République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 23 novembre 2023 à 20h45
3e législature - 1re année - 6e session - 36e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h45, sous la présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente.
Assiste à la séance: Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Anne Hiltpold, Carole-Anne Kast, Pierre Maudet et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que MM. Florian Dugerdil, François Erard, Jean-Pierre Pasquier, Léo Peterschmitt, Charles Poncet, Vincent Subilia, Francisco Taboada et François Wolfisberg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Rémy Burri, Monika Ducret, Patrick Lussi, Yves Magnin, Philippe Meyer et Daniel Noël.
Annonces et dépôts
Néant.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un magistrat du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Le magistrat entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Monsieur, vous êtes appelé à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment: M. Liburn Mehmetaj.
La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Premier débat
La présidente. Mesdames et Messieurs, nous poursuivons nos travaux avec le PL 12377-B, qui est classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité, rédigé par mes soins, est aimablement repris par Mme Joëlle Fiss. S'agissant du rapport de troisième minorité de Mme Aude Martenot, puisque le groupe Ensemble à Gauche ne fait plus partie de ce Grand Conseil, il ne sera pas présenté. Madame Fiss, c'est à vous.
Mme Joëlle Fiss (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Merci beaucoup, Madame la présidente. Effectivement, j'ai l'honneur de reprendre le rapport de majorité dont vous êtes l'auteure.
Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le PL 12377 vise à modifier l'article 15 de la constitution genevoise dans le but d'allonger la liste des discriminations interdites dans le droit. Après des discussions lors de la précédente législature, voici le second passage de ce texte en plénière. Pour rappel, la proposition initiale consistait à ajouter l'identité de genre à la liste exemplative.
Il y a plusieurs raisons pour refuser cet objet proposé à la base par Ensemble à Gauche lors de la dernière législature. D'abord, que les choses soient claires: l'interdiction des discriminations constitue un principe général garanti par le droit fédéral.
Ensuite, la loi générale sur l'égalité et la lutte contre les discriminations, soit la L 13279 que j'aime appeler la loi Fontanet, a été adoptée en mars 2023 et couvre parfaitement le sujet. Son article 1 recense entre autres les discriminations basées sur «le sexe, l'orientation affective ou sexuelle, l'identité de genre, l'expression de genre, l'intersexuation» parmi d'autres.
Faut-il par ailleurs rappeler que l'article 15 de la constitution genevoise mentionne que «toutes les personnes sont égales en droit» et que «nul ne doit subir de discrimination» ? La liste de l'article 15 ne prétend en rien être exhaustive, il s'agit d'une liste exemplative.
Mais l'argument le plus important, c'est qu'il ne faut surtout pas oublier que les droits de l'homme sont universels. A force de vouloir visibiliser certains combats, comme le proposent les rapporteurs de minorité, on affaiblit l'architecture des droits de l'homme dans son ensemble. Je dois dire avec regret qu'il s'agit d'une vision quelque peu wokiste des droits fondamentaux. Pourquoi ? Parce que les partisans du wokisme critiquent l'universalité des droits de l'homme, estimant qu'elle masque les différences de chacun; selon eux, les luttes spécifiques deviennent invisibles. Or cette lecture démontre une alarmante incompréhension de ce qu'est une valeur dite universelle. En réalité, c'est exactement le contraire: depuis les Lumières, les valeurs universelles visent à assurer l'égalité de chacun et de chacune devant la loi en dépit des différences.
La vérité, c'est qu'on ne pourra jamais recenser toutes les formes de discrimination, de nouvelles variantes vont malheureusement apparaître. Imaginez un instant si une nouvelle discrimination émergeait, par exemple - allez, au bol - envers toutes les personnes aux cheveux blonds, yeux verts et portant un tee-shirt bleu: ce n'est pas parce que ces personnes-là ne sont pas explicitement mentionnées dans la constitution que leur droit à l'égalité et à la non-discrimination ne s'applique pas.
Tout le monde n'est pas uniforme, mais tout le monde est égal. Par conséquent, hiérarchiser les victimes n'a aucun sens. J'ajouterai enfin que l'égalité de tous devant le droit n'enlève en rien l'importance d'étudier la spécificité de chaque forme de discrimination; chaque intolérance est ancrée dans son propre contexte sociohistorique et nécessite une réponse ciblée en fonction de sa dynamique distincte. Aussi, l'un n'exclut pas l'autre. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
M. Yves de Matteis (Ve), rapporteur de première minorité. Je ne vais pas relire mon rapport de minorité, il est disponible sur le site du Grand Conseil. J'aimerais en revanche préciser un élément qui n'a pas été évoqué jusqu'à présent, à savoir que c'est suite à une méprise - c'est du moins ce que m'avait indiqué un membre de la commission concernée de la Constituante - que l'identité de genre n'a pas été incluse dans l'article 15. En effet, seule l'orientation sexuelle y a été inscrite, certains constituants et certaines constituantes pensant que les deux termes, orientation sexuelle et identité de genre, étaient équivalents ou synonymes. En raison de cette lacune, le groupe à l'origine du projet de loi a demandé l'ajout de l'identité de genre.
Toutefois, au cours des débats de notre commission des Droits de l'Homme, il est également apparu que d'autres catégories de personnes n'étaient pas citées dans cet article antidiscriminatoire de notre constitution. Si l'on examine la Constitution fédérale, l'article 8 précise que personne ne peut être discriminé du fait de son âge - on pense aux enfants, aux jeunes ou aux seniors - ou de son sexe - il est ici avant tout question des femmes. Rien de tout cela dans notre charte cantonale - et je ne pense pas qu'on puisse soupçonner les auteurs de la Constitution fédérale de wokisme.
Contrairement à la Constitution fédérale, la constitution genevoise n'interdit donc pas les discriminations basées sur l'âge (enfants, jeunes, seniors) ou le sexe (femmes), ce qui est déjà en soi une incongruité par rapport au droit supérieur; une incongruité d'autant plus patente quand on regarde ce qui se passe à l'étranger: de nombreux pays - quasiment tous - disposent qu'on ne peut pas être discriminé du fait de son âge, de son genre, de son sexe et, parfois même, de son identité de genre.
Le 9 mai 2019, la commission des Droits de l'Homme a donc voté l'ajout des critères de l'âge, du sexe, de l'identité de genre et de la structure familiale dans l'article «Egalité» de notre constitution. La majorité d'alors était constituée d'Ensemble à Gauche, du parti socialiste, du groupe Vert et du PDC - qui ne s'appelait pas encore Le Centre. Il a semblé assez logique à la commission d'ajouter le critère de l'âge, qui concerne la totalité de la population, puisque nous avons tous été enfants et jeunes et que nous serons pour la plupart d'entre nous des seniors. La même majorité a également trouvé pertinent d'inclure le critère du sexe, qui concerne plus de la moitié de la population, à savoir les femmes. Quant aux situations familiales, évidemment qu'elles méritaient aussi d'être intégrées à cette disposition, ce qui a justifié le vote.
Malheureusement, le texte a été renvoyé à nouveau en commission et, cette fois-ci, quatre votes négatifs du PDC - qui a changé d'avis -, du PLR et de l'UDC ont eu raison des trois votes favorables d'Ensemble à Gauche, du parti socialiste et du groupe Vert. A noter que le MCG s'est abstenu lors de ce scrutin. En ce qui me concerne, je sais qu'un certain nombre d'associations avec lesquelles je suis en contact verraient d'un très bon oeil que nous adoptions ce projet de loi, et c'est pour ces raisons que j'invite les membres du Grand Conseil à l'accepter avec les amendements présentés lors des travaux de commission. Merci, Madame la présidente.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de deuxième minorité. Ce projet de loi s'intéresse de près au coeur de la définition de la dignité humaine. En Suisse, à Genève, nous appliquons la conception qui est bien traduite dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, que je cite: «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.» Je pense qu'il est très judicieux de disposer de ce genre de principes.
Maintenant, il faut également s'intéresser aux faits: comment ces principes d'égalité sont-ils mis en oeuvre ? La dignité humaine et les libertés fondamentales ne vont pas de soi et il est un certain nombre de domaines dans lesquels des droits fondamentaux ont été précisés, des lois d'application votées et des jurisprudences mises en oeuvre, que ce soit à la Cour européenne des droits de l'homme ou devant les tribunaux suisses, pour s'assurer qu'il ne puisse pas y avoir trop de fluctuations dans ce qu'on entend par «libertés individuelles».
Ce texte faisait suite à la décision de l'Organisation mondiale de la santé, en mai 2019 - c'est-à-dire deux mois avant son dépôt -, de retirer l'ancienne expression «trouble de l'identité de genre» de la liste des maladies; il s'agissait d'un grand pas en avant que les auteurs voulaient bien sûr concrétiser par cet objet. Mme Fiss a mentionné un certain nombre de motifs de discrimination qui ne sont pas cités dans les travaux parlementaires, par exemple le fait d'avoir les yeux verts; je la mets au défi de trouver des statistiques sur la discrimination à l'égard de personnes aux yeux verts qui soient similaires à celles qu'on trouve concernant les personnes transgenres.
Prenons les chiffres de l'association Stop Suicide, qui fournit un certain nombre de données: il y a dix fois plus de tentatives de suicide chez les personnes transgenres que dans le reste de la population. Parmi les jeunes de 16 à 26 ans, c'est simple, 69% y ont déjà songé contre 20% en moyenne... (Brouhaha.)
La présidente. Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur, je suis navrée. Mesdames et Messieurs, peut-être ne l'avez-vous pas remarqué, mais la pause est terminée. Est-il possible d'avoir un peu de calme ? J'ai compris qu'il y a des amendements de dernière minute sur d'autres objets, mais je vous remercie d'aller en discuter à l'extérieur pour qu'on puisse poursuivre sereinement le débat sur celui-ci. Reprenez, Monsieur Esteban.
M. Diego Esteban. Merci, Madame la présidente. Ce sont des statistiques assez édifiantes qui montrent bien qu'on ne cherche pas à mettre fin à ses jours parce qu'on est trans, mais parce que la société sanctionne notre identité de genre. De même, le taux de chômage est six fois plus élevé chez les personnes transgenres que dans le reste de la population. Ainsi, contrairement aux personnes avec les yeux verts, on est vraiment dans un cas de figure où il y a une légitimité et une urgence à protéger la liberté individuelle, et l'un des outils de cette protection est précisément l'interdiction des discriminations.
On nous dit que la liste est exemplative et que, du coup, elle pourrait tout contenir, mais ce que la jurisprudence suisse nous enseigne, c'est que chaque fois qu'on ne mentionne pas un élément, on prend le risque d'une application aléatoire. En effet, on parle beaucoup de l'égalité et de l'interdiction des discriminations, mais il existe une autre disposition stipulant que la dignité humaine est inviolable, et aujourd'hui, elle n'est pas appliquée par les tribunaux, elle n'a pas de portée juridique propre. Juridiquement, en Suisse, on ne peut pas invoquer la dignité humaine; c'est le risque qu'on prend avec les personnes transgenres si on n'insère pas quelque part dans la hiérarchie normative de notre pays le fait qu'il ne faut pas sanctionner des personnes pour ce qu'elles sont. Voilà, c'est tout ce que je signalerai à ce stade, Madame la présidente. La deuxième minorité que je représente votera bien sûr l'entrée en matière.
Mme Christina Meissner (LC). Notre constitution est claire: toutes les personnes sont égales en droits. Ce projet de loi vise à modifier l'article 15 de la constitution afin d'allonger la liste exemplative des discriminations interdites qui s'y trouvent. Lors du premier passage en commission, une majorité avait soutenu ce texte; lors du second passage en commission, une autre majorité s'est formée pour le refuser. Pourquoi ce revirement ?
C'est très simple: entre-temps, le 23 mars 2023, la loi générale sur l'égalité et la lutte contre les discriminations (la L 13279) a été adoptée par ce parlement; elle couvre - elle couvrait, du moins à ce moment-là - à satisfaction les discriminations liées à «l'origine, l'âge, le sexe, l'orientation affective ou sexuelle, l'identité de genre, l'expression de genre, l'intersexuation, les incapacités, les particularités physiques, la situation sociale ou familiale, les convictions religieuses ou politiques». Il n'y a aucune raison de remettre en question la formulation adoptée par le Grand Conseil alors que seulement huit mois se sont écoulés.
Certes, la loi votée n'est pas parfaite, certains à la droite du parlement l'ont déjà relevé en déposant un texte pour la modifier - que dis-je, pour la supprimer. Si la gauche s'y met à son tour, ce sera donner raison au Centre qui, à l'époque, avait demandé qu'elle soit soumise au peuple; solution refusée par votre assemblée. Eh bien maintenant, Mesdames et Messieurs les députés, assumez vos choix, s'il vous plaît ! Quant à nous, nous refuserons l'entrée en matière.
M. Yves Nidegger (UDC). Chers collègues, l'article 15 de notre constitution cantonale, sous le titre «Egalité», comporte un premier alinéa parfaitement rédigé - gloire soit rendue aux constituants qui ont quelque peu repris la constitution précédente -, lequel dispose: «Toutes les personnes sont égales en droit.» C'est parfait, tout est dit. Il n'y a pas plus universel ni inclusif que le mot «personnes» et il n'y a pas plus précis que le fait qu'elles soient égales en droit. Ce n'est pas une égalité de fait; avec les mêmes droits, celui qui bosse beaucoup et qui a du talent aura probablement une vie davantage couronnée de succès que celui qui ne bosse pas et est moins talentueux, mais chacun aura les mêmes droits.
Puis, il y a un alinéa 2 que certains souhaiteraient faire ressembler à un inventaire à la Prévert en se demandant ce qu'on pourrait bien y ajouter. C'est un peu le corollaire du premier: «Nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de [...]». Alors au XIXe siècle, ce corollaire négatif était important: tout le monde est égal en droit, donc nul ne doit être discriminé pour tel ou tel motif. Mais on était au XIXe siècle, il s'agissait de motifs classiques: il ne fallait pas que les catholiques soient moins bien traités que les protestants à Genève, il était question de convictions religieuses. Ou alors de l'origine: le Fribourgeois ou le Valaisan - qui se trouvent tous deux être catholiques par ailleurs - ne devaient pas être maltraités par rapport à l'habitant du canton, donc on a mentionné l'origine. Après est venue la question du sexe: les hommes, les femmes.
On peut naturellement allonger cette liste et en faire un inventaire à la Prévert avec toutes les possibilités d'inégalités de traitement qui pourraient être constatées ou imaginées, mais on en arrive à une proposition qui rend illisible une disposition dont le premier alinéa, si on le comprend bien, est absolument parfait et suffisant.
Tout dépend de l'époque, mais si vous voulez vraiment tout préciser... On a par exemple ajouté les déficiences, c'est-à-dire le handicap. Dans cette logique, il faudrait donc... On a parlé du genre - hommes, femmes, ce sont en principe deux genres -, et il y a cette idée très à la mode aujourd'hui - mais qui passera très vite - qui voudrait que la plupart des gens auraient un trouble, peinant à déterminer s'ils sont hommes ou femmes. Il ne faut pas se foutre de la gueule du monde, les gars: on sait tous si on est un homme ou une femme. (Remarque.) Statistiquement, ce n'est vraiment pas un problème de société d'une quelconque importance.
Cela étant, il est en vogue actuellement de souligner le fait que, peut-être, certains auraient ce trouble, il faut donc le spécifier. Mais alors faites-le pour tous les handicaps: on ne peut pas être discriminé parce qu'on a un pied bot, parce qu'on est aveugle, parce qu'on est sourd, c'est du même ordre.
La non-entrée en matière constitue la seule réponse rationnelle, intelligente à ce projet de loi, susceptible de nous ramener un petit peu aux limites qu'il nous faut imposer, donc le groupe UDC suivra très docilement la majorité.
La présidente. Je vous remercie. La parole va à M. Matthieu Jotterand pour deux minutes trente-cinq.
M. Matthieu Jotterand (S). Merci, Madame la présidente. Le chrono n'a pas été arrêté très vite, je trouve.
La présidente. Il est décalé de vingt secondes, si vous voulez tous les chiffres dans le détail.
M. Matthieu Jotterand. Merci beaucoup, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, mon préopinant vient de nous donner un bel exemple d'hôpital qui se fout de la charité sur le plan de se foutre de la gueule du monde. Pourquoi ? Nous avons là un homme cisgenre qui n'a absolument jamais vécu la moindre discrimination, je suis prêt à en mettre ma main au feu, et qui, pourtant... (Remarque. Rires.) Vous me laissez parler, Monsieur Nidegger, ou vous avez encore quelque chose à commenter ? ...et qui, pourtant, vient nous dire que les discriminations que subissent les personnes trans équivalent, comme le formulerait une autre préopinante, à celles vis-à-vis des personnes aux yeux verts.
Mesdames et Messieurs, je ne doute pas que nous sommes parfaits dans notre travail et que la Constituante était tout aussi parfaite, mais l'alinéa 1 n'est pas si parfait que cela. Bien sûr, il l'est en théorie, mais tant qu'on reste dans l'abstrait, cela ne veut rien dire. «Toutes les personnes sont égales en droit», bien sûr, c'est ce que préconise la constitution, mais c'est inutile tant que cela reste un voeu pieux. Il faut donc améliorer cette disposition qui, pour l'instant, édicte un principe dans le vide.
Les personnes transgenres représentent une très petite part de la population, une part toutefois qui concentre un nombre de discriminations vraiment très élevé. On nous dit qu'il y aura toujours de nouvelles discriminations, mais ce n'est pas le cas, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas le cas ! Les personnes discriminées, on les connaît, ce sont toujours les mêmes, ce sont des phénomènes notoires, et c'est d'ailleurs pour cela que nous avons légiféré.
Pourquoi est-il seulement réjouissant et pas suffisant que la lutte contre les discriminations figure dans la loi ? Pourquoi ? Parce que mon préopinant a précisément cherché à abolir cette loi, tout simplement. Inscrire le principe dans la constitution permettrait une protection plus importante, de la même manière qu'on a malheureusement besoin, dans certains pays du monde, de mettre le droit à l'avortement dans la constitution parce que des gens l'attaquent. Et vu comme est partie la législature ici, cela risque d'arriver, cela viendra sans doute. Voilà pourquoi il est indispensable d'ancrer dans notre constitution la protection des personnes transgenres contre la discrimination. (Applaudissements.)
M. Mauro Poggia (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG s'opposera au texte qui vous est proposé, non pas qu'il considère qu'il n'y ait pas de discriminations et encore moins qu'il ne faille pas les poursuivre, mais nous constatons que notre constitution sert d'expression à tous les bons principes, principes que nous pouvons bien sûr chacune et chacun soutenir, mais qui sont déjà couverts par des dispositions générales. Une loi existe à Genève et nous sommes également en train de travailler en commission sur d'autres textes qui touchent ces questions.
Qui oserait aujourd'hui prétendre - comme dans certains pays où d'aucuns, ouvertement, veulent interdire l'avortement - que la discrimination contre les personnes transgenres se justifie ? Personne. Personne ! Par contre, entre le dire et le faire, il y a encore un pas, et il faut que nous puissions agir lorsqu'il y a des déviances de langage et de comportement. Pour cela, l'arsenal législatif dont nous disposons est bien suffisant.
N'utilisons pas notre constitution pour y mettre - et ne le prenez pas de manière péjorative - toutes les émotions de notre société actuelle, des émotions certainement justifiées, fondées sur des actes graves qu'il faut combattre, mais qui ne doivent pas être toutes mentionnées dans une charte fondamentale, faute de quoi celle-ci ne remplirait plus sa fonction première qui est d'énoncer de grands principes. Je vous remercie.
La présidente. Merci bien. Monsieur Yves de Matteis, souhaitez-vous reprendre la parole ? (Remarque.) Alors allez-y, vous disposez encore de trois minutes.
M. Yves de Matteis (Ve), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. J'ajouterai encore deux éléments. D'abord, le projet de loi d'Ensemble à Gauche avait été déposé bien avant les travaux sur ces objets. Le but était de renforcer la protection des personnes transgenres, certainement pas de remettre en cause la loi Fontanet.
Ensuite, quand on a ajouté les critères de l'âge et du sexe - qui, pour l'un d'entre eux, figure aussi dans cette loi -, c'était précisément pour que celle-ci soit vraiment garantie constitutionnellement, qu'il y ait une base solide avec une ligne ininterrompue entre la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Convention européenne des droits de l'homme, la Constitution suisse et notre charte cantonale. A ce propos, je répète que si la constitution genevoise est une liste à la Prévert, alors la Constitution fédérale aussi, puisqu'elle comprend notamment l'âge et le sexe, éléments qui ne sont pas inclus dans la constitution genevoise. Tout cela pour arriver par la suite aux lois et règlements qui en seront déduits.
Il s'agit vraiment d'une suite logique depuis la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui est d'ordre universel, jusqu'aux mesures concrètes du canton. Le fait de ne pas vouloir inclure ces trois critères de discrimination, à mon sens, constitue une erreur. C'était aussi l'avis des constitutionnalistes que nous avons reçus, qui nous ont notamment indiqué que le fait d'ajouter des éléments à cette liste exemplative augmentait la densité normative de notre constitution et permettait d'en renforcer l'esprit même ainsi que la protection de la population genevoise. Il suffit de lire les procès-verbaux de commission pour s'en rendre compte. Voilà, c'est tout ce que j'avais à dire pour l'instant. Merci.
La présidente. Vous n'aurez plus la parole après.
M. Yves de Matteis. Ce n'est pas grave.
Mme Joëlle Fiss (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. J'aimerais juste réagir - vous transmettrez, Madame la présidente - aux propos de M. de Matteis: depuis mars 2023, l'identité de genre est incluse dans la loi sur l'égalité et la lutte contre les discriminations qui a été adoptée par notre parlement. Il n'y a donc pas de problème, cet élément est ancré dans la législation genevoise. Je peux comprendre qu'il y ait eu certaines revendications avant l'adoption de la loi dite Fontanet, mais maintenant, cela ne fait plus aucun sens. Voilà, c'est l'un des points que je me devais de souligner.
Vous transmettrez aussi aux membres du parti socialiste que je regrette qu'ils n'aient pas compris que mon analogie avec les yeux, le tee-shirt ou les cheveux était métaphorique; ils ont vraiment pris cela au premier degré, c'est dommage. Ce que j'essayais de dire, c'est ceci: imaginez qu'une nouvelle forme de discrimination apparaisse tout à coup, par exemple à l'endroit des personnes aux cheveux blonds, yeux verts et portant un tee-shirt bleu: même si cette catégorie de personnes n'est pas explicitement mentionnée dans la constitution, la loi Fontanet les protégerait malgré tout.
Je me répète un peu, mais oui, il est possible que de nouvelles formes de discrimination apparaissent à l'avenir. Vous êtes bien optimistes de penser que la discrimination s'arrête là où on est aujourd'hui, en 2023; il se peut très bien que de nouvelles versions émergent soudain. Je suis assez étonnée par cette vision.
Encore une fois, Mesdames et Messieurs, il s'agit d'une liste exemplative, pas exhaustive. C'est dû au fait que les droits de l'homme sont universels, que tout le monde est concerné, que tout un chacun est égal devant la loi. Voilà pourquoi le PLR vous demande de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Avant de donner la parole à la conseillère d'Etat, je rappelle à tout un chacun de bien insérer son badge. En effet, beaucoup de personnes n'ont pas leur badge, et après l'intervention de la magistrate, il y aura le vote. Madame Nathalie Fontanet, je vous laisse vous exprimer.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députa... les députés, pardon ! (Rires. Commentaires.) Je n'ai pas dit de gros mot, au moins ! Et vu mon état d'énervement, c'est déjà pas mal. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat comprend tant les arguments de la majorité que ceux des minorités, mais nous nous rallions à la majorité tout simplement parce que nous estimons qu'une modification constitutionnelle - et donc une votation populaire sur les seuls ajouts proposés - ne paraît pas très proportionnelle ni opportune politiquement, sans parler des coûts. A notre sens, avec l'adoption de la LED et de la LED-Genre, le projet de loi dont il est question ici n'est plus nécessaire aujourd'hui.
S'agissant des droits des personnes transgenres, l'élargissement de l'article 261bis du code pénal aux discriminations envers celles-ci nous semblerait prioritaire par rapport à une modification de la constitution cantonale. Nous sommes conscients que la liste des discriminations reste lacunaire, mais dans le cadre de la LED et de la LED-Genre, des travaux ont été menés qui ont duré deux ans, chaque terme a fait l'objet d'une négociation; il n'y a pas lieu de revenir maintenant sur le sujet avec une modification constitutionnelle. Au nom du Conseil d'Etat, je vous recommande dès lors de suivre la position de la rapporteure de majorité. Merci.
La présidente. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est le moment de voter.
Mis aux voix, le projet de loi 12377 est rejeté en premier débat par 59 non contre 34 oui et 1 abstention.
Troisième débat
La présidente. Nous passons au PL 12428-A, classé en catégorie II, soixante minutes. Je vous rappelle que nous sommes au troisième débat; nous nous prononcerons uniquement sur le projet dans son ensemble, après avoir voté sur l'amendement de Mme Alimi que vous avez reçu par messagerie. Je précise à ce propos que c'est la version bis de cet amendement qui est pertinente.
La présidente. Je donne la parole à Mme Osmani.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Nous voilà en troisième débat sur un projet de loi qui a fait l'objet de quatre ans de travaux !
La présidente. Si vous tournez votre micro vers vous, on vous entendra mieux !
Mme Xhevrie Osmani. Moi, en tout cas, je m'entendais bien... Le but de ce projet de loi est de donner enfin une base légale à la perception d'une cotisation auprès du personnel soumis à la LPAC afin de financer la perte de gain maladie à l'Etat. Malgré le rapport 119 de la Cour des comptes signalant l'absence de base légale pour la perception, la prime continuait d'être prélevée. Ce projet de loi permet de fixer une prime corrélée aux absences pour maladie tout en maintenant le principe de solidarité.
C'est aussi une réponse aux velléités du département de privatiser cette assurance et de punir celles et ceux qui sont malades en facilitant leur licenciement. La majorité s'est battue pour maintenir un droit au salaire et pour la protection contre le licenciement.
Aujourd'hui, un amendement consensuel, qui est un bon compromis, nous permet de garantir un niveau de prestations important pour les employés de l'Etat en mettant fin au projet de privatisation, puisque cette assurance resterait en mains publiques, avec l'instauration d'une caisse cantonale. Par ailleurs, cet amendement permet pour le personnel un maintien des cotisations aux assurances sociales pendant le versement du traitement la première année, donnant par exemple droit aux pleines indemnités chômage s'il y a possibilité de travailler dans une nouvelle activité après la maladie.
L'amendement garantit également la protection contre le licenciement en cas de maladie pendant les deux premières années et pendant 365 jours si les motifs de résiliation ont été communiqués avant l'incapacité de travail, ce qui permet à l'employeur de repourvoir le poste.
La caisse est aussi un outil permettant l'octroi des indemnités après la fin des rapports de service et une opportunité d'offrir dans le futur une alternative publique, transparente et non lucrative, au-delà des entités soumises à la LPAC.
Les employés en première année obtiennent enfin une couverture digne et comparable à ce qui est pratiqué dans le privé, droits qui justifient une augmentation acceptable de la participation du personnel.
Je vous invite donc à accepter ce projet de loi avec l'amendement. Merci.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Chers collègues, je ne reviendrai pas sur le fond de ce projet de loi, sauf peut-être pour rappeler que le fait d'être assuré par l'employeur en première année d'emploi est un élément sur lequel tout le monde est d'accord et qui n'a jamais été contesté. Les difficultés se situent vraiment à un autre niveau.
Toutefois, ce soir, nous n'en sommes pas là, nous sommes en troisième débat. Nous sommes saisis d'un amendement général, reçu il y a quelques minutes. J'aimerais attirer votre attention sur l'importance que revêt la possibilité d'analyser correctement un tel amendement et ses effets sur la loi. Je rappelle simplement que dans le cadre des travaux sur ce projet de loi, qui, je vous le rappelle, a été déposé en 2019, nous avons déjà eu l'occasion en commission de traiter quatre amendements généraux, notamment la veille du vote en deuxième débat. En effet, le 16 février, nous avons reçu un amendement général et nous n'avons pas eu le temps de le traiter. Le département avait également proposé un amendement général, qui n'a pas été pris en compte. Je le dis, car si nous voulons respecter notre mandat et le «remplir consciencieusement», la moindre des choses que nous puissions faire, c'est d'analyser correctement en commission cet amendement général, qui apparaît effectivement tout à fait prometteur.
Il nous faut entendre l'employeur: ce ne sont pas nous qui sommes employeurs, mais l'Etat. (Remarque.) Nous allons transmettre de nouvelles règles à l'employeur qui est le Conseil d'Etat, raison pour laquelle il faut qu'il ait pu analyser correctement les effets de cet amendement général. Il y a les effets financiers et aussi les effets sur des institutions de droit public majeures, qui nous en ont expliqué l'importance. Je pense à l'IMAD, aux HUG, à l'université, qui a à la fois du personnel académique et du personnel technique; pour le personnel soignant, des situations très particulières d'épuisement ou de violences subies de la part de patients nécessitent la possibilité d'être assuré de manière spécifique. Tous ces éléments doivent vraiment être pris en compte afin que nous soyons sûrs des effets de cet amendement général.
Vous m'avez compris, Mesdames et Messieurs les députés, ce que je vous demande, c'est de renvoyer ce projet de loi en commission. Je m'exprime au nom de mon groupe: nous n'avons évidemment pas eu l'occasion d'étudier ce nouvel amendement en commission. Le groupe PLR s'engage à traiter en priorité et avec célérité ce projet de loi et propose, le moment venu, en tout début d'année, de revenir en plénière une fois les travaux terminés. Je confirme ma demande de renvoi à la commission du personnel de l'Etat. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Merci. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Monsieur le rapporteur de seconde minorité, vous avez la parole sur cette demande.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Il faut accepter le renvoi en commission. En effet, il s'agit de traiter les relations employeur-employé, notamment, comme cela a été dit, avec des entités publiques comme l'IMAD, les HUG et l'université. L'amendement général vient d'arriver, nous n'avons pas eu le temps de l'étudier. (Remarque.) Par conséquent, il convient de renvoyer ce texte à la commission ad hoc sur le personnel de l'Etat. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Je me permets de préciser que la commission en question a changé de nom: il s'agit désormais de la commission sur le personnel de l'Etat. Madame la rapporteure de majorité, vous avez la parole pour vous exprimer sur le renvoi en commission.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Madame la présidente, je refuse le renvoi en commission et invite les députés à en faire de même. Pendant quatre ans, ils n'ont pas eu plus de volonté que cela de voter cette loi. Ce n'est donc pas maintenant qu'ils vont traiter avec célérité cet amendement général. Je vous invite à refuser le renvoi en commission et à procéder au vote sur cet amendement. Merci.
La présidente. Je vous remercie. (Brouhaha.) Nous votons sur le renvoi à la commission sur le personnel de l'Etat.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12428 à la commission sur le personnel de l'Etat est rejeté par 93 non contre 4 oui et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
La présidente. Nous continuons donc le débat et je donne la parole à M. Christo Ivanov, pour qu'il se prononce sur le fond.
M. Christo Ivanov (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Ecoutez, comme cela a été dit par la rapporteure de majorité, les travaux sur ce texte ont duré quatre ans. Comme l'a dit mon préopinant, M. Pierre Conne, il y a eu plusieurs amendements généraux, notamment envoyés en catastrophe le 16 février dernier. Nous avons traité cela lors du deuxième débat. Ce soir, un nouvel amendement général est proposé. Je pense qu'il convient de le refuser et, par conséquent, de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Merci, Madame la présidente.
Une voix. On est déjà au troisième débat !
Mme Masha Alimi (LJS). Le groupe LJS n'est pas favorable à pérenniser le système actuel, qui est obsolète et trop hétérogène entre les nombreuses entités parapubliques et qui fait porter la quasi-totalité de la charge sur les finances publiques en l'inscrivant dans la loi de manière définitive.
D'un autre côté, nous ne sommes pas convaincus qu'une assurance privée contractée par l'Etat soit la meilleure solution, sachant qu'une assurance privée cherchera d'abord à maximiser sa rentabilité et qu'il n'y a aucune garantie que l'intérêt des assurés soit respecté, ni que leurs données soient protégées.
C'est pourquoi nous proposons un amendement général au projet de loi afin d'assurer les membres du personnel du service public en cas d'incapacité de travail pour cause de maladie ou d'accident, dès le premier jour de travail, via une caisse publique qui aurait un fonctionnement similaire à celui d'un organisme d'assurance sur la base d'une cotisation prélevée sur le salaire et fixée à un dixième du taux moyen d'absence maladie des employeurs, entourée de cautèles strictes pour éviter les abus, par exemple avec l'assouplissement des conditions de licenciement pour certains.
Nous vous invitons donc à accepter l'amendement LJS en matière d'assurance perte de gain, qui s'avère un compromis équilibré répondant à la nécessité de protéger les employés tout en préservant les finances publiques et en luttant efficacement contre l'absentéisme. Je vous remercie de votre attention.
M. Sandro Pistis (MCG). Ce soir, on est pris en otages. On est pris en otages par un amendement, déposé par le groupe LJS, qui redéfinirait de manière très fondamentale la prestation des APG. Nous, au sein du MCG, nous ne sommes pas d'accord d'être pris en otages et de voter ce type d'amendement au troisième débat. Pour nous, il est préférable d'avoir le statu quo, car ce dernier préserve les intérêts de celles et ceux qui sont affiliés pour les pertes de gain. Aujourd'hui, on nous prend en otages avec un amendement qui fait plusieurs pages; je voudrais quand même le montrer. (L'orateur montre l'amendement.) Zéro étude en commission ! (Commentaires.) Oui, nous refusons le renvoi, car nous sommes pris en otages: c'est soit on accepte le renvoi et il n'y a pas de majorité, soit nous acceptons ce torchon.
Pour le MCG, il est exclu de mettre en péril la fonction publique ! Il est exclu que l'on soit pris en otages. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne voterons pas cet amendement, qui n'a pas été discuté. Nous sommes des députés sérieux, il est important d'aller jusqu'au bout de notre travail, de ne pas soutenir ce type de torchon et de ne pas nous laisser prendre en otages. Le MCG ne votera donc pas l'amendement et ne votera pas non plus cette loi, vu qu'il n'y a pas de majorité. Le groupe Libertés et Justice sociale a dit clairement qu'il n'était pas d'accord de soutenir ce projet de loi tel que sorti de commission. Soit nous votons le projet de loi tel que sorti de commission, soit nous ne votons rien.
M. Stéphane Florey (UDC). Exactement... Ce qu'a dit M. Pistis est très juste. Très franchement, à ce stade, le projet est mort et enterré. J'aimerais dire au groupe LJS - vous transmettrez, Madame la présidente - que nous savons très bien de qui proviennent ces amendements. Arrêtez de faire comme si vous veniez sauver la république en proposant une solution définitive. Mais arrêtez ! Nous ne sommes pas dupes. Arrêtez de nous prendre pour des imbéciles, Madame Alimi ! (Vifs commentaires.)
La présidente. S'il vous plaît, adressez-vous à la présidence, Monsieur Florey !
M. Stéphane Florey. On sait très bien de qui proviennent ces amendements. Arrêtez de nous inonder...
La présidente. S'il vous plaît, vous vous adressez à la présidence !
M. Stéphane Florey. ...avec ces propositions de dernière minute - vous transmettrez, Madame la présidente. Refusons ce projet de loi, parce que très franchement, ça devient agaçant.
Une voix. Et les amendements !
M. Stéphane Florey. Ce n'est pas sérieux, ce n'est pas la manière qu'a ce parlement de travailler; ça, vous l'apprendrez. Merci. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Ce n'est pas non plus la manière de vous adresser aux collègues du parlement. Monsieur Jacques Jeannerat, vous avez la parole, pour une minute trente.
M. Jacques Jeannerat (LJS). Merci, Madame la présidente. Permettez-moi, Madame la présidente, et je vous prie de transmettre: il y a des mots, «imbécile» et «torchon», que je ne peux pas accepter. Je ne suis pas un imbécile, je suis un élu du peuple - vous transmettrez à M. Florey, s'il vous plaît. (Applaudissements.) S'agissant du torchon dont M. Pistis parle, il l'a depuis une semaine dans sa boîte mail. Nous avons déposé un deuxième amendement dans la matinée où seules quatre virgules ont été changées. Il ne faut donc pas parler de torchon - vous transmettrez, Madame la présidente, à M. Pistis également.
Je trouve que ces termes sont un manque de respect cruel envers les élus du peuple que nous sommes. Je suis choqué par les mots «torchon» et «imbécile». Evidemment, nous sommes un nouveau groupe, un nouveau mouvement, nous avons un conseiller d'Etat qui a une certaine personnalité, que certains trouvent dérangeante. Nous sommes quand même indépendants sur un certain nombre de choses... (Rires.) ...mais je ne peux pas accepter... (Commentaires.) ...je ne peux pas accepter de me faire traiter d'imbécile et qu'un amendement déposé il y a une semaine sur lequel nous n'avons changé que trois virgules soit qualifié de torchon. Merci, Madame la présidente, de transmettre ces propos à mes honorables collègues que j'apprécie beaucoup, les députés Pistis et Florey. (Applaudissements.)
Mme Caroline Renold (S). J'aimerais recentrer l'enjeu de ce débat, puisque la question que nous avons à trancher aujourd'hui, c'est de savoir comment seront traités les salariés du secteur public lorsqu'ils sont malades. Le projet de loi et l'amendement général, qui modifie quelques éléments de ce projet de loi tel que sorti de commission, sont excellents dans le sens de leur protection.
Ce texte comporte trois volets. Le premier est qu'un salarié du secteur public malade ne peut pas être licencié pendant 730 jours. Cela n'est pas le cas actuellement. Le Conseil d'Etat nous l'a dit, notamment dans la justification de son amendement général. Lorsqu'il y a un autre motif de résiliation, il est possible de licencier. Or, là n'est pas la question ! Une personne malade ne doit pas être licenciée pendant sa maladie. L'amendement général déposé par le groupe LJS, qui flexibilise la question, est un compromis tout à fait acceptable pour le parti socialiste, raison pour laquelle nous le voterons. Cet amendement prévoit qu'il est possible de licencier après 365 jours si le motif de licenciement a été communiqué à l'employé avant le début de l'incapacité de travail.
Le deuxième volet de ce projet de loi, c'est que tout salarié du secteur public a droit, en cas de maladie attestée, à 730 jours de revenu, au maximum. (Remarque.) La question, c'est évidemment de savoir comment se concrétise ce revenu. Le Conseil d'Etat souhaitait faire des économies sur le versement des prestations du premier pilier. (Cela revient à économiser sur le financement de l'AVS pour ensuite dire qu'il faut réformer les rentes parce qu'il n'y a pas encore assez de financement...) Le projet de loi proposait deux années de traitement; l'amendement propose quant à lui une année de traitement et une année d'indemnité, ce qui nous semble à nouveau être un compromis acceptable pour les salariés du secteur public.
Le troisième volet concerne le financement. Tout cela part d'une volonté du Conseil d'Etat de faire des économies en concluant une assurance privée. Peut-être que certains pensent que les assurances privées sont de grandes entreprises philanthropes qui offriront un service de qualité à moindre coût. Ce n'est pas mon cas. De deux choses l'une: soit la prime d'assurance sera élevée et l'économie pour l'Etat inexistante, soit le service sera au rabais, au détriment des collaborateurs malades. Pour travailler dans la défense des assurés, je peux vous dire que les assurances privées fonctionnent ainsi: elles coupent les prestations du jour au lendemain, après quelques mois d'arrêt de travail, laissant les travailleurs sur le carreau. Puis elles mandatent un expert, qui leur plaît parce qu'il statue toujours dans leur sens - on se souvient de l'exemple de la clinique Corela - pour démontrer que le travailleur est capable de travailler.
Est-ce là le régime que l'on souhaite offrir aux salariés du service public ? Non ! La conclusion d'une assurance privée est une grave péjoration des droits des fonctionnaires, sans aucun bénéfice financier ! Il faut donc maintenir cette compétence au sein de l'Etat. C'est pour toutes ces raisons que nous vous invitons à adopter ce projet de loi avec l'amendement déposé par Mme Alimi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Louise Trottet (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les bras m'en tombent quand j'entends certains changements de position in extremis dans cette salle - je ne citerai personne. Pourtant, ce projet de loi sur lequel nous votons ce soir est extrêmement important, comme l'a dit ma préopinante, la députée Renold. Ce texte vise à combler une des lacunes dans la protection contre le licenciement, en particulier chez les collaborateurs malades. Il s'agit d'une population spécialement vulnérable dans sa première année d'emploi. A l'heure où les troubles musculosquelettiques, les covids longs et les troubles psychiques connaissent une importante hausse, ces personnes peuvent se retrouver sans rentrées financières du jour au lendemain, avec l'impossibilité de recourir au chômage et avec une assurance-invalidité qui, comme on le sait, peut mettre beaucoup de temps à se mettre en place.
Ce projet de loi est donc extrêmement important pour combler ces lacunes. A titre personnel, je trouve assez navrante la direction que prennent nos débats ce soir - mais je ne m'éterniserai pas. Le groupe Vert votera ce projet de loi, tout comme l'amendement déposé par le groupe Libertés et Justice sociale. Je préciserai que le groupe Vert est extrêmement attaché au respect dans l'enceinte de ce parlement. Merci. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. La parole est à M. Mauro Poggia, pour une minute vingt.
M. Mauro Poggia (MCG). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais simplement faire remarquer que le député de mon groupe qui a parlé de torchon ne parlait pas du document lui-même, mais de la manière dont les choses se sont déroulées. Je pense effectivement que c'est un travail bâclé. On ne peut pas venir en troisième débat avec un amendement aussi élaboré et demander de voter des textes de façon aussi rapide, précipitée, alors qu'il y a des conséquences importantes.
Personnellement, je n'ai pas tout l'historique de ce texte à l'esprit, mais quand je vois qu'on propose même la possibilité de créer une assurance publique qui verserait les indemnités perte de gain maladie et accident, ça me rappelle quelque chose ! On est en train de faire un texte à la gloire d'une idée, idée qui sans doute est mort-née... (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...puisque je ne vois pas qui aurait l'idée aujourd'hui, économiquement parlant, de créer une assurance publique et d'engager des fonctionnaires pour calculer les indemnités de perte de gain pour les fonctionnaires malades ou accidentés, alors que le travail se fait déjà aujourd'hui par les services de l'Etat. Je pense effectivement que ce texte est saugrenu et je n'en vois pas la finalité.
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Mauro Poggia. Pour le reste, j'ai entendu dire qu'on voulait punir les malades; évidemment que ce n'est pas le cas ! Par contre, devoir payer un salaire à quelqu'un à qui on dit: «Maintenant, ça ne va pas» et qui se met en arrêt maladie, cela pose quand même un petit problème.
M. Souheil Sayegh (LC). Cher parlement... (Brouhaha.) ...comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer lors du deuxième débat - je le répète pour les personnes qui n'étaient pas présentes -, ce projet de loi est dangereux, et dangereux à bien des égards. Il est tellement dangereux qu'il n'a trouvé ni la faveur des entités auditionnées, ni celle du Conseil d'Etat dans sa majorité, majorité antérieure, qui n'est pas forcément fondamentalement différente de la majorité actuelle. (Rires. Commentaires. L'orateur rit.) Il est même dangereux pour les personnes qu'on cherche soi-disant à protéger, et aussi pour celles qui n'ont rien demandé et qui font le job. En résumé, ce projet de loi n'a rien de bon, ou plutôt si: il nous a permis de fédérer une alliance autour de son refus. (Remarque.)
Si on voulait nuire à la fonction publique - on parle de celle qui travaille -, on ne pourrait pas mieux s'y prendre. Qui fait le job des absents ? Les présents. Qui va payer la part de l'assurance perte de gain des absents ? Les présents. Et qui va tomber malade ? Du coup, ce sera les présents... qui deviendront absents à leur tour. (Rires. Commentaires.)
Qui va prendre demain le risque d'engager en CDI une personne, sachant qu'au bout d'une semaine, si elle devait tomber malade, l'employeur l'aurait sur le dos pendant deux ans ? Quelle plus grande lourdeur dans les rapports de services ? Comment pourra-t-on demain licencier une personne qui dysfonctionne et qui, par hasard, tomberait malade après qu'on lui aurait signifié ce dysfonctionnement ?
Pour les personnes qui sont nouvelles au sein de ce parlement, je rappelle que nous avons eu l'occasion d'entendre les propos de la vice-rectrice de l'Université de Genève, Mme Galliot, qui nous a expliqué que sur environ dix mille collaborateurs à l'université, certaines personnes étaient sous un régime de droit public, d'autres sous un régime de droit privé. En tout, un tiers du personnel de l'université - un tiers de ces dix mille collaborateurs - a été engagé sous un régime de droit privé. En 2020, ce tiers a consommé pour environ 960 000 francs d'assurance perte de gain. Pour les deux autres tiers des collaborateurs, donc 60%, si on faisait une simple règle de trois, on arriverait à une perte de gain d'environ 3 millions. Eh bien non: l'assurance perte de gain pour les personnes engagées sous un régime de droit public a coûté 10 millions, Mesdames et Messieurs, 10 millions ! Ce n'est donc plus une règle de trois qui s'applique pour arriver à ce résultat. De là à dire qu'il y a une différence de régime et de traitement entre le droit privé et le droit public, c'est un pas que je ne franchirai pas, mais cela explique à quel point ce projet de loi peut être dangereux. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
L'amendement déposé en une heure cet après-midi, et d'ailleurs modifié deux fois, ne peut pas résumer des années de travail en commission. Il s'agit d'une maladresse que nous pardonnerons très facilement. Nous constatons donc que ce projet de loi ne rencontre pas les faveurs de la majorité, mais qu'il est important pour la protection des collaborateurs et collaboratrices. Je sais que le Conseil d'Etat est sensible à cette thématique, et j'imagine facilement que Mme la conseillère d'Etat et ses services nous reviendront prochainement avec un projet de loi qui pourrait satisfaire une majorité de ce parlement.
La présidente. Merci.
M. Souheil Sayegh. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, le groupe Le Centre refusera et l'amendement et le projet de loi. Je vous remercie de m'avoir écouté. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci. Madame Alimi, il n'y a plus de temps de parole pour le groupe LJS.
Une voix. Elle est mise en cause !
La présidente. Son chef de groupe a déjà répondu. Est-ce que les rapporteurs souhaitent s'exprimer ? Monsieur Ivanov ? Monsieur Conne ? (Remarque.) Oui, alors vous avez la parole pour une minute cinquante.
M. Pierre Conne (PLR), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. Pour ne pas allonger les débats, je fais miens les propos de notre dernier préopinant, M. Souheil Sayegh. Je remercie notre préopinant et collègue député M. Mauro Poggia d'avoir souligné que l'amendement que certains essaient de nous faire adopter a simplement pour but de créer une base légale pour une assurance publique; nous ne sommes pas dupes.
Cela étant, je vous invite à refuser l'amendement et à refuser le projet de loi en troisième débat, tel qu'il était sorti de commission. Je vous remercie.
La présidente. Merci. Madame Osmani, pour la majorité, vous avez la parole pour quarante-cinq secondes.
Mme Xhevrie Osmani (S), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Vous voudrez bien transmettre, Madame la présidente, au parti sérieux de cet hémicycle: plus que son sérieux, il nous a montré ce que vaut une parole donnée. Il vient d'ouvrir au Conseil d'Etat le champ des possibilités pour concrétiser ses appels d'offres, dont nous sommes tous au courant. (Remarque.) Si si, on a été mis au courant de cela en commission ! Je ne sais pas combien de temps la fonction publique sera nantie de cette situation, mais voilà ce que j'avais à dire au parti des fonctionnaires et au défenseur des assurés. Je vous invite à accepter cet amendement et le projet de loi. Merci.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite rappeler l'historique. Le Conseil d'Etat était soucieux de revoir le traitement et la protection des personnes engagées à l'Etat depuis moins d'une année et qui se retrouvaient dans une situation extrêmement compliquée en cas de maladie, car pas suffisamment protégées. Dans ce contexte-là, et d'ailleurs avant que je n'arrive au Conseil d'Etat, la volonté d'externaliser une assurance perte de gain, conformément aux recommandations de la Cour des comptes, avait été envisagée comme mesure d'économie.
Puis nous n'avons pas déposé de projet de loi à cet égard; nous sommes venus expliquer en commission de quoi il en retournait. Nous avons très rapidement compris qu'il n'y avait pas de volonté de la majorité de la commission, voire même de l'ensemble du parlement, que l'Etat aille de l'avant avec une externalisation de l'assurance perte de gain.
Dans ce contexte, et avant d'engager des frais, contrairement à ce qui vous a été indiqué il y a quelques instants, le Conseil d'Etat n'a pas lancé d'appel d'offres et n'a pas poursuivi ce projet. En revanche, ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que je m'engage à titre personnel et au nom du Conseil d'Etat à revenir avec un projet de loi qui prenne en compte une meilleure protection des travailleurs et travailleuses, des collaborateurs et collaboratrices de l'Etat, en particulier quand ils sont dans leur première année d'engagement, car ces personnes-là le méritent.
J'aimerais aussi relever que nous devrons trouver des solutions pour avoir une assurance perte de gain créée par l'Etat lui-même, et nous irons dans cette direction, parce que cela est nécessaire pour les collaboratrices et les collaborateurs. Par ailleurs, le projet de loi, aussi bien tel qu'il est sorti de commission qu'avec l'amendement proposé, entraînerait une moins bonne protection de l'ensemble des travailleurs et des travailleuses qui aujourd'hui bénéficient d'une assurance perte de gain maladie et accident surobligatoire. C'est le cas des collaboratrices et collaborateurs des HUG, c'est le cas des collaboratrices et collaborateurs de l'IMAD, dont les employeurs seraient contraints de résilier l'assurance perte de gain, alors que ces personnes-là sont exposées à des dangers particuliers: on le sait pour les médecins avec l'exposition au sang, on le sait aussi pour les collaboratrices et collaborateurs de l'IMAD, mais pas seulement, pour les assistantes en soins également ainsi que pour le personnel hospitalier. Mesdames et Messieurs, avec le projet de loi tel qu'il est sorti de commission, respectivement avec son amendement, tout cela ne serait plus possible, cela figure dans le projet de loi et tout en bas de l'amendement.
J'aimerais aussi rappeler qu'on ne peut pas, sur un sujet tel que celui-ci, en troisième débat, revenir avec un amendement qui demande la création d'une caisse publique pour une assurance perte de gain de collaboratrices et collaborateurs, alors qu'aujourd'hui, c'est justement l'Etat qui tient ce rôle et qui assure cette protection. C'est contradictoire, et penser qu'on peut faire ce vote sur le siège sans l'avoir soumis à des services compétents, même s'ils devaient dire oui - ils pourraient aussi dire non, ou feraient au moins des modifications -, ce n'est pas digne de nos travaux, Mesdames et Messieurs. Je vous encourage à refuser ce projet de loi, à refuser cet amendement et je prends l'engagement devant vous de revenir avec un projet de loi qui pourra remporter une large adhésion. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
La présidente. Merci. Je vous rappelle que nous sommes en troisième débat. Nous votons d'abord sur l'amendement de Mme Alimi, qui est un amendement général, raison pour laquelle je le mets aux voix en une fois.
Mis aux voix, cet amendement général est rejeté par 56 non contre 42 oui.
Mis aux voix, le projet de loi 12428 est rejeté en troisième débat dans son ensemble par 66 non contre 32 oui (vote nominal).
Premier débat
La présidente. Nous passons au point suivant, le PL 12429-A. Le débat se tient en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité de Mme Anne Marie von Arx-Vernon est repris par M. Souheil Sayegh; le rapport de première minorité de M. André Python sera présenté par M. François Baertschi. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! Que ceux qui veulent discuter du précédent point n'hésitent pas à le faire à l'extérieur de manière à ce qu'on puisse continuer nos travaux ! Madame Osmani, ça vous concerne aussi. La parole est au rapporteur de majorité.
M. Souheil Sayegh (LC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Cher parlement, permettez-moi de rendre un hommage à Mme von Arx qui nous a quittés lors de la législature précédente et qui était l'auteur de ce rapport de majorité. Je vais tenter tant bien que mal (vous me le pardonnerez) de rapporter ses propos. Après le débat passionnant que nous avons eu tout à l'heure, on va s'apaiser un peu en parlant de l'âge de la retraite; ça va faire du bien à ce parlement et aux différents bords qui le composent.
La commission ad hoc sur le personnel de l'Etat s'est réunie neuf séances durant, du 5 avril 2019 au 2 février 2020, pour traiter de ce projet de loi. Ce dernier propose simplement une modification de l'article 25 de la LPAC en vue de permettre aux membres de toutes catégories socioprofessionnelles de la fonction publique qui le désirent de prolonger leur activité professionnelle pendant deux ans au-delà de l'âge limite de la retraite, ce de manière facultative. Cet âge limite n'est naturellement pas changé par ce texte.
Que dit actuellement l'article 25 de la LPAC ? Je vous donne lecture de l'alinéa 2: «Afin de conserver la collaboration d'un membre de son personnel difficilement remplaçable à brève échéance, et avec son accord, le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut autoriser, dans des cas exceptionnels, la cessation des rapports de service au-delà de l'âge limite, mais pas au-delà de 67 ans.» Il existe donc déjà une limite à 67 ans, mais cette disposition demeure restrictive. Ce projet de loi vise, lui, à permettre à des personnes de travailler après 65 ans, jusqu'à 67 ans, mais c'est facultatif. Il offre par ailleurs une souplesse supplémentaire, en particulier aux femmes. Autant il est possible pour celles et ceux qui le veulent, et pour de bonnes raisons, de prendre une retraite anticipée, autant il serait juste de permettre à des personnes, si elles le souhaitent, de continuer leur activité professionnelle au-delà des 65 ans officiels.
Ce texte s'inscrit dans le cadre d'une réalité criante: l'allongement de l'espérance de vie et un âge des membres de la fonction publique qui ne fait qu'augmenter. Il s'inscrit également dans la volonté de pallier un manque de personnel qualifié.
A Bâle, le modèle offre plus de souplesse s'agissant de l'âge de 67 ans, puisqu'il donne la possibilité de repousser la fin de l'activité professionnelle à cet âge; cela ne se fait toutefois pas sur dérogation par le biais de mesures exceptionnelles, mais pour les cas pertinents.
Par ailleurs, le projet de loi entraîne des avantages pour les femmes, car il leur permet de cotiser plus d'années au deuxième pilier.
Durant son audition, le directeur de l'OPE, M. Tavernier, nous a appris que ce serait une aubaine pour certaines personnes, mais il rend attentif aux effets de bord, par exemple le risque non maîtrisable lié à la santé, aux cotisations au deuxième pilier ou encore à la probabilité qu'une exception soumise à dérogation devienne une forme de droit acquis et qu'il ne soit plus du bon vouloir de l'autorité de refuser l'âge de 67 ans comme limite.
Lors de son audition, le Cartel intersyndical nous a informés qu'il s'oppose au projet de loi, étant donné qu'il se bat pour une rente-pont avec la CPEG; il ne peut pas soutenir l'idée d'une prolongation de l'âge de la retraite, puisque la majorité des catégories professionnelles que le Cartel défend semble être composée de personnes souffrant de leurs conditions de travail. Le Cartel pourrait entrer en matière sur une augmentation de l'âge de la retraite, mais pour les petits métiers, si on leur permettait de cotiser plus longtemps.
Pendant son audition, la CPEG nous a indiqué qu'elle est en adéquation avec la loi fédérale, car elle peut assurer les collaborateurs de 65 à 70 ans révolus et que la retraite à l'intérieur de cette fourchette n'aurait aucun impact sur le niveau opérationnel de la caisse.
Auditionné, le corps intermédiaire de l'Université de Genève nous a fait savoir que les personnes interrogées sont plutôt en défaveur de ce texte: il pourrait nuire à la relève académique ou retarder l'égalité homme-femme. On a encore appris que si leur activité professionnelle pouvait se prolonger, certains professeurs apporteraient davantage de fonds de recherche grâce à des projets.
Lors de l'audition des HUG, on a appris qu'on vieillit en bonne santé - c'est rassurant ! -, qu'il y a une pénurie du personnel de santé, qu'ils sont ouverts au projet de loi, qu'il y a une relève qui se prépare et qu'il existe des différences entre les métiers présents en leur sein.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Souheil Sayegh. Pendant son audition, l'Université de Genève nous a dit qu'en 2019, l'Association des professeurs de l'Université de Genève a envoyé une enquête électronique à tous ses membres. La première question était: «Seriez-vous en principe intéressé-e à avoir la possibilité de prolonger de deux ans votre activité professionnelle à l'Université, soit au maximum jusqu'à l'âge de 67 ans ?» La deuxième était: «Seriez-vous en pratique intéressé-e à prolonger votre activité professionnelle à l'Université jusqu'à 67 ans ?» 41% des professeurs ont répondu; 69% sont des professeurs ordinaires, 24% des professeurs associés, et la part de réponses de professeures se monte à 23%. 89% ont répondu «oui» à la première question, et 75% à la deuxième.
Enfin, le département a relevé les bons côtés de ce texte quant au vieillissement de la population, à l'allongement de la durée de vie, rappelant qu'il apporte plus de souplesse aux collaborateurs de l'Etat et pas de contrainte.
En résumé, la majorité de la commission vous recommande de voter ce projet de loi, parce qu'il permet d'être en accord avec la CPEG, qu'il permet aux femmes de cotiser plus longtemps, que la population se porte bien jusqu'à un âge avancé, que la disposition qu'il propose est facultative et qu'il cible finalement un faible nombre de personnes. Je vous remercie de votre attention.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité ad interim. Chers collègues, il est actuellement possible pour un collaborateur de l'Etat d'ajourner son départ à la retraite à 67 ans, mais uniquement suite à une décision de son employeur. Ce que demande ce projet de loi, c'est un automatisme, et cet automatisme aurait de graves conséquences: il bloquerait notamment certaines carrières.
Nous avons entendu le corps intermédiaire de l'université. Il était inquiet de voir des professeurs ne pas laisser la place à la relève et de bloquer toute évolution, ce qui, dans un premier temps, semble peut-être pertinent, mais qui, à long terme, a des conséquences très négatives, parce qu'on ne prépare pas la relève. Celle-ci ne doit pas être prévue à partir de 65 ans ou 64, 63, mais bien avant; c'est bien avant qu'il faut préparer l'arrivée de nouveaux talents. C'est une exigence. Voilà pourquoi nous sommes opposés à ce genre de projets de lois, à ce genre de dispositifs qui ont des effets très néfastes, car ils donnent un signal.
Il est vrai que, puisqu'on a parlé du domaine universitaire - mais ça ne s'applique pas uniquement à ce domaine-là, c'était notamment l'exemple cité par l'auteur... (Remarque.) ...l'autrice - pardon, Madame - la regrettée députée Mme von Arx... C'était l'auteur de...
Une voix. Du projet de loi.
M. François Baertschi. Non, du rapport. C'est déjà un peu lointain; je m'excuse, chers collègues, de confondre ces éléments. Le gros problème est le blocage de certaines évolutions à l'intérieur de ces institutions. C'est problématique au niveau universitaire en particulier, il est vrai, mais également dans les autres secteurs de l'Etat, car on arriverait à certains blocages. Cette limite d'âge a néanmoins des mérites dans des carrières très structurées. C'est pour ces raisons en tout cas que le groupe MCG s'est opposé à ce projet de loi. Il s'est opposé non pas à la possibilité de prendre la retraite à 67 ans, mais à l'obligation d'accepter le départ à cet âge. Cela ne nous semblait pas pertinent. Voilà pourquoi nous vous proposons de refuser ce projet de loi. Merci, Madame la présidente.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Tout d'abord, je souligne que ce projet de loi, contrairement à ce qu'on a entendu, s'adresse fondamentalement au milieu universitaire. Il faut dire que la possibilité pour une personne dans le milieu universitaire de travailler au-delà de 65 ans aujourd'hui existe. Elle existe ! Seulement, ce à quoi on assiste là, c'est autre chose: il s'agit de rendre automatique et obligatoire, presque, le départ à la retraite à 67 ans. C'est donc une manière comme une autre d'attaquer l'âge du départ à la retraite.
On a interrogé en commission, fondamentalement, Mesdames et Messieurs, fondamentalement, l'université et les entités qui lui sont liées. La majorité à l'université, tant les étudiants que certaines catégories de chercheurs, s'y est opposée: aujourd'hui, si un chercheur veut poursuivre son activité une année ou deux parce que sa recherche est tellement fondamentale, c'est possible ! Il y a toutefois des conditions, que je peux énoncer.
Tout d'abord, si les personnes arrivant à l'âge de la retraite souhaitent poursuivre leurs recherches parce qu'elles ont encore un certain nombre d'activités, etc., elles peuvent le faire, mais à titre bénévole. En outre, chers collègues, quand on est chercheur ou professeur à l'université, on arrive à 65 ans avec une retraite qui ne s'élève pas à 3500 francs - vous voyez ce que je veux dire; c'est une retraite grâce à laquelle on peut vivre décemment, et peut-être continuer de travailler à l'université «gratos», comme on dit, en faisant un don à la république. Je constate que la majorité ne comprend pas ce qu'est un don à la république. C'est parti, chez eux; il fut peut-être un temps, il y a quarante ans, où le PDC avait encore cette notion, mais aujourd'hui, totalement contaminés par le PLR, vous l'avez perdue, Monsieur. (Rire.)
Je comprends qu'étant chercheur à l'université ou professeur ordinaire, avec des salaires très conséquents, on arrive à 65 ans et qu'on dise: «Ecoutez, je veux encore continuer la recherche pendant deux ans.» C'est actuellement possible, et il n'y a pas besoin de légiférer. Je le répète: il n'y a pas besoin de légiférer.
D'ailleurs, ce que fait cette loi, c'est qu'un certain nombre de chercheurs appelés à prendre des postes et qui attendent la retraite d'un professeur pour occuper sa place devront patienter encore deux ans - peut-être, car d'ici là, on nous aura peut-être présenté un autre projet de loi qui ajoutera deux ans supplémentaires. La politique de la droite de ce parlement vise en effet à ce que le départ à la retraite ne se fasse pas à 65 ans mais puisse se faire jusqu'à l'âge de 75 ans. On verra ça année après année.
Mesdames et Messieurs, cet objet est absolument ridicule, parce qu'aujourd'hui, les possibilités pour les chercheurs de continuer une recherche au-delà de 65 ans existent, en accord avec l'université. Effectivement, ils ne sont pas payés, mais je crois qu'ils ont des retraites beaucoup plus qu'honorables. Ma foi, ça existe ! Je ne vois donc aucune raison de repousser l'âge de la retraite à 67 ans, surtout pour des questions de recherche. Vous savez très bien qu'à partir d'un certain âge, on est quand même un peu moins efficace en matière de recherche que quand on a 40, 50 ans. (Commentaires. Rires.)
La présidente. Je vous remercie. (Remarque.) Monsieur Velasco, vous vouliez continuer ?
M. Alberto Velasco. Non, ça va.
La présidente. Sinon vous pouvez continuer sur votre temps. (Remarque.) Très bien. Monsieur Guy Mettan, vous avez la parole.
M. Guy Mettan (UDC). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'UDC acceptera ce projet de loi et l'amendement proposé. Celui-ci étant plutôt d'ordre, on va dire, sémantique et technique, il ne change pas fondamentalement les choses et ne pose donc pas de problème. Sur le fond, j'avoue que, personnellement - enfin, notre parti trouve très bien cette traduction d'une certaine flexibilité et ne comprend pas les objections amenées par les rapporteurs de minorité. Pourquoi ? Parce qu'il faut se souvenir que dans la tradition universitaire... Je ne me rappelle plus de quand date l'interdiction, je veux dire la cessation des rapports de travail à l'âge de 70 ans, mais en tout cas jusqu'à la fin du siècle dernier, les professeurs pouvaient travailler et enseigner jusqu'à 70 ans ! C'était toujours le cas au sein de l'université jusqu'à ce qu'on change cette manière de faire et qu'on ramène l'âge de la retraite à 65 ans. Donc, en flexibilisant encore un peu le départ à la retraite avec la possibilité de l'ajourner à 67 ans, on ne fait que reprendre une tradition antique de notre université.
Je me souviens de mes professeurs, ou de certains d'entre eux, qui, à l'époque, enseignaient jusqu'à l'âge de 70 ans et non jusqu'à 65 ans. J'ai juste voulu rétablir un petit peu les choses et montrer que ce projet de loi n'accomplit pas une immense révolution, n'introduit pas des éléments extraordinaires, mais s'inscrit au fond dans une continuité qui était la marque de notre université, qui est aussi celle d'autres universités partout ailleurs dans le monde, que ce soit en Amérique du Nord ou en Europe. Il n'y a donc rien d'extraordinaire à cela.
De plus, ça nous paraît bien du point de vue de l'enseignement d'offrir la possibilité de garder ces professeurs, ainsi que l'a dit le rapporteur de majorité, de conserver une certaine excellence et la rémunération qui s'ensuit. De toute façon, la cotisation notamment à l'AVS s'arrête à 65 ans. Il y a déjà des diminutions de ce point de vue là. Pour ces raisons, nous vous conseillons d'accepter ce texte et l'amendement.
Je tiens aussi à souligner que la commission a très bien travaillé, puisqu'elle a consacré pas moins de dix séances à l'examen de ce projet de loi. On ne peut donc pas dire qu'elle a négligé son étude ou qu'elle aurait ignoré des aspects importants. Merci de votre attention.
La présidente. Je vous remercie. J'ai entendu parler de l'amendement de M. de Senarclens, je vous rappelle également l'amendement du Conseil d'Etat, initialement déposé en 2021, que vous avez reçu dans vos documents de début de session. Madame Alimi, vous avez la parole.
Mme Masha Alimi (LJS). Merci, Madame la présidente. Je suis pour un choix libre et flexible de l'âge de la retraite. J'aime bien le mot «libre», car il implique un choix; on laisse aux gens le choix d'aller plus loin, de continuer à travailler. Pourquoi pas ? Alors effectivement, il peut y avoir un inconvénient, à savoir la tentation de prolonger le délai de l'arrivée à la retraite pour des raisons financières au détriment de la santé, mais j'y vois avant tout des avantages, par exemple pour les femmes: elles prolongent une carrière qui a démarré tardivement et compensent ainsi les années durant lesquelles elles ont travaillé partiellement voire pas du tout. Je vois aussi moins d'hésitations à engager des personnes âgées de 50 ans et plus, puisqu'elles auront la possibilité de rester plus longtemps. En outre, il n'y aura pas de surcoûts au niveau du deuxième pilier, car on arrête de cotiser à 65 ans. Pour le personnel de l'Etat, cela signifie une prestation de retraite différée, ce qui lui permettra d'avoir une meilleure rente lorsque la retraite sera effective. Pour toutes ces raisons, nous voterons en faveur de ce projet de loi.
Je profite d'avoir la parole pour ajouter - si vous pouvez le transmettre à certains députés, surtout UDC, Madame la présidente - que j'ai ma personnalité et mes idées, qu'elles m'appartiennent et que je vais toujours jusqu'au bout de mes convictions. Voilà ! Je vous remercie, Madame la présidente.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). En préambule, je souhaite d'abord dire une chose importante: contrairement aux propos du rapporteur de minorité socialiste, ce projet de loi ne concerne pas exclusivement l'université. Il va modifier la LPAC, la loi sur le personnel de l'administration cantonale, et va donc concerner toute l'administration ainsi que l'hôpital, la Haute école spécialisée et l'université. Il s'adresse à une large partie des fonctionnaires. A la différence de ce qu'on a pu entendre, des personnes aiment leur travail, et non seulement l'aiment, mais en plus ont envie de continuer à travailler après 65 ans. Je connais même des personnes dans cet hémicycle qui veulent reprendre un peu du service et devenir président du Grand Conseil à 75 ans ! (Rires.) C'est dire que des gens aiment travailler et ont envie de s'engager au-delà de l'âge de la retraite. Le travail n'est pas qu'une souffrance, il n'est pas qu'annihilant !
En l'occurrence, c'est une possibilité offerte à l'employé - qu'il n'est pas obligé de saisir - de proposer ses services. En outre, ce qui est génial dans ce projet de loi, c'est que le Conseil d'Etat ou l'autorité qui répond de cet employé peut lui refuser cette possibilité; il y a ainsi une énorme flexibilité. Finalement, cela peut être un accord gagnant-gagnant pour tout le monde, avec une flexibilité et des opportunités pour chaque partie. Evidemment, on peut relever la question des femmes, qui ont parfois des carrières hachées: elles peuvent avoir un intérêt à continuer à travailler dans le but de cotiser deux années supplémentaires à leur deuxième pilier. C'est un élément très important.
Il faut aussi garder en vue que nous avons une société vieillissante, qu'une partie des baby-boomers est déjà à la retraite et qu'ils vont y arriver encore plus massivement ces prochaines années. Si nous n'avons pas les employés ici, nous aurons donc besoin d'en importer - je m'adresse au MCG, qui se plaint souvent qu'il y a trop de frontaliers à Genève. En fait, en offrant la possibilité de continuer à travailler deux ans de plus, on va limiter l'arrivée de frontaliers, ce qui devrait être sensible aux bancs du MCG.
Nous avons entendu toutes les entités: l'université, les HUG ainsi que la CPEG. Elles sont globalement toutes favorables à ce projet de loi qui va apporter, je le répète, de la flexibilité et permettre à des personnes de prolonger leur travail si elles le souhaitent. C'est gagnant-gagnant et je vous invite à soutenir ce texte.
J'ai déposé un amendement pour modifier l'article 20 de la LHES-SO-GE, puisqu'il y avait, je dirais, une erreur de plume. Il s'agit d'aligner l'alinéa 4 de cet article sur l'article 13, alinéa 4, de la loi sur l'université, pour avoir un effet miroir. Aucun changement de fond n'est effectué. Le PLR acceptera également les propositions d'amendements déposées par le Conseil d'Etat. Je vous remercie, Madame la présidente.
Mme Caroline Renold (S). Ce projet de loi prétend répondre à deux objectifs: augmenter l'âge de la retraite pour ceux qui en auraient envie et lutter contre une raréfaction du personnel liée à l'arrivée des baby-boomers à l'âge de la retraite. Il rate pourtant totalement sa cible et est néfaste, ce pour plusieurs raisons.
Il est néfaste car, premièrement, il met en danger la relève académique. Il a bien été conçu en premier lieu pour les hauts cadres, les professeurs d'université et les médecins hauts cadres; c'est comme ça que la personne qui l'a déposé l'a formulé. Il est complètement faux de dire qu'il existe un manque de personnel universitaire qualifié; au contraire, les postes sont rares et une relève importante, de qualité, brillante, s'efforce de trouver des postes et fait de la recherche. Vous avez donc, d'une part, un corps intermédiaire - entendu dans le cadre de la commission - qui est précarisé: s'ils veulent rester dans le milieu académique après le doctorat, ces chercheurs doivent enchaîner pendant dix à quinze ans des contrats à durée déterminée, à temps partiel, avec des fonds limités dans le temps. Vous avez de l'autre des professeurs, certes très qualifiés, pour qui le départ à la retraite ne signifie pas quitter la recherche. Au contraire, comme l'expliquait le rapporteur de minorité socialiste, ils peuvent demeurer actifs, continuer à faire de la recherche par d'autres moyens, par exemple avec des titres honorifiques ou en étant associés à des groupes de recherche.
De plus, si on examine réellement ce que les institutions distribuant des fonds de recherche cherchent - pardon pour la répétition -, c'est attribuer des fonds plutôt à de jeunes chercheurs, à des chercheurs qui débutent leur carrière et non à des chercheurs proches de l'âge de la retraite qui ne seront pas là pour accompagner, dans la suite de leur carrière, les doctorants dont ils suivent les thèses. Ce projet de loi prétéritera donc la relève académique, qui souffre déjà de conditions de travail difficiles. En outre, il nuira à l'égalité hommes-femmes, puisque la relève est plus féminine que la vieille garde.
Par ailleurs, soyons clairs, ce projet de loi ne flexibilise pas, mais augmente l'âge de la retraite pour les personnes à hauts revenus qui souhaiteraient partir plus tard à la retraite. En effet, on n'envisage à nul moment une diminution de l'âge de la retraite, notamment pour les métiers pénibles et physiques. La direction des HUG, entendue par la commission, l'appelle de ses voeux.
Il existe un risque de glissement vers une augmentation de l'âge de la retraite, non seulement pour les personnes à hauts revenus mais aussi pour tous les salariés. On en arriverait alors à un système à l'américaine: si vous avez un bas salaire, vous n'aurez jamais de quoi vivre avec votre rente et il vous faudra travailler beaucoup plus tard. C'est du reste ce que propose le rapporteur de majorité aux femmes: si vos prestations à l'âge de la retraite sont inégales, vous n'avez qu'à travailler un petit peu plus, plutôt que de changer le système qui est inégal; il vous est demandé de travailler un peu plus pour cotiser encore un peu.
Ce texte rate complètement sa cible dans la mesure où il ne répond pas à la pénurie de personnel dans les soins, qui est une réalité - c'est d'ailleurs ce qu'ont indiqué les HUG en commission, contrairement à ce qu'a relaté le rapporteur de majorité. Les HUG soulignent que ce projet de loi ne va pas résoudre le «problème structurel de vieillissement de la population, de l'augmentation des besoins en soins et du vieillissement [de leur] propre personnel». Pour toutes ces raisons, le parti socialiste vous invite à refuser ce texte.
Mme Louise Trottet (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit d'un sujet très complexe, aux enjeux multiples. Pour cette raison, le groupe Vert va laisser la liberté de vote. Contrairement à ce qu'on a dit précédemment, ce texte ne propose pas d'automatismes, mais un mécanisme qui serait mutuellement consenti par l'employeur et l'employé pour prolonger, dans des cas bien spécifiques, la durée d'activité de certains collaborateurs.
D'autre part, même si ce projet pouvait avoir des effets vertueux dans les secteurs à la relève déficiente, il pourrait - on l'a entendu juste avant - avoir des effets plutôt pernicieux dans les secteurs où la relève se trouve déjà dans des situations de précarité: je parle du corps intermédiaire à l'université, dont les membres, aujourd'hui, ont des perspectives souvent très incertaines et peinent à stabiliser leur situation alors qu'ils sont à l'âge où, en général, on fonde une famille.
Ce texte est donc un petit peu à double tranchant, raison pour laquelle nous n'avons pas une position entièrement arrêtée. On peut aussi craindre que ce projet de loi crée un précédent en ce qui concerne la généralisation de l'âge de la retraite à 67 ans, on l'a dit; en quelque sorte, c'est un petit peu un pied dans la porte. Les Vertes et les Verts restent très attachés à un maximum de droits et de libertés sur le lieu de travail et, dans le même temps, à la possibilité de choisir d'anticiper ou de repousser le départ à la retraite. Pour ces raisons, nous allons voter en ordre dispersé. Mon collègue de parti, M. Pierre Eckert, va également prendre la parole sur ce point.
La présidente. Je vous remercie. Je donne la parole à M. San... M. Sangdel.
M. Djawed Sangdel (LJS). Merci, Madame la présidente. Effectivement, Sangdel est un nom que l'on n'entend pas souvent.
Chers collègues, dans certains domaines, comme dans le domaine universitaire, dans la recherche, dans certains domaines techniques, il est bien évidemment important d'intégrer les jeunes. C'est très important ! A côté des jeunes, il faut aussi des personnes qui ont de l'expérience pour les former et partager leur expérience avec eux.
Ce projet de loi n'impose pas un âge automatique de la retraite à 67 ans, sinon ce serait vraiment... Certaines personnes n'ont pas envie de travailler jusqu'à 67 ans; cela veut dire que c'est un choix des deux parties. Si quelqu'un souhaite continuer son activité jusqu'à 67 ans mais que l'institution n'en a pas besoin, elle est libre de dire non.
Adopter ce texte signifie que l'on prend aussi en compte la réalité démographique suisse. En effet, selon les statistiques publiées par l'OFS, une grande partie de la population de la Suisse a entre 40 et 69 ans.
Si certaines institutions prévoient des défis à venir, en d'autres termes si dans le futur elles se trouvent en difficulté par manque de personnel bien qualifié, elles auront au moins à leur disposition des personnes qui pourront continuer à travailler et à occuper certains postes qui sans ça seraient vacants. Compte tenu des éléments que ma collègue ainsi que moi-même venons d'expliquer, le groupe LJS vous invite à voter ce projet de loi afin d'éviter des défis en matière de personnel. Je vous remercie beaucoup.
La présidente. Merci bien. La parole revient à M. Pierre Eckert pour deux minutes douze.
M. Pierre Eckert (Ve). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme on l'a dit, la flexibilité de l'âge de la retraite est un sujet qui préoccupe notre groupe, les Verts, au niveau genevois et fédéral depuis quelque temps. Nous sommes en faveur d'un âge flexible de retraite, qu'il soit élevé ou non bien entendu, même si nous avons une préférence pour un âge moins élevé; nous sommes également pour donner la possibilité aux travailleurs dont la profession comporte un certain degré de pénibilité de partir nettement plus tôt à la retraite. (Brouhaha.) Ça va, là-bas ? (Un instant s'écoule.)
Il est tout à fait hors de question que ce projet de loi qui nous est présenté soit une porte d'entrée à une augmentation généralisée de l'âge de la retraite, et je tiens à le dire; en ce qui concerne cette augmentation, j'aimerais bien que, d'une façon ou d'une autre, on fasse preuve d'une certaine bienveillance à l'égard de situations particulières et que l'on donne la possibilité d'un abaissement de l'âge dans des situations qui sont plus pénibles. (Brouhaha.)
La présidente. Excusez-moi, Monsieur Eckert ! Même si je n'ai pas encore sonné pour annoncer le vote, il y a visiblement un afflux massif de députés. C'est très bien, mais si vous pouviez aller et venir en silence, Mesdames et Messieurs, ce serait encore mieux. Y compris du côté de l'UDC, même s'il y a des invités du MCG. (Rires. Commentaires.)
Une voix. Assieds-toi autour d'un verre !
La présidente. Merci ! Si on pouvait continuer le débat... Allez-y, Monsieur Eckert.
M. Pierre Eckert. Une partie du groupe peut comprendre que dans certaines situations, des personnes, universitaires ou d'autres professions (comme on l'a dit, le projet de loi ne concerne pas que des universitaires) désirent poursuivre leur pensum. J'aimerais encore mentionner une façon de prolonger la durée de travail: la question n'est pas que des gens aient envie d'occuper une place de travail (ils peuvent continuer à travailler à temps partiel voire à des temps de travail nuls), mais l'élément intéressant pour eux consiste à pouvoir garder contact avec les personnes de l'université, maintenir le contact par mail, etc. Cette flexibilité doit rester partielle.
En outre, et je tiens à le souligner, il n'y a pas réellement de risques d'une élévation généralisée de l'âge de la retraite: la plupart des membres du personnel de l'Etat ont plus envie de partir à la retraite avant 65 ans qu'après. Mon intervention avait juste pour but de donner une certaine perspective. Le groupe laissera la liberté de vote. (Brouhaha.)
La présidente. Je vous remercie. Je continue à inviter celles et ceux qui discutent à le faire à l'extérieur. Monsieur Pistis, s'il vous plaît ! (Commentaires.) Je cède la parole aux rapporteurs, en commençant par les rapporteurs de minorité. Monsieur Velasco, c'est à vous pour quarante secondes.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Permettez-moi de m'adresser à M. de Senarclens pour lui dire que, lui qui est maçon, il doit comprendre combien c'est dur de travailler jusqu'à 67 ans. N'est-ce pas ? Vous exercez la profession de maçon, n'est-ce pas, Monsieur...
La présidente. Je ne vous le permets pas; si vous pouviez vous adresser à moi, ce serait mieux.
M. Alberto Velasco. Ce projet de loi concerne une élite de l'université qui est bien payée, qui a de très bonnes retraites et qui aimerait continuer de travailler jusqu'à 67, 68, 69 ans, voire - pourquoi pas ? - jusqu'à 70 ans. Toutefois, pour la majorité des personnes, quand elles arrivent à 65 ans, elles ont suffisamment travaillé et s'arrêtent. De plus, il y a toute une génération de jeunes qui vient derrière: elle a besoin d'accéder à ces postes importants de chefs de projet, de chefs de laboratoire.
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Alberto Velasco. Ce projet de loi ne fait qu'empêcher cela. C'est la raison pour laquelle... (Le micro de l'orateur est coupé.)
La présidente. Merci. La parole revient au rapporteur de première minorité. Monsieur Baertschi, vous avez cinq minutes douze.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité ad interim. Merci, Madame la présidente, c'est largement suffisant ! Je vais citer les propos du recteur, propos qui figurent dans le rapport: «[...] arrivés à l'âge de 65 ans, les professeurs sont éligibles au titre de professeur honoraire qui leur donne la possibilité, à titre bénévole, de poursuivre des activités d'enseignement ou des recherches qu'ils accomplissent.» Ce projet de loi part donc d'un faux problème: la possibilité d'accorder une prolongation de manière très large, pour que les talents universitaires puissent continuer à travailler bien au-delà de 65, voire de 67 ans, existe. Limiter à l'âge de 67 ans ce type de fonctions est en effet restrictif. Il faut quand même voir que c'est beaucoup plus large, et cette vision élargie montre que ce texte tel qu'il nous est présenté n'est absolument pas pertinent. C'est pourquoi je vous propose de le refuser.
La présidente. Je vous remercie. Je donne la parole au rapporteur de majorité pour deux minutes quarante-sept.
M. Souheil Sayegh (LC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. J'apporte quelques précisions au rapporteur de première minorité: ce projet comporte une dimension facultative, il n'y a aucune obligation d'accepter le départ à la retraite. Le texte le dit bien: «Un membre du personnel peut, à sa demande, cesser ses rapports de service au-delà de l'âge limite [...]» Cela veut dire qu'il peut continuer son travail jusqu'à 67 ans et cesser ses rapports de service entre 65 et 67 ans, mais à sa demande. «Le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peuvent s'opposer à la cessation des rapports de service au-delà de l'âge limite.» C'est donc vraiment facultatif. Je ne vois pas, à la lecture de cet article, la notion d'une quelconque obligation d'accepter un départ à la retraite à l'âge de 67 ans.
Je ne suis pas convaincu - vous transmettrez au rapporteur de deuxième minorité, Madame la présidente - que toutes les personnes de plus de 65 ans deviennent moins efficientes; je lui laisse la responsabilité de ses paroles eu égard aux membres de ce parlement élu et à celles et ceux qui pourraient prendre part au vote. Une certaine retenue en vertu de l'article 24 pourrait être suggérée. (Rires.)
Une voix. C'est bas !
M. Souheil Sayegh. Enfin s'agissant de la pénurie de personnel ou du travail des jeunes, j'aime bien les jeunes, mais il n'y en a pas beaucoup qui aujourd'hui souhaiteraient travailler à 100%. La notion de travail change: peu ou de moins en moins de personnes ont envie de travailler à 100%, ce que je respecte et, franchement, peux très bien comprendre. On connaîtra toutefois une pénurie de personnel dans les années à venir; on parle de plusieurs centaines de milliers de personnes qui viendraient à manquer sur le marché de l'emploi d'ici une quinzaine d'années, et je ne comprends pas qu'on puisse dire aujourd'hui que ça va gêner ces personnes-là dans l'accès à l'emploi.
En fait, ce projet de loi est plutôt sensé, il permet de dire: ok, on a envie de travailler après 65 ans, on le peut mais jusqu'à 67 ans. Une autorité (le conseil d'administration ou le Conseil d'Etat) est là pour, entre guillemets, «protéger» et faire office de garde-fou, et pourrait elle-même refuser l'accès au travail au-delà de 65 ans.
Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs, la majorité de ce parlement vous recommande d'accepter cet objet avec les amendements déposés. Merci.
La présidente. Je vous remercie. La parole n'étant plus demandée, nous procédons au vote sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12429 est adopté en premier débat par 58 oui contre 34 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1 (souligné).
La présidente. Nous passons à l'article 2 souligné, qui modifie d'autres lois. Nous commençons par l'alinéa 1, qui concerne la loi sur l'instruction publique.
Mis aux voix, l'art. 137, al. 2 (nouvelle teneur), est adopté.
La présidente. A l'alinéa 2, relatif à la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève, nous sommes saisis de deux amendement portant sur l'article 20, alinéa 4. Le plus éloigné est celui de M. de Senarclens. S'il est refusé, je mettrai aux voix l'amendement du Conseil d'Etat; s'il est accepté, l'amendement du Conseil d'Etat tombera.
Monsieur de Senarclens, votre amendement vise à remplacer «autoriser un membre du personnel à» par le simple mot «ou», alors que l'amendement du Conseil d'Etat vise à remplacer «un membre» par «une ou un membre». (Remarque.) Monsieur de Senarclens, vous pouvez prendre la parole quinze secondes pour expliquer rapidement le vôtre.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Merci, Madame la présidente. L'amendement du Conseil d'Etat ne concerne pas l'alinéa 4 mais l'alinéa 5. Dans l'amendement que propose le Conseil d'Etat, le texte de l'alinéa 4 ne fait que reprendre le texte du projet de loi sorti de commission. Pour ma part, je propose d'amender l'alinéa 4: il se trouve que les mots «procéder à un rachat de caisse de pension, autoriser un membre du personnel à dépasser le montant maximum du traitement» ne sont pas très cohérents, je pense que vous l'aurez compris.
La présidente. Je vous remercie. A l'alinéa 4, l'amendement du Conseil d'Etat vise à une pure harmonisation. Le texte du projet de loi contient l'expression «un membre», l'amendement du Conseil d'Etat est ainsi formulé: «une ou un membre». Je suis d'accord sur le fond: il n'y a aucun changement, mais formellement, «une ou un» ou «un» sont deux choses différentes, et juridiquement, c'est un amendement. (Remarque.) Très bien ! Je redis que l'amendement de M. de Senarclens vise à supprimer les mots «autoriser un membre du personnel à». Dès le moment où on les supprime, on n'a plus besoin de se demander si c'est «un membre» ou «une ou un membre»; si cet amendement est accepté, il fera donc tomber celui du Conseil d'Etat. Nous allons reprendre le débat sur les temps de parole. Monsieur François Baertschi, il vous reste quatre minutes, vous pouvez vous exprimer sur ces amendements fondamentaux !
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de première minorité ad interim. Merci, Madame la présidente, je serai très rapide: je demande juste un retour en commission, parce que je n'ai rien compris aux amendements de M. de Senarclens. (Applaudissements. Exclamations.)
La présidente. Je vous remercie. Monsieur le rapporteur de seconde minorité, je vous donne la parole à propos du renvoi en commission.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Madame la présidente. Je suis d'accord avec mon collègue; il faut renvoyer ce rapport en commission, car le débat n'est pas clair.
M. Souheil Sayegh (LC), rapporteur de majorité ad interim. Non, pas de renvoi en commission, Madame la présidente !
La présidente. Je vous remercie. Madame la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet, souhaitez-vous vous exprimer ? (Remarque.) Non, je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12429 à la commission sur le personnel de l'Etat est rejeté par 56 non contre 39 oui et 1 abstention.
La présidente. Madame Osmani, les socialistes n'ont plus de temps de parole. Mesdames et Messieurs, nous allons voter sur les amendements dans l'ordre que j'ai indiqué. Voici celui de M. de Senarclens:
«Art. 20, al. 4 (nouvelle teneur)
4 A titre exceptionnel et avec l'autorisation du Conseil d'Etat, la HES-SO Genève peut, sur dérogation et dans l'intérêt de l'enseignement et de la recherche, procéder à un rachat de caisse de pension ou dépasser le montant maximum du traitement pour la fonction afin de s'assurer ou de conserver la collaboration d'une enseignante éminente ou d'un enseignant éminent.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 51 oui contre 42 non et 4 abstentions.
La présidente. Cet amendement ayant été adopté, celui du Conseil d'Etat portant sur le même alinéa tombe. Nous passons à l'amendement du Conseil d'Etat qui vise à créer un alinéa 5 au même article:
«Art. 20, al. 5 (nouveau)
5 Le règlement interne sur le personnel prévoit que la directrice générale ou le directeur général peut autoriser la cessation des rapports de service d'une ou d'un membre du personnel au-delà de l'âge limite, mais pas au-delà de 67 ans.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 80 oui contre 16 non.
Mis aux voix, l'art. 20, al. 4 (nouvelle teneur) et al. 5 (nouveau), ainsi amendé est adopté.
La présidente. A l'alinéa 3 de l'article 2 souligné, qui concerne la loi sur l'université, nous sommes saisis d'un amendement du Conseil d'Etat:
«Art. 13, al. 4 (nouvelle teneur) et al. 5 (nouveau)
4 Le règlement sur le personnel prévoit que, avec l'autorisation du Conseil d'Etat, l'université peut, sur dérogation et dans l'intérêt de l'enseignement et de la recherche, procéder à un rachat de caisse de pension ou dépasser le montant maximum du traitement pour la fonction afin de s'assurer ou de conserver la collaboration d'une professeure éminente ou d'un professeur éminent.
5 Le règlement interne sur le personnel prévoit que le rectorat peut autoriser la cessation des rapports de service d'une ou d'un membre du personnel au-delà de l'âge limite, mais pas au-delà de 67 ans.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 78 oui contre 18 non.
Mis aux voix, l'art. 13, al. 4 (nouvelle teneur) et al. 5 (nouveau), ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 2 (souligné) est adopté, de même que l'art. 3 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12429 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 38 non et 3 abstentions (vote nominal).
Premier débat
La présidente. Nous passons au PL 12467-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. (Brouhaha.) Comme d'habitude, je prie les personnes qui souhaiteraient discuter du précédent vote de sortir de la salle et j'invite les personnes qui restent dans la salle à écouter les orateurs. Madame Buffet-Desfayes, vous avez la parole.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Pour rappel, le projet de loi qui nous est soumis ce soir avait pour volonté de modifier la loi qui institue une assurance en cas de maternité et d'adoption en faisant passer l'indemnisation de 80% à 100% du gain assuré. Nous avons vu un premier écueil dans ce projet de loi: il devait entrer en vigueur en 2020, mais a été voté en commission en 2022 seulement.
Mais plus que le temps qui a été pris par la commission pour le traiter et pour le voter, ce qui pose problème, c'est avant tout le fait qu'il ne soit pas du tout tenu compte de ce qui s'est passé dans la réalité entre le moment où le projet de loi a été déposé et le moment où il a été voté. Ce qui s'est passé dans la réalité, c'est d'abord le vote sur le congé paternité, et puis - peut-être surtout - le vote sur le congé parental: deux grandes avancées sociales qui sont fondamentales, qui étaient attendues, souhaitées et bienvenues pour les parents et aussi, bien sûr, pour la mère, dont il est question dans ce projet de loi. Pour rappel, le congé parental institue un congé de 24 semaines avec au moins 2 semaines qui peuvent être réparties entre les deux parents.
Ce projet de loi, de l'aveu même de ceux qui l'ont déposé et qui l'ont défendu en commission, porte une volonté de politique nataliste, traduisez «pousser les femmes à faire plus de bébés». Même si on peut partager cette vision de la société, la réalité est que ce n'est pas tellement l'indemnisation qui compte réellement au moment où on décide de faire des enfants, mais ce sont davantage les perspectives professionnelles des femmes qui sont engagées, puisque, comme on le sait, elles doivent souvent interrompre leur carrière pour faire des enfants, les élever et s'en occuper. Puis, il y a un autre problème aussi très important et très souvent discuté dans cette enceinte, celui des possibilités de garde qui sont manquantes et qui doivent toujours être davantage développées.
Ce texte oublie et cache aussi le fait que bon nombre d'entreprises à Genève offrent déjà une indemnisation à hauteur de 100%, fidélisant ainsi leur personnel: proposer quelque chose de supplémentaire qui n'est pas forcément offert ailleurs leur permet d'être compétitives.
«Last but not least», comme on dit en bon français, les coûts d'une telle mesure sont très mal évalués dans ce projet de loi; lors des auditions, un chiffre approximatif a été avancé, mais il ne tient pas compte des différents coûts administratifs qui, pour mettre en place ce projet de loi, seraient aussi mis... en branle. (Rires.) Je n'ai pas trouvé d'autre mot, je suis navrée, mais c'est juste ! (Rires.) Ecoutez, il est 22h40, toutes mes excuses pour ceux qui nous écoutent encore.
En conclusion, ce projet de loi est obsolète et n'offre aucune réponse à la question de la natalité, ni à celle des frais de garde, ni à celle des perspectives professionnelles des femmes, qui sont mises en cause au moment d'avoir des enfants. C'est pour toutes ces raisons que le groupe PLR vous invite à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Léna Strasser (S), rapporteuse de minorité. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le message de la majorité, c'est: «Ne faites pas d'enfants, il n'y a pas assez de places de crèche et on déplace l'âge de la retraite pour combler le manque de personnel à venir.» Pourtant, en permettant d'indemniser à 100% plutôt qu'à 80% le congé de maternité et d'adoption, ce projet de loi comble une faille dans le dispositif d'assurance-maternité ou d'assurance parentale. Il amène un vrai soutien aux familles dans un moment où, avec l'agrandissement du noyau familial, les dépenses ponctuelles et les charges durables augmentent.
Je me permets de rappeler ici que l'indemnité maternité est soumise aux charges sociales usuelles, y compris celles du deuxième pilier. Dès lors, le revenu des familles baisse lorsque la mère ne touche que 80% de son salaire. Quand ? Justement au moment où les charges, elles, augmentent, ce qui est un contresens. La rapporteure de majorité l'a dit, certains employeurs compensent le manque à gagner dans le salaire des femmes durant cette période charnière qui suit l'arrivée d'un enfant; ils ont raison et on aurait aussi bien raison d'aller dans cette direction-là, car malheureusement, tous ne le font pas. De cela résulte une inégalité de traitement. Doit-on vraiment attendre la bonne volonté de toutes les entreprises pour obtenir une amélioration des conditions d'indemnisation des femmes lors des naissances ? La minorité ne le pense pas.
Les études montrent que cette voie n'est pas la bonne à suivre: selon elles, il en résulte un écart entre l'indemnisation des femmes très qualifiées et celle des femmes peu qualifiées. Ce projet de loi vise donc à permettre une égalité de traitement et à soutenir particulièrement les femmes travaillant à temps partiel ou à des postes précaires. Une des auditionnées a relevé en commission: «Les deux tiers des personnes qui gagnent moins de 4000 francs par mois sont des femmes. Le fait d'avoir une réduction de revenu de 20% touche au revenu disponible de ces femmes et de l'ensemble de la famille. La question se pose donc de pouvoir maintenir son revenu durant la maternité.» Maintenir le salaire complet durant le congé maternité est donc in fine un soutien à la famille et une manière de soutenir la parentalité.
Quant au fait que ce projet de loi a un impact financier, oui, c'est le cas: il s'agit d'un investissement qui bénéficiera directement aux familles ainsi qu'aux enfants qui vivent dans notre canton et qui permettra d'améliorer leur situation financière dans un moment clé. Au vu des auditions lors du travail sur cet objet et de la pertinence de ce qu'il propose, la minorité vous recommande de le soutenir. (Applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC). Soutenir les jeunes parents et la natalité est louable et indispensable. Malheureusement, il semble que ce projet de loi prévoyant de maintenir la totalité du revenu durant la maternité aurait un effet très marginal sur la natalité; son efficience n'est de loin pas démontrée. Par contre, cette augmentation de 20% des indemnités pose plusieurs problèmes. Les jeunes parents sont dans des situations multiples: or, bien plus que d'autres, les salariés seraient très fortement assistés. Il y a aussi un coût très conséquent: il est question de 300 à 350 millions par année. Il pourrait aussi y avoir un certain désengagement des entreprises, surtout celles qui, pour fidéliser leurs collaboratrices, versent déjà la totalité du salaire durant le congé maternité.
Il faut rappeler que Genève est déjà, et de très loin, beaucoup plus généreux que l'assurance fédérale. Indépendamment de l'augmentation des taux de cotisation, on est surtout face à un choix de société: certains désirent collecter des fonds à l'aide d'une administration et arroser très largement, indépendamment des besoins et des situations personnelles. Nous, nous défendons la diversité des situations des jeunes parents et défendons surtout leur libre choix. Il faut également que les fonds publics soient engagés avec le maximum d'efficience. Pour ces raisons, je vous recommande de refuser ce projet de loi.
Mme Emilie Fernandez (Ve). Chers collègues, ce projet de loi propose un outil pour mettre fin à une injustice qui creuse l'inégalité entre les hommes et les femmes sous l'angle du revenu. En effet, un réel congé parental généralisé n'étant toujours pas d'actualité, ce sont encore aujourd'hui les femmes qui assument le congé maternité. Or pour ces dernières, l'arrivée d'un enfant signifie également de renoncer pendant cette période à 20% de leur salaire.
Ce projet de loi agit sur l'indemnité et demande de l'augmenter de 80% à 100% par une élévation des cotisations à 0,2% au maximum. Pour notre groupe, ce projet de loi va dans le sens d'une politique progressiste et propose un investissement raisonnable, qui bénéficiera directement aux familles au moment où elles accueillent un enfant et permettra de lutter contre l'inégalité salariale. Les Verts et Vertes vous encouragent donc à le soutenir. Merci. (Applaudissements.)
Mme Véronique Kämpfen (PLR). J'aimerais juste rappeler ici que le congé maternité genevois est déjà plus généreux qu'ailleurs en Suisse. Il comporte deux semaines de plus qu'ailleurs, et le montant des prestations est aussi plus élevé à Genève que dans les autres cantons: il est de 329,60 francs par jour au lieu de 220 francs prévus par le droit fédéral. Selon les calculs du fonds cantonal de compensation de l'assurance-maternité, le coût supplémentaire de ce projet de loi serait d'environ 26,3 millions de francs par année. Par ailleurs, l'augmentation du volume des prestations nécessiterait une augmentation proportionnelle de la réserve légale. Ça, c'est important: la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption prévoit que les avoirs du fonds ne doivent pas être inférieurs au tiers des dépenses annuelles de celui-ci. Un taux de cotisation fixé à 0,16% comme proposé par ce projet de loi ne permettra donc pas la constitution des réserves requises par la loi. Les cotisations employeur-employé seraient donc augmentées d'au moins 0,2%, ce qui est loin d'être neutre dans une période où la pression sur les salaires est déjà forte.
A ces difficultés s'ajoute le fait que les montants des recettes et des dépenses de l'assurance-maternité sont influencés par de multiples facteurs externes comme le niveau des revenus déterminants, le nombre des bénéficiaires, le niveau nominal des salaires, etc. Une variation de l'un ou de l'autre de ces facteurs aurait une influence sur les taux de cotisation, qui pourraient dépasser le taux maximum prévu dans ce projet de loi.
En raison de ces incertitudes administratives manifestes pour les employeurs et pour les employés, et au vu des avancées sociales qui ont vu le jour depuis 2019, dont le fameux congé parental accepté par le biais d'une initiative à Genève, le groupe PLR vous invite à refuser ce texte. Je vous remercie, Madame la présidente.
M. Sylvain Thévoz (S). Mesdames et Messieurs les députés, contrairement à ce que prétend la droite, ce projet de loi est extrêmement simple, extrêmement réaliste et extrêmement équitable en ce sens qu'il vise simplement à maintenir un salaire complet durant le congé maternité. En 2023, après toutes les démonstrations féministes pour l'égalité, après toutes les belles paroles de la droite qui disait que la question féministe n'était ni de droite ni de gauche, qu'elle était là, qu'elle était bien présente, on voit ici un fossé se creuser à nouveau avec une droite qui prétend que c'est compliqué, que ça va évidemment coûter cher. Augmenter de 20% la couverture et le paiement durant le congé maternité semble absolument inatteignable ! Pour le parti socialiste, ce n'est pas le cas: il faut évidemment voter ce projet de loi, parce que ce qui coûte cher, c'est de maintenir cette inégalité.
Pour rappel, la Suisse a investi plusieurs milliards de francs dans l'éducation tertiaire de 56 000 femmes qui se sont retirées du monde du travail après la naissance d'un ou de plusieurs enfants pour se consacrer aux tâches familiales. Ça, c'est une perte de masse salariale - parce qu'on va parler argent - de 1,5 milliard de francs par an, soit une perte de recettes fiscales d'environ 250 millions de francs. Donc ce qui coûte, ce n'est pas cette mesure-là, c'est évidemment de ne rien faire et de continuer, à travers ces inégalités, à faire en sorte que des femmes doivent quitter le monde du travail. Le premier signal, il est là: durant le congé maternité, vous ne touchez plus 100%, mais 80%, et c'est là que s'enclenchent déjà les inégalités dans le couple. Alors ce n'est pas la seule raison, mais c'est une des raisons parmi un certain nombre qui conduisent au fait que les femmes se retirent du monde du travail. Ce n'est pas parce que c'est une seule des raisons et pas toutes les raisons qu'il faut shooter la mesure proposée; il faut la soutenir et soutenir les autres.
Je tiens à rappeler aussi qu'avoir des enfants est un des plus grands facteurs d'entrée dans la précarité, vous le savez, avec le grand âge et le passage à la majorité. Aujourd'hui, avoir des enfants rend précaire et vulnérable. Ce texte propose une mesure sociale, pratique, qui permet de lutter contre cette précarité. Mme Strasser l'a rappelé, les deux tiers des personnes qui touchent moins de 4000 francs sont des femmes. Le refus de ce texte touche encore davantage les plus précaires parmi les précaires en alourdissant encore leurs difficultés. Pour le PS, il faut évidemment soutenir ce projet de loi, il faut bien entendu lutter contre les inégalités de genre. Nous vous invitons chaleureusement à voter cet objet afin de pouvoir amener une petite pierre en plus à l'égalité - c'est ce que nous avons aujourd'hui l'occasion de faire. Merci. (Applaudissements.)
Mme Patricia Bidaux (LC). Si on devait voter pour l'égalité, il s'agirait de s'attacher et de s'atteler de manière créative et vraiment investie au problème de la garde des enfants, parce que c'est vraiment ça qui crée une grande disparité. Je dois dire qu'on parle beaucoup des mères, mais que font les grands-mères quand les mères vont travailler ? Elles s'occupent de leurs petits-enfants, et c'est là que nous avons quelque chose à faire, et à faire manifestement de manière profonde, avec toutes les tentatives qu'a menées Le Centre pour essayer de faire bouger les lignes. Voilà ce qui représente selon moi l'égalité: le fait de permettre à chacun et à chacune de travailler comme elle en a envie, également sur le long terme.
Ce projet de loi a été déposé en 2019. Comme l'a dit la rapporteure de majorité, la population s'est positionnée sur l'IN 184.
L'exposé des motifs démontre qu'il y a des lacunes fédérales, s'agissant d'un congé parental en particulier, comme cela a aussi été relevé. Ce projet de loi ne règle pas ce sujet, et pour cause: c'est au niveau fédéral que l'institution d'un congé parental doit être décidée.
L'initiative acceptée par le peuple genevois, «Pour un congé parental maintenant !», si elle est validée par la Confédération, engendrera un nouveau prélèvement de 3% sur la masse salariale, porté par les employeurs et les employés. Avant de prélever davantage, il est plus que nécessaire d'attendre le retour de la Confédération sur l'IN 184 et sa mise en oeuvre, de façon à ne pas articuler des choses qui deviennent difficilement compatibles à cause des mille-feuilles que nous mettons en place.
L'assurance de 100% du salaire telle que proposée ici demandera un prélèvement supplémentaire de 0,2% à répartir entre les employeurs et les employés de manière paritaire. Les chiffres ont été largement et clairement présentés par Mme la députée Kämpfen, je n'y reviendrai pas.
Il a été fait mention durant les travaux de la commission du fait que ce genre de texte démontrerait une volonté politique de soutenir la natalité dans notre canton, mais pour Le Centre, le vrai problème actuel est à un autre niveau, celui des difficultés que rencontrent les parents pour la garde des enfants, qui, je le répète, est défaillante. Cependant, la seule mesure proposée ici par une partie de ce parlement ne permet pas d'augmenter les places disponibles ! C'est un autre débat, pour lequel Le Centre ne cesse de s'investir.
Revenons au texte qui nous occupe: je le redis et le redirai encore, avant de prélever davantage, il faut mener les calculs jusqu'au bout et tenir compte des frais de gestion et de la réserve obligatoire, une réserve qui, dans sa forme actuelle, permet de prendre en compte les fluctuations des besoins. Avant de prélever, attendons donc ce retour de la Confédération sur l'IN 184. Le Centre refusera l'entrée en matière sur ce projet de loi. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Merci. La parole est à Mme Sophie Demaurex pour une minute dix.
Mme Sophie Demaurex (S). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, la logique qui a prévalu dans le cadre de l'assurance-maternité a été d'appliquer le principe de l'assurance perte de gain à 80%. Est-ce un bon parallèle ? Pourquoi cette période permettant de découvrir et d'élever un futur citoyen doit-elle être sanctionnée par une coupe salariale de 20%, alors que le taux de cotisation paritaire pour le fonds de l'assurance-maternité permettant de couvrir les indemnités cantonales de 5000 naissances genevoises diminue chaque année ? Il serait grand temps de l'élargir à une indemnisation à 100%.
Or qu'en est-il de ce que l'on nomme le congé maternité ? Est-ce un congé payé aux frais de la société, vraiment ? Non, il s'agit d'une période absolument intense, et vu les différents projets de congé parental, nul n'est besoin d'en faire un rappel. En effet, nous n'avons jamais autant parlé d'éducation positive, de repérage précoce, de prévention, de socialisation du jeune enfant et de son développement.
La présidente. Il vous faut conclure.
Mme Sophie Demaurex. Il a été relevé que le fait d'avoir un congé maternité à 100% ne constituerait pas une mesure d'encouragement à la natalité. Peut-être, mais est-ce une raison pour précariser les familles avec une période de revenus diminués ? Je voudrais conclure en disant qu'une baisse du pouvoir d'achat, des assurances-maladie trop élevées, peu d'offre en matière de... (Le micro de l'oratrice est coupé. Applaudissements.)
La présidente. Merci. Il n'y a plus de temps pour la rapporteure de minorité... Ah si, il vous reste une minute trente-cinq. Voulez-vous vous exprimer ? (Remarque.) Non, alors je donne la parole à la rapporteure de majorité pour deux minutes vingt.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente. Nous l'avons vu au travers de ces discussions, il faut faire en sorte de garantir aux femmes des conditions-cadres favorables, larges et diverses tout au long de leur vie et arrêter de tenir un discours si misérabiliste, qui voit l'arrivée d'un enfant uniquement comme une charge financière supplémentaire. Prendre la question de la natalité et celle de l'égalité entre hommes et femmes par le petit bout de la lorgnette n'a vraiment aucun sens, preuve en a été ce débat. La gauche le dit elle-même en réalité, puisqu'elle a déposé un autre texte dont nous discuterons demain, qui reconnaît aussi la question importante du rôle du père dans la parentalité, qui est ici complètement laissé de côté pour ne traiter que du niveau financier.
Il faut donc tenir compte, comme je l'ai dit tout à l'heure, de l'ensemble de la situation, mettre en place le congé parental et voir quels seront ses effets sur la durée.
Je me permets en conclusion de rappeler un simple fait: c'est la même gauche qui aujourd'hui nous fait la morale qui s'est opposée à ce même congé parental. Je réitère donc notre volonté de nous opposer à ce texte, et nous vous invitons à nous suivre. Je vous remercie.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il est clair que ce projet de loi consiste en une mesure concrète en faveur de l'égalité entre hommes et femmes. Toutefois, différents problèmes ont été relevés. En premier lieu, les coûts de cette mesure n'ont pas pu être évalués de façon extrêmement précise. Ensuite, il est quand même douteux que ce projet de loi ait effectivement pour impact de favoriser la vie des familles et la natalité. En troisième lieu, Mesdames et Messieurs les députés, il n'est pas raisonnable d'augmenter encore les charges sociales et les coûts du travail pour nos PME. Je tiens à rappeler que nous avons subi, et les PME également, différentes crises successives. Les PME représentent 90% de notre tissu économique et se sont montrées très opposées à ce texte en raison des charges que la mesure ferait peser sur elles.
Dans ce contexte, et au vu des changements déjà intervenus avec le congé parental et l'initiative acceptée par le peuple, le Conseil d'Etat vous laisse déterminer ce que vous voulez faire avec ce projet de loi... (Rires.) ...mais il est très inquiet pour la situation des entreprises, voilà ! (Exclamations. Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. (Brouhaha.) Un peu d'attention, s'il vous plaît ! Nous votons sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12467 est rejeté en premier débat par 62 non contre 32 oui.
La présidente. Nous reprendrons nos travaux demain à 14h. Il n'y a pas d'extraits, nous commencerons donc directement par le traitement de l'ordre du jour ordinaire. Je vous souhaite un bon retour chez vous.
La séance est levée à 23h.