcul de l'impôt s'effectue sur la base des données de l'année (ou des deux années dans un système bisannuel) précédente(s).

 Cette méthode part de la fiction que le revenu imposable réalisé durant la période de calcul préalable à la période fiscale correspond à celui qui sera réalisé durant la période fiscale. L'inexactitude économique inhérente à un tel système est corrigée au fur et à mesure, aussi longtemps que le contribuable reste assujetti aux impôts d'une même entité fiscale (même canton par exemple) et sur des bases semblables (revenu d'activité lucrative par exemple). Autrement dit, les modifications qui peuvent intervenir dans les revenus du contribuable entre la période de calcul et la période de taxation seront corrigées au cours de la période de taxation suivante.

 Ce n'est que dans certains cas exceptionnels, prévus dans la loi, que l'impôt se fonde totalement ou partiellement sur le revenu réalisé durant la période fiscale (calcul dit selon le revenu acquis), notamment au début de l'assujettissement ou lors de modifications du revenu lors de circonstances déterminées (cessation d'activité lucrative, chômage de longue durée par exemple). En d'autres termes, on s'écarte du système praenumerando lorsque l'application de la fiction de l'égalité, ou de la continuité, des éléments imposables ne saurait manifestement pas être invoquée, en raison des changements «structurels» intervenus dans la situation du contribuable.

 Les exemples suivants illustrent la méthode praenumerando:

a) système annuel, l'impôt dû pour la période fiscale 1997 se détermine, pour une période de taxation de même durée, sur la base d'une déclaration d'impôt déposée la même année, qui mentionne le revenu imposable réalisé en 1996 (période de calcul). Il s'agit du système actuellement en vigueur à Genève.

 1996 1997

---------------------------------------|----------------------------------------

 période de calcul période fiscale =

  période de taxation

b) système bisannuel, la première année étant une année impaire; l'impôt dû pour la période fiscale 1997/1998 se détermine, pour une période de taxation de même durée, sur la base du revenu moyen réalisé durant la période de calcul, soit les deux années précédentes, 1995/1996. La déclaration d'impôt est déposée en 1997. Il s'agit du système de l'impôt fédéral direct actuellement en vigueur.

 1995/1996 1997/1998

---------------------------------------|---------------------------------------

 période de calcul période fiscale =

      période de taxation

2. Dans l'autre méthode, appelée système postnumerando, l'impôt est calculé après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte. La période fiscale et la période de calcul se confondent et n'excèdent pas, en général, une année. L'impôt sera donc calculé après la fin de l'année fiscale sur la base du revenu ou du bénéfice effectivement réalisé pendant la période de calcul (année civile ou période comptable). On parle également, à propos de l'imposition selon le système postnumerando du calcul selon le revenu acquis.

 L'exemple suivant illustre la méthode postnumerando:

 L'impôt dû pour la période fiscale 1999 est calculé sur la base du revenu réalisé en 1999. Ce dernier ne pouvant pas être connu de manière exacte avant la fin de l'année 1999, la procédure de taxation ne peut être initiée qu'en 2000, soit après la fin de la période fiscale. Ce système appliqué depuis de nombreuses années par le demi-canton de Bâle-Ville, ainsi que, à compter de 1999, par le canton de Zurich notamment, prévaut dans la plupart des pays étrangers.

 1999 2000

-----------------------------------------|------------------------------------------

 période fiscale = période de taxation

  période de calcul

Il convient de relever que la distinction entre système prae- et postnumerando ne concerne pas directement l'impôt sur la fortune et le capital.

En effet, ces derniers éléments sont évalués à une date fixe, et non pendant une période donnée. En règle générale, on choisit la date la plus proche de la taxation, afin de serrer au plus près la réalité économique du contribuable. Dans le système praenumerando, on choisira donc le 1er janvier de la période fiscale ou de taxation (ces deux périodes se recoupant, comme on l'a vu plus haut), alors que, dans le système postnumerando, on retiendra le dernier jour de la période fiscale ou de calcul (même remarque que ci-dessus concernant l'identité entre les deux notions, in casu).

B. Les solutions imposées par la LHID et la LIFD

Comme exposé plus haut, les impôts genevois sur le revenu des personnes physiques sont perçus actuellement selon le système praenumerando annuel. L'impôt fédéral direct sur le revenu des personnes physiques est prélevé, quant à lui, selon le système praenumerando bisannuel, chaque période fiscale (ainsi que chaque période de calcul précédente) commençant par une année impaire.

A l'origine, la solution prévue dans les projets de LHID et de LIFD élaborés par le Conseil fédéral consistait à imposer, aussi bien pour les impôts cantonaux et communaux sur le revenu et le bénéfice que pour l'impôt fédéral direct portant sur les mêmes objets, le système annuel postnumerando.

Les propositions du Conseil fédéral concernant l'imposition dans le temps n'ont pas été retenues telles quelles, la solution finalement adoptée par le législateur étant un compromis. Ainsi, la LHID (tout comme la LIFD) dispose de ce qui suit:

- Pour les personnes physiques, les impôts sur le revenu et la fortune sont fixés - au choix des cantons - soit selon le système praenumerando bisannuel (art. 15, al. 2, LHID) soit selon le système postnumerando annuel (art. 16 LHID). La période fiscale correspond à l'année (aux années) civile(s) pertinente(s). La période de calcul correspond soit à l'année (aux années) civile(s) pour les contribuables sans activité lucrative ou exerçant une activité lucrative dépendante (salariée), soit au(x) exercice(s) comptable(s) pertinent(s) pour les contribuables exerçant une activité lucrative indépendante (art. 15, al. 2, et art. 64, al. 2, LHID).

- Les cantons ont un délai échéant le 31 décembre de l'an 2000 pour adapter leur législation à la réglementation prévue par la LHID (art. 72, LHID). A l'expiration de ce délai, il est prévu à l'article 70 LHID que le Conseil fédéral fasse rapport aux Chambres fédérales de l'état de la situation dans les divers cantons en matière d'imposition des personnes physiques en vue de proposer une uniformisation.

C. Adaptation de la législation cantonale - principes et calendrier

Il a été vu que la LHID ne prévoit pas le mode d'imposition dans le temps actuellement en vigueur pour les impôts genevois sur le revenu des personnes physiques et le bénéfice des personnes morales, à savoir le système praenumerando annuel. Par conséquent, la législation genevoise devra prévoir, d'ici le 1er janvier 2001 au plus tard:

- pour les impôts sur le revenu des personnes physiques, soit le système praenumerando bisannuel, soit le système postnumerando annuel;

- pour les impôts sur le bénéfice des personnes morales, le système postnumerando annuel (la période fiscale étant calquée sur l'exercice commercial), ce qui est le cas depuis le 1er janvier 1995 (article 37 de la loi sur l'imposition des personnes morales - LIPM - du 23 septembre 1994).

Compte tenu, d'une part, de la longue tradition d'imposition annuelle, solidement ancrée dans les habitudes genevoises et qui permet d'obtenir des recettes fiscales davantage en rapport avec l'évolution effective des revenus et des bénéfices et, d'autre part, du caractère plus moderne d'un système d'imposition annuel basé sur la méthode du revenu acquis (et non plus présumé), la commission est d'avis qu'il y a lieu d'adopter le système postnumerando annuel.

Commentaire par article du projet de loi 7532 (LITPP)

Article 1

Période fiscale

Référence à d'autres textes légaux: Projet de LIPP: art. 61, al. 1 et 2

 LHID: art. 63

 LIFD: art. 209

 LCP: art. 1 et 17, al. 1

  (a contrario)

Par rapport au projet de loi initial, cet article ne contient plus que les deux premiers alinéas, les deux derniers alinéas (3 et 4) ayant été rattachés à l'article 2, qui traite de la période de calcul en matière d'imposition du revenu, dont ils sont devenus les alinéas 4 et 5.

Article 2

Alinéas 1, 2, 4 et 5: Imposition du revenu, période de calcul

Alinéa 3: Obligations du contribuable exerçant une activité lucrative indépendante

Référence à d'autres textes légaux: Projet de LIPP: art. 62, 63 et 61, al. 3 et 4

 LHID: art. 64

 LIFD: art. 210

 LCP: art. 17

Par rapport au projet de loi initial, cet article s'est vu attribuer l'ancien article 63, devenu l'alinéa 3, de même que les alinéas 3 et 4 de l'ancien article 61, devenus, eux, les alinéas 4 et 5.

Les alinéas 4 et 5 appellent deux précisions :

La première concerne la distinction entre la notion de revenus à caractère périodique de ceux qui sont à caractère non périodique.

A cet égard, on citera la Circulaire n° 7 du 26 avril 1993 de l'administration fédérale des contributions sur le calcul dans le temps de l'impôt fédéral direct dû par les personnes physiques qui indique (page 3) que «comme il est important pour la détermination du taux de distinguer les revenus à caractère périodique des revenus à caractère non périodique, il faut partir du principe que les revenus à caractère périodique sont des revenus acquis à intervalles réguliers au cours de toute la période fiscale; figurent parmi ces revenus, les revenus provenant d'une activité à but lucratif et les revenus acquis en compensation du produit de cette activité, ainsi que les rentes de tout genre, à condition qu'ils soient acquis plusieurs fois au cours d'une année civile, c'est-à-dire à intervalles réguliers (mensuellement, trimestriellement ou semestriellement).

Entre également dans la catégorie de revenus, tout revenu provenant de la location ou de l'usage personnel d'un immeuble. En revanche, les revenus obtenus une seule fois au cours de la durée de l'assujettissement ou à titre de prestation unique s'apparentent à des revenus à caractère non périodique.

Font partie de ces revenus, les versements de capitaux remplaçant des prestations périodiques (par exemple les indemnités obtenues lors de la cessation d'une activité ou de la renonciation à l'exercice de celle-ci ou à l'exercice d'un droit), ainsi que les intérêts annuels d'avoirs et les dividendes. Cette énumération n'est toutefois pas exhaustive.»

La deuxième précision concerne l'application de l'alinéa 5, qui traite de la prise en compte des déductions en cas d'assujettissement partiel, compte tenu de la distinction qu'il convient d'opérer entre les revenus à caractère périodique et ceux qui sont à caractère non périodique. A cet égard, il paraît judicieux de recourir à un exemple:

Etat de fait (hypothèses):

Le contribuable débute son assujettissement le 1er avril. Il gagne 15 000 F par mois pendant trois mois et demi (soit 52 500 F au total); il est licencié le 15 juin. Il reçoit à ce titre une indemnité de licenciement qui s'élève à 100 000 F brut. Les retenues sociales relatives à ce dernier versement sont de 12 000 F (AVS, LPP).

Le contribuable quitte Genève le 30 juin de la même année (cessation d'assujettissement).

Pour le surplus, le contribuable a droit à des déductions sociales (déductions personnelles, charge de famille, montant arrondi pour simplifier) de 15 000 F par année et à d'autres déductions (intérêts de dettes, primes d'assurance-maladie, par exemple) s'élevant à 10 000 F pour les 4 mois pendant lesquels il a été assujetti.

Conséquences fiscales:

L'imposition aura lieu de la manière suivante:

Revenus périodiques:

revenus bruts

./. déductions sociales

./. autres déductions

Revenus

non périodiques:

indemn. de licenciement

./. retenues sociales

(déduction liée au revenu non périodique)

Revenu imposable

52 500

(5 000)

(10 000)

____________

37 500

100 000

(12 000)

____________

88 000

Revenu déterminantpour le taux

180 000

(15 000)

(30 000)

____________

135 000

100 000

(12 000)

____________

88 000

Article 3

Imposition de la fortune, période de calcul

Référence à d'autres textes légaux: Projet de LIPP: art. 66

 LHID: art. 66

 LIFD: -

 LCP: art. 45

Cet article a été adopté sans changement par rapport au projet de loi initial (hormis un ajout à sa note marginale et, bien sûr, sa numérotation).

Alinéa 3

La mention «Les contribuables qui exercent une activité lucrative indépendante doivent procéder à la clôture de leurs comptes chaque période fiscale (...)» qui figurait dans le projet de loi initial, a été modifiée comme suit lors de la séance du 9 septembre 1997: «Les contribuables qui exercent une activité lucrative indépendante doivent clôturer leurs comptes à chaque période fiscale (...)».

Article 4

Déductions sociales et barèmes

Référence à d'autres textes légaux: Projet de LIPP: art. 64

 LHID: -

 LIFD: art. 213, al. 3

 LCP: -

Cet article a été adopté sans changement par rapport au projet de loi initial (hormis, bien sûr, sa numérotation).

Article 5

Epoux, enfants sous autorité parentale

Référence à d'autres textes légaux: Projet de LIPP: art. 65

 LHID: -

 LIFD: -

 LCP: -

Cet article a été adopté sans changement par rapport au projet de loi initial (hormis, bien sûr, sa numérotation).

Article 6

Période transitoire

Référence à d'autres textes légaux: Projet de LIPP: art. 67

 LHID: art. 69

 LIFD: art. 218

 LCP: -

Cet article a été adopté sans changement par rapport au projet de loi initial (hormis un ajout à sa note marginale et, bien sûr, sa numérotation).

Pour une illustration graphique du mécanisme d'imposition selon la différence (double taxation) durant la période transitoire, un schéma explicatif, qui a été remis aux commissaires en annexe du procès-verbal du 2 septembre 1997, se trouve à la page 21 du présent rapport.

La commission a évoqué la possibilité d'instaurer une double taxation pour l'impôt sur la fortune. Cela impliquerait la suppression de l'alinéa 4 (qui prévoit l'imposition de la fortune uniquement d'après le nouveau droit) et la mention, dans l'alinéa 1, de «... l'impôt sur le revenu et sur la fortune des personnes physiques...».

L'amendement proposé à ce sujet par certains commissaires n'a pas été retenu à l'issue du vote dont il a fait l'objet.

On mentionnera à cet égard que la solution de l'imposition de la fortune selon le nouveau droit uniquement durant la période transitoire (soit la solution prévue dans la LITPP) a été retenue dans la loi révisée du 8 juin 1997 du canton de Zurich.

A noter que le principe de la double taxation de la fortune n'est susceptible de présenter une charge fiscale supplémentaire pour le contribuable que dans le cas d'une baisse de la fortune imposable entre le 31 décembre de l'année précédant l'année pour laquelle l'impôt est dû (n-1) et l'année pour laquelle l'impôt est dû (n), par exemple dans le cadre d'une baisse des valeurs cotées en bourse.

Alinéa 2

Certains commissaires ont souhaité insérer la notion générique de «versements en capital» en lieu et place, voire en complément, de celle d'«indemnités». Cette proposition a toutefois été rejetée par la majorité des commissaires.

Article 7

Entrée en vigueur

Alinéa 1

Comme on l'a vu ci-dessus, l'introduction de l'imposition selon le système postnumerando annuel ne peut intervenir, pour des raisons de coordination avec le changement de méthode en matière d'impôt fédéral direct (voir art. 41 et 208 à 220 LIFD ainsi que l'ordonnance du Conseil sur le calcul dans le temps de l'impôt fédéral direct dû par les personnes physiques, du 16 septembre 1993 - RS CH 642.117.1) que lors d'une année impaire. On rappellera en effet que la période fiscale bisannuelle en matière d'impôt fédéral direct commence par une année impaire et se termine par une année paire (art. 40, al. 2, LIFD) et que le changement de système ne peut dès lors intervenir, sur décision du canton concerné, qu'après la fin d'une telle période fiscale bisannuelle.

La LITPP ne peut, dès lors, entrer en vigueur qu'en 1999 au plus tôt, ce qui correspond à la planification initiale du département des finances, approuvée par le Conseil d'Etat.

Alinéa 2

Il est toutefois proposé - et la commission a été unanime à ce sujet - de déléguer au Conseil d'Etat la faculté de repousser la date d'entrée en vigueur de la loi à l'échéance utile suivante (c'est-à-dire de deux ans), à savoir au 1er janvier 2001 (date à laquelle la LHID deviendra contraignante pour les cantons) si les contraintes techniques liées au changement de système le commandent.

En l'état, il n'est pas du tout exclu qu'il faille envisager de faire usage de cette possibilité, ne serait-ce qu'en raison des travaux de grande refonte du système d'information et des processus administratifs et de travail qui y sont associés auquel il s'agira de procéder dans un proche avenir au sein de l'Administration fiscale cantonale. Le cas échéant, une telle mesure devrait être envisagée au cours du premier semestre de l'année 1998. Elle interviendra sous forme d'arrêté du Conseil d'Etat, lequel sera, bien sûr, publié et inséré dans le recueil systématique de la législation genevoise.

La commission dans son ensemble estime que la solution de la LITPP offre l'avantage de régler immédiatement la question de principe du passage au système annuel postnumerando, tout en laissant la flexibilité nécessaire pour préparer une entrée en vigueur dans les meilleures conditions possibles, tant pour les contribuables que pour les autorités.

Article 8

Modification à une autre loi (D 3 05)

Cette disposition est rendue nécessaire par le fait que, si par impossible le reste de la loi sur l'imposition des personnes physiques ne devait pas être adopté avant l'entrée en vigueur de la LITPP, le système annuel postnumerando s'appliquerait à l'ensemble des dispositions actuelles de la loi générale sur les contributions publiques (impôt sur le revenu et la fortune des personnes physiques, impôt immobilier complémentaire).

Il convient de préciser que ces modifications de forme ne préjugent en rien de l'examen quant au fond du contenu de ces dispositions dans la mesure où la matière est traitée également dans le cadre des dispositions restantes de la loi sur l'imposition des personnes physiques.

Conclusion et vote de la commission

La commission fiscale aborde, dès sa prochaine séance, en deuxième lecture, les dispositions de fond de la loi sur l'imposition des personnes physiques: assujettissement à l'impôt, assiette fiscale, imposition de la famille, questions d'ordre social, impôt sur la fortune, en particulier. Les diverses questions soulevées lors de la première lecture seront reprises.

Au vu des analyses et considérations contenues dans ce rapport, la commission est convaincue de la nécessité de passer du système praenumerando au système postnumerando et que le traitement fractionné du projet de loi 7532 permet ce passage à bref délai.

Le projet de loi 7532, tel qu'amendé, est aprouvé à la majorité par la commission qui vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à faire de même.

(PL 7532)

PROJET DE LOI

sur l'imposition dans le temps des personnes physiques (LITPP)

(D 3 12)

LE GRAND CONSEIL,

vu les articles 16, 62 à 69 de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, du 14 décembre 1990,

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Les impôts sur le revenu et la fortune des personnes physiques sont fixés et prélevés pour chaque période fiscale.

2 La période fiscale correspond à l'année civile.

Art. 2

1 Le revenu imposable se détermine d'après les revenus acquis pendant la période fiscale.

2 Le produit de l'activité lucrative indépendante se détermine d'après le résultat des exercices commerciaux clos pendant la période fiscale.

3 Les contribuables qui exercent une activité lucrative indépendante doivent clôturer leurs comptes à chaque période fiscale, ainsi qu'à la fin de l'assujettissement. La clôture des comptes n'est pas obligatoire lorsque l'activité n'a débuté qu'au cours du deuxième semestre de la période fiscale.

4 Si les conditions d'assujettissement ne sont réalisées que durant une partie de la période fiscale, l'impôt est prélevé sur les revenus obtenus durant cette période. Pour les revenus à caractère périodique, le taux de l'impôt se détermine compte tenu d'un revenu calculé sur douze mois. Les revenus à caractère non périodique sont soumis à un impôt annuel entier, mais ne sont pas convertis en un revenu annuel pour le calcul du taux.

5 L'alinéa 3 s'applique par analogie aux déductions.

Art. 3

1 La fortune imposable se détermine d'après son état à la fin de la période fiscale ou de l'assujettissement.

2 Pour les contribuables qui exercent une activité indépendante et dont les exercices commerciaux ne coïncident pas avec l'année civile, la fortune commerciale imposable se détermine d'après le capital propre existant à la fin de l'exercice commercial clos pendant la période fiscale.

3 Si les conditions de l'assujettissement ne sont réalisées que durant une partie de la période fiscale, seul le montant de l'impôt correspondant à cette durée est prélevé.

4 L'augmentation de fortune en cours de période fiscale résultant d'une dévolution successorale, de gains de loterie ou du versement de prestations en capital provenant d'assurances, de versements en capital remplaçant des prestations périodiques, de versements en capital provenant d'institutions de prévoyance professionnelle ou fournis selon des formes reconnues de prévoyance liée, ne sera prise en compte pour le calcul de l'impôt que pour le reste de la période fiscale.

Art. 4

1 Les déductions sociales et les barèmes sont déterminés d'après la situation existant à la fin de la période fiscale ou de l'assujettissement.

2 Si les conditions d'assujettissement ne sont réalisées que durant une partie de la période fiscale, les déductions sociales sont accordées proportionnellement. Elles sont entièrement prises en considération pour le calcul du taux.

Art. 5

1 En cas de mariage, les époux sont imposés globalement pour toute la période fiscale.

2 En cas de décès de l'un des époux, les conjoints sont imposés globalement jusqu'au jour du décès. Le décès entraîne la fin de l'assujettissement des deux époux et le début de l'assujettissement du conjoint survivant.

3 En cas de divorce ou de séparation judiciaire ou de fait, chaque époux est imposé séparément pour l'ensemble de la période fiscale.

4 Le revenu et la fortune des enfants sous autorité parentale, à l'exception du gain obtenu de leur travail, sont ajoutés à ceux du détenteur de l'autorité parentale jusqu'à la fin de l'année précédant celle au cours de laquelle ces enfants deviennent majeurs.

Art. 6

1 Pour la période fiscale de transition, l'impôt sur le revenu des personnes physiques fait l'objet de deux taxations provisoires conformes, l'une aux anciennes dispositions, l'autre aux nouvelles. L'impôt calculé selon le nouveau droit est dû s'il est plus élevé que celui calculé selon l'ancien droit; si tel n'est pas le cas, c'est l'impôt calculé selon l'ancien droit qui doit être acquitté.

2 En cas de mariage, décès d'un époux, de divorce, de séparation judiciaire ou de fait durant la période fiscale de transition, l'imposition s'effectue exclusivement selon le nouveau droit. Toutefois, les revenus extraordinaires réalisés au cours de l'année précédant la période de transition sont soumis séparément à l'impôt durant la période de transition aux taux des barèmes de l'ancien droit. Sont notamment considérés comme revenus extraordinaires, les gains en capital sur des éléments de la fortune commerciale, réévaluations, gains de loterie, indemnités en capital, revenus de fortune à caractère non périodique, et gains résultant de l'omission d'amortissements ou de provisions justifiées par l'usage commercial.

3 Lors du début d'assujettissement au cours de la période fiscale de transition, l'imposition s'effectue exclusivement selon le nouveau droit.

4 La fortune est imposée exclusivement d'après le nouveau droit.

Art. 7

1 La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1999.

2 Toutefois, si les contraintes techniques liées à la mise en oeuvre de la présente loi l'exigent, le Conseil d'Etat peut en différer l'entrée en vigueur au 1er janvier 2001.

Art. 8

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:

Art. 10, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Le revenu et la fortune des époux vivant en ménage commun s'additionnent, quel que soit le régime matrimonial.

Art. 10 A (abrogé)

Art. 10 B (abrogé)

Art. 12 (abrogé)

Art. 17, al. 1 à 4 et 6 (abrogés)

Art. 30 A (nouvelle teneur)

Il est déduit du revenu net annuel du contribuable 2 750 F lorsque celui-ci a contracté mariage au cours de l'année fiscale.

Art. 45, al. 1 (abrogé)

al. 2 (nouvelle teneur)

2 Les titres cotés en bourse sont évalués au cours moyen du mois de décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû.

al. 4 et 5 (abrogés)

Art. 76, al. 5 à 7 (nouveaux)

5 L'impôt est dû par la personne inscrite comme propriétaire ou usufruitier au registre foncier à la date du 31 décembre de la période fiscale

6 L'impôt est calculé au 31 décembre de la période fiscale sur la valeur des immeubles à cette date.

7 Pour les immeubles locatifs, en l'absence d'un état locatif annuel produit au 31 décembre de la période fiscale, le dernier état locatif annuel connu sera retenu.

Passage de l'imposition annuelle praenumerando à l'imposition annuelle postnumerando-période transitoire

Ancien droit (AD):

Période de calcul

(revenu)

__________________

100

ANNÉE FISCALE

Période de taxation

=

Déclaration d'impôts

impôts sur le revenu: 30

impôts sur la fortune: 2

_____

Total ancien droit: 32

Fortune: 200

1998

1999

2000

01. 01.  31. 12

01. 01. 31. 12.

01. 01. 31. 12.

Nouveau droit (ND):

Période de calcul

(revenu)

_____________________

120

Fortune: 250

Période de taxation

=

Déclaration d'impôts

impôts surle revenu:  40  

impôts surla fortune: 2,5

_______

Taxation ND: 42,5

./.Taxation AD: (32)

_______

Solde à payer: 10,5

L'impôt sur la fortune est prélevé selon l'ancien et le nouveau droit.

Premier débat

Mme Christine Sayegh (S). La loi fédérale sur l'harmonisation fiscale a pour but, comme son nom l'indique, d'harmoniser les législations fiscales cantonales entre elles en matière d'imposition directe.

Le projet de loi 7532 sur l'imposition des personnes physiques, élaboré par le Conseil d'Etat, tend à l'adaptation de notre législation actuelle au droit fédéral. Les trois premiers chapitres concernent respectivement l'assujettissement à l'impôt, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur la fortune. Ces trois chapitres soulèvent des questions politiques importantes, notamment en matière de déductions sociales pour lesquelles nous n'avons pas encore reçu, en commission, toutes les études nécessaires pour y répondre.

Le quatrième chapitre est consacré à l'imposition dans le temps. Il y a une certaine urgence à le traiter, ce que la commission fiscale a admis à l'unanimité. En effet, la période de calcul, à savoir la période de prise en considération des revenus et de la fortune taxables ne correspond pas forcément à la période fiscale de taxation qui, en principe, est la période de paiement de l'impôt.

Nous sommes dans un système annuel, dit praenumerando, la période de calcul étant l'année qui précède la période fiscale. Nous devons donc choisir entre le système fédéral actuel, dit praenumerando bisannuel ou le système postnumerando. C'est ce dernier qui est proposé. Nous appliquons déjà ce système avec l'article 10 B de la loi sur les contributions publiques pour les contribuables au chômage depuis plus de six mois. Cela consiste à réunir, sur une même année, la période de calcul et la période fiscale. Les impôts correspondent ainsi au revenu de la même période, ce qui est mieux adapté à la réalité.

Techniquement, il est donc important que nous décidions rapidement du système que nous souhaitons appliquer, pour qu'il puisse être opérationnel au début d'une année impaire, la prochaine échéance étant 1999.

Le système postnumerando est adéquat, et c'est pourquoi notre groupe votera ce projet de loi, en proposant toutefois un amendement à l'article 6 relatif à la période transitoire, afin de traiter le revenu et la fortune de la même manière. Je développerai cet amendement en deuxième débat.

M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur. Je remercie Mme Sayegh de son cours ex cathedra sur un sujet ardu. Il a certainement bien renseigné l'ensemble des députés. Je suis cependant étonné de sa confusion, car il me semble que ce projet de loi a été voté en commission à l'unanimité, sans qu'il y ait eu de proposition d'amendement.

Il serait bien que nous en recevions le texte pour que nous jugions de son intérêt.

Mme Christine Sayegh (S). Cet amendement est simple. Il consiste à ajouter «et la fortune» après «revenu», à la deuxième ligne de l'alinéa 1 de l'article 6 de la loi, afin que l'impôt sur le revenu et la fortune des personnes physiques fasse l'objet de deux taxations provisoires conformes pour la période fiscale de transition.

Si cet amendement est accepté, il y aura lieu de supprimer l'alinéa 4 dudit article 6 qui prévoyait un traitement différent de la fortune.

Nous avions proposé cet amendement en commission. Il a été refusé par l'ancienne majorité.

M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur. Effectivement, nous avions discuté de cette solution en commission fiscale. Je la trouve mauvaise. L'article 6 pénalise déjà fortement le contribuable qui sera taxé selon les deux systèmes dans l'année d'adoption de ce nouveau système. Il paiera les impôts correspondant à la taxation la plus forte. Il sera ainsi pénalisé par rapport au système existant.

Cet amendement se justifiait pour éviter des fraudes ou certains arrangements préjudiciables à l'Etat. Dans ce sens, nous l'avions compris et accepté. En revanche, au niveau de la fortune, il ne se justifie pas, les évolutions étant stables et les possibilités de fraude n'existant quasiment pas. Dès lors, ce qui se justifie pour le revenu ne se justifie pas pour la fortune. Par conséquent, je vous demande de rejeter cet amendement.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je remercie la commission fiscale de s'être attelée à cette révision indispensable de la loi sur l'imposition des personnes physiques. L'importance des travaux a conduit à présenter exclusivement le projet d'imposition dans le temps pour passer au système postnumerando annuel. Ce système avantagera tout le monde, dans la mesure où sera taxée la période de calcul correspondant à la période fiscale, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Je vous recommande donc d'adopter ce projet de loi voté à une très large majorité de la commission fiscale.

J'en viens à l'amendement proposé par Mme la députée Sayegh. Il est vrai qu'il a été débattu et qu'il a soulevé des questions qui ont reçu leur réponse à la page 13 du rapport de Mme Nicollier.

Nous avons voulu reprendre la loi fiscale zurichoise qui vient d'entrer en vigueur et qui a reconnu le principe que nous-mêmes avons suivi, à savoir que l'imposition de la fortune pour la période transitoire est faite exclusivement en vertu du nouveau droit et non pas avec une double taxation. Cela pour éviter une charge fiscale supplémentaire lors d'une baisse de fortune entre le 31 décembre de l'année de taxation et l'année précédente.

Nous avons choisi cette solution pour ces raisons techniques et par souci de coller le plus possible aux cantons qui appliquent déjà la nouvelle LIPP, notamment Zurich qui l'a faite voter par le peuple. C'est pourquoi le Conseil d'Etat, en ce qui le concerne, entend s'en tenir au texte voté par la commission.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 5.

Art. 6

Le président. Nous allons passer à l'amendement proposé par Mme Christine Sayegh. Madame, vous avez la parole.

Mme Christine Sayegh (S). Merci, Monsieur le président. Le but de cet amendement est de maintenir les recettes fiscales. Tant le revenu que la fortune seraient imposés selon deux taxations provisoires, d'après l'ancien et le nouveau système, et la taxation la plus forte serait retenue.

Si les Zurichois n'ont adopté, selon l'ancien droit, que la taxation transitoire sur le revenu, c'est à cause d'un silence de la loi sur l'harmonisation fiscale. Au début de la lecture de cette loi, il nous avait été dit qu'elle comportait un silence que nous devions analyser pour savoir s'il s'agissait d'un silence qualifié ou, comme c'est le cas, d'un silence tout court.

C'est ce silence tout court qui nous permet de faire cet amendement que je maintiens. Dans une période de crise, nous ne pouvons pas nous permettre de réduire d'éventuelles recettes fiscales.

M. le rapporteur Brunschwig a relevé que cela n'avait pas beaucoup d'importance. Dès lors, je ne vois pas pourquoi il s'oppose à cette proposition.

Par conséquent, je confirme le maintien de mon amendement.

M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur. Les solutions les plus simples sont les plus pratiques, particulièrement en matière de fiscalité où les textes sont très compliqués, surtout en ce qui concerne ce passage transitoire qui va créer des problèmes aux uns et aux autres.

La solution la plus simple est celle proposée par Mme Nicollier dans son rapport.

A moins que vous n'ayez des talents de devin, il est difficile de présumer des évaluations de fortunes dans les années considérées. Nous ne les connaissons pas, ayant laissé au Conseil d'Etat le soin de les déterminer.

Il n'y aura donc pas forcément de répercussions positives ou négatives par rapport à votre formule ou par rapport à celle retenue par la commission.

Par conséquent, je recommande le rejet de cet amendement.

M. Gilles Godinat (AdG). J'avais formulé cet amendement en commission pour défendre le principe même de l'égalité de traitement pour le revenu et la fortune.

Ne pas tenir compte des modifications de la fortune et imposer le montant le plus bas déclaré entre deux années n'est pas cohérent. En revanche, le principe de la taxation de la fortune la plus élevée pendant la période transitoire est fiscalement juste.

M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur. Le système préconisé par la commission ne revient pas à taxer la fortune la plus basse. J'interviens afin que ce parlement ne soit pas trompé.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je voudrais m'opposer à un des arguments soulevés par Mme la députée Sayegh qui a déclaré vouloir sauvegarder les recettes de l'Etat.

Si quelqu'un entend les sauvegarder, c'est bien moi ! Jamais, au cours des débats, il n'a été question, sur ces articles-là, de savoir si on récupérerait plus ou si on offrirait des cadeaux à certains contribuables.

Les deux systèmes sont possibles à travers la loi. Nous pensons simplement que l'imposition sur la fortune sur le nouveau droit créera plus de complications à l'administration que les estimations de fortune d'une année sur l'autre.

C'est pourquoi nous avons proposé, uniquement pour la période transitoire, ce système qui entrera en vigueur au 1er janvier 2001. Si le parlement entend adopter majoritairement cet amendement, il va sans dire que l'administration s'y pliera totalement.

Mme Christine Sayegh (S). Je tiens à préciser que cet amendement ne créera pas de difficultés. De toute façon, nous aurons deux déclarations à remplir, l'une selon l'ancien droit, l'autre selon le nouveau.

Lors de la dernière séance de commission, nous avons effectivement parlé de la fortune pendant la période transitoire, mais nous n'avions pas de réponse concernant les impératifs éventuels du droit fédéral.

Cela signifie simplement que la fortune sera taxée de la façon la plus favorable à l'Etat.

Le président. Je mets aux voix l'amendement de Mme Christine Sayegh qui consiste à ajouter les mots «et la fortune» à la deuxième ligne de l'alinéa 1, de l'article 6, soit :

«1Pour la période fiscale de transition, l'impôt sur le revenu et la fortune des personnes physiques...».

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. L'amendement de l'alinéa 1 implique la suppression de l'alinéa 4 du même article 6. Nous votons cette suppression.

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 6, ainsi amendé, est adopté.

Mis aux voix, l'article 7 est adopté, de même que l'article 8 (souligné).

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

(PL 7532)

LOI

sur l'imposition dans le temps des personnes physiques (LITPP)

(D 3 12)

LE GRAND CONSEIL,

vu les articles 16, 62 à 69 de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, du 14 décembre 1990,

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Les impôts sur le revenu et la fortune des personnes physiques sont fixés et prélevés pour chaque période fiscale.

2 La période fiscale correspond à l'année civile.

Art. 2

1 Le revenu imposable se détermine d'après les revenus acquis pendant la période fiscale.

2 Le produit de l'activité lucrative indépendante se détermine d'après le résultat des exercices commerciaux clos pendant la période fiscale.

3 Les contribuables qui exercent une activité lucrative indépendante doivent clôturer leurs comptes à chaque période fiscale, ainsi qu'à la fin de l'assujettissement. La clôture des comptes n'est pas obligatoire lorsque l'activité n'a débuté qu'au cours du deuxième semestre de la période fiscale.

4 Si les conditions d'assujettissement ne sont réalisées que durant une partie de la période fiscale, l'impôt est prélevé sur les revenus obtenus durant cette période. Pour les revenus à caractère périodique, le taux de l'impôt se détermine compte tenu d'un revenu calculé sur douze mois. Les revenus à caractère non périodique sont soumis à un impôt annuel entier, mais ne sont pas convertis en un revenu annuel pour le calcul du taux.

5 L'alinéa 3 s'applique par analogie aux déductions.

Art. 3

1 La fortune imposable se détermine d'après son état à la fin de la période fiscale ou de l'assujettissement.

2 Pour les contribuables qui exercent une activité indépendante et dont les exercices commerciaux ne coïncident pas avec l'année civile, la fortune commerciale imposable se détermine d'après le capital propre existant à la fin de l'exercice commercial clos pendant la période fiscale.

3 Si les conditions de l'assujettissement ne sont réalisées que durant une partie de la période fiscale, seul le montant de l'impôt correspondant à cette durée est prélevé.

4 L'augmentation de fortune en cours de période fiscale résultant d'une dévolution successorale, de gains de loterie ou du versement de prestations en capital provenant d'assurances, de versements en capital remplaçant des prestations périodiques, de versements en capital provenant d'institutions de prévoyance professionnelle ou fournis selon des formes reconnues de prévoyance liée, ne sera prise en compte pour le calcul de l'impôt que pour le reste de la période fiscale.

Art. 4

1 Les déductions sociales et les barèmes sont déterminés d'après la situation existant à la fin de la période fiscale ou de l'assujettissement.

2 Si les conditions d'assujettissement ne sont réalisées que durant une partie de la période fiscale, les déductions sociales sont accordées proportionnellement. Elles sont entièrement prises en considération pour le calcul du taux.

Art. 5

1 En cas de mariage, les époux sont imposés globalement pour toute la période fiscale.

2 En cas de décès de l'un des époux, les conjoints sont imposés globalement jusqu'au jour du décès. Le décès entraîne la fin de l'assujettissement des deux époux et le début de l'assujettissement du conjoint survivant.

3 En cas de divorce ou de séparation judiciaire ou de fait, chaque époux est imposé séparément pour l'ensemble de la période fiscale.

4 Le revenu et la fortune des enfants sous autorité parentale, à l'exception du gain obtenu de leur travail, sont ajoutés à ceux du détenteur de l'autorité parentale jusqu'à la fin de l'année précédant celle au cours de laquelle ces enfants deviennent majeurs.

Art. 6

1 Pour la période fiscale de transition, l'impôt sur le revenu et la fortune des personnes physiques fait l'objet de deux taxations provisoires conformes, l'une aux anciennes dispositions, l'autre aux nouvelles. L'impôt calculé selon le nouveau droit est dû s'il est plus élevé que celui calculé selon l'ancien droit; si tel n'est pas le cas, c'est l'impôt calculé selon l'ancien droit qui doit être acquitté.

2 En cas de mariage, décès d'un époux, de divorce, de séparation judiciaire ou de fait durant la période fiscale de transition, l'imposition s'effectue exclusivement selon le nouveau droit. Toutefois, les revenus extraordinaires réalisés au cours de l'année précédant la période de transition sont soumis séparément à l'impôt durant la période de transition aux taux des barèmes de l'ancien droit. Sont notamment considérés comme revenus extraordinaires, les gains en capital sur des éléments de la fortune commerciale, réévaluations, gains de loterie, indemnités en capital, revenus de fortune à caractère non périodique, et gains résultant de l'omission d'amortissements ou de provisions justifiées par l'usage commercial.

3 Lors du début d'assujettissement au cours de la période fiscale de transition, l'imposition s'effectue exclusivement selon le nouveau droit.

Art. 7

1 La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1999.

2 Toutefois, si les contraintes techniques liées à la mise en oeuvre de la présente loi l'exigent, le Conseil d'Etat peut en différer l'entrée en vigueur au 1er janvier 2001.

Art. 8

La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:

Art. 10, al. 1 (nouvelle teneur)

1 Le revenu et la fortune des époux vivant en ménage commun s'additionnent, quel que soit le régime matrimonial.

Art. 10 A (abrogé)

Art. 10 B (abrogé)

Art. 12 (abrogé)

Art. 17, al. 1 à 4 et 6 (abrogés)

Art. 30 A (nouvelle teneur)

Il est déduit du revenu net annuel du contribuable 2 750 F lorsque celui-ci a contracté mariage au cours de l'année fiscale.

Art. 45, al. 1 (abrogé)

al. 2 (nouvelle teneur)

2 Les titres cotés en bourse sont évalués au cours moyen du mois de décembre de l'année pour laquelle l'impôt est dû.

al. 4 et 5 (abrogés)

Art. 76, al. 5 à 7 (nouveaux)

5 L'impôt est dû par la personne inscrite comme propriétaire ou usufruitier au registre foncier à la date du 31 décembre de la période fiscale

6 L'impôt est calculé au 31 décembre de la période fiscale sur la valeur des immeubles à cette date.

7 Pour les immeubles locatifs, en l'absence d'un état locatif annuel produit au 31 décembre de la période fiscale, le dernier état locatif annuel connu sera retenu.

M 1156
18. Proposition de motion de MM. Bernard Clerc et Chaïm Nissim sur la réduction de la dette publique. ( )M1156

EXPOSÉ DES MOTIFS

La crise des finances publiques dure depuis de nombreuses années, et aucune solution simple n'est à même de la résoudre. Parmi les projets qui permettraient d'augmenter les recettes, la plupart demandent du temps et une harmonisation intercantonale, voire même à l'échelon européen. C'est le cas d'une taxation des plus-values sur les actions, qui dépend d'une loi fédérale. C'est le cas aussi d'une taxation des grandes fortunes, qui dépend d'une harmonisation fiscale intercantonale. C'est le cas, enfin, de la taxe dite «Tobin» sur les transactions financières, qui dépend d'une décision au niveau européen. Il en va malheureusement de même pour les taxes dites «écologiques», comme la taxe sur les carburants et combustibles, ou sur les énergies non renouvelables. Ces taxes «vertes», elles aussi, seront longues à mettre en oeuvre et dépendront d'accords aux niveaux fédéral et européen. Cela ne signifie pas, bien entendu, que le Conseil d'Etat ne doive pas se pencher sur ces pistes, mais cela signifie qu'il ne faut pas attendre de soulagement immédiat de la crise grâce à ces pistes.

En s'appuyant sur les comptes de l'Etat de Genève pour l'année 1996, on peut constater que la dette du canton s'est élevée à 8 776 millions de francs et le service de la dette (plus exactement les intérêts passifs) à 449 millions de francs, soit environ 8,8% du budget de l'Etat (voir Compte d'Etat, pages 112 et 113). Par ailleurs, les intérêts passifs représentent la majeure partie du déficit annuel du compte de fonctionnement (soit 97,4%). Selon les données dont nous disposons, le montant de la dette s'élève actuellement à 9 216 millions de francs, en augmentation de 5% par rapport aux comptes 1996.

La question peut dès lors se poser: vu que les pistes permettant d'augmenter les recettes semblent devoir prendre du temps, et vu que les pistes qui permettent de réduire les dépenses sans toucher à l'essentiel, c'est-à-dire moins aveuglément qu'avec des coupes linéaires et «bêtes», demandent elles aussi une réflexion en profondeur sur le rôle de l'Etat et le fonctionnement de ses services, ne pourrions-nous pas, dans l'immédiat, nous poser les questions: Comment obtenir un ballon d'oxygène? Comment alléger momentanément la pression du service de la dette? Ce ballon d'oxygène ne devrait en aucun cas être considéré par le Conseil d'Etat comme un oreiller de paresse. Il ne devrait en aucun cas nous dispenser d'étudier très sérieusement les pistes évoquées ci-dessus. Mais ce ballon d'oxygène serait le bienvenu tout de même pour nous permettre d'affronter la crise sans le sentiment d'urgence et de catastrophe imminente qui est le nôtre aujourd'hui.

- En premier lieu, nous proposons de trouver un arrangement avec la Banque nationale en vue de contracter auprès d'elle un emprunt de 2 milliards de francs à un taux d'intérêt fortement réduit (1%-2%). Il s'agirait d'une avance sur la part qui devrait revenir au canton de Genève lors de la réévaluation de la réserve d'or de la Banque nationale et sur les produits réalisés grâce aux variations du cours de change (pour mémoire, 7 396 millions de francs selon le 89e Rapport de gestion de la Banque nationale suisse, sans compter les 7 milliards de francs dus à la réévaluation du prix de l'or). Cette somme servira à rembourser immédiatement les emprunts publics dont le taux d'intérêt dépasse 6% (il s'agit des emprunts contractés: 650 millions de francs en 1990, 500 millions de francs en 1991, 800 millions de francs en 1992). D'aucuns penseront qu'une telle proposition est impossible ou plutôt «farfelue». Soit. Mais si l'on prend en considération l'analyse du professeur Thomas von Ungern, de l'université de Lausanne, qui aboutit au constat que «si l'esprit de la constitution et de la loi n'était pas violé, les cantons pourraient réduire leur endettement d'un tiers» («Journal de Genève et Gazette de Lausanne», les 1er et 2 juin 1966), une telle idée n'est pas si impossible à mettre en pratique. Le conseiller d'Etat Vodoz l'avait lui-même évoquée, pour partie.

- En deuxième lieu, on pourrait envisager de frapper d'une «taxe solidaire» unique de 0,01% les fortunes gérées à Genève, pour éponger en partie d'autres emprunts, en particulier auprès de l'AVS. Selon les estimations, une telle mesure de solidarité du monde financier à l'égard de Genève - totalement indolore au niveau individuel - permettrait d'obtenir 80 millions de francs (en admettant que la fortune gérée à Genève s'élève à 800 milliards de francs).

Sans se faire d'illusions, la présente motion essaie de dessiner des pistes et de provoquer un débat, pour trouver des idées nouvelles qui nous permettraient d'éviter de frapper toujours les plus démunis. C'est la raison pour laquelle nous vous appelons, Mesdames et Messieurs les députés, à lui faire bon accueil et à la renvoyer au Conseil d'Etat.

Débat

M. Chaïm Nissim (Ve). Notre motion est d'actualité puisqu'elle invite le Conseil d'Etat à présenter au Grand Conseil un plan de désendettement du canton.

L'exposé des motifs, dont le Conseil d'Etat ferait bien de s'inspirer, ouvre quelques pistes.

La première avait déjà été suggérée dans une motion, déposée voici six mois et refusée par le Grand Conseil. Il s'agit de l'introduction d'une taxe «Tobin» sur les transactions financières qui atteignent un volume gigantesque au plan mondial. Cette taxe remédierait à tous les déficits budgétaires que connaissent les Etats modernes aujourd'hui. Le problème est que cette taxe nécessite une harmonisation au niveau européen, voire au niveau mondial, et que l'on ne pourra pas la décréter demain matin, juste après l'adoption de notre motion.

Deuxième piste, les taxes vertes pour lesquelles les écologistes se battent depuis des années. Ces taxes pourraient impulser la notion de développement durable dans notre économie, mais elles exigeront, pour le moins, une harmonisation intercantonale.

En revanche, le Conseil d'Etat pourrait s'inspirer des deux dernières pistes suggérées par notre ancien collègue Andràs November. La première d'entre elles fait référence à une taxe solidaire à laquelle je tiens beaucoup. Au taux indolore de 0,01%, elle frapperait le montant total des fortunes gérées à Genève évalué à 800 milliards de francs. Elle rapporterait 80 millions.

Voici six mois, M. Vodoz commençait à explorer la quatrième piste, celle de la Banque nationale qui, cette année, a gagné 7 milliards sur ses transactions financières. Par ailleurs, le prix de l'or qu'elle détient a fait l'objet d'une réévaluation prudente d'environ 7 milliards. Une part de ces 14 milliards pourrait être prêtée aux cantons à des taux très réduits. Ce ballon d'oxygène pourrait sortir certains cantons de leur excès d'endettement.

Mon collègue Bernard Clerc et moi-même avons lancé cette motion comme une bouteille à la mer. La majorité de ce Grand Conseil ayant changé, nous sommes heureux de constater qu'un geste désespéré peut se transformer en certitude d'espoir.

M. Bernard Clerc (AdG). Que la majorité ait changé ou pas, je ne suis pas du tout désespéré ! Cette motion pose, de manière directe, des problèmes importants.

Il est presque inutile de rappeler le montant de la dette cantonale de l'ordre de 470 millions par an; tous les groupes s'entendent à reconnaître cette réalité qui ne peut être niée. En revanche, des sacrifices sont demandés, depuis des années, au personnel et aux usagers des services publics, respectivement au niveau des salaires et des prestations.

Bien évidemment, des sacrifices ne sont jamais demandés aux bailleurs de fonds !

Or, contrairement à une idée largement répandue dans l'imagerie populaire, les prêts aux collectivités publiques sont une bonne affaire... (Brouhaha; le président agite la cloche.) Visiblement, cela n'intéresse pas grand monde. C'est donc une bonne affaire, disais-je, et cela pour plusieurs raisons. Ces prêts permettent aux créanciers de répartir leurs risques, parce qu'ils constituent des placements sûrs. En effet, on n'a guère vu d'Etats mis en faillite ! Par contre, au niveau des rendements, il faut tenir compte de l'intérêt réel, c'est-à-dire l'intérêt brut moins l'inflation. Je vous signale que ce type de placements est tout sauf désavantageux, puisque le rendement moyen de la dette de l'Etat est de 5,5%. Avec une inflation de l'ordre de 1%, le rendement net est d'environ 4,5%.

Vous me direz que ce rendement est inférieur à celui produit par des placements dans des produits dérivés ou autres objets similaires. Mais il faut le considérer dans un ensemble de répartitions des risques... (Brouhaha.)

Le président. Je prie les personnes qui ont des conversations privées de bien vouloir les tenir en dehors de cette enceinte !

M. Bernard Clerc. Si on compare à la période où les taux des emprunts étaient de 6 ou 7%, avec une inflation de 4 ou 5%, les intérêts réels étaient de 3 à 4%, c'est-à-dire inférieurs à ceux d'aujourd'hui.

Je ne reviendrai pas sur les pistes évoquées par M. Nissim. Je dirai simplement que le chiffre cité de 800 milliards gérés sur la place genevoise ressort d'estimations faites en 1992. Or, pas plus tard que le 30 octobre, nous avons reçu une estimation des actifs de la clientèle privée dans le monde : ils s'élèvent à 25 mille milliards de francs; 70% desdits actifs sont gérés dans le pays d'origine et 30% à l'extérieur, la Suisse s'arrogeant les 40% de ces 30%. Sachant que Genève s'octroie à peu près la moitié de la part helvétique, nous arrivons au chiffre - tenez-vous bien, Mesdames et Messieurs les députés ! - de 3 750 milliards de francs gérés sur place, soit quatre fois plus que les estimations de 1992. Je vous laisse imaginer ce que rapporterait une taxe de 0,01% ! Il y a matière à réflexion...

Nous demandons simplement au Conseil d'Etat de présenter au Grand Conseil un plan de désendettement une fois qu'il aura étudié les possibilités suggérées dans cette motion, voire d'autres. Aussi je vous demande d'adresser la motion directement au Conseil d'Etat.

M. Daniel Ducommun (R). Notre groupe n'a aucune objection à ce que cette motion poursuive son destin auprès de la commission des finances.

Qui ne souhaite pas trouver de solutions au désendettement du canton ! Simplement, nous divergeons sur les moyens. MM. Clerc et Nissim veulent augmenter les recettes fiscales ou les taxes sur les grandes fortunes, les opérations boursières, les poubelles... Attention, Messieurs, toute hausse d'impôts est soumise à la sanction populaire !

Le groupe radical, lui, défend la politique des moyens. Il faut faire avec ce que l'on a. Dans ce contexte, l'axe de la colonne des dépenses reste notre référence prioritaire. Cela ne sert à rien de négocier un taux de faveur avec la Banque nationale si, par ailleurs, nous continuons à vivre au-dessus de nos moyens.

Maintenons notre volonté d'économiser. Il faut poursuivre les efforts entrepris par le Conseil d'Etat dans la gestion des effectifs, l'exploitation des recommandations de l'audit, le ciblage de l'aide sociale, la suppression des doublons entre l'Etat et les communes, la rationalisation des achats, et j'en passe !

Bref, nous examinerons tout cela en commission des finances.

M. Bénédict Fontanet (PDC). On ne peut que féliciter MM. Clerc et Nissim de leur clairvoyance enfin révélée. Aujourd'hui, leur but, qui consiste à demander au Conseil d'Etat de désendetter le canton, est fort louable, et notre groupe, de son côté, le poursuit bien évidemment.

Monsieur Clerc, on n'a pas toujours entendu ce discours sur vos bancs. Certains des membres de votre groupement politique affirment qu'un Etat non endetté est un Etat mal géré et peu importe la dette publique, pourvu qu'on ait l'ivresse ou, à défaut, les dépenses, la dette n'important guère dans la gestion des collectivités publiques.

Je suis d'accord avec vos observations, Monsieur Ducommun, mais je pense que nous pouvons voter cette motion dont seule l'invite lie le Conseil d'Etat. En effet, nous ne pouvons que partager le souhait de l'Alliance de gauche que le Grand Conseil, sur la base d'un plan du Conseil d'Etat, arrive à désendetter le canton.

En revanche, il ne semble pas que les moyens proposés dans l'exposé des motifs puissent être approuvés par ce Grand Conseil. Il va de soi que nous ne les faisons pas nôtres, parce que vous avancez le montant de 3 700 milliards gérés à Genève. Je ne suis pas certain que ce soit le cas. Nous n'allons pas nous battre à propos de ce chiffre, bien que les banquiers, présents dans cette salle, seraient ravis d'apprendre qu'autant d'argent soit administré chez nous.

Nous pourrions aller plus loin encore en taxant des actifs se trouvant à l'étranger. Nous pourrions faire preuve de beaucoup d'imagination dans ce domaine.

Il va de soi que si notre pays est le seul à taxer les transactions financières comme vous le souhaitez, le résultat sera remarquable pour le dynamisme de notre place financière... Il va de soi que si, à Genève, nous taxons, fût-ce de manière tout à fait minime, les fortunes qui s'y trouvent, celles-ci ne bougeront pas, parce qu'aucun banquier ou gestionnaire de biens n'aura l'idée, Messieurs Clerc et Nissim, de les délocaliser ne serait-ce qu'à Nyon ou à Gingins...

On peut regretter que la plupart de ces transactions puissent être exécutées très rapidement par le biais de l'informatique, mais vouloir taxer ici, même de manière minime, ces fortunes qui ne sont pas celles des contribuables genevois, c'est encourager leur déplacement sous d'autres cieux aussi charmants que les nôtres, notamment ceux du canton de Vaud.

Je veux bien que l'on fasse un hold-up à la Banque nationale, mais ce sera difficile sans l'accord des Chambres fédérales ! Nous savons, dans cette enceinte, que nous pouvons compter sur la vigilance des MM. Grobet et Dupraz. Il n'en demeure pas moins que ce projet de hold-up n'a pas remporté un succès considérable auprès des cantons. On songe à dépouiller quelque peu la Banque nationale au profit d'une grande fondation de solidarité qui poursuit des buts que vous et moi jugeons louables. Mais il apparaît que les cantons, pourtant à la base de la fortune de la Banque nationale, ne pourront pas passer à la caisse, n'en déplaise, hélas, à M. Vodoz, pour se refaire tant soit peu une santé financière sur le dos de la Confédération et de la Banque nationale.

Notre groupe approuve l'invite de la motion tout en réprouvant son exposé des motifs. Nous n'avons pas d'objection à ce que le Conseil d'Etat nous soumette un plan de désendettement pour autant qu'il soit réaliste et tienne compte des impératifs d'une saine gestion et non de recettes aussi vagues que fumeuses.

M. Nicolas Brunschwig (L). Nous félicitons MM. Clerc et Nissim, car nous ne pouvons que souscrire à leurs considérants et invite.

Nous nous réjouissons de constater que les élus de leur parti respectif commencent à s'intéresser aux problèmes de l'endettement du canton de Genève, alors qu'ils l'ont considéré, pendant longtemps, comme un problème mineur par rapport aux problèmes sociaux et d'emploi à Genève. Ce réveil est tardif, mais il est totalement justifié !

Je n'ai pas très bien compris les explications techniques et chiffrées de M. Clerc. Vu l'heure tardive, j'ai sans doute eu du mal à les saisir. Je serais ravi de lire le texte que M. Clerc a brandi en commission des finances, afin de savoir si ses propositions sont réalistes et compatibles avec le droit fédéral.

Nous avons quelques doutes à cet égard, et c'est pourquoi nous vous invitons à renvoyer cette motion à la commission des finances. Nous sommes sûrs que MM. Nissim et Clerc nous convaincront de la justesse des moyens proposés et convaincront, surtout, la nouvelle ministre des finances qui sera ravie de se charger de cette tâche.

M. René Ecuyer (AdG). Evidemment, nous sommes bien contents que vous vous associiez à cette motion invitant le Conseil d'Etat à présenter un plan de désendettement au Grand Conseil; l'exposé des motifs ouvre quelques pistes qui pourraient vous inspirer.

Personnellement, quand je vois ce qui se passe - je lis les journaux comme tout le monde - je trouve les parlements singulièrement manchots à l'égard des cent familles les plus riches de notre pays qui ont augmenté leurs capitaux de plus de 60 milliards en une année ! Vous vous rendez compte !

Et voilà que vous vous effrayez à l'idée qu'on pourrait leur en demander un dix millième, autrement dit 0,01%, sous la forme d'une taxe de solidarité ! J'avoue que c'est inquiétant.

L'autre soir, M. Ebner s'est vanté d'avoir gagné 500 millions en une nuit, avec l'achat de la Winterthur. Cela représente le déficit du canton de Genève pour une année !

Et quand on propose de demander un petit quelque chose à ces gens-là pour réduire la dette publique, on nous répond qu'il faut faire avec ce qu'on a pour essayer de s'en sortir ! Nous, nous affirmons qu'il faut prendre l'argent où il est ! Quand les fortunes de cent familles augmentent de 60 milliards en une année, je dis qu'il y a de l'argent à prendre. Cela veut dire que des gens, dans ce pays, vivent de la crise. Ils n'ont aucun scrupule à envoyer des milliers de personnes au chômage puisqu'ils en vivent ! Ils font des affaires. Et on ne pourrait donc pas leur demander la moindre participation ?

Dans quinze jours, il y aura une manifestation, parce que l'on va tenter de rogner 100 F à tous les petits vieux de ce canton qui touchent une allocation minimum.

Moi, j'ai honte quand je vois ça ! J'ai honte quand j'entends un Ebner annoncer 500 millions de bénéfice en une nuit ! J'ai honte que l'on enlève 100 F aux petits vieux de ce canton, parce que l'Etat n'arrive pas à tourner ! Vraiment, j'ai honte !

Franchement, je vous dis qu'elle est très bien, cette motion... (Rires.) On devrait même aller plus loin !

M. Chaïm Nissim (Ve). Juste quelques mots à l'adresse de mon excellent collègue Ducommun.

Monsieur Ducommun, proposer à la Banque nationale de nous accorder un prêt à un intérêt très bas ne signifie pas l'octroi d'un oreiller de paresse.

Nous sommes prêts, nous aussi, à nous occuper de certaines réformes urgentes et à faire des économies là où c'est possible.

L'un n'exclut pas l'autre.

Je précise à mes trois préopinants de l'Entente que nous demandons le renvoi au Conseil d'Etat et non en commission. En effet, nous ne tenons pas à ce qu'elle s'enlise dans un marécage.

Une voix. Ce ne serait pas la première !

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je comprends votre indignation, Monsieur Ecuyer, mais si les choses étaient simples, nous serions en tête des cantons, avec un taux d'autofinancement de 100%.

En demandant, depuis huit ans, des réductions du déficit, nous faisons le plan de désendettement que vous sollicitez. Il ne peut y avoir un tel plan sans une réduction préalable des déficits, et nous verrons ce qui se passera le 19 décembre. Une fois les déficits réduits et l'équilibre retrouvé, il faudra amortir la dette de fonctionnement accumulée pendant ces années de difficultés économiques.

On a tendance à oublier que Genève, avec l'appui de conseillers de banque et de financiers, est le canton le plus performant dans la gestion de sa dette. En quatre ans - et vous le savez ! - nous avons économisé près de 125 millions sur des intérêts classiques d'emprunt.

Nous avons dénoncé en remboursement anticipé un emprunt de 200 millions, qui était à 6,75% au 1er mars 1997, pour des créances comptables à 1,8%. Le 20 novembre dernier, nous avons dénoncé un emprunt de 250 millions, qui avait été souscrit à 71/8e pour reprendre des emprunts sur les créances comptables finançant le déficit de fonctionnement à 1,8%. Le 30 avril 1998, mon successeur résiliera probablement un emprunt de 200 millions à 6,5% pour des taux beaucoup plus bas.

Ce sont ainsi plus de 650 millions qui ont été gérés de façon à dégager des économies et abaisser le montant du taux d'intérêt de la dette.

La piste de la Banque nationale a effectivement été explorée. J'ai été fort peu soutenu ici même et seul le journal «Débats publics» a approuvé l'idée que j'ai présentée à la Conférence suisse des chefs des départements des finances, à Berne. Je n'y ai obtenu que deux ou trois voix sur les vingt-six cantons, parce que la Banque nationale a fait montre d'une opposition absolue. Et pourtant il s'agissait simplement, pour les autres 7 milliards, que les cantons puissent être en compte avec la Banque nationale et que celle-ci permette des amortissements à des taux beaucoup plus intéressants plutôt que de distribuer des montants complémentaires destinés aux comptes de fonctionnement pour financer d'autres opérations et couvrir d'autres dépenses.

Ma tentative a échoué provisoirement. Je dis «provisoirement», car je ne désespère pas d'une fondation appelée à gérer les revenus des 7 autres milliards. Il faudra également que les cantons et la population de notre pays trouvent les moyens de remédier aux difficultés budgétaires qui les assailliront bientôt, à part quelques exceptions. Je suis persuadé que les autorités fédérales et la Banque nationale retiendront une idée, proche ou identique, qui permettra aux cantons d'amortir leur dette de manière plus satisfaisante.

Les taxes dites «Tobin» et les éléments à prendre en compte sur les fortunes gérées relèvent d'un problème qui doit être considéré sur le plan national, voir international. Mais contentons-nous déjà du plan national. Il est impensable, à moins d'un suicide collectif - et cela vaut pour les gains sur les capitaux, indépendamment du fait que la LHID l'empêche - que nous prenions de telles mesures sur le plan cantonal, parce qu'il n'y a rien de plus mobile que les capitaux.

En revanche, j'aimerais que l'on réfléchisse, dans ce pays, à ne pas empiler diverses charges fiscales, mais à imaginer des impôts nouveaux en remplacement de certaines fiscalités devenues désuètes, lesquelles ne rapportent plus ce qu'elles ont rapporté.

Nous devons accomplir cette mutation sur le plan national, de façon que notre pays continue à être compétitif, dispose d'une fiscalité qui nous permette de travailler et réponde aux préoccupations sociales, culturelles et humaines. Pour ce faire, il ne suffit pas d'empiler les impôts comme des assiettes, sinon l'échec est garanti. Il faut se mettre autour d'une table, réfléchir et présenter de nouvelles formes d'imposition pour remplacer les anciennes qui rapportent moins.

Le Conseil d'Etat et, plus particulièrement, le département des finances réfléchiront à ces questions, que vous votiez un renvoi au Conseil d'Etat ou en commission. Ils vous feront part des travaux qui se déroulent, en la matière, sur le plan national. Ensuite, vous pourrez en débattre, avec un rapport à la clé.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion en commission est rejetée.

Mise aux voix, cette motion est adoptée.

Elle est ainsi conçue :

motion

sur la réduction de la dette publique

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

- que la crise persistante des finances publiques que connaît Genève exige la mise en place d'un plan de redressement financier innovateur;

- que les intérêts de la dette du canton représente une part prépondérante du budget de fonctionnement de l'Etat;

- que, pour sortir de la crise actuelle, il est indispensable de prendre en considération les principes de développement durable qui veulent concilier les besoins de notre génération avec ceux des générations futures,

invite le Conseil d'Etat

à présenter au Grand Conseil un plan de désendettement du canton.

M 1158
19. Proposition de motion de MM. René Koechlin et Armand Lombard concernant le partage du travail par la création d'emplois motivée par des congés sabbatiques. ( )M1158

LE GRAND CONSEIL,

considérant:

1. la nécessité de disposer des moyens les plus divers de lutte contre le chômage;

2. le besoin de formation et de recyclage individuels;

3. le partage du travail comme une piste possible du développement socio-économique,

invite le Conseil d'Etat

1. à établir un programme sabbatique pilote sur trois ans dans le cadre de:

a) 5-8 services de l'administration publique,

b) 5-8 entreprises privées;

2. à remplacer les postes sabbatiques financés à 50% au moins par des chômeurs pris en charge par l'employeur et par l'assurance-chômage;

3. à renseigner le Grand Conseil annuellement sur le déroulement du programme et sur ses impacts sociaux, économiques et financiers;

4. à présenter une évaluation complète après 3 ans.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Il est une fonction de l'Etat souvent oubliée, qui est celle de laboratoire social.

Au vu de l'intérêt suscité par le partage du travail souvent considéré comme offrant des chances de renouveau au tissu social, il paraît souhaitable de tenter l'expérience d'une de ses applications dans le cadre de l'Etat, avec des comparaisons avec le secteur privé. Une solution de partage de travail, d'ores et déjà pratiqué en Belgique, est celle d'un jumelage année sabbatique/chômage. Deux chercheurs genevois, le Dr L. P. Luka et le professeurP. L. Kukorelli, directeurs de l'Institut de recherche pour les loisirs actifs et la redistribution du travail (IRLAT), ont travaillé cette hypothèse qui fait l'objet de la présente motion.

Les motionnaires souhaitent par ce projet ciblé dégager d'autres pistes possibles et les voir tester rapidement, car, au-delà des mots, l'action-pilote, l'essai et le réel permettent sans nul doute de progresser. Si le présent projet ne concerne qu'une catégorie spécifique relativement privilégiée d'une communauté, il n'est pas moins un essai à tenter.

Buts du projet

1. Optimaliser l'occupation sur le marché de l'emploi en combinant les possibilités de congés sabbatiques des personnes ayant un emploi avec les possibilités d'occupation et peut-être même de perfectionnement ou de réinsertion de chômeurs. Un meilleur équilibre serait atteint sur le marché de l'emploi.

2. Permettre à l'entreprise ou au service public pendant une rocade de quelques mois entre un chômeur et un collaborateur d'établir pour ce dernier un programme de formation continue quasiment sans frais supplémentaires.

3. Proposer un laboratoire social public/privé, neutre financièrement, et ouvrant une voie au partage d'emploi.

Introduction des chercheurs genevois

«Il est incontestable que le problème du chômage est actuellement l'un des fardeaux socio-psychologiques les plus cruciaux dans les pays industrialisés» écrivait en 1988 déjà le Dr Luka après son séjour à Stanford, Californie.

«Les répercussions néfastes sur la santé somatique, la santé mentale, la criminalité, le fonctionnement de la famille et l'éducation des enfants de chômeurs créent un climat de mécontentement qui augmente la fragilité des familles et ajoute à la tension sociale un élément qui peut faire basculer la collectivité vers l'agressivité. Vu l'évolution de la technologie dans tous les domaines - de l'industrie à l'administration - on craint que le phénomème du chômage n'augmente dans les temps à venir si une solution valable - acceptable d'une façon permanente et à long terme pour les employeurs et les employés - n'est pas trouvée et appliquée dans un délai relativement court pour permettre un changement de tendance et créer un espoir réaliste pour la société.»

«Un nouvel arrangement de la répartition des emplois et du temps libre dont peuvent bénéficier les chômeurs et les employés n'ayant jamais chômé (sans que la productivité globale et l'intérêt des employeurs n'en soient affectés) nous semble l'unique issue réaliste.»

«La redistribution du travail, dans le présent projet, ne recherche pas un gain économique ou financier, ni en ce qui concerne les dépenses consécutives au chômage, ni dans les salaires dépensés pour la production; mais ce gain est incontestable sur plusieurs plans, en particulier sur:

- une réduction des frustrations consécutives au désoeuvrement et les conséquences de ces frustrations telles que grèves, manifestations de rue, appels à l'anarchie;

- la santé somatique et mentale des chômeurs (et des travailleurs n'ayant jamais chômé);

- la stabilité des institutions sociales, surtout l'école et la famille;

- la confiance tant individuelle que collective dans l'avenir;

- la réduction de la délinquance et de la violence découlant du chômage;

- l'amélioration des connaissances professionnelles qui intéresse surtout les victimes du sous-emploi;

- l'amélioration de la qualité de vie, l'élargissement de l'horizon culturel et professionnel.»

Sondage d'opinion

Un sondage d'opinion a été effectué en 1988 par les professeurs L. Luka (psychiatre) et P. Kukorelly (économiste) de Genève. Il visait à évaluer le désir des salariés interrogés à interromptre leur vie professionnelle active pour une période d'un an.

Résultat du sondage

«Après un sondage pilote à Paris, nous avons analysé 400 réponses venant de Toulouse et 386 de Munich; 401 réponses de femmes et 385 d'hommes. L'intérêt exprimé pour une année sabbatique est particulièrement frappant: 82% des femmes et 70,7% des hommes se déclarent désireux de prendre une année sabbatique. Ceux qui seraient intéressés à prendre une année sabbatique avec un salaire inférieur ou égal à 50% représentent 25% à Toulouse et 32% à Munich. La proportion de ceux qui désireraient une rémunération de 75 à 90% de leur salaire habituel s'élève à 57% à Toulouse contre 46% à Munich (...).»

Sur l'ensemble des 786 réponses obtenues à Toulouse et à Munich, avec les 196 obtenues par le premier sondage à Paris, soit 982, plus de 75% des personnes interrogées souhaiteraient une période sabbatique, c'est-à-dire une interruption de carrière professionnelle de longue durée après sept ans d'activité professionnelle.

Un changement sabbatique est souhaité par une majorité, avec tous ses risques et surprises, même si le revenu devait être inférieur au revenu habituel.

De façon échelonnée, on peut déduire que si 10% des travailleurs actifs partaient consécutivement en année sabbatique, 100% des chômeurs trouveraient une offre dans un pays où le chômage se situe autour de 10% - ce qui est le cas des pays de l'Union européenne. Ce remplacement - si cela était complètement adéquat et arithmétique - réglerait le problème du chômage à 100% parce que les prochains 10% de sabbaticiens devraient obligatoirement eux aussi être remplacés à leur tour. Le chômage disparaîtrait complètement si les travailleurs maintenaient leur rythme de 10% de congé sabbatique par an.

Les quatre parties concernées

1.  Le travailleur.

2.  Le chômeur.

3.  L'employeur.

4.  L'assurance-chômage.

1. Le travailleur

Le travailleur a une ancienneté de plus de sept ans au sein de l'entreprise lorsqu'il désire prendre un congé sabbatique. Ce congé peut durer de 6 à 12 mois et devrait permettre à l'intéressé de faire soit un séjour de perfectionnement à l'étranger, soit de poursuivre une formation, soit d'exercer une activité culturelle ou artistique, etc. Le travailleur toucherait environ 50% de son dernier salaire versé par l'employeur.

Au moment de l'entente entre employeur et employé et après avoir fixé la date du début de l'année sabbatique, l'employé s'engage à trouver un chômeur indemnisé apte à le remplacer pendant son absence. Il en assurera la mise au courant. Au retour du congé sabbatique, l'employé reprend son poste de travail.

2. Le chômeur

Il exercera une occupation durant 7 à 12 mois. Il est mis au courant par le travailleur qu'il est appelé à remplacer. Pour cette activité, il touchera une rémunération de l'ordre de 25-30% du salaire payé à la personne qu'il remplace.

3. Employeur

Il signe un contrat de travail d'une durée déterminée avec le chômeur. Il lui versera une rémunération de l'ordre de 25-30% du salaire que touchait le sabbaticien. Au début de son activité, le chômeur n'offrira sans doute pas les mêmes prestations de travail que le sabbaticien, mais si l'adaptation et l'apprentissage s'améliorent, il recevra une augmentation sans dépasser les 50% du salaire du sabbaticien.

4. L'assurance-chômage

Trois solutions sont possibles.

a) Réalisation d'un gain intermédiaire

 LACI révisée: la rémunération devra être conforme aux usages professionnels et locaux.

b) Réalisation d'un stage de réintégration (art. 59 à 61 LACI)

 La possibilité de faire un stage n'est ouverte qu'aux chômeurs qui sont difficiles à placer. Si le stage est considéré comme un stage de perfectionnement professionnel ou un recyclage au sens des articles 59 et suivants LACI, l'assurance-chômage verse au stagiaire l'indemnité. Le salaire obtenu durant le stage devra toutefois être assimilé à un revenu provenant d'une activité à temps partiel et déduit de l'indemnité en cas de fréquentation d'un cours.

c) Programmes d'occupation temporaire (art. 72 LACI)

 L'aptitude de l'assuré peut être améliorée

 - en réhabituant le chômeur à un rythme de travail régulier;

 - par une formation professionnelle pratique.

 Il est possible et même souhaitable que des stages pratiques se déroulent au sein même des entreprises.

 Cette possibilité serait également ouverte aux chômeurs ayant épuisé leur droit aux indemnités.

 L'assuré ayant droit aux indemnités de chômage reçoit durant la participation au programme également une rémunération versée par l'organisateur et subventionnée par le fonds de l'assurance-chômage et le canton.

 Des programmes d'occupation ne peuvent être subventionnés qu'en ces de chômage prononcé (1% de chômage dans le canton).

 Cette dernière solution semble la plus réaliste.

Nous souhaitons que le Grand Conseil prenne en considération ce projet et accepte de l'étudier en commission, comme un des éléments de la lutte contre le chômage et comme une tentative de restructuration du travail dans la région genevoise.

Débat

M. Armand Lombard (L). Notre motion est simple et ne suscitera pas une longue discussion.

Son objectif est de trouver une piste et un type d'action pour le partage du travail dont nous débattons depuis quatre ans et pour lequel nous n'avons guère reçu de propositions réalistes. Actuellement, la commission de l'économie se penche sur deux textes législatifs et c'est positif.

Le but principal de notre motion est d'inciter à une discussion, à ouvrir un débat et à rechercher de nouvelles solutions pour le partage du travail.

Le sujet est complexe. On cherche à diminuer le temps du travail, à inclure le travail sous diverses formes rémunérées ou non, à inciter les entreprises à créer des temps partiels et à les compenser par d'autres temps partiels moindres. Chacun a des idées mais personne n'a de solutions pratiques.

Mon collègue Koechlin et moi-même avons découvert dans une proposition des professeurs Luka et Kukorelli... (Interruption de M. Claude Blanc.) Monsieur Blanc, vous n'avez pas besoin de crier ! Je disais que la proposition des professeurs universitaires Luka et Kukorelli est de remplacer par un chômeur, financé par l'assurance-chômage, une personne désirant prendre une année sabbatique.

Des chômeurs pourraient ainsi retravailler et les personnes, ayant décidé de prendre une année sabbatique pour se perfectionner, dans le cadre de leur entreprise, en suivant une formation professionnelle continue ou supplémentaire, pourraient partir à moindres frais. Si ces personnes recevaient 100% de leur salaire, cette motion serait évidemment sans objet.

Du sondage opéré par ces deux professeurs, il est ressorti que plus de la moitié des personnes interrogées accepteraient, en année sabbatique, 50% de leur salaire, «voire moins». Notre deuxième invite doit d'ailleurs être complétée dans ce sens.

Ce projet est, certes, élitaire, parce que les salariés modestes ne peuvent malheureusement y prétendre. Cela dit, le partage du travail concerne aussi les classes salariales supérieures. A cet égard, notre proposition est intéressante et je souhaite en discuter en commission.

Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Quand on lit l'intitulé «Proposition de motion concernant le partage du travail par la création d'emplois motivée par des congés sabbatiques» et que l'on connaît les noms des motionnaires, on se dit : Pétarade ! Le parti libéral entame sa grande révolution culturelle !

Nous ne pouvons qu'être d'accord avec vos considérants, Messieurs les motionnaires. Depuis des années, nous tenons les mêmes propos en réclamant des moyens divers pour lutter contre le chômage. Depuis des années, nous faisons des propositions dans ce sens et, d'ailleurs, nous vous attendons sur les nôtres, à la commission de l'enseignement, en matière de formation continue. Depuis des années, nous demandons un accès facilité à la formation et au recyclage individuels et préconisons le partage du travail comme une piste possible.

Comme je doutais quelque peu de la révolution culturelle du parti libéral, j'ai lu attentivement l'exposé des motifs.

J'ai constaté que vos motivations étaient principalement d'ordres moral et social. Il nous importe, à nous aussi, de répartir le travail de manière différente et plus égalitaire, mais pour nous ce partage doit constituer le levier de régulation du marché du travail. Or votre levier est celui d'une régulation sociale pour éviter que les gens ne descendent dans la rue, pour éviter des grèves, pour éviter des problèmes de santé somatiques et psychiques, ce qui est bien. Mais le problème est que seule la motivation sociale vous intéresse.

Par conséquent, il sera utile de vous entendre en commission sur la question particulière du marché du travail.

J'attire votre attention sur un point : avec votre proposition de congé sabbatique, vous entérinez le système de rotation du personnel et les contrats à durée déterminée, les chômeurs étant appelés à ne travailler que quelques mois.

D'autre part, je souhaite vous entendre à propos de votre deuxième invite qui propose de «...remplacer les postes sabbatiques financés à 50% au moins par des chômeurs pris en charge par l'employeur et par l'assurance-chômage;». Pour moi, elle fait uniquement référence aux fameux emplois temporaires qu'il a été si difficile de vous arracher lors de la modification de la loi sur le chômage.

Pour toutes ces raisons et dans l'espoir que le parti libéral est en train de vivre sa grande révolution culturelle, nous soutiendrons le renvoi de cette motion en commission.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission de l'économie.

 

La séance est levée à 23 h 30.