République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 15 septembre 1995 à 17h
53e législature - 2e année - 9e session - 36e séance -autres séances de la session
No 36
Vendredi 15 septembre 1995,
soir
Présidence :
Mme Françoise Saudan,présidente
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : MM. Olivier Vodoz, président du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Jean-Philippe Maitre, Claude Haegi et Gérard Ramseyer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
La présidente donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Philippe Joye et Mme Martine Brunschwig Graf, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Marlène Dupraz, René Ecuyer, Henri Gougler, Claude Lacour, Alain-Dominique Mauris et Pierre Meyll, députés.
3. Déclaration du Conseil d'Etat et communications.
La présidente. Je vous transmets une communication du Bureau.
Vous pouvez constater que vous ont été distribués, à vos places, les textes de vos interventions de la séance de 17 h d'hier. Afin que le Mémorial puisse paraître plus rapidement, nous vous remercions de les corriger et de les remettre aux huissiers avant la fin de la séance de 20 h 30.
4. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
La présidente. Les demandes d'interpellations suivantes sont parvenues à la présidence :
Cosignataires : Liliane Maury Pasquier, Liliane Charrière Urben, Laurent Moutinot, Micheline Calmy-Rey, Fabienne Blanc-Kühn.
Cosignataires : Sylvie Châtelain, Liliane Charrière Urben, Liliane Maury Pasquier, Maria Roth-Bernasconi, Claire Torracinta-Pache.
Elles figureront à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
e) de questions écrites.
Néant.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:
Art. 205, al. 11 (nouveau)
11 L'anonymat des recourants en grâce est préservé.
Art. 207, al. 4 (nouveau)
4 Le préavis de la commission est présenté en préservant l'anonymat du recourant. La publication dans le Mémorial du Grand Conseil se fait sous la forme: «le recourant» ou «la recourante».
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le respect élémentaire de certaines règles de discrétion ainsi que les exigences de la loi fédérale sur la protection des données rendent inacceptable la divulgation de situations personnelles très douloureuses que l'on rencontre dans le cadre des recours en grâce.
L'Assemblée fédérale vient, sur recommandation du Ministère public fédéral, d'adopter une présentation anonyme d'un recours en grâce et il faut y voir le début d'une nouvelle pratique.
Il va de soi que les députés seront toujours informés de l'identité des recourants mais il convient de limiter autant que faire se peut la publicité autour de ces cas.
La modification qui vous est proposée vise à introduire, à l'article 205, alinéa 11, le principe de la garantie de l'anonymat. Ce principe pourrait également prendre place à l'article 204, alinéa 5, l'actuel alinéa 5 devenant l'alinéa 6.
La mise en oeuvre du principe est réglée à l'article 207, alinéa 5, en prescrivant la forme anonyme de présentation des rapports de la commission de grâce, renforcée par la publication anonyme au Mémorial. Ainsi, un lapsus éventuel dans le débat au Grand Conseil sera corrigé au Mémorial.
Il faut reconnaître que la publicité la plus large n'est pas le fait du Mémorial - hélas! - mais de la presse. Faut-il légiférer à ce propos? Les auteurs du présent projet de loi ne le pensent pas, tout en souhaitant que les journalistes se fixent à eux-même des règles semblables en la matière.
Pour toutes ces raisons, nous vous prions, Mesdames, Messieurs les députés, de bien vouloir accueillir favorablement le présent projet de loi.
Annexe: Lettre du Ministère public de la Confédération au président de la commission des grâces du Conseil national
page 3
page 4Préconsultation
M. Laurent Moutinot (S). Très brièvement présenté, ce projet tente d'améliorer notre procédure en matière de grâce, par une meilleure protection apportée à la sphère privée, en particulier aux données dites "sensibles".
Nous avons vu dans la pratique que la grâce concerne souvent des situations douloureuses ou pénibles. Pas plus tard qu'hier, il a été fait allusion à des cas de proches de la personne demandant la grâce, atteints dans leur santé. Nous souhaitons, par conséquent, concrétiser cette volonté de discrétion non pas par une mesure excessive comme le serait le huis clos - je vous rappelle que le huis clos existe en matière de grâce exclusivement pour les mineurs en l'état actuel de notre règlement - mais, en revanche, par une certaine discrétion, c'est-à-dire par l'anonymat, de manière à éviter qu'une publicité excessive ne soit donnée, sans pour autant travailler dans le secret, puisque la presse, quant à elle, peut parfaitement identifier les cas qui nécessiteraient à juste titre une publicité. En revanche, les cas qui ne la nécessitent pas seraient définitivement mis à l'abri de toute publicité fâcheuse.
J'ai entendu dire que ce projet n'avait pas de raison d'être, car les faits contenus dans le dossier avaient déjà été débattus en public, lors de l'audience de jugement. Cet argument est inexact en ce sens que, d'une part, lors d'une audience de jugement, l'accusé a la parole en dernier et est présent pour se défendre, ce qui n'est pas le cas en matière de grâce. Mais, d'autre part et surtout, ces dossiers de grâce contiennent toute une série d'éléments qui n'ont pas été débattus devant la juridiction de jugement, pouvant concerner des tiers. C'est la raison pour laquelle je souhaite qu'en commission, puis au retour en plénière, vous fassiez bon accueil à ce projet de loi.
M. John Dupraz (R). Le groupe radical ne s'opposera pas au renvoi de ce projet de loi en commission, mais, quant au fond, nous émettons des réserves, en ce sens que, dans notre pays, la justice est publique et nous estimons que la grâce doit l'être également. Malheureusement, il se trouve que, par souci d'information, les députés rapporteurs en disent parfois un peu trop long en séance plénière, si bien que paraissent au Mémorial - et la presse peut relater ces faits - les motifs et les raisons pour lesquels les gens ont été condamnés et ceux pour lesquels ils demandent leur grâce.
Lorsque la commission de grâce, lundi dernier, a débattu longuement concernant les dossiers à traiter, les rapports sont brefs en séance plénière comme on l'a très bien vu hier. Etant donné que la justice est publique, je ne vois pas pourquoi la grâce ne resterait pas publique. Il s'agit pour nous, députés, de faire preuve de discrétion dans nos rapports en séance plénière, étant entendu que les dossiers sont traités en séances de commission.
Ce projet est renvoyé à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La commune de Russin, qui compte 380 habitants, a construit, en 1963, un immeuble locatif de 9 appartements qui reste, à ce jour, l'unique possibilité de logement à prix abordable.
Interrogée lors d'une enquête en 1984, la grande majorité des citoyens de la commune a souhaité une extension modérée du village, de 5 à 20 lo-gements. Ainsi mandaté, le Conseil municipal a mené une politique propre à se donner les moyens de réaliser les logements souhaités. La commune a ainsi acquis, en 1991, une parcelle voisine de l'immeuble existant en vue d'une future réalisation immobilière, dont les avant-projets, exposés en séance publique, ont été particulièrement bien perçus par la population.
Une commission ad hoc a été nommée par le Conseil municipal pour mener à bien le plan localisé de quartier et un architecte a été mandaté pour réaliser ces travaux.
La fondation dont la constitution vous est aujourd'hui soumise sera dotée, à sa création, de l'immeuble projeté ainsi que de l'immeuble déjà existant.
Le Conseil d'Etat, à la demande du Conseil municipal, vous prie donc de bien vouloir approuver ce projet de loi afin de permettre à la commune de Russin de poursuivre son action logement.
Ce sont là, Mesdames et Messieurs les députés, les considérations qui tendent à éclairer et motiver le présent projet de loi et dont nous espérons de votre part un accueil favorable.
Préconsultation
M. David Revaclier (R). Le groupe radical vous propose la discussion immédiate de ce projet, puisqu'il ne pose pas de problèmes fondamentaux.
Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
concernant la constitution d'une fondation de la commune de Russinpour le logement
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 175 de la constitution genevoise;
vu l'article 72 de la loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984;
vu la délibération du Conseil municipal de la commune de Russin, du27 avril 1995;
vu l'arrêté du Conseil d'Etat, du 12 juin 1995,
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Il est créé sous le nom de «Fondation de la commune de Russin pour le logement» une fondation de droit public, au sens de la loi sur les fondations de droit public, du15 novembre 1958.
2 Cette fondation est dotée de la personnalité juridique. Elle est placée sous la surveillance du Conseil municipal de la commune de Russin.
Art. 2
Les statuts de la fondation de la commune de Russin pour le logement, tels qu'ils ont été approuvés par délibération du Conseil municipal de la commune de Russin, le 27 avril 1995, joints en annexe à la présente loi, sont approuvés.
ANNEXE
page 3
4
5
6
7
8
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, est modifiée comme suit:
Art. 178 A (nouveau)
Candidats
Tout parti politique ou groupement de citoyens qui présente des candidats à l'élection du Conseil d'Etat, du Grand Conseil, d'un conseil administratif, d'un conseil municipal d'une commune de 3000 habitants, du Conseil national et du Conseil des Etats est tenu, au moment du dépôt de sa liste de candidats au département, de déposer ses comptes pour l'exercice écoulé.
Art. 178 B (nouveau)
Membres élus
Tout parti politique ou groupement de citoyens, dont les membres sont élus dans les conseils cités à l'article 178 A doit déposer au département le 31 mars de chaque année au plus tard ses comptes pour l'exercice écoulé.
Art. 178 C (nouveau)
Comptes déposés
1 Les comptes déposés au département doivent comporter la liste nominative de tous les donateurs ayant versé, durant l'exercice concerné, une contribution supérieure à 500 F, ainsi que toutes les dépenses et recettes de toutes les activités déployées par le parti ou le groupement de citoyens concerné.
2 Les comptes font l'objet d'une vérification par le contrôle financier de l'Etat, auquel les justificatifs des revenus, des dépenses et des avoirs doivent être présentés, pour s'assurer de leur conformité.
3 Les comptes déposés au département, y compris la liste des donateurs, peuvent être consultés par tout citoyen ayant le droit de vote à Genève.
Art. 178 D (nouveau)
Relevé des dépenses
Tout parti politique ou groupement de citoyens qui dépose au département une prise de position au sens de l'article 22 à l'occasion d'une votation cantonale et fédérale est tenu, dans les 30 jours à compter de la votation, de déposer le relevé de toutes les dépenses qu'il a encourues lors de la campagne relative à cette votation, avec la liste nominative de tous les donateurs lui ayant versé une contribution supérieure à 500 F. L'article 178 C est, pour le surplus, applicable.
EXPOSÉ DES MOTIFS
La Télévision suisse-alémanique a rendu public, lors d'une récente émission, que les trois partis de l'Entente avaient reçu une contribution de 50 000 F de la part du promoteur Nessim Gaon à la veille des élections cantonales de 1989, ce qui a été confirmé par des déclarations de responsables de ces partis, publiées dans la presse locale.
Certains de ces responsables ont déclaré, à cette occasion, que cette contribution n'avait rien d'extraordinaire, ni quant à ce mode de faire, ni quant à son montant. Il en ressort que certains partis reçoivent des contributions régulières de certains milieux économiques et, semble-t-il, des syndicats patronaux et des milieux immobiliers.
Un journal local a confirmé que des banques et entreprises financent des partis politiques en affirmant que c'était une pratique courante, parfaitement admissible, et que la dénonciation des versements de M. Nessim Gaon n'était qu'une mauvaise querelle à l'égard de ce dernier, considéré quasiment comme un bienfaiteur.
Cette façon de présenter les appuis financiers à des partis politiques et le fait de mettre tous ceux-ci «dans le même sac» est inadmissible.
Il est évident que de telles contributions peuvent créer des liens d'intérêts et influencer des décisions que les représentants de ces partis sont amenés à prendre dans l'exercice de leurs mandats, sans qu'il ne soit nécessaire de rappeler les pratiques révélées ces dernières années dans les pays qui nous entourent et qui ont amené ces pays à prendre un certain nombre de mesures visant à prévenir des faveurs de la part des autorités à l'endroit de certains donateurs.
Ces mesures portent à la fois sur la transparence des partis politiques et des élus sur le plan financier ainsi que sur la limitation des sommes pouvant être consacrées à des campagnes électorales.
Le présent projet de loi vise uniquement à instituer une transparence financière élémentaire sur le financement des partis, qui devront déposer leurs comptes annuels au département avec la liste nominative de tous les donateurs ayant versé une contribution supérieure à 500 F (règle qui sera également applicable aux votations populaires). Les comptes seront vérifiés par le contrôle financier de l'Etat et pourront être consultés par tout citoyen ayant le droit de vote à Genève.
Il faut, lors de l'examen de ce projet de loi, sérieusement se demander si le montant consacré à des dépenses à l'occasion des élections et votations ne devrait pas être plafonné.
Au bénéfice des considérations qui précèdent, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de faire bon accueil au présent projet de loi.
Préconsultation
M. Christian Ferrazino (AdG). Deux mots pour vous présenter ce projet de loi qui a été déposé, suite à l'affaire du promoteur, M. Nessim Gaon. Cette affaire a mis en évidence que certains partis politiques - suivez mon regard ! - avaient reçu des sommes d'argent de ce financier. C'est en tout cas ce que celui-ci avait indiqué lors d'une émission à la télévision suisse alémanique. C'est également ce que les responsables d'alors des partis de l'Entente ont pu confirmer dans la presse locale. D'ailleurs, pour certains de ces partis, il n'y avait rien d'extraordinaire dans ce genre de procédé. A lire certains, il s'agissait même d'une pratique courante. On a laissé croire ainsi que tous les partis politiques de Genève étaient mêlés à ces pratiques.
J'ai repris une coupure de presse de l'époque où M. Joye, qui n'intervenait pas en tant que conseiller d'Etat, mais ancien président de son parti, déclarait ceci : «Effectivement, en ma qualité de président en 1989 du parti démocrate-chrétien, nous avons reçu 10 000 F pour le PDC. Je rappelle que le budget annuel de mon parti est de 300 000 F à 350 000 F, un montant qui double lors des années électorales. Ce ne sont pas des versements destinés exclusivement aux partis de l'Entente. Ces gens arrosaient tous azimuts.» Voilà ce que nous pouvions lire dans la presse. (M. Dupraz se déplace dans la salle.)
Si M. Dupraz pouvait reprendre sa place...
La présidente. Monsieur Dupraz ! Vous poserez votre question après, Monsieur Dupraz. Nous vous donnerons la parole. (M. Dupraz manifeste.)
M. Christian Ferrazino. Vous pouvez vous asseoir, Monsieur Dupraz !
La présidente. Je vous rendrai trente secondes, Monsieur Ferrazino, parce que nous sommes en préconsultation.
M. Christian Ferrazino. Je vous remercie. Pendant ce temps, M. Dupraz pourra peut-être réfléchir, afin de nous faire des interventions un peu plus sensées que celles auxquelles il nous a habitués. (M. Dupraz interrompt l'orateur.)
La présidente. Monsieur Dupraz, je vous en prie !
M. Christian Ferrazino. Je comprends que vous puissiez vous agiter, Monsieur Dupraz, puisque vous faites partie d'une formation politique qui a reconnu publiquement avoir touché des deniers de M. Gaon. Je comprends... (M. Dupraz interrompt l'orateur.)
Mais vous prendrez la parole tout à l'heure pour me répondre. Je serai très intéressé d'entendre vos propos. Mais j'ai déjà entendu ceux du responsable politique de la formation à laquelle vous adhérez toujours, Monsieur Dupraz, et qui a reconnu... (M. Dupraz parle en même temps que l'orateur.) ...que les radicaux avaient reçu des sommes d'argent de la part de M. Gaon. Je comprends d'ailleurs mieux les prises de position que vous preniez sur certaines motions concernant ce financier, comme d'ailleurs d'autres députés.
La présidente. Ecoutez, Monsieur Dupraz, cela suffit ! (M. Dupraz proteste.) Je regrette infiniment, mais c'est vous qui l'interpellez tout le temps. Si vous ne voulez pas entendre M. Ferrazino, vous avez la buvette, la salle des Pas-Perdus ou la salle Nicolas Bogueret. (M. Dupraz continue à protester.)
M. Christian Ferrazino. Non, il va m'entendre... (M. Dupraz proteste encore.)
La présidente. J'applique le règlement, Monsieur Dupraz. Je ne voudrais pas vous faire expulser.
M. Christian Ferrazino. Il va m'entendre, Madame la présidente, parce que j'ai un certain nombre de choses à dire à ce Grand Conseil et, en particulier, à M. Dupraz. Je vous le déclare solennellement, Monsieur Dupraz, ni l'Alliance de gauche, ni l'une ou l'autre de ses composantes n'a, à aucun moment, reçu quelque somme d'argent que ce soit de M. Gaon. Si vous pouvez me dire la même chose de votre formation politique, vous le ferez tout à l'heure et je vous écouterai avec intérêt. Mais vous ne pourrez pas le faire, je le sais d'avance !
Par conséquent, en répondant à M. Dupraz, je répondais à M. Joye qui pensait pouvoir dire que, tous partis confondus, ces procédés étaient en usage dans notre République. Cette manière de mettre tout le monde dans le même sac est tout simplement inadmissible.
Un des points positifs sur lequel nous pourrons nous retrouver est le suivant : s'il y a doute de part ou d'autre, le seul moyen pour effacer ce doute, c'est d'adopter la plus grande transparence possible.
L'autre avantage de ce projet de loi est qu'il permettra de déterminer les intérêts privés et les intérêts publics et d'éviter que ces deux notions ne soient trop souvent mélangées par certains. Je vous dirai simplement que le but de notre projet de loi est que certaines pratiques ayant cours dans des pays voisins ne s'instaurent pas à Genève. Je pense en particulier à l'Italie et à la France.
En France, on a réagi, on a légiféré d'une manière qui va bien au-delà des solutions que nous proposons, car les montants qu'on peut investir dans le cadre d'une campagne politique sont strictement limités. M. Lang en sait quelque chose pour en avoir lui-même été l'objet. C'est dire que la France a voulu, suite aux scandales qui l'ont affectée, limiter les montants que chaque formation politique pouvait investir, afin de mettre l'ensemble des formations sur un pied d'égalité.
Notre projet de loi ne va pas jusque-là. Nous nous sommes montrés très modestes dans les propositions que nous avons formulées, puisque ce projet ne vise qu'à la publicité des comptes des partis politiques et des formations prenant position à l'occasion de votations, sans pourtant retenir le plafonnement des dépenses. C'est une solution qui pourrait être examinée en commission et qui mériterait également d'être abordée plus en profondeur.
En résumé, notre projet de loi n'est pas du tout une panacée. Au contraire, il est très modeste et vise à rendre le fonctionnement de nos institutions démocratiques aussi transparentes que possible.
Mme Michèle Wavre (R). M. Ferrazino va être déçu, car ce n'est pas M. Dupraz qui lui répond, mais je crois que cela vaut mieux pour la sérénité des débats.
La présidente. Et comment, Madame ! (Rires.)
Mme Michèle Wavre. Quand on parle de transparence, le groupe radical tend toujours une oreille attentive, y compris pour ce projet de loi, même quand il s'agit de la transparence des comptes des partis politiques.
Comme d'autres partis, nous, radicaux, présentons nos comptes, chaque année, dans des séances publiques devant la presse. Notre financement provient principalement des cotisations de nos membres et des jetons de présence que, bon gré, mal gré, nos élus versent au parti. Il n'y a donc pas de mystère.
Par contre, votre projet de loi soulève un problème très important que nous discuterons volontiers en commission des droits politiques, c'est le problème du financement des partis politiques. Nous avons là l'occasion d'approfondir la question de façon fort intéressante.
J'ajouterai encore une remarque à propos de l'article 178 D qui me semble assez difficile à appliquer, notamment le délai de trente jours proposé après les votations pour rendre les comptes. Selon mes renseignements, certains responsables de campagne ont déclaré que c'était impossible à faire.
Malgré ces réserves, le groupe radical se fera un plaisir d'accepter le renvoi de ce projet en commission des droits politiques.
M. Philippe Schaller (PDC). Madame et Messieurs, votre projet de loi a l'immense mérite de soulever un problème réel et de forcer notre parlement à en débattre.
Si l'on peut accepter le fond, permettez-moi de vous dire que la forme est par contre inacceptable. Aucun parti n'a le monopole de la pureté ! Aucun parti n'a le monopole du financement parfois insolite ! Vous désignez un peu trop facilement les bons et les méchants, alors que vous savez bien que rien n'est tout à fait blanc ou noir, qu'il y a toujours une certaine grisaille. Le problème du financement, le trafic d'influence et le clientélisme touchent tous les partis, qu'ils soient de droite ou de gauche.
Quant à nos comptes, ils sont publiquement distribués lors des assemblées générales comme l'a dit Mme Wavre. Notre parti est financé à peu près de la même manière que le parti radical. Il est vrai que, pour les campagnes, nous recevons des dons de personnes physiques et morales, membres ou sympathisants du parti.
Nous, PDC, sommes disposés à renvoyer ce projet à la commission des droits politiques. Il obligera les uns et les autres à reconnaître à la fois la radicalité des choix éthiques et l'indépassable ambiguïté des situations concrètes.
Mme Claire Torracinta-Pache (S). Ce projet de loi aborde une des facettes du financement des partis politiques, à savoir l'information et la transparence de leurs comptes. Ces principes de transparence et du droit du public à l'information nous sont très chers, à nous socialistes, depuis de nombreuses années.
J'en profite, Monsieur Ramseyer - puisque j'en ai l'opportunité - pour vous rappeler que voilà déjà quatre ans que le parti socialiste a déposé une motion sur le droit du public à l'information, concernant toutes les activités de l'Etat, motion que le Conseil d'Etat s'est empressé d'enfouir dans ses tiroirs. Je referme la parenthèse.
Mesdames et Messieurs, les citoyens et les citoyennes ont le droit de savoir qui ils élisent et ce que représentent leurs élus - nos faveurs vont également au projet de loi sur les liens d'intérêts - mais ils ont aussi le droit de savoir comment sont financés les partis de leurs élus.
C'est pourquoi, comme les autres orateurs, nous accueillons favorablement ce projet de loi, même si la procédure décrite paraît un peu lourde et même s'il est peu probable que, hormis des représentants des autres partis, beaucoup de citoyens fassent appel à cette procédure.
Je ne sais pas si le parti socialiste a le monopole de la pureté, mais nous nous sentons très libres et disposés, dès demain, à ouvrir nos comptes à qui voudrait bien les voir.
Permettez-moi encore une remarque d'ordre plus général. Il me semble que le financement global des partis politiques est, en fait, le reflet de ce qu'ils représentent dans un pays. Soit on les considère comme une simple association, une amicale de citoyens partageant des opinions et des convictions communes, et leur financement dépend des cotisations des membres et des élus, ce qui peut engendrer des dépendances par rapport à des donateurs - particuliers, privés ou groupes privés - et cela est gênant.
Soit on les considère comme un rouage indispensable au bon fonctionnement de notre démocratie et comme un élément contribuant à la formation de l'opinion publique, et ils devraient alors recevoir des aides substantielles de l'Etat, ce qui leur permettrait de mieux assurer leur indépendance.
Notre pays appartient, pour l'instant, plutôt à la première catégorie. J'aimerais citer le radical Claude Frey qui avait présidé une commission du Conseil national qui s'était penchée sur ce problème : «Les partis politiques contribuent à la formation de l'opinion publique, mais ils sont les mal-aimés de notre démocratie». Il s'agit là d'un débat important qui se déroule à différents niveaux depuis des années, mais qui sort du cadre du projet de loi nous occupant aujourd'hui. Ce débat est loin d'être clos et il y aura certainement encore beaucoup à faire pour améliorer les choses dans notre pays.
En attendant et pour en revenir au projet de loi 7281, nous sommes d'accord de le renvoyer en commission. Nous souhaitons pouvoir élargir le débat à la problématique générale du financement des partis politiques dans le cadre des travaux de la commission.
Mme Barbara Polla (L). Une des particularités, un des points centraux de l'organisation sociale de la Suisse est le fait que la vie associative y est très développée. Toutes les associations, qu'elles soient sportives, syndicales, politiques, sociales, féministes, écologistes, pour la traversée de la rade, pour l'Europe, «Halte aux déficits», de quartier ou de pétanquistes, sont, aux termes des articles 60 et suivants CCS, des associations privées dont les membres volontaires se réunissent autour d'un projet qu'ils souhaitent défendre et, de ce fait, cotisent pour l'association.
Les partis politiques ne font pas exception à cette règle. Bien sûr, ceux-ci font de la politique, mais ils ne sont pas les seuls. Les associations syndicales, écologistes ou patronales font de même et de nombreuses autres aussi.
La vie comptable de ces associations n'a aucune raison d'être contrôlée par l'Etat. En effet, la gestion de leurs comptes est revue par des contrôleurs, en accord avec les règles de bonne gestion. Il n'est donc nul besoin de savoir quel soutien financier reçoivent les associations en général. Il est vrai que plus le projet est intéressant et plus il obtiendra de financement. En effet, pour un projet associatif qui nous est cher, nous sommes tous prêts à cotiser.
Mme Torracinta-Pache a parlé de la liberté de connaître les comptes des associations et des partis politiques. Je parlerai plutôt d'une autre liberté, celle de la libre décision de soutenir telle ou telle action sociale ou politique qui relève, elle aussi, du libre arbitre de chacun. Certaines personnes ne souhaitent pas que leurs noms soient associés à des dons et cela ne concerne pas seulement les dons à des partis politiques mais aussi ceux à des activités artistiques ou sociales. La liberté de donner de l'argent à une association en laquelle on croit et que l'on désire soutenir fait partie des libertés personnelles et économiques pour lesquelles nous nous engageons, quelle que soit l'association concernée.
De plus, ce projet de loi intervient dans un contexte malheureux, où l'on s'acharne contre une certaine personnalité genevoise. Mais nous y reviendrons plus tard dans ces débats.
En fait, la publication des comptes des partis, telle qu'elle est souhaitée, amènerait certainement des personnes, non pas à renoncer à soutenir un parti, mais à changer leurs pratiques afin de conserver l'anonymat auquel elles ont droit. Sans évoquer la possibilité de la multiplication des dons inférieurs à 500 F, leur soutien ira probablement aux myriades d'associations qui, bien que n'étant pas constituées en parti, n'en ayant pas le nom et ne présentant pas de candidats aux élections - je signale en passant que l'élection d'un conseiller municipal d'une commune de trois mille habitants est une situation difficile à Genève - font néanmoins des recommandations de vote, soutiennent des candidats, proposent des initiatives et lancent des référendums.
On peut encore se poser la question de savoir ce que les motionnaires souhaitent à terme. La probabilité qu'il s'agisse en fait de voir les partis politiques entièrement financés par l'Etat n'est pas négligeable. Là encore, nous nous opposerons radicalement, si je puis dire, Monsieur Dupraz, à une telle perspective.
Pour toutes ces raisons, pour les libertés d'engagement civique et personnel, pour sauvegarder notre vie associative du contrôle de l'Etat, nous nous opposerons fermement à ce projet de loi, bien que nous ne rejetions pas son renvoi en commission.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Notre groupe soutient ce projet de loi avec d'autant plus de sérénité et d'enthousiasme que notre parti n'est pas et n'a jamais été l'objet de financement obscur.
Ce projet de loi tombe particulièrement bien en cette période où les "affaires", comme on les qualifie dans les pays qui nous entourent, se sont tant développées ces dernières années qu'elles ont fait perdre toute crédibilité aux partis politiques. Je pense à la France ou à l'Italie. Il n'est pas souhaitable que de trop nombreuses rumeurs, insistantes pour certaines, donnent une image similaire de la Suisse.
Comme vous le savez, notre parti a toujours été favorable à toute forme de transparence, notamment en matière de fiscalité, avec le succès que l'on a connu. Une transparence dans les comptes des partis pourrait mettre fin à ces rumeurs qui sont peut-être infondées et chaque parti devrait donc y trouver un avantage.
Pour répondre à l'intervention de Mme Polla, je suis frappée que l'on craigne toujours de voir disparaître un certain nombre de généreux donateurs, qui préféreraient l'anonymat. Encore une fois, cela ne nous concerne pas, puisque nous n'avons pas, nous, de généreux donateurs. Mais je ne vois pas très bien pour quelles raisons inavouables on ne pourrait pas aider un parti politique ou une association, sans se cacher derrière l'anonymat, sauf si ce sponsoring représente un moyen de pression sur le parti bénéficiaire.
Or, comme chacun sait que les partis se disent libres de toute pression et qu'aucun n'admet être acheté par un lobby, ce projet de loi est donc le bienvenu. Il permet donc d'appliquer de manière concrète ce qui se dit la main sur le coeur, et il mettra fin aux rumeurs douteuses.
Nous appuyons donc son renvoi en commission, et nous espérons que son étude se fera dans un délai raisonnable, afin qu'il puisse être appliqué lors des prochaines élections cantonales.
Ce projet est renvoyé à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, est modifiée comme suit:
Art. 93, al. 1 (nouvelle teneur)
Clausede retrait
1 L'initiative peut être retirée en tout temps, mais au plus tard 30 jours après la publication ou l'affichage de la décision définitive du Grand Conseil ou du conseil municipal sur sa prise en considération et l'adoption éventuellement d'un contre-projet.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'expérience démontre que le délai de 3 jours pour retirer une initiative à compter de la publication d'un contre-projet approuvé par le Grand Conseil dans la Feuille d'avis officielle est manifestement insuffisant si cette publication intervient quelques jours seulement après le vote du contre-projet par le Grand Conseil.
Un délai de 30 jours pour retirer une initiative après le vote d'un contre-projet est indispensable pour que les initiants aient le temps matériel d'analyser un contre-projet, ce d'autant plus qu'il peut faire l'objet de modifications au moment de son approbation finale, comme ce fut le cas récemment pour l'initiative 103 sur les Transports publics genevois, et de réunir les instances compétentes d'une association.
Le délai proposé n'aurait pas pour effet de retarder la date de la votation, vu les délais nécessaires pour mettre sur pied les votations.
Au bénéfice des considérations qui précèdent, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de faire bon accueil au présent projet de loi.
Préconsultation
M. Gilles Godinat (AdG). Ce projet de loi est plus technique que politique. Il vise à allonger le délai de retrait d'une initiative après prise de position et décision dans notre enceinte. Le délai de trois jours étant très bref - on l'a vu dernièrement à l'occasion de l'initiative 103 - il nous paraît judicieux d'augmenter ce délai de retrait.
M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical accepte ce projet de loi qui lui paraît utile. Il rend toutefois les proposants attentifs au fait qu'une telle mesure peut avoir des effets sur le contenu du contre-projet. Cependant, ces effets seront certainement positifs, car cette modification empêchera de rédiger des contre-projets exclusivement destinés à faire retirer une initiative.
Donc, à tous égards, non seulement au point de la technique législative, car il est vrai que trois jours est un délai totalement insuffisant, mais également sur le fond, votre projet de loi peut apporter quelque chose de neuf.
Ce projet est renvoyé à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Crédit d'investissement
Un crédit de 1 300 000 F est ouvert dès 1996 au Conseil d'Etat pour déplacer la prise d'eau de la station d'alimentation artificielle de la nappe d'eau souterraine du Genevois à Vessy.
Art. 2
Budget d'investissement
Ce crédit est réparti en 2 tranches annuelles inscritesaux budgets d'investissement dès 1996 sous la rubrique69.57.00-543-01.
Art. 3
Couverture financière
La couverture financière de ce crédit est assurée par le financement spécial relatif à la réalimentation de la nappe souterraine de Vessy.
Art. 4
Amortissement
Le taux d'amortissement applicable à cet investissement est fixé au taux déterminé pour l'amortissement de la station de Vessy et de son annexe, le laboratoire de Sierne, soit au moyen de 30 annuités fixes.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Objectifs
Dès les années 1960, la nappe souterraine du Genevois a vu son niveau s'abaisser à la suite d'une surexploitation tant dans les puits genevois que dans ceux de la Haute-Savoie.
Les concertations transfrontalières de l'époque ont abouti à l'arrangement du 9 juin 1978 entre le Conseil d'Etat et le préfet de la Haute-Savoie, relatif à la protection, l'utilisation et la réalimentation de la nappe souterraine franco-suisse du Genevois.
L'Etat de Genève a décidé de construire une station de réalimentation de la nappe de Vessy, en 1979. Les premiers apports à la nappe ont débuté en février 1982. Depuis lors à ce jour, 145 millions de m3 ont été infiltrés dans le sous-sol.
Actuellement la prise d'eau dans l'Arve est située dans une passe de l'ancienne usine de la Société des eaux de l'Arve. Cette usine est actuellement exploitée par les Services industriels de Genève (SIG), la concession de la Société étant échue. Très vétuste, l'usine n'est munie que d'un dégrillage manuel qui engendre d'importants frais de main-d'oeuvre.
Les SIG ont étudié la possibilité de construire une centrale hydroélectrique sur le site de l'ancienne usine. Ce projet est actuellement renvoyé sine die pour des raisons économiques. Par contre, les SIG ont construit de nouveaux puits au parc Bertrand et au chemin du Velours, qui remplacent les puits vétustes de Vessy, trop vulnérables en cas de pollution accidentelle de la rivière.
Afin de supprimer l'ancien dégrillage, et de ne pas empêcher la construction, à long terme, d'une future centrale hydroélectrique, il est nécessaire de construire une nouvelle prise d'eau, située plus en amont, sur la rive gauche, et de la raccorder par une canalisation nouvelle, branchée sur l'actuelle conduite qui alimente la station de réalimentation, où l'eau brute de la rivière est dessablée, désinfectée, floculée et filtrée, avant de rejoindre par infiltration, la nappe d'eau dans le dispositif d'épandage souterrain de la «Grande Fin».
Besoins
Prise d'eau avec ses équipements mécaniques...........................
528 000 F
Conduite Ø 700 mm, longueur 250 m de raccordement à la conduite actuelle..........................................................................
584 000 F
Etablissement du projet définitif, requête en autorisation de construire, honoraires...................................................................
188 000 F
Total
1 300 000 F
Impacts à attendre
Seules les nuisances usuelles d'un chantier sont à attendre pendant 3 à4 mois. Les prélèvements dans l'Arve pour réalimentation ne sont pas modifiés par la prise d'eau future et restent fixés à 0,6 m3/seconde, soit moins de 1% du débit moyen de la rivière.
Budget prévisionnel d'exploitation
Ces investissements n'entraîneront pas de dépenses d'exploitation sup-plémentaires.
Quant à la charge financière annuelle comprenant les intérêts au taux de 5,75% et l'amortissement au moyen de 30 annuités, elle se montera à91 930 F.
Couverture financière
La charge financière estimée à 91 930 F sera portée au financement spécial relatif à la réalimentation de la nappe souterraine de Vessy et couverte par une adaptation des redevances en matière de droit d'eau pour le captage des eaux souterraines de l'Arve (voir plan financier annexé).
Vu ce qui précède, le Conseil d'Etat vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un accueil favorable au présent projet de loi.
Préconsultation
M. Max Schneider (Ve). Ce projet de loi dépasse la simple installation de pompage sous la nappe d'eau souterraine du Genevois à Vessy. Comme l'indique les objectifs de ce projet de loi, on a déjà injecté dans le sous-sol 145 millions de mètres cubes.
Il y a environ cinq ans, lors d'une interpellation de mon cher collègue M. Loutan qui s'inquiétait de la baisse de niveau de cette nappe souterraine, il lui a été répondu qu'il n'y avait pas de danger et que cette nappe était maintenue à niveau. Il s'inquiétait aussi de possibles pollutions ou d'une saturation du filtrage à travers le gravier. On lui a encore répondu : «Pas de problème, M. Loutan, les choses sont en ordre !».
Les choses ne semblent pas si en ordre que cela, puisque cet intéressant projet de loi nous est proposé. Je remercie beaucoup les personnes qui ont écrit les objectifs aux pages 2 et 3, parce qu'elles nous expliquent ce qui se passe dans cette nappe souterraine.
C'est pour en savoir davantage que je souhaiterais, Madame la présidente, que ce projet de loi soit renvoyé à la commission de l'environnement, afin que nous puissions entendre les tenants et aboutissants des travaux concernant cette nappe phréatique, notamment en coordination avec nos voisins français, ou à la commission des affaires régionales, puisqu'il s'agit d'un problème franco-suisse d'importance.
Le parti écologiste ne s'oppose pas à ce projet pour l'instant, mais s'y intéresse de près, de même qu'à la vision future de la construction d'une centrale hydroélectrique, sur le site de l'ancienne usine de Vessy.
La présidente. Le Bureau et les chefs de groupe avaient décidé de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'énergie. Puisque je ferai voter sur votre proposition, je vous prierai de choisir entre la commission de l'environnement et celle des affaires régionales. (M. Annen interrompt la présidente.)
C'est ce que je viens de dire Monsieur Annen ! Vous ne m'écoutez pas !
M. Max Schneider. Excusez-moi de n'être pas intervenu au Bureau auparavant, mais je pense que M. Haegi, puisque ce projet de loi émane de son département, pourrait choisir lui-même la commission qui lui semble la plus adéquate.
M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais intervenir sur un autre registre que celui évoqué par M. Schneider. La question que nous nous posons est de savoir s'il appartient à l'Etat de Genève de payer cette somme ou si cela ne serait pas plutôt le rôle des Services industriels.
Si l'on se réfère à l'exposé des motifs, il en ressort que le déplacement de cette prise d'eau est essentiellement justifié par le fait de réserver la possibilité de réaliser une future centrale hydroélectrique à cet endroit. Certes, la réalisation de cette centrale est différée dans le temps, mais il n'empêche qu'il apparaît que le besoin de déplacer la prise d'eau est bien provoqué par les projets futurs des Services industriels. Dès lors, il semblerait logique que ce soient les Services industriels, qui ont déjà racheté les Eaux de l'Arve, qui supportent cette dépense.
Il faudra sérieusement examiner la question, car, en l'état des finances cantonales, il n'y a pas de petites économies, d'autant plus que les Services industriels ont moins de difficultés que l'Etat à financer leur budget d'équipement.
Vous hochez la tête, Monsieur Haegi, mais vous savez comme moi qu'il n'y a pas - malheureusement diront certains, heureusement diront les Services industriels - de possibilité de référendum contre la hausse des taxes SI. Celles-ci bénéficient ainsi, toutes les années, d'une adaptation de l'ordre de 4% à 6%. Les Services industriels se trouvent donc, malgré tout, dans une situation plus facile que l'Etat. C'est pourquoi je suggère que nous leur demandions de prendre cette dépense à leur charge.
M. Roger Beer (R). Je ne suivrai pas les traces de M. Grobet, bien que je reconnaisse que la question mérite largement d'être posée. Je pense, au contraire, qu'il doit certainement y avoir une bonne raison pour que ce projet soit présenté par l'Etat.
Je soutiens M. Schneider quand il pose la question de l'utilisation de l'eau dans le bassin genevois, mais je crois que celle-ci dépasse cette simple demande de financement pour la création d'une nouvelle bouche d'alimentation en eau potable.
Genève a la chance extraordinaire de bénéficier dans son bassin de sources d'eau énormes, entre autres le lac, un fleuve et une très grande rivière. De tout temps, traditionnellement, on a réalimenté la nappe phréatique parce qu'on a reconnu la qualité purificatrice du sol. A ce titre, le travail effectué par l'Etat ou les Services industriels n'était que la traduction artificielle, par la main de l'homme, de ce qui se passe dans la nature. Dans d'autres cantons, comme Bâle par exemple, certaines forêts sont totalement mises à ban, parce qu'on y déverse de l'eau pour la récupérer quelque temps après, une fois purifiée.
Le problème qui se pose ici est particulier : la station qui appartenait aux Eaux de l'Arve étant totalement vétuste, on ne peut pas, pour des raisons financières, la reconstruire actuellement, ce que nous pouvons tous comprendre. Pour réserver une amélioration ou une reconstruction future, il a donc été décidé de reconstruire cette source d'alimentation un peu en amont.
Il sera intéressant d'écouter toutes les raisons techniques qui justifient ce projet et, par la même occasion, d'obtenir un certain nombre de réponses aux questions que le parti écologiste, et M. Schneider en particulier, se posent. Je propose pour ce faire que le projet de loi soit renvoyé à la commission de l'énergie et des SI, plutôt qu'à la commission des affaires régionales.
Excusez-moi, Monsieur Haegi ! J'espère que vous ne serez pas vexé, mais je pense que la commission des affaires régionales - on le voit dans son rapport - parle déjà de beaucoup de choses et il serait peut-être plus judicieux de laisser ce problème de la nappe phréatique au canton de Genève, même si son impact est largement régional. Je vous invite donc à renvoyer ce projet de loi à la commission de l'énergie.
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Mais, Monsieur le député Beer, il n'y a rien de vexant dans votre proposition !
Mesdames et Messieurs les députés, vous me permettrez de vous sourire malicieusement quand j'entends M. Grobet suggérer que nous allions du côté des Services industriels, parce que les augmentations de tarifs ne sont pas exposées à des référendums. Il y a des tentations qui peuvent surgir en certaines circonstances ! Dans le cas particulier, elles ne sont que momentanées.
Pour bien étudier ce projet, qui a bien évidemment une dimension financière, ainsi qu'une dimension environnementale qui ne saurait être banalisée, je crois, Monsieur Schneider, que vous pouvez suivre la suggestion de vos collègues. Quant à mes collaborateurs et moi-même, nous viendrons à la commission de l'énergie au moment où vous le souhaiterez.
Finalement, qu'importe la commission qui traitera de ce sujet, l'essentiel étant que vous obteniez les réponses aux questions que vous vous posez. Je vous assure de la disponibilité de mon département.
La présidente. Monsieur Schneider, maintenez-vous votre proposition de renvoyer ce projet de loi à la commission des affaires régionales ?
M. Max Schneider (Ve). Madame la présidente, après avoir entendu M. Haegi et M. Beer, je regrette de dire qu'un problème beaucoup plus grave n'a encore pas été soulevé : on touche les 25% de la consommation d'eau du canton de Genève...
La présidente. Nous sommes en préconsultation, M. Schneider. Je vous interrogeais simplement sur le maintien de votre proposition de renvoyer ce projet de loi à la commission des affaires régionales.
M. Max Schneider. Pour être plus précis, je propose de renvoyer ce projet de loi à la commission de l'environnement, qui est genevoise comme M. Beer le souhaitait, afin qu'on puisse traiter ce sujet à Genève.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission de l'environnement et de l'agriculture est rejetée.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission de l'énergie et des Services industriels est adoptée.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Depuis 1967, l'Etat de Genève manifeste traditionnellement sa solidarité en intervenant ponctuellement au titre de l'aide humanitaire en faveur de populations victimes de crises aiguës, notamment en raisons de catastrophes naturelles ou de conflits armés importants, par des subventions tirées sur la part de la taxe du droit des pauvres qui lui est attribuée. Cette taxe est due sur tous les divertissements qui font l'objet d'une contre-prestation pécuniaire.
A deux reprises, les autorités cantonales ont eu l'occasion de manifester leur solidarité en faveur des victimes du conflit qui sévit en ex-Yougoslavie en allouant une subvention au titre de l'aide humanitaire. En effet, le 2 octobre 1992, la loi 6874 allouait un montant de 500 000 F à la Croix-Rouge suisse, destiné à soutenir son action de distribution de biens de base (vivres, habillements, articles d'hygiène, couverture, tentes, médicaments). Le 5 novembre 1993, la loi 7043 attribuait une subvention de 500 000 F au Haut Commissariat pour les réfugiés, afin de contribuer au financement de l'achat de couvertures et de sacs de couchage pour les réfugiés.
Ces deux lois, ainsi que celle qui vous est présentée aujourd'hui, étaient munies de la clause d'urgence; celle-ci permet un virement immédiat de la subvention puisque la loi votée en question n'est pas soumise au droit de référendum, qui pourrait, normalement, être exercé dans un délai de quarante jours.
Au vu de l'ampleur des besoins auxquels sont confrontées quotidiennement les populations civiles de l'ex-Yougoslavie ainsi que les organisations d'aide humanitaire présentes sur le terrain, le Conseil d'Etat appelle à nouveau à un geste de solidarité. L'opération militaire lancée par les forces croates le 4 août dernier a permis à la Croatie de récupérer la plupart des territoires sous contrôle des forces serbes en Krajina. La situation humanitaire est particulièrement préoccupante et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) estime à 200 000 réfugiés le nombre de personnes à assister dans un prochain avenir. Suite à l'arrivée d'un flot massif de réfugiés en provenance de la Krajina, le CICR a mis en route un programme de distribution de nourriture, de matériel sanitaire ainsi que de matériaux pour construire des abris de fortune. Il a aussi veillé à la mise sur pied d'une cuisine populaire et d'une distribution d'eau potable dans les lieux publics tout en augmentant son assistance médicale dans les hôpitaux de la région. Le CICR organise également un pont aérien vers cette région de la Bosnie. Il a obtenu le feu vert de toutes les autorités en présence, ainsi que celui du comité des sanctions de l'ONU chargé de surveiller l'application de l'embargo sur ce pays.
Le programme d'aide du CICR pour l'ex-Yougoslavie s'élève à 82 433 391 F. Au 9 août 1995, les dons reçus et promis se montent à 49 838 354 F, laissant ainsi un solde de 30 953 733 F à couvrir. Cependant, au vu de l'augmentation des activités en raison de l'aggravation de la situation depuis le début de l'année, des dépenses supplémentaires sont à envisager.
Afin de parer au plus pressé, le CICR nous a proposé de participer à son programme d'assistance aux personnes déplacées et de contribuer au financement de l'achat de l'aide alimentaire et non-alimentaire, ainsi qu'à l'installation de réservoirs et de rampes de distribution d'eau potable. En participant à ce programme, l'Etat de Genève pourrait fournir une aide concrète et ciblée.
C'est au vu de ce qui précède que nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accueillir favorablement le présent projet de loi en acceptant d'allouer une aide financière de 500 000 F en faveur des populations civiles de l'ex-Yougoslavie.
Préconsultation
M. Bernard Annen (L). Eu égard au degré d'urgence de ce projet de loi, nous vous proposons la discussion immédiate.
Mise aux voix, la proposition de discussion immédiate est adoptée.
Premier débat
M. Luc Gilly (AdG). Je félicite le Conseil d'Etat pour ce projet de loi. Il nous réjouit tous. On décide d'envoyer 500 000 F pour des projets de la Croix-Rouge urgents et nécessaires en Yougoslavie. C'est bien !
Vu le débat houleux d'hier soir, qui a également porté sur ce sujet, j'aimerais juste dire que les Yougoslaves ont pensé qu'ils seraient défendus par leur propre armée. Cela n'a pas été le cas ! Je vous rappelle aussi, pour que vous y réfléchissiez trente secondes, que 500 000 balles...
La présidente. 500 000 francs, Monsieur Gilly !
M. Luc Gilly. ...500 000 francs : c'est le vol de cinq heures d'un bombardier, qui pilonne la Yougoslavie ! Cinq heures de vol ! Voilà le résultat !
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
allouant une subvention au Comité international de la Croix-Rouge pour ses activités de secours en faveur des populations de l'ex-Yougoslavie
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Une subvention de 500 000 F est allouée au Comité international de la Croix-Rouge pour soutenir ses activités de secours en faveur des populations de l'ex-Yougoslavie.
2 Le Conseil d'Etat est autorisé à prélever cette somme sur la part du droit des pauvres attribué à l'Etat.
Art. 2
L'urgence est déclarée.
La commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil, présidée par Mme Fabienne Bugnon, s'est penchée sur le PL 7242 les 14 et 28 juin 1995. Elle a été assistée dans son travail par M. Yves Martin, secrétaire général du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales et par M. Robert Hensler, chancelier.
Introduction
Les membres de l'actuel bureau du Grand Conseil, comme tous leurs prédécesseurs, d'ailleurs, ont été frappés par la brièveté du délai accordé aux députés pour lire et assimiler les textes qui leur sont soumis à chaque session. Souvent, en effet, les parlementaires reçoivent les projets de loi, motions et rapports à l'ordre du jour moins d'une semaine avant la séance plénière. Ils doivent consacrer leur week-end et leurs loisirs à la lecture des différents textes, afin d'être au courant pour les caucus, qui ont lieu généralement en début de semaine, dans les divers groupes qui constituent le Grand Conseil genevois.
Ceci est évidemment une conséquence du parlementarisme de milice.
Les membres du bureau ont donc unanimement présenté ce projet de loi qui vise à allonger les délais de lecture, dans le but d'améliorer le confort des députés, et, par suite, leurs compétences et leur efficacité.
Discussion de la commission
A dire vrai, les auteurs du projet avaient espéré allonger encore plus les délais de lecture. Ils avaient proposé 13 jours. De même, ils proposaient le dépôt des textes à la Chancellerie 23 jours avant la séance. Mais des objections, d'ordre technique principalement, ont été soulevées en commission. L'administration, qui a la charge de gérer l'activité législative, doit en effet faire face à diverses difficultés pratiques.
Les délais d'impression, par exemple, sont actuellement de trois jours et paraissent incompressibles. Le délai de distribution postale, tributaire du volume de la correspondance, n'est pas de la compétence des instances cantonales.
Dans un autre domaine, il faut relever que tous les députés ne maîtrisent pas l'informatique, il s'en faut de beaucoup. Et même les initiés à l'ordinateur ne sont pas à l'abri d'erreurs, de « virus », de pannes ou de malentendus. Car tous les textes sont revus, parfois corrigés ou retapés avant de passer à l'imprimerie, ce qui mange encore du temps.
Il apparaît en outre que l'allongement trop important des délais poserait à l'administration de délicats problèmes de planification et de préparation du travail du législatif et de l'exécutif.
Certains commissaires ont vivement souhaité qu'une collaboration intense soit instaurée entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil, notamment son bureau, afin de résoudre au mieux d'agaçants petits problèmes techniques ou administratifs qui alourdissent et compliquent la tâche des députés.
C'est d'ailleurs dans cette optique que le chancelier, M. Hensler, a annoncé son intention d'installer dans l'enceinte de l'Hôtel de Ville, au rez-de-chaussée, des sortes de boîtes aux lettres où chaque député pourrait retirer son courrier, en venant assister aux séances de commission, par exemple. On pourrait aussi y déposer des documents destinés à la Chancellerie, en dehors des heures d'ouverture des bureaux.
C'est un premier pas. Les députés souhaitent que soient prises d'autres décisions pratiques propres à leur faciliter la tâche.
Finalement, la commission, par 9 oui contre 3 non (L) et 1 abstention (Verts) vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, que tous les textes utiles à la discussion en plénière parviennent aux parlementaires 10 jours ouvrables avant la séance (article 8, alinéa 2).
L'article 8, alinéa 3, demeure tel qu'il est actuellement (le bureau doit être en possession des textes 16 jours avant la séance).
Elle propose également de fixer l'entrée en vigueur du nouvel article 8, alinéa 2, au 9 novembre 1995.
Premier débat
M. Jean-Luc Ducret (PDC). Il s'agit, par souci de cohérence, de modifier le délai prévu à l'article 8, alinéa 3, en le portant à vingt et un jours, c'est-à-dire cinq jours de plus que celui prévu actuellement. Pourquoi pas quatre jours ? Simplement parce qu'il s'agit de permettre à la chancellerie et, en particulier, au service du Grand Conseil, de bénéficier du week-end pour imprimer les textes.
Mme Evelyne Strubin (AdG). Il faut rappeler tout d'abord que ce projet de loi provient du Bureau du Grand Conseil qui a constaté, à l'instar de tous les groupes de ce parlement, le manque de temps mis à disposition des députés pour prendre connaissance des textes qu'ils doivent voter.
En effet, les textes leur parviennent le vendredi précédant les séances plénières. Passé le week-end, dès le lundi, voire le mardi pour certains, ils doivent être assimilés et analysés pour les caucus. Les deux ou trois jours restant sont superflus, car, une fois les décisions prises en caucus, les textes ne sont plus forcément lus.
Ce manque de temps révèle les difficultés d'un parlement de milice et la disparité entre les parlementaires professionnels et les autres. C'est pourquoi cette proposition du Bureau a beaucoup intéressé les membres de la commission des droits politiques.
Néanmoins, il est vite apparu que modifier les délais de dépôt des textes poserait des problèmes. En effet, il aurait fallu prévoir des exceptions pour le budget et les comptes, et entrevoir la possibilité de nombreuses demandes de dérogation pour clause d'urgence, ce qui aurait pu aboutir à d'inutiles chamailleries en cas de refus.
De plus, trop avancer les délais équivaudrait à ne plus suivre l'actualité et on arriverait à perdre d'un côté le temps de réflexion gagné de l'autre, ce qui est une mauvaise opération. MM. Hensler et Vodoz ont d'ailleurs relevé en commission que cela pourrait aller jusqu'à nous empêcher de siéger ou qu'il faudrait alors nous envoyer des polycopiés qui reviendraient cher, les délais d'impression et de livraison étant, comme le mentionne le rapport, incompressibles.
Devant ces éléments, la commission a jugé préférable de ne pas toucher au délai de dépôt et à renoncer aux treize jours proposés dans le projet de loi du Bureau. Cependant, considérant que les députés ne doivent pas seulement «trouver» le temps de lire les textes mais l'«avoir» et que la connaissance des sujets traités relève de l'équilibre des pouvoirs, nous avons jugé utile de procéder au basculement en amont des jours moins nécessaires pour nous après les caucus. Nous n'avons donc demandé que dix jours ouvrables avant les plénières, ce qui a été accepté par neuf voix pour, deux contre et deux abstentions.
Etant donné que M. Haegi a lui-même souligné «que ce projet de loi ne vise pas à autre chose que l'efficacité du Grand Conseil, qu'il n'y a pas d'opposition entre le législatif et l'exécutif, et qu'il est du rôle du Conseil d'Etat d'exécuter les demandes du Grand Conseil», et étant donné que nous avions fait un pas vers le Conseil d'Etat en comprenant les raisons de son opposition aux modifications du délai de dépôt et en restreignant nos demandes, nous avons pensé pouvoir obtenir sa mise en pratique. Ce d'autant plus que le vote du projet n'a pas soulevé d'objections techniques de la part de M. Martin, représentant du département. D'ailleurs le Conseil d'Etat bénéficie de plusieurs pistes pour atteindre ce but, comme M. Hensler et certains députés l'ont relevé en commission, par exemple l'utilisation optimale du réseau informatique, l'amélioration de l'organisation du service de la législation, la réduction du délai de remise des textes, les envois fractionnés, un service de boîte aux lettres ou autres.
Il est également important de relever que les textes du Conseil d'Etat constituent 95% du volume à étudier et qu'ils arrivent parfois en retard, empiétant ainsi sur le délai imparti aux députés. Il serait donc aisé, pour le Conseil d'Etat, d'apporter déjà une grande amélioration en respectant les délais. Nous pouvons d'ailleurs l'y aider nous-mêmes en ne nous y prenant pas juste à la dernière limite et en faisant preuve d'indulgence, si la mise en vigueur de cette loi s'avère chaotique. A ce que je sache, aucun député n'a jamais traîné le Conseil d'Etat au Tribunal pour un peu de retard.
Nous sommes persuadés qu'en collaborant cela doit être possible. En tout cas, si cela ne l'était pas, je me poserai de sérieuses questions sur l'avenir des réformes du parlement en cours à la commission des droits politiques, réformes auxquelles bon nombre de groupes ont participé en renvoyant des motions ou des projets de lois à cette commission.
S'il fallait, pour mettre en place cette amélioration, déplacer le délai de dépôt malgré tous les désagréments déjà exprimés, nous serions contraints de devoir y renoncer, ce qui nous navrerait. C'est pourquoi nous voterons la proposition, telle que sortie de la commission, sans l'amendement de M. Ducret, et nous souhaitons que vous agissiez de même.
Mme Michèle Wavre (R), rapporteuse. Je vous suggère de refuser cet amendement de M. Ducret, parce que la commission a longuement discuté du problème et a réussi à trouver un consensus tout à fait satisfaisant, d'une part, et parce que nous n'avons pas eu la chance de lire cet amendement avant la séance, d'autre part. Nous aurions apprécié le connaître plus tôt afin de pouvoir nous décider à son sujet, mais, en principe, nous nous y opposons.
M. Jean-Luc Ducret (PDC). Cet amendement me semble indispensable concernant ce délai dans la mesure...
M. Claude Blanc. Marie-Laure Beck ne serait pas d'accord !
M. Jean-Luc Ducret. ...où il avait été envisagé d'envoyer les textes en photocopie. Le Bureau du Grand Conseil a tenté ce genre d'envois et s'est rendu compte que les plis adressés à tous les députés étaient beaucoup trop lourds et que les frais postaux ainsi induits devenaient exagérés. Il fallait donc donner la possibilité au service du Grand Conseil d'imprimer les textes, comme cela se fait actuellement et de maintenir cette pratique. Voilà pourquoi le délai de vingt et un jours est indispensable au service du Grand Conseil.
Il s'agit simplement de nous donner un autre rythme de travail. Cela a été dit en commission et je le répète ici : en principe, il n'y a aucun texte sérieux qui ne mérite d'être débattu dans une urgence telle que l'on ne puisse donner quatre, voire cinq jours de plus, pour son impression. Il s'agit là de la qualité de notre travail, de notre crédibilité. Nous ne devons pas travailler dans la précipitation. Le service du Grand Conseil ne peut pas faire de miracles, et ne peut pas travailler jour et nuit. Il faut lui donner ce délai de quatre jours supplémentaires.
M. Bernard Annen (L). Nous suivrons les conseils du rapporteur, parce que les délais proposés ressortent des discussions et d'un consensus de la commission qui a certainement étudié tous les cas de figure.
Faisons attention, parce que trop allonger le délai pourrait se retourner contre nous, et je ne crois que cela soit uniquement en fonction de tel ou tel pouvoir. Il faut trouver un équilibre de manière que nous puissions être le plus efficaces possible. On doit essayer d'appliquer ce règlement avec une certaine souplesse d'interprétation, et faire confiance au Bureau du Grand Conseil pour qu'il puisse être le mieux à même d'exécuter son travail. Ce projet a été étudié de telle manière qu'il a donné satisfaction à l'ensemble de la commission. Il ne me semble pas judicieux de revenir à la dernière minute sur un délai de ce type.
Pour terminer, je préciserai qu'un projet de loi est évolutif et que si, réellement, celui-ci ne donne pas satisfaction, nous pourrons toujours rajouter les jours nécessaires à la modification du délai. Nous devons à tout prix conserver de la souplesse les uns et les autres et c'est si vrai, Monsieur Ducret, qu'il n'y aurait pas de possibilité de discussion immédiate dans le cadre de nos travaux si nous devions nous cantonner à un carcan de dates. Je vous suggère donc, pour le moment, de respecter les résultats issus des travaux de la commission et de maintenir les délais qui ont été décidés.
Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Une fois n'est pas coutume, nous sommes d'accord avec le groupe libéral et nous voterons ce projet de loi tel quel.
Je ne me rappelle pas, Monsieur Ducret, que vous ayez jamais présenté cet amendement en commission. Rien n'est écrit dans le rapport à ce sujet, et je trouve que ce n'est pas très sérieux de revenir avec des amendements en séance plénière, après le travail en commission. Vous auriez pu proposer ces amendements en commission. Vous auriez dû vous préparer pour être à jour dans les séances de commission et présenter vos propositions à cette occasion.
Je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter les conclusions du rapport de Mme Wavre.
M. Jean-Luc Ducret (PDC). Vous l'aurez bien compris, je l'espère : ce n'est pas mon amendement personnel, mais le fruit de l'expérience faite depuis l'adoption du rapport de Mme Wavre. Le Bureau du Grand Conseil a examiné comment, dans la pratique, on peut envoyer ces textes dans les délais prévus.
Si vous voulez maintenir le texte tel que proposé, faites-le ! Je le voterai comme vous ! Simplement, on se rendra compte, à l'expérience, que nombre de vos textes seront refusés par le Bureau du Grand Conseil, parce qu'ils n'auront pas pu être distribués dans les délais.
Ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1 (souligné)
Art. 8, al. 3 (nouveau)
La présidente. M. Ducret a déposé un amendement visant à introduire à l'article 8, un alinéa 3, dont la teneur serait la suivante :
«3 Pour être inscrits à l'ordre du jour, les divers textes doivent être en possession du Bureau 21 jours avant la séance.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Ce projet est adopté en deuxième débat.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
modifiant la loi portant règlement du Grand Conseilde la République et canton de Genève
(B 1 1)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
La loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève, du 13 septembre 1985, est modifiée comme suit:
Art. 8, al. 2 (nouvelle teneur)
2 Tous les documents utiles à la discussion doivent parvenir aux députés 10 jours ouvrables avant la séance du Grand Conseil, sauf urgence motivée par le bureau.
Art. 2
La présente loi entre en vigueur le 9 novembre 1995.
RAPPORT DE PREMIERE MAJORITE
Lors de sa séance du 8 juin 1995, le Grand Conseil renvoyait en commission le projet de loi 7244. Sous la présidence de M. Jean-Claude Genecand, la commission du logement a étudié ce projet les 19 et 26 juin 1995, en présence de M. Claude Haegi, conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales (DIER), de Mmes Karin Salibian, secrétaire adjointe, Karine Bellinazzo Spahni, directrice de l'office du logement social, MM. Mario Cavaleri, directeur de l'office financier du logement, Claude Page, directeur adjoint, Louis Cornut, chef de la division des études d'aménagement au département des travaux publics et de l'énergie.
1. Historique
Le projet de loi 7244 s'inscrit dans une suite logique des lois adoptées antérieurement, soit :
- loi 6617, crédit de 31,5 millions, du 8 mars 1991;
- loi 6690, crédit de 32,0 millions, du 7 octobre 1993.
Il va notamment dans le sens voulu par la loi du 21 juin 1991 préconisant la construction de 3000 HBM dans les 8 ans, dont les ¾ à construire.
2. Situation et évolution
L'application des lois antérieures a permis d'entreprendre la construction de 104 logements et l'achat de 358 logements (6617) et respectivement 331 et 32 logements (6690).
Les dépenses en dotations effectuées au profit de ces deux lois laissent actuellement un solde disponible de 2 975 000 F. La mise en oeuvre du projet de loi 7244 permettra la construction de 305 logements et l'acquisition de 150 logements supplémentaires. L'aboutissement de ce train de lois donnera à terme 1 560 logements HBM nouveaux (1 020 construits et 540 acquis). C'est donc plus de 50 % des prévisions de la loi du 6 juin 1991 qui seront accomplies dans une période de difficultés non négligeables des finances publiques et cela dans un secteur social favorisant les personnes à revenus modestes.
A cela il faut rajouter 280 logements HBM construits ou à construire sans dotation de l'Etat par diverses institutions grâce à des facilités d'implantation, soit au total 1 840 logements HBM.
3. Travaux de la commission
La mise à disposition de plusieurs tableaux et explications a permis aux commissaires d'étudier à fond l'application des lois 1991 et 1993 concernant les opérations HBM. La nature diverse des constructions et achats a montré que le Conseil d'Etat s'est toujours attaché à sortir dans tous les cas la solution pratique qui permettait d'aboutir au mieux dans l'utilisation des sommes allouées. La liste des opérations prévues dans le cadre du projet de loi 7244 permet d'ores et déjà à terme une réalisation d'environ 305 logements. L'aide fédérale sera demandée dans chacun des cas en complémentarité des subventions cantonales. La direction générale du logement étudiera les offres d'achats proposées au DIER et aux fondations immobilières de droit public quant aux 150 logements à acquérir faisant partie du projet de loi 7244.
Le pilotage des opérations est donc du ressort du Conseil d'Etat qui renseignera le Grand Conseil sur les réalisations de logements ainsi qu'il est tenu de le faire chaque année dans le rapport de gestion, au sens de la loi du 21 juin 1991. D'autre part, les explications fournies à la commission du logement vont totalement dans le sens de la motion 972 adoptée par le Grand Conseil le 17 février 1995.
Le Conseil d'Etat s'engage en outre à assurer le mieux possible une mixité des différentes catégories de logements pour ne pas créer des zones à clientèle unique prétéritant une harmonie de la population et un déséquilibre fiscal nuisible aux finances des communes genevoises.
4. Situation économique
Le secteur du bâtiment est actuellement touché de plein fouet par une récession notoire. La diminution des postes de travail due à la baisse des dépenses de construction fait apparaître un chômage d'envergure qui malheureusement a tendance à s'accroître. En 5 ans, le nombre d'emplois dans la construction et le génie civil a diminué de 50%, et 30% des PME dans ce domaine ont disparu. Un investissement à hauteur de 2 milliards seul permettrait le maintien de l'emploi. C'est dans cette optique que le projet de loi 7244 avec ces 30 millions générant 90 millions d'investissements s'inscrit. Il est donc une volonté manifeste d'apporter sa contribution au redressement du secteur de la construction tout en restant dans les limites possibles des finances publiques et du plan quadriennal adopté le 2 septembre 1992.
Il ne s'agit plus pour les parlementaires de freiner l'accomplissement de ces investissements par un interventionnisme de contrôles tatillons, mais de faire en sorte d'appuyer le Conseil d'Etat en lui enjoignant d'engager d'urgence les constructions prévues par ce projet de loi. Une responsabilité primordiale doit se faire pour mettre en avant les problèmes du moment : l'emploi, le combat contre le chômage et la relance de l'investissement par l'exemple des collectivités publiques.
5. Conclusion
C'est à l'unanimité que la commission du logement a approuvé le projet de loi 7244 et vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'en faire de même.
RAPPORT DE DEUXIEME MAJORITE
page 1 A4
page 2
page 3
Premier débat
La présidente. J'ai une communication à vous faire. M. Ferrazino viendra à la table des rapporteurs. En effet, il avait annoncé, en son temps, le dépôt d'un second rapport de majorité qui avait été accepté par la commission. Pour des raisons indépendantes de sa volonté, M. Ferrazino n'a pas pu le déposer à temps. Aussi le Bureau et les chefs de groupe ont-ils décidé d'accepter qu'il défende son second rapport de majorité. Cela crée un problème au plan de la procédure. Si vous examinez la loi portant règlement du Grand Conseil, vous constaterez que l'article 77, concernant les rapporteurs, prescrit que ceux-ci doivent prendre la parole dans un ordre déterminé, celui de la majorité l'ayant en premier. L'article 188, lui, parle de la possibilité de plusieurs rapporteurs de minorité. Ce point devra être éclairci, et nous le ferons trancher par la commission législative. Mais en l'état, M. Ferrazino pourra défendre son second rapport de majorité. Monsieur Pierre Ducrest, rapporteur de première majorité, vous avez la parole.
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de première majorité. Bien que ces déclarations, à propos du rapport de M. Ferrazino, soient assez claires, vous comprendrez notre surprise de recevoir un tel document le jour même de la plénière. Certes, en date du 26 juin 1995, M. Ferrazino avait annoncé un dépôt de rapport de deuxième majorité, mais lors de l'avant-dernière séance de la commission du logement, soit le 4 septembre, il a déclaré qu'il y renonçait : d'où notre étonnement. Nous voulons bien consentir à ce que le Bureau de ce parlement accepte, dans la forme, le dépôt d'un tel rapport, bien qu'il s'agisse, à la fois, d'un élément nouveau et d'un fâcheux précédent, mais vous admettrez, Monsieur le rapporteur de deuxième majorité, que vous nous aviez habitués à mieux, question classe !
Ce rapport est un réquisitoire axé sur le professionnalisme dans le blocage des projets. Vous parlez de construction, mais vous sous-entendez démolition. Lorsque vous dites ne plus vouloir d'achats à hauteur des 25% prévus dans la loi sur les trois mille HBM du 21 juin 1991, nous nous en étonnons, sachant que vous et vos amis aviez voté cette loi à l'époque. D'autre part, vous avez voté les lois concernant la dotation en millions pour les constructions HBM.
Vous parlez de relance de la construction. Je ne voudrais pas vous faire un cours à ce sujet, Monsieur le rapporteur de deuxième majorité, mais vous dire que dans une construction, il y a, certes, le gros oeuvre, mais également le second oeuvre. L'achat de bâtiments, qui nécessitent souvent une rénovation et une transformation du fait des lois modernes en vigueur, fournit du travail aux entreprises de second oeuvre, qui comptent dans la branche de la construction. Cependant, vous prenez le risque énorme de supprimer des emplois dans le second oeuvre.
Avec le premier amendement, vous dites qu'il faudrait revoir les lois que vous avez votées naguère, alors que celles-ci sont déjà engagées dans les constructions et qu'il ne reste que 3 millions à disposition sur les deux lois de dotation de 1993, et non de 1995, comme indiqué dans votre rapport. Je suppose que c'est une faute de frappe.
Le deuxième amendement fait, en définitive, que vous voulez recréer des commissions, bloquer à nouveau le départ de ces constructions, alors que vous prétendez défendre une fraction de la population, la plus démunie, qui a urgemment besoin de logements sociaux HBM.
Alors, voyez-vous, Monsieur le rapporteur de deuxième majorité, vu que vous quittez votre rôle, nous reprendrons nous-mêmes le flambeau, parce que persuadés que ces gens ont besoin d'habitations sociales à bon marché.
Nous rejetterons donc vos amendements et voterons le projet tel qu'il est ressorti en commission. Je conclurai en disant que je suis encore étonné que vous ayez voté vous-même, en commission, le projet tel qu'il nous était présenté et que, par-là même, l'unanimité a été obtenue.
M. Christian Ferrazino (AdG), rapporteur de deuxième majorité. M. Ducrest venant de soulever des problèmes de forme, je lui répondrai brièvement, plus par courtoisie que par nécessité.
Il est vrai, Monsieur Ducrest, que j'ai renoncé à déposer un rapport de deuxième majorité à la commission du logement, mais il s'agissait d'un rapport écrit. Toutefois, nous avons la possibilité, comme vous le savez, de déposer un rapport oral jusqu'à la plénière. Mais notre règlement est ainsi fait que le rapport oral est aussi un rapport écrit. C'est pourquoi vous avez reçu sur vos bancs ce rapport qui, répondant d'avance aux arguments que vous venez de reprendre, trouve par là sa justification.
Monsieur Ducrest, vous mélangez les choses en disant : "Il y a les bons, ce sont les nôtres, ceux de la construction, ceux de la relance, suivez-les ! Et il y a les autres, ceux d'en face, qui bloquent tout". Je vous connaissais des discours plus nuancés. Libre à vous de faire de telles caricatures à longueur de journée, mais elles n'aideront en rien à la compréhension et à la résolution des problèmes posés par ce dossier.
Je m'explique : ce Grand Conseil a effectivement voté, en juin 1991, cette fameuse loi pour la construction de trois mille HBM en huit ans. Vous avez fait allusion à trois crédits qui ont été successivement adoptés par ce parlement, le troisième étant celui qui nous occupe aujourd'hui. Le premier crédit a notamment permis d'acquérir les immeubles des Rentes genevoises. A l'époque, on nous avait dit qu'il s'agissait d'une excellente opération, puisque ces immeubles avaient été acquis à des prix raisonnables et demeuraient en main de la collectivité publique. Je vous rappelle aussi que cette loi prévoyait 25% de logements en acquisition et le reste, c'est-à-dire les trois quarts, en construction.
A ce stade de mon intervention, je corrige une erreur qui s'est glissée dans mon rapport oral : ce ne sont pas trois cent quatre-vingt-dix logements qui ont été achetés aux Rentes genevoises par le biais du premier crédit, mais deux cent soixante-trois. Le chiffre "390" représente l'acquisition totale au moyen des deux premiers crédits. Quoi qu'il en soit, ces données démontrent l'effort fourni par l'Etat, pour acquérir des logements en propriété.
En revanche, si nous suivions votre discours sur la relance et le traduisions en faits concrets, il ne conviendrait pas d'acheter des immeubles existants, mais de lancer des opérations nouvelles.
Je m'arrête sur deux exemples, cités dans votre rapport de première majorité, pour répondre, Monsieur Ducrest, aux affirmations que vous lancez sans les illustrer. Vous dites : «Il est donc une volonté manifeste d'apporter sa contribution au redressement du secteur de la construction». Mais comment allez-vous relancer ce secteur en achetant des immeubles clés en main, ces immeubles étant déjà construits ?
Or, les dotations injectées par l'Etat dans les constructions nouvelles permettent, précisément, de donner des travaux bien au-delà du montant de ces dotations. Et la Pelotière, que nous prenons pour deuxième exemple, est, je vous le rappelle, une opération qui ne vise pas des immeubles construits par l'Etat ou par des organismes sans but lucratif.
L'article 2 de la loi 1991, que nous avons votée, prévoit que les immeubles construits avec les crédits qui en découlent le sont soit par l'Etat, soit par des organismes sans but lucratif. Or, les immeubles de la Pelotière ne peuvent être intégrés dans la catégorie des constructions nouvelles, mais doivent l'être dans celle des acquisitions d'immeubles, puisqu'il s'agit d'immeubles construits par des tiers, que le département, dans l'exposé des motifs du projet de loi, a préféré ranger dans la catégorie des immeubles en construction. Conformément à la loi de 1991, il aurait fallu les insérer dans la catégorie des immeubles achetés une fois construits.
Monsieur Haegi, souvenez-vous : quand je vous ai demandé pourquoi acheter les immeubles construits de la Pelotière, vous m'avez répondu - et le procès-verbal de la commission du logement en fait foi - que la Pelotière était une opération clé en main, les fondations de l'Etat ayant souhaité cette formule.
Vous signifiez donc deux choses : une opération clé en main, c'est-à-dire l'achat d'immeubles une fois construits, faite à la demande des fondations de l'Etat. Etant enclin à vérifier les informations que l'on me donne, j'ai pris contact, pas plus tard qu'aujourd'hui, avec un représentant d'une fondation HBM. Je lui ai demandé comment il se faisait que les responsables des fondations interviennent auprès de l'Etat pour dire qu'ils n'étaient pas désireux de construire et qu'ils préféraient que des tiers le fassent à leur place. Quelle n'a pas été la stupeur de mon interlocuteur qui m'a rétorqué : «Mais comment ? Tout récemment encore, nous avons eu une réunion et nous nous sommes demandé pourquoi confier ces constructions à des tiers, puisque nous, fondations, manquons cruellement de terrains pour construire des HBM. Pourquoi un tel choix ?». Chacun sait, évidemment, que l'Etat ne dispose pas de surfaces illimitées pour ce faire. Et pourtant, Monsieur Haegi, le représentant de cette fondation appartient à un parti politique plus proche du vôtre que du mien.
Monsieur Haegi, l'information que vous avez donnée à la commission du logement est fausse, puisque des responsables de ces fondations m'ont confirmé qu'à aucun moment ils n'ont demandé à l'Etat d'intervenir de la sorte. D'ores et déjà, Monsieur le président, j'attends vos explications avec intérêt.
J'entends rappeler ici la raison pour laquelle ces fondations n'aiment pas reprendre des immeubles construits par des tiers. Essentiellement, parce qu'elles n'ont pas été associées, au départ, à leur construction. Beaucoup souhaitent que les constructions HBM ne soient plus bâties comme des HLM, des HCM, c'est-à-dire sans distinguer le type d'habitat, en sachant que la conséquence première du procédé est l'augmentation des subventions de l'Etat et, par conséquent, la diminution des logements pouvant être construits avec ces montants.
Aussi ces fondations immobilières HBM souhaitent-elles être associées au processus de construction, afin de pouvoir donner leur avis sur la conception des logements à réaliser.
Un dernier mot sur la Pelotière : mon interlocuteur n'a pas manqué de relever qu'il s'était opposé à cette opération, parce que les logements étaient très mal situés. Ils étaient éloignés de Genève, sis à deux kilomètres de la gare de Versoix et pratiquement pas desservis par les transports publics. Et mon interlocuteur de rappeler à l'attention de ceux qui l'auraient oublié, que les habitants des HBM n'ont pas toujours une voiture pour se déplacer. La Pelotière, effectivement, n'était pas l'endroit rêvé pour mener ce genre d'opération.
La question se pose et c'est aussi le sens de ce deuxième rapport de majorité, Monsieur Haegi...
La présidente. Il vous reste une minute de temps de parole, Monsieur Ferrazino !
M. Christian Ferrazino, rapporteur de deuxième majorité. En tant que rapporteur, je pourrai reprendre la parole et je vous remercie de me laisser conclure cette première intervention. Je préciserai donc ma question à M. Haegi. Vous aviez dit, lors du débat de préconsultation, que vous n'étiez pas venu pour voler au secours d'un promoteur privé qui avait beaucoup de peine à se "dépatouiller" d'une opération que certains qualifiaient de "foireuse". Vous aviez dit que ce promoteur pouvait très bien se passer de l'aide des pouvoirs publics.
S'il y a eu une véritable réticence de la part des responsables des fondations immobilières HBM à intervenir de la sorte, puisqu'elles préfèrent être à l'origine des projets et de leur prise en charge, je vous demande pourquoi avoir fait le choix d'investir un montant si important dans une opération qui, manifestement, ne recevait pas leur aval.
La présidente. Monsieur Ferrazino, je dois rectifier l'un de vos propos. Il n'est pas prévu de rapport oral par la loi portant règlement de notre Grand Conseil. Au contraire, il est prévu expressément que les rapports doivent être remis, sous forme écrite, au Bureau au moins seize jours avant la séance du Grand Conseil, sauf en cas d'urgence motivée. C'est d'ailleurs forte de cette disposition que j'avais posé expressément la question au Bureau et aux chefs de groupe, à la fois sur les délais, à la fois sur le rapport de deuxième majorité. C'est parce que le Bureau et les chefs de groupe ont accepté que vous figuriez à la table des rapporteurs que vous y êtes. Mais vous ne devez pas vous imaginer que la loi portant règlement du Grand Conseil vous donne cette possibilité, mais il est vrai que nous avons souvent accepté ce genre de procédure. Ce faisant, nous avons mis clairement en évidence que nous ne devrions pas trop nous éloigner des textes légaux.
M. Jean-Pierre Gardiol (L). Le rapport oral de deuxième majorité, présenté par M. Ferrazino, est la démonstration de ce qu'il faut continuer à faire pour aggraver la crise du bâtiment et retarder la construction de HBM.
En effet, le Conseil d'Etat sollicite un crédit de 30 millions pour aboutir rapidement à la construction de logements bon marché, dans l'intérêt de ceux qui les attendent et qui en ont besoin. Pour agir rapidement, il ne faut pas mélanger les rôles bien définis de l'exécutif et du législatif, comme Me Ferrazino voudrait le faire.
La République compte actuellement une multitude de projets d'envergure, prêts à démarrer, autorisations de construire définitives en force. Ces projets représentent plusieurs centaines de logements sociaux pour un total de travaux de plusieurs centaines de millions.
Les investisseurs manquent cruellement, mais l'Etat doit pouvoir jouer, dans plusieurs de ces projets, un rôle de catalyseur en se portant acquéreur de projets privés, par l'intermédiaire des fondations immobilières de droit public. Cela aurait pour effet de faire démarrer la totalité des projets. Cet effet multiplicateur a été démontré dans le cas cité par Me Ferrazino dans son rapport. L'opération qu'il mentionne est l'exemple même de ce qu'il faut faire, car elle a permis, par un investissement de l'Etat à hauteur de 12 millions, de contribuer à faire démarrer un projet important au plus bas de la récession, générant des travaux pour 60 millions de francs.
De plus, toutes les explications concernant ce dossier ont été données en commission, par le Conseil d'Etat, en toute transparence. Le Conseil d'Etat n'a donc fait qu'utiliser de façon optimum les compétences que lui confère la loi. Il n'y a aucune raison d'entraver l'action du gouvernement, comme le propose, à tort, notre collègue Ferrazino. Par conséquent, notre groupe encourage vivement le Conseil d'Etat à poursuivre sur sa lancée.
Enfin, à titre personnel, je m'étonne que Me Ferrazino s'érige, dans son rapport, en défenseur des entreprises et des emplois du bâtiment. D'autres, dans cet hémicycle, sont mieux à même de parler au nom des partenaires de l'acte de construire.
Au nom du groupe libéral, je vous invite à rejeter les amendements ponctuant ce rapport qui relève de l'anachronisme et du délire les plus complets.
M. Claude Blanc (PDC). Je n'interviendrai pas sur le fond, mais je me permettrai de revenir sur la forme. Au début du débat, Madame la présidente, vous vous êtes bien gardée d'évoquer l'article 194 de la loi portant règlement du Grand Conseil. Et c'est l'alinéa 3 de cet article 194 que le Bureau à sciemment violé en acceptant que M. Ferrazino dépose hier son rapport auprès du Grand Conseil. En effet, cet alinéa 3 dit précisément : «Les rapports doivent être déposés sur le bureau du Grand Conseil 16 jours avant la séance, sauf en cas d'urgence motivée». Si le Bureau a jugé que l'urgence était motivée, d'accord...
La présidente. Ce n'est pas seulement le Bureau, mais aussi les chefs de groupe. C'est moi-même qui ai soulevé la question. Aussi, Monsieur Blanc, je vous conseille, puisque vous maîtrisez parfaitement le règlement, de redevenir chef de groupe. Cela évitera peut-être ce genre de problème.
M. Claude Blanc. Madame la présidente, cela n'autorise pas le Bureau à violer la loi.
La présidente. Alors, cela ne sera pas la première fois, car on l'a violée aussi sous votre présidence. Il ne faudrait pas avoir la mémoire aussi courte !
M. Claude Blanc. Je vous mets au défi de le prouver.
La présidente. Monsieur René Koechlin, vous avez la parole.
M. René Koechlin (L). Rassurez-vous, Madame la présidente, je parlerai du fond et non de la forme. Nous avons reçu le rapport de M. Ferrazino que, peut-être, certaines personnes, dans ce Grand Conseil, n'ont pu lire à temps. En ce qui me concerne, j'en ai pris connaissance avec intérêt.
A l'évidence, Monsieur le rapporteur de deuxième majorité, vous êtes un irréductible "y'a-qu'à-tiste". Vous dites, en substance, au Conseil d'Etat : «N'achetez pas des immeubles existants, même s'ils sont bon marché, pour en faire des habitations bon marché. N'achetez pas à des privés - sous-entendu qu'ils sont tous d'immondes profiteurs - des immeubles en cours de construction ou récemment achevés, même s'ils sont bon marché, car quand bien même ils sont économiques, le profit est de trop. Vous n'avez qu'à construire vous-mêmes, ou faire construire par des fondations ou autres institutions de droit public, sans but lucratif. Cela coûtera moins cher et conviendra mieux à des HBM».
Bien ! Moi, je réponds à M. Ferrazino : d'accord ! Vous constaterez qu'en l'espace de deux jours je suis d'accord avec vous jusqu'à ce point. Mais dites-nous, avec précision et sans attendre, où, dans quel délai, et avec l'aval de quelle commune.
Vous évoquez, Monsieur, les communaux d'Ambilly, ce qui est bien la seule opération que vous appelez de vos voeux. Il n'y en a pas d'autre. Or, c'est exactement une affaire dont la commune concernée, tout son conseil municipal en tête, ne veut pas. Il s'agit d'un abcès de fixation politique et affectif, d'un projet que les Thônésiens refusent catégoriquement. Alors, Monsieur Ferrazino, allez-y, prenez l'initiative, tentez, avec votre talent de persuasion, de convaincre ! Agissez plutôt que de "bêler" des critiques incongrues et des propositions stratosphériques, tant elles sont éloignées des réalités concrètes et incontournables, si terre à terre soient-elles !
En ce qui me concerne, il y a des lustres, Monsieur, que j'essaie de construire des HBM. Or, je me suis toujours trouvé confronté à des obstacles sans commune mesure avec ceux qu'un constructeur honnête doit usuellement surmonter. J'attends, Monsieur Ferrazino, que vous nous montriez la voie, si tortueuse soit-elle, qui conduit à la réalisation tant souhaitée de HBM. Mais, s'il vous plaît, abstenez-vous des circonvolutions et méandres, purement théoriques, dont vous venez de nous donner un échantillon.
M. Thomas Büchi (R). La récession qui frappe actuellement le secteur du bâtiment tourne au drame. J'évoque des chiffres, déjà cités dans cette enceinte, mais qu'il n'est pas inutile de rappeler. Plus de 50% d'emplois ont été perdus en moins de quatre ans, à Genève. Il y avait vingt deux mille travailleurs en 1991, il y en a moins de dix mille en septembre 1995. Il serait inconscient de laisser cette situation se dégrader davantage car, maintenant, ce sont les meilleures entreprises, soit les forces vives de notre économie, qui tombent en déconfiture. Par conséquent, il faudra des années pour reconstituer et retrouver tout un savoir-faire perdu, gâché.
Il est évident que le groupe radical accueille très favorablement le projet de loi 7244. Il le soutiendra sans réserve.
L'ouverture d'un crédit de 30 millions pour financer les subventions d'investissement, à l'ordre des fondations immobilières de droit public, est extrêmement positif. D'abord, cela apportera une bouffée d'oxygène indispensable aux travailleurs du bâtiment. Ensuite, ce crédit servira à construire et gérer des logements destinés à des personnes à revenu très modeste.
Il est inutile de rappeler à cette assemblée que la plupart des bénéficiaires de ces logements connaissent, actuellement, des difficultés d'emploi et des embarras d'ordre pécuniaire.
J'ai lu avec attention le rapport de M. Ferrazino, tout en me demandant pourquoi il s'intitule de deuxième majorité, puisque sa teneur combat tout ce que le projet de loi a de positif. Monsieur Ferrazino, je me dois de corriger, ici, certaines de vos affirmations erronées et fallacieuses, notamment quand vous vous opposez à ce que la société Cooplog construise neuf immeubles HBM le long de la route de Drize. Même la Ville de Genève, dont le service des bâtiments est en main socialiste depuis plus de 33 ans, octroie des terrains en droit de superficie à Cooplog. Si Mme Burnand prend ce type de décision, ce n'est certainement pas pour favoriser la spéculation immobilière. Je rappelle que Cooplog est une société plate-forme qui, au départ, gère le dossier. Ensuite, ce sont des sociétés coopératives qui administrent les bâtiments. Il s'agit de sociétés à but non lucratif, contrairement à ce que vous déclarez, Monsieur Ferrazino, dans votre rapport. De plus, Cooplog possède un capital de 50 000 F. Pour faire de la spéculation, cela me semble un peu court !
Monsieur Ferrazino, si vous étiez bien renseigné, vous sauriez que ce dossier vise des objectifs très pointus, au niveau des coûts. Le prix de la construction sera inférieur à 400 F le m3 SIA, ce qui est remarquable et permettra, pour des chantiers équivalents, d'engager moins de subventions publiques que par le passé. Est-il raisonnable, Monsieur Ferrazino, quand le bâtiment genevois agonise, de vouloir bloquer un projet bien étudié par des professionnels responsables et compétents, un projet prêt à démarrer ? Personnellement, je ne crois pas que c'est la bonne méthode pour venir en aide aux travailleurs et aux plus démunis.
Si d'évidence, vous êtes un excellent avocat, vous n'êtes pas, pour autant, un bâtisseur chevronné et reconnu. Par conséquent, si chacun s'appliquait à remplir sa tâche dans les limites de ses compétences professionnelles, nous y gagnerions tous en efficacité.
Cela fait cent cinquante ans que la devise du parti radical est «Justice sociale». L'autre est «Liberté d'entreprendre». Elles méritent que l'on se batte pour elles, car ce sont les seules à avoir généré des emplois. Sans places de travail, il n'y a pas de justice sociale possible. L'équilibre de notre société repose sur la subtile alchimie de ces deux principes.
En conclusion, le groupe radical votera sans réserve le projet de loi 7244, car il serait irresponsable de ne pas le faire. Il rejettera, naturellement, les amendements du rapport de deuxième majorité.
M. Christian Ferrazino (AdG), rapporteur de deuxième majorité. Je répliquerai dans l'ordre inverse des interventions, pour permettre à M. Büchi d'obtenir des réponses aux interrogations qu'il vient de formuler.
Vous parliez de compétence professionnelle. Apparemment, Monsieur Büchi, le droit de la société anonyme n'en est pas une dans laquelle vous excellez. Vous dites que la société Cooplog - un nom trompeur - ne disposant que de 50 000 F, ne pourrait s'adonner à des activités spéculatives. Connaissez-vous le montant du capital qui était nécessaire à la constitution d'une société anonyme ? Précisément, 50 000 F ! Contrairement à ce qu'a dit M. Büchi et selon l'extrait du registre du commerce que j'ai ici, Cooplog est une société anonyme au capital de 50 000 F. Une société anonyme est une société de capitaux. Et quel est le but d'une telle société ?
M. John Dupraz. Celui de faire du profit !
M. Christian Ferrazino, rapporteur de deuxième majorité. Bravo, Monsieur Dupraz, vous avez tout compris ! (Vacarme.) Ah ! sur les bancs d'en face, on commence à mousser quand on parle de capitaux, de sociétés anonymes, parce que... (Intervention de M. Olivier Vaucher.) Monsieur Vaucher, vous oubliez que vous êtes le président d'une fondation HBM. Vous pourriez mieux vous tenir... (Protestations.) ...parce que vous confondez deux rôles. J'en termine avec M. Büchi, concernant Cooplog. On pourrait supposer qu'il s'agit d'une vraie coopérative, et ce d'autant plus que le Conseil d'Etat, dans l'exposé des motifs de son projet de loi, dit : «...qu'à la route de Drize, dans le périmètre de Battelle, un projet HBM est prévu sur des terrains de l'Etat à remettre en droit de superficie à une société coopérative». Et c'est précisément la société Cooplog qui a fait la demande de l'autorisation de construire publiée dans la «Feuille d'avis officielle». Mais Cooplog n'est pas une société coopérative, elle est une société anonyme ! Si pour vous, c'est la même chose, Monsieur Haegi, j'attends vos explications.
Il n'en demeure pas moins que nous avons été induits en erreur par les informations de cet exposé des motifs, puisqu'il s'agit incontestablement d'une société anonyme.
M. Koechlin, qui voulait faire de l'humour, a demandé où nous pourrions construire, car chacun sait qu'il y a peu de terrains disponibles pour ce genre d'opération. Alors, Monsieur Koechlin, pourquoi donner à une société anonyme, en droit de superficie, des terrains propriété de l'Etat ? Vous savez que les terrains de Drize ont été acquis, il n'y a pas si longtemps, de l'Hospice général, et cela à un prix très raisonnable. Ces terrains sont bien situés et permettraient, idéalement, la construction de logements sociaux. Pourquoi les fondations immobilières, dont celle que vous présidez, Monsieur Vaucher, ne pourraient pas elles-mêmes construire sur les terrains propriété de l'Etat, à des prix tout à fait acceptables ? (Agitation.)
La présidente. Les dialogues sont interdits. Monsieur Ferrazino, continuez !
M. Christian Ferrazino, rapporteur de deuxième majorité. J'en viens à expliquer le sens de notre amendement relatif à l'alinéa 3 de l'article 1. Il vise précisément à soumettre l'examen des projets, qui matérialisent les crédits que le Grand Conseil adopte, à une commission consultative. M. Ducrest craignait que cette commission constitue un frein ou un blocage à des projets du Conseil d'Etat. M. Haegi avait laissé entendre à la commission du logement qu'il n'était pas du tout opposé à examiner ces projets en commission. A l'expérience, il s'avère que le plus simple, et ce qui respecte le mieux l'affectation des deniers publics, est de mettre sur pied une commission qui comprenne les représentants des milieux immobiliers, un représentant par parti, mais également les représentants du Rassemblement qui, je vous le rappelle, sont à l'origine du projet de loi visant à la construction de trois mille HBM en huit ans. C'est suite à l'initiative du Rassemblement que nous votons ces crédits, aujourd'hui, et il est normal qu'il soit associé au choix de la construction des logements. Tel est le sens de cet amendement. En effet, il n'est pas normal que le Grand Conseil ait, pour seule compétence, de voter une enveloppe, en l'occurrence de 30 millions, de faire un chèque en blanc à l'adresse du Conseil d'Etat pour des opérations HBM, soit sous forme d'achats, soit sous forme de constructions nouvelles.
Si nous avions une commission regroupant tous les intéressés, ces discussions auraient lieu à l'intérieur de cette commission, les choix seraient définis en connaissance de cause et nous n'aurions pas à débattre, au sein du Grand Conseil, de cette affectation des crédits.
M. Hervé Dessimoz (R). Je suis toujours étonné de voir, avec quelle verve, M. Ferrazino se pique de connaître le problème du logement. Pourtant, je lui ai souvent relu le Mémorial sur les débats menés, lors de la précédente législature, à propos de la construction des logements HBM. Il faut dire qu'à l'époque l'état d'esprit des députés était positif et consensuel. Ce n'est pas le cas de celui de M. Ferrazino.
Monsieur Ferrazino, vous évoquez le fait que les fondations souhaitent participer au processus de réflexion et d'étude des logements HBM. Cela est évident, mais le drame, actuellement, c'est que les zones à construire disponibles sont celles qui ont fait l'objet de longues procédures, pour l'obtention des plans localisés de quartier. Il s'agit donc d'opérations pour lesquelles les études sont fortement avancées et dont la plupart sont très onéreuses au niveau du prix du terrain. En effet, toute opération qui dure suscite des intérêts intercalaires venant grever lourdement le coût du terrain.
Le terrain, précisément, est un élément important dans le processus de financement des HBM, puisqu'il correspond, le plus souvent, au montant nécessaire à l'Etat pour commanditer la fondation HBM. En fait, c'est le capital de dotation sur le terrain.
Quand vous comprendrez que l'intérêt public est de réduire la durée des procédures, nous pourrons avancer et construire des HBM.
Où, quand et comment construire des logements HBM, Monsieur Ferrazino ? Je suis étonné que votre rapport fasse allusion aux communaux d'Ambilly, puisque la commune de Thônex et ses habitants sont contre la construction, sur ce lieu, de HBM, HLM et d'autres encore. De plus, le périmètre caressé à l'époque par le Conseil d'Etat n'appartient, pour une grande partie, ni à l'Etat de Genève, ni aux communes, mais à la commune française d'Ambilly.
En revanche, je suis étonné que vous ne citiez pas une opération d'envergure que nous avons tous défendue pendant la précédente législature, mais que votre collègue, M. Grobet, a toujours refusée. Il s'agit du déclassement de Mategnin. Le prix du terrain était de 100 F le m2 et il aurait été possible de construire six cents logement...(Protestation de M. Grobet.) Oui, Monsieur ! Nous en avons débattu, il y a peu, une motion a été déposée et les membres de la commission de l'aménagement, que je présidais, peuvent l'attester.
Si vous étiez positif, Monsieur Ferrazino, vous feriez une résolution sur Mategnin et je suis persuadé que nombreux seraient les députés à vous suivre, parce qu'à Mategnin, figurez-vous, la commune est d'accord. Le conseil municipal de Meyrin a déjà voté deux résolutions en faveur de ce déclassement. Je tiens à vous dire Monsieur Ferrazino - et vous pouvez consulter votre collègue, M. Lachat - que pendant la précédente législature, nous avons fait de la concertation et préparé ce dossier, parce que nous voulions du concret pour manifester notre volonté fondamentale, consensuelle et positive en faveur de la construction, à Genève, de ces trois mille logements HBM.
Monsieur Ferrazino, vous faites des effets de manches pour alimenter la chronique politique, mais c'est le néant pour le concret et le positif ! Et le néant, Monsieur Ferrazino, c'est triste comme la mort !
M. Laurent Moutinot (S). Par chance, la commission était unanime et nous avons deux rapports de majorité. Quel aurait été le débat s'il y avait eu une minorité ? Je rappelle que le projet de loi dont nous sommes saisis, vise à ce que nous votions un crédit de 30 millions en faveur de logements HBM.
Je partage l'analyse de M. Gardiol, mais pas sa conclusion. Cette analyse consiste à dire qu'il existe des projets et que nous manquons d'investissements. M. Koechlin, du même parti, prétend exactement le contraire en déclarant ne pas savoir où construire.
Je crois que vous avez raison, Monsieur Gardiol, car il suffit de prendre connaissance, dans la «Feuille d'avis officielle», des dossiers venant en prolongation, c'est-à-dire ceux autorisés depuis plus d'une année, et dont le chantier n'a pas démarré, pour être certain qu'il y aura du travail, si on trouve les investisseurs.
Il y a eu unanimité en commission sur l'affectation de 30 millions à la construction de logements HBM. Au niveau des principes, nous préférons la construction de nouveaux HBM à l'achat d'anciens immeubles, pour la simple et bonne raison que cela donne du travail, d'une part, et que cela fait des logements en plus, d'autre part, et non pas des logements qui changent de catégorie.
Jusque-là, je n'ai pas eu de difficulté à m'exprimer. Cela se gâte avec les amendements de l'Alliance de gauche. Je regrette de n'en avoir pris connaissance qu'hier, en même temps que vous, et non pas en commission du logement où nous aurions pu les examiner plus avant.
Sur le fond, M. Ferrazino va dans la bonne direction en disant que les crédits affectés aux HBM doivent aller à la construction de nouveaux projets. Il a raison aussi de proposer qu'une commission, pour des montants aussi importants, soit appelée à se prononcer sur le choix des projets. En revanche, sur le plan technique, des problèmes se posent, notamment celui de l'affectation des crédits du solde, des crédits de lois antérieures. Je ne suis pas sûr que l'on puisse mener une telle opération sur le plan technique.
La sagesse voudrait que le projet soit renvoyé en commission pour que l'on élucide l'intégralité de sa teneur. Mais je doute de cette nécessité, puisque nous étions unanimes sur le principe même et, me semble-t-il, que nous le sommes toujours. Raison pour laquelle, face à cette difficulté, je réaffirme l'attachement du parti socialiste à ce que les fonds dévolus aux HBM soient destinés à la construction. Quant aux amendements de M. Ferrazino, chacun des députés de mon groupe s'exprimera en son âme et conscience.
M. Christian Grobet (AdG). Sur la forme, je tiens à relever que nous avons reçu, il y a quarante-huit heures, un imposant rapport sur la politique régionale, et tout le monde a trouvé parfaitement normal de le maintenir à l'ordre du jour, malgré la violation du règlement, Monsieur Blanc ! Mme la présidente a donc raison ! (Ambiance houleuse.) Décidément, il y a un double traitement à l'intérieur de ce Grand Conseil : certains députés reçoivent des documents avant les autres. Il faudra nommer une commission d'enquête pour connaître les raisons de cette inégalité de traitement, Madame la présidente.
La présidente. J'ai déjà assez à faire avec M. Claude Blanc, alors si vous vous y mettez, Monsieur Christian Grobet...
M. Christian Grobet. Madame la présidente, vous avez fort justement rappelé qu'en certaines occasions les délais n'ont pas été respectés. Il nous arrive même de recevoir des textes de motions à 20 h, avec une demande de vote pour 23 h. Ne cherchons pas chicane à M. Ferrazino et soyons-lui reconnaissants d'avoir mis ses arguments par écrit, ce qui permet de mener la débat d'une manière plus cohérente, bien que je constate que certains s'évertuent à faire de mauvais procès à d'autres.
Monsieur Dessimoz, il n'y a pas que vous et vos amis politiques qui sachiez parler en matière de logement. D'ailleurs, vous démontrez l'incohérence de vos propos en appuyant la concrétisation d'une loi qui est le fruit d'une initiative provenant du Rassemblement en faveur d'une politique sociale du logement. Et, tout à l'heure, nous n'avons entendu que des éloges de cette initiative. Par conséquent, il faut croire que les personnes qui s'expriment sur les bancs de gauche, y compris celles du PDC - puisque leur parti appartient au Rassemblement en faveur d'une politique sociale du logement - ne sont pas si confuses et ignorantes en la matière.
Après ce rappel, je vous informe, puisque le rapport en question est un rapport de majorité, que nous voterons ce crédit. Il n'a jamais été question pour nous de ne pas le voter, et n'essayez surtout pas de prétendre le contraire.
En revanche, nous profitons de ce débat pour soulever trois problèmes :
1) Nous pensons que l'argent qui sera libéré, ce soir, par le Grand Conseil, peut être mieux utilisé que les crédits antérieurs. Nous parvenons là au point fondamental de notre démarche, car nous sommes persuadés que cet argent peut contribuer à la relance bien mieux que tout ce qui nous a été proposé. Il est évident qu'en achetant des anciens immeubles et en continuant d'acquérir des logements déjà construits au-delà de la proportion maximale de 25%, prévue dans la loi de 1991, nous ne contribuerons pas à la relance du bâtiment, à l'exception de quelques travaux de rénovation. D'autre part, et contrairement à ce qui a été affirmé, on ne met pas de logements à la disposition des personnes de condition modeste, puisque les logements acquis sont déjà occupés. Il faudrait donc attendre qu'ils se libèrent pour y accueillir de nouveaux locataires remplissant les critères HBM. Pour ces deux motifs, l'acquisition d'anciens immeubles doit être abandonnée au profit de la construction de logements nouveaux.
2) Nous insistons pour que ces logements, comme prévu par la loi de 1991, soient construits par les utilisateurs eux-mêmes, c'est-à-dire les fondations HBM. Ils le souhaitent, et c'est légitime, car ils entendent que ces logements correspondent aux normes HBM. J'ai également eu l'occasion de parler avec des responsables de fondations HBM, certains à l'opposé de notre bord politique, qui n'approuvaient pas l'opération de la Pelotière, parce que les bâtiments n'étaient pas conçus, au départ, comme devraient l'être des logements HBM. Concernant la Pelotière, on nous a dit que le promoteur n'avait pas besoin de l'Etat pour le sauver. Si cela est vrai, il aurait été préférable d'investir les 12 millions dans une autre opération qui aurait permis, elle, de mieux contribuer à la relance. Tout à l'heure, M. Koechlin a rappelé le problème de la disponibilité des terrains. Or, l'Etat possède un certain nombre de terrains qui pourraient être mis à la disposition des fondations HBM, dont ceux de Drize, précisément ! Il est vraiment choquant - en dehors du fait de savoir s'il est convenable ou non qu'une société anonyme en bénéficie - que les rares terrains bon marché libres de l'Etat, qui pourraient bénéficier aux fondations HBM, ne leur soient pas attribués. On a évoqué les terrains des communaux d'Ambilly. Vous me permettrez de sourire, car que n'ai-je entendu sur les bancs d'en face et de mes anciens collègues ! On m'a reproché de n'avoir pas avancé assez rapidement avec le déclassement des terrains des communaux d'Ambilly. Il est vrai que l'opération était difficile et il était évidemment plus pratique de demander à M. Grobet d'aller au charbon ! Alors, maintenant que vous avez les responsabilités et que vous détenez tous les pouvoirs, vous ne voulez plus avancer dans l'opération des communaux d'Ambilly ! Je trouve pour le moins cela cocasse !
Une voix. Il n'y a pas d'autres terrains !
M. Christian Grobet. Mais si ! Consultez, si vous le voulez, les plans du département des travaux publics ! Il y a les terrains de Drize, de Cressy; il y a effectivement les communaux d'Ambilly. Il y a un certain nombre de surfaces libres pour les projets d'immeubles des fondations HBM, pour autant qu'on veuille bien les leur remettre.
3) Je conclus avec l'affaire de Mategnin. Monsieur Dessimoz, vous avez un sacré culot quand vous dites que je bloquais cette opération. Figurez-vous que je me suis entretenu, à plusieurs reprises, avec le propriétaire des terrains. Du reste, vous le savez. A la fin de mon mandat, mon interlocuteur, propriétaire d'une gravière, semblait disposé à vendre ses terrains, car le problème était que l'Etat puisse les acheter pour y construire des logements bon marché. Et la moitié des terrains devait être reprise par la commune de Meyrin. Le propriétaire en question a été très longtemps ambigu sur la décision de vendre ou pas, car, vous le savez aussi bien que moi, il était en relation d'affaires avec une grande entreprise de construction de la place qui aurait voulu, elle, acheter ces terrains pour y construire. Je ne citerai par son nom, mais il est connu des gens qui s'occupent d'affaires immobilières.
Quant au prix du terrain, Monsieur Dessimoz, je suis heureux de vous voir rallié au prix maximum de 100 F le m2, ce qui est très bien payé pour cette ancienne gravière en zone agricole, et dont le propriétaire a retiré un profit substantiel.
M. John Dupraz. Il a payé des impôts !
La présidente. Monsieur Dupraz, ça suffit !
M. Christian Grobet. J'espère bien qu'il a payé des impôts, sinon ce serait le comble ! Et quand on paie des impôts, c'est parce que l'on a fait de bonnes affaires. Ceux qui se plaignent d'acquitter des impôts sont en réalité des gens bien heureux. Je suis donc content, Monsieur Dessimoz, que vous soyez d'accord avec le prix maximum de 100 F le m2 pour ces terrains, prix qui correspond à la fourchette de 70 à 100 F, fixée par le Grand Conseil, pour les terrains en zone agricole. Mais la réalité, Monsieur Dessimoz, est que le propriétaire voulait vendre à 120 F le m2 !
La présidente. Monsieur Grobet, vous touchez à la fin de votre temps de parole.
M. Christian Grobet. Comme j'ai été mis en cause, permettez-moi de poursuivre.
La présidente. Vous pouvez prendre trois fois la parole, Monsieur Grobet, nous ne sommes pas en préconsultation.
M. Christian Grobet. Je souhaite l'éviter et je termine promptement en disant qu'au moment où mon mandat a pris fin la balle était dans le camp de ce propriétaire qui devait nous dire s'il acceptait ou pas de vendre au prix de 100 F le m2. Je crois savoir qu'il en veut toujours 120 F et constate, deux ans après, que la transaction n'est toujours pas conclue. Alors, de grâce, ne mettez pas sur mon dos le fait que cette transaction immobilière n'ait pas encore eu lieu.
M. David Hiler (Ve). A l'instar d'autres orateurs, je regrette que les amendements proposés ici ne l'aient pas été en commission. Je le regrette d'autant plus que le rapport de M. Ferrazino contient des accusations que je qualifierais d'importantes, voire de graves. Je me réfère, en particulier, au contenu de la page 3.
En principe, le travail en commission sert à vérifier des informations de ce type, lesquelles peuvent être reprises en plénum. Pour nous, qui ne comptons pas dans nos rangs de professionnels de l'immobilier et de la protection des locataires, il est difficile de vérifier en vingt-quatre heures de telles informations et de leur donner la suite qui convient.
D'autre part, j'affirme que l'amendement qui porte sur l'alinéa 3 est excellent. Sans aucune doute, il est nécessaire, et la discussion de ce soir le prouve, en dehors d'autres considérations. Des liens de confiance sont à établir et, pour ce faire, la transparence et l'information, y compris pour les partenaires sociaux du domaine immobilier, sont indispensables.
En revanche, en tant qu'écologistes, nous ne sommes pas particulièrement satisfaits d'entendre parler, avec insistance, de Mategnin et des communaux d'Ambilly. Si, une fois ou l'autre, la question de la zone agricole devait être reposée ici, je souhaiterais, pour le moins, qu'elle ne le soit pas au travers de déclassements où l'on avance le tank du logement social, mais dans le cadre d'une réflexion urbanistique d'ensemble sur le développement urbain. Ce serait une condition minimale, de loin préférable à des ponctions, dans une zone agricole ou dans l'autre, soit au nom du logement social, soit au nom de la technologie de pointe, ou encore au nom d'une zone artisanale. Cela est contraire à la notion même de l'urbanisme.
Le simple fait de débattre de dossiers chauds, tels ceux concernant les communaux d'Ambilly, où il n'y a pas de zone agricole, mais une zone villas, requiert des informations. Pour la petite histoire, je suis allé jusque chez M. Haegi pour me renseigner. Cela ne change rien pour nous. Notre section des Trois-Chênes a pris position contre ce projet, et la commune y est relativement défavorable. Je suis prêt à discuter et prends ici une position personnelle. Je ne suis pas d'accord sur Mategnin, mais le suis sur les communaux d'Ambilly. En revanche, je récuse vigoureusement la manière de poser le débat au travers d'un crédit de 30 millions.
Il faut savoir si nous voulons conforter une agglomération transfrontalière, qui s'étend de Ville-la-Grand à Chêne-Bourg, en lui bâtissant un centre, donc en faisant une opération d'urbanisme, mais nous ne pouvons pas poser le débat par le biais du logement social, comme c'est la mode, ni d'ailleurs par celui d'entreprises qui désireraient, à tout moment, s'installer à Genève. Une réflexion d'ensemble est donc nécessaire, car nous entendons de tout avec ces projets qui remontent à la surface.
Je passe à la question de fond. Les clauses de l'initiative et de la loi qui en est l'application doivent être respectées. Un quota a été défini et il doit être respecté pour l'ensemble de l'opération. Néanmoins, je serais moins sévère que l'Alliance de gauche. Si l'on peut acheter des immeubles à bon compte, qui se prêtent à des opérations HBM, et que c'est maintenant qu'il faut le faire et pas plus tard, pourquoi pas ?
Je donne raison à M. Ferrazino, quand il défend l'esprit de la loi en voulant le respect du quota, et je le soutiens dans ce sens. Concernant son amendement proposé à chaud, permettez-moi de dire que nous ignorons s'il est praticable et à quoi nous devrions renoncer si nous le votions. Nous, écologistes, estimons n'avoir pas l'information nécessaire pour nous prononcer à son sujet, notamment sur le terme «exclusivement».
Aussi, je propose d'ajourner cet objet à la séance de la semaine prochaine, pour que nous puissions poser l'ensemble des questions en commission. Il ne s'agit surtout pas d'un report plus lointain ! Le vote final interviendrait jeudi ou vendredi.
Peut-être jugerez-vous qu'il n'y a pas lieu de le faire. Quant à nous, nous estimons que de réels faits nouveaux se sont avérés, par rapport au contenu des procès-verbaux de la commission du logement. Permettez-moi de le signaler ! Il y a eu certains commentaires à l'entrée en matière, d'autres lors du vote, et ils n'ont pas été examinés par la commission. Nous le regrettons.
La présidente. Monsieur Hiler, vous demandez formellement le renvoi de ce projet en commission, si je vous ai bien compris ?
M. David Hiler. Formellement, avec vote la semaine prochaine.
La présidente. Mais vous demandez maintenant le renvoi en commission.
M. David Hiler. Parfaitement.
La présidente. J'avais des orateurs inscrits avant que cette demande ne parvienne au Bureau. Nous allons donc les appeler dans l'ordre. Vous pouvez d'ores et déjà prendre vos dispositions. Il y a encore sept personnes inscrites.
M. Pierre Ducrest (L), rapporteur de première majorité. Dans le tour de préconsultation, certains avaient annoncé qu'il existait, sur le territoire cantonal, 3 700 logements HBM, soit 2% du parc locatif total, et qu'il fallait, bien entendu, accélérer le mouvement pour augmenter le nombre des logements subventionnés de type HBM.
Or, la proposition d'amendement concernant la commission consultative va à l'encontre de cette urgence, et il est piquant d'y lire qu'il faut prendre des gens du Rassemblement qui se trouve être à l'origine de la loi pour un plan d'urgence-logements du 21 juin 1991. En commission du logement...
La présidente. Monsieur Bénédict Fontanet ?
M. Bénédict Fontanet. Je voudrais seulement pouvoir parler !
La présidente. Veuillez m'excuser, je vous rends la parole, Monsieur Ducrest !
M. Pierre Ducrest, rapporteur de première majorité. Merci, Madame la présidente ! En commission du logement, à chaque fois, nous avons eu toutes les informations détaillées nécessaires. D'ailleurs, le procès-verbal, émanant de la commission du 26 juin, fournit le détail total d'une opération au cours de laquelle un promoteur immobilier aurait dû faire sa pelote. Une pelote qui n'existe pas, bien entendu.
Je vais essayer, et c'est très difficile pour moi, Monsieur Ferrazino, de me mettre dans la peau d'un militant de vos milieux, à revenu modeste, et qui aurait besoin d'un logement HBM. Je me dirais que je ne suis pas prêt de l'obtenir, défendu comme je le suis.
A nouveau, je tente de me mettre dans la peau d'un militant de vos milieux, à revenu modeste, et qui travaille dans la construction. J'aurais bien des craintes pour mon poste de travail, sachant que le système de commission que vous proposez décalera, dans le temps, tout type de construction.
Maintenant, il faut agir rapidement, et il n'est pas question, à mon sens, d'accepter la demande de M. Hiler qui, en fait, est une proposition de retarder les débats de ce parlement.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, le renvoi en commission ayant été demandé, nos débats ne devraient, théoriquement, que porter sur le renvoi en commission. Mais vous savez, et nous en avons eu la démonstration récemment, que l'on déborde toujours sur le fond. Je vous prie donc d'être concis.
M. Bénédict Fontanet. Rassurez-vous, Madame la présidente, on tâchera d'être aussi rapide et concis que possible, comme d'habitude ! (Mme Calmy-Rey interrompt l'orateur.)
C'est l'hôpital qui se moque de la charité, Madame Calmy-Rey !
Mesdames et Messieurs, je suis surpris de la tournure que prennent ces débats, et je m'étonne de la méthode de travail suivie. M. Ferrazino, habile bretteur s'il en est, est venu présenter son rapport avec quarante-huit heures de retard... mais je ne reprendrai pas l'argumentation de M. Claude Blanc, quand bien même je la partage.
La présidente. Je vous en remercie, Monsieur le député !
M. Bénédict Fontanet. M. Ferrazino propose des amendements qu'il n'a pas soumis aux travaux de la commission, dans une sorte de rapport oral, si je puis m'exprimer ainsi, deux jours avant la séance de notre Grand Conseil. On doit se prononcer sur ces amendements, on nous dit que ceux-ci ne sont pas inintéressants et qu'il faudrait peut-être les renvoyer en commission. Je me demande à quoi cela rime de les étudier en commission et de présenter ses amendements en séance plénière, pour renvoyer le tout en commission. Il faudrait penser à travailler sérieusement !
A mon sens, ces amendements peuvent être rejetés, car ils n'apportent rien au débat, mais sont illustratifs de la maxime : «Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué !».
Il y a peut-être dans M. Ferrazino un conseiller d'Etat qui sommeille. Le sera-t-il un jour, c'est une autre question ! Mais, pour le moment, il a envie de tout contrôler et, de préférence, ce que le Conseil d'Etat va faire de ce crédit. De deux choses l'une, Monsieur Ferrazino : ou on vote un crédit global et on fait confiance au Conseil d'Etat - c'est notre attitude - et celui-ci tâche de réaliser des HBM comme le Rassemblement - auquel le PDC appartient, Monsieur Grobet, je vous le concède - le souhaite, ou on ne fait pas confiance au Conseil d'Etat et, chaque fois qu'une opération est réalisable, on crée une commission ad hoc pour mieux compliquer les rouages et le processus administratif, en attendant que le Grand Conseil tranche sur chaque crédit.
Nous sommes d'avis de voter un crédit global, car le Conseil d'Etat est bien équipé pour décider dans ce type d'affaires, sans qu'il soit nécessaire de créer une commission de plus. Vous le savez bien, Mesdames et Messieurs : quand on ne veut pas décider, on crée une commission, et quand on veut encore moins décider, on crée une sous-commission à l'intérieur de la première commission !
Quant à réserver l'octroi et l'utilisation des crédits HBM aux seules opérations nouvelles, c'est faire preuve d'un rigorisme excessif. On pourrait souhaiter que ces crédits servent plutôt à initier des opérations, mais, comme le disaient certains des préopinants, il peut s'avérer intéressant d'entrer dans des opérations en cours, voire de racheter des opérations réalisées, ou encore d'anciens bâtiments pouvant facilement devenir des HBM. L'amendement que vous proposez ici est tout à fait excessif.
Quant à votre crainte de voir des promoteurs privés s'immiscer dans des opérations et réaliser, le cas échéant, quelques profits, elle est futile ! On pourrait pousser l'absurde jusqu'au bout et réserver aux seules fondations de droit public l'initiative des opérations HBM, et, dans la foulée, fonder des entreprises qui appartiendraient à l'Etat et travailleraient peut-être à moindre coût, en excluant toute entreprise privée, de façon à être bien certain de tout contrôler.
Tout le monde s'accorde à dire qu'il est urgent d'avoir davantage de HBM. Tout le monde a voté ce projet de loi en commission. De grâce, ne nous perdons pas dans des arguties ou des précautions inutiles ! Votons ce projet qui est bon et réalisons-le, mais ne nous perdons pas dans des tergiversations qui n'ont même pas retenu l'attention de la commission, à juste titre d'ailleurs, puisqu'elle n'en était pas informée.
M. Christian Ferrazino (AdG), rapporteur de deuxième majorité. On voit à l'intervention de M. Fontanet qu'il ne fait pas partie de la commission du logement. Si vous aviez assisté à nos travaux, qui furent courts - à peine deux séances consacrées à cette question - vous sauriez que cet examen s'est déroulé au pas de charge, puisqu'il fallait adopter rapidement ces crédits dans la mesure où le Conseil d'Etat doit les utiliser pour débloquer un certain nombre d'opérations.
Nous n'avons pas du tout retardé le travail en commission. Puisque la période des vacances n'a pas permis de déposer le rapport écrit, nous avons utilisé cette forme pour le déposer quarante-huit heures avant. Il aurait été plus simple, Monsieur Fontanet, de reporter les débats en commission, ce que nous voulions éviter.
Pour répondre à M. Hiler, je déclare qu'il faut arrêter de croire que nous avons des spécialistes sur ces questions. Nous ne sommes pas plus spécialistes que vous, Monsieur Hiler !
Nous avons dû faire un certain nombre de recherches, pour savoir ce qu'il en était exactement des projets qui nous étaient soumis. Nous n'avons pas la science infuse ! Le problème est le même pour tout le monde.
Pour reprendre l'exemple que vous avez donné sur les communaux d'Ambilly, qui ne sont pas en zone agricole mais bien en zone de fond villa, la seule question qui se pose vraiment est la suivante : veut-on construire des petites villas, comment certains le pensent, ou souhaite-t-on plutôt consacrer cette zone à la construction de petits immeubles, c'est-à-dire utiliser plus rationnellement le terrain ? Quel type de densification voulons-nous ? Il ne s'agit pas de s'en prendre à la zone agricole.
Cela étant, je ne répondrai pas à M. Dessimoz qui trouvait mes discours tristes. Les vôtres sont affligeants d'ennui ! Savez-vous pourquoi ? Parce que vous nous ressassez toujours votre exemple meyrinois. J'ai l'impression qu'il faudrait que vous déménagiez, que vous changiez de commune, et peut-être qu'à l'avenir vous pourriez nous apporter d'autres exemples.
D'ailleurs, vous connaissez mal même ceux de votre propre commune. M. Grobet n'a pas eu le temps de terminer son intervention - c'est dommage ! - mais je vais le faire à sa place. Il est faux de dire que l'opération s'est faite à 100 F le mètre carré, car, dans le cadre de la commission du logement, M. Haegi nous a lui-même indiqué que le propriétaire n'était pas partant à ces conditions.
M. Haegi pourra donner cette information au Grand Conseil, parce qu'il faut savoir que la totalité de la surface de Mategnin ne fait pas partie de cet accord, puisque le propriétaire se réserve, semble-t-il, une certaine surface pour construire lui-même. Le calcul au mètre carré doit donc se faire sur l'ensemble de la surface concernée.
Voyez-vous, Monsieur Dessimoz, votre connaissance des dossiers de votre commune semble également hasardeuse !
Par rapport à la proposition du groupe écologiste, je proposerai que nous votions le projet de loi et ses amendements en deuxième débat, ce soir, et que nous puissions reprendre le troisième débat, la semaine prochaine, ce qui nous permettra d'examiner en commission, lundi prochain, les différentes questions qui pourront être soulevées.
M. Thomas Büchi (R). Je serai bref ! Je tiens simplement à répondre à M. Ferrazino qui a déformé les propos que j'ai tenus. Je veux donc rétablir la vérité.
J'ai dit que Cooplog était une société anonyme avec un capital-actions de 50 000 F, société plate-forme, qui gérait les dossiers sur le plan technique. Contrairement à ce que vous avez affirmé ensuite, j'ai ajouté que d'autres coopératives, à but non lucratif, étaient constituées en aval pour gérer les dossiers et les bâtiments.
M. Hervé Dessimoz (R). Monsieur Hiler, un mot concernant le problème de Mategnin. Vous défendez les communaux d'Ambilly et les gens sont contre, mais vous êtes opposés à Meyrin, alors que les gens sont pour.
Genève est ainsi faite, Monsieur Hiler, que, lorsque les gens se dispersent et se déchirent, les projets avortent. Pendant ce temps, l'Etat achète des immeubles existants pour tenter de répondre à cette loi d'acquisition de trois mille logements HBM.
Quant à vous, Monsieur Grobet, vos propos sont vraiment perfides. Je déclare aussitôt que je n'ai aucun lien de connaissance avec le propriétaire du terrain. A plusieurs reprises dans le passé, vous aviez déjà essayé de m'intimider ! Mais vous savez très bien que cela ne marche pas avec moi ! Je vous le répète devant tout le monde : cela ne marchera pas !
Maintenant, Monsieur Ferrazino, je vais vous éclairer sur cette affaire de Mategnin. Je n'est pas besoin de déménager de Meyrin pour en parler, parce que j'étais président de la commission de l'urbanisme qui a voté la première résolution pour le déclassement des terrains de Mategnin, il y a déjà dix ans. A cette époque, je crois que vous ne vous piquiez même pas de politique !
Je tiens à vous rappeler cette histoire, parce qu'elle devrait vous intéresser. A l'origine, c'est un projet de loi de vos collègues du parti du Travail, M. Jacques Boesch et Mme Deuber-Pauli, qui a fixé clairement le tarif à 270 F par mètre carré pour le déclassement. C'est à partir de ce moment-là que les problèmes ont commencé et que le propriétaire a cru qu'il pouvait demander ce prix-là. Il est vrai aussi que vos collègues avaient pensé, de bonne foi, non pas favoriser la spéculation mais permettre de concrétiser une opération de logements sociaux.
Pour que vous compreniez bien cette opération de Mategnin, il faut que vous sachiez que nous avions reçu - Mme Calmy-Rey présidait alors les débats en concertation-logement - les propriétaires - il y en a avaient plusieurs ! - leurs mandataires, et la commune de Meyrin. Tous peuvent attester que l'on admettait un prix moyen de 100 F le mètre carré. Les propriétaires cédaient 50% des terrains, gratuitement, à la commune de Meyrin; de ce fait, on pouvait construire des logements HBM, puisque le terrain était gratuit. Pour l'autre moitié des terrains, on prenait en considération le tarif de 200 F au mètre carré dans le plan financier HLM; ce qui veut dire que cela revenait au même prix que les HBM.
On a cédé gratuitement 50% des terrains et on a reporté 200 F au mètre carré. Tout ceci a été protocolé. Avec ces mesures, Monsieur Ferrazino, on faisait 50% de HBM et 50% de HLM bon marché. Si vous pouvez me montrer aujourd'hui un plan HLM où le terrain est pris en considération à hauteur de 200 F le mètre carré, ça m'intéresse !
M. Christian Grobet (AdG). M. Dessimoz a pris la parole deux fois, moi aussi ! Je réfute formellement - vous relirez le Mémorial, Monsieur Dessimoz ! - avoir insinué que vous étiez en relation d'affaires avec le propriétaire de cette parcelle. J'ai simplement dit que vous connaissiez bien les personnes en cause et que vous êtes très bien informés des tenants et aboutissants de cette affaire. Vous étiez dans l'erreur en affirmant tout à l'heure que ce propriétaire était vendeur du terrain à 100 F le mètre carré.
Je ne pouvais pas accepter, non plus, votre accusation selon laquelle j'aurais bloqué cette opération, alors que précisément j'ai essayé de trouver un accord avec le propriétaire sur le plan foncier, répondant aux propres valeurs foncières dont vous avez parlé. Il est vrai qu'il faut trouver un accord avec ce propriétaire pour résoudre cette affaire de Mategnin, mais je vous ai clairement dit où on en était à l'époque et rien de plus.
Maintenant, comme M. Ferrazino l'a déclaré, il serait possible de voter ce projet de loi en deux débats et d'examiner, si besoin est, nos propositions d'amendements à la commission du logement, d'ici la séance de la semaine prochaine. Malgré un certain nombre de problèmes qui ont été soulevés ce soir, nous sommes d'accord sur l'essentiel, à savoir qu'il faut avoir des logements HBM. Toute la question est : comment y arriver le mieux possible.
Dans ce cadre, je pense qu'une commission consultative ferait l'affaire sans qu'elle ait pour effet de bloquer quoi que ce soit, contrairement à ce qui a été dit, car une commission consultative ne donne que des préavis. Celle-ci répondrait à cette volonté que vous avez maintes fois exprimée que les partenaires sociaux soient associés aux projets de construction de logements. Or, j'ai ici le sentiment qu'il n'existe pour vous qu'un seul partenaire, les milieux immobiliers, et que les associations de locataires et d'utilisateurs ne comptent pas. Si véritablement vous êtes pour une politique de concertation et de consensus, comme vous la préconisez si souvent, et de collaboration entre les partenaires sociaux, je pense que cette commission consultative pourrait jouer une rôle éminemment utile. Je ne vois pas pourquoi vous la refuseriez.
M. David Hiler (Ve). Nous soutiendrons la proposition de renvoi en commission, afin de renvoyer le troisième débat à la semaine prochaine.
M. Claude Haegi, conseiller d'Etat. Je confirme l'avis de ceux qui pensent que l'application des amendements inattendus que nous avons reçus ce soir aurait pour effet de compromettre l'aboutissement de l'initiative des trois mille logements. Nous savons que cette initiative ne sera pas réalisée dans le délai de huit ans, pour des raisons évidentes. Le bon sens doit conduire chacun à le reconnaître. Par contre, nous avons la volonté d'aller dans la direction qui consiste à créer des logements sociaux, en particulier des HBM, en grand nombre et dans les meilleurs délais.
Mesdames et Messieurs les députés, je l'ai dit et je le répète, nous ne disposons pas d'une réserve de terrains qui nous permettrait de concrétiser l'initiative à brève échéance, comme cela a été demandé, ce soir, par plusieurs intervenants.
Il n'y a pas si longtemps, nous avons eu l'occasion, dans le cadre d'une délégation du Conseil d'Etat, de recevoir la Chambre de commerce et d'industrie qui avait sorti un document citant les nombreux terrains dans le canton que l'Etat devait utiliser. Je me souviens de la prestation de mon ancien collègue, alors chargé du département des travaux publics, qui, sur chaque dossier, a apporté une explication justifiant l'absence de construction aux endroits où la Chambre de commerce et d'industrie imaginait qu'on pouvait y mettre quelque chose. Croyez-vous que les choses aient tant changé depuis cette entrevue ?
De quoi disposons-nous ? Nous avons un important terrain à Cressy, sur lequel nous espérons pouvoir concrétiser un projet immobilier, après avoir attendu tant d'années avec toutes les conséquences que cela peut impliquer. C'est sans doute le plus grand terrain que nous ayons à disposition.
Puis, nous avons des possessions de différentes dimensions, comme l'immeuble de l'avenue de la Roseraie, pour lequel la Fondation HBM attend désespérément la concrétisation d'une demande exprimée il y a dix ans.
A l'avenue Soret, dans un périmètre compliqué, pour un projet engagé depuis une vingtaine d'années, nous allons disposer d'un droit de superficie à travers une fondation de droit public, grâce à un accord avec la Ville de Genève, ce qui devrait nous conduire à la construction d'un immeuble HBM.
Nous avons encore quelques possibilités à la rue Jean-Simonet, sur la commune de Vernier. En démolissant un immeuble et en renonçant à quelques appartements, nous pourrions multiplier par six le nombre d'appartements HBM. A l'époque : opposition, et même résistance, du département le plus concerné ! Aujourd'hui : opposition de la commune qui ne souhaite pas avoir un nombre plus élevé d'immeubles HBM sur son territoire, considérant qu'elle a déjà fait sa part !
Enfin, les terrains de Drize, c'est-à-dire de Battelle, qui ne sont pas totalement entre les mains de l'Etat de Genève, car une partie appartient encore à Battelle. Nous n'avons jamais imaginé construire autre chose que des logements à caractère social sur la parcelle que nous maîtrisons. Sur une partie de celle-ci, il s'agit de construire des logements destinés aux étudiants et, sur l'autre partie, de construire un bâtiment en coopérative HBM.
Je confirme ce qu'a déclaré le député Büchi, à savoir qu'il n'est pas question de donner à une société anonyme les droits auxquels il a été fait allusion. C'est avec une coopérative que nous concrétiserions ce projet. La Cooplog, société anonyme, est une structure donnant naissance à un certain nombre de coopératives, qui est appréciée dans de larges milieux. Il peut y avoir quelques réserves, telles qu'exprimées ce soir, mais elles ne sauraient remettre en question les aptitudes professionnelles de Cooplog.
En ce qui concerne les projets que nous pourrions engager, telle est la situation.
Je vous rappelle que, dans l'initiative pour les trois mille logements, il est clairement dit que nous ne devrions pas isoler les immeubles HBM des autres, mais que nous devrions prendre en compte le problème essentiel de l'intégration sociale, en les considérant comme une composante des aménagements que nous réalisons. C'est la raison pour laquelle nous avons cité les Verchères.
Les Verchères sont un de nos plus importants projets en suspens, qui date lui aussi d'une vingtaine d'années, tant les procédures ont été nombreuses et compliquées. Nous avons pensé y introduire, dès lors que nous avions plusieurs centaines de logements, un pourcentage de HBM. Or, dans le texte du deuxième rapport de majorité, on nous dit que c'est trop cher ! J'ignore ce qui vous permet d'avancer une telle affirmation, alors que vous n'avez pas vu les plans financiers. Nos services ont davantage d'idées à ce sujet, car ils connaissent leurs dossiers.
On trouve aussi dans ce rapport que la cherté de ce projet proviendrait d'une densité insuffisante. Mais alors que penser de tous les projets à faible densité, que souvent vous nous réclamez, et pour cause ! Avons-nous une densité faible à Cressy ? Faut-il définitivement renoncer à construire des HBM dans les zones où la densité est faible ? N'est-ce pas le moment de souligner que lorsque la densité est faible le coût est élevé pour l'ensemble des constructions et frappe l'ensemble des locataires, voire des propriétaires, mais cela est un autre sujet...
Lorsque nous parlons des Verchères nous ne pouvons pas oublier les communaux d'Ambilly, parce que nous nous sommes engagés, à un certain moment, vis-à-vis de la commune, à ne rien entreprendre et à ne plus parler du dossier des communaux d'Ambilly, tant que les Verchères ne seraient pas terminées.
Je me souviens m'être rendu dans la commune de Chêne-Thônex au début de la législature précédente, avoir parlé de ce sujet et constaté la force de l'opposition communale. Lorsqu'on tient certains propos comme ceux du rapporteur de deuxième majorité, sur le sujet précis de nos rapports avec la Ville de Genève et sur l'autonomie communale, j'imagine que cette opposition ne devrait pas vous laisser de marbre, Monsieur le député. Mais ce n'est pas parce qu'une commune déclare ne pas vouloir de ce projet, pour l'instant, que nous ne pourrons jamais y revenir.
Les interlocuteurs que nous rencontrons, cela a été relevé même au-delà des bancs de l'Entente, ne nous attendront pas éternellement ! C'est le bon sens même ! Quand nous avons la possibilité de réaliser une opération, dont les prix sont raisonnables, à un moment où nous en avons besoin, nous devons en profiter ! Depuis des mois, le Rassemblement notamment, à juste titre, me dit : «Mais allez de l'avant ! Concrétisez le plus rapidement possible !». Il n'y a jamais eu personne pour me désigner d'autres projets à promouvoir, dans de meilleures conditions, que ceux que nous avons effectués avec les moyens à disposition.
Quand on me dit que le choix de Pelotière est malheureux, que la situation est mauvaise, etc., parce que les gens seraient soi-disant tous dépourvus de voitures, c'est un mauvais procès ! Je vous invite à vous rendre sur le parking d'un immeuble HBM pour que vous réalisiez que ceux qui n'ont pas de voiture sont moins nombreux que ceux qui en possèdent. Vous pourriez même vous rendre compte qu'il arrive assez fréquemment qu'ils en aient deux. C'est vous dire que le problème des moyens de transports n'est pas crucial.
Si, dans le quartier en question, des caisses, comme la CAP ou la Caisse paritaire du bâtiment, ont investi sur le même périmètre et dans les mêmes conditions financières - je vous passe les détails - que celles que nous avons connues, c'est donc que l'affaire n'était pas si mauvaise.
Les fondations voudraient être associées au projet dès le début. Bien sûr, ce serait l'idéal, mais ce n'est pas forcément le moment de le faire pour les raisons que j'ai signalées plus haut.
Mesdames et Messieurs, ne nous privez pas de la possibilité de réagir parfois un peu vite. Je vous donne un exemple concret pour vous montrer ce que nous pourrions empêcher si nous avions la procédure qui vous est présentée ce soir. Au 24 de la rue de Montbrillant, un immeuble pose problème. Je suis en tractations depuis longtemps - M. Ferrazino le sait bien - pour que nous transformions ce bâtiment en HBM avec bail associatif. Voyez-vous, à cause de cet immeuble, tout le quartier de l'îlot 13 est bloqué en ce moment.
On aimerait bien les uns et les autres, y compris les coopérateurs qui se trouvent aux numéros 15 et 15 bis, et ceux liés à d'autres projets, voir l'ensemble démarrer. Pour ce faire, il va être nécessaire que nous intervenions. Je songe sérieusement à acquérir également les numéros 20 et 22 - c'est la première fois que je le dis publiquement - quand les prix seront intéressants, pour en faire des immeubles HBM. Mais notre interlocuteur est une entreprise, et non pas un terrain de l'Etat ! Ce n'est pas l'Etat qui va se mettre à construire et je n'ai d'ailleurs jamais imaginé créer une entreprise à cette seule fin. Quand des opportunités se présentent, il faut savoir les saisir ! Parfois, certains concours de circonstances nous permettent de faire des choses bien et de les faire vite.
Si le souci du rapporteur de deuxième majorité est d'avoir un peu plus de transparence, je crois avoir déjà répondu à cette question et m'être engagé à donner des informations en commission. La commission du logement sert aussi à cela !
Toute une série de moyens sont à votre disposition pour vérifier le bon usage des deniers que vous nous votez, c'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à renoncer aux amendements qui vous sont suggérés et, surtout, de ne pas retarder ce projet en reportant le débat à la semaine prochaine. Cela ne nous apporterait rien de plus.
Par contre, je vous confirme ma disponibilité en commission pour répondre à toutes les questions que vous voulez. Pendant les travaux de la commission, qui ont peut-être été rapides, il n'y a pas eu une seule question posée qui n'ait pas obtenu de réponse.
Le moment est arrivé de voter ce crédit et de continuer une politique dynamique dans ce domaine. (Applaudissements.)
Ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1
La présidente. Les propositions d'amendements portant sur l'introduction de deux nouveaux alinéas, je mets au vote l'article 1, alinéa par alinéa :
Mis aux voix, l'alinéa 1 de l'article 1 est adopté.
La présidente. Je mets aux voix le premier amendement proposé, soit l'introduction d'un alinéa 2 (nouveau), tel qu'il figure dans le rapport de seconde majorité de M. Ferrazino :
«2 Ce crédit est destiné exclusivement à la construction de logements par des Fondations HBM ou, pour leur compte, par la Fondation Cité Nouvelle. Il en est de même de la partie des crédits de 31 500 000 F et de 32 000 000 F, ayant fait l'objet respectivement des lois 6617 du 8 mars 1991 et 6990 du 7 octobre 1995, pour la partie de ces crédits non dépensés à ce jour.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
La présidente. Je mets aux voix le second amendement proposé, soit l'introduction d'un alinéa 3 (nouveau), tel qu'il figure dans ledit rapport :
«3 Les opérations de construction de logements HBM bénéficiant de ces crédits sont soumis à l'examen d'une commission consultative, formée de représentants du Rassemblement en faveur d'une politique sociale du logement, qui a lancé l'initiative populaire à l'origine de la loi pour un plan d'urgence-logements du 21 juin 1991, des milieux immobiliers, des Fondations HBM, et d'un représentant de chaque parti siégeant au Grand Conseil.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2, 3 et 4.
Ce projet est adopté en deuxième débat.
Troisième débat
La présidente. Comme il appartient au Grand Conseil de se prononcer sur la proposition d'un troisième débat, en vertu de l'article 134, alinéa 3, lettre c, je la soumets au vote concernant le projet de loi 7244.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
(PL 7244)
LOI
ouvrant un crédit destiné à financer les subventions d'investissement de l'Etat aux fondations immobilières de droit public chargées de construire, d'acquérir et de gérer des logements destinés aux personnes à revenu très modeste (HBM)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
Principe
Un crédit de 30 000 000 F est ouvert au Conseil d'Etat dès 1996 pour financer les subventions d'investissement aux fondations immobilières de droit public chargées de construire, d'acquérir et de gérer des logements destinés aux personnes à revenu très modeste (HBM).
Art. 2
Budget
Ce crédit est inscrit, par tranches annuelles, au budget d'investissement sous la rubrique 66.00.00.-553.75.
Art. 3
Emprunt Le financement de ces subventions d'investissement est assuré par le recours à l'emprunt et dans les limites du cadre directeur du plan financier quadriennal adopté le 2 septembre 1992 par le Conseil d'Etat fixant le maximum des investissements nets de l'Etat à 250 millions de francs par an dès 1994.
Art. 4
Amortissement
Le taux d'amortissement applicable à cet investissement est fixé à 8% de la valeur résiduelle.
La séance est levée à 19 h 30.