République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 septembre 1997 à 17h
53e législature - 4e année - 10e session - 44e séance -autres séances de la session
No 44/VII
Jeudi 25 septembre 1997,
nuit
Présidence :
Mme Christine Sayegh,présidente
La séance est ouverte à 20 h 30.
Assistent à la séance : MM. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat, Philippe Joye, Claude Haegi, Olivier Vodoz et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
La présidente donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Hervé Dessimoz, Erica Deuber-Pauli, Marlène Dupraz, Laurette Dupuis, Luc Gilly, Claude Howald, Yvonne Humbert, Catherine Passaplan, Elisabeth Reusse-Decrey, Philippe Schaller et Yves Zehfus, députés.
3. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
La présidente. L'interpellation suivante, figurant au point 118 de l'ordre de jour, vient d'être retirée par son auteur :
e) de questions écrites.
Néant.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
La commission des travaux, sous la présidence de M. Hervé Burdet et successivement de M. Henri Duvillard, a examiné, lors des séances qui l'ont réunie les 23 et 30 janvier, 13 février, 30 avril et 25 juin 1996, l'ensemble des projets de lois de bouclement qui lui étaient soumis. A cette dernière date, la commission a décidé de soumettre à expertise un certain nombre de projets en cause pour le motif qu'ils révélaient des probables dysfonctionnements dans l'utilisation des crédits d'investissement, voire des fautes dans l'interprétation de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat (D 1 05), notamment de ses articles 52 et 55.
Les experts consultés ont remis leurs rapports à la fin de l'année dernière, de sorte que la commission a repris l'étude des projets en question dès le mois de janvier de cette année. Le 18 février 1997, elle a examiné le projet de loi cité en titre ainsi que l'expertise s'y rapportant; cette dernière fut établie par M. Gérard Portier, architecte à Genève.
En résumé, il ressort de cet examen ce qui suit:
L'ouvrage en cause a fait l'objet successivement de deux crédits d'investissement votés par le Grand Conseil le 27 janvier 1989 (PL 6271-A) et respectivement le 29 octobre 1990 (PL 6603).
Ces deux crédits se rapportaient à l'«exécution d'une glissière centrale et de pistes cyclables sur la route du Pont-Butin (RC 38)».
Le projet de loi 6603 ne portait strictement que sur la nature ou la conception de la glissière de sécurité: initialement prévue en métal, il était question de la réaliser en béton. Cette modification n'impliquait aucune plus-value. En réalité, elle comportait une moins-value. Seul le changement d'exécution de l'ouvrage justifiait le second projet de loi. Or, au moment où ce dernier fut déposé, le département des travaux publics, chargé de la gestion du crédit, avait l'intention de compléter l'opération par l'aménagement d'une voie TPG dont le coût s'élevait à environ 470 000 F (ce qui représente exactement 20% du crédit voté).
Probablement parce qu'il s'avérait que l'économie que comportait la nouvelle forme d'exécution de la glissière, ajoutée au montant de la subvention fédérale, compensait à quelques dizaines de milliers de francs près le prix supplémentaire à payer pour la voie TPG, le département n'a pas jugé nécessaire de saisir le Grand Conseil de cette modification de l'ouvrage pourtant relativement importante.
Cette omission est d'autant plus choquante que l'adjonction d'une voie pour les bus constitue, à l'évidence, une transformation du projet au moins autant sinon plus importante que le changement technologique de la glissière.
Le département des travaux publics, lors de la présentation du second projet de loi (PL 6603) au Conseil d'Etat puis au Grand Conseil, aurait dû mentionner cette adjonction majeure que comportait l'ouvrage.
Conclusion
Principalement pour ce dernier motif et parce que le présent bouclement de crédit s'inscrit dans une série d'autres projets souffrant de fautes ou de négligences de même nature, la majorité de la commission des travaux vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, par 4 voix (3 L, 1 PDC), 3 avis contraires (AdG) et 6 abstentions (2 R, 1 PDC, 2 S, 1 Ve), à refuser d'entrer en matière sur le projet de loi en question. Il conviendra d'y revenir lors de l'examen ou après l'adoption du projet modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat que la commission des travaux vient de soumettre à votre attention, ainsi qu'à votre suffrage.
Annexe: rapport de l'expert.
(PL 7382)
PROJET DE LOI
pour le bouclement du crédit de 2 350 000 F pour couvrir les frais d'exécutiondes travaux de pose d'une glissière de sécurité et de construction de pistes cyclables sur la route du Pont-Butin, entre les routes de Chancy (RC 4)et de Saint-Georges (RC 30)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Bouclement
Le bouclement du crédit de 2 350 000 F pour couvrir les frais d'exécution des travaux de pose d'une glissière de sécurité et de constuction de pistes cyclables sur la route du Pont-Butin, entre les routes de Chancy (RC 4) et de Saint-Georges (RC 30), sans demande de crédit supplémentaire, est accepté.
Article 2
Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique, du 11 janvier 1964.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Loi n° 6603 du 13 décembre 1990 ouvrant un crédit de 2 350 000 F pour couvrir les frais d'exécution des travaux de pose d'une glisière de sécurité et de construction de pistes cyclables sur la route du Pont-Butin, entre les routes de Chancy (RC 4) et de Saint-Georges (RC 30).
F
Montant voté: 2 350 000
Montant dépensé: 2 822 325
Dépassement: 472 325, soit 20%.
Ce dépassement est dû à la prise en considération de la demande faite par l'Association suisse des transports (AST) de créer une voie complémentaire réservée aux bus entre le chemin Louis-Hubert et l'arrêt des TPG situé au droit de la rue des Bossons. Cet aménagement a nécessité la construction d'une voie de circulation non comprise dans le devis initial, ainsi qu'une emprise supplémentaire avec plantation de végétaux et remise en état des clôtures, selon le détail suivant:
F
Génie civil, voie bus: 440 000
Plantations: 17 000
Clôtures: 15 000
Total dépassement: 472 000
S'agissant d'une route principale suisse (T 104), ces travaux ont bénéficié d'une subvention fédérale de 887 960 F calculée sur le montant total dépensé, y compris le dépassement précité, entraînant une économie finale de 415 635 F.
Conclusion
Au vu des éléments qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de voter le bouclement du crédit de 2 350 000 F pour couvrir les frais d'exécution des travaux de pose d'une glissière de sécurité et de construction de pistes cyclables sur la route du Pont-Butin, entre les routes de Chancy (RC 4) et de Saint-Georges (RC 30).
ANNEXE
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RAPPORT DE LA MINORITÉ
L'exposé des motifs explique clairement la raison de ce dépassement dû à la prise en considération de la demande de l'AST, actuellement ATE (Association Transport Environnement) de créer une voie complémentaire pour les TPG. Cet aménagement a coûté 472 000 F.
Sécurité, esthétique, coût furent examinés dans des séances où s'affrontaient les partisans des lobbies pro-béton et pro-métal, pourtant issus du même parti.
Le temps pressait et comme l'écrit l'expert mandaté par l'actuel président du département des travaux publics et de l'énergie (DTPE), à la demande de la majorité de la commission: «Le département des travaux publics et de l'énergie (DTP) n'a donc pas inclus le dépassement dû à la construction de la voie TPG car, de bonne foi semble-t-il, il a estimé que le dépassement de crédit serait couvert, d'une part, par l'économie réalisée en changeant de type de glissière et, d'autre part, par le montant de la subvention fédérale.
Il faut se rappeler, et je cite l'ingénieur cantonal, que ce projet de loi a été voté à la suite des accidents mortels. Le projet de loi 6271 avait pour but de continuer la berme centrale sous forme d'éléments en béton. Au Grand Conseil, un amendement, voté à quelques voix près, précisa «glissière métallique».
Le DTP, conscient du danger que représentait une glissière métallique, notamment pour les deux-roues, élabora un nouveau projet de loi, le projet de loi 6603, avec éléments de protection en béton, qui fut accepté. La voie de bus TPG et des itinéraires cyclables avec aménagements paysagers ayant été opportunément rajoutés. La participation de la Confédération de 28% fit que dans le contexte initial et final on arrive à une économie de l'ordre de 20%. Un peu plus loin dans son rapport, l'expert constate que le DTPE aurait dû, au sens strict de la loi, présenter un nouveau projet de loi modifiant le projet de loi 6603 (soit un troisième projet de loi).
La pression publique (presse, lettres de lecteurs, services de sécurité divers, associations d'usagers, communes, etc.) était forte pour une mise en place rapide de mesures de sécurité efficaces. D'autre part, des engagements avaient été pris auprès des fournisseurs et entreprises par le DTPE qui a ensuite dû négocier. Un nouveau projet de loi aurait fatalement retardé les travaux. En reprenant la fin de l'exposé des motifs du projet de loi 7382, on lit: «S'agissant d'une route principale suisse (T 104), ces travaux ont bénéficié d'une subvention fédérale de 887 960 F, calculée sur le montant dépensé, y compris le dépassement, entraînant une économie de 415 635 F.»
Rejoignant la conclusion du projet de loi 7382, je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi.
Annexes: coût final et justificatif.
ANNEXE
17
Premier débat
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Le projet de loi 6603 voté en 1989 et complémentaire au projet de loi 6271 aurait dû comporter le coût supplémentaire de 20% découlant de la création d'une voie pour les TPG, d'un coût d'environ 470 000 F.
A l'époque, le chef du département des travaux publics, toujours lui, a omis ou n'a pas jugé utile d'inclure ce montant dans le projet de loi en question qui était un projet de loi pour un crédit complémentaire. En valeur absolue, la somme est relativement modeste, mais, proportionnellement au crédit en cause, elle est importante.
Cette négligence, car il s'agit bien de cela, montre une fois de plus - et c'est encore un de ces cas douloureux qu'il échoit, malheureusement, à votre serviteur de traiter - le peu de cas que faisaient le chef du département et le Conseil d'Etat de ce parlement et de la loi sur la gestion administrative de l'Etat du 11 janvier 1964.
On vote un crédit supplémentaire pour une modification du projet, soit la création d'une glissière d'un autre type et on fait passer, sous le couvert de ce crédit, la création d'une voie TPG, mais sans la signaler aux commissaires et encore moins au Grand Conseil.
Il convient malheureusement de mettre cette infraction - car il s'agit bien d'une infraction, même si le montant est modeste - à nouveau au débit du gouvernement d'alors. C'est la raison pour laquelle la commission des travaux vous invite à ne pas entrer en matière sur ce projet, de nouveau, à titre purement exemplaire.
M. Pierre Meyll (AdG), rapporteur de minorité. M. Harmann, ingénieur cantonal, rappelait devant la commission des travaux que, au début de l'ouvrage, nous étions contraints d'agir vite, soumis à la pression qui s'exerçait en raison d'accidents mortels survenus sur ce tronçon. Si bien qu'à la commission d'alors nous avions assisté à un combat fratricide entre libéraux avec, d'un côté, ceux en faveur du métal et, de l'autre, ceux en faveur du béton. Je ne nommerai personne et ne parlerai ici que de la réalité des faits qui, même si elle dérange, convient d'être dite, afin de mettre les choses au point, puisque M. Koechlin désire entrer dans le vif du sujet.
Ensuite, nous avons entrevu la possibilité de construire cette troisième voie pour le bus. Elle était nécessaire, et nous sommes fiers de l'avoir réalisée. Si nous ne l'avions pas construite, vous nous l'auriez reproché. Je vous entends hurlant que notre programme était insuffisant, et que l'on aurait pu économiser de l'argent. C'est ce que nous avons fait et, apparemment, cela vous ennuie. Cette décision devait être prise rapidement au profit des transports publics et de la sécurité.
M. Christian Grobet (AdG). Nous parvenons, me semble-t-il, au terme des cinq ou six mauvais procès que vous m'aviez intentés. Bien entendu, ils se sont déroulés en mon absence, sans que vous n'ayez daigné m'entendre, sauf pour le cas précédent. En effet, vous avez écouté les explications que j'ai données à la commission des travaux et que le Conseil d'Etat, lui, n'a pas jugé utile de fournir pour la halle de fret dans le projet de loi, à savoir que le coût de l'ouvrage est entièrement couvert par les loyers. Il n'a pas non plus donné les explications voulues.
Monsieur Koechlin, l'acte de contrition - pourrait-on dire - dont vous nous avez gratifié, tout à l'heure, en vous plaignant de devoir évoquer cette affaire, me fait sourire. En effet, car il n'y a pas de dépassement de crédit au sujet du cas qui nous occupe, ce qui, naturellement, ne vous empêche pas d'adresser, malgré tout, des griefs à M. Grobet. Ce projet a coûté 400 000 F de moins que le crédit prévu et voté par vos soins... Mais il paraît qu'il y a tout de même de quoi m'adresser des reproches !
Je suis très fier d'avoir participé à la réalisation de cet ouvrage, dont on parle relativement peu. En effet, on a beaucoup cité les grands ouvrages de cette République, comme l'autoroute de contournement, la halle de fret, l'hôtel de police, l'université, les écoles, etc., mais la glissière de la route du Pont-Butin est peut-être la réalisation, Monsieur Koechlin, qui m'a donné le plus de satisfaction, voyez-vous, et qui a été l'un de mes dossiers les plus difficiles. (Commentaires.) Oui, c'est vrai, je fais là de l'autosatisfaction.
Cette route du Pont-Butin était une voie mortelle. Lorsque je suis arrivé au département des travaux publics, j'ai eu le souhait d'apporter plus de sécurité sur nos routes. (Commentaires.) M. Fontanet est venu me dire des paroles aimables, tout à l'heure, et je tiens tout de suite à signifier que mon discours ne s'adresse pas à son père, magistrat que je tenais en très haute estime.
Dix-huit mois ont été nécessaires pour convaincre le département de justice et police et, plus particulièrement, les services de ce département - M. Fontanet était très attentif aux avis de ces services - de réaliser une berme de sécurité. Sans faire du pathos, Mesdames et Messieurs les députés, il a fallu plusieurs morts sur ce tronçon de route pour que, enfin, le DJP et même le TCS admettent que l'on installe une berme de sécurité sur le Pont-Butin. La conséquence dramatique de cet acte - au sens où certains l'entendaient - a été la suppression d'une voie de circulation, afin de permettre la mise en place de cette berme centrale et des deux pistes cyclables pour assurer la sécurité. Il convient de noter que l'on circule très bien sur ce Pont-Butin, malgré le fait qu'il n'y ait que deux voies dans un des deux sens.
En ce qui concerne ce projet, le département des travaux publics ne construisait pas pour un autre département. Ce projet a donc traîné. Il a été l'un des plus longuement discutés en commission et sur lequel on nous a fait le plus de reproches. Nous avons dû nous rendre sur place pour mesurer la largeur de la piste cyclable. Des députés ont voulu installer du métal plutôt que des glissières modernes en béton qui sont supérieures sur le plan de la sécurité. C'est démontré. Deux étapes ont été nécessaires à l'aboutissement de cet interminable projet. Mais j'ai eu l'immense satisfaction de constater que depuis l'installation de ces bermes, soit depuis dix ans, plus aucun accident grave n'est survenu sur cette route du Pont-Butin.
Or, aujourd'hui, on me fait un procès d'intention sur cet aménagement routier et, comble d'ironie, on m'accuse d'avoir profité du chantier. Oui, nous avons profité du chantier pour réaliser ce que la loi nous demandait de faire, soit une voie consacrée aux bus. J'ai été étonné de l'abstention de certains face à la création de cette voie de bus, alors que l'ATE nous avait signalé - à juste titre - qu'il fallait la réaliser.
Monsieur Koechlin, vous êtes député depuis assez longtemps pour savoir que le financement de cette voie de bus pouvait très bien s'effectuer par les crédits routiers budgétaires annuels qui sont d'environ 7 millions. Vous savez bien que beaucoup d'aménagements routiers de ce canton - mon successeur en a fait toute une série - sont réalisés sans que l'on ait à voter des crédits «grands travaux». Dans le budget des investissements, un montant d'environ 7 millions est prévu pour les aménagements routiers.
Pourquoi avons-nous porté le coût de l'aménagement de cette voie de bus dans ce crédit routier ? Nous l'avons fait dans le but d'obtenir les subventions fédérales, dont le montant s'est élevé à 800 000 F. Il est paradoxal de se voir reprocher le paiement d'un ouvrage par un certain crédit, alors qu'il aurait pu être financé par un crédit budgétaire ordinaire. Si tel avait été le cas, vous n'auriez rien dit, mais alors on n'aurait certainement pas obtenu de subventions fédérales, car le projet n'aurait pas été inscrit dans le cadre d'un crédit voté par le Grand Conseil.
Je tenais à donner ces explications pour le Mémorial, au cas où un jour quelqu'un relirait le résumé de cette affaire, mais je dois dire, Monsieur Koechlin, que vous finissez par le plus lamentable de vos six procès.
M. Pierre Ducrest (L). L'ancien magistrat, chef du DTPE de l'époque, a l'air de s'excuser, mais il n'a pas à le faire, car l'escroquerie est patente. (Commentaires.)
Une voix. Il faut le prouver !
La présidente. Je vous prie de ne pas utiliser de vocables aux connotations pénales !
M. Pierre Ducrest. Le 9 novembre 1988, un projet de loi a été déposé devant ce Grand Conseil. Après avoir été renvoyé en commission, suite au vote du 11 janvier 1989, il est revenu devant ce Grand Conseil, afin d'être voté le 27 janvier 1989.
Or, Mesdames et Messieurs les députés, le 30 novembre 1988, pendant que la commission travaillait à plein rendement, l'AST, l'Association suisse des transports - et non pas l'ATE - a demandé l'autorisation d'ouvrir une piste pour le bus sur le même périmètre de chantier prévu. Il a reçu l'accord du magistrat alors en place. Or ce dernier n'a rien dit à la commission chargée des travaux. Comme il a l'habitude de rechercher des références dans les mémoriaux, je suis allé chercher celui du 27 janvier 1989, dans lequel il ne pipe mot de cette ligne de bus.
Dans ses conclusions, l'expert mentionne bien qu'il n'ait pas obéi à la loi de 1964, mais il lui met un bémol en disant que, de toute manière, il pensait «se requinquer» - si vous me permettez l'expression - sur la somme restante après paiement de la barrière en béton, soit 80 000 F, objet demandé par un amendement de M. Montessuit, ainsi que sur la somme d'environ 100 000 F représentant l'enveloppe totale votée le 27 janvier.
Or, si on fait l'amalgame des deux éléments, cela ne joue pas. En fait, ce magistrat n'a pas indiqué à la commission qu'il avait autorisé la construction de la fameuse voie de bus dans le périmètre du chantier, bien qu'il eût été très facile de le faire. Ainsi, nous aurions pu inclure ce coût dans le budget, augmentant ainsi le crédit qui n'apparaîtrait pas aujourd'hui avec un dépassement de 472 000 F.
C'est pour l'ouvrage que cet argent est dépensé, mais il convient de rester logique avec soi-même. On ne peut pas entrer en matière sur ce genre de choses, mais j'espère qu'aucun des magistrats, actuellement sur les bancs du Conseil d'Etat, n'a agi de même. (Commentaires.) Je n'en doute pas, mais je désire que le magistrat en question soit sanctionné par ces paroles.
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. M. Meyll parle de décision rapide. Il s'agissait de la glissière de sécurité. Pour cet ouvrage, j'en conviens et je suis d'accord avec M. Grobet, la décision devait être rapide, parce qu'il y avait une question de sécurité, et il fallait agir vite. Le département a procédé avec célérité et les travaux ont été exécutés sans retard.
Mais en ce qui concerne la voie de bus, elle a été réalisée à l'insu du Grand Conseil, un point c'est tout, et elle a coûté 440 000 F. En disant que, dans cette affaire, il n'y a pas eu de dépassement, M. Grobet montre bien qu'il n'entend rien à la gestion des crédits. A l'époque, déjà, il n'y entendait rien. Est-ce un aveu ? Lisez en page 5, les chiffres sont parlants. Il s'agit d'un dépassement de 472 000 F. Il se trouve que ce dépassement coïncide presque avec le coût de la voie de bus en question.
Vous parlez des crédits ordinaires de 7 millions d'aménagements routiers avec lesquels vous auriez pu financer cette voie. Mais vous ne l'avez pas fait, dans le but de toucher une subvention fédérale, et vous avez eu raison. Mais où vous avez eu tort - et c'est le seul tort que l'on vous reproche d'ailleurs - c'est qu'il fallait agir conformément à la loi. Ce que vous n'avez pas fait. Si vous aviez décidé, pour toucher cette subvention fédérale, qu'il valait mieux ne pas financer ces travaux avec le crédit de 7 millions en question, il fallait venir dans ce Grand Conseil demander un crédit complémentaire; ce que vous n'avez pas fait.
Cela dit, Monsieur Grobet, tout procès est lamentable, pour reprendre vos termes, surtout quand il concerne un ancien magistrat qui, par habitude, se plaisait et se plaît encore à donner des leçons aux autres, sans cesse et à toute occasion. De ces crédits de bouclement, innombrables - nous en avons traité quatre-vingt-quatre en commission, à retardement parce que vous n'avez jamais jugé utile de les présenter à temps à ce Grand Conseil. C'est votre successeur qui a dû faire effectuer cet énorme travail, difficile, car se rapportant précisément à des cas relativement anciens pour certains. Confronté à une telle situation et compte tenu du caractère répétitif de ces erreurs ou de ces errements, vous devriez adopter une attitude moins arrogante et un peu plus humble.
M. Pierre Meyll (AdG), rapporteur de minorité. Je ne sais pas s'il est judicieux de relancer un débat dans lequel M. Koechlin allume la mèche et est tout heureux de se faire plaisir, de faire de la rhétorique... (L'orateur est interrompu.) Mais arrêtez, et on s'arrêtera aussi !
La présidente. La parole n'est plus demandée !
M. Pierre Meyll, rapporteur de minorité. Si, si, si, je n'ai pas terminé !
La présidente. Ah, bien alors !
M. Pierre Meyll, rapporteur de minorité. Oui, mais comme vous n'arrivez pas à faire taire M. Vaucher, j'attends qu'il ait fini !
La présidente. Les échanges aimables sont terminés ?
M. Pierre Meyll, rapporteur de minorité. Il est inexact de parler de dépassement, puisqu'il y a une subvention fédérale de près de 900 000 F. Nous n'aurions pas eu cette subvention dans le cas où il aurait fallu attendre que ce projet revienne devant le Grand Conseil. Alors, s'il a bien fait, pourquoi le contestez-vous aujourd'hui ? Il faut clore le débat et voter ce coût. Ce sera beaucoup mieux ainsi.
La présidente. Monsieur Schneider, vous aviez demandé la parole. Ah, vous renoncez, c'est très bien ! Que dites-vous, vous avez une motion d'ordre ? Alors il fallait la formuler ! J'ai donné la parole à M. Balestra. Monsieur Balestra, tâchez d'être concis, précis, afin que nous puissions passer au vote !
M. Michel Balestra (L). Plus concis que moi, tu meures !
La présidente. Non, non, on veut tous être en vie !
M. Michel Balestra. Il est désolant de constater dans cette affaire que, à l'époque - c'était mes débuts au Grand Conseil - nous avions senti qu'un projet de loi voté le 27 janvier 1989, avec l'urgence de la sécurité, avait déplu au président du département, parce qu'il préservait une voie de circulation et qu'il prévoyait une petite barrière métallique.
Le 13 décembre 1990, on est revenu pour présenter un nouveau projet de loi, dont je me souviens des termes : «La loi ayant passé à une faible majorité et pour protéger les motards, je préférerais mettre tout de même ce que je vous avais demandé au départ, et, en plus, vous économiserez 80 000 F.»
Alors, je ne m'étais pas opposé à cela, mais j'avais l'impression de m'être fait un tout petit peu avoir. Je m'étais demandé si les plots de béton n'avaient pas déjà été commandés et si on n'avait pas attendu si longtemps dans le but de faire passer le nouveau projet de loi. Mais je n'avais pas compris que les services concernés du DTPE avaient déjà décidé l'adjonction d'une voie de TPG l'année précédente, et qu'elle aurait pu figurer dans le projet de loi.
Je me garderai de l'usage de mots excessifs, mais pour le Grand Conseil il est désolant d'avoir opté pour une barrière métallique et de se faire «emphysiquer» une barrière en béton avec, au passage et dans le même projet de loi, une voie de bus. Vous voyez la limite de notre capacité à contrôler ce qui se passe au Conseil d'Etat.
Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.
La commission des travaux du canton, sous la présidence de M. Henri Duvillard, a étudié ce projet de loi au cours de la séance du 25 mars 1997, ainsi qu'à titre préliminaire (avant son dépôt formel) le 19 novembre 1996.
Assistaient également aux travaux: MM. F. Reinhard, directeur des bâtiments, M. Gonthier, chef de division études et constructions, ainsi queM. Guscetti, ingénieur civil mandaté.
Vous trouverez dans l'exposé des motifs (Mémorial 1997, séance de février, pages 1089 et suivantes) le détail du programme des travaux.
Travaux en commission
En présentation préliminaire du 19 novembre 1996 et par note. Philippe Joye, conseiller d'Etat, le département des travaux publics et de l'énergie (DTPE) a relaté les événements qui l'ont conduit à renoncer dans un premier temps à l'exécution de cette 2e paroi, essentiellement pour des motifs économiques, tout comme un certain nombre d'autres équipements de la halle 7. Il nous a été dit, par ailleurs, que ces équipements ont été tout de même exécutés à l'insu du Grand Conseil. Cela fera l'objet d'un projet de loi de bouclement du dépassement de crédit de la halle 7. Vous trouverez dans la note et dans un courrier interdépartemental les raisons de la réactivation de ce projet. Dans le cas qui nous occupe, M. le conseiller d'Etat Joye a préféré rompre avec les habitudes départementales et respecter la procédure, tout au moins son esprit, en présentant clairement ses intentions avant la dépenses projetée, étant précisé d'entrée que le délai fixé pour la livraison de cette paroi (5 avril 1997) était incompatible avec celui du traitement d'un projet de loi au Grand Conseil.
Dans ce contexte, après avoir entendu M. Huser, directeur d'Orgexpo, appuyant la justification de cette exécution et la nécessité de maintenir un outil de travail performant face à la concurrence des organisateurs d'expositions, la commission, après dissertation sur la forme législative adéquate pour le traitement de ce projet de loi «d'urgence», a voté par 11 oui (AdG, L, PDC, R, Ve) et 2 abstentions (S) le principe de la dépense sous réserve d'un dépôt de projet de loi dans les formes.
Ce projet de loi, déposé le 22 janvier 1997, a été formellement étudié le 25 mars 1997 en commission. Le département nous a assurés que les performances d'isolation phonique convenaient aux deux utilisateurs et nous a confirmé que, contrairement à ce que le rapporteur souhaitait, la charge financière incombe à l'Etat et non aux utilisateurs. Le DTPE nous a informés de la bonne marche des travaux et du respect des délais et des coûts. Il faut relever toutefois que ces travaux différés ont provoqué une légère plus-value de 5% environ.
Vote
La commission est entrée en matière à l'unanimité des membres présents et a voté le projet de loi par 5 oui (L, R, PDC) et 3 abstentions (AdG, S).
La commission vous recommande donc de voter ce projet de loi.
Annexes: Note du 15 novembre 1996.
Courrier du CE du DEP au CE du DTPE du 11 novembre 1996.
ANNEXE 1
6
7
ANNEXE 2
Premier débat
La présidente. Il s'agit d'un rapport à l'unanimité, je vous le rappelle !
M. Pierre Meyll (AdG). Oui, je le savais, mais je désire pour la petite histoire, raconter l'affaire de ce fameux rideau...
La présidente. Je rappelle que l'on discute les conclusions du rapport et que l'on ne refait pas les travaux effectués par les commissions. On a fait cela tout le temps, et je désire que l'on soit concis.
M. Pierre Meyll. Je désire tout de même rappeler, Madame, que ce rideau avait été prévu lors de la construction de l'Arena. Il avait été convenu que l'on mettrait un rideau de sécurité et d'isolement. Ce projet a été combattu par la droite, et les libéraux notamment, qui voulait en diminuer le coût. Quelque temps après, on est revenu à la charge, afin d'installer un rideau qui nous a coûté 200 000 F de plus, simplement parce que, sous des prétextes de fausses économies, la droite n'a pas voulu de la solution initiale.
Je désire voir inscrit au Mémorial - et c'est la raison de mon intervention - que cette affaire est à mettre au compte d'une droite qui se veut complètement ignorante des problèmes de la construction, lorsque cela l'arrange...
Une voix. Ah !
La présidente. Il me semblait qu'il s'agissait d'un rapport d'unanimité...
M. Pierre Meyll. Oui, Madame, nous acceptons ce fait, mais je peux même vous dire que le projet de loi a été voté après que les travaux ont été complètement terminés.
La présidente. Voilà !
M. Dominique Hausser (S). Nous votons maintenant un crédit de 590 000 F, dépensé depuis le mois d'avril.
La présidente. Bien sûr !
M. Dominique Hausser. En novembre 1996, le conseiller d'Etat Joye a réussi à extorquer une approbation de la majorité de la commission en faveur d'un crédit de 490 000 F - et non pas 590 000 F - à laquelle les socialistes n'ont pas adhéré.
Nous nous trouvons dans une situation strictement illégale, raison pour laquelle les socialistes s'abstiendront sur ce projet.
M. Florian Barro (L), rapporteur. Je désire apporter une précision, suite aux propos de M. Meyll, au sujet du montant du surcoût - je m'étais renseigné auprès de la commission - qui ne s'élève pas à 200 000 F, mais à environ 50 000 F. Cette somme a été inscrite au procès-verbal.
Monsieur Hausser, onze personnes ont approuvé le principe du dépôt du projet de loi et l'engagement de cette dépense. Ce principe n'a pas été extorqué, comme vous l'avez dit, et vous n'avez pas à le refuser, puisque vous vous êtes abstenu. Alors gardez un tout petit peu la mesure de vos propos ! La variation du coût n'a pu être déterminée que par la procédure particulière qui a été adoptée.
Lors d'une de mes interventions au sujet de ces dépassements de crédit, je vous avais demandé de ne plus accuser le DTPE, les départements utilisateurs ou le Conseil d'Etat de mauvaise gestion, car il nous incombe, de par notre position de députés au Grand Conseil, d'assumer un certain nombre de responsabilités. Dès le moment où nous avons pris - à onze voix contre deux abstentions - la décision de permettre au département d'engager ces travaux, sous réserve d'un projet de loi déposé dans les formes, nous nous sommes engagés.
Il faut cesser de rejeter continuellement la faute sur les autres en pratiquant la politique de l'autruche. Votre participation ne doit pas se limiter à entériner les projets. A un certain moment, il convient de prendre ses responsabilités. Ce petit projet de loi est la démonstration que, à certains égards, nous sommes capables de les prendre.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. D'abord, la discussion a eu lieu au sein de la commission. Ensuite, les travaux ont été annoncés le 19 novembre 1996, terminés le 11 avril, et, maintenant, nous discutons du bouclement. Il n'y a pas dix ans d'écart.
M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur Joye, il n'y a peut-être pas dix ans d'écart, mais il n'empêche que le rapporteur de majorité a reconnu qu'il s'agissait d'une procédure un peu spéciale.
Or, qu'est-ce qu'une procédure un peu spéciale, Monsieur Barro ? C'est une procédure concernant un objet dont ce Grand Conseil ne veut pas. En l'occurrence, il s'agit d'une paroi mobile, néanmoins construite, car le Conseil d'Etat ne se soucie guère des volontés de ce législatif. En effet, sitôt que le Grand Conseil a refusé la création de cette paroi mobile, mais que le Conseil d'Etat a fait le nécessaire pour qu'elle soit construite, nous voilà saisis d'un crédit de bouclement.
Les sieurs Ducrest et Burdet se grattent la tête, mais ne trouvent rien d'anormal, même si le rapporteur de majorité annonce que la procédure est un peu spéciale. Ne pouvant incriminer M. Grobet, ils se trouvent à court d'arguments.
Tout à l'heure, en prétendant que ce genre de cas ne se présentait plus avec le Conseil d'Etat actuel, vous avez perdu une occasion de vous taire. En effet, car la paroi mobile est une chose, mais il y a aussi le restaurant, dont ce Grand Conseil ne voulait pas et qui a tout de même été construit. Ceux qui ont participé à la commission des travaux le savent, et nous serons certainement saisis d'un projet de bouclement de crédit à ce sujet, Monsieur Maitre. Mais nous n'en sommes qu'à la première étape.
Mesdames et Messieurs les députés d'en face, vous avez perdu une occasion de vous taire. Ce n'est certainement pas la première fois ni la dernière. S'il est un exemple illustrant bien la procédure particulière du gouvernement - pour reprendre les termes très choisis de M. Barro - c'est bien ce dossier !
Monsieur Joye, je vous rappelle qu'à maintes reprises vous avez émis le désir de saisir ce Grand Conseil d'un crédit de bouclement sur la rade. Vous disiez vous faire un point d'honneur de le présenter avant la fin de la législature. Nous l'attendons toujours et espérons que vous nous le communiquerez lors de la prochaine, soit l'ultime, séance de ce Grand Conseil.
Mesdames et Messieurs les députés, cessez de donner des leçons et regardez ce qui se passe chez vous ! La meilleure chose serait que vous balayiez devant votre porte ! (Applaudissements.)
M. Florian Barro (L), rapporteur. Monsieur Ferrazino, il ne s'agit pas d'un crédit de bouclement, mais d'un crédit complémentaire. Il conviendrait de lire correctement l'intitulé du titre. (Commentaires.)
La présidente. Un peu de silence !
M. Florian Barro, rapporteur. J'ai noté dans mon rapport que le Conseil d'Etat est venu à la commission des travaux, demandant l'autorisation de faire cette dépense, sous réserve d'un projet de loi dans les formes.
A la commission des travaux, nous avons pris cette responsabilité, à onze voix, y compris celles de l'Alliance de gauche, vu l'urgence de la situation, soit la dead-line fixée au 5 avril de cette année en rapport avec une exposition de haute horlogerie. Il faut cesser de dire le contraire, car nous avons pris la décision d'accepter le principe de la dépense. Soyez cohérent, lorsque vous prétendez que ce projet de loi n'est pas correct.
M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Les propos de M. Ferrazino procèdent d'un manque d'information sur toute une série de sujets. Vous faites de l'autodescription, lorsque vous utilisez le qualificatif incorrect ne reprenant que les propos d'un député qui s'est préalablement exprimé.
Cette paroi mobile n'a pas été votée dans le cadre du premier crédit, mais après un certain nombre de mois d'explications. Aussi bien les représentants de la société d'exploitation d'Arena que ceux d'Orgexpo nous ont informé de l'impossibilité d'exploiter judicieusement ces installations, lors de répétitions, à l'occasion d'un certain nombre de concerts. (Commentaires.)
Ce n'est pas à l'utilisateur que je représente, en l'occurrence la Fondation du Palais, qu'il convient de faire des reproches, car nous avions réclamé cette paroi. M. Grobet le sait très bien.
La présidente. Un peu de silence ! Pas de dialogues, je vous prie !
M. Jean-Philippe Maitre, président du Conseil d'Etat. Dès le début, la Fondation du Palais des expositions avait réclamé cette paroi mobile. Nous avons été frustrés du fait qu'elle ne figure pas dans le crédit.
Vos propos sont erronés. En effet, vous tentez de faire un procès de responsabilité au Conseil d'Etat et à la Fondation du Palais des expositions qui n'y sont pour rien.
Quant au restaurant, dont vous avez évoqué la construction dans la halle 7, il est financé par la Fondation du Palais des expositions ainsi que par un prêt octroyé sans intérêt par l'exploitant du restaurant, donc à des conditions extrêmement avantageuses et non pas par le crédit «grands travaux». Vous constatez à quel point ces affaires sont en ordre, et vous avez perdu une occasion de vous renseigner davantage.
M. Pierre Meyll (AdG). On ne renvoie pas la responsabilité au Conseil d'Etat concernant cette paroi mobile, mais il faut bien admettre qu'elle était comprise dans le premier projet de loi présenté. Les gens de la droite n'en ont pas voulu, sous prétexte qu'il fallait diminuer les prix. En même temps, il s'avérait absolument indispensable de construire un restaurant. Ceci avait été programmé. Par conséquent, il s'agit d'un manque de rigueur. En effet, il était clair que l'exposition d'horlogerie de grand luxe devait se dérouler dans un certain silence, qui ne pouvait pas être obtenu lorsque des concerts et des répétitions avaient lieu, comme celui de Johnny Halliday, par exemple. On a donc dû revenir aux solutions prévues. Il s'agit d'un manque de rigueur de la part de la droite qui veut économiser dans des domaines qu'elle connaît mal pour ensuite payer plus.
M. Christian Ferrazino (AdG). Monsieur Maitre, vos propos devraient être adressés à M. Koechlin qui nous faisait la leçon sur un dossier tout à fait similaire. Ce dernier aurait dû prendre la parole et dire que le Conseil d'Etat aurait dû demander un crédit complémentaire et, ensuite, se faire rembourser par Orgexpo. Vous ne l'avez pas fait pour le restaurant, Monsieur Maitre, bien qu'il s'agisse du même principe.
Monsieur Barro, la commission des travaux n'a pas la compétence nécessaire pour accorder un mandat; seul le Grand Conseil a pouvoir de décision en cette matière. Moins formalistes que vous, nous voterons ce crédit. Toutefois, nous entendions souligner, Monsieur Maitre, que sur vos bancs, les députés savent s'indigner lorsqu'il s'agit d'anciens projets. Mais leurs beaux raisonnements, leurs grandes leçons de gestion - M. Koechlin parlait de son pain quotidien - s'effondrent subitement devant la procédure très particulière- pour reprendre l'expression de M. Barro - adoptée par le gouvernement monocolore.
M. Claude Blanc (PDC). La différence entre avant et aujourd'hui, c'est qu'avant on faisait et on venait demander le crédit supplémentaire dix ans après au Grand Conseil; on laissait encore le soin à son successeur de le faire - on n'avait pas prévu d'avoir un successeur, d'accord, mais c'est un autre problème.
Aujourd'hui, on vient demander avant. Alors, M. Barro l'a très bien expliqué, les députés de l'Alliance de gauche l'ont accepté en commission...
Une voix. Non !
La présidente. Ecoutez ! Silence !
M. Claude Blanc. Le conseiller d'Etat Joye est venu devant la commission des travaux en parlant d'un problème d'urgence et proposant d'entreprendre les travaux sous réserve du dépôt d'un projet de loi.
Au moins, M. Joye nous a dit la vérité avant. Monsieur Grobet, vous nous avez toujours caché la vérité, et il a fallu attendre dix pour qu'elle apparaisse. Alors il faut au moins avoir l'élémentaire honnêteté de reconnaître que les méthodes ont changé, que M. Joye a eu la correction de venir à la commission des travaux pour expliquer la situation et requérir notre autorisation. La commission est d'accord, même avec les voix des députés de l'Alliance de gauche. Votre démonstration tombe à plat. Aujourd'hui les choses sont claires, avant elles étaient ténébreuses.
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je serai à disposition, durant la semaine prochaine, de quiconque désire une explication détaillée sur le désordre indicible du budget...
Une voix. ...du gouvernement !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. ...de Palexpo et d'Arena. Nous avons dû naviguer au coup par coup et, compte tenu des difficultés de coordination existantes lorsque nous avons repris ce dossier, nous nous en sommes bien tirés.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
ouvrant un crédit complémentaire pour la construction d'une 2e paroimobile, destinée à isoler phoniquement la halle 7 de Palexpo et la sallede spectacles Geneva Arena
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Un crédit complémentaire de 590 000 F (y compris TVA) est ouvert au Conseil d'Etat pour la construction d'une paroi mobile d'isolation phonique entre la halle 7 de Palexpo et la salle de spectacles Geneva Arena.
2 Ce crédit se décompose de la manière suivante:
a) construction métallique 205 000 F
b) paroi mobile 325 000 F
c) honoraires 60 000 F
590 000 F
Art. 2
Ce crédit complémentaire ne figure pas au budget d'investissement 1997. Il sera comptabilisé en une tranche unique au compte d'investissement en 1997 sous la rubrique 54.02.00.503.20, émargeant au département des travaux publics et de l'énergie.
Art. 3
Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du plan directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.
Art. 4
L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.
Art. 5
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
La commission de l'énergie et des Services industriels, sous la présidence de Mme Janine Berberat, députée, s'est saisie du projet de loi 7606 qui lui a été renvoyé par le Grand Conseil lors de sa session des 24, 25 avril et 2 mai 1997, lors de ses séances des 18 avril, 9 et 16 mai 1997. Au fil de ses travaux, elle a été assistée par les personnes suivantes: MM. Philippe Joye, conseiller d'Etat, président du département des travaux publics et de l'énergie (DTPE), Jean-Pascal Genoud, directeur de l'office cantonal de l'énergie (OCEN), et Rémi Beck, adjoint au directeur de l'OCEN.
Travaux de la commission
Présentation du nouveau projet CADIOM
Le projet de chauffage à distance CADIOM apparaît lors du débat sur le projet de loi relatif au crédit sur les Cheneviers, en septembre 1987. En mars 1991 intervient le débat sur l'étude technico-économique du projet CADIOM qui prévoit un investissement de 70 millions de francs, somme qui devait être prise en charge par les SIG pour 18 millions de francs et par l'Etat à raison de 50 millions de francs, à fonds perdus. L'Office fédéral de l'énergie laisse entendre qu'il y aurait une participation financière de sa part à un tel projet, car il présente de l'intérêt.
Un premier mandat est lancé en février 1992 pour une étude comparative et une demande de financement, car on comprend mieux l'intérêt du potentiel thermique raccordable à Onex. Le financement va provoquer une augmentation de la taxe d'incinération et au niveau de l'OCEN, on essaie de trouver d'autres modalités de financement, telles que le recours au fonds de politique énergétique.
Le 24 novembre 1994, le Conseil d'administration des SIG annonce qu'il renonce au projet CADIOM.
En mars 1995, survient un encouragement de l'Office fédéral de l'énergie qui estime que le projet CADIOM ne devrait pas être abandonné et qui demande de mettre tout en oeuvre pour sa réalisation. On parle d'une participation financière fédérale de l'ordre de 10 millions de francs. On a toujours avancé l'argument que le projet était surestimé en coût. En janvier 1996, l'OCEN est convié à l'inauguration d'un projet similaire, dans le canton de Vaud, estimé à 35 millions de francs. Un autre mandat est lancé pour tenter d'abaisser le coût du projet CADIOM.
Le 30 janvier 1996, M. C. Haegi présente un projet avec pour objectif de faire des Cheneviers une usine de production, en augmentant la part de la production électrique. A cette occasion, le projet CADIOM est ressuscité et réexaminé.
En avril 1996, on décide de reprendre l'étude depuis l'origine, avec une contrainte, soit de se fixer un prix palier à l'entrée d'Onex de 5 c le kWh. A la fin de l'étude de faisabilité (septembre 1996), on arrive à un prix encore inférieur, soit 3,2 c. Le projet est donc intéressant économiquement. Il est proposé au Conseil d'Etat d'intéresser l'économie privée et le Conseil d'Etat approuve la démarche. L'avis de préqualification est lancé en février 1997. Dix groupes ont été retenus à ce jour. Il s'agit d'un gros projet; c'est la première fois qu'on étudie un réseau de chauffage à distance avec deux sources thermiques.
Entre le projet initial et le nouveau, il y a de profondes modifications. Actuellement, dans la première étape, on ne parle que de la liaison des Cheneviers vers Onex, avec une extension possible. Le coût de la distribution d'Onex vers Le Lignon est beaucoup plus élevé, car il faut faire passer la conduite en caniveaux. La puissance thermique qu'il est possible de dégager aux Cheneviers est de 30 MW. Tout le nouveau projet voit son coût diminuer et il comporte 6 variantes. Le coût de la distribution des 30 MW disponibles jusqu'à l'entrée d'Onex tombe à 12 millions de francs. Les investissements comprennent aussi le manque à gagner (production électrique) pour l'usine des Cheneviers et on arrive finalement à un prix de 3,2 c à l'entrée d'Onex.
Financement
La démarche proposée est d'intéresser des partenaires privés à réaliser, financer et exploiter le réseau CADIOM. Pour y parvenir, il faut trouver des partenaires qui vont, d'une part, passer à la réalisation d'une telle installation et seront, d'autre part, capables de réunir les consommateurs qui vont se raccorder au réseau. Jusqu'à la remise de l'étude, l'Etat ne paiera rien; le million de francs prévu dans le projet de loi 7606 est destiné la réalisation de l'étude globale, mais ce million est conditionné. A fin octobre 1997, lorsqu'on disposera de tous les dossiers de réalisation établis par le groupe retenu pour faire l'étude, si l'étude du groupe retenu n'est pas satisfaisante, on pourra arrêter le projet et, dès lors, l'Etat devra payer l'étude réalisée au groupe qui l'aura faite pour un montant maximum de 1 million de francs. Si, par contre, le groupe auteur de l'étude est choisi pour faire la réalisation, le financement et l'exploitation du réseau, l'étude sera mise à la charge de ce dernier. Dans l'hypothèse où un autre groupe que celui retenu pour faire l'étude serait chargé de la réalisation, c'est le groupe réalisateur qui financera l'étude. Donc l'Etat n'aura à débourser un montant pouvant s'élever au maximum à 1 million de francs qu'uniquement dans le cas où aucun projet ne parviendrait à réalisation. La décision à prendre à fin octobre 1997 sera le fait d'un groupe de travail pluridisciplinaire.
Audition de la commune d'Onex - MM. J.-C. Cristin, maireet Fröhliger, responsable du service technique
M. Cristin a interpellé à plusieurs reprises le Conseil d'Etat pour savoir ce qu'il en était du projet CADIOM. La Ville d'Onex est spécialement intéressée car le projet prévoit que la Cité nouvelle serait reliée avec les Cheneviers et d'autres centrales de chauffage à distance. Cette cité a été construite en 1960 et ses chaufferies sont vétustes. Les propriétaires sont confrontés au renouvellement de leurs installations de chauffage et s'informent régulièrement de l'avancement du projet CADIOM qui résoudrait leur problème à des conditions plus favorables. La commune est également propriétaire de bâtiments dont les chaufferies doivent être renouvelées.
Lorsque les autorités communales d'Onex ont appris que le Conseil d'Etat réactivait le projet CADIOM, elles ont pris la liberté de demander à être entendues pour témoigner de leur intérêt. En effet, les financements doivent être désormais moins coûteux puisque la liaison prévue est plus courte. L'aspect écologique est également à prendre en compte. Enfin, à Onex qui accueille 17 000 habitants, lorsque ce projet chiffré sera présenté, il est vraisemblable que les propriétaires d'immeubles s'y intéresseront.
M. Fröhliger indique que ce projet intéresse également Lancy et Confignon, mais il se limite à la situation d'Onex. Il montre un plan de la commune où sont indiqués les bâtiments avec chaufferie appartenant à la commune et d'autres qui sont sous la maîtrise indirecte de la commune. La chaufferie d'Onex parc est en fonction depuis 25 ans; sa cheminée est trop proche des bâtiments locatifs. En plus, d'autres bâtiments en mains privées pourraient également être reliés à CADIOM. La puissance installée dans des bâtiments sous contrôle de la commune est de 11,7 MW. Le projet de la chaufferie d'Onex II représente à lui seul 10 MW et le projet d'Onex parc, 2 MW. En résumé, les besoins pour CADIOM sont au moins de 12 MW pour Onex. D'autres clients potentiels onésiens sont intéressés par ce projet, par exemple Locacasa.
Pour le rendre parfaitement acceptable, les coûts d'énergie résultant de ce projet devraient être inférieurs à ceux d'une solution classique. Les frais de chauffage et d'eau chaude qui seront facturés doivent être concurrentiels. Enfin, il faut prévoir que les clients vont vouloir obtenir une garantie de fourniture d'énergie.
En résumé, la commune d'Onex voit dans le nouveau projet CADIOM un net avantage environnemental et une économie possible, en particulier au niveau des frais d'entretien des installations de chauffage et grâce à la possibilité de renoncer à la construction de chaufferies nouvelles.
Audition de M. J.-C. Landry, écotoxicologue cantonal et codirecteurde la direction générale de l'environnement
M. Landry indique que l'audit des Cheneviers en 1994-95 a amené à la conclusion que cette usine ne pouvait plus en rester à la fatalité de brûler des ordures ! Il lui a été donné une mission, soit de devenir une usine productrice de biens dont le premier est l'énergie sous forme électrique ou thermique. L'usine a deux fours neufs et un four à grille ancien, qui produisent tous de l'énergie en excès. Le four rotatif est un cas à part, utilisé comme instrument à but écologique dans lequel on incinère les déchets spéciaux présentant des risques. Mais on n'arrive pas à rentabiliser environ un tiers de l'énergie produite par l'usine des Cheneviers. Actuellement, on s'en débarrasse en réchauffant l'eau du Rhône; ce n'est pas judicieux.
Du point de vue écologique, l'usine répond aux normes correspondant à l'ordonnance fédérale (OPair). D'ici à la fin mai 1997 sera déposé le projet de loi demandant l'ouverture d'un crédit d'investissement de 35 millions de francs pour l'introduction des procédés Denox.
Le projet CADIOM a été étudié pour pouvoir fonctionner tous les jours, mais l'usine ne peut pas fournir la puissance initiale de 30 MW en continu. Il est donc nécessaire de prévoir une centrale d'appoint ou de secours au niveau des Cheneviers pour y brûler des combustibles supplémentaires. On brûle ainsi 3 000 tonnes de composés organiques qui posent problème aux industries et l'on évite de devoir payer une taxe liée à l'élimination des résidus liquides non traités. Ce procédé de combustion procure un gain de production énergétique.
Avec la mise en place du projet CADIOM, il sera possible de renoncer à moderniser les installations de la centrale au mazout de Cressy, voire de renoncer totalement à cette centrale. Il en résulte une diminution globale (Cheneviers + Cressy) de l'émission de CO2.
Sur le plan de l'électricité, la production des Cheneviers (121 000 MW en 1996) devrait diminuer avec la mise en route de CADIOM; 29 000 kWh devant être soustraits de la production d'énergie électrique. Pour le1er trimestre 1997, on constate cependant que la production électrique des Cheneviers a augmenté de 14% par rapport à la même période de 1996, deux fours ayant entre-temps été changés.
Le point faible de la distribution à partir de Verbois et des Cheneviers reste la ligne électrique qui est saturée. La production d'électricité à partir de ces sites a donc ses limites. Néanmoins, on peut penser que, dans des conditions normales, il n'y aura pas de perte de production d'énergie électrique puisque la diminution due à CADIOM est compensée par la production accrue due aux fours neufs.
Le bilan du projet CADIOM est donc globalement positif, en termes écologiques, économiques et sociaux, puisqu'on diminue les émissions polluantes, celles de CO2 ou de gaz à effet de serre; on ne réchauffe plus le Rhône; on obtient une diminution de la taxe à payer et on fournit du travail par l'augmentation de la performance de l'usine.
Audition de M. B. Cordt-Møller, directeur général des Financesde l'Etat (DF)
M. Cordt-Møller explique et confirme que le projet de loi 7606 a la caractéristique d'ouvrir un crédit extraordinaire. En effet, le crédit d'investissement n'est pas prévu au budget 1997, ni au plan de trésorerie. Dans 95% des cas, les projets de loi font appel à un financement prévu ; dans les 5% restants, les projets de loi font appel à un crédit extraordinaire.M. Cordt-Møller ajoute qu'il existe 3 catégories d'investissement de l'Etat:
1. la loi budgétaire annuelle;
2. le train annuel de lois, pour lequel les montants prévus doivent être inférieurs à 2 000 000 F;
3. les grands travaux, dont les montants sont supérieurs à 2 000 000 F.
M. Cordt-Møller admet qu'en l'espèce on aurait dû mettre le présent Projet de loi dans le train annuel des lois votées avec le budget 1997, puisque son montant ne dépasse pas 2 000 000 F. Mais, le problème, c'est qu'en l'occurrence, le train de lois en question est déjà passé en décembre 1996. Si cette dépense de 1 000 000 F n'a pas été prévue au budget annuel, ni dans le train annuel de lois, il ne reste plus qu'à le traiter comme un crédit extraordinaire d'investissement qui sera approuvé par le Grand Conseil d'abord sur la base du projet de loi 7606, puis avec tous les autres crédits extraordinaires de l'exercice 1997 en même temps que le compte d'Etat 1997. La dépense sera comptabilisée dans le compte de trésorerie dit «des grands travaux».
Après d'abondantes discussions et une pesée minutieuse des intérêts en présence, après avoir en particulier insisté pour que le texte de la loi prévoie explicitement une approbation par le Grand Conseil du projet définitif avant sa réalisation (voir article 6 ci-dessous), parvenue au terme de ses travaux, auditions et réflexions, la commission de l'énergie et des Services industriels vous propose, à l'unanimité (5 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 3 AdG) et une abstention (Ve), Mesdames et Messieurs les députés, d'approuver le projet de loi 7606.
Annexe I: Extraits de l'étude «CADIOM 96, Chauffage à distance Onex»; canton de Genève, OCEN (Office cantonal de l'énergie), Genève, juin 1996.
Résumé: pages 4-8
Conclusions de l'étude pages 9-11.
Annexe II: Evaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière.
Evaluation des charges financières moyennes.
ANNEXE I
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ANNEXE II
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Premier débat
La présidente. Je vous demande votre opinion sur la proposition de traiter ensemble le point 95 et le point 114.
M. Hervé Burdet (L), rapporteur. Le point 95, soit le rapport sur CADIOM, fait partie des points en retard que le Grand Conseil aurait dû traiter dès le mois de juin. Dès lors, nous vous demandons, conformément à ce que nous avons convenu, de le traiter maintenant.
La proposition de motion qui concerne une étude complémentaire à propos du traitement des déchets n'a, en fait, rien à voir avec CADIOM. Il s'agit d'un point nouveau que nous traiterons, par la suite, en suivant l'ordre du jour. Pour l'instant, passons à CADIOM et aux problèmes énergétiques qu'il sous-tend.
Mise aux voix, la proposition de traiter la proposition de motion 1152 avec le rapport sur le projet de loi 7606 est rejetée.
La présidente. Nous ne traiterons donc que le point 95 de notre ordre du jour.
M. Hervé Burdet (L), rapporteur. Nous traitons, au point 95, un simple crédit approuvant pour un million des frais d'études liées à la construction, au financement et à l'exploitation d'un réseau de chauffage à distance, financement qui se fait par des tiers investisseurs.
L'utilisation du crédit, telle que libellée à l'article 2, est liée au résultat des études de faisabilité. En l'occurrence, le Grand Conseil ne s'engage pas beaucoup. Après d'abondantes discussions, la commission, qui a voulu examiner dans le détail l'opportunité de construire le réseau CADIOM, a approuvé, à l'unanimité, soit cinq libéraux, deux radicaux, deux démocrates-chrétiens, deux socialistes, trois Alliance de gauche - pour une fois - et une seule abstention «verte», le présent projet de loi. Alors, si après ces informations, un long débat s'installe, je n'y comprends plus rien.
M. Chaïm Nissim (Ve). Ce projet de loi est exclusivement énergétique. L'excellent rapport de mon collègue Burdet résume le travail technique de l'OCEN. Nous nous sommes demandé si l'usine des Cheneviers produisait suffisamment de mégawatts, si on pouvait les transporter à coût raisonnable jusqu'à Onex et si les gens d'Onex pouvaient payer la thermie à un prix raisonnable dans un but économique intéressant.
Le problème des écologistes - depuis, les socialistes ainsi que l'Alliance de gauche se sont ralliés à nous, Monsieur Burdet - réside dans le fait que l'étude proposée dans ce projet de loi est exclusivement énergétique. Or, dans la motion 1152, nous proposions que l'aspect de la gestion des déchets soit pris en compte dans l'étude à réaliser.
Supposons que l'on décide de brûler davantage de déchets - par exemple, en remettant en marche, le four 3 inutilisé à l'usine des Cheneviers, car elle est trop grande - pour chauffer Onex ou le Lignon. Au total, le tonnage de déchets, qui s'élève à 240 000 tonnes par an, pourrait passer - parce que l'usine a cette capacité - à 380 000 tonnes par an. Il pourrait donc augmenter d'un tiers. Si on augmentait la capacité de l'usine des Cheneviers pour chauffer Onex et le Lignon, il en résulterait un problème de gestion des déchets qui devrait être étudié aussi.
Nous ne sommes pas contre ce projet CADIOM, à condition d'étudier simultanément les deux aspects : déchets et énergie. Nous nous en sommes ouverts à MM. Genoud et Joye qui ont parfaitement compris notre point de vue. Ils étaient d'accord sur le fait que les deux études auraient pu être menées de pair. Ce procédé plus intelligent, au lieu de provoquer un retard, aurait fait évoluer le tout.
Vous venez de refuser, Mesdames et Messieurs les députés, d'étudier simultanément le projet de loi et la motion. Ce n'est pas très grave, car nous venons de préparer un amendement au projet de loi figurant au rapport de M. Burdet, à la page 7.
L'amendement consiste à ajouter à la suite de l'article 1 :
«1...tiers investisseurs. Ces études prendront en compte notamment les aspects énergétiques et gestion des déchets.»
Une fois que vous aurez voté cet amendement qui ne «mange pas de pain» - vous en conviendrez, car, lorsqu'on décide de brûler des déchets pour fabriquer de l'énergie, il est intéressant qu'une étude couvre les aspects déchets et énergie - Mesdames et Messieurs les députés, nous serons contents et nous pourrons voter ce projet de loi avec vous.
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Je tiens à confirmer les propos de M. Burdet. Ce projet de loi est d'une extrême urgence. En effet, la commune d'Onex attend non seulement l'étude mais aussi la concrétisation du chauffage à distance CADIOM. Pourquoi ? Parce qu'un nombre considérable de chaufferies publiques et privées de cette commune arrivent à fin de course.
Aujourd'hui, après trente-cinq ans de bons et loyaux services, le renouvellement du matériel s'impose. CADIOM serait la clé. Ce projet propose une solution énergétique avant-gardiste; de plus il permettrait à l'usine des Cheneviers d'optimiser ses capacités.
Enfin, CADIOM est un projet solide qui peut aussi intéresser d'autres communes. C'est la raison pour laquelle le groupe radical approuve ce projet de loi.
M. Pierre Vanek (AdG). Je souscris aux propos d'Hervé Burdet. En effet, il n'y a pas lieu d'avoir un long débat, puisque cet objet a été largement traité en commission. Nous avons entendu beaucoup de choses intéressantes et nous sommes arrivés, une fois n'est pas coutume, à des conclusions communes.
Je dirai deux choses, dont la première concerne, à la fin du rapport de M. Burdet, l'article 6 nouveau issu des travaux de la commission. Le projet de loi initial prévoyait en effet un crédit pour une étude, et, en aucune manière, il n'était prévu que ce projet revienne devant ce Grand Conseil pour une décision définitive.
Dans cette République, certains ont la sale manie de vouloir soustraire des objets au contrôle populaire que nous représentons; ceci sous des prétextes divers. Dans ce cas, le prétexte était le financement par les privés. Nous avons inséré un article 6 dans ce projet de loi, disant que la réalisation, le financement et l'exploitation, donc tous les aspects du projet de réseau de chauffage à distance CADIOM, sont soumis à l'approbation du Grand Conseil.
Je désire insister sur ce point des travaux de la commission, dont découle le fait que nous soyons arrivés à une relative unanimité sur cet objet.
J'ai bien dit qu'il fallait parler de tous les aspects. Or je ne puis approuver le rapporteur de quasi-unanimité lorsqu'il dit qu'il s'agit simplement d'un problème énergétique que l'on traitera rapidement. Il est clair que ce problème comporte aussi d'autres aspects liés mais ne se réduisant pas à la politique énergétique, tels les aspects financiers, de gestion, de contrôle ultérieur de cette installation, et, bien sûr, celui lié à la politique de gestion des déchets dans ce canton.
En conséquence, et puisque le Grand Conseil aura à connaître les résultats non pas de l'étude mais - si je lis bien l'article 1 - des études liées à la construction, au financement et à l'exploitation de ce réseau, il est opportun d'expliciter le fait que l'on tiendra compte de tous les paramètres du problème, afin que ce Grand Conseil, ou plutôt le suivant, puisse se prononcer sur cet objet en pleine connaissance de cause.
J'appuie donc l'amendement proposé par notre collègue Chaïm Nissim, qui me semble d'ailleurs n'être qu'une explicitation des intentions de l'article 1, tel qu'il est déjà libellé. En effet, s'il était dans les intentions des uns ou des autres de ne pas tenir compte du tout, pour un projet qui concerne cette usine des Cheneviers, de politique de gestion des déchets, ce serait un aveuglement stupide. Nous n'avons rien à perdre et, au contraire, beaucoup à gagner à étudier le problème à fond avant que des investissements - d'où qu'ils viennent d'ailleurs - ne soient engagés à hauteur de ce qui sera nécessaire pour réaliser cette installation, dont je rappelle que nous l'appelons également de nos voeux.
M. René Longet (S). Ce projet est intelligent, et nous sommes favorables à son étude. Toutefois, il contient une contradiction qui touche la politique en matière de déchets. Cette contradiction pourrait devenir majeure entre l'objectif visé par la politique énergétique et celui en matière de prévention des déchets. Il conviendra de l'étudier sérieusement, car nous ne donnerons notre aval que si nous sommes sûrs de ne pas marquer un auto-goal.
En effet, il serait aberrant de réduire une politique de recyclage efficace - que M. Burdet connaît bien d'ailleurs, puisqu'il en a été un des promoteurs dans les années 80 - pour chauffer la ville d'Onex avec un système de chauffage exigeant davantage de déchets à brûler.
Le projet de loi, comme l'a rappelé M. Burdet, a été corrigé en commission, afin que nous puissions considérer le résultat de l'étude. Il conviendra de le corriger une deuxième fois pour préciser - comme le disait M. Vanek - que l'étude portera également sur la cohérence avec la politique des déchets.
Nous sommes prêts à voter ce crédit ce soir avec cet amendement, car, sans cet amendement, on ne sait guère où l'on va. Ce projet ne fera probablement pas l'objet d'une longue dispute entre la gauche et la droite. Toutefois, il devrait aller de soi que l'étude inclue l'aspect «déchets». Nous en avons parlé en commission. L'amendement de M. Nissim nous permettra d'alléger l'ordre du jour. En effet, si vous le votez, non seulement vous confirmerez un élément qui concourt à la cohérence de la politique énergétique mais nous retirerons la motion prévue au point 114.
M. Jean-Claude Genecand (PDC). Notre groupe votera ce projet de loi pour deux raisons. Premièrement, après les premières estimations le coût du kWh est évalué à 3,5 centimes, ce qui est tout à fait acceptable, alors que le projet présenté en haute conjoncture s'avérait extrêmement coûteux, puisqu'il s'élevait à 70 millions. Aujourd'hui, les appréciations sont faites avec plus de réalisme, ce qui rend ce projet tout à fait réalisable.
Deuxièmement, ce projet a une valeur écologique. En effet, brûler des déchets sans valoriser la chaleur qu'ils dégagent est une perte inestimable. Par ailleurs, les chaufferies d'Onex seront remplacées, au fur et à mesure de leur vieillissement, par le chauffage à distance; ce qui diminuera notablement l'émission du CO2.
Relevons également l'expérience d'une collaboration - Etat-économie privée - qui oblige à l'établissement d'un budget équilibré. Nous avons appris, lors d'une récente commission, que le coût de l'étude se monterait à moins d'un million, ce qui doit nous encourager à prendre ce risque.
Quant à l'amendement proposé par nos collègues, il requiert une longue étude qui dépend du DIER. Nous ne pouvons l'accepter, car cette demande de crédit exige une réalisation relativement rapide. Nous pourrons en discuter lors du traitement de la motion au point 114, dont je suis d'avis qu'il faut la soutenir. Mais il n'y a pas lieu de l'intégrer au cadre de ce projet de loi, car la complexité des études qu'elle requiert risquerait de provoquer un retard considérable pour ce projet de loi. Je vous engage donc à le voter, tel qu'il nous est présenté.
M. Max Schneider (Ve). Notre amendement semble poser des problèmes. D'abord, pour rassurer M. Genecand, toutes les études concernant les déchets sont à inclure dans ce projet de loi. C'est là l'objet de l'amendement de mon collègue. Cet amendement n'est pas parfait, en ce sens que l'on demande au tiers investisseur de procéder aussi à l'étude des déchets et cela n'est pas possible. Si notre motion était passée avec le projet de loi, nous l'aurions voté sans amendement. Etant donné votre refus, nous avons dû intervenir sur ce projet de loi.
Je tiens à rassurer mes collègues de l'Entente, car ces études sont déjà faites. Elles figurent au Mémorial, à la page 2615. J'avais pris le soin de faire des photocopies du rapport d'audit Thélumée dans lequel il est parfaitement démontré que les fours 5 et 6 suffiraient à l'incinération des déchets d'origine genevoise, à court et à long terme. Le four 3 n'est nécessaire qu'à moyen terme pour incinérer les volumes de déchets d'origine vaudoise ou française.
Nous sommes cohérents avec le projet proposé qui cible sur 30 MW. Si, par contre, comme stipulé dans le rapport de M. Burdet à la page 10, on estime qu'il faut augmenter la puissance et que l'on prévoit une plage éventuelle de 60 MW dans une deuxième étape, cela nous effraie un peu.
A Genève, dans les prochaines années, nous sommes certains de réussir à diminuer le volume de déchets à incinérer, soit de diminuer aussi l'énergie fournie par cette centrale, si on améliore le recyclage, le tri des déchets et que l'on recherche d'autres manières de les traiter. M. Landry, directeur actuel de l'écotoxicologie et directeur pour l'assainissement, a certainement déjà en main toutes ces études concernant les déchets.
Voilà pourquoi nous demanderons au Conseil d'Etat qu'il fournisse ses études sur les déchets aux personnes chargées de l'étude sur le projet CADIOM. Ces personnes ne doivent pas, elles-mêmes, faire l'étude des déchets. Le DIER peut faire ce travail et en informer les tiers investisseurs, afin qu'ils tiennent compte de ce volume de déchets.
Premièrement, notre amendement ne retarde absolument pas les études. Deuxièmement, les études sur les déchets ne sont pas forcément à effectuer par les tiers investisseurs. Elles peuvent se faire au sein de l'Etat. Par conséquent, cela ne modifie ni le crédit ni le délai d'exécution. Si vous acceptez cet amendement, c'est avec vous que nous voterons ce projet CADIOM.
M. Hervé Burdet (L), rapporteur. L'analyse présentée par M. Genecand est tout à fait pertinente, et M. Schneider y souscrit à sa manière. Il n'est pas possible de retarder le vote sur ce projet, car il est urgent de faire ces études. Il n'est pas possible non plus, comme l'ont souligné MM. Genecand et Schneider, de demander au tiers investisseur, chargé d'étudier la constitution d'un réseau de chauffage à distance sur la base de rejets de chaleur de l'usine et de traitement des ordures ménagères de financer une étude qui porte sur le fonctionnement de l'usine de traitement des ordures ménagères, soit d'une fonction qui revient en propre au département de l'intérieur.
Il faut donc voter ce projet de loi sans le moindre amendement. L'amendement et l'étude qu'il suppose, nous pouvons en discuter au point 4. Je ne m'oppose pas au fait que l'on étudie d'une manière fraîche l'élimination des ordures, mais une chose ne me semble pas bien comprise, et dont on a beaucoup parlé en commission. Nous n'avons plus affaire, aux Cheneviers, à une vieille usine qui élimine des ordures ménagères et rejette le tout sous forme de rejets par la cheminée ou de pertes de chaleur dans la nature, mais à une usine polyvalente recyclant toute sorte de denrées et qui en produit d'autres; qui produit aussi de la chaleur.
L'étude qu'il vous est proposé de financer consiste à étudier la valorisation de ces rejets de chaleur. Cela n'a rien à voir avec l'élimination des déchets en soi. Vouloir joindre à l'étude de l'utilisation des rejets de chaleur une autre étude sur l'élimination des déchets, c'est tout mélanger et c'est revenir au statu quo ante d'une ancienne usine du type du début de ce siècle où l'on brûle des ordures. Cela n'a rien à voir, il faut voter ce projet sans le moindre amendement.
M. Chaïm Nissim (Ve). Je désire rompre une ou deux lances en faveur de mon amendement.
La présidente. Vous pourriez aussi le faire en deuxième débat !
M. Chaïm Nissim. Oui ! Mme de Tassigny et M. Genecand craignaient des retards au cas où l'on aurait étudié les deux aspects simultanément. Mme de Tassigny a dit très justement que les gens d'Onex attendent avec beaucoup d'impatience de pouvoir être chauffés, car leurs chaufferies arrivent à bout de course. Elles ont 35 ans pour certaines, et il faut absolument les remplacer.
Madame de Tassigny, le pire service que vous puissiez rendre aux gens d'Onex est de refuser notre amendement. De cette manière, vous en ferez un cas politique. En effet, lorsque ce projet de loi reviendra devant ce Grand Conseil, l'Alternative sera peut-être majoritaire. Alors, comme nous aurons été bloqués et irrités par toutes les querelles qui auront eu lieu ce soir, nous risquons - parce que l'étude aura été éventuellement refusée sur l'aspect déchets et que nous aurons continué à prétendre que les aspects déchets et énergie sont indissolublement liés - de nous cabrer et de refuser ce projet qui aurait été excellent avec ces deux études et que tout le monde aurait pu accepter. Ainsi, les retards risqueraient d'être encore plus importants.
Ensuite, pour ceux qui s'inquiéteraient, comme l'ont dit MM. Max Schneider et Hervé Burdet, du fait que l'on demande à des tiers investisseurs de faire une étude pour laquelle ils ne sont ni formés ni payés.
En commission, M. Joye nous a dit que la maison choisie pouvait faire l'étude pour 600 000 F, alors que le crédit prévoyait un million. Il n'est donc pas très difficile de demander à un Etat censé être homogène, au DIER et au DTPE, une étude pluridisciplinaire «énergie et déchets». Il est tout à fait vrai qu'une grande partie de l'étude «déchets» est déjà faite et que, en refusant un des deux aspects de l'étude, vous risquez de tout faire capoter par crispation politique.
Je vous demande, Monsieur Burdet - je le vois qui réfléchit et cela me fait plaisir - de réfléchir encore un petit peu...
La présidente. Pour l'instant on gère le CO2 qu'on émet ! C'est un déchet aussi !
M. Chaïm Nissim. Ce serait intéressant d'étudier les deux en même temps, cela coûterait un tout petit peu plus cher que les 600 000 F prévus, peut-être 700 000 F ou 800 000 F, mais comme on dispose d'une enveloppe d'un million, on est «tout bon», on peut y aller !
Au niveau des délais, si vous voulez, on peut spécifier dans le projet de loi...
La présidente. Vous reviendrez en deuxième débat, Monsieur le député !
M. Chaïm Nissim. ...que le délai ne sera pas supérieur.
La présidente. Voilà ! Vous reviendrez en deuxième débat !
Mme Janine Berberat (L). Messieurs les motionnaires, vous prenez le projet CADIOM en otage et vous vous livrez à une espèce de chantage. En réalité, vous ne voulez pas de CADIOM, mais bien d'une politique des déchets à votre façon. Pour Onex, vous voulez des centrales chaleur-force à la place de CADIOM.
Vous dites que les gens d'Onex ne demandent rien d'autre que de remplacer leurs chaufferies. Ils sont venus nous dire leur volonté de remplacer les chaufferies et leur intérêt pour CADIOM. Ce projet les séduit par son caractère écologique. Il est attrayant, car il abolit les rejets.
Vous prétendez qu'il faudra faire une étude complémentaire, mais vous savez qu'une étude sur les déchets a été effectuée et que les gens des Cheneviers travaillent avec le groupe pluridisciplinaire. Simplement, les résultats de cette étude ne vous conviennent pas. Mais, dans votre motion, on n'en parle pas. Il n'y est dit que ce que vous voulez bien que l'étude complémentaire dise, afin de pouvoir limiter l'exploitation des Cheneviers.
Dans le projet de loi, à l'article 6, est stipulé que, une fois l'étude effectuée, le projet CADIOM reviendra devant ce Grand Conseil. A ce moment, nous aurons toutes les données, car cette étude doit tenir compte de la réalisation, du financement et de l'exploitation. Or comment exploiter un réseau de chauffage sans tenir compte de la problématique des déchets, donc de toute façon, dans l'étude, l'utilisation et la quantité des déchets seront inclues.
Lorsque ce projet sera revenu devant le Grand Conseil, vous pourrez alors faire valoir votre conception des déchets, mais, aujourd'hui, je vous en supplie, laissez ce projet de loi aboutir, donnez un signe à des tiers, à des privés qui investissent et suivent en quelque sorte vos idées écologiques. Les mentalités changent dans les entreprises, alors acceptez cette idée.
Il vous faut aussi raisonner en termes de places de travail et, dans cette enceinte, de quelque bord que l'on soit, je ne pense pas que l'on crache dessus. Alors, je vous en prie, laissez aller de l'avant ce projet de loi ! De toute façon, le dernier mot appartiendra au Grand Conseil.
M. Max Schneider (Ve). Je me suis abstenu en commission, puis j'en ai discuté avec mes collègues. Ce soir, nous sommes venus pour approuver ce projet, Madame la présidente de commission. Or nous accuser de vouloir prendre le projet CADIOM en otage est absolument faux et injuste à notre égard.
Nous avons rédigé une motion, afin de trouver un débouché. Si l'on continue à augmenter le volume incinéré aux Cheneviers, nous risquons non seulement les rejets thermiques dans le Rhône qui forment une pollution mais également le microclimat lié à la configuration du lieu où Genève est située, entourée du Salève et du Jura et où, en hiver, et bien souvent en été, l'OPair 92 n'est plus respecté.
Madame Berberat, nous sommes confrontés à un problème de pollution de l'air absolument insupportable à long terme dans ce canton. C'est pour cette raison que nous aimerions diminuer ce volume de déchets incinérés. Les scientifiques du département du DIER, comme du DTPE, ont déjà fait des études donnant des solutions pour tenter de diminuer cette pollution et le rapport Thélumée a confirmé cette possibilité. Si l'on prend l'usine des Cheneviers, en tant qu'usine de production d'énergie électrique et de production thermique et que l'on veut la rentabiliser à tout prix, sans tenir compte des impératifs de l'environnement, il s'agit d'une autre démarche et d'un autre dialogue.
On fournira un maximum d'énergie électrique et un maximum de rejets thermiques que l'on réutilisera dans CADIOM. Mais cette démarche n'est pas la bonne. La démarche sensée est de réaliser CADIOM avec un minimum de déchets. Malheureusement, ces déchets devront toujours être incinérés dans cette République. Il convient de diminuer ce volume à incinérer pour le traiter de manière différente, comme M. Haegi l'a déjà prévu, puisqu'il veut mettre en marche un biogaz. D'autres biogaz ont été proposés dans cette République avec du compostage. C'est une très bonne idée, et on veut la réaliser.
Madame la présidente de commission, l'Alternative votera ce projet CADIOM, mais ne laissez pas de côté l'étude des déchets qui peut s'inscrire, et qui l'est déjà en partie, dans ce projet, ainsi, nous le voterons avec vous.
M. Pierre Vanek (AdG). Ce débat devient surréaliste, lorsque, Madame Berberat, vous parlez de CADIOM pris en otage. Il ne s'agit pas du tout de cela. Vous prétendez que nous ne voulons pas du projet CADIOM.
Je rappelle que l'article 6, qui sauf erreur est de la plume de notre rapporteur Burdet, indique bien que la question de savoir si l'on veut ou non ce projet sera reposée dans cette enceinte, après étude, dans une séance ultérieure. Il s'agit bien de cela, Monsieur Burdet ?
Dans son introduction, le rapporteur de quasi-unanimité indiquait que nous pouvions passer rapidement sur ce point, car il ne s'agissait pas de se prononcer sur le fond, mais bien sur un seul crédit d'étude. C'est bien de cela qu'il s'agit ce soir. Personne ne prend en otage ni ne prend position sur le fond du projet CADIOM.
La longueur du débat est due au refus d'un petit amendement. Ce dernier indique que les études de l'article 1, donc liées à la construction, au financement et à l'exploitation d'un réseau de chauffage à distance, doivent prendre en compte toute une série d'aspects. Des collègues dans cette salle demandent qu'il soit précisé que ce projet de loi doit prendre en compte explicitement les aspects énergétique et aussi les aspects de gestion des déchets. Je souscris à cette idée. Il s'agit du texte qui, malheureusement, n'a pas été distribué...
La présidente. On va le faire distribuer !
M. Pierre Vanek. On s'enflamme donc, de part et d'autre, pour peu de chose. Ces études devront prendre en compte ces aspects. Il n'y a pas de problème. Ces études ont déjà été effectuées, nous dit-on. Soit. Nous ne demandons pas de les refaire, mais de les prendre en compte, c'est le texte exact de l'amendement.
Il s'agit d'une guerre de religion sur un point absurde. Je ne vois pas pourquoi quelqu'un de normalement constitué dans cette enceinte - sauf à vouloir faire un mauvais procès à nos amis écologistes ou à d'autres personnes dans cette salle - refuserait cet amendement.
Est-ce à dire que vous ne voulez pas que ces études - pour lesquelles on vote une couverture de crédit à hauteur d'un million - prennent en compte les aspects énergétiques ? Bien sûr que non, les aspects énergétiques, Monsieur Burdet, on en parle abondamment dans le texte ! Ou encore que ces études ne prennent pas en compte l'aspect gestion des déchets, alors qu'il s'agit de se servir de ces déchets pour créer de la chaleur, notamment pour Onex ?
Vous ne pouvez qu'être d'accord. Par conséquent, votez cet amendement et faisons comme M. Burdet l'a dit, même si c'est un peu tard, évitons un trop long débat !
Mme Janine Berberat (L). Je désire vous rappeler, Monsieur Vanek, que ce crédit d'un million ne sera payé que si CADIOM ne se réalise pas. De toute façon, il s'agit d'une couverture de risques. Le projet CADIOM ne coûte rien à la République. Il est pris par des tiers investisseurs, par des privés. Je désire que vous en teniez compte.
Monsieur Schneider, vous dites que les rejets des Cheneviers sont trop conséquents. C'est exact et une demande de crédit de 35 millions est pendante devant ce Grand Conseil pour les filtres DENOX. Nous avons aussi entendu M. Landry nous dire : «Mieux on rentabilisera, moins l'usine des Cheneviers coûtera à la République, et on pourra investir pour lutter contre la pollution des rejets.»
Vouloir sous-utiliser l'usine des Cheneviers, c'est la rendre plus coûteuse aux Genevois et plus polluante à l'environnement.
La présidente. Il s'agit de votre dernière intervention, Monsieur Vanek. Je me permets de vous le rappeler !
M. Pierre Vanek (AdG). Oui, j'en suis bien conscient.
Mme Berberat m'a interpellé en disant que ce projet ne coûte rien à la République. Fort bien, nous discuterons plus tard des aspects financiers et du contrôle à exercer sur cette installation. Il est heureux que, dans cette République, certaines choses soient gratuites, mais enfin, on doit quand même en discuter !
Ce n'est pas parce que des privés investissent - s'ils investissent, c'est bien qu'ils comptent en tirer quelque profit - que l'on ne doit pas exercer de contrôle sur les investissements qui ressortissent de la politique énergétique ou de gestion des déchets publique, voulue par les citoyens de ce canton.
Votre argument, Madame Berberat, n'est pas pertinent. Le montage financier qui fait que des privés investiraient ne leur donne pas le droit de faire n'importe quoi. Nous sommes là pour le garantir, grâce à l'article 6 dû à la plume de M. Burdet.
Nous demandons que les pièces du dossier soient complètes. M. Genecand m'interpelle en disant que tout cela va rallonger les temps d'études. Mais alors votez cet amendement ! Décidément, c'est de la mauvaise volonté. (Brouhaha.)
La présidente. Un peu de silence, afin que vous sachiez ce que vous allez voter !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Tout d'abord, il y a trois ans et huit mois que nous travaillons sur CADIOM. C'est dire si le sujet est délicat, mais aussi que les responsables et les exploitants des Cheneviers ont été jusqu'à ce jour associés à tous les travaux. Jamais nous n'avons laissé de côté la question de la source d'énergie de CADIOM. Il convient de le souligner.
Il ne faut pas tout mélanger. Les installations existent et fonctionnent. L'étude de la complexité de celle qui est proposée me semble être dangereuse par rapport aux besoins d'Onex. Le programme des Cheneviers ne porte pas uniquement sur les déchets ménagers, mais sur la recherche d'autres sources d'énergie.
La question de considérer l'adéquation entre le projet CADIOM et l'évolution d'une politique des déchets ménagers à l'horizon 2020 est sous-jacente. Mais les auteurs s'interrogent sur une durée qui correspond également et exactement à la durée de la concession accordée à CADIOM.
La centrale chaleur-force des Cheneviers existe déjà, mais, à l'heure actuelle, elle ne sert qu'à chauffer le Rhône. CADIOM propose d'utiliser la chaleur à bon escient, cela, quel que soit le type de combustible fourni. L'adaptation pourra avoir lieu au fil de l'évolution des besoins dans le domaine des Cheneviers.
La présidente. Je trouve cette assemblée très bruyante. Voulez-vous faire un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Un autre problème apparaît en filigrane. Il s'agit de la concurrence qui existe avec une installation potentielle de chaleur-force à Onex, comme alternative à CADIOM. Ce ne sera jamais le cas, car l'étude de faisabilité que nous avons réalisée pour le couplage chaleur-force à Onex montre que ce résultat financier est nettement défavorable.
Comme l'a dit Mme Berberat, une partie non négligeable des chaufferies d'Onex a déjà été rénovée. Si nous traînons davantage, le potentiel d'utilisation de chaleur que représente la Cité nouvelle ne pourra pas être valorisé.
Je vous propose donc de franchir maintenant l'étape au sujet de laquelle vous avez à vous prononcer. Je puis vous assurer que les éléments de gestion des déchets seront pris en compte, car le département du DIER est et sera associé à toute la démarche. CADIOM n'a pas besoin d'une étude complémentaire pour justifier sa réalisation.
De plus, vous êtes bien gardés, puisque vous vous êtes réservé le droit de vous prononcer sur l'opportunité de réaliser le projet CADIOM au terme de l'étude, dont vous allez voter le crédit. C'est pour cette raison que je vous propose de voter le projet sec, tel qu'il est présenté.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1
La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement de M. Chaïm Nissim.
Une voix. Mais qu'est-ce que tu fais là ?
M. Chaïm Nissim (Ve). Je suis provisoirement chez les radicaux. Dupraz, tu m'acceptes dans le parti radical ?
La présidente. Monsieur Dupraz, vous vous laissez squatter, c'est incroyable !
M. John Dupraz. Exceptionnellement !
La présidente. Alors, continuez, Monsieur Nissim !
M. Chaïm Nissim. Notre présidente de la commission de l'énergie, Janine Berberat, avait raison lorsqu'elle disait que, sous le problème énergie-déchets existait un problème de fond.
Il existe effectivement, vous n'êtes pas sans l'ignorer, diverses manières d'économiser...
La présidente. On n'est pas sans l'ignorer, on s'en sert !
M. Chaïm Nissim. ...les déchets. On peut composter une partie des déchets, on peut recycler certains déchets...
La présidente. Ne refaites pas tout le débat ! Soyez concis, Monsieur le député, s'il vous plaît, car cela devient très fatigant. Je ne peux plus tenir la salle. Tout le monde est bruyant. Je ne sais pas ce qui est un déchet pour finir. Allez-y !
M. Chaïm Nissim. ...On peut recycler le verre et le papier. On peut aussi faire ce qu'a fait la Migros qui a proposé dernièrement à ses clients des berlingots beaucoup plus minces réduisant ainsi d'un facteur 10 le tonnage et le pouvoir calorifique des déchets à brûler. (Brouhaha.) (La présidente sonne sa cloche.)
Face à toutes ces méthodes, on peut opter pour deux politiques. D'une part, se dire - et c'est là où la présidente de la commission de l'énergie a raison - essayons de brûler, à l'avenir, un minimum de déchets en recyclant et en fabriquant des berlingots plus fins, etc. En brûlant ce minimum de déchets, on peut encore récupérer l'énergie pour chauffer une partie des bâtiments d'Onex.
Mais, d'autre part, on peut aussi - et c'est là le point d'achoppement - vouloir brûler davantage de déchets pour chauffer Onex, moins cher, tout en négligeant l'aspect recyclage. C'est là le sens de notre amendement. Essayer de faire les deux en même temps, soit brûler le moins de déchets possible tout en récupérant la chaleur. Il s'agit d'un point assez important, politiquement non négligeable.
La présidente. Vos explications sont claires. (Rires.) Je vous interdis de rire ! Je mets aux voix votre amendement, Monsieur Nissim, qui consiste à rajouter à la fin de l'article 1, les termes suivants :
«...tiers investisseurs. Ces études prendront en compte notamment les aspects énergétiques et gestion des déchets.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 1 est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 est adopté, de même que les articles 3 à 7.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
loi
ouvrant un crédit extraordinaire destiné à l'étude de la réalisation,du financement et de l'exploitation d'un réseau de chauffageà distance CADIOM
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Un crédit pouvant atteindre 1 000 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir les frais des études liées à la construction, au financement et à l'exploitation d'un réseau de chauffage à distance par des tiers investisseurs.
Art. 2
L'utilisation du crédit est liée au résultat des études de faisabilité. En cas de réalisation du projet, les frais des études seront couverts par les tiers investisseurs.
Art. 3
Compte d'investissement
Ce crédit ne figure pas au budget d'investissement 1997. En cas de non-réalisation du projet, il sera comptabilisé sur la rubrique 58.01.00.508.01.
Art. 4
Financement et couverture des charges financières
Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du plan directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels, dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.
Art. 5
Amortissement
L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.
Art. 6
Approbation du Grand Conseil
La réalisation, le financement et l'exploitation du réseau de chauffage à distance CADIOM sont soumis à l'approbation du Grand Conseil.
Art. 7
Loi sur la gestion administrative et financière
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.
M. Chaïm Nissim (Ve). Il s'agit de la réponse du Conseil d'Etat et non du développement de mon interpellation. M. Joye doit répondre à l'interpellation.
La La présidente. S'agit-il de la réponse ou de l'interpellation ? Dans l'ordre du jour, il était mentionné qu'il s'agissait de l'interpellation. Monsieur le conseiller d'Etat, êtes-vous prêt à répliquer à cette interpellation ou souhaitez-vous qu'on la remette à une séance ultérieure ?
M. Philippe Joye, conseiller d'Etat. Je vous serais reconnaissant de procéder ainsi.
Le Grand Conseil prend acte que ce point est renvoyé à une prochaine séance.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Lors de l'adoption de la loi sur la viticulture par le Grand Conseil le 26 mai 1972, l'ensemble des viticulteurs genevois était regroupé dans la Fédération genevoise des viticulteurs citée à l'article 19, alinéa 1. Cette fédération n'existe plus. Elle a été remplacée par l'Association des organisations viticoles de Genève qui regroupe l'Association genevoise des vignerons et encaveurs indépendants (AGVEI), l'Association des viticulteurs indépendants genevois (AVIGE) et l'Association des vignerons de la Cave de Genève (AVCG).
Dans un arrêt du 7 mai 1997, par lequel il a confirmé la légalité du fonds viticole et de son mode de perception, le Tribunal fédéral a relevé la modification qui était, en pratique, intervenue à propos des organisations agricoles consultées. Il n'en a toutefois tiré aucune conclusion juridique susceptible de remettre en cause les mécanismes prévus par la loi, s'agissant d'instance de préavis. Le Conseil d'Etat estime cependant opportun de modifier cet article, en supprimant la référence à une organisation viticole qui n'existe plus.
Au bénéfice des explications ci-dessus, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir approuver ce projet de loi.
Préconsultation
La présidente. La discussion immédiate avait été proposée par le Bureau et les chefs de groupe.
Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
modifiant la loi sur la viticulture
(M 2 50)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur la viticulture, du 26 mai 1972, est modifiée comme suit:
Art. 19, al. 1 (nouvelle teneur)
La contribution prévue à l'article 18, lettre a, est fixée par le département sur le préavis des organisations viticoles. Elle ne peut dépasser 300 F par hectare. Cette contribution est perçue par bordereau remis sans frais et sous enveloppe fermée.
9. Ordre du jour.
La présidente. Le point 118 de l'ordre du jour ayant été retiré par son auteur, soit une réplique de Mme Blanc-Kühn, nous avons terminé les objets nouveaux non traités du département de l'économie publique lors de la précédente séance.
Mme Geneviève Mottet-Durand (L). Etant donné que plusieurs objets qui figurent dans les points nouveaux ne nous sont pas parvenus à temps pour les caucus, nous avions décidé, d'un commun accord au Bureau, de les renvoyer à la séance d'octobre. Pouvez-vous nous dire de quels points il s'agit, afin que tout le monde soit au clair à ce sujet ?
La présidente. Comme ces projets ont été reçus dans le désordre, les points 38 et 39 sont remis à la prochaine séance.
10. Rapport de la commission législative chargée d'étudier les objets suivants :
Réunie sous la présidence de M. Michel Halpérin, la commission législative a traité de ces divers projets de loi les 1er et 22 novembre 1996, les 10, 17 et 31 janvier, 18 avril, 16 mai, 20 juin 1997 et 29 août 1997.
Remerciements
La commission remercie vivement M. Bernard Duport, secrétaire adjoint au département de justice et police et des transports chargé du domaine judiciaire, qui a participé à tous ses travaux, pour sa précieuse collaboration scientifique et technique.
Il faut relever l'excellent climat dans lequel se sont déroulés les travaux de la commission. L'ambiance de travail constructive, la richesse des échanges et leur haute tenue méritent d'être signalées.
Méthode de travail
La commission judiciaire, surchargée, a transmis à la commission législative, avec l'accord du Grand Conseil, toute une série de projets de loi concernant la réforme de divers points touchant le pouvoir judiciaire. Un bouquet de projets avait fleuri, en partie à la suite des élections judiciaires de 1996 et des incidents qui les avaient entachées, qu'on ne voulait pas voir se reproduire.
Divers milieux, politiques et judiciaires, ont inspiré des projets visant à donner plus d'autonomie au pouvoir judiciaire, et, en corollaire, plus de responsabilités, mais, également, plus de souplesse dans son organisation et plus de moyens pour permettre aux magistrats d'accomplir leur tâche au mieux des intérêts des justiciables.
La commission a décidé, dans un premier temps, de procéder à un grand nombre d'auditions de personnalités représentatives du monde judiciaire et politique, du barreau, de la presse. Puis, les commissaires ont étudié les divers éléments des projets de loi qui leur étaient soumis, les ont classés par thèmes, en ont discuté le principe et l'économie. S'étant mis d'accord sur ces différents points, ils ont élaboré deux projets de loi, groupant toutes les réformes envisagées, ainsi qu'un projet de modification de l'article 124 de la constitution genevoise.
Introduction
Tous ceux qui ont entendu le serment prononcé par les juges sont frappés par sa grandeur et sa beauté. Il traduit une conception de la justice idéale, qui ressemble à la belle jeune femme aveuglée, portant glaive et balance, de la statuaire médiévale, éclairée par la philosophie des Lumières.
Mais le monde, emporté par la précipitation contemporaine, attend plus, aujourd'hui, de la justice. Elle doit être non seulement équitable et incorruptible, mais aussi rapide, précise, efficace. Elle doit ménager le justiciable, ses intérêts mais aussi sa dignité et son amour-propre.
Les députés ont appelé de leurs vooeux une justice idéale, parfaite, rendue par des juges détachés des passions humaines.
Les juges, les avocats, le public ont fait le même rêve. La commission a donc tenté de rédiger un projet de loi qui favorise une justice à visage humain, plus conforme au désir général.
Une des réformes de la loi sur l'organisation judiciaire de 1941 (LOJ), avait déjà visé, en 1993, à donner plus d'autonomie au pouvoir judiciaire. Cette autonomie est d'ailleurs unanimement souhaitée par tous les acteurs du système judiciaire. Le public, par ailleurs, un peu échaudé par les incidents qui ont troublé les élections judiciaires de 1996 (avec le lot habituel de rumeurs), désire plus de transparence dans les affaires de la justice. Il ne s'agit naturellement pas de livrer en pâture à tout un chacun les insuffisances supposées de tel ou tel juge, mais de faire en sorte que, sous les yeux des citoyens genevois, la justice soit rendue de manière correcte, par des juges irréprochables. Ce dernier terme englobe non seulement une attitude morale, mais également la conscience professionnelle.
C'est pourquoi la commission législative a élaboré un projet de loi qui modifie le statut des magistrats, introduisant des nouveautés comme le travail à temps partiel, l'incompatibilité avec certaines activités lucratives annexes, amendant le serment prononcé par les juges à leur entrée en fonction. Parallèlement, pour améliorer le fonctionnement de la justice, elle a proposé l'institution d'un conseil supérieur de la magistrature (ci-après nommé CSM) nouvelle manière, plus autonome, doté de plus de pouvoir et dont la composition a été changée pour plus d'efficacité et, surtout, plus d'autorité.
Le Conseil supérieur de la magistrature aura un vrai pouvoir pour encourager, former, sévir. Les magistrats dont il aura à surveiller l'activité seront soumis à un contrôle plus sévère, qui, en fin de compte, profitera à la profession tout entière, en lui évitant la déconsidération que des manquements à la rigueur morale et professionnelle entraînent inévitablement.
Mais, pour donner ce surcroît de pouvoir et d'autonomie au CSM, il faudra réviser la constitution genevoise. Les commissaires ont estimé qu'il était stérile de soumettre les décisions de ce conseil à l'aval du Conseil d'Etat, comme c'est le cas à présent, et que, pour que la réforme projetée soit complète, il fallait que le CSM ait une totale liberté pour prendre les sanctions qui s'imposeraient, sans en référer à une autre instance.
Le peuple genevois devra donc trancher, en approuvant ou en rejetant l'abrogation des alinéas 2 et 3 de l'article 124 de la constitution genevoise qui prévoient justement le contrôle des décisions du CSM par le Conseil d'Etat.
Enfin, la commission a discuté de la «commission interpartis», formée de représentants des partis politiques et chargée officieusement de préparer les élections judiciaires. De l'avis général, cet organe fonctionne de façon satisfaisante. Plutôt que de l'institutionnaliser, il a été prévu de lui donner, par l'entremise de la députation, une information complète lorsqu'elle sera nécessitée par une élection.
Le présent rapport se présentera comme suit:
- auditions;
- discussions de la commission;
- commentaires, article par article;
- conclusion;
- textes de loi.
Auditions
Audition du procureur général, M. Bernard Bertossa, et du président de la Cour de justice et du Conseil supérieur de la magistrature, M. Pierre Heyer
M. Bertossa se montre réservé quant à une éventuelle réforme de la composition et des attributions du CSM. Il penche, d'une manière générale, pour une plus grande autonomie du pouvoir judiciaire, allant jusqu'à s'interroger sur la nécessité de la présence d'un conseiller d'Etat au CSM. Dans un autre domaine, celui des incompatibilités entre la fonction de magistrat et des activités lucratives annexes, il exprime également ses doutes sur la légitimité du pouvoir politique à s'en mêler. Il estime que les magistrats font fort bien le ménage eux-mêmes. Selon lui, les magistrats apprécieraient qu'on leur fasse confiance et il insiste sur cette dernière notion. Quant au travail à temps partiel pour les juges, il y est opposé. M. Bertossa rappelle que les magistrats sont élus directement par le peuple et il met l'accent sur l'indépendance du pouvoir judiciaire. Celui-ci, répète-t-il, est composé de personnes responsables à qui on doit faire confiance.
M. Heyer indique que le CSM a déjà réfléchi à son propre fonctionnement. L'obligation de confidentialité qui gouverne son activité fait que ses travaux ne sont jamais rendus publics. Ce manque d'information est nuisible. M. Heyer est favorable à une certaine transparence. Le CSM a une activité soutenue mais uniquement disciplinaire actuellement. La qualité du travail des magistrats n'est pas contrôlée. Son président le regrette, c'est pouquoi il estime qu'il serait bon que le conseil puisse encourager la formation continue des magistrats. La composition du CSM ne devrait pas être modifiée, et la présence de laïcs n'est pas souhaitée par ses membres actuels (bien qu'on en trouve dans d'autres institutions du même type). La durée des mandats des présidents de juridiction le préoccupe aussi, parce qu'elle diffère de celle du procureur général, par exemple. Comme ce sont les présidents qui font, de droit, partie du CSM, la composition de ce dernier change en fait tous les deux ans, ce qui nuit à la continuité de son action. M. Heyer propose donc que la durée des mandats des membres du conseil soit portée à trois ans. En ce qui concerne la commission interpartis, un organe informel composé de représentants de tous les partis politiques présents au Grand Conseil, il estime qu'elle a fait du bon travail, sérieux, courageux, lors des dernières élections judiciaires. Il lui semble superflu de l'institutionnaliser.
Il n'y a aucune voie de recours contre les décisions du CSM, sauf au Tribunal fédéral, pour arbitraire. Cela devrait être corrigé, notamment pour respecter la Convention européenne des droits de l'homme.
En ce qui concerne la publicité des décisions du CSM, sans la prôner véritablement, M. Heyer admet qu'on pourrait être plus complet sur le sujet dans des rapports annuels, par exemple. Le CSM veille à ce que chaque magistrat fasse son travail, traite ses dossiers avec diligence. Il sévit lors de manquements à cette discipline, et la procédure appliquée est conforme aux principes généraux de la procédure genevoise, avec l'assistance d'un avocat, le droit d'être entendu et de consulter son dossier. Par contre, ni l'éthique ni la moralité des magistrats ne sont contrôlées.
Audition de M. Pierre-Yves Demeule, président de l'Association des magistrats du pouvoir judiciaire, et de Mme Renée Pfister-Liechti, membres tous deux de la Cour de justice
On évoque d'abord la question du travail à temps partiel. Les deux personnes auditionnées n'y sont pas favorables, invoquant d'insolubles problèmes d'organisation. M. Demeule voit d'un bon oeil le maintien de la possibilité, pour les juges, de prononcer des arbitrages, en marge de leur travail habituel. Il pense aussi que le CSM devrait pouvoir s'occuper de la formation continue des magistrats et que la durée du mandat de ses membres devrait être modifiée, pour plus d'unité. Il ne faut pas toucher à sa composition, sauf en ce qui concerne la présence d'un membre de l'exécutif, qui va à l'encontre du principe de la séparation des pouvoirs. Mme Pfister-Liechti, comme son collègue, considère que le CSM doit, s'il veut conserver son efficacité, avoir un nombre de membres limité, et qu'il ne faut pas le politiser. Par contre, elle semble approuver le secret qui entoure toute décision du conseil.
Audition des représentants de la commission interpartis, MM. Michel Jaquet, David Lachat et Pierre-André Morand
La question du travail à temps partiel est, selon, eux, purement politique et la commission interpartis n'a pas, sur ce sujet, une opinion unanime. Pour ce qui est des arbitrages, que des juges peuvent accepter en plus de leur travail ordinaire, la commission ne s'y intéresse pas pour autant qu'ils n'entravent pas l'activité de ceux qui s'y consacrent à temps perdu. Jusqu'à présent, ce sont les présidents de juridiction qui autorisent tel ou tel juge à accepter un arbitrage. M. Morand estime que cette compétence devrait être attribuée au CSM, pour éviter les conflits d'intérêts. Il s'inquiète de la loi actuelle, qui attribue à un candidat-juge non réélu une indemnité de plusieurs centaines de milliers de francs, sans compter le coût d'une élection (environ 500 000 F) s'il n'y a pas d'élection tacite. L'indemnité de non-réelection devrait représenter au maximum 6 mois de salaire. M. Jaquet pense qu'elle devrait être versée aussi à un juge qui démissionne en cours de législature.
M. Morand pense que le CSM doit s'ouvrir sur l'extérieur et accueillir des laïcs. Le nombre de ses membres devrait être diminué. M. Jaquet estime que les juridictions devraient choisir elles-mêmes leur président. Le CSM pourrait comprendre aussi d'anciens magistrats, et le procureur général devrait en être membre de droit, comme c'est le cas actuellement.
Selon M. Morand, la publicité sur des décisions prises par le CSM doit être limitée à un cercle défini de personnes, comme la commission interpartis par exemple. C'est elle qui prépare les élections, indiquant à chaque parti concerné si ses candidats sont agréés, parce qu'ils n'ont pas été sanctionnés à l'issue d'une enquête disciplinaire.
M. Lachat pense que la commission interpartis doit être informée des décisions prises par le CSM pour pouvoir faire son travail correctement. Or, les décisions du CSM sont confidentielles. Selon lui, il faudrait que le secret qui entoure l'activité du CSM soit levé au moins pour la commission au moment des élections car, autrement, comment saurait-on si un candidat a fait l'objet d'une enquête disciplinaire, voire d'une sanction? Le risque est alors grand de proposer à l'élection un mauvais candidat.
Les compétences du CSM devraient, toujours selon eux, être élargies et permettre d'encourager la formation continue des juges. Le CSM devrait pouvoir s'autosaisir, au lieu d'attendre qu'une plainte soit déposée.
Enfin, certains membres de la commission interpartis souhaitent son institutionnalisation, qui permettrait qu'on lui communique les décisions du CSM parce qu'elle serait astreinte au secret. D'autres pensent qu'elle peut continuer de fonctionner parfaitement comme elle est actuellement. En réalité, ses membres ne font qu'examiner chaque candidature, et transmettent ensuite leur accord de principe à leur parti, qui prend la décision en dernier ressort. La commission n'a donc aucune compétence formelle, mais telle qu'elle est, elle fonctionne très bien.
Audition de Mme Sylvie Arsever, chroniqueuse judiciaire au «Journal de Genève»
Mme Arsever explique qu'elle se fait le porte-parole de ses collègues chroniqueurs judiciaires. Tous estiment que le fonctionnement du CSM laisse à désirer, qu'il répugne à sévir. Lors des élections, le CSM laisse à la commission interpartis et aux partis le soin de faire le ménage, mais sans leur donner suffisamment d'informations. Il y a là un problème. Le CSM compte trop de membres pour être efficace, et la commission interpartis devrait avoir davantage accès aux dossiers. Mme Arsever est favorable à une plus grande publicité des activités du CSM, notamment de sa jurisprudence, et à un élargissement de ses compétences, pour encourager la formation continue des juges par exemple. Quant à la commission interpartis, l'invitée estime qu'il serait bon de lui donner une plus grande légitimité, ce qui faciliterait son travail.
Audition de Mme Martine Heyer, juge à la Cour de justice, et de M. Dominique Martin-Achard, juge suppléant
Mme Heyer est favorable au travail à temps partiel. Les juges travaillent sur dossiers, il ne devrait pas être si compliqué de diviser le nombre de ces dossiers. Lorsqu'il y a des permanences à mettre sur pied, dans le domaine pénal par exemple, c'est une question d'organisation de savoir comment les répartir. On pourrait maintenir l'obligation de travailler à 100% dans certains cas, tels que les permanences ou les réunions de juridiction. Elle n'ignore pas qu'il y a chez les juges des résistances au temps partiel. Mais elle pense que bien des mères de famille ou des magistrats en fin de carrière seraient heureux de travailler moins, sans avoir une autre activité lucrative pour autant.
M. Martin-Achard est du même avis. Ancien juge de carrière, il pense que le temps partiel peut parfaitement être organisé, mais que les résistances de ses collègues ont une cause psychologique: ils craignent que la pratique du temps partiel ne dévalorise leur fonction.
Le problème des arbitrages est abordé. Selon M. Martin-Achard, il s'agit d'une manne privée, et la question est délicate. Certains juges sont amenés à en accepter beaucoup, ce qui peut porter préjudice à leur activité professionnelle. Le temps partiel ne devrait pas les favoriser. Le CSM, dans sa composition actuelle, ne devrait pas non plus pouvoir se prononcer sur l'attribution des arbitrages.
Audition de l'Association des juristes progressistes, représentée par Me Sabina Mascotto et Me Yves Aeschlimann
Mme Mascotto estime que les dernières élections judiciaires ont vu se développer une confusion regrettable entre les rôles du CSM et de la commission interpartis. Selon elle, le premier doit se contenter de ses attributions actuelles et la seconde doit faire de la politique. Il est inutile de l'institutionnaliser. La formation continue des juges devrait être du ressort de la commission de gestion du Palais de justice. Elle serait favorable à un élargissement de la composition du CSM, qui devrait comprendre tous les présidents de juridiction, ainsi que deux «sages» désignés par le Grand Conseil, sans négliger le fait que des laïcs pourraient ne pas saisir toutes les nécessités du travail de magistrat. Par contre, la présence d'avocats n'est pas souhaitable au sein du CSM. Celui-ci devrait améliorer la publicité de ses décisions, dans un but de prévention. Cela éviterait les ragots et les rumeurs. On pourrait, par exemple, publier une statistique détaillée des décisions du CSM, avec le nombre et le motif des sanctions infligées, et ces informations devraient être communiquées à la commission interpartis. Mais toutes les sanctions ne devraient pas être publiées. Quant à la qualité du travail fourni par les juges, elle est sanctionnée par les jugements en appel. Le CSM doit se limiter à examiner si le magistrat fait preuve de la diligence exigée et n'a pas à s'occuper de formation continue.
La conception de la dignité de la fonction de magistrat est abordée. Selon Mme Mascotto, est indigne le juge qui maltraite les témoins ou les parties à un procès, qui se conduit mal dans sa vie privée, en violant la LCR par exemple.
Mme Mascotto souhaite une ouverture du CSM vers l'extérieur mais n'indique pas comment elle devrait se faire.
M. Aeschlimann aborde la question des présidences de juridictions. Il estime que le mandat présidentiel devrait être renouvelable et que le critère de l'ancienneté devrait être abandonné. Pour l'indemnité versée à un magistrat sortant, elle devrait être maintenue, sauf en cas de faute grave, et même là, une suspension de traitement devrait suffire. Il ne devrait pas être nécessaire à un juge qui n'est pas représenté par son parti de se porter candidat indépendant, en obligeant à l'organisation d'élections coûteuses pour qu'il puisse toucher son indemnité. Celle-ci n'est allouée, en effet, qu'au candidat non réélu.
L'association des juristes progressistes n'est pas favorable à l'augmentation des arbitrages, qu'elle considère comme une privatisation de la justice. Les magistrats doivent se consacrer entièrement à leur fonction. Actuellement, ils se plaignent d'une surcharge de travail, il semble donc bizarre que certains acceptent un grand nombre d'arbitrages. Le CSM devrait pouvoir trancher sur cette question. Une restitution à l'Etat de 33% sur le montant des honoraires d'arbitrage, en faveur de l'assistance juridique, serait une bonne chose. Les juges devraient pouvoir continuer à être juges suppléants au Tribunal fédéral et conseillers municipaux. Les juristes progressistes sont en faveur du temps partiel pour les magistrats. Mais des problèmes pratiques risquent de se poser.
Audition de l'Ordre des avocats, représenté par Me Marc Bonnant, ancien bâtonnier
Me Bonnant expose immédiatement la vision que l'Ordre des avocats a de la magistrature. C'est un corps noble, qui doit être servi par les meilleurs. Ceux-ci peuvent provenir de tous horizons, pourvu qu'ils soient libres, inféodés à aucun pouvoir. Leur appartenance politique est secondaire. Ils devraient être choisis par un collège de «sages», composé de magistrats, d'avocats et de politiques reconnus par tous pour leur maturité et leur équilibre intérieur, et se faire un idéal élevé de leur fonction. L'élection des juges par le peuple n'est donc pas une nécessité, pour l'Ordre.
Selon Me Bonnant, le CSM actuellement ne fonctionne pas. Les meilleurs n'y siègent pas forcément, et ses compétences sont trop limitées, mal définies. Il devrait être composé des plus illustres, des plus cultivés, en nombre restreint (7 membres au maximum, dont deux avocats), et veiller non seulement au respect du devoir de diligence et d'assiduité mais aussi à la formation permanente des juges. Il constate que les magistrats n'ont en face d'eux aucun contre-pouvoir. Ils n'acceptent plus les contrôles, ignorent les avocats et n'ont pas de considération pour le pouvoir politique. Il faut leur imposer une autorité de surveillance, libre de tout corporatisme. Le CSM pourrait accueillir des avocats dans son sein mais pas de politiques, à cause du principe de la séparation des pouvoirs. De plus, des laïcs ne sont pas forcément au fait de toutes les contraintes de la fonction de magistrat.
Le Conseil de l'Ordre n'est pas unanime sur la question du travail à temps partiel. Pour des questions de coût, d'éthique de la fonction de juge qui ne saurait être que «de dépassement de soi, jusqu'à l'épuisement» si nécessaire, et aussi, parce que les femmes pourraient devenir trop nombreuses au sein de la magistrature, ce que certains craignent...
Selon Me Bonnant, un magistrat ne doit pas exercer un autre métier. Des exceptions sont tolérables: les magistrats doivent pouvoir rendre des arbitrages ou enseigner, ou être juges suppléants au Tribunal fédéral. Comme ils font partie d'un cénacle regroupant les meilleurs, ils sont souvent sollicités, et méritent donc les avantages financiers que cela leur procure. La magistrature est souvent mal considérée et peu honorée. Il est donc juste que ses membres méritants soient récompensés, par l'attribution d'arbitrages, par exemple. Mais ceux-ci doivent s'ajouter au travail habituel, et non l'entraver ou le remplacer. Ils doivent donc être approuvés par le CSM.
L'Ordre des avocats, dans une note adressée à la commission législative, demande que les magistrats exercent leur charge avec dignité, assiduité, diligence et attention.
Selon Me Bonnant, le mot dignité recouvre tous les autres. Il ne se limite pas aux bonnes manières, mais veut dire aussi conscience, rigueur et humanité. Le magistrat doit être capable de s'ouvrir et d'écouter. Le serment prononcé par les juges au moment d'entrer en fonction est capital. Il élève celui qui le prête, et anoblit ses futures entreprises. Il doit donc inclure les notions de conscience, de rigueur et d'humanité.
L'invité regrette qu'il y ait des juges de 25 ans, considérant qu'à cet âge, on est rarement «apaisé et comblé» et détaché des passions humaines. Un juge doit faire preuve non seulement d'un savoir académique, mais aussi de probité, de caractère et d'équilibre. Il a entre les mains un pouvoir tel que même ceux qui ne possèdent pas toutes ces qualités peuvent, par légèreté ou inexpérience, briser un être humain.
Dans certains pays, d'ailleurs, seuls des avocats chevronnés et comblés sont choisis pour être juges. Ils ont alors suffisamment d'expérience et de détachement pour les passions humaines pour ne pas s'impliquer personnellement dans leur travail. Un magistrat «vibrant de douleur» devrait se récuser s'il sent que l'affaire dont il aura à s'occuper est trop proche de ses propres soucis. Et il devrait pouvoir le faire sans déshonneur.
Me Bonnant ajoute que le CSM devrait être composé de femmes et d'hommes de courage, indépendants, expérimentés et soucieux des êtres humains qu'ils ont en face d'eux.
Discussions de la commission
Les textes qui ont servi de matière première au travail de la commission abordaient divers thèmes, qui se recoupaient parfois. Ce sont les suivants: introduction du travail à temps partiel pour les juges, incompatibilité de la fonction de magistrat avec d'autres activités lucratives, mode d'élection des présidents de juridiction, réforme du Conseil supérieur de la magistrature, sort financier des magistrats dont le mandat ne serait pas renouvelé, institutionnalisation de la commission interpartis (ou commission judiciaire de préavis).
Introduction du travail à temps partiel
C'est une revendication assez ancienne puisqu'on en parle depuis 20 ans. Elle s'est jusqu'ici heurtée à deux objections: l'une d'ordre pratique, l'autre d'ordre éthique et philosophique. D'abord, on s'est posé des questions de coût, de locaux, d'organisation. Mais on s'est surtout demandé si on pouvait ainsi tronçonner la fonction de magistrat. Car, d'un côté, on exige, par idéal, que les magistrats vouent toute leur attention et leur énergie à leur tâche, et, d'un autre côté, on leur permettrait de ne l'exercer qu'à demi.
Les problèmes pratiques ne semblent pas insolubles. L'administrateur du Palais de justice, lui-même, interrogé précédemment à ce sujet par la commission judiciaire, n'y voyait pas d'obstacles insurmontables. Et, en effet, le travail à temps partiel a été introduit dans bien d'autres secteurs professionnels sans provoquer le chaos que prédisaient les Cassandre.
La question de la fonction du magistrat, qui est élu par le peuple, est plus délicate. Peut-on, sans autre, la diviser en deux?
La dignité de cette fonction n'est pas, de l'avis des députés, remise en cause par l'introduction du mi-temps, pour autant que certaines limites soient posées, contrôlées par le CSM. L'incompatibilité avec d'autres activités lucratives devrait aussi pouvoir garantir la noblesse de la tâche de magistrat. De toute manière, les nécessités du service public présideront à toute décision.
Un juge peut demander de travailler à mi-temps, et nul n'y est forcé.
La commission a estimé que toutes les fonctions pourraient s'exercer à mi-temps, sauf celle de procureur général, qui doit, pour des raisons à la fois historiques et de sécurité, rester à temps complet.
Les commissaires ont refusé la possibilité de travailler non seulement à 50% (limite inférieure) ou à 100%, mais encore à d'autres pourcentages.
La solution retenue est donc soit un mi-temps, soit un temps complet, au choix et sous réserve de l'approbation du CSM, statuant sur préavis de la commission de gestion du pouvoir judiciaire et du président de la juriction concernée.
Les fonctions de juge à la Cour de cassation, président du tribunal des conflits, juge assesseur, juge suppléant et membre des Tribunaux des prud'hommes ne peuvent être exercées à mi-temps, puisqu'elles sont remplies par des non-professionnels, ouqui ne sont pas requis en permanence.
Notons qu'un seul membre de la commission était opposé à l'introduction du mi-temps, pour des raisons philosophiques essentiellement.
Incompatibilités
L'article 63 actuel de la loi sur l'organisation judiciaire (LOJ) prévoit une incompatibilité générale de la fonction de juge avec un autre emploi salarié. Il a semblé aux commissaires, comme aux auteurs de projets de loi sur ce sujet, que cette disposition était insuffisante. On sait que de nombreux juges, aux compétences professionnelles reconnues, rendent des arbitrages dans des affaires privées, à la requête des parties en cause. D'autres sont honorés d'une suppléance au Tribunal fédéral. D'autres encore ont des connaissances dont ils pourraient faire profiter les étudiants en droit, à l'université, établissant un lien plus étroit entre le Palais et l'académie (mais à titre gracieux uniquement, vu l'interdiction de toute fonction administrative salariée prévue à l'article 133 de la constitution genevoise). Il a paru juste de faire de ces cas des exceptions à la règle générale d'incompatibilité.
La création artistique et la recherche scientifique ont été également admises, pour autant qu'elles ne nuisent pas à l'exercice de la charge du magistrat concerné, ni à la dignité de sa fonction.
Par contre, il est inconcevable qu'un magistrat soit administrateur de sociétés, sauf lorsqu'il s'agit d'entités de droit public ou poursuivant un intérêt public. En fait, toute activité régulière rémunérée, en dehors de celles qui sont expressément autorisées, est incompatible avec la fonction de magistrat, et donc exclue.
L'accord du président de sa juridiction sera nécessaire pour qu'un juge puisse se livrer aux activités indiquées précédemment.
Certains juges sont conseillers municipaux. Les commissaires n'ont pas trouvé bon de l'interdire. Pour le reste, le principe de la séparation des pouvoirs consacré par la constitution genevoise exclut les juges de l'administration et du Grand Conseil.
Les arbitrages ont fait l'objet d'une étude approfondie de la part de la commission. Certains juges en font beaucoup, signe que leur compétence est reconnue. Les députés ont considéré que la possibilité de prononcer des arbitrages devait être maintenue, à la condition expresse qu'ils ne perturbent pas le travail ordinaire du magistrat. C'est pourquoi il devra obtenir l'accord de son président de juridiction avant de les accepter. Ce dernier, qui connaît parfaitement sa juridiction, est le mieux à même de décider si un juge peut accepter des arbitrages, combien, à quelle fréquence, en tenant compte des ses performances professionnelles. C'est la pratique actuelle, qui n'a donc pas été remise en cause mais précisée dans le texte légal.
Sur ces divers points, la commission a été d'un avis quasi unanime.
Mode d'élection des présidents de juridiction
L'article 2A LOJ prévoit que les présidents de la Cour de cassation, de la Cour de justice, du Tribunal de première instance, du collège des juges d'instruction et du Tribunal tutélaire et Justice de paix sont élus par le Grand Conseil selon un système de rotation, tous les deux ans. La volonté d'autonomisation du pouvoir judiciaire, désirée à la fois par les magistrats et par les députés, a tout naturellement amené les commissaires à modifier ce texte.
Désormais, les présidents de juridiction seront élus par leurs pairs, pour trois ans. Ce laps de temps a été retenu pour que les périodes de présidence s'harmonisent avec la durée de la législature judiciaire, qui est de six ans. C'était d'ailleurs aussi un voeu émis par l'association des magistrats du pouvoir judiciaire. Un président est immédiatement rééligible, mais une seule fois.
La commission a prévu, dans un article 2B, la procédure à suivre lors des élections des présidents de juridiction.
Le serment des juges et membres du ministère public
Durant les travaux de la commission et à la lumière de certaines auditions, les commissaires ont estimé qu'il y avait lieu d'amender le texte du serment prêté par les juges et les membres du Ministère public, qui leur semblait insuffisant.
Les membres de la commission attachent beaucoup d'importance au texte du serment tel qu'ils l'ont modifié. Ils ont pris soin de mentionner, outre les compétences professionnelles de rigueur, d'assiduité et de diligence, les qualités morales de dignité et, surtout, d'humanité. Cette notion particulièrement leur tient à coeur. Les justiciables, souvent entièrement étrangers au monde judiciaire se trouvent confrontés, lorsqu'ils se rendent au Palais, à un univers qui les effraie. C'est au juge de les mettre à l'aise, en les traitant avec humanité. Quant à la dignité, c'est une notion qui recouvre une façon de se comporter dans la vie et dans son travail, et qui incite au respect. Le terme est d'ailleurs couramment employé dans la loi sur le CSM et dans la jurisprudence, et l'idée en est largement admise dans les milieux judiciaires.
Le magistrat s'y engage par serment, et le CSM aura la charge de lui faire respecter sa parole, dans toutes ses acceptions.
Les termes du serment sont repris dans l'article 1 du projet de loi instituant un conseil supérieur de la magistrature qui indique la mission du CSM. Les petites différences de rédaction sont dues à ce que le texte de l'article 73 LOJ est celui d'un serment destiné à être prononcé solennellement en public, tandis que l'art. 1 est une somme de directives destinées à ceux qui devront faire respecter le serment par ceux qui l'auront prêté.
Texte des serments tel qu'il est ressortides travaux de la commission
Pour les juges:
«Je jure ou je promets solennellement:
d'être fidèle à la République et canton de Genève comme citoyen et comme juge;
de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, à l'étranger comme à l'habitant du pays;
de m'attacher strictement aux lois et à l'intention de la loi;
de remplir mon office avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Pour les membres du Ministère public:
«Je jure ou je promets solennellement:
d'être fidèle à la République et au canton de Genève comme citoyen et en ce qui concerne mon office;
de rechercher avec vigilance et de déférer aux autorités compétentes toutes les infractions aux lois et de poursuivre les contrevenants sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, l'habitant du pays comme l'étranger;
de veiller à l'observation des règlements et de défendre tous les intérêts que la société me confie, ceux des mineurs, des interdits et de toutes les personnes qui réclament une protection plus spéciale;
de m'attacher strictement aux lois et à l'intention de la loi;
de remplir mon office avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Projet de loi modifiant la loi sur l'organisation judiciaire (PL 7247-A)
Commentaire de la loi, article par article
Article 1
Article 2A nouvelle teneur: accepté à l'unanimité
Article 2B nouveau: accepté à l'unanimité
Article 60 C nouvelle teneur: accepté à l'unanimité moins 1 voix (L). La proposition de donner aux juges la possibilité de travailler à des pourcentages variables a été refusée par 3 voix (L, PDC, R) contre 2 (S, Ve).
Article 63 nouvelle teneur: accepté à l'unanimité
Article 64 nouvelle teneur: il reprend les termes de l'article 63, alinéa 2 ancien, l'ancien article 64 étant remplacé par le nouvel article 63. Adopté à l'unanimité.
Article 65 nouvelle teneur: il précise que l'article 60C (qui institue le mi-temps) et l'article 63 (sur les incompatibilités) ne s'appliquent pas aux juges à la Cour de cassation, au président du Tribunal des conflits, aux juges assesseurs ou suppléants et aux membres des Tribunaux de prud'hommes. Ces juges ne sont pas requis en permanence, ou sont des laïcs exerçant une autre profession. Il est bien évident que les règles concernant les juges professionnels ne peuvent leur être appliquées. Accepté à l'unanimité.
Article 66 nouvelle teneur: il ajoute, à la mention de l'incompatibilité de la fonction de juge avec la profession de notaire, celle d'avocat également.
Article 73, alinéas 1 et 3 nouvelle teneur: accepté à l'unanimité
Article 75A, alinéa 2, lettres f, g et h nouvelles: accepté à l'unanimité.
Article 76 nouveau: le texte devient «Les présidents sont chargés d'exercer les tâches qui leur sont confiées par la loi, notamment de convoquer les tribunaux, de les tenir en activité et de veiller à ce que tous les membres remplissent leurs fonctions avec exactitude et avec la dignité qui convient à leur caractère». Cela pour reprendre les modifications des tâches des présidents de juridiction. Accepté à l'unanimité.
Deux dispositions habituelles de droit transitoire et d'entrée en vigueur sont ajoutées, sous article 2 et article 3
Réforme du Conseil supérieur de la magistrature
Le Conseil supérieur de la magistrature (ci-après CSM) a eu, jusqu'à présent, des compétences disciplinaires uniquement. Il est chargé de veiller au bon fonctionnement des tribunaux et à ce que les juges «exercent leur charge avec dignité». En clair, cela signifie qu'il s'assure surtout que chaque juge traite les dossiers qui lui ont été attribués avec diligence, sans prendre de retard. A côté de cela, il contrôle aussi leur comportement professionnel et privé, sur dénonciation. Mais il ne se préoccupe pas de la qualité du travail des magistrats.
Composé du procureur général, des présidents de la Cour de cassation, de la Cour de justice, du Tribunal administratif, du Tribunal de première instance, du collège des juges d'instruction, du Tribunal tutélaire et de la Justice de paix, du Tribunal de la jeunesse et du conseiller d'Etat chef du département chargé de la justice et de la police, en tout 9 personnes, et présidé par le président de la Cour de justice, le CSM délibère à huis clos, et peut infliger des avertissements ou des blâmes à tout magistrat s'étant rendu coupable d'une faute dans l'exercice de sa charge ou ayant porté atteinte à la dignité de la magistrature. Il peut aussi proposer au Conseil d'Etat de priver de son traitement ou de destituer un magistrat ayant gravement failli. Ses décisions sont sans appel et restent stictement confidentielles.
Ce mode de fonctionnement a été remis en cause à plusieurs reprises, par les usagers du Palais de justice, par les observateurs, par les avocats. On estimait notamment, et cela a été dit lors des auditions, que le CSM «répugnait à sévir», que ses membres hésitaient à accabler des collègues, que des plaignants hésitaient à se plaindre et, surtout, que le secret absolu qui entourait ses décisions posait des problèmes lors de la préparation des élections judiciaires. En effet, les partis devant présenter des candidats, ils ne pouvaient savoir si ceux-ci étaient valables ou s'ils avaient reçu des blâmes pour des fautes professionnelles.
Le CSM a des compétences limitées. S'il peut infliger avertissements et blâmes, il est obligé de s'en remettre au Conseil d'Etat pour priver de son traitement un magistrat coupable de faute grave, ou pour le destituer. Il est apparu à la commission législative que ce mode de fonctionnement ne correspondait pas au désir, exprimé par toutes les personnes intéressées, d'une plus grande indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis du pouvoir exécutif. La logique voudrait que le CSM ait la haute main sur toutes les décisions disciplinaires qu'il prend. Cela lui donnerait aussi une plus grande assise, et un pouvoir accru.
Dans un autre registre, le CSM n'a aucune compétence pour ordonner à un juge qui manifesterait des lacunes dans sa formation, de les combler. Or, les juges comme les représentants d'autres professions doivent sans cesse se tenir au courant des nouveautés dans leur domaine (qu'on songe aux médecins, par exemple), et il arrive qu'on leur attribue de nouvelles charges, qui exigent d'eux une science qu'ils n'ont pas reçue à l'université. Ainsi, la récente loi donnant à un enfant le droit d'être entendu lors de la procédure en divorce de ses parents oblige le juge à avoir des connaissances en psychologie qui ne font pas partie de sa formation.
Le CSM devrait donc pouvoir ordonner à un juge de compléter sa formation.
La composition du CSM a aussi été remise en cause. Quelques-uns la trouvaient pléthorique, d'autres, insuffisante. Quant à la qualité des membres, elle était contestée également. On trouvait contraire au principe de la séparation des pouvoirs qu'un conseiller d'Etat y siège, ou bien dangereux que seuls des juges (à cette exception près) en fassent partie, et qu'ils doivent juger leurs pairs. On craignait alors un certain manque de sévérité. La commission a modifié la composition du CSM, l'augmentant légèrement, mais y introduisant des membres étrangers au sérail judiciaire.
Options de la commission législative
Mission du Conseil supérieur de la magistrature
De toutes parts, des voix se sont élevées pour que le CSM soit chargé de contrôler la qualité du travail des magistrats. Les commissaires ont voulu répondre à ce voeu. Ils ont donc modifié la mission du Conseil en le chargeant de veiller au respect des notions de rigueur (professionnelle), d'assiduité, de diligence et d'humanité, qui précisent celle de dignité.
On a vu plus haut l'importance que la commission attache à la notion d'humanité. Au point qu'elle l'a introduite dans le serment que devront prêter les futurs magistrats. Un magistrat dispose envers les justiciables d'un grand pouvoir, dont il doit faire usage de manière mesurée. Il doit faire preuve de qualités d'écoute, de respect humain.
Il s'y engage donc par serment, et le CSM sera chargé de veiller à ce qu'il le respecte.
Par ailleurs, le CSM sera bien armé désormais, humainement et juridiquement, pour pouvoir contrôler la qualité du travail des magistrats, à la lumière de la mission qui lui a été assignée dans l'article 1 du projet de loi.
Composition du Conseil
Conformément aux voeux émis par plusieurs milieux, et repris dans certains des projets de loi soumis à la commission législative, le Conseil devrait comporter, outre le Procureur général et le président de la Cour de justice, des magistrats élus par leurs pairs pour leurs qualités humaines et professionnelles reconnues, ainsi que des personnes venues d'autres horizons, et des avocats.
Le Conseil devrait donc comprendre: le procureur général, le président de la Cour de justice, 4 magistrats ou anciens magistrats de carrière élus par leurs pairs, 3 membres désignés par le Conseil d'Etat parmi des citoyens connus pour leur intégrité, leur expérience, leur conscience professionnelle et leur grande connaissance du domaine judiciaire.
Ce seront un peu les êtres «apaisés et comblés» décrits par Me Bonnant lors de son audition. Deux avocats, membres du barreau, seront aussi élus par leurs confrères, avec des critères comparables.
La durée du mandat sera de trois ans, renouvelable, pour s'ajuster à la durée de la législature judiciaire et assurer une continuité dans la politique du Conseil.
Il est évident qu'un magistrat ayant été sanctionné ne peut faire partie du Conseil, au moins pendant 5 ans. Le Conseil est le garant d'une haute tenue professionnelle et morale de la magistrature et ne peut compter en son sein une personne sanctionnée sans perdre de son autorité. La commission a veillé à ce que le remplacement de n'importe quel membre défaillant soit assuré par la loi.
Organisation
La composition du Conseil ayant été modifiée, la commission a dû changer le quorum pour la tenue des délibérations et pour la prise des décisions. Si un magistrat est mis en cause devant le Conseil, le président de sa juridiction siège au Conseil avec voix consultative.
Le Conseil pourra élaborer son propre règlement, qui ne sera plus soumis à l'approbation du Conseil d'Etat, dans le souci, exprimé plus haut, de garantir au CSM une véritable autonomie. C'est dans cet esprit que la commission législative a choisi de laisser au Conseil le soin de s'organiser (greffe, etc.).
Récusation
Les cas de récusation sont les mêmes que ceux prévus aux articles 85 à 101 LOJ
Procédure
Le président ou trois membres peuvent demander la réunion du Conseil au cas où ils auraient connaissance de faits qui pourraient entraîner des sanctions à l'égard d'un magistrat. Le Conseil peut donc s'autosaisir, ou être saisi sur plainte.
Le président peut classer les plaintes qui lui apparaissent mal fondées, mais il doit en informer les membres du Conseil. La commission estime primordial que le CSM traite tous les dossiers collégialement.
Elle a porté à 1 000 F l'amende qui peut être infligée à l'auteur d'une plainte mal fondée et téméraire.
Le plaignant et le magistrat mis en cause ont le droit de se faire assister d'un avocat, de consulter le dossier, le droit d'être entendu.
Pour le surplus, les règles de la procédure administrative s'appliqueront, si la nouvelle loi n'y déroge pas expressément.
Sanctions et mesures
Le Conseil sera chargé de veiller à ce que les magistrats qui accusent des retards dans le traitement de leur dossier, qui ne sont pas suffisamment assidus, ou rigoureux dans leur travail ou dont le comportement est répréhensible soient sanctionnés.
La seule compétence propre du Conseil, jusqu'à présent, était d'infliger un blâme ou un avertissement au magistrat qui se serait rendu coupable d'une faute. Il devait se contenter, pour les cas plus graves, de proposer au Conseil d'Etat des mesures de privation de traitement ou de destitution.
Dans le souci d'assurer au Conseil une autonomie pleine et entière, la commission propose qu'il lui revienne désormais de prononcer toutes les sanctions, de la plus légère à la plus lourde, sans en référer à une autorité extérieure au pouvoir judiciaire. Ce serait une marque de la confiance des Genevois en la capacité du Conseil et de l'ensemble des magistrats du pouvoir judiciaire à gérer eux-mêmes toutes les questions qui les concernent.
Cela, cependant, ne peut se faire sans modifier l'article 124 de la constitution genevoise dont la teneur est la suivante:
1 Sans préjudice des règles relatives à l'organisation intérieure et au fonctionnement des tribunaux et sous réserve des compétences disciplinaires du Conseil supérieur de la magistrature, le Conseil d'Etat veille à ce que les tribunaux remplissent leurs fonctions avec exactitude
2 Sur la proposition du Conseil supérieur de la magistrature, le Conseil d'Etat peut priver de leur traitement pour six mois au plus, relever de leur charge ou destituer des magistrats du pouvoir judiciaire.
3 Le Conseil d'Etat ne peut, de son propre chef, prononcer aucune sanction ni prendre aucune mesure contre un magistrat; il doit se borner en cette matière à ratifier ou à rejeter les propositions du Conseil supérieur de la magistrature.
La commission propose donc de soumettre au peuple genevois l'abrogation des alinéas 2 et 3 de cet article 124, ce qui permettra ensuite au Grand Conseil d'adopter le nouveau projet de loi. Il s'agit là, les commissaires le soulignent, d'un renforcement du pouvoir judiciaire, donc d'un acte politique important.
Enfin, et pour éviter que des magistrats fautifs ne soient obligés de se représenter à une élection judiciaire pour pouvoir toucher une indemnité de départ, le Conseil pourra priver de l'indemnité prévue par l'article 15 de la loi concernant le traitement et la retraite des magistrats du pouvoir judiciaire un magistrat qui se serait rendu coupable d'une faute grave.
Autres compétences
Pour répondre à un souhait émis par tous, le CSM pourra désormais enjoindre à un magistrat de compléter sa formation professionnelle. L'organisation de la formation permanente est laissée à la compétence de la commission de gestion du Palais de justice. Le CSM sera également compétent pour lever le secret de fonction auquel sont astreints les magistrats du pouvoir judiciaire. Cela correspond à un souhait des magistrats eux-mêmes, qui désiraient qu'une base légale désigne clairement l'autorité qui aurait cette compétence.
Décisions
Comme par le passé, les décisions du Conseil sont définitives. Seul un recours de droit public au Tribunal fédéral reste possible contre elles. Les décisions sont motivées et confidentielles. La violation de la confidentialité peut être punie d'une amende de 10 000 F au maximum, qui devrait décourager les éventuels auteurs de fuites.
Publicité
Afin que chaque personne intéressée puisse connaître la jurisprudence développée par le CSM, celui-ci devra présenter chaque année au Grand Conseil un rapport, indiquant la teneur de ses décisions importantes, en respectant l'anonymat des parties. Il s'agit de faire connaître la pratique du Conseil, dans un souci de transparence et de prévention.
Elections judiciaires
Lors des élections judiciaires de 1996, il a transpiré une information selon laquelle un des candidats avait commis des fautes professionnelles et se représentait malgré cela. La commission interpartis, ou commission judiciaire de préavis, chargée officieusement de préparer les élections judiciaires, ayant appris ce fait, a courageusement proposé de rayer ce candidat des listes. Mais la loi est ainsi faite qu'un «magistrat dont le mandat n'est pas renouvelé, bien qu'il ait fait acte de candidature (...) a droit, s'il ne bénéficie pas d'une pension, à une indemnité égale à 2 mois de traitement par année de magistrature (...)» (extrait de l'alinéa 1 de l'article 15 de la loi concernant le traitement et la retraite des magistrats du pouvoir judiciaire). La personne concernée se trouvait dans ce cas. Elle a donc dû se présenter en candidate indépendante, une élection a dû être spécialement organisée (et cela coûte environ 500 000 F à l'Etat) pour pouvoir lui assurer une indemnité qui lui permette de se reconvertir. Des députés s'en étaient émus et avaient présenté un projet de loi pour changer cela. Le projet de loi 7469 règle ce problème à l'article 6, alinéa 2.
On l'a vu, les délibérations du CSM sont confidentielles. On a vu aussi les difficultés que cela entraîne, notamment lors de la préparation des élections judiciaires. Des voix se sont élevées pour que la commission interpartis, qui est chargée de cette préparation, reçoive les informations nécessaires pour remplir sa tâche. Fallait-il l'institutionnaliser? Certains y étaient favorables, disant que le secret serait mieux gardé par des membres nommés officiellement et tenus à la confidentialité par leur statut même. D'autres ont constaté que, telle qu'elle était, la commission interpartis avait parfaitement fonctionné, et avait fait un travail sérieux et courageux.
La commission législative a choisi de ne pas institutionnaliser la commission judiciaire de préavis (commission interpartis), qui reste donc inchangée. Mais l'article 10 du projet de loi 7469 permet de lui assurer la qualité et la quantité des informations qui lui sont nécessaires pour préparer une élection judiciaire. Désormais, le président du CSM livrera les informations utiles à une représentation parlementaire désignée à cet effet et comprenant des députés de tous les groupes du Grand Conseil, qui les transmettra ensuite aux représentants de chaque parti qui se réuniront dans le cadre de la commission interpartis.
Pour les candidats qui n'ont encore jamais été magistrats, la commission législative souhaiterait qu'ils présentent une attestation de leurs qualités professionnelles établie par la commission de surveillance du barreau.
Des dispositions diverses réglant le droit réglementaire, le droit transitoire et l'entrée en vigueur de la loi complètent le projet de loi.
Projet de loi modifiant la loi sur le Conseil supérieur de la magistrature (PL 7469-A)
Chaque article a été adopté à l'unanimité.
Projet de loi constitutionnelle (PL 7458-A)
La modification de la constitution genevoise est un préalable indispensable à l'octroi d'un véritable autonomie au CSM, traduite par le fait que ses décisions les plus importantes ne seront plus soumises à l'aval du Conseil d'Etat. Ce pouvoir accru et les responsabilités qui en découlent donneront une plus grande assise au Conseil, dans le respect de la séparation des pouvoirs.
L'abrogation des alinéas 2 et 3 de l'article 124 de la constitution a été adoptée à l'unanimité.
Conclusion
La commission législative a voulu donner plus d'autonomie au pouvoir judiciaire face au pouvoir politique tout en améliorant les rapports entre les justiciables, les avocats et les magistrats. Elle a cherché des solutions de bon sens, pratiques et consensuelles. Une quasi-unanimité s'est dégagée sur presque tous les points abordés, sans clivages politiques, ce qui est digne d'être relevé. Elle vous soumet aujourd'hui le fruit de ses réflexions, Mesdames et Messieurs les députés, et vous engage à adopter les projets de loi qui vous sont soumis. Ces derniers forment un tout cohérent et logique et répondent, dans la mesure où ils en retiennent les propositions, aux préoccupations exprimées dans les projets de loi 6850, 7247, 7458, 7469, 7544 et la motion 1064.
(PL 7247)
PROJET DE LOI
modifiant la loi sur l'organisation judiciaire
(E 2 05)
(Statut des magistrats)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:
Art. 2 A (nouvelle teneur)
1 Les présidents et vice-présidents de la Cour de cassation, de la Cour de justice, du Tribunal de première instance, du collège des juges d'instruction et du Tribunal tutélaire et Justice de paix sont élus par les juges titulaires de chacune de ces juridictions, à l'exclusion des assesseurs, parmi leurs pairs.
2 Chaque président et vice-président est élu pour 3 ans et n'est immédiatement rééligible à la même fonction qu'une seule fois.
Art. 2 B (nouveau)
1 Les élections ont lieu au bulletin secret, à l'occasion d'un plénum de la juridiction auquel sont convoqués les magistrats ayant le droit de vote.
2 Est élu au premier tour le juge qui a obtenu la majorité absolue. Est élu au deuxième tour le juge qui a obtenu le plus de voix. En cas d'égalité, le premier en rang (art. 67) est proclamé élu.
3 La commission de gestion du pouvoir judiciaire valide les élections et en communique le résultat au Grand Conseil, ainsi qu'au Conseil d'Etat.
4 Les noms des présidents et vice-présidents élus sont publiés dans la Feuille d'avis officielle.
Art. 60 C (nouveau)
1 Les magistrats du pouvoir judiciaire, à l'exception du procureur général, peuvent exercer leur fonction à mi-temps.
2 En cas de vacance au sein d'une juridiction, les magistrats à temps partiel qui en font partie peuvent, dans l'ordre de leur rang au sens de l'article 67, demander à augmenter leur taux d'activité.
3 Les demandes relatives à une modification du taux d'activité sont soumises au Conseil supérieur de la magistrature, qui statue sur préavis de la Commission de gestion du pouvoir judiciaire et du président de la juridiction concernée. Le Conseil supérieur de la magistrature peut refuser les demandes ou en fixer la date de prise d'effet si cela est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de la juridiction.
4 Les dossiers sont répartis entre les magistrats qui composent une juridiction en proportion de leur taux d'activité.
Art. 63 (nouvelle teneur)
1 Les fonctions de magistrat du pouvoir judiciaire sont incompatibles avec l'exercice de toute autre activité lucrative, à l'exception de:
a) membre d'une autorité ou d'une juridiction administrative, si la qualité de magistrat est requise par la loi ou le règlement;
b) juge suppléant au Tribunal fédéral et au Tribunal fédéral des assurances;
c) enseignant universitaire, à raison de deux heures par semaine au plus, et sans rémunération;
d) arbitre.
2 Ces fonctions accessoires ne sont admises qu'avec l'accord, donné de cas en cas, du président de juridiction et dans la mesure où elles ne nuisent pas à l'exercice de la charge du magistrat concerné et au fonctionnement de sa juridiction.
3 L'exercice, même lucratif, d'une activité scientifique ou artistique est permis, dans la mesure où il est compatible avec la dignité de la fonction de magistrat et où il ne nuit pas à l'exercice de la charge du magistrat concerné et au fonctionnement de sa juridiction.
4 Les magistrats du pouvoir judiciaire ne peuvent être administrateur, associé, gérant ou représentant d'une personne morale à but lucratif, sauf lorsqu'il s'agit d'une entité de droit public ou poursuivant un intérêt public.
Art. 64 (nouvelle teneur)
La fonction de juge de paix est incompatible avec celle de membre de la fondation officielle de la jeunesse.
Art. 65 (nouvelle teneur)
Les articles 60 C et 63 ne sont pas applicables aux fonctions de juge à la Cour de cassation, président du Tribunal des conflits, juge assesseur, juge suppléant et membre des Tribunaux des prud'hommes.
Art. 66, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les incompatibilités avec la fonction de notaire et l'exercice de la profession d'avocat sont réglées par les lois régissant ces professions.
Art. 73, al. 1, 4e phrase (nouvelle teneur),al. 3, 5e phrase (nouvelle teneur)
1 Avant d'entrer en fonction, les membres des tribunaux, les juges d'instruction, les juges de paix et les juges du Tribunal de la jeunesse font devant le Grand Conseil la promesse suivante:
«Je jure ou je promets solennellement:
(...) de remplir mon office avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité».
3 Les membres du Ministère public font devant le Grand Conseil la promesse suivante:
«Je jure ou je promets solennellement:
(...)
de remplir mon office avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité.
(...)».
Art. 75 A, al. 2, lettres f, g et h (nouvelles)
f) de veiller à ce que les magistrats du pouvoir judiciaire puissent compléter leur formation professionnelle;
g) de donner au Conseil supérieur de la magistrature un préavis sur les demandes de modification de leur taux d'activité présentées par les magistrats;
h) de valider les élections des présidents et vice-président des juridictions.
Art. 76 (nouvelle teneur)
Les présidents sont chargés d'exercer les tâches qui leur sont confiées par la loi, notamment de convoquer les tribunaux, de les tenir en activité et de veiller à ce que tous les membres remplissent leurs fonctions avec exactitude et avec la dignité qui convient à leur caractère.
Art. 2
1 Les présidents et vice-présidents de juridictions en fonction lors de l'entrée en vigueur de la présente loi le restent jusqu'au terme de la période pour laquelle ils ont été élus.
2 Le serment prêté par les magistrats en fonction lors de l'entrée en vigueur de la présente loi reste valable jusqu'au terme de la période pour laquelle ils ont été élus.
Art. 3
Le Conseil d'Etat fixe l'entrée en vigueur de la présente loi.
Premier débat
Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. Pourriez-vous préciser la procédure que nous adopterons pour le vote de ces trois projets de lois en sachant qu'une modification de la constitution devra être votée par le peuple ? Je vous suggère de voter tous les projets en trois débats et, ensuite, d'attendre le vote populaire, afin que les projets entrent immédiatement en vigueur si l'abrogation est adoptée.
La présidente. En trois débats ou alors en deux débats et vous attendez le vote populaire pour voter le troisième ?
Mme Michèle Wavre, rapporteuse. En trois débats, c'est mieux !
La présidente. Tout le monde est d'accord ?
M. Claude Blanc (PDC). Je ne suis pas certain que cette idée soit très judicieuse. Normalement, lors du vote de projets de lois consécutifs à un projet de loi constitutionnelle, on vote le projet de loi constitutionnelle et on adopte les autres projets qui en dépendent en deux débats. Ensuite, on attend que le peuple se soit prononcé sur la constitution pour voter le troisième débat, sinon cela met en cause le droit de référendum sur les autres projets, qui ne pourrait pas courir, car on n'aurait pas voté sur le projet de loi constitutionnelle. Il vaut mieux liquider le problème constitutionnel, affirmer notre intention en votant les autres projets en deux débats et, ensuite, voter le troisième débat, car cela ouvre un nouveau droit de référendum.
La présidente. Tout à fait, je voulais aussi préciser cette nuance ! Monsieur Grobet ? Vous aviez la même idée ! Je vous propose de débattre des projets de lois, puis nous passerons au vote des projets les uns après les autres ou alors, voulez-vous un débat par projet ? Du moment qu'il n'y a qu'un seul rapport, il s'agit d'un débat général. Ensuite, on votera les projets en deux débats, sauf le projet constitutionnel.
M. Christian Grobet (AdG). En commission, nous avions adopté le point de vue exprimé par Mme Wavre.
M. Blanc attire notre attention sur un aspect résultant de la procédure suggérée. J'avoue avoir été quelque peu pris de court et ne pas encore avoir fait ma religion à ce propos; d'où mon hésitation à me prononcer. Peut-être devrions-nous attendre la fin de ce débat pour prendre la décision de savoir si on vote ces projets en trois débats. Cela nous laisserait un temps de réflexion.
Monsieur Blanc, le raisonnement suivant est aussi possible : si des gens décident de lancer un référendum contre les lois, il est bon qu'ils puissent le faire tout de suite, car il est un peu gênant de faire voter un article constitutionnel par le peuple, pouvant être approuvé par ce dernier, et qu'un référendum soit lancé après coup contre les lois. Je suggère donc de laisser le temps du débat à notre réflexion, afin de savoir si l'on veut procéder au troisième débat sur les lois.
La présidente. La sagesse permet de laisser le troisième débat en suspens, ou de le voter en fin de cette séance, ou à la prochaine séance. C'est peut-être raisonnable. Etes-vous opposés à ce mode de faire ?
M. Christian Ferrazino (AdG). La modification constitutionnelle, visée par ce projet de loi, concerne uniquement le contrôle du Conseil de surveillance de la magistrature par le Conseil d'Etat. Cette disposition serait abrogée. La seule modification constitutionnelle qui sera soumise à votation populaire vise à l'abrogation de l'article 124 de la constitution. Nous ne voulons plus que le Conseil d'Etat, pouvoir exécutif, soit l'autorité de surveillance du Conseil de surveillance de la magistrature, pouvoir judiciaire.
Par contre, toute une série d'autres dispositions visent, tant la composition du Conseil de surveillance de la magistrature que les compétences nouvelles que nous voulons donner à ce Conseil, ainsi que la publicité de décisions du Conseil de surveillance de la magistrature.
Toutes ces modifications législatives peuvent être votées en troisième débat. Même si, par hypothèse, le peuple ne nous suivait pas dans la modification constitutionnelle que nous proposons et consistant à abroger l'autorité de tutelle du Conseil d'Etat - telle qu'elle est exercée actuellement - il pourrait très bien accepter, sans lancer de référendum, les autres modifications législatives visant la composition et la transparence que nous désirons voir adopter par le Conseil de surveillance de la magistrature dans les décisions qu'il prendra. Il conviendra aussi que ce Conseil de surveillance de la magistrature saisisse, chaque année, le Grand Conseil d'un rapport annuel.
La réflexion se faisant au cours de ce débat, je ne vois pas d'objection à ce que nous votions l'ensemble de ces lois en trois débats, afin que, comme l'a rappelé notre collègue Grobet, dans le cas d'un référendum, on puisse trancher le tout lors d'une même votation. Cette modification constitutionnelle apparaît comme un élément essentiel, déterminant de l'ensemble du projet qui nous est soumis.
M. Christian Grobet (AdG). Il est regrettable que M. Halpérin, le président de la commission, ne soit pas dans la salle. L'Alliance de gauche a déposé un projet de loi constitutionnelle. A l'unanimité, la commission législative a décidé, Monsieur Blanc, qu'il fallait procéder par voie législative sans modifier la constitution et sans compléter la constitution.
Nous avons travaillé un projet touchant exclusivement la législation. Or, à la fin des travaux, nous nous sommes rendu compte que ce projet avait pour conséquence d'imposer une petite modification, très formelle, de la constitution. A l'inverse, pour les SI, nous avions d'abord modifié la constitution et, ensuite, voté les lois en troisième débat. Dans le projet qui nous occupe, il ne s'agit pas d'une réforme constitutionnelle, mais bien législative avec, en somme, un toilettage de la constitution. Dès lors, il n'y a pas d'objection à voter les lois en troisième débat. Ce procédé répondrait à la préoccupation des membres de la commission qui auraient voulu terminer cet objet avant la fin de la législature.
Autant j'étais réticent à un troisième débat sur la question du Réseau hospitalier, en raison du fait que ce Grand Conseil était divisé en deux, autant pour ce projet - qui est un projet d'importance faisant l'unanimité - le vote du troisième débat est justifié en fin de législature, afin d'éviter de reprendre toutes les discussions lors de la prochaine législature sur une question très technique. Je souscris donc à la proposition de Mme Wavre qui est celle de la commission. Toutefois, si des hésitations persistent, votre suggestion de fixer le troisième débat au début de la séance de jeudi prochain à 17 h pourrait être retenue, ce qui permettrait aux groupes de se décider.
La présidente. Le règlement permet le troisième débat sur proposition ou de la commission unanime, ou du Conseil d'Etat, ou du Bureau unanime. je pense que la commission a dû prendre une décision...
M. Claude Blanc (PDC). Je comprends le raisonnement de M. Grobet; toutefois une chose m'échappe. En effet, à la page 36 du rapport, le projet de loi constitutionnelle abrogeant l'article 124 de la constitution...
La présidente. Non, les alinéas 2 et 3 seulement, Monsieur !
M. Claude Blanc. Ah, seulement !
La présidente. J'ai relu une fois encore l'article; en fait, l'alinéa 1 persiste !
M. Claude Blanc. Ah, bon !
La présidente. Il s'agit uniquement de ce qui vient d'être expliqué. Je ne recommencerai pas les explications, qui étaient tout à fait exactes.
M. Claude Blanc. D'accord !
La présidente. Il s'agit des alinéas 2 et 3 par rapport au Conseil supérieur de la magistrature.
La présidente. Je propose de voter en deux débats. On décidera à la fin de la séance, tous les membres de la commission n'étant pas présents, il n'y a donc pas d'unanimité. Etes-vous tous d'accord avec le troisième débat ?
Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. Il convient de tenir compte de la lettre de Mme Bovy, présidente du Tribunal administratif. J'ai demandé que l'on présente un amendement indiquant le Tribunal administratif. Nous lui présentons nos excuses.
La présidente. En effet, tous les chefs de groupe ont reçu un courrier. La présidente du Tribunal administratif s'étonnait que sa juridiction ne soit pas soumise à ces dispositions. Nous traiterons l'amendement de Mme Michèle Wavre en deuxième débat.
PL 7247-A
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1 (souligné)
Art. 2 A (nouvelle teneur)
La présidente. Nous sommes saisis d'un amendement de la commission prévoyant d'ajouter «Tribunal administratif.», comme suit :
«1... du Tribunal de première instance, du Tribunal administratif, du collège...»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 A (nouvelle teneur) ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 B (nouveau) est adopté, de même que les articles 60 C (nouveau) à 76 (nouvelle teneur).
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que les articles 2 et 3 (soulignés).
La présidente. Nous réservons le troisième débat, dès que nous aurons voté tous les projets de lois.
PL 7469-A
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, ce projet est adopté en deuxième débat.
PL 7458-A
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
(PL 7458)
LOI constitutionnelle
modifiant la constitution de la République et canton de Genève
(A 2 00)
(Surveillance des tribunaux)
LE GRAND CONSEIL,
Décrète ce qui suit:
Article unique
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit:
Art. 124, al. 2 et 3 (abrogés)
PL 7247-A
La présidente. Souhaitez-vous différer le troisième débat ? Il y a unanimité de la commission.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
(PL 7247)
LOI
modifiant la loi sur l'organisation judiciaire
(E 2 05)
(Statut des magistrats)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit:
Art. 2 A (nouvelle teneur)
1 Les présidents et vice-présidents de la Cour de cassation, de la Cour de justice, du Tribunal de première instance, du Tribunal administratif, du collège des juges d'instruction et du Tribunal tutélaire et Justice de paix sont élus par les juges titulaires de chacune de ces juridictions, à l'exclusion des assesseurs, parmi leurs pairs.
2 Chaque président et vice-président est élu pour 3 ans et n'est immédiatement rééligible à la même fonction qu'une seule fois.
Art. 2 B (nouveau)
1 Les élections ont lieu au bulletin secret, à l'occasion d'un plénum de la juridiction auquel sont convoqués les magistrats ayant le droit de vote.
2 Est élu au premier tour le juge qui a obtenu la majorité absolue. Est élu au deuxième tour le juge qui a obtenu le plus de voix. En cas d'égalité, le premier en rang (art. 67) est proclamé élu.
3 La commission de gestion du pouvoir judiciaire valide les élections et en communique le résultat au Grand Conseil, ainsi qu'au Conseil d'Etat.
4 Les noms des présidents et vice-présidents élus sont publiés dans la Feuille d'avis officielle.
Art. 60 C (nouveau)
1 Les magistrats du pouvoir judiciaire, à l'exception du procureur général, peuvent exercer leur fonction à mi-temps.
2 En cas de vacance au sein d'une juridiction, les magistrats à temps partiel qui en font partie peuvent, dans l'ordre de leur rang au sens de l'article 67, demander à augmenter leur taux d'activité.
3 Les demandes relatives à une modification du taux d'activité sont soumises au Conseil supérieur de la magistrature, qui statue sur préavis de la Commission de gestion du pouvoir judiciaire et du président de la juridiction concernée. Le Conseil supérieur de la magistrature peut refuser les demandes ou en fixer la date de prise d'effet si cela est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de la juridiction.
4 Les dossiers sont répartis entre les magistrats qui composent une juridiction en proportion de leur taux d'activité.
Art. 63 (nouvelle teneur)
1 Les fonctions de magistrat du pouvoir judiciaire sont incompatibles avec l'exercice de toute autre activité lucrative, à l'exception de:
a) membre d'une autorité ou d'une juridiction administrative, si la qualité de magistrat est requise par la loi ou le règlement;
b) juge suppléant au Tribunal fédéral et au Tribunal fédéral des assurances;
c) enseignant universitaire, à raison de deux heures par semaine au plus, et sans rémunération;
d) arbitre.
2 Ces fonctions accessoires ne sont admises qu'avec l'accord, donné de cas en cas, du président de juridiction et dans la mesure où elles ne nuisent pas à l'exercice de la charge du magistrat concerné et au fonctionnement de sa juridiction.
3 L'exercice, même lucratif, d'une activité scientifique ou artistique est permis, dans la mesure où il est compatible avec la dignité de la fonction de magistrat et où il ne nuit pas à l'exercice de la charge du magistrat concerné et au fonctionnement de sa juridiction.
4 Les magistrats du pouvoir judiciaire ne peuvent être administrateur, associé, gérant ou représentant d'une personne morale à but lucratif, sauf lorsqu'il s'agit d'une entité de droit public ou poursuivant un intérêt public.
Art. 64 (nouvelle teneur)
La fonction de juge de paix est incompatible avec celle de membre de la fondation officielle de la jeunesse.
Art. 65 (nouvelle teneur)
Les articles 60 C et 63 ne sont pas applicables aux fonctions de juge à la Cour de cassation, président du Tribunal des conflits, juge assesseur, juge suppléant et membre des Tribunaux des prud'hommes.
Art. 66, al. 1 (nouvelle teneur)
1 Les incompatibilités avec la fonction de notaire et l'exercice de la profession d'avocat sont réglées par les lois régissant ces professions.
Art. 73, al. 1, 4e phrase (nouvelle teneur),al. 3, 5e phrase (nouvelle teneur)
1 Avant d'entrer en fonction, les membres des tribunaux, les juges d'instruction, les juges de paix et les juges du Tribunal de la jeunesse font devant le Grand Conseil la promesse suivante:
«Je jure ou je promets solennellement:
(...) de remplir mon office avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité».
3 Les membres du Ministère public font devant le Grand Conseil la promesse suivante:
«Je jure ou je promets solennellement:
(...)
de remplir mon office avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité.
(...)».
Art. 75 A, al. 2, lettres f, g et h (nouvelles)
f) de veiller à ce que les magistrats du pouvoir judiciaire puissent compléter leur formation professionnelle;
g) de donner au Conseil supérieur de la magistrature un préavis sur les demandes de modification de leur taux d'activité présentées par les magistrats;
h) de valider les élections des présidents et vice-président des juridictions.
Art. 76 (nouvelle teneur)
Les présidents sont chargés d'exercer les tâches qui leur sont confiées par la loi, notamment de convoquer les tribunaux, de les tenir en activité et de veiller à ce que tous les membres remplissent leurs fonctions avec exactitude et avec la dignité qui convient à leur caractère.
Art. 2
1 Les présidents et vice-présidents de juridictions en fonction lors de l'entrée en vigueur de la présente loi le restent jusqu'au terme de la période pour laquelle ils ont été élus.
2 Le serment prêté par les magistrats en fonction lors de l'entrée en vigueur de la présente loi reste valable jusqu'au terme de la période pour laquelle ils ont été élus.
Art. 3
Le Conseil d'Etat fixe l'entrée en vigueur de la présente loi.
PL 7469-A
M. Laurent Moutinot (S). Je désire apporter une petite précision. Dans la lettre que nous a adressée le président de la Cour de justice, on nous a fait observer que nous avions fixé un quorum très élevé pour les prises de décisions du Conseil supérieur de la magistrature et que cela pouvait poser des problèmes s'agissant de décisions urgentes ou provisoires à prendre. Il ne semble pas nécessaire de modifier notre projet pour répondre à cette objection des magistrats dès lors que nous avons expressément prévu dans cette loi que le Conseil supérieur de la magistrature s'organisait lui-même en édictant son propre règlement et que, sans déroger à la loi, pour ce type de question, il peut prévoir une procédure adéquate.
La présidente. Nous votons le troisième débat. La commission législative est unanime pour la demande du troisième débat.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
(PL 7469)
LOI
instituant un Conseil supérieur de la magistrature
(E 2 20)
LE GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,
vu les articles 124 et 135 de la constitution de la République et canton de Genève,
Décrète ce qui suit:
Article 1
Sans préjudice des règles du droit commun, de l'article 124 de la constitution et des règles relatives à l'organisation intérieure et au fonctionnement des tribunaux, les magistrats de l'ordre judiciaire sont soumis pendant la durée de leur charge à la surveillance d'un Conseil supérieur de la magistrature (ci-après: le conseil) qui veille au bon fonctionnement des tribunaux et notamment à ce que les magistrats exercent leur charge avec dignité, en particulier avec rigueur, assiduité, diligence et humanité.
Art. 2
1 Le conseil est composé :
a) du procureur général;
b) du président de la Cour de justice;
c) de 4 magistrats de carrière ou anciens magistrats de carrière du pouvoir judiciaire, élus par les magistrats de carrière du pouvoir judiciaire en fonction, les juges titulaires de la Cour de cassation étant assimilés à des magistrats de carrière;
d) de 3 membres désignés par le Conseil d'Etat en fonction de leurs qualités personnelles;
e) de 2 avocats au barreau élus par les avocats inscrits au tableau.
2 Le mandat des membres désignés en application de l'alinéa 1, lettres c, d, et e, est d'une durée de 3 ans, renouvelable.
3 Un magistrat ayant fait l'objet d'une sanction ne peut siéger au conseil pendant une période de 5 ans à compter du prononcé de la sanction. Cette interdiction peut être levée par le conseil au moment où la sanction est prise, si la faute commise était légère. Si le magistrat sanctionné est membre du conseil, ses fonctions au sein de ce dernier prennent fin immédiatement et il est procédé à une élection complémentaire afin de pourvoir à son remplacement. S'il est membre de droit du conseil, son remplacement est assuré, s'il s'agit du procureur général, par le premier en rang de ses procureurs et, s'il s'agit du président de la Cour, par le vice-président.
4 La liste des membres du conseil est fixée par arrêté du Conseil d'Etat et publiée dans la Feuille d'avis officielle.
Art. 3
1 Le Conseil est présidé par le président de la Cour de justice.
2 Il délibère à huis clos.
3 Il délibère valablement lorsque 9 au moins de ses membres sont présents et prend ses décisions à la majorité simple, à l'exception de celles rendues en application de l'article 6, lettres b à d, pour lesquelles une majorité absolue de 7 voix est requise.
4 Le président de juridiction d'un magistrat mis en cause siège au conseil avec voix consultative, même lorsqu'il est par ailleurs membre du conseil.
5 Le conseil peut élaborer son propre règlement, qui est publié dans la Feuille d'avis officielle.
Art. 4
Les cas de récusation des membres du conseil sont les mêmes que ceux prévus dans la loi sur l'organisation judiciaire pour la récusation des juges.
Art. 5
2 Le conseil se réunit sur convocation de son président, notamment lorsque ce dernier a pris connaissance de faits qui, s'ils sont vérifiés, peuvent entraîner à l'égard d'un magistrat l'application des sanctions et mesures prévues à l'article 6. Le conseil est également convoqué sur demande de 3 de ses membres.
2 Le président peut classer les plaintes qui lui apparaissent manifestement mal fondées; il en informe les membres du conseil. Si le plaignant persiste dans sa plainte, le président doit réunir le conseil. Si ce dernier estime que la plainte est non seulement mal fondée mais téméraire, il peut infliger au plaignant une amende de 1 000 F au maximum.
3 Le conseil est libre d'ordonner dans chaque cas toutes mesures préparatoires qui lui paraissent utiles. Il peut déléguer l'instruction d'un dossier à un ou plusieurs de ses membres.
4 Il ne peut prendre aucune décision sans avoir entendu ou dûment appelé le magistrat mis en cause et le plaignant. Ces derniers peuvent se faire assister d'un avocat.
5 La loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, est applicable dans la mesure où la présente loi n'y déroge pas.
Art. 6
1 Le conseil est compétent pour:
a) infliger un avertissement ou un blâme à tout magistrat qui s'est rendu coupable d'une faute dans l'exercice de sa charge, ou dont le comportement porte atteinte à la dignité de la magistrature;
b) priver de son traitement pour une période qui n'excède pas 6 mois, tout magistrat coupable d'une faute grave dans l'exercice de sa charge ou dont le comportement porte gravement atteinte à la dignité de la magistrature;
c) prononcer la destitution de tout magistrat ne remplissant pas les conditions d'éligibilité prévues aux articles 60, 60 A et 60 B de la loi sur l'organisation judiciaire, ou indigne d'exercer sa charge, ou ne respectant pas les décisions du conseil;
d) relever de sa charge sous réserve de ses droits à la retraite tout magistrat incapable en raison de l'âge ou de la maladie.
2 Les sanctions prévues sous lettres b et c peuvent être assorties de la suppression ou de la réduction de l'indemnité prévue à l'article 15, alinéa 1, de la loi concernant le traitement et la retraite des magistrats du pouvoir judiciaire, du 26 novembre 1920, si le magistrat s'est rendu coupable d'une faute grave dans l'exercice de sa charge, ou s'il a, par son comportement, porté gravement atteinte à la dignité de la magistrature.
Art. 7
1 Le conseil peut enjoindre à un magistrat de compléter sa formation professionnelle.
2 Le conseil est l'autorité compétente au sens de l'article 320, chiffre 2, du code pénal pour décider de lever le secret de fonction auquel sont astreints les magistrats du pouvoir judiciaire. Le secret n'est levé que si la révélation est indispensable à la protection d'intérêts supérieurs publics ou privés.
3 Le conseil est l'autorité compétente pour statuer sur les demandes des magistrats relatives à la modification de leur taux d'activité.
Art. 8
1 Les décisions du conseil sont motivées.
2 Elles sont définitives et immédiatement exécutoires. Le conseil peut en ordonner la publication s'il le juge opportun.
3 Elles sont communiquées au magistrat mis en cause et au plaignant, qui ne sont pas autorisés à les rendre publiques.
4 La violation de cette obligation de confidentialité peut être sanctionnée, par le conseil, d'une amende de 10 000 F au maximum.
Art. 9
Le conseil présente au Grand Conseil un rapport annuel portant sur ses activités. Il peut publier, en respectant l'anonymat des parties, les décisions qu'il juge importantes.
Art. 10
1 Chaque parti siégeant au Grand Conseil désigne un représentant que le président du conseil informe des sanctions rendues, depuis leur dernière élection, à l'encontre des magistrats candidats à une élection judiciaire.
2 Si une procédure disciplinaire est en cours, le président du conseil en rend compte.
Art. 11
Le Conseil d'Etat édicte les dispositions réglementaires relatives aux élections découlant de la présente loi.
Art. 12
La loi instituant un Conseil supérieur de la magistrature, du 27 juin 1942, est abrogée.
Art. 13
Les causes en état d'être jugées lors de l'entrée en vigueur de la présente loi le sont sous l'empire de la loi du 27 juin 1942.
Art. 14
La présente loi entre en vigueur en même temps que la loi constitutionnelle modifiant l'article 124 de la constitution genevoise, du 24 mai 1847.
PL 6850-A
La présidente. Si j'ai bien compris le rapport, ce projet de loi devrait être retiré si le projet 7247-A est voté ? Est-ce juste ?
Une voix. C'est juste, Madame la présidente !
La présidente. Comme je préside, je ne retire rien et si personne ne le retire, cela perdure jusqu'à la prochaine fois.
M. Laurent Moutinot (S). Madame la présidente, si vous désirez que je retire le fruit de nos travaux communs, je le retire volontiers.
La présidente. Je ne ferai point de commentaires.
Le Grand Conseil prend acte du retrait du projet de loi 6850-A.
PL 7544-A
M. Pierre-François Unger (PDC). Le groupe démocrate-chrétien retire le projet de loi 7469. (Rires.)
Une voix. Non !
La présidente. Etes-vous sûr qu'il ne s'agit pas du projet 7544 ? (Commentaires.) Oui, car on vient de voter le 7469-A. Il me semble qu'il y a une erreur de numérotation, Monsieur Unger. Mme la rapporteuse va éclairer notre lanterne. Que faut-il faire ?
Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. M. Unger ne peut pas retirer le projet que nous venons de voter. On a donné le numéro 7469-A à un des projets, donc il ne peut pas le retirer.
La présidente. Que faut-il faire pour le projet 7544-A, Madame la rapporteuse ? Je n'ai pas vu de conclusion dans le rapport, c'est pourquoi je vous le demande.
Mme Michèle Wavre, rapporteuse. Les projets ont été groupés, et nous avons repris toutes les propositions, alors si vous voulez que, formellement, les auteurs retirent les projets qui n'ont pas été retenus, alors il faudrait demander aux auteurs de le faire tout de suite. Je retire le projet 7544-A.
La présidente. Voilà !
Le Grand Conseil prend acte du retrait du projet de loi 7544-A.
M. Christian Ferrazino (AdG). Quant à nous, il nous appartient de retirer le projet 7458-A qui a été repris dans le nouveau projet de loi. Monsieur Unger, vous ne pouvez plus rien retirer. (Rires.) En fait, vous ne pouvez retirer que votre projet de loi sans numéro, puisque le numéro initial a été repris dans le projet que nous avons voté et qui a permis l'assemblage de toutes les propositions qui sont maintenant individuellement retirées.
M 1064-A
La présidente. Merci de ces éclaircissements. Nous avons encore la motion 1064-A.
M. Laurent Moutinot (S). Je la retire également avec votre accord, Madame la présidente !
Le Grand Conseil prend acte du retrait de la proposition de motion 1064-A.
La présidente. Nous avons donc concentré plusieurs projets de lois en trois projets de lois. Le point 40 est donc traité.
Ce projet de loi a été présenté au Grand Conseil le 19 décembre 1996 (Mémorial page 7585) et renvoyé le même jour, sans débat de préconsultation, à la commission judiciaire.(Mémorial page 7589).
But de la nouvelle législation
L'article 44, alinéa 1 du code pénal suisse prescrit: «Si le délinquant est alcoolique et que l'infraction commise soit en rapport avec cet état, le juge pourra l'interner dans un établissement pour alcooliques ou au besoin dans un établissement hospitalier, pour prévenir de nouveaux crimes ou délits».
Et l'alinéa 6 ajoute: «Le présent article est applicable par analogie aux toxicomanes».
Pour appliquer ces dispositions légales fédérales, la législation genevoise a confié l'application des dispositions relatives aux toxicomanes au conseil de surveillance psychiatrique (Art. 10 LACP) et l'application des dispositions relatives aux alcooliques à la commission de surveillance des alcooliques condamnés. La composition et les compétences de cette commission spéciale sont régies par la loi genevoise sur le traitement et le placement des alcooliques (E 4 60).
Cette commission se heurte à deux avatars:
- Elle n'a pratiquement plus d'activité (Voir à ce sujet l'exposé des motifs page 3).
- Il faudrait lui désigner une instance cantonale de recours pour respecter la nouvelle législation fédérale (Art. 98a OJF).
Des lors le Conseil d'Etat propose:
a) de transférer les compétences de la commission de surveillance des alcooliques condamnés au conseil de surveillance psychiatrique;
b) de faire disparaître la commission de surveillance des alcooliques condamnés en abrogeant purement et simplement la loi sur le traitement des alcooliques.
Audition de M. B. Duport, secrétaire adjoint du DJPT
M. Duport explique que le but du projet de loi est d'éviter d'avoir deux commissions exécutant un travail analogue. Il précise que la commission de surveillance des alcooliques n'a traité que 4 cas en 16 ans. Mieux encore, vu qu'il n'y a pas eu de cas à traiter depuis 4 ans, cette commission n'a pas été reconduite depuis l'élection du dernier Conseil d'Etat...
Toutes les juridictions et autorités consultées se sont prononcées en faveur du projet de loi. La composition du Conseil de surveillance psychiatrique est plus large que celle de la Commission de surveillance des alcooliques. Des précisions sont données quant au lieu et aux modalités de l'internement.
Débats de la commission
Certains commissaires, notamment les médecins, sont gênés par la référence psychiatrique de la commission, rappelant que ni les toxicomanes ni les alcooliques ne sont actuellement considérés comme des cas psychiatriques.
Il est alors proposé d'ajouter à la dénomination «Conseil de surveillance psychiatrique» les termes «des alcooliques et des toxicomanes». Cela paraît impossible puisque cette commission traite aussi les cas de personnes ni alcooliques ni toxicomanes.
Amendements et votes
L'entrée en matière est votée à l'unanimité. Il en va de même pour tous les articles, à l'exception de l'article 10 lettres d à g.
Art. 10 lettre d
Ce paragraphe partant de l'idée surannée que l'alcoolisme et la toxicomanie seraient des maladies, il est proposé et accepté de radier la seconde phrase de cet alinéa conditionnant la libération des personnes alcooliques ou toxicomanes à une sorte de présomption de «guérison». (Ceci nonobstant le texte de l'art. 44, al. 4, CPS).
Art. 10 lettre e
Il est proposé dans un but de clarté comme de logique de séparer le second paragraphe de cet alinéa pour en faire un alinéa distinct qui devient la lettre f.
Art. 10 lettre f
Reprend le texte du second paragraphe de la lettre e.
Art. 10 lettre g
Reprend le texte de l'ancienne lettre f.
Le nouveau texte retenu est voté à l'unanimité par la commission qui vous recommande l'adoption de ce projet de loi.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
a) abrogeant la loi sur le traitement et le placement des alcooliques(E 4 60) et
b) modifiant la loi d'application du code pénal et d'autres lois fédérales en matière pénale (E 4 10)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi sur le traitement et le placement des alcooliques, du 3 décembre 1971, est abrogée:
Art. 2
La loi d'application du code pénal et d'autres lois fédérales en matière pénale, du 14 mars 1975, est modifiée comme suit:
Art. 10, lettres c, d et e (nouvelle teneur), lettre f(nouvelle, la lettre f ancienne devenant la lettre g)
c) pour surveiller les personnes internées dans les établissements hospitaliers, ceux pour alcooliques ou toxicomanes ou de détention en vertu d'un jugement d'une autorité judiciaire pénale;
d) pour libérer les personnes alcooliques et toxicomanes condamnées;
e) pour libérer conditionnellement les personnes alcooliques et toxicomanes condamnées et les soumettre à un patronage;
f) pour communiquer au juge un préavis sur l'opportunité d'ordonner l'exécution de la peine suspendue;
g) pour proposer au juge, s'il y a lieu, l'exécution des peines suspendues ou ordonner la réintégration des personnes alcooliques et toxicomanes condamnées dans un établissement approprié.
Art. 11 (abrogé)
Art. 3
La présente loi ne s'applique pas aux causes pendantes devant la commission de surveillance des alcooliques condamnés lors de son entrée en vigueur.
Art. 4
Le Conseil d'Etat fixe l'entrée en vigueur de la présente loi.
Le 26 mai 1994, le Grand Conseil a renvoyé au Conseil d'Etat la mo-tion 885-A, invitant ce dernier «à permettre, par une modification du fonctionnement de la commission de conciliation en matière de baux et loyers, dans sa composition de l'article 8 de la loi régissant son activité, la prise en compte des aspects sociaux du défaut de paiement de loyer dans toute la mesure compatible avec les exigences du droit fédéral».
Dans son rapport sur cette motion, la commisison judiciaire avait expressément indiqué qu'il s'agissait notamment que la commission de conciliation puisse disposer, au début de la procédure, à l'instar du procureur général au stade final, de l'appui de l'office du logement social pour trouver l'aide adéquate selon les cas.
Rappelons que, lorsqu'elle se réunit dans la composition prévue à l'arti-cle 6, alinéa 2, de la loi l'instituant, la commission de conciliation siège avec un assesseur membre de l'Hospice général (commission sociale).
A la suite du vote de la motion, des contacts ont été établis entre la commission de conciliation en matière de baux et loyers et l'office du logement social (ci-après OLS).
Dans la mesure où l'OLS n'est pas amené à intervenir dans l'ensemble des procédures évoquées à la commission de conciliation, il a été convenu, pour des raisons d'efficacité et conformément au voeu du Grand Conseil, que la participation dudit office serait limitée aux séances de la commission sociale de cette instance.
C'est ainsi que, depuis septembre 1996, l'OLS a assisté à ces audiences au cours desquelles il a pu signaler aux locataires faisant l'objet d'une procédure d'évacuation pour défaut de paiement du loyer l'existence de l'allocation personnalisée de logement (afin de limiter les montants dus au titre de loyer) et inviter les locataires concernés à s'inscrire auprès de son service des demandes, étant rappelé que l'Etat n'est pas propriétaire des logements qu'il attribue et que, donc, son intervention est par définition limitée.
Les logements dits «d'urgence» ne sont attribués qu'au stade de l'exécution d'un jugement d'évacuation. En effet, ce type de logement (dont les caractéristiques de confort ne sont pas optimales) ne doit exister que pour des cas extrêmes, notamment afin d'éviter la création de ghettos.
Cette expérience de quelques mois s'étant révélée positive, l'OLS participe désormais de manière systématique aux audiences de la commisison sociale.
Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à entériner la présente réponse.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi générale sur les contributions publiques, du 9 novembre 1887, est modifiée comme suit:
Art. 16, al. 2, lettre l (nouvelle)
l) les revenus résultant de l'aliénation ou du rem-boursement d'obligations à intérêt unique pré-pondérant (obligations à intérêt global, obligations à coupon zéro) qui échoient au porteur.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La pratique suivie jusqu'à maintenant par les autorités fiscales se fonde sur l'idée que les bénéfices ou les pertes de cours réalisés à la suite d'achats ou de ventes en bourse restent sans effet sur l'assiette fiscale du contribuable pour autant que celui-ci ne gère que sa fortune privée. Or, il faut bien constater que cette pratique crée une différence de traitement fiscal entre l'imposition d'un gain provenant de valeurs mobilières et celle d'un même gain provenant d'autres sources de revenus. Ainsi, l'impôt sur le revenu est moins progressif qu'il n'y paraît, les gains en capitaux se concentrant surtout sur les revenus élevés et il y a, de fait, incitation à transformer des revenus ordinaires en gains en capital non imposés.
Le législateur fédéral a modifié cette pratique pour les obligations à intérêt unique, en général le disagio d'émission ou l'agio de remboursement. Il a introduit pour ces obligations une solution en vertu de laquelle la rémunération globale sera dorénavant imposable auprès de celui qui l'aura effectivement réalisée. Conformément à l'article 20, alinéa 1, lettre b, de la LIFD sont donc imposables en tant que rendement de la fortune mobilière les revenus résultant de l'aliénation ou du remboursement d'obligations à intérêt unique prépondérant. Il s'agit des obligations à coupon zéro (discount bonds), des obligations à intérêt global par exemple celle de type Migros, des obligations à rémunérations périodiques annuelles se situant au-dessous du taux du marché et assorties d'un agio de remboursement fixe, d'emprunts à double monnaie, de papiers monétaires à court terme (créances comptables de la Confédération, des cantons et des communes) et éventuellement aussi de certaines obligations à option et d'instruments financiers dérivés.
Le présent projet de loi se veut tout simplement une adaptation de la loi genevoise sur les contributions publiques à l'article 20, alinéa 1, lettre b, de la LIFD décrit ci-dessus et ce, afin d'aligner la pratique de l'administration fiscale cantonale sur celle de l'administration fédérale des contributions. Au bénéfice de ces explications, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les député-e-s, de bien vouloir lui réserver un bon accueil.
Préconsultation
Mme Micheline Calmy-Rey (S). La Suisse fait partie d'un des rares pays ne connaissant pas l'imposition des gains en capitaux pour les personnes privées. Parmi les pays industrialisés, seules la Grèce et la Suisse ne connaissent pas une telle imposition. Genève ne déroge pas, puisque la pratique suivie à ce jour exonère les plus-values mobilières.
Il y a plus-value mobilière lorsque quelqu'un achète des titres, des actions ou des obligations et les revend à un prix plus élevé. Bien qu'il s'agisse d'un gain, il est libéré de tout impôt pour les personnes privées, et il faut bien constater que cette pratique crée une inégalité, une différence de traitement fiscal entre l'imposition d'un gain provenant de valeurs mobilières et l'imposition d'un gain provenant d'autres sources de revenus, comme celles du travail ou de la propriété immobilière. Cette subvention déguisée n'a, à l'heure actuelle, aucune raison d'être, car l'évolution boursière est largement positive.
La loi d'harmonisation fiscale ne prévoit pas ce type d'imposition, mais ce n'est pas, à vrai dire, un obstacle rédhibitoire ni global, et, quelquefois, cela peut être une question d'interprétation.
En effet, conformément à l'article 20, alinéa 1, lettre b de la loi sur l'impôt fédéral direct, sont imposables en tant que rendement de la fortune mobilière les revenus provenant de la vente ou du remboursement d'obligations à intérêt unique prépondérant. La disposition s'applique aux obligations à coupon zéro, soit sans rémunération périodique, et aux obligations à intérêt global exclusif, à savoir des obligations dont la rémunération globale ne provient pas ou peu des échéances périodiques d'intérêts.
Par exemple, une obligation émise au-dessous du pair à 700 F, remboursable après cinq ans à la valeur nominale de 1 000 F : la différence de 300 F entre la valeur d'émission et celle du remboursement serait imposable si l'on adoptait notre projet de loi, car il n'y a pas de paiement périodique d'intérêts.
Autre exemple : une obligation à intérêt global, émise à la valeur nominale de 1 000 F procurant un intérêt annuel de 30 F et qui est remboursable après six ans à une valeur de 1 326 F. Cette obligation entre dans la catégorie visée par notre projet de loi, puisque l'intérêt annuel représente une part minoritaire du rendement global annuel.
Par contre, notre projet de loi ne change pas le traitement fiscal des bénéfices ou des pertes de cours réalisées à la suite d'achats ou de ventes en bourse pour autant que le contribuable ne gère que sa fortune privée. Le projet de loi que nous déposons ce soir se veut donc tout simplement une adaptation de la pratique cantonale à la loi fédérale et à la pratique de l'administration fédérale des contributions. Je vous remercie de bien vouloir l'accepter ou le renvoyer en commission.
M. Daniel Ducommun (R). Ce projet de loi n'est pas inintéressant et mérite d'être renvoyé, bien sûr, à la commission fiscale, laquelle traite actuellement la révision de l'imposition des personnes physiques.
Toutefois, il ne faut pas se faire trop d'illusions sur de nouveaux gains fiscaux potentiels, Madame Calmy-Rey. L'administration fiscale fédérale estime totalement disproportionné le gain réalisé par rapport à la procédure d'imposition résultant d'un calcul, Mesdames et Messieurs les députés, de dix pages. Pour faire la déclaration, il faudra dix pages ! Lors de la prochaine séance, je serai en mesure de vous en donner la teneur.
Cette procédure est actuellement en étude de simplification, et il serait souhaitable que l'on puisse s'y référer dans nos travaux en commission fiscale. Sur le principe, le groupe radical ne conteste pas l'opportunité de ce projet, il reste sceptique sur ses modalités d'application.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Il est vrai qu'il est tard et que nous sommes fatigués, mais ce projet est d'importance. Le Conseil d'Etat, par ma bouche, entendait dire ce qui suit.
Deux méthodes de taxation des obligations à intérêt unique prépondérant existent dans la législation. L'administration fiscale a publié un certain nombre de directives à cet égard. Il est vrai que la LIFD prévoit la taxation, selon la méthode visant à taxer chaque opération, chaque aliénation, et non pas à la fin du cheminement du titre coupon zéro - discount bonds - comme on les appelle. La LHID, comme l'a rappelé Mme Calmy-Rey, reste muette. Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 1995.
Par conséquent, l'administration fiscale cantonale a appliqué jusqu'à maintenant la formule traditionnelle. Dans le cadre de l'étude de la LIPP - la loi sur l'imposition des personnes physiques - l'intérêt de la commission a été attiré sur cette problématique.
Mais on peut aussi adapter les règles de la LIFD au plan cantonal; la méthode est beaucoup plus compliquée et demande un travail plus considérable. Mais elle existe sur le plan fédéral. Zurich a voulu l'introduire. Mais par manque de base légale le Tribunal administratif zurichois a rejeté la proposition votée par le parlement. Zurich étudie donc l'introduction d'une base légale, comme la proposition qui nous est faite aujourd'hui pour taxer ces nouveaux gains selon la formule LIFD.
En ce qui concerne le département des finances, nous ne voyons aucun obstacle à ce que ce travail soit fait. Il est d'ailleurs déjà amorcé en commission. Nous aurons l'occasion de définir la méthode de calcul, voire les gains qui pourront en découler.
Aujourd'hui, nous traitons ces cas selon la méthode traditionnelle simplifiée. Il n'y a aucune objection cependant à ce que l'on applique demain la règle fédérale. Il s'agit d'une forme d'harmonisation verticale, préconisée par le droit fédéral. Par conséquent, je suis d'accord que ce projet de loi soit renvoyé en commission et rejoigne les travaux importants qui s'y font et que vous présidez, Madame la présidente du Grand Conseil, en matière de LIPP.
Ce projet est renvoyé à la commission fiscale.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit:
Art. 117 (nouvelle teneur)
1 Le Conseil d'Etat présente chaque année au Grand Conseil le budget administratif de l'Etat, conformément aux règles de la gestion administrative et financière de l'Etat fixées par la loi.
2 Le budget administratif est subdivisé en un budget de fonctionnement et en un budget des investissements.
3 a) le budget de fonctionnement doit être équilibré;
b) il comprend les recettes et les dépenses courantes ainsi que la part annuelle d'amortissement des investissements;
c) en cas de deux déficits annuels successifs, résultant de charges excédant les revenus de plus de 2%, le Conseil d'Etat présente au Grand Conseil un projet de loi de rétablissement des finances énumérant le détail des modifications de charges et de revenus permettant le retour à l'équilibre du budget de fonctionnement et l'amortissement complet du découvert au bilan dans un délai maximum de 10 ans.
4 Le Conseil d'Etat rend compte chaque année de l'administration des finances, conformément aux articles 80 et 82.
Art. 55, al. 3 (nouveau)
3 Si le Grand Conseil décide que la loi de rétablissement des finances prévue à l'article 117, alinéa 3, lettre c, ne revêt pas le caractère d'urgence exceptionnelle, elle est alors soumise au référendum obligatoire.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Nous avons l'honneur de vous présenter un projet de révision qui apporte, au niveau de la constitution, les principes modernes de la gestion des finances publiques, déjà contenus dans la loi de 1993, et qui donne aux autorités et au peuple des responsabilités accrues et des pouvoirs étendus pour sortir de la grave crise financière que nous traversons.
Bref rappel historique
Si les articles 96 et 97 de la constitution prévoient qu'il ne doit pas y avoir de dépenses nouvelles sans recettes nouvelles, on devrait voir dans cette disposition, issue de la crise financière des années 30, l'exigence implicite du respect de l'équilibre budgétaire. Mais cette exigence n'étant pas expressément formulée, elle a souvent été contestée.
Cette contestation a profité du vide régnant dans une constitution qui ne fait pas de distinction entre le budget de fonctionnement et le budget d'investissement. Or, les investissements peuvent être couverts par des recettes étalées sur les années à venir et non sur l'année ou les années de leur réalisation. L'endettement devient alors légitime puisqu'il a sa contrepartie dans l'augmentation du patrimoine. La dette est amortie au fur et à mesure de la dépréciation des biens. Conséquence: la dette pour les dépenses d'investissements est acceptable; elle est inacceptable pour les dépenses courantes.
Harmonisation des comptes des cantons
Tous les cantons ont ressenti le besoin d'une harmonisation dans la conception et la présentation de leurs comptes, certains en la faisant précéder de réformes constitutionnelles, d'autres après, comme le ferait Genève avec le présent projet de loi, en l'inscrivant maintenant dans la constitution. Cela après avoir fait l'expérience de son application depuis 1985 dans la loi budgétaire annuelle et depuis 1993 dans la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat.
Même s'ils n'avaient pas encore été inscrits dans la constitution, ces principes d'harmonisation dans la présentation des comptes, de distinction des dépenses de fonctionnement et d'investissement et d'équilibre du compte de fonctionnement ont été respectés jusqu'en 1988.
Grave crise financière
C'est en 1989 que les premiers effets de la crise économique se sont fait sentir d'abord à Genève et en Suisse romande, dont les exportations sont plutôt tournées vers les pays anglo-saxons, puis plus tard en Suisse alémanique influencée par la conjoncture allemande.
Alors que le canton de Zurich s'alarme aujourd'hui des effets d'une crise qui entame sérieusement l'état de sa fortune au bilan, le canton de Genève a vu disparaître complètement dès 1991 les réserves de 809 millions de francs accumulés au cours des années 80 pour faire place à un découvert béant qui atteindra environ 3,4 milliards de francs à la fin de cette année. Le tableau ci-annexé montre l'évolution des comptes et permet de se faire une idée de la profondeur de la crise financière. Le découvert représente la dette de consommation comprise dans la dette totale. Vivre à crédit n'est pas possible à la longue ni pour les ménages, ni pour les entreprises, ni pour les institutions non plus.
Rétablissement en 10 ans
Après avoir posé les principes d'une saine gestion financière dans la constitution elle-même, le présent projet de loi prévoit dans la constitution aussi les voies et moyens pour rétablir une situation normale quand surgit une grave crise, celle que nous vivons.
Auparavant, il faut rappeler qu'un effort considérable a été fourni dès 1993 par le plan de rétablissement 1993-1996 que le gouvernement a adopté. Il n'a pas été entériné par le Grand Conseil, si ce n'est implicitement par le biais de la modification de certaines lois, les autres mesures étant de la compétence du Conseil d'Etat. En quatre ans, ce plan de rétablissement aura allégé les charges de l'Etat d'environ 2 milliards de francs.
Quant à la réforme nouvelle entreprise par l'administration, à la suite de l'audit, elle allégera sans doute son coût, mais elle ne suffira pas à résorber les déficits.
Article 117 Cst, al. 3 c, et article 55, al. 3
La crise est telle que seule une loi unique, modifiant bon nombre de lois qui régissent les revenus et les charges, doit impérativement être proposée par le Conseil d'Etat au Grand Conseil. C'est ce que prévoit le nouvel alinéa 3 c de l'article 117 Cst quand il y a des déficits de plus de 2% (100 millions de francs). Il faut en finir avec des votes fragmentaires qui refusent tantôt les augmentations de revenus, tantôt les diminutions de charges. Le rétablissement doit constituer un tout indissociable, équilibré, non laissé à la merci des humeurs partisanes, mais sauvegardant le bien commun.
Quant à la modification de l'article 55 Cst, elle rappelle au Grand Conseil qu'il détient le pouvoir d'assortir la loi de rétablissement de la clause d'urgence. Et s'il estime que la profondeur de la crise n'est pas un état d'urgence, c'est alors le peuple qui prend toutes ses responsabilités par un référendum devenu obligatoire. C'est là une innovation fondamentale.
Il ne s'agit pas seulement de rétablir l'équilibre du compte de fonctionnement sans plus se soucier de la dette de consommation contractée pendant 10 ans, celle-ci doit être amortie complètement durant les 10 années à venir, au plus tard en 2007.
Inversion durable de la croissance des dépenses et des recettes
En 9 ans, les charges ont passé de 3 milliards 637 millions de francs en 1988 à 5 milliards 163 millions de francs en 1997, tandis que les revenus passaient de 3 milliards 657 millions de francs à 4 milliards 683 millions de francs. Il y a donc eu croissance annuelle moyenne des charges de 4% et des revenus de 2,8%. Ce différentiel a provoqué des déficits cumulés de4 milliards 148 millions de francs, faisant passer le bilan d'un état de fortune de 809 millions de francs à un découvert de 3 milliards 339 millions de francs.
C'est donc un différentiel inverse, prévoyant durablement, sur 10 ans, une croissance des charges inférieure à celle des revenus, qui devrait permettre de rétablir, 20 ans plus tard, en 2007, l'état de santé financière que l'Etat connaissait en 1988. La période de rétablissement aura été de même durée que celle de la détérioration.
Bien gérer la reprise
Même si la reprise est perceptible, la récession a laissé des traces qui seront longues à effacer. Gérer la reprise signifie qu'il ne faut pas seulement parvenir à l'équilibre du compte de fonctionnement, mais qu'il faut que ce compte produise des bénéfices susceptibles de combler les déficits qu'il a engendrés en laissant un grave endettement.
L'inversion de croissance des charges et des revenus, que l'on vient de voir, montre que cela est possible.
Bien que les recommandations souvent entendues d'une gestion anticyclique de la crise des finances publiques ne soient pas sans limites, elles trouveraient ici une certaine application puisque les dépenses auront été plus importantes que les recettes en temps de crise, et moins importantes dès la reprise.
Investissements: préserver l'avenir
C'est à dessein que la révision proposée ne limite pas les investissements. Les dépenses d'investissement sont des dépenses pour l'avenir dont les charges annuelles en intérêts et amortissements figurent au compte de fonctionnement; il ne faut pas que ce compte de fonctionnement ne comporte que des dépenses courantes sans faire une place, comme par le passé, aux charges découlant des investissements.
A cet égard, Genève s'est passablement distancé de bien des cantons qui ont un peu trop abruptement réduit leurs investissements, et les charges annuelles qu'ils induisent, à seule fin d'équilibrer par ce moyen leur compte de fonctionnement.
Conclusion
Peut-on considérer qu'il sera toujours impopulaire d'avoir une certaine rigueur dans la gestion des affaires publiques? Il est plus que souhaitable que les citoyens sachent qu'il existe un péril certain et qu'ils prennent connaissance de son ampleur au travers des mesures visant à l'écarter. Se ces mesures sont bien cadrées, elles devraient rencontrer l'assentiment de tous. La confiance sera restaurée, l'économie revigorée et le plein-emploi retrouvé.
Que les principes d'une gestion moderne et équitable de l'administration soient élevés au niveau de notre Constitution, et que cette même constitution donne aux autorités, et finalement au peuple, le devoir et le pouvoir d'y parvenir, tels sont les buts du présent projet de loi que nous recommandons à votre acceptation, Mesdames et Messieurs les députés.
7
Préconsultation
M. Jean Opériol (PDC). Voici deux chiffres. A la fin de 1988, le budget de fonctionnement indiquant la fortune du canton s'élevait à 809 millions. En 1997, budget compris, cette fortune se révèle être négative à hauteur de 3,4 milliards de déficits accumulés.
En dix ans, le budget de fonctionnement a généré une accumulation de pertes de 4,2 milliards. Les déficits se sont régulièrement creusés durant ces deux dernières législatures. Nous sommes tous responsables de cette catastrophe : gouvernement, parlement et peuple. Soit que nous n'avons pas voulu ni su voir la réalité en face soit que nous n'avons pas pris nos responsabilités ni eu le courage de dire non au bon moment sur toutes sortes de sujets.
Dès lors que la preuve de notre manque de courage est faite et que, d'autre part, on ne peut plus espérer de retour à l'équilibre en dehors d'une détermination farouche de ce parlement, cette détermination reste plus qu'aléatoire. Il faut donc que nous soyons obligés et contraints d'agir.
Notre parti, avec le précieux concours de Denis Roy, ancien directeur général des finances de l'Etat, a passé son été 1997 sur un projet de loi constitutionnelle allant dans ce sens. En ce qui concerne l'article 117, alinéa 5 de la constitution, dans le cas où deux exercices consécutifs présenteront un excédent des charges sur les revenus de plus de 2%, le Conseil d'Etat devra présenter au Grand Conseil un projet de loi de rétablissement des finances énumérant le détail des mesures à prendre permettant le retour à l'équilibre du budget de fonctionnement et l'amortissement complet du découvert au bilan dans un délai maximum de dix ans.
La modification de l'article 55 de la constitution rappelle au Grand Conseil - au cas où il l'aurait oublié - qu'il détient le pouvoir d'assortir la loi de rétablissement des finances de la clause d'urgence. Si notre Grand Conseil ne voit ni ne veut voir l'urgence du retour à l'équilibre de nos finances, c'est le peuple qui sera appelé à prendre ses responsabilités. Le référendum sera obligatoire, et c'est là une innovation fondamentale.
Mesdames et Messieurs les députés, les auteurs du projet de loi attirent votre attention sur le fait qu'il ne s'agit pas seulement de rétablir l'équilibre du compte de fonctionnement, sans plus se soucier de la dette qui s'accumule depuis bientôt dix ans, mais aussi d'amortir cette dette dans un délai maximum de dix ans. Nul doute que vous partagerez notre souci et ferez bon accueil à ce projet de loi constitutionnelle en le renvoyant en commission, probablement des finances.
M. Daniel Ducommun (R). Tout ce qui peut contribuer à l'assainissement de notre caisse publique est bon à prendre et digne d'être étudié en commission des finances. Il sera fait ainsi avec ce projet de loi de nos collègues démocrates-chrétiens.
A regret, nous devrons néanmoins modérer notre optimisme. Mesdames et Messieurs les députés, en huit ans passés à la commission des finances avec le conseiller d'Etat Olivier Vodoz, j'ai vu passer une dizaine de projets de ce type, du reste traités en compagnie et en collaboration avec M. Denis Roy. Ces dix projets et celui qui nous préoccupe ce soir, proche du modèle fribourgeois, ont déjà été minutieusement étudiés, il y a quelques années, sans résultat tangible.
De plus, notre constitution comprend nombre de garde-fous qui devraient, grâce à une application rigoureuse, suffire à résoudre le problème posé. Je fais allusion aux article 54, 56, 57, 80, 81, 95, 96, 97...
Une voix. Carton !
M. Daniel Ducommun. ...qui font tous, de près ou de loin, référence à l'obligation de prévoir une couverture financière pour toute nouvelle dépense. On revient toujours à la case départ. Le déficit ne peut pas être résorbé par une nouvelle loi, mais par une redéfinition du rôle de l'Etat et des prestations essentielles qu'il doit offrir à la population.
Nous rappelons également qu'un projet de loi radical est actuellement en souffrance à la commission fiscale. Il stipule notamment que les dépenses de fonctionnement de l'Etat de Genève ne peuvent pas dépasser le montant inscrit au budget 2001, sous réserve des transferts de charges imposés au canton ou d'une situation exceptionnelle. Ce projet se différencie quelque peu de celui de nos collègues démocrates-chrétiens par le fait qu'il donne des pistes pour des recettes supplémentaires, comme celle de l'accueil de nouvelles entreprises, par le biais, dans un premier temps, d'exonération fiscale et, nous le souhaitons, la possibilité de bénéficier des effets de l'arrêté Bony.
En conclusion, tout acte constitutionnel est un cadre légal qui a toutefois une valeur théorique s'il n'est pas accompagné d'un catalogue d'actions concrètes comprenant, soit l'absence de prestations, soit l'augmentation des recettes, soit encore les deux cumulés. Ce sont les réflexions que nous contribuerons à développer en commission des finances.
M. Dominique Hausser (S). Pour paraphraser le début de l'exposé des motifs, les socialistes ont l'honneur de vous commenter le projet de révision présenté par les démocrates-chrétiens qui apporteraient, au niveau de la constitution, les principes modernes de la gestion des finances publiques, etc.
Mesdames et Messieurs les députés, M. Ducommun a fait un certain nombre d'allusions au contenu de la loi actuelle, vous montrant ainsi les instruments législatifs que nous possédons déjà.
Permettez-moi de faire deux commentaires. Premièrement, nous sommes d'accord avec M. Ducommun pour dire que le budget est divisé en compte de fonctionnement et en compte d'investissement. Par contre, nous ne savons pas toujours ce qui doit ou ce qui devrait figurer dans l'un ou l'autre compte. Ainsi, il est aisé d'imaginer faire passer, sans aucune difficulté, des rubriques de l'un à l'autre. Nous l'avons déjà vu.
Deuxièmement, l'alinéa 3, lettre c, du projet de loi concerne le fait que le Conseil d'Etat présente un projet de rétablissement des finances au Grand Conseil, énumérant le détail des modifications. Ce voeu pieux est «cassé» par l'article 55, alinéa 3, dans lequel il est inscrit que : «Si le Grand Conseil décide que la loi de rétablissement des finances prévue à l'article 117, alinéa 3, lettre c, ne revêt pas le caractère d'urgence exceptionnelle, elle est alors soumise au référendum obligatoire.» En d'autres termes, cela signifie que le Grand Conseil décide le redressement des finances et que le peuple, lui, n'a d'autre forme de procédure que les sept mille signatures à récolter pour casser cette décision. (Commentaires.)
C'est exactement ce qui est écrit, Mesdames et Messieurs les députés : sauf si le Grand Conseil décide qu'il s'agit d'une mesure d'urgence. Or s'il faut redresser les finances publiques, car le déficit est trop important, si l'on n'inscrit pas en même temps la clause d'urgence, il y a un référendum, donc cela n'a pas de sens...
La présidente. Nous considérerons le sens exact de la disposition en commission des finances !
M. Dominique Hausser. Nous examinerons ce projet en commission, tout en sachant que ce n'est pas en «pondant du papier» que l'on réussit à combler les déficits.
M. Bernard Clerc (AdG). Nous savons tous que les démocrates-chrétiens sont des hommes de foi et nous le constatons dans les conclusions de l'exposé des motifs, dans lesquelles il est noté, je cite : «La confiance sera restaurée, l'économie revigorée et - tenez-vous bien ! - le plein-emploi retrouvé.»
Une voix. Ah, voilà qui est bien !
M. Bernard Clerc. Je m'étonne que M. Vodoz n'ait pas découvert avant cette recette miracle. Si cela avait été le cas, nous serions aujourd'hui dans une situation de plein emploi et tout irait bien.
J'ai toujours pensé que les «lendemains qui chantent» étaient l'apanage de la gauche, et je m'aperçois qu'ils appartiennent au parti démocrate-chrétien.
Votre projet est pour le moins curieux. Que nous révèle-t-il ? En cas de deux déficits annuels successifs résultant de charges excédant les revenus de plus de 2%, soit, grosso modo, deux déficits annuels successifs de 100 millions, il faut obligatoirement rétablir l'équilibre des finances. Je vous laisse apprécier le résultat en regard du déficit de ces dernières années. Ce projet de loi - nous dit-on - permettra de conserver une marge anticyclique. J'avoue n'y rien comprendre. En effet, si l'on désire assurer une marge anticyclique, il ne faut justement pas faire ce que vous proposez. Ensuite, il faut pouvoir préserver les dépenses d'investissement, qui, elles, sont anticycliques. On pourrait donc ne pas y toucher, mais, par contre, il faut à tout prix réduire les dépenses de fonctionnement.
Trop souvent dans ce parlement, on considère que seules les dépenses d'investissement ont un impact sur l'économie. Malheureusement, les expériences de la crise actuelle montrent que les dépenses de fonctionnement jouent un rôle fondamental dans le maintien du pouvoir d'achat, dans le maintien de l'emploi et dans une certaine confiance en l'avenir. Il est erroné de considérer le budget de l'Etat que sous son aspect anticyclique et seulement par rapport au compte d'investissement. Il faut l'analyser du point de vue des dépenses de fonctionnement.
Ensuite, on propose d'atteindre cet équilibre en réduisant les dépenses, mais on ne nous dit pas, par exemple, qu'il serait interdit de diminuer les recettes. Pourtant certains d'entre vous le proposent. Mais oui, Monsieur Brunschwig, c'est vous ! Et vous avez été appuyé, jusqu'à une époque assez proche, par vos cousins de l'Entente, y compris les démocrates-chrétiens.
Nous sommes prêts à discuter de ce projet en commission, mais, très honnêtement, il ne nous paraît pas très sérieux sur le plan de la politique économique.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Ce projet de loi, puisqu'il est constitutionnel, sera, de toute manière, étudié en commission.
Je me réjouis de ces intentions vertueuses, même si j'aurais préféré entendre ces propos au début plutôt qu'à la fin de cette période difficile. Il est vrai que toute une série de projets de lois ont été étudiés dans ce domaine. Cela permet d'aboutir à deux choses :
La première - nous l'avons constaté lors de la présentation du projet de budget 1998 - le budget de fonctionnement de l'Etat n'est pas constitué exclusivement par les charges d'exploitation, soit la masse salariale, les charges financières ainsi que des dépenses générales, mais, pour plus de 44%, soit près de la moitié du budget, de subventions et de prestations. S'il suffisait, pour réduire les déficits, de couper dans les prestations de nature sociale ou de formation, cela aurait été fait depuis longtemps.
Or on sait bien que, en période de crise, le rôle de l'Etat, comme l'ont rappelé certains députés dans cette enceinte, doit être mis en exergue pour faire face à ses obligations. Je dis avec un brin de nostalgie que, pour agir, il convient d'avoir une véritable volonté politique. Or, tous les projets de lois que vous concocterez ainsi que toutes nos dispositions constitutionnelles resteront lettre morte si nous n'arrivons pas à trouver ensemble une volonté politique d'agir sur un certain nombre de points.
Pourquoi les articles 96 et 97 de la constitution prévoient-ils que toutes les dépenses nouvelles doivent être couvertes par des recettes nouvelles et que l'on ne peut pas recourir à l'emprunt ? En réalité, parce que personne n'a défini ce qu'est une dépense nouvelle. L'accroissement des prestations et des modifications que vous apportez aux différentes lois a toujours été considéré par ce parlement comme des dépenses non nouvelles. Dans un certain nombre de cas, elles l'ont été à l'initiative du gouvernement, comme n'étant pas des dépenses nouvelles, mais l'adaptation de dépenses autres.
D'ailleurs, un groupe travaille et la commission des finances sera bientôt saisie de propositions de réexamen d'un certain nombre de dispositions de nature budgétaire. Cela touchera les notions d'amortissement, de déficit, des reports de crédit, des budgets bisannuels et également de ce que seraient les dépenses nouvelles par rapport aux dépenses ordinaires ou qui ne mériteraient pas une couverture financière particulière.
Enfin, la seule mesure qui pourrait être prise serait de réintroduire le référendum obligatoire. Cette mesure a fait partie de notre constitution pendant un certain nombre de décennies. Ensuite, elle a été abandonnée chez nous comme dans certains cantons, tandis que d'autres l'ont conservée. Le référendum obligatoire prévoit que, à toute dépense nouvelle et définie comme étant nouvelle, doit correspondre des recettes. Si le peuple veut ces dépenses nouvelles, il doit simultanément voter les moyens financiers.
Avec la loi Lacroix, vos et nos prédécesseurs ont abandonné cette idée du référendum obligatoire. Vous pouvez relire, à ce sujet, l'histoire de notre constitution qui est intéressante. Les réflexions qui se feront à la commission des finances sur ces sujets avec d'autres projets, déjà déposés, pourraient aboutir, selon certaines conditions à redéfinir ce qu'est le référendum obligatoire.
Afin d'être cohérents, il conviendra d'appliquer au compte des investissements la même formule que celle que vous voulez donner à celui de fonctionnement, afin d'éviter une inégalité de traitement. Par exemple, vous ne pourriez pas signifier que la politique sociale ou celle de formation devrait faire l'objet du référendum obligatoire, alors que, dans une politique d'investissement, tout serait permis.
C'est pourquoi, au début du plan de redressement, j'avais évoqué le fait que nous ne devrions pas dépasser, à charge du budget, des investissements de 250 millions net par année, car nous savons que, dès la deuxième année, tout investissement génère des amortissements, d'une part, et des charges d'intérêt, d'autre part, puisque nous devons emprunter l'ensemble des fonds nécessaires à la couverture de nos investissements.
Le rapport entre le volume d'investissements et les comptes de fonctionnement est donc direct. On ne peut donc pas, pour des raisons de politique anticyclique, séparer la problématique des investissements de celle des dépenses nouvelles et l'appliquer ensuite à toutes les autres dépenses, comme celles de la formation, de la sécurité ou des prestations sociales.
Je vous livre ces quelques réflexions, car je n'aurai pas le bonheur de suivre avec vous les débats à la commission des finances sur ces projets importants. Mais souvenez-vous qu'il faut une véritable volonté politique pour redresser les finances et non pas seulement des textes législatifs !
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
Mme Micheline Calmy-Rey (S). Madame la présidente, cette motion avait été rejetée lors du débat sur les comptes, mais, à l'occasion de ce débat, le président Vodoz nous avait dit être d'accord de fournir les renseignements demandés par la motion. Aussi, Monsieur le président, je réitère la demande.
La La présidente. Il est pris note de votre demande et que cette motion ne doit plus figurer à l'ordre du jour. Qui demande la parole ? Oh, excusez-moi, Monsieur le conseiller d'Etat, je ne vous vois pas ! Cette motion a été retirée. Je vais pousser ma cloche, car je ne vous vois pas du tout !
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je vous remercie de tirer votre cloche, Madame la présidente. Il est vrai que nous sommes deux de petite taille, par conséquent, on ne s'aperçoit guère. Ce n'est pas grave. Je n'ai pas compris toutes les allusions, mais je considère qu'il est juste que vous ayez ces tableaux. J'ai interrogé l'administration à ce sujet. Il s'agit d'un travail considérable, puisqu'il doit couvrir une période de huit ans et que toute une série de structures sont autonomisées comme, par exemple, l'université. Je dois donc m'enquérir auprès de cette dernière. Le travail est en cours, et probablement que mon successeur vous remettra ces beaux tableaux. Peut-être aurons-nous l'occasion de les découvrir au cours des travaux sur le projet de budget 1998. Si j'ai bien compris, cependant, cette motion serait retirée ?
La présidente. Oui, elle avait été votée et rejetée. Elle a été agendée une seconde fois, par erreur.
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Ah bon ?
La présidente. J'ai dit qu'elle n'avait pas à figurer à l'ordre du jour, parce qu'elle avait déjà été votée et rejetée. Nous avons terminé les objets du département des finances. Monsieur le conseiller d'Etat, vous n'avez plus rien à ajouter ? (Rires.)
M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Je souhaite que nous terminions la séance, afin que nous puissions aller nous coucher !
La présidente. C'est un très bon conseil !
Le Grand Conseil prend acte que cette proposition de motion a déjà été traitée. Elle a été rejetée le 27 juin 1997.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi générale sur le logement et la protection des locataires, du4 décembre 1977, est modifiée comme suit:
Art. 39A, al. 3 (nouveau)
3 Le locataire qui bénéficie d'une prise en charge (totale ou partielle) de son loyer en vertu d'autres dispositions légales ou réglementaires, d'un loyer fixé en fonction de son revenu ou d'une autre forme d'aide personnalisée ne peut prétendre à une allocation de logement au sens de la présente loi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Depuis 1981, les dispositions régissant l'aide personnalisée au logement ont permis à plusieurs milliers de locataires genevois n'ayant pas la possibilité de trouver un logement moins onéreux d'assumer le paiement de leur loyer.
Ce faisant, les budgets de cette aide atteignent aujourd'hui près de20 millions de francs par an.
La loi générale sur le logement et la protection des locataires, du4 décembre 1977, institue en son article 39A les principes de l'allocation de logement, les modalités étant édictées par le Conseil d'Etat, par voie réglementaire.
Considérant que certains locataires bénéficiaient d'ores et déjà d'autres formes d'aide au paiement de leur loyer, le Conseil d'Etat les a exclus du champ d'application de l'allocation de logement, réservant cette aide aux autres personnes.
Ainsi, par exemple, les locataires d'immeubles propriété de la Ville de Genève bénéficient d'un loyer fixé en fonction de leurs revenus. Même si les critères de calcul de cette aide diffèrent de ceux de l'allocation, il serait pour le moins inéquitable que l'allocation vienne encore se greffer sur l'aide municipale.
De même, les prestations complémentaires de l'office cantonal des personnes âgées (OCPA) ou celles du revenu minimum cantonal d'aide sociale (RMCAS) tiennent compte de la globalité des charges, y compris le loyer, que les personnes doivent assumer. L'Etat assure l'aide nécessaire, via les prestations de l'OCPA et du RMCAS, pour que les personnes concernées disposent du revenu minimum qui leur permet, notamment de payer leur loyer.
Le règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 24 août 1992 (RLGL), en son article 22, contient les dispositions nécessaires pour éviter le cumul des aides individuelles publiques au logement.
Le Tribunal administratif, dans un arrêt du 3 juin 1997, a toutefois estimé que le Conseil d'Etat ne disposait pas de la base légale suffisante pour édicter ces restrictions, qui sont en vigueur depuis le 9 septembre 1982.
Dès lors, en application de cette juriprudence, les quelque 30 000 bénéficiaires d'OCPA ou du RMCAS pourraient prétendre à une allocation de logement, entraînant un débordement de formalités administratives, tant pour les locataires que pour l'administration, sans autre résultat qu'un transfert de charges (des budgets OCPA-RMCAS vers ceux de l'allocation de logement) et une augmentation des frais du personnel pour gérer ces dossiers à double. En outre, les locataires concernés verraient leur aide OCPA/RMCAS réduite du montant de l'allocation de logement, après avoir dû effectuer les démarches nécessaires à double.
Vu ce qui précède, le présent projet de loi vise à instaurer la base légale nécessaire permettant d'empêcher le cumul des aides individuelles, limitant l'allocation de logement aux seuls locataires ne disposant pas d'autre soutien financier pour le paiement du loyer.
Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui tendent à motiver le présent projet de loi et dont nous espérons, de votre part, un accueil favorable.
Préconsultation
M. Bernard Clerc (AdG). Vu l'heure tardive, je serai bref. Je comprends cette idée de «rationalisation», mais, dans le jargon du New Public Management, on dit que le client doit être mis au centre. Or j'ai l'impression que, dans cette affaire, les bénéficiaires des prestations ne sont pas toujours mis au centre des préoccupations.
En effet, si les bénéficiaires de l'OCPA sont des personnes prises en charge sur une longue durée et que le problème de l'allocation-logement se pose dans les mêmes termes qu'il est posé dans ce projet de loi, il en est tout autrement pour les bénéficiaires du RMCAS. La personne est soumise à des changements fréquents de situation, car son emploi est souvent temporaire ou de durée limitée. Or, si chaque fois qu'une personne sort du système RMCAS elle doit refaire une demande d'allocation-logement, la situation devient absurde. Il conviendra de l'examiner en commission.
Ce projet est renvoyé à la commission du logement.
La séance est levée à 22 h 55.