République et canton de Genève

Grand Conseil

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La séance est ouverte à 16h05, sous la présidence de M. Alberto Velasco, président.

Assistent à la séance: Mme Carole-Anne Kast et M. Pierre Maudet, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Antonio Hodgers, Anne Hiltpold et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Diane Barbier-Mueller, Jennifer Conti, Florian Dugerdil, Raphaël Dunand, Adrien Genecand, Xhevrie Osmani, Charles Poncet, Skender Salihi et Alexandre de Senarclens, députés.

Députés suppléants présents: Mme et MM. Sebastian Aeschbach, Darius Azarpey, Rémy Burri, Stéphane Fontaine, Daniel Noël et Nicole Valiquer Grecuccio.

Correspondance

Le président. Le Bureau et les chefs de groupe ont trouvé à leur place l'énoncé de la correspondance reçue par le Grand Conseil. Cet énoncé figurera au Mémorial.

Courrier de M. MÜLLER Christian relatif à l'augmentation de l'impôt sur les véhicules (C-4149)

Annonces et dépôts

Le président. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:

Pétition : Pour protéger la population contre le bruit et le trafic : des mesures d'accompagnement dès l'ouverture de la route des Nations (P-2230)

Pétition 2230

Questions écrites urgentes

Le président. Vous avez reçu par messagerie les questions écrites urgentes suivantes:

Question écrite urgente de Jean-Marie Voumard : Quel est le taux d'absentéisme du personnel dans les établissements pénitentiaires de Champ-Dollon ? (QUE-2136)

Question écrite urgente de Arber Jahija : Nouveau terrain d'entraînement du SFC à Vessy : le canton a-t-il bien expliqué aux autorités de la Ville de Genève les différences entre des infrastructures sportives professionnelles et amatrices ? (QUE-2137)

Question écrite urgente de Julien Nicolet-dit-Félix : Imposition des véhicules : des chiffres pour établir les faits (QUE-2138)

Question écrite urgente de Jean-Marc Guinchard : Plan crack : où en est-on après plus d'un an et plusieurs textes déposés au Grand Conseil ? (QUE-2139)

Question écrite urgente de Louise Trottet : Immatriculations de véhicules motorisés dans d'autres cantons (QUE-2140)

Question écrite urgente de Celine van Till : Aide psychologique d'urgence - peut-on faire mieux ? (QUE-2141)

QUE 2136 QUE 2137 QUE 2138 QUE 2139 QUE 2140 QUE 2141

Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.

Questions écrites

Le président. Vous avez également reçu par messagerie les questions écrites suivantes:

Question écrite de Thierry Cerutti : Citerne de Vernier, complément (Q-4040)

Question écrite de Ana Roch : Prévenir l'influence des réseaux sociaux sur l'automutilation des jeunes en milieu scolaire (Q-4041)

Question écrite de Julien Nicolet-dit-Félix : Sorties scolaires, quel bilan une année après la réintroduction des voyages scolaires en avion ? (Q-4042)

Question écrite de Jean-Marc Guinchard : Quelle protection pour les conducteurs et conductrices des TPG ? (Q-4043)

Question écrite de Masha Alimi : Est-il possible d'avoir des statistiques concernant le nombre de familles qui ont à leur charge leurs enfants qui sont toujours étudiants au-delà de l'âge de 25 ans ? (Q-4044)

Q 4040 Q 4041 Q 4042 Q 4043 Q 4044

Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.

QUE 2127-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Leonard Ferati : Y a-t-il un service d'animation le week-end et les jours fériés dans tous les EMS de Genève ?

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2127-A

QUE 2128-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Jacques Blondin : Restauration collective, DIP, HUG et Aéroport international de Genève : contrats AIMP signés

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2128-A

QUE 2129-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Skender Salihi : Combien de plaques de contrôle « GE 96X XXX » sont délivrées à Genève ?

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2129-A

QUE 2130-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Thierry Cerutti : Formation continue pas pour les résidents genevois, pour les frontaliers ?

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2130-A

QUE 2131-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Thierry Cerutti : Pragmatisme - bon sens - STOP au CRACK dans nos rues !

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2131-A

QUE 2132-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Gabrielle Le Goff : Obtention d'une AUADP (autorisation d'usage accru du domaine public) pour les chauffeurs qui étaient titulaires d'un contrat de bail à ferme avant l'entrée en vigueur de la LTVTC 2022

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2132-A

QUE 2133-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Skender Salihi : Interrogations sur le retard de la mise en place de l'école de police cantonale à Genève

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2133-A

QUE 2134-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Cédric Jeanneret : Report modal TIM-train : mythe ou réalité ?

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2134-A

QUE 2135-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite urgente de Sylvain Thévoz : Renforcer les pertes fiscales et les baisses de prestations : et la transparence ?

Annonce: Séance du vendredi 1er novembre 2024 à 16h10

Cette question écrite urgente est close.

QUE 2135-A

Q 4022-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Amar Madani : Bilan de la collaboration entre les HUG et le CHUV ?
Q 4023-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Louise Trottet : Promotion de l'allaitement au parlement cantonal
Q 4024-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Céline Bartolomucci : Les tests en laboratoire sur animaux toujours de plus en plus nombreux en Suisse : quels sont les chiffres 2023 à Genève ?
Q 4025-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Céline Bartolomucci : Manque de recours aux aides sociales et aux prestations complémentaires : qui est concerné à Genève ?
Q 4026-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de Philippe de Rougemont : Assurer le dispositif de la PC pour des abris à l'intention de la population
Q 4027-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de François Baertschi : Ecole d'avocature (ECAV) : près de 90 000 francs de coûts pour une étude sur le marché des avocats stagiaires à Genève
Q 4028-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de François Baertschi : Ecole d'avocature (ECAV) : les coûts des litiges
Q 4029-A
Réponse du Conseil d'Etat à la question écrite de François Baertschi : Ecole d'avocature (ECAV) : une barrière déguisée à l'accès au marché !
M 2970-A
Rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier la proposition de motion de François Baertschi, Jean-Marie Voumard, Ana Roch, Skender Salihi, Sandro Pistis, Gabriela Sonderegger, Thierry Cerutti, Arber Jahija pour la dynamisation de l'axe ferroviaire Genève-Chambéry-Turin-Nice, enjeu central de la communication sur l'arc alpin
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 2 et 3 mai 2024.
Rapport de majorité de M. Jean-Marc Guinchard (LC)
Rapport de minorité de Mme Danièle Magnin (MCG)

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons l'ordre du jour et traitons la M 2970-A en catégorie II, trente minutes. La parole revient au rapporteur de majorité, M. Jean-Marc Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, le rapport que vous avez sous les yeux est relativement restreint et concis. J'aimerais néanmoins en rappeler le contexte. Cette proposition de motion a été déposée par le MCG. Considérant que l'axe ferroviaire Genève-Nice via Turin offre une alternative intéressante aux voies autoroutières et aériennes, celui-ci a souhaité inviter le Conseil d'Etat à faire la promotion de cet axe et à intervenir auprès des autorités compétentes afin qu'une politique régionale soit favorisée et les possibilités ferroviaires depuis Genève élargies vers le sud.

Il faut souligner que si le rapport est relativement bref, c'est que cette motion a d'abord été traitée par la commission des transports, qui a procédé aux auditions nécessaires et mené un travail approfondi. La commission des transports a ensuite émis un préavis à l'intention de la commission des affaires communales, régionales et internationales, qui a consacré une séance à l'étude de ce texte. Par bonheur, parmi les membres de la CACRI, un membre siège aussi à la commission des transports; il nous a fait un résumé extrêmement complet sur les débats qui ont eu lieu dans la commission précitée.

La CACRI s'est basée sur le préavis négatif émis par la commission des transports et a refusé cette motion avec la même répartition que la commission des transports, c'est-à-dire 9 non, 2 oui et 4 abstentions. Pour les commissaires qui se sont abstenus, soit quatre d'entre eux, le seul mérite de la motion - il faut le signaler - est d'avoir pour objectif le développement d'un axe ferroviaire, mais ce texte privilégie un itinéraire qualifié de «poétique et ubuesque» et passe à côté des priorités.

Parmi ces dernières, il est question de deux axes ferroviaires tout aussi importants. L'un est l'amélioration de la ligne Genève-Lyon, et l'autre, la réhabilitation de celle dite du Tonkin. Ces deux projets sont plus facilement réalisables et peuvent être mis sur les rails dans des délais plus courts, tout à fait raisonnables. Sur cette base, la majorité de la commission vous recommande de rejeter cet objet dans les mêmes proportions que celles de la commission. Je vous remercie.

Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de minorité. Je siège à la CACRI et j'ai été fort attristée de constater que personne ne s'est véritablement posé la question de ce qu'il advenait de toutes les petites lignes que l'on désaffecte au fur et à mesure, alors que c'est bien de ça qu'il s'agit. On a entendu, on a appris que dans cet itinéraire qui n'existe plus, il y avait des petites lignes. Or, on les a désaffectées aussi bien en Suisse qu'en France; les petites lignes sont pourtant plus ou moins neutres sur le plan du climat et du CO2, puisqu'elles marchent souvent à l'électricité.

Les personnes qui ont déposé cette motion et qui l'ont votée sont vraiment très tristes du fait qu'on n'examine rien. Je vous donne un exemple tout simple, tout bête. A Chancy, on pouvait prendre une ligne de train de l'autre côté du pont, en territoire français, à la gare de Pougny-Chancy. Eh bien, il semble que les quais ne soient pas assez longs pour que l'on puisse y arrêter les TGV, et un peu partout, c'est le même type d'opposition que l'on avance contre toutes celles et tous ceux qui voudraient avoir des moyens de transport un peu plus neutres sur le plan de l'énergie et de la pollution. Donc voilà !

J'espère que ceux qui se sont abstenus adopteront cette motion pour que l'on procède à un examen un peu plus approfondi de ce qui peut être fait, pour que l'on voyage plus facilement dans ces zones-là, et que parmi ceux qui avaient voté non il y en ait au moins un ou deux qui se soient décidés à voter oui. Merci, Monsieur le président.

Mme Fabienne Monbaron (PLR). Nous saluons l'effort tenté par cette motion et son objectif de développer l'usage du train, mais nous constatons la difficulté de la mettre en oeuvre. Outre le fait que Genève n'a pas de poids sur le développement ferroviaire en France, il s'avère que l'itinéraire préconisé dans ce texte n'est ni confortable ni rapide, nous l'avons compris grâce aux auditions: comme cela nous a été démontré, le trajet pour aller à Nice peut prendre entre huit et quinze heures selon la variante choisie, avec parfois une distance de plus d'un kilomètre à pied pour les transbordements. Donc effectivement, nous n'avons pas demandé de faire la promotion de cet itinéraire. A l'heure actuelle, il ne ferait envie qu'aux vacanciers désireux de prendre du temps pour admirer le paysage, ce qu'ils peuvent déjà faire maintenant; il n'est pas près de concurrencer la voiture ou l'avion. Nous estimons que d'autres lignes méritent un appui. Dès lors, nous refuserons cet objet.

M. Jacques Jeannerat (LJS). Chers collègues, il semble qu'on déraille un peu, avec cette motion ! (Commentaires.) La rapporteure de minorité dit qu'il faut arrêter de désaffecter les petites lignes en Suisse et en France. Mais ça fait plus d'un siècle qu'on n'a pas désaffecté de ligne en Suisse ! Et ce n'est pas le petit canton, la petite république de Genève qui doit s'occuper de la désaffectation des petites lignes en France ! On a déjà quasiment sauvé le réseau de Haute-Savoie avec le Léman Express. On a déjà donné à ce niveau-là.

C'est romantique d'aller en train à Nice, je n'ai pas de souci ! Je n'ai jamais fait le voyage en train, mais j'imagine que c'est romantique: il faut amener trois pique-niques, parce que ça prend du temps.

Non ! La priorité des priorités, si on souhaite développer le rail régionalement en direction de la France, est d'améliorer la ligne Genève-Lyon. C'est la seule priorité. Je voulais déposer un amendement général pour changer toutes les invites, mais ça ne collait pas avec les considérants, j'y ai donc renoncé. Pour ces raisons, le groupe LJS va rejeter cet objet.

M. Cédric Jeanneret (Ve). Tout comme le MCG, qui a déposé cette motion, les Vertes et les Verts déplorent que les transports ferroviaires locaux soient peu à peu abandonnés et souhaitent que le train redevienne un moyen de transport privilégié.

Comme l'a rappelé notre très bon, notre excellent rapporteur de majorité, la commission a fait son travail en auditionnant notamment la Communauté d'intérêts pour les transports publics, association de défense des intérêts des usagers des transports publics. La CITraP n'est pas opposée à la pittoresque ligne en question, qui relie la Côte d'Azur au Piémont, bien au contraire ! Néanmoins, l'avis des experts de la CITraP est que l'on doit concentrer le développement des liaisons ferroviaires au départ de Genève vers le sud de la France et vers l'Espagne en priorité sur les lignes suivantes... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît ! Est-ce que les députés à ma droite peuvent se taire ?

Une voix. Non ! (Commentaires.)

Le président. Non ?! Si vous voulez, vous pouvez sortir: vous avez tout le loisir de sortir pour discuter ! Ayez le respect d'écouter vos collègues ! (Remarque.) Merci beaucoup ! Monsieur Cédric Jeanneret, poursuivez !

M. Cédric Jeanneret. Merci. Donc la CITraP, comme l'a rappelé mon collègue Jeannerat, préconise bien entendu en priorité l'«amélioration qualitative et capacitaire de l'infrastructure et du matériel roulant sur le trajet Genève-Lyon». On le sait, cette liaison Genève-Lyon, soit la deuxième et la troisième ville de leurs pays respectifs, est juste catastrophique. Il s'agit donc d'améliorer la fiabilité de service, la ponctualité et le nombre de liaisons quotidiennes entre Genève et Lyon.

La deuxième priorité est la «mise en service d'une relation TGV directe Genève-Marseille-Nice toute l'année deux fois par jour, sans transbordement à Lyon [...]».

La troisième priorité, selon les experts de la CITraP, ce sont les «négociations avec la SNCF autorisant le train rapide Barcelone-Lyon à venir jusqu'à Genève», comme c'est souhaité par les chemins de fer espagnols.

La bonne nouvelle, c'est que c'est à l'ordre du jour, comme on l'a appris suite à une récente interpellation de notre collègue Verte au Parlement fédéral, Delphine Klopfenstein, qui fait le job. Elle a interpellé le Conseil fédéral, qui lui a confirmé que des réflexions visant «à poursuivre le renforcement de l'attrait du chemin de fer aussi bien en transport à longue distance qu'à moyenne et courte distance entre la Suisse et la France, et à favoriser ainsi le transfert de la route au rail» sont en cours. «Le Conseil fédéral a approuvé à la fin avril 2024 deux déclarations d'intention relatives, d'une part, au développement du fret ferroviaire par la rive gauche du Rhin et, d'autre part, au développement stratégique des liaisons ferroviaires franco-suisses. Il est prévu que ces déclarations soient signées cette année encore par les ministres des transports des deux pays.»

Oui, affaire à suivre de près ! Mais non, il n'est pas opportun à ce stade que notre Grand Conseil demande au Conseil d'Etat de placer cet axe spécifique Genève-Chambéry-Turin-Nice au-dessus de la pile. Pour ces raisons, nous refuserons cette motion. Je vous remercie de votre attention.

M. Matthieu Jotterand (S). Voilà une motion au but louable, et ce pour en tout cas deux raisons. Déjà parce qu'il est nécessaire de développer le trafic ferroviaire international, notamment vers les destinations les plus fréquentées depuis l'aéroport de Genève, et Nice fait partie du top 10. La liaison Genève-Nice, oui, c'est une bonne idée ! C'est louable pour une autre raison: le développement des transports publics en direction du sud de Genève est tout à fait souhaitable, par exemple à travers des lignes de bus qui desserviraient des P+R situés en Haute-Savoie - je me réjouis que le MCG apporte son soutien.

Quant au trafic ferroviaire international, on peut penser à une ligne Genève-Nice. Oui ! Cela dit, le truc, c'est qu'il y a des montagnes - les Alpes, si vous connaissez -, et le problème, c'est que les franchir est souvent assez pénible, car ça se fait soit par des tunnels qui n'existent pas là où ils seraient nécessaires, soit en contournant les Alpes, soit par des itinéraires touristiques dans les montagnes qui tournent beaucoup, qui sont charmants, mais qui, comme on l'a relevé, mettent un temps extrêmement long.

La liaison Genève-Nice existe et elle est assez facilement praticable, même si l'on peut regretter qu'il n'y ait pas de liaisons directes. Elle est toutefois possible par le réseau à grande vitesse qui existe en France, et non par ces itinéraires certes pittoresques mais absolument inefficaces.

On ne peut évidemment pas refuser la promotion du trafic ferroviaire pour desservir une des destinations les plus fréquentées depuis l'aéroport, mais la motion ne le fait clairement pas par le bon itinéraire, elle prend le mauvais chemin - c'est le cas de le dire. Nous nous abstiendrons donc.

M. François Baertschi (MCG). Notre réseau ferroviaire est aujourd'hui uniquement dirigé vers le nord - la Suisse - et vers l'ouest - Paris et Lyon. Genève est complètement passée à côté de l'axe situé en direction du sud et de Nice. Pour atteindre cette destination, on favorise actuellement de manière hypocrite l'avion qui, par ailleurs, est sérieusement critiqué. Vive les doubles discours ! Pourtant, nous avons une voie ferrée continue depuis Genève. Cette voie passe par Turin pour arriver à Nice: il n'y a pas un mètre de rail à construire. L'objectif qui devrait être partagé par tous serait de dynamiser et coordonner cet axe. Pour Genève, c'est capital ! Nous pourrions ainsi donner une autre ampleur à notre cité, qui deviendrait enfin le centre ferroviaire d'une large région alpestre.

La majorité de la commission des transports et de la CACRI ne l'a pas compris. Malheureusement ! Espérons que ce Grand Conseil sera plus ouvert et accueillera avec bienveillance cette motion. Si ce n'est pas le cas, ce sera la tâche des générations futures d'être plus avisées et visionnaires que nous le sommes, alors que notre génération est perdue dans ses blocages intellectuels. Genève ne doit pas manquer ce train !

M. André Pfeffer (UDC). Chers collègues, cette motion MCG a été soutenue uniquement par le MCG, en tout cas en commission. Elle demande de promouvoir l'axe Genève-Chambéry-Turin-Nice, et, dans sa dernière invite, d'«apporter le soutien de notre canton aux initiatives locales [...]». Alors je ne sais pas exactement si le MCG souhaite soutenir financièrement Chambéry-Turin-Nice, mais bref ! Un expert a quand même été auditionné. On a surtout retenu deux points: premièrement, cet axe a un intérêt touristique, et deuxièmement, une autre priorité, à savoir améliorer l'axe Genève-Lyon et surtout les trajets du TGV, aurait un intérêt bien supérieur. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera cette motion. Merci de votre intérêt.

M. François Baertschi (MCG). Je tiens à ajouter encore un élément: certains ont dit que c'était romantique ! Qu'avez-vous contre le romantisme ? Pensez notamment à l'Orient-Express, qui passe dans de nombreux endroits, qui permet de dynamiser des lignes. Le fait de dynamiser les lignes, même si c'est par le tourisme, permet une communication locale, par exemple dans la région niçoise, dans celle du Piémont également, voire dans d'autres régions. Ne soyons pas fermés sur notre petite Genève ! J'ai l'impression que les gens sont vraiment étroits et ne savent vraiment pas voir plus loin que le bout de leur nez. Soutenez ce texte ! Merci !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Jotterand pour une minute.

M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Monsieur le président. Je serai bref: tout ce que dit M. Baertschi serait parfaitement juste s'il n'y avait pas deux itinéraires pour aller à Nice. L'un, efficace, passe par Lyon - voilà pourquoi il faut améliorer Genève-Lyon -, il met sept heures. L'autre met une quinzaine d'heures, il passe précisément par les endroits qu'on a cités; certes, si vous prenez une carte et que vous tracez Genève-Nice, vous verrez que c'est le plus droit, mais en 3D, il y a des montagnes. C'est le plus sinueux, parce qu'il y a des montagnes. Bien sûr que les rails sont continus, mais il y a deux itinéraires et nous vous suggérons d'utiliser la voie efficace. Vous semblez vous entêter pour des voies plus sinueuses, c'est votre choix. Le choix du parlement penche plutôt en faveur de l'efficacité, malheureusement pour vous.

M. Jacques Jeannerat (LJS). Pour ma part, si l'on améliore cette ligne, je crains un afflux terrible de frontaliers... (Rires.) ...de gens qui seront le week-end à Nice et viendront travailler du lundi au vendredi à Genève. Je suis très inquiet, avec cette motion. (Rires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole revient à M. Baertschi pour trente secondes.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce que je voulais dire, M. Jeannerat l'a dit à ma place... (Rires. Commentaires.) ...mais en fait, si l'on développe, si l'on a une vision intelligente de la région, on va réduire le nombre de frontaliers à Genève. C'est une des raisons de cette motion. Merci, Monsieur le président.

M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Nous avons entendu quelques scoops, cet après-midi ! Le premier, c'est que le MCG est romantique - j'apprécie ! Le deuxième, c'est qu'il demande que l'on ne soit pas fermé sur Genève. Le troisième, c'est qu'il faut être ouvert sur la France. Enfin, je salue son aspect visionnaire et tolérant, parce que ce texte permettra à nos concitoyens d'aller faire leurs courses à Nice de façon plus rapide ! Merci.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, très intéressant débat ! (Commentaires.) Un peu sinueux, mais romantique ! Le romantisme efface toutes les critiques !

Sincèrement, comme le rapporteur de majorité, j'aimerais souligner la qualité du propos du préopinant MCG, qui nous a surpris, nous, le Conseil d'Etat. On peut presque dire qu'il a fait son chemin d'Annemasse ou son chemin de Damas ! (Rires.) Il a vu la lumière du ferroviaire !

Trois informations intéressantes ! Premièrement, le MCG soutient le ferroviaire. Deuxièmement, le MCG soutient un développement sur le sud. Troisièmement, le MCG soutient peut-être financièrement - c'est ce qu'il convient de faire avec ces lignes - un développement des transports qui va au-delà des strictes limites cantonales ! Ces éléments sont suffisamment rares pour être soulignés, et du point de vue du Conseil d'Etat, rien que pour ces éléments-là, cette motion mérite d'être soutenue: elle affiche une ambition nouvelle de la part d'une composante de ce parlement.

Il m'appartient quand même de rectifier un ou deux éléments. Premièrement, Mme la rapporteure de minorité a évoqué tout à l'heure la fermeture de petites lignes en Suisse. A l'instar du député Jeannerat, je lui dis que ça n'est pas le cas, et je l'assure: il n'y a pas en Suisse, en tout cas dans la région romande, de petites lignes qui ont disparu récemment. La politique voulue par les CFF, qui doivent assurer l'universalité de la prestation, est au contraire de les desservir, même quand elles sont peu rentables.

Côté français, il en va autrement ! Vous avez raison, Madame la rapporteure de minorité, de souligner qu'aux alentours de Genève, toute une série de gares ont été désaffectées. On pense à la gare de Viry, qui, si elle était ouverte, présenterait l'avantage d'assurer une desserte, pour peu qu'il y ait un transfert modal, pour le personnel frontalier.

Vous avez mentionné la gare de Pougny. Je suis désolé de vous décevoir, mais il n'est pas prévu d'y faire s'arrêter les TGV ! Ni de près ni de loin, pas non plus en raison de la longueur des quais ! En revanche, les trains régionaux pourraient présenter un intérêt. Au pied du Jura, une ligne - peut-être le savez-vous, Mesdames et Messieurs - a aussi été désaffectée, mais les rails ont été conservés; sa réhabilitation présenterait sans doute un intérêt.

Certains ont évoqué la ligne du Tonkin, au sud du Léman, dont la réhabilitation fait l'objet d'un soutien fort du canton du Valais. Elle pose un certain nombre de problèmes, parce qu'elle est en voie unique et que, surtout, elle comprend, je crois, une petite vingtaine de passages à niveau qui sont, aujourd'hui, des endroits particulièrement dangereux. Cela représente - j'ai entendu que le MCG soutenait, le cas échéant financièrement, la réhabilitation de lignes côté français - environ 300 millions. On peut y penser, mais évidemment, ce n'est pas gratuit.

Pour refuser cet objet, d'aucuns ont invoqué le fait que ce n'était pas la priorité. J'aimerais dire tout à fait clairement que pour le Conseil d'Etat, le développement du maillage ferroviaire, du réseau capillaire ferroviaire dans l'agglomération, donc de l'autre côté de la frontière, en direction du sud en particulier - M. Baertschi a raison -, d'Annecy, de Chambéry, est une priorité ! Cette priorité est liée au transfert du personnel frontalier de la voiture au rail, et je sais qu'il le soutient. Sur ce point, nous vous rejoignons: c'est important.

Si l'on veut tirer jusqu'à Nice, pourquoi pas ? M. Jotterand a cependant raison, les tunnels n'existent pas au-delà de Chambéry. Or, vous le savez peut-être, Mesdames et Messieurs, un ouvrage majeur est en construction entre Lyon et Turin: 58 kilomètres, vingt-cinq ans de chantier ! Il sera un des tunnels les plus importants d'Europe, voire du monde, et plus long que le tunnel du Gothard. Il ouvrira en principe en 2030 ou 2031. C'est un enjeu colossal, mais qui montre - et sur ce point, je rejoins M. Baertschi une fois de plus - qu'on a un peu loupé le train, parce qu'il faudra passer par Lyon pour aller à Turin, ou par Milan, mais ce sera évidemment beaucoup plus long.

Mesdames et Messieurs, voici l'axe central du propos du Conseil d'Etat, et je vais conclure sur ce point, Monsieur le président: l'enjeu pour Genève - de ce point de vue là, les représentants de la CITraP ont raison - est de passer du XXe au XXIe siècle s'agissant de la liaison Genève-Lyon. Celle-ci est extraordinairement vétuste, a un voltage qui n'est pas similaire au voltage suisse, utilise encore des trains Corail des années 80 sans climatisation - vous l'avez peut-être empruntée il n'y a pas longtemps -, a un degré de confort extrêmement réduit et nous rapproche de Lyon - rapproche, c'est presque un abus de langage - en environ deux heures. C'est une priorité pour l'exécutif, et le député Jeanneret l'a dit tout à l'heure à juste titre, nos relais à Berne la défendent. Priorité étant un terme qui s'accommode assez mal du pluriel, le gouvernement est enclin à dire que s'agissant des relations avec la France et du développement sur le réseau français, c'est Genève-Lyon qui est ultraprioritaire.

Mais encore une fois, lorsqu'on invoque le romantisme, le Conseil d'Etat cède, et nous vous incitons à voter des deux mains cette motion MCG... (Commentaires.) ...qui ouvre tous ses chakras financiers... Des deux mains ou d'une main, comme vous le voulez... (Rires.)

Une voix. Des deux mains !

M. Pierre Maudet. Des deux mains ! Vous pouvez appuyer sur le bouton vert ! ...qui ouvre ses chakras sur le financement du ferroviaire en France voisine, sur le soutien massif au ferroviaire et également sur la liaison avec le sud. Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je soumets cette proposition de motion à vos votes.

Mise aux voix, la proposition de motion 2970 est rejetée par 59 non contre 18 oui et 13 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

M 2982-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Matthieu Jotterand, Leonard Ferati, Grégoire Carasso, Sylvain Thévoz, Caroline Marti : En attendant la gare souterraine, améliorons déjà celle de La Plaine
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 31 octobre et 1er novembre 2024.
Rapport de Mme Caroline Marti (S)

Débat

Le président. Nous en venons à la M 2982-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Madame la rapporteure, vous avez la parole.

Mme Caroline Marti (S), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, depuis 2019, le canton de Genève bénéficie enfin... (L'oratrice insiste sur le mot: «enfin».) ...d'un véritable réseau RER dans son agglomération - c'est évidemment le Léman Express -, mais nous devons aujourd'hui reconnaître que dans ce réseau, la ligne Genève-La Plaine, qui y est intégrée, est véritablement le parent pauvre de notre RER: cette ligne ne bénéficie actuellement d'une cadence qu'à la demi-heure, ce qui n'est évidemment pas suffisant pour être assez incitatif, notamment vis-à-vis des travailleurs et travailleuses de la ZIMEYSA et de l'ensemble des habitants des villages situés le long de cette ligne.

L'autre aspect qui pose problème est que la gare de La Plaine n'est aujourd'hui pas dimensionnée pour pouvoir accueillir l'ensemble des trains du Léman Express, de sorte que la ligne L6 ne s'y arrête pas, ce qui réduit l'offre ferroviaire de cette gare. C'est aussi regrettable puisqu'on se limite dans les possibilités de rabattement des voyageurs via des lignes de bus desservant la gare de La Plaine pour ensuite prendre le train à destination de Genève.

Un autre facteur qui nous pousse à penser que cette ligne est aujourd'hui le parent pauvre de notre RER est la halte de Châtelaine, qui était à l'origine prévue pour l'année 2028 et qui a pris énormément de retard; aujourd'hui, on ne peut pas l'attendre avant 2038. Or, cette halte de Châtelaine est absolument nécessaire pour desservir ce quartier et ceux alentour, qui ont été très fortement densifiés ces dernières années. C'était prévu dans le plan directeur cantonal 2030, mais la halte n'a pas suivi, ce qui constitue véritablement une entrave aux déplacements en transports publics pour les habitants de cette région.

Dans ce contexte, cette motion a été déposée pour ne pas attendre 2038 en vue d'une amélioration de cette ligne de La Plaine. Elle propose d'abord d'anticiper les travaux dans cette gare, qui sont nécessaires pour améliorer la desserte et la cadence. Or, les travaux de commission ont montré que cela ne nous permettrait pas de gagner beaucoup de temps, même si on commençait à lancer le projet d'agrandissement de cette gare aujourd'hui. Et surtout, ça ne permettrait pas le passage à la cadence au quart d'heure plus rapidement, puisque sur cette ligne, elle est absolument liée non seulement aux travaux d'extension de Cornavin, mais aussi à la réalisation de la halte de Châtelaine. C'est la raison pour laquelle la commission a renoncé à cet aspect de la motion.

Le texte demandait ensuite d'étudier toute piste d'amélioration de cette ligne. Là aussi, les travaux de commission...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Madame.

Mme Caroline Marti. Merci, Monsieur le président. ...ont montré que le Conseil d'Etat avait procédé à un certain nombre d'améliorations, soit celles qui étaient déjà possibles, notamment en termes d'amplitude d'horaire. C'est la raison pour laquelle la commission a également décidé de renoncer à cet élément, pour se focaliser uniquement sur la question du dimensionnement de la halte de Châtelaine. En effet, cela garde tout son sens, parce que finalement, ce que l'on constate aujourd'hui avec le premier bilan du Léman Express, c'est qu'il est victime de son succès. Les gares avec des quais de 200 mètres, comme c'est le cas dans les principales du réseau, ne sont pas suffisamment grandes pour accueillir des trains plus longs, de manière à augmenter la desserte sur le Léman Express. Or, quand on planifie des infrastructures ferroviaires, on doit réfléchir sur le long, sur le très long terme; il serait donc dommage de sous-dimensionner la halte de Châtelaine.

Il reste dans cette motion la requête visant à vraiment anticiper la demande future. Cette dernière, ce n'est pas uniquement la demande en 2038, mais également en 2050 et en 2060. Il s'agit donc de dimensionner cette gare de manière à pouvoir absorber une augmentation importante du nombre de passagers, avec donc des trains offrant des capacités beaucoup plus importantes. La commission a été quasiment unanime dans ce constat et vous demande d'accepter cette motion, qui a été passablement remaniée. Je vous remercie.

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Florey.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Enfin la vérité, je dirais ! (Rires.) Blague à part, cette motion, elle est bien gentillette; la commission a tout fait pour la sauver en déposant une multitude d'amendements, dans le but de plaire à son auteur. Simplement, on a juste un problème de timing, c'était déjà le cas avec la motion initiale et ça l'est encore avec la version amendée: on est dix fois trop tôt ! Tant que l'agrandissement de la gare de Cornavin n'est pas réalisé, nous n'avons aucune garantie que le reste qui est proposé ici sera ou devra être fait.

Le point central, c'est la gare de Cornavin: tant que vous ne faites pas les travaux de Cornavin, vous pouvez réaliser tout ce que vous voulez à côté, ça ne servira à rien ! Et anticiper à ce point-là, pour un timing aussi long, c'est juste gaspiller de l'argent maintenant, sans la garantie qu'il sera utilisé à bon escient. C'est uniquement pour cela que nous avons refusé cette motion. Moi, je ne vous conseillerais qu'une chose - vous transmettrez, Monsieur le président -, c'est de revenir dans dix ou quinze ans avec votre motion; peut-être que là, elle sera un peu plus opportune et un peu plus d'actualité, et nous aurons tout le loisir d'en rediscuter. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

M. Jacques Jeannerat (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, mon préopinant a raison, cette motion est gentillette ! En effet, tout tourne autour de l'amélioration et des travaux de la gare de Cornavin, avec les voies en sous-sol, etc., etc. Comme l'a dit le rapporteur de majorité... la rapporteure de majorité - excusez-moi, Madame Marti ! -, elle a été remaniée suite aux auditions, notamment l'excellente audition de M. Fattebert, des CFF.

Effectivement, il faudrait peut-être présenter à nouveau cette motion dans dix ans. N'empêche que c'est important, sur le plan politique, de poser des jalons, de poser des bornes. Et si notre Grand Conseil vote ce texte ce soir, eh bien ce sera un jalon de posé, que nous projetons sur l'avenir. Par conséquent, même si je suis d'accord avec les propos de mon préopinant, je n'arrive pas à la même conclusion. Le groupe LJS soutiendra cette motion. Elle est importante, elle pose des jalons, même si c'est pour dans dix, quinze ou dix-huit ans. Notre groupe vous invite donc à l'accueillir favorablement dans sa version amendée.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion contenait initialement trois invites et son but était d'avoir un nouveau saut d'offre en cherchant à accélérer la mise en oeuvre de la cadence au quart d'heure. Mais sur la base du principe de réalité et suite aux différentes auditions devant la commission des transports, ce texte a été amendé, cela a été dit. Maintenant, il ne reste qu'une seule invite: «à planifier le dimensionnement de la future halte de Châtelaine de manière à répondre à la demande future, en particulier au niveau de la longueur des quais».

Cette motion s'intitule désormais «pour une halte de Châtelaine bien dimensionnée». Alors en effet, à ce stade, il est prévu que la Confédération et les CFF financeront la gare souterraine de Cornavin, mais pas le projet de Châtelaine, qui, lui, devra donc être financé par le canton. Celui-ci nous a dit être favorable à son financement, c'est pourquoi cette motion a tout son sens quant à l'anticipation des besoins futurs.

Il faut éviter de sous-dimensionner ces infrastructures de transport. La capacité d'accueil des quais, à savoir leur longueur, est essentielle à la bonne gestion du flux des voyageurs. On le voit avec le succès du Léman Express; cela le prouve, une fois que les infrastructures ferroviaires sont mises en place, la demande explose ! La demande suit, elle est même très grosse, voire trop forte: il y a des aménagements qui doivent être réadaptés. Cette motion est là afin de l'anticiper.

En attendant la gare souterraine de Cornavin, qui sera au mieux, disons, mise en place en 2038, en attendant la cadence au quart d'heure, anticipons d'éventuels travaux, évitons de gaspiller - justement, c'est le but, car les travaux d'adaptation deviendraient ainsi inutiles - et planifions ce dimensionnement de la future halte de Châtelaine, notamment la longueur des quais ! Nous soutiendrons bien évidemment cette motion. Merci. (Applaudissements.)

M. Matthieu Jotterand (S). Mesdames et Messieurs les députés, je me demande si ce n'est pas M. Florey qui est bien gentillet - vous transmettrez, Monsieur le président - d'avoir fait tout ce travail en commission et d'y avoir contribué pour me plaire ! Je ne sais pas si c'est pour prolonger le romantisme de la motion précédente.

Toujours est-il qu'au mépris de la bonne tenue de la séance, la majorité de droite s'est permis de soutenir les autoroutes en vue de dimanche (évidemment, je ne donnerai pas mon avis, afin d'éviter de perturber notre débat). On a un bon exemple, dans la suite des propos de M. Florey, de ce qu'elle peut dire au lieu de soutenir les autoroutes: «Il faut revenir dans dix ou quinze ans !» Mais non, mais non ! Monsieur Florey, vous n'avez rien compris si vous dites ça ! Pourquoi ? Parce que dans dix ou quinze ans, les plans seront faits et ce sera trop tard. Ce sera engagé et ensuite, on n'aura plus que les yeux pour pleurer. Comme tous les autres projets ferroviaires à Genève, ils seront sous-dimensionnés. On peut citer l'extension de la gare Cornavin dans les années 80, le CEVA, la gare souterraine de Genève Aéroport, etc., etc. !

C'est bien parce qu'avec des politiciens comme M. Florey, nous arrivons systématiquement trop tard, parce que nous dormons, parce que nous disons que ce sera pour plus tard, parce qu'on n'a aucun esprit visionnaire, qu'on se retrouve avec des projets sous-dimensionnés, qui ont, malgré tout, coûté cher.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, c'est maintenant qu'il faut travailler les plans et le dimensionnement des infrastructures de demain et d'après-demain. Et c'est pour ça que cette motion a un intérêt, même si, en effet, on a bien entendu pendant les auditions que pour la gare de La Plaine, il serait malheureusement difficile, voire impossible, de faire quelque chose. Pour la halte de Châtelaine, c'est possible; je rappelle à ce titre que c'est le canton qui la financera entièrement, puisqu'elle n'a pas été retenue dans l'étape d'aménagement 2035.

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Matthieu Jotterand. Nous avons donc une certaine marge de manoeuvre ! (Applaudissements.)

M. Amar Madani (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le MCG reste dans le train... (Remarque. L'orateur rit.) ...et partage de ce fait l'objectif de cette motion. Cette démarche est non seulement légitime, mais également nécessaire, pour garantir des solutions adaptées aux attentes de nos usagers. Cependant, comme cela a été souligné, il convient de rappeler que les actions soit ont été réalisées soit sont en cours de réalisation; un planning clair et ambitieux a été établi pour y arriver. Néanmoins, le MCG soutient cette motion amendée, comme il l'a fait en commission. Ce soutien vise à envoyer un message fort aux autorités afin qu'elles aillent de l'avant et mènent à bien ces projets. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Souheil Sayegh (LC). Chers collègues, Le Centre a toujours été favorable au développement du rail, et c'est pour cette raison qu'en commission, il a choisi de soutenir cette motion. Dans la grande efficacité qui est toujours la sienne, la commission des transports a décidé d'amender ce texte et de le résumer à une seule invite, consacrée au développement de la halte de Châtelaine.

On l'a vu, le succès du Léman Express ne faiblit pas; bien au contraire, l'offre ne suffit plus ! En redimensionnant les gares sur le plan cantonal, en planifiant cela dès aujourd'hui, on prépare en fait le Léman Express de demain. Comme dans dix ans, il n'est pas certain que je sois encore là - je sais que ça peut en décevoir certains... (Rires.) ...ou certaines ! (Rires.) -, j'ai décidé de soutenir ce texte aujourd'hui, et ai recommandé à mon parti de faire de même. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord, une remarque: ce que je trouve dommage, c'est que quand M. Jotterand n'a plus d'arguments, il en vient à des attaques personnelles. (Exclamations.)

Une voix. Oui, oui !

M. Stéphane Florey. Moi, ce que je dirai là-dessus, c'est que finalement, vous n'avez pas écouté ce qu'on a dit en commission. On n'a jamais affirmé que les travaux ne se feraient pas ! Ce que vous proposez là et à quoi vous tenez absolument, visiblement plus pour votre ego que pour le bien du contribuable... Là, vous êtes en train de gaspiller de l'argent, pour deux raisons: la première, c'est que ce que vous demandez dans votre motion, c'est déjà planifié, c'est donc déjà prévu à long terme. Et la deuxième, c'est que si vous construisez maintenant quelque chose qui sera inutilisé pendant au moins vingt à vingt-cinq ans, dans vingt-cinq ans, il va se passer quoi ? Il va falloir rénover ce qu'on construit aujourd'hui, sans que cela ait été utilisé, pour rien du tout ! C'est dans ce sens-là que nous sommes opposés à cette motion: encore une fois, elle vient beaucoup trop tôt. Pour les raisons que j'ai évoquées, elle est inutile, et c'est pour ça que nous la refusons. Je vous remercie.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Je dirais que pour ce style de motion, il vaut mieux arriver trop tôt que trop tard. L'idée n'est absolument pas de dire qu'il faut immédiatement construire cette halte, il faut évidemment attendre. L'idée, c'est de travailler la planification. Et par rapport au message envoyé, je peux comprendre qu'on se demande si c'est vraiment utile de le dire au département, mais peut-être qu'il vaut mieux le dire explicitement qu'implicitement. Ainsi, on souligne que dans la préparation, ce serait bien de tenir compte de la demande future et donc notamment d'adapter la longueur des quais. Voilà !

Effectivement, je ne suis pas sûre que si on ne vote pas la motion, le Conseil d'Etat va se dire: «Ah, alors on va faire les choses inutilement, sans regarder la demande, et on va volontairement construire trop court !» Mais, dans le doute, nous voterons ce texte, pour rappeler le soutien du PLR au rail et le besoin de mieux nous équiper. On le voit en effet avec le CEVA et les problématiques actuelles de trains qui s'arrêtent sans qu'on puisse ouvrir les portes arrière parce que les gares ont été pensées trop courtes - peut-être qu'il y avait une raison à l'époque, mais en tout cas on voit que l'évolution est rapide en la matière et qu'il vaut peut-être mieux prévoir un peu trop long que trop court. Pour ces raisons, le PLR votera cette motion, qui effectivement ne changera pas la face de la république.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Non, sans doute cette motion ne changera-t-elle pas la face de la république, mais quand même ! D'abord, j'ai écouté attentivement les soutiens réitérés de plusieurs partis au rail - à vrai dire, tous ! -, et ça fait plaisir, ça fait chaud au coeur d'entendre qu'il y a un vrai enthousiasme ferroviaire et qu'il y a une confiance accordée au Conseil d'Etat, avec, c'est vrai, un historique qui n'est pas neutre. Songeons ici au fait que la première évocation du CEVA, de la ligne Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse, remonte à 1912, soit plus de cent ans avant l'inauguration de la ligne que nous connaissons, qui a eu lieu en 2019.

Si on est honnête, on doit reconnaître que les vrais travaux ont commencé au début des années 2000, mais on voit bien qu'il faut une vingtaine d'années pour envisager un déploiement ferroviaire et passer de la réflexion, de l'idée de base à la conception puis à la réalisation. Ce domaine est celui du temps long, où il faut développer une vision stratégique. Ensuite, il faut de la volonté.

Vous le savez, en principe, les développements ferroviaires, c'est la Confédération qui les paie. Pour la halte de Châtelaine, c'est un peu différent, mais qui dit paiement par la Confédération dit travail de lobby, travail de conviction, activation de nos élus fédéraux. Et puis, on le sait, les temps financiers au niveau fédéral ne sont pas très propices. Il va donc falloir se battre ensemble, et toute unanimité de ce Conseil sur des motions de ce type-là est bienvenue, parce qu'elle nous met du vent dans les voiles.

Sur la question de la temporalité, plusieurs députés ont évoqué le fait qu'on était trop tôt ou trop tard; moi, je partage l'avis de la préopinante libérale en la matière...

Une voix. PLR !

M. Pierre Maudet. ...on n'est en réalité jamais trop tôt ! Le fait de poser des jalons, de planter des graines maintenant, pour indiquer la direction dans laquelle on va, est important, parce que figurez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a parfois des opportunités, des trains qui passent plus tôt que prévu. En la matière, j'aimerais souligner ici l'action du Conseil d'Etat sur la gare de Vernier, que nous allons inaugurer le mois prochain suite à sa rénovation.

Je me permets d'évoquer une opportunité qui avait été abordée devant la commission des transports, à savoir l'affectation du tunnel du Furet. Certains d'entre vous ne le connaissent peut-être pas, c'est le virage à gauche quand on vient du pont de la Jonction, réservé aux marchandises, qui va précisément jusqu'à Châtelaine et qui nous permettrait avantageusement de décharger un peu la gare Cornavin, par une liaison qui rallierait Annemasse et l'aéroport, en passant évidemment par Chêne-Bourg, Eaux-Vives, Bachet et Lancy-Pont-Rouge. Une liaison directe vers l'aéroport ou La Plaine, c'est évidemment avantageux. Ce tunnel, il existe; il s'agit de le convertir pour passer du transport de marchandises au transport de passagers, mais c'est là ce qu'on appelle au mauvais français ou en bon anglais un «quick win», un gain rapide, que nous envisageons avec les CFF pour les prochaines années. Et ça, on le peut, précisément parce qu'on entretient des réflexions sur le développement des gares et qu'on regarde ce qu'il est opportun de réaliser à plus brève échéance.

Autre exemple, le canton se bat pour obtenir des rames à deux étages sur le Léman Express, pour avoir plus de capacité, ce qui est une façon d'éviter la problématique de la longueur des quais, évoquée par la rapporteure de majorité - c'est un vrai problème. On sait qu'un peu partout, on va passer de 160 à 220 mètres, et la motion nous y incite aussi.

Le Conseil d'Etat accueille bien sûr favorablement cette motion. Il insiste sur deux éléments: le premier, en écho à Mme Zuber-Roy, c'est qu'il est vrai que la demande est importante, mais en matière de transport, l'offre crée également une stimulation. Par conséquent, la capacité du canton de Genève, cas échéant en prenant en charge financièrement une partie de cette offre nouvelle, est essentielle. On l'a vu dans le cadre du Léman Express.

Le deuxième élément - c'est une information que je vous donne -, c'est que le Conseil d'Etat rendra publique le mois prochain sa vision stratégique ferroviaire pour les vingt à vingt-cinq prochaines années, dont je ne peux pas totalement exclure qu'elle n'ait pas quelques élans romantiques - toute allusion à une motion précédemment traitée serait fortuite ! -, mais vous verrez que dans ce domaine, le Conseil d'Etat souhaite marquer cette législature, avec votre concours, par une vision extrêmement ambitieuse pour le rail, qui va tout à fait dans le sens de cette motion et qui va même au-delà ! Merci de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.

Mise aux voix, la motion 2982 (nouvel intitulé) est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 76 oui contre 10 non (vote nominal).

Motion 2982 Vote nominal

M 3000-A
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier la proposition de motion de Guy Mettan, Stéphane Florey, Marc Falquet, Christo Ivanov, Julien Ramu, Daniel Noël, Patrick Lussi, André Pfeffer, Florian Dugerdil, Virna Conti, Yves Nidegger, Charles Poncet pour le maintien de la souveraineté sanitaire de la Suisse et du canton de Genève face aux directives de l'OMS
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 20 et 21 juin 2024.
Rapport de majorité de M. Jean-Marc Guinchard (LC)
Rapport de minorité de M. Patrick Lussi (UDC)

Débat

Le président. Nous traitons à présent la M 3000-A en catégorie II, trente minutes. Le rapport de minorité de M. Patrick Lussi est repris par M. Guy Mettan. Monsieur Guinchard, vous avez la parole.

M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, le texte qui nous est soumis visait surtout à modifier, voire à faire cesser les travaux concernant la revision de la loi fédérale sur les épidémies, dont la consultation s'est terminée au mois de mars de cette année. Le canton de Genève a bien entendu participé à la consultation et fait part de ses avis; les résultats de cette consultation sont d'ailleurs désormais publics.

En mettant en doute cette loi sur les épidémies, les signataires de la motion mettent également en doute le rôle de l'OMS et son efficacité dans la lutte contre les épidémies. Ils disent ne pas admettre que cette organisation internationale puisse déclarer un état d'urgence ou de nécessité. Tel n'est d'ailleurs pas le cas, Mesdames et Messieurs, et il sied de rappeler que l'OMS n'émet que des directives et que, sur le plan suisse, seul le Conseil fédéral est compétent pour décider de mesures relatives à l'état d'urgence et de nécessité.

Il est toutefois important et indispensable que l'OMS puisse assurer un rôle de coordination et d'information sur le plan international. La pandémie de covid, rappelons-le, a provoqué la mort de sept millions de personnes dans le monde, sans doute plus si l'on tient compte du fait que certains pays n'ont pas voulu ou pu transmettre des données statistiques exactes - je doute que des pays comme la Russie, la Chine ou la Corée du Nord aient transmis régulièrement les statistiques concernant les décès qu'ils ont enregistrés.

La gestion de la pandémie par le canton a fait l'objet de trois rapports d'évaluation, un à l'interne et deux par des experts indépendants, rapports qui ont été présentés et commentés à la commission de la santé quelques mois après la fin des mesures sanitaires.

Certains députés minoritaires ont souligné, à juste titre d'ailleurs, l'importance du respect des processus démocratiques et des libertés individuelles. S'agissant des premiers, il a été rappelé que notre Conseil et ses commissions ont pu se réunir, adopter de nombreux crédits et rapidement voter, après des examens minutieux par la commission législative, les arrêtés urgents proposés par le Conseil d'Etat. Quant au respect des libertés individuelles, plusieurs députés ont relevé que dans la très grande majorité des cas, le principe de proportionnalité avait été soigneusement respecté.

La méfiance distillée par cette proposition de motion dans ce contexte a fait dire à certains commissaires que son thème général s'inspirait plus de théories complotistes que de raisonnements techniques et scientifiques.

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Jean-Marc Guinchard. Merci, Monsieur le président. De plus, comment peut-on parler de souveraineté sanitaire au moment où une épidémie se répand rapidement, et bien entendu sans connaître de frontières ?

La majorité de la commission a donc refusé d'adopter ce texte - il n'y a eu que deux oui et deux abstentions -, et nous vous prions, Mesdames les députées, Messieurs les députés, de bien vouloir en faire de même. Je vous remercie.

M. Guy Mettan (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Pour ma part, je vous enjoins d'accepter cette motion, pour plusieurs raisons. La première est que contrairement à ce qui a été dit par le rapporteur de majorité, aucun bilan sanitaire et social de la crise du covid-19 n'a été possible. Ça n'a pas été fait au niveau fédéral ni au niveau cantonal. J'ai déposé deux motions dans ce sens-là: elles ont été rejetées avant même d'être examinées, sous prétexte qu'on avait eu des rapports, qui, eux, faisaient un bilan économique. Or, le bilan économique, on l'a fait, il n'y a aucun problème là-dessus, mais le bilan sanitaire sur la manière dont on a réagi et sur l'efficacité des mesures prises n'a absolument pas été fait, notamment en ce qui concerne l'OMS, à savoir l'Organisation mondiale de la santé, et non pas de l'économie !

Au niveau national, ça n'a pas non plus été fait. Face à toutes les propositions qui ont été déposées pour essayer de faire un bilan sanitaire, on a botté en touche, pour une raison au fond assez simple, c'est que ce bilan sanitaire n'est pas satisfaisant. On a dû prendre des mesures dans l'urgence, c'est un fait, et on a le droit de se tromper quand on est dans l'urgence; en revanche, on n'a pas le droit de persister à se tromper sur la durée quand on s'aperçoit que certaines des mesures ne sont pas appropriées.

Si vous lisez par exemple le rapport de M. Tegnell, le monsieur santé de Suède, qui s'exprimait encore récemment, vous constaterez que la Suède n'a pas appliqué beaucoup des mesures prises dans le reste de l'Europe durant la crise du covid et qu'elle est le pays qui s'en est le mieux sorti au niveau du bilan sanitaire, notamment quant au nombre de morts.

C'est la raison pour laquelle il est absolument indispensable que l'on conserve à l'échelle internationale une diversité de possibilités de réactions face à une crise, parce que justement, on est dans l'ignorance de ce qui se passe. Il faut donc laisser aux pays la possibilité de réagir comme ils l'entendent: ils ont peut-être des solutions meilleures que celles que nous croyons bonnes chez nous. Et cela a été le cas précisément pendant la crise du covid; j'avais cité l'exemple de la Biélorussie, je reconnais que ce n'est peut-être pas le meilleur, mais celui de la Suède est un modèle de gestion sanitaire. C'est elle qui a le meilleur bilan, et ce sans appliquer les mesures que nous avons prises ni enfreindre ou menacer les libertés civiles, le droit de réunion, le droit de commerce, le droit de culte et tous les droits supprimés au moment de la crise du covid.

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Guy Mettan. Oui, volontiers. Pour ces raisons-là, nous ne pouvons pas accepter qu'il y ait une organisation qui se dépêche, en profitant encore de la crise et de la peur qu'elle a engendrée, pour prendre des mesures contraignantes et imposer à tous les pays une seule solution, alors qu'on voit que ce n'est pas la bonne.

Par exemple, s'agissant de vaccins, nous en avons inventé et avons voulu imposer au reste du monde le vaccin ARN. D'autres pays ont développé d'autres vaccins, la Chine, la Russie ou encore Cuba, qui en a inventé trois: on a empêché leur application à tous trois au niveau mondial, pour des raisons bassement économiques, parce que les multinationales qui fabriquaient les vaccins, d'entente avec Mme von der Leyen, qui est d'ailleurs sous le coup d'une accusation par le Parlement européen pour compromission avec le directeur de Pfizer, M. Bourla, parce qu'elle a acheté des centaines de millions de doses qui n'ont servi à rien... Au niveau de la Confédération, nous avons acheté 200 millions de doses qu'on a jetées à la poubelle. Aucun bilan n'a été fait sur ce gâchis.

On a droit à l'erreur, mais dans ce cas, il faut aussi tirer les leçons de nos erreurs; or, on refuse de le faire, raison pour laquelle je vous invite à accepter cette motion, et à le faire d'autant plus volontiers que l'OMS elle-même a renoncé à adopter ce traité sur les épidémies. Le 24 mai, si vous lisez les journaux - ça date donc d'il n'y a même pas plus de six mois -, vous aurez constaté que l'OMS a renoncé à ce traité funeste sur les pandémies, car une majorité des pays du monde l'a refusé, parce qu'eux ont eu l'intelligence de tirer parti de ce qui a été fait et se sont aperçus que ce traité ne servait à rien à part imposer des normes univoques à tout le monde sur l'ensemble de la planète et allait contre les intérêts de la santé de la majorité de la population mondiale.

Pour cette raison, suivons la majorité des membres de l'OMS, qui ont renoncé à ce traité, et pour nous, pour la Suisse, acceptons cette motion, qui était évidemment visionnaire, pionnière, puisqu'elle avait anticipé qu'au fond, ce traité n'était pas pertinent et qu'il ne méritait pas d'être mis en application; Dieu merci, les gens sensés dans ce monde en ont pris conscience et ont rejeté ce texte. Il n'y a pas de raison que nous persistions dans l'erreur. Merci de votre attention.

M. Léo Peterschmitt (Ve). Cette motion cherche à remettre en question la nouvelle loi fédérale sur les épidémies et à fragiliser le rôle de l'OMS dans la gestion des crises sanitaires. Marquée par une grande méfiance, voire complotiste, elle va à l'encontre de la position de Genève sur les questions de santé globale, alors que Genève en est un centre mondial.

Concernant la loi sur les épidémies, notre canton a participé aux consultations fédérales, et les réponses obtenues par le canton sont accessibles à toutes et tous. Mais pour l'UDC, il faut s'attaquer aux fondements essentiels de la coopération internationale et ignorer l'importance d'une réponse unie et globale face aux crises sanitaires; chacun dans son coin !

Contrairement à ce que la motion affirme, l'OMS n'émet que des recommandations, sans imposer de mesures, laissant le pouvoir de décision au Conseil fédéral. Lors de la pandémie de covid-19, le rôle de l'OMS a été crucial. Cela ne veut pas dire que la gestion de la crise a été parfaite et que l'OMS est exempte de toute critique. C'est là le piège de cette motion; elle prend des éléments issus de la sphère complotiste et utilise l'épouvantail d'une dictature sanitaire imposée par l'OMS à la Suisse et au monde et le mélange à des questions importantes sur la réponse apportée aux épidémies.

La rhétorique utilisée ici associe des éléments très scientifiques à des questionnements complotistes qui ne le sont pas du tout. Les arguments avancés par cette motion s'écartent des réalités sanitaires et des véritables défis de santé publique. Ce texte va à l'encontre d'une santé publique solide, fondée sur la transparence, la science et la confiance. C'est pourquoi je vous invite à le rejeter. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Pierre Conne (PLR). Chers collègues, le PLR vous invite à refuser cette motion. Il fait siens les propos du rapporteur de majorité et du préopinant. J'aimerais ajouter que les signataires de ce texte confondent les frontières politiques avec les frontières ou les barrières immunologiques. Ici, nous parlons d'épidémies, c'est-à-dire d'agents transmissibles, et nous savons tous, Mesdames et Messieurs, qu'ils traversent les frontières et ne respectent ni les lois ni les barrières.

Evidemment, si nous voulons lutter intelligemment contre les pandémies, nous devons faire confiance aux organismes de régulation et de contrôle internationaux, qui sont les seuls capables de réunir des données internationales et de proposer ensuite aux Etats des mécanismes coordonnés pour pouvoir efficacement lutter ensemble contre ces épidémies.

Mesdames et Messieurs, ne nous trompons donc pas de débat; considérons cette question comme étant une question sanitaire mondiale - c'est effectivement le rôle de l'OMS. Je pense que tout ce qui fragilise cette agence, tout ce qui fragilise la dimension internationale de ces questions sanitaires, notamment des maladies transmissibles, est quelque chose d'extrêmement préjudiciable.

J'aimerais ajouter que la révision de la loi sur les épidémies est dans le fond le produit d'une leçon tirée de cette première pandémie mondiale, et que justement, plutôt que de considérer qu'on veut reproduire la tête dans un sac des mécanismes qui n'ont pas donné satisfaction, on doit à l'inverse tirer profit de l'expérience de cette première pandémie, de manière nationale et internationale, en respectant évidemment les prérogatives de la Suisse, notamment s'agissant des décisions à prendre le moment venu.

S'agissant de cette proposition de révision de la loi sur les épidémies, on doit justement la saluer comme étant un moyen de mieux prévoir la manière dont nous lutterions contre une pandémie qui pourrait - à Dieu ne plaise ! - survenir dans un temps futur. Je répète donc la position du PLR consistant à rejeter cette motion et vous invite à la suivre. Je vous remercie de votre attention.

M. Jean-Charles Rielle (S). Monsieur le président, chères et chers collègues, je serai bref et reprendrai juste les quelques éléments qui figurent déjà dans l'excellent rapport de majorité de notre collègue et qui ont amené la commission à refuser largement cette motion.

La consultation sur la revision de la loi fédérale sur les épidémies, la LEp, s'est terminée en mars dernier. Pour rappel, le canton de Genève a participé à la consultation lancée par le Conseil fédéral sur cet objet et les résultats de celle-ci ont été rendus publics.

Les signataires de la motion cherchent surtout à mettre en doute le rôle de l'OMS - comme l'a relevé mon collègue - ainsi que son efficacité dans la lutte contre la pandémie et n'admettent pas que cette organisation internationale puisse déclarer un état d'urgence ou de nécessité.

L'OMS n'émet que des directives et seul le Conseil fédéral est compétent pour décider de telles mesures, même s'il est nécessaire que l'OMS puisse assurer un rôle de coordination et d'information sur le plan international. Cette pandémie, rappelons-le, a provoqué la mort de plus de sept millions de personnes dans le monde.

Comme cela a été dit, la gestion de la pandémie par le canton a fait l'objet de trois rapports d'évaluation, un à l'interne et deux par des experts indépendants, rapports qui ont été présentés et commentés à la commission de la santé quelques mois après la fin des mesures sanitaires.

Certains députés minoritaires ont souligné, à juste titre d'ailleurs, l'importance du respect des processus démocratiques et des libertés individuelles. S'agissant des premiers, il a été rappelé que notre Conseil et ses commissions ont pu se réunir, voter de nombreux crédits et adopter, après des examens minutieux par la commission législative, les arrêtés urgents proposés par le Conseil d'Etat. Quant au respect des libertés individuelles, plusieurs députés ont relevé que dans la très grande majorité des cas, le principe de proportionnalité avait été scrupuleusement respecté.

La méfiance distillée par cette motion semble à certains s'inspirer plus de théories complotistes que de raisonnements techniques et scientifiques, cela a été relevé. De plus, la notion de souveraineté sanitaire semble bien dérisoire quand une épidémie se répand rapidement au-delà des frontières des Etats.

Forts de ce constat, les socialistes vous invitent à refuser cette motion ainsi que tout éventuel retour en commission, comme cela a été proposé, le Conseil d'Etat ayant déjà très clairement pris position lors de la consultation. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)

Mme Ana Roch (MCG). Cette motion arrive un peu comme la grêle après les vendanges: elle concerne une procédure de consultation lancée par Conseil fédéral, et malheureusement, pour ce texte, le délai de réponse est largement dépassé. Le Conseil d'Etat ne peut donc pas y répondre. Quant aux autres questions soulevées en commission - intéressantes ! -, elles sont de compétence fédérale. Pour ces raisons, le groupe MCG s'abstiendra. Merci.

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole au rapporteur de minorité pour trente secondes.

M. Guy Mettan (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je tiens à dire rapidement que la loi sur les épidémies n'a pas été appliquée en Suisse; on venait de l'adopter en votation populaire et elle n'a pas été appliquée au moment où est survenue l'épidémie. Il est quand même bizarre de voter une loi et de réclamer sa mise en vigueur pour ensuite ne pas l'appliquer quand une épidémie survient ! En effet, ce texte n'a pas été appliqué pendant l'épidémie de covid-19. C'est la raison pour laquelle je vous invite, en tenant compte effectivement du fait que les invites de cette motion sont un peu dépassées, à adopter les deux amendements que j'ai présentés dans mon rapport de minorité et à renvoyer le tout à la commission de la santé, pour qu'on puisse examiner ces amendements.

Le président. Vous présentez donc deux amendements et demandez le renvoi, c'est bien juste ?

M. Guy Mettan. Exactement.

Le président. Demandez-vous le renvoi en commission avant ou après le vote sur les amendements ?

M. Guy Mettan. Après.

Le président. Après le vote sur les amendements ? (Remarque.) Ah bon, d'accord. (Commentaires.)

Une voix. Il faut voter sur le renvoi en premier !

M. Guy Mettan. Excusez-moi ! Je demande en effet d'abord le renvoi en commission pour qu'on puisse examiner les deux amendements qui figurent dans mon rapport de minorité. Voilà !

Le président. Il me semble en effet beaucoup plus logique de procéder de la sorte. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Est-ce que le rapporteur de majorité veut s'exprimer à ce sujet ?

M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Bien sûr, Monsieur le président, j'ai demandé la parole, ce n'est pas pour rien ! Je reviendrai ensuite sur les amendements. Je pense que les travaux ont été menés de façon tout à fait satisfaisante; nous avons procédé à un certain nombre d'auditions, les choses sont claires, et je recommande donc de refuser le renvoi.

Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs, je lance la procédure de vote sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 3000 à la commission de la santé est rejeté par 67 non contre 10 oui.

Le président. Monsieur le rapporteur de minorité, souhaitez-vous présenter vos amendements ?

M. Guy Mettan (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Les amendements se trouvent dans mon rapport de minorité. On peut peut-être les relire.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, ces amendements se trouvent en bas de la page 45 du rapport. Ils visent à remplacer les invites du texte initial de la motion par les deux invites suivantes:

«- à évaluer de façon approfondie les conséquences sur le fédéralisme et les éventuelles atteintes aux libertés civiles de l'adaptation de la loi sur les épidémies exigée par le traité sur les pandémies voulu par l'OMS;

- à faire part, le cas échéant, de ses réserves aux autorités fédérales compétentes.»

Nous votons en bloc sur cette proposition d'amendement.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 69 non contre 11 oui et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Le président. Nous allons passer au vote de la proposition de motion.

M. Jean-Marc Guinchard. J'ai demandé la parole !

Le président. Monsieur le rapporteur de majorité, je vous cède le micro.

M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Il est parfois dur d'avoir raison tout seul, n'est-ce pas, Monsieur Mettan ?

M. Guy Mettan. C'est mon destin !

M. Jean-Marc Guinchard. Je tiens juste à ajouter, en guise de conclusion, comme le rapporteur de minorité a enjoint à ce Grand Conseil d'accepter cette motion, ce qui est une méthode un peu directive, que je me permets, moi, Monsieur le rapporteur de minorité, de vous enjoindre de relire les procès-verbaux de la commission de la santé, qui a évalué les trois rapports dont j'ai parlé, qui ont également été rappelés par le député socialiste tout à l'heure. Ces trois rapports ont tous abordé les aspects sanitaires, contrairement à ce que vous avez déclaré.

Deuxième chose: vous invoquez pour les pays la liberté d'action, indépendamment des recommandations édictées par l'OMS. A ce sujet, vous avez donné l'exemple de la Suède - je passe sur l'exemple de la Biélorussie, qui était assez maladroit d'ailleurs -, qui effectivement n'a pas souhaité, elle, reconnaître les recommandations de l'OMS: cela prouve bien que tout est possible à cet égard.

Par conséquent, je maintiens le refus cette motion, qui, de toute façon, ne permet plus au Conseil d'Etat quelque action que ce soit. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote sur la proposition de motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 3000 est rejetée par 59 non contre 11 oui et 11 abstentions (vote nominal).

Vote nominal

R 1012-A
Rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier la proposition de résolution de Delphine Bachmann, Xavier Magnin, Jean-Charles Lathion, Jacques Blondin, Sébastien Desfayes, Claude Bocquet, Jean-Marc Guinchard, Patricia Bidaux, Souheil Sayegh, Jean-Luc Forni, Bertrand Buchs, Philippe Morel, Didier Bonny, Marta Julia Macchiavelli, Marjorie de Chastonay, Philippe de Rougemont, Yves de Matteis, Corinne Müller Sontag, Ruth Bänziger, Anne Bonvin Bonfanti, Maria José Quijano Garcia pour une politique transfrontalière ambitieuse dans le domaine de la santé
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 29 février et 1er mars 2024.
Rapport de majorité de Mme Jacklean Kalibala (S)
Rapport de minorité de M. Alexis Barbey (PLR)

Débat

Le président. Nous passons à la R 1012-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Madame Kalibala, vous avez la parole.

Mme Jacklean Kalibala (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la crise du covid-19 nous aura appris une chose, c'est que la santé est bel et bien une question internationale. Les virus et autres pathogènes traversent aisément les frontières, quelle que soit la politique extérieure du gouvernement. Par ailleurs, les traitements sont souvent d'origine étrangère et doivent faire l'objet de négociations multilatérales. Et puis, les professionnels sont des ressources précieuses qui sont puisées au-delà des frontières.

A Genève, nous avons la chance d'avoir des soins excellents, mais qui dépendent en grande partie de professionnels venant de l'étranger, notamment de France voisine. Le Grand Genève fait face à une situation d'inégalité d'accessibilité des soins et nous ne pouvons pas ignorer le fait que Genève s'en sort favorablement grâce au personnel soignant frontalier.

Notre situation privilégiée péjore la situation en France voisine, en raison notamment des différences salariales de part et d'autre de la frontière. La pénurie de soignantes et soignants détériore les conditions de travail et exerce une pression importante sur les équipes de soin des deux côtés de la frontière.

Il est évident qu'une politique sanitaire transfrontalière coordonnée est nécessaire afin de faire face aux défis qui nous attendent avec le vieillissement de la population, sans parler d'éventuelles pandémies ou catastrophes.

Cette résolution relève deux enjeux prioritaires: la formation et la mutualisation des ressources. Elle demande de renforcer la coopération transfrontalière en matière de santé. Malgré la frontière qui nous sépare et les différences législatives, des collaborations directes avec l'agence régionale de santé française sont possibles à travers l'accord-cadre de 2016. A l'image des conventions pour les urgences, la médecine hyperbare et la dialyse, sans oublier la collaboration pendant la crise sanitaire du covid... (Brouhaha.)

Le président. Excusez-moi, Madame la députée. Monsieur Pfeffer, si vous voulez parler, merci de le faire à l'extérieur, vous aurez beaucoup plus de place. Vous pouvez continuer, Madame.

Mme Jacklean Kalibala. Comme je disais, à l'image des conventions pour les urgences, la médecine hyperbare et la dialyse, sans oublier la collaboration pendant la crise sanitaire du covid-19, nous devons mettre en oeuvre d'autres projets permettant de garantir un accès égalitaire et de réduire la pression due aux disparités sanitaires.

La majorité de la commission vous invite donc à voter cette proposition de résolution afin de donner un signal clair au Conseil d'Etat, lui demandant d'agir pour réunir les partenaires régionaux autour d'une forte volonté politique de collaboration. Merci.

M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de minorité. S'il y a une chose qui n'est pas niée par la minorité sur cet objet, c'est qu'il faut continuer les négociations avec la France dans le domaine de la politique sanitaire. Mais simplement, la minorité sait bien que ces négociations sont continues; ce n'est pas cette résolution qui amènera à négocier avec la France, c'est simplement le travail normal de notre gouvernement que de dialoguer en permanence avec nos amis français.

Quelques avancées ont d'ailleurs eu lieu, elles sont la preuve que cette négociation est bien présente. D'abord, un patient français peut désormais aller aux HUG et être remboursé par son assurance-maladie. Plusieurs conventions ont été signées, en particulier sur l'utilisation du caisson hyperbare des HUG ainsi que sur les dialyses. Et enfin, des discussions sur les tarifs ont lieu en permanence.

Alors s'il faut continuer cette négociation, il faut aussi se rendre compte que la situation est assez difficile. Elle l'est à cause de blocages qui sont les nôtres, qui sont des blocages genevois. Si on n'a pas réussi à cofinancer des P+R de l'autre côté de la frontière, on peut se demander quelle serait la situation si on devait cogérer des écoles d'infirmières ou des centres médicaux - c'est autrement plus compliqué et difficile. On aurait certainement une grande peine à le faire.

La complexité administrative française est aussi un obstacle à ces négociations, en particulier le parisianocentrisme de nos voisins, qui fait que tout doit passer du département à la région, puis de la région au gouvernement central, avant de redescendre la même échelle - ça ne facilite pas les négociations et explique qu'elles n'ont pas toujours autant de résultats que souhaité.

Enfin, il y a un dernier point que j'aimerais mentionner, c'est que les hôpitaux doivent de nos jours avoir un certain nombre de patients pour pouvoir maintenir une spécialité médicale au sein de leur établissement. Par conséquent, il est plus difficile de transférer un patient de Lyon à Genève ou de Genève à Lyon, parce que c'est un patient en moins qui sera traité par l'hôpital en question, ce qui pourrait remettre en cause leur capacité à traiter de futurs sujets.

Pour ces trois raisons, à savoir le fait que les négociations continuent déjà, et ce en permanence, les difficultés d'investir en France et enfin ces nouvelles réglementations des hôpitaux sur les quotas minimaux de patients, il s'agit de refuser cette résolution.

Mme Louise Trottet (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il convient de rectifier une méprise qui figure dans le rapport de minorité: il ne s'agit pas d'une résolution à l'intention de l'Assemblée fédérale, mais bien d'une résolution cantonale, ce qui fait quand même une différence.

J'aimerais aussi ajouter que le rapporteur de minorité use d'un argument assez fréquemment invoqué lorsqu'on ne veut tout simplement pas d'une idée ou d'un objet, celui consistant à dire que la problématique serait déjà connue au niveau de l'exécutif et que le parlement n'a donc pas à s'en saisir. Or, les textes de cette enceinte, même déclaratoires, ont toute leur importance pour soutenir certaines actions du Conseil d'Etat. Notre système de santé est profondément et durablement interconnecté avec celui présent de l'autre côté de la frontière. Le covid ne l'a que trop bien montré, comme l'a soulevé la rapporteure de majorité.

Et c'est une réalité que le politique gérera d'autant mieux en l'envisageant de manière plus égalitaire et plus franche. Cette réalité est d'ailleurs de plus en plus conscientisée, il faut le souligner, avec notamment la tenue récente du colloque franco-suisse sur les ressources humaines du secteur de la santé, durant lequel certaines propositions très novatrices, qui font d'ailleurs écho à cette résolution, ont été formulées, notamment en matière de formation transfrontalière et d'échanges de personnel soignant.

Effectivement, il reste maintenant à voir ce qui sera vraiment mis en oeuvre parmi toutes ces propositions et ce qui trouvera des majorités. Par conséquent, encore une fois, cette résolution joue un rôle pour appuyer les propositions faites lors de ce colloque.

Dans les faits, il s'agit de créer les conditions pour que des deux côtés de cette frontière, les populations aient un accès rapide à des soins de qualité, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. 20% à 30% des lits en France voisine sont fermés. Nous ne serions probablement pas très satisfaits si c'était le cas de notre côté de la frontière - c'est le moins qu'on puisse dire. Cela est profondément injuste, d'autant plus lorsqu'on sait que l'attractivité des emplois chez nous n'est pas pour rien dans cette pénurie.

Il convient donc de mettre en place une formation contenant suffisamment de personnel soignant et de médecins de l'autre côté de la frontière et de réaliser cet objectif de manière concertée et planifiée sur le long terme, également en collaboration avec la France voisine.

Le vieillissement de la population et le transfert du stationnaire vers l'ambulatoire sont des variables qui vont modifier en profondeur les besoins du système de santé du Grand Genève ces prochaines années. Après le Grand Genève du logement et celui de l'économie, il faut maintenant penser et concrétiser le Grand Genève de la santé ! Pour toutes ces raisons, le groupe Vert va accepter cette résolution et vous propose d'en faire de même. (Applaudissements.)

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Genève a l'habitude d'exporter ses problèmes. Elle le fait dans le domaine du logement, en envoyant ses citoyens se loger dans le canton de Vaud voisin ou en France voisine. Genève a aussi l'habitude de créer, sur le plan médical et paramédical, des déserts dans la zone frontalière, puisqu'elle occupe une masse assez importante d'infirmières.

Je tiens à rappeler que des négociations constantes ont lieu - M. le rapporteur de minorité l'a dit. A cet égard, j'aimerais rappeler également la lettre d'intention, signée récemment par les HUG, qui leur demande de ne pas faire de démarchage actif et volontaire auprès du personnel médical et paramédical de France voisine.

Il est vrai que dans le cadre des négociations que nous menons avec la France, on constate un certain déséquilibre, avec un pays extrêmement centralisé, où toutes les décisions, malgré la régionalisation, doivent remonter au ministère de la santé, au ministère des affaires étrangères, auprès du premier ministre, voire du président, alors que Genève a quand même les coudées un peu plus franches à cet égard.

Cette résolution n'est pas anodine, elle représente un signal fort et important, raison pour laquelle il vaut la peine de l'accepter, et c'est pourquoi Le Centre vous recommande de le faire avec la même majorité qu'en commission. Je vous remercie.

M. Guy Mettan (UDC). Le groupe UDC refusera cette résolution. Le rapporteur de minorité a très bien expliqué les raisons pour lesquelles, si on peut souscrire au but général, qui est de maintenir et de développer la coopération, eh bien au fond, sur le plan pratique, ce texte ne sert pas à grand-chose.

J'aimerais aussi quand même préciser que si Genève crée une certaine désertification médicale de l'autre côté de la frontière, elle n'est pas la seule à le faire, la France y contribue beaucoup. Parce que par exemple, toute la France centrale, l'Auvergne, le Périgord, etc., sont des déserts médicaux, et Genève, je peux vous l'assurer, n'y est pour rien ! Ce n'est pas avec ce type de résolution qu'on va résoudre le problème des déserts médicaux français.

L'autre raison, c'est qu'on a aussi des coûts qui sont différents. Il y a le problème des infirmières, qui est celui qu'on connaît le mieux. Mais il y a aussi le problème des médecins. Pour moi, s'il y a des médecins suisses qui sont d'accord d'aller travailler et de s'installer dans la vallée de l'Arve, il n'y a aucun problème ! Mais je suis sûr que pas beaucoup de médecins suisses ne sont prêts à le faire pour venir en aide à la population française, qui en aurait besoin. Simplement parce qu'il y a des problèmes de formation, des problèmes de coût, des problèmes de revenus, qui rendent cette coopération difficile.

Ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire, ça veut dire qu'il faut effectivement chercher des solutions. Le Conseil d'Etat mène des discussions actives, je pense que M. Maudet va nous l'expliquer. Des solutions ont été trouvées. Ces différences sont aussi un peu réduites depuis l'ouverture du nouvel hôpital de Findrol, de l'autre côté de la frontière, qui a permis d'un peu mieux contrebalancer les choses. Il y a donc des réalisations, on avance gentiment, peut-être pas assez vite, mais nous ne pensons en tout cas pas que c'est à travers ce type de résolution qu'on résoudra ces problèmes, raison pour laquelle je vous invite à suivre le rapporteur de minorité.

M. Amar Madani (MCG). Mesdames les députées, Messieurs les députés, cette proposition de résolution ne nous paraît pas acceptable, ni sur la forme ni sur le fond. Sur la forme, le recours à cet instrument diminue sa pertinence. Tout ce qui gagne en fréquence perd en signifiance, comme cela a déjà été soulevé maintes fois. Les conseillers nationaux sont encore les meilleurs relais pour porter cette problématique, sans qu'il soit nécessaire d'encombrer le Parlement fédéral. (Commentaires.)

Une voix. C'est une résolution pour le Conseil d'Etat.

M. Amar Madani. Maintenant, Mesdames et Messieurs, sur le fond, l'accès aux soins a occupé bon nombre de nos débats. Cette question soulève particulièrement la problématique des tensions dans les métiers de la santé. Bien sûr, les coopérations transfrontalières sont envisageables, c'est déjà le cas pour beaucoup de projets spécifiques, comme les caissons hyperbares et les dialyses, ou encore pour les échanges d'expériences et le partage des savoirs.

Quant à la question du personnel frontalier dans nos institutions, elle n'est pas spécifique à ce secteur d'activité. C'est une réalité générale qui touche davantage ce secteur en raison de l'attractivité de la place genevoise en matière de salaires et d'organisation du travail. Lier ce phénomène aux déserts médicaux dans les départements français voisins est un raccourci.

La direction française des études, de l'évaluation et de la statistique conteste d'ailleurs la notion de désert médical en général et préfère utiliser des indicateurs plus pertinents et opérationnels en la matière pour les définir et les mesurer.

Pour combattre l'hétérogénéité en matière d'accès aux soins sur notre territoire, Genève doit développer un modèle de santé autocentré. Des solutions ont été avancées et réitérées. Elles sont d'abord centrées sur l'attractivité de ces métiers, l'orientation des élèves à la sortie du cycle d'orientation, la formation professionnelle et les places de stage, les conditions de travail et les rémunérations.

Tout comme pour le domaine alimentaire, la souveraineté en matière de santé est une donnée essentielle de notre développement et de notre cohésion. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Regarder ailleurs, c'est organiser une fuite en avant sans retombées concrètes pour nos concitoyens. C'est notamment le cas pour la proposition de constitution d'un fonds, dont on ne sait comment il serait financé, à quelle hauteur et pour quel objectif. Les coopérations doivent toujours rester souples et s'adapter en dehors de tout carcan institutionnel et bureaucratique.

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Amar Madani. Mesdames et Messieurs, pour toutes ces raisons, le MCG votera non à cette résolution.

M. Romain de Sainte Marie (S). Bon, d'abord, je suis un peu étonné, puisque le MCG retourne sa veste; il avait voté unanimement en commission, ses deux députés ayant accepté cette résolution. Peut-être qu'ils n'avaient pas tout à fait compris ce texte, étant donné que mon préopinant n'a pas saisi que cet objet invite le Conseil d'Etat et non pas l'Assemblée fédérale à agir en matière de relations avec les départements de France voisine.

Peut-être que cet élément fera que le MCG retournera à nouveau sa veste à la fin de mon intervention, car il aura compris que notre marge de manoeuvre est ici tout à fait cantonale.

J'entendais le rapporteur de minorité parler des P+R et de cette malheureuse votation, qui a quand même déjà dix ans ! Alors si en dix ans nous n'osons plus parler à nos voisins français pour développer le Grand Genève parce qu'on a encore le traumatisme de ce vote sur les P+R, ma foi, nous n'allons pas beaucoup avancer et nous n'allons plus oser faire quoi que ce soit dans cette région, qui est bien une région qui dépasse les frontières et qui s'étend sur le canton de Vaud, celui de Genève et les deux départements de France voisine.

On l'a bien amené, nous parlons de déserts médicaux. Alors ce n'est pas le désert médical de l'Auvergne et du Périgord, pardon, Monsieur le député UDC Mettan - la densité de population dans ces régions n'est pas tout à fait la même que celle de la France voisine, où la densité est à l'inverse beaucoup plus élevée, avec les villes qui bordent la frontière genevoise. Là, on parle bien d'un désert médical, il faut le dire, dont Genève est en effet la cause, par l'attractivité salariale, par l'attractivité de ce centre urbain: nous attirons effectivement la main-d'oeuvre dans le domaine de la santé.

Au sujet de cette main-d'oeuvre, il convient d'arrêter avec cette croyance selon laquelle les dangereux frontaliers piquent le travail des Genevoises et des Genevois, puisque s'il y a bien un domaine dans lequel on voit un taux de chômage plus faible, quasiment nul même, c'est bien celui de la santé. Cela révèle un enjeu majeur, celui de la formation. C'est là que nous devons agir dans le canton de Genève et au niveau de la Confédération; l'initiative fédérale concernant les soins infirmiers a d'ailleurs été acceptée.

Et puis, il y a aussi une logique qui doit exister des deux côtés de la frontière, le rapporteur de minorité le mentionnait: si nous devons agir de manière coordonnée avec la France en matière de logement, il en va de même pour la formation en matière de santé. Là aussi, cette résolution invite à agir de façon coordonnée avec le voisin français pour former davantage, pour faire en sorte que nous gardions notre qualité en la matière à Genève et garantir ainsi que la France voisine ne soit pas un désert médical. Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste, et j'espère maintenant le MCG également, votera cette résolution ! (Applaudissements.)

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Une remarque rapide à l'intention du député UDC qui a cité tout à l'heure les déserts médicaux de l'Auvergne ou du Périgord: lorsque je me balade dans les HUG ou dans certaines cliniques privées, je constate d'après les accents que j'entends qu'il y a pas mal de gens qui viennent justement d'Auvergne, du Périgord, de Toulouse ou de Provence. Merci.

M. Laurent Seydoux (LJS). Mesdames et Messieurs les députés, il est clair que les enjeux de notre région sont vastes et nombreux et que celui des soins infirmiers et des aspects médicaux est extrêmement important. Cette résolution a vraiment comme objectif un engagement de la part du canton, qui, je le rappelle, est un pôle extrêmement important et attractif pour notre région, mais également que cet engagement puisse déborder avec l'appui de nos régions frontalières. Je crois que c'est un véritable enjeu que d'avoir les collaborations les plus importantes possibles entre les régions frontalières et Genève, et on le voit par rapport à l'attractivité de notre canton.

Le groupe Libertés et Justice sociale soutiendra vivement ce texte, qui a l'avantage de propulser notre région vers le futur; ces collaborations sont absolument indispensables. Nous vous encourageons donc à voter en faveur de cette résolution. Merci.

M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de minorité. Je crois que l'essentiel des arguments, dans un sens comme dans l'autre, a été dit, et il ne faudrait pas se répéter. Mais on a pu voir notamment que les négociations ont lieu en permanence entre la France et la Suisse, ce dont témoigne ce qui figure dans le rapport de majorité, à savoir l'accord de collaboration avec l'agence nationale de santé française qui date de 2016. Cela montre bien qu'il y a un échange et une discussion continus entre le gouvernement genevois et ses homologues de la Haute-Savoie et de l'Ain.

Le problème dont on a beaucoup parlé ici est celui du désert médical autour de nous en France. Je crois que ce désert médical n'est pas... Enfin, il est partiellement dû à Genève, il ne faut pas se voiler la face, mais c'est un problème que les Français ont absolument partout. Dans toutes leurs régions, il y a des problèmes de densité médicale, et on ne doit pas penser que la disparition des HUG par exemple, qui cesseraient d'attirer les infirmières françaises, réglerait le problème du désert médical qui nous entoure.

Pour ces deux raisons, je vous invite à rejeter une résolution qui ne fait qu'enfoncer des portes ouvertes en disant par exemple qu'il faut appliquer la loi partout où elle doit être appliquée. Le gouvernement mène les négociations là où cela doit être fait et il n'a pas besoin de cette résolution. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à la rapporteure de majorité pour trente secondes.

Mme Jacklean Kalibala (S), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président, je ferai vite. Je pense juste qu'il est important de noter dans ce discours consistant à se focaliser sur le désert médical qu'il y a effectivement des déserts médicaux en France, mais que c'est aussi le cas en Suisse: des régions sont dépourvues de médecins et d'infirmiers. Et vu que notre canton dépend majoritairement d'infirmières étrangères - aux HUG, 60% des infirmières et 40% des médecins sont d'origine étrangère -, nous ne sommes pas à l'abri de nous retrouver dans une situation de pénurie de médecins et de soignantes.

Le but de la coopération est donc justement qu'on puisse garder notre bon système de santé et le nombre de soignantes dont on dispose actuellement.

Le président. Merci, Madame la députée.

Mme Jacklean Kalibala. La résolution souhaite précisément combattre les blocages et aller de l'avant afin de continuer à améliorer la coordination et la collaboration transfrontalière.

M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, c'est en réalité un débat important qui est mené à la faveur de cette résolution, et j'aimerais dire d'emblée que pour le Conseil d'Etat, la question de l'espace sanitaire, qui va évidemment au-delà des frontières cantonales, aussi bien en direction de la Confédération et des autres cantons que des régions françaises voisines, est fondamentale. Mme la rapporteure de majorité vient de le dire avec beaucoup de pertinence, nous avons en Suisse déjà des cantons qui vivent, qui subissent - utiliser le verbe vivre serait un abus de langage - des déserts médicaux, je pense par exemple au canton du Jura, dans une certaine mesure à celui de Neuchâtel ainsi qu'à toute une série de cantons du Plateau.

La réalité de cette pénurie de personnel s'affranchit des clichés, qui, malheureusement, parsèment le rapport de minorité. La France, ce n'est pas le tiers-monde médical que l'on décrit, en tout cas pas de façon aussi claire et répartie que ça. Les Français sont les premiers à admettre - c'était le cas lors d'un colloque le mois passé à Paris - qu'ils procèdent de la même façon que nous, et sans forcément le vouloir, à une extraction de forces vives d'Afrique du Nord pour réaliser des soins, par exemple dans les EHPAD - c'est ainsi qu'on appelle les EMS en France - du sud du pays. On est donc toujours à côté du désert médical d'un autre. La réalité est que notre monde est interconnecté, que nous avons intérêt à nous préoccuper de cette problématique dans notre région, mais avec un regard qui va au-delà de cette situation, qui, de façon générale, va toucher l'Europe de plein fouet d'ici quelques années.

Cette réalité, vous l'avez dit, à Genève, c'est plus de 60% du personnel soignant du personnel des HUG qui vient de France voisine. Là, il faut quand même se souvenir qu'il y a cinq ans de cela, quatre ans et demi même plus exactement, dans le cadre de l'épidémie du covid, précédemment évoquée dans cette enceinte, nous avons pu faire fonctionner la coopération transfrontalière au-delà de ce que l'on imaginait. Rappelez-vous: si l'on appliquait strictement la fermeture des frontières, on avait finalement 60% du personnel des HUG qui n'étaient pas disponibles et les Hôpitaux universitaires de Genève pouvaient arrêter de pratiquer.

Donc dans ce sens-là, le rapporteur de minorité a raison quand il dit que lorsqu'il faut trouver des solutions, il y a un dialogue constant et qu'on les trouve, mais on ne peut pas se contenter de situations d'urgence pour faire avancer la coopération transfrontalière.

Et c'est là que cette résolution prend tout son sens. Je me permets, Monsieur le président, de tordre le cou à l'idée répandue dans certains groupes, semble-t-il, que ce serait une résolution destinée à l'Assemblée fédérale: ce texte est destiné au Conseil d'Etat et on parle bien ici de politique cantonale, pour un canton qui a quand même cent kilomètres de frontière avec la France et dix à peine avec le reste de la Suisse, soit le canton de Vaud. Dans ce contexte-là, il y a trois enjeux clés, sur lesquels, il faut le dire, on a peu avancé ces dernières années.

D'abord, la question de l'embauche. Sans nous culpabiliser, il faut admettre que lorsqu'en France - imaginez-vous, mettons-nous à leur place - on forme à tour de bras des infirmiers et infirmières et que dans les trois mois qui suivent, un certain nombre fichent le camp dans le pays d'à côté alors que la formation a été assumée par l'argent public des citoyennes et citoyens français, ça pose un problème ! On ne peut pas juste le nier. Sinon, on admet publiquement qu'on va continuer de pomper éhontément les ressources du pays voisin ! Ce n'est pas notre vision de la coopération transfrontalière. Le reconnaître et voter cette résolution, c'est admettre qu'on a un problème partagé.

Mettez-vous par exemple à la place des maires de Viry, de Valleiry, que j'ai rencontrés encore ce matin, dont les communes sont situées en bordure de Genève: on ne peut pas aujourd'hui admettre qu'ils ont construit des EMS et que deux tiers des lits ne sont pas exploitables pour les personnes âgées qui ont vécu toute leur vie dans ces villages aux alentours de Genève. Pas exploitables non pas parce qu'ils n'ont pas l'argent, mais parce qu'ils ne trouvent personne pour faire fonctionner ces EMS.

C'est un problème similaire que nous avons dans le domaine des transports avec les conducteurs de bus: nous ne voulons pas, nous ne pouvons pas - et je sais que le MCG nous soutient là-dessus - aller pomper éhontément les ressources publiques françaises pour conduire des véhicules de transport en commun. Parce qu'à terme - il faut réfléchir ! - s'il n'y a plus de bus, plus de train, les infirmières et les infirmiers ne viendront évidemment plus. Ou alors ils prendront la voiture et on retombera dans les problèmes que nous avons évoqués en début d'après-midi - ce n'est évidemment pas ce qu'on souhaite.

Il doit y avoir une certaine osmose, un équilibre. Nous devons nous soucier de la capacité de nos voisins français d'assumer leurs responsabilités dans les services publics, les transports, la santé, dans toute une série de domaines. Leurs problèmes sont aussi les nôtres. Cette résolution le dit et le dit bien, et sur la question de l'embauche, c'est central.

Sur la question de la formation, que j'ai évoquée incidemment, les Français sont aujourd'hui prêts à mettre le paquet. Les Suisses, Genève, le font aussi. Vous savez qu'on a ce projet d'école sur le terrain de la Goutte de Saint-Mathieu à Bernex. Chaque année, nous «fabriquons», nous «produisons», entre guillemets, jusqu'à 250 infirmiers ou infirmières à Genève, lorsque nous avons des candidats. Je souligne ce qui a été dit tout à l'heure avec pertinence: il n'y a pas de chômage dans ce domaine-là. Il n'y en a pas ! Et donc si on pouvait former plus, on le ferait, mais ce n'est pas possible. Pas parce qu'il n'y aurait pas suffisamment de places, mais parce qu'on n'a pas assez de candidats. Alors j'entends là aussi les propos des opposants à cette résolution: on peut rendre la formation plus attractive, on peut le cas échéant faire plus de publicité, mais ça ne va pas nous offrir les bataillons nécessaires. Et là aussi, le problème est partagé avec la France.

Et puis, le dernier élément est celui qui concerne la patientèle, et cela a été évoqué, mais on est passé dessus un peu comme chat sur braise. Les Hôpitaux universitaires de Genève, soit un des cinq hôpitaux universitaires de Suisse, un fleuron du point de vue médical, on peut y injecter tout l'argent qu'on veut, au bout d'un moment, s'ils n'ont pas la masse critique, la capacité de permettre par exemple à des chirurgiens d'avoir le volume suffisant d'opérations par année, eh bien ils vont baisser, ils vont régresser. Et c'est quand même hallucinant !

Je prends un exemple peut-être un peu caricatural, mais assez frappant: on a tout autour de Genève une patientèle potentielle qui voit des enfants atteints d'un cancer, résidant à Collonges-sous-Salève, soit à dix kilomètres à vol d'oiseau des HUG, être obligés d'aller plusieurs fois par semaine à Grenoble ou à Lyon, parce que le principe de territorialité nous empêche d'hospitaliser ces enfants - et c'est un cas réel - aux Hôpitaux universitaires de Genève.

Voilà un domaine dans lequel la tâche est ardue, parce que, Mesdames et Messieurs, je ne vous le cacherai pas, les systèmes d'assurance-maladie sont très différents et parce que les tarifs pratiqués à Genève rendent cette hospitalisation en oncologie pédiatrique extrêmement compliquée, voire difficilement concevable du point de vue financier. Mais du point de vue du bassin de vie que l'on partage et même par rapport à la masse critique de patientèle pour les HUG, c'est un enjeu fondamental.

Par conséquent, et je conclus, Mesdames et Messieurs, cette résolution nous semble très importante, parce qu'elle montre qu'on prend la mesure du problème; elle affiche clairement le fait qu'on partage une communauté de destin, un bassin de vie, qu'il y a certes des efforts à fournir des deux côtés, mais qu'on ne peut pas juste se désintéresser de la situation française s'agissant de l'embauche, de la formation et de la patientèle. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, au sein du Conseil d'Etat, nous cherchons des solutions gagnant-gagnant.

Nous sommes en étroite discussion et nous avons intensifié les collaborations avec l'agence régionale de santé, basée à Lyon, ainsi qu'avec le partenaire côté français, qui est l'institut de formation - il y a notamment un bâtiment en construction à Annemasse, dans le cadre duquel nous pourrions développer des collaborations. Et nous accueillerions avec grand intérêt un soutien fort de ce parlement à cette résolution, pour mettre du vent dans les voiles au Conseil d'Etat et aller dans cette direction. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.

Mise aux voix, la résolution 1012 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 47 oui contre 39 non et 1 abstention (vote nominal). (Commentaires pendant la procédure de vote. Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Résolution 1012 Vote nominal

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos travaux à 18h05.

La séance est levée à 17h50.