République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 12907-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le rapport de gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2020

Suite du deuxième débat

Le président. Nous reprenons le traitement du PL 12907-A; nous sommes à l'issue du deuxième débat.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article unique.

Troisième débat

Le président. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. Je souhaite... (Remarque.) Je souhaite simplement répondre à une question qui m'a été posée hier par M. Florey concernant ce qu'avait rapporté la bourse à la CPEG en 2020: la performance globale de la CPEG en 2020 est de 4,2%. Les actions ont rapporté 4,5% avec un résultat de 365 millions et les obligations, 2,4%, pour un résultat de 129 millions. Au total, cela signifie donc que la CPEG a réussi à obtenir à travers la bourse un résultat de 494 millions. Merci.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole est-elle demandée ? (Un instant s'écoule.) Monsieur Jacques Blondin, c'est à vous.

M. Jacques Blondin (PDC). Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, merci, Madame la conseillère d'Etat, de l'information que vous venez de nous donner. Hier, il a été dit que les placements de la fortune privée rapportaient 7,7%. La réalité de la CPEG, c'est trois points en dessous. C'est donc une sacrée différence que nous révèle l'analyse des chiffres - je fais allusion à certains commentaires qui sont faits dans cette salle.

Pour ce qui est du troisième débat, Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, le parti démocrate-chrétien souhaite également s'associer aux remerciements adressés hier en lien avec la crise covid et l'année 2020 qui a effectivement été compliquée. Malgré les résultats du deuxième débat, nous tenons à remercier le Conseil d'Etat pour son engagement, la fonction publique dans son ensemble - cela a été dit, pas seulement le secteur médical et paramédical - et puis toutes celles et tous ceux qui se sont engagés - ce Grand Conseil en fait partie - pour essayer de trouver les meilleures solutions en faveur de la population.

En ce qui concerne le parti démocrate-chrétien, je ne vais pas répéter ce qu'Olivier Cerutti a dit hier lors du premier débat, mais j'aimerais juste rappeler quelques chiffres suite à toutes les explications d'hier. Le budget 2020 prévoyait un déficit de 585 millions et finalement, les comptes se bouclent avec un déficit de 498 millions. Les résultats sont donc meilleurs que ce que prévoyait le budget, il est bon de le rappeler. La crise covid a pris une place prépondérante et imprévue en 2020, a pesé de 378 millions et provoqué des pertes de revenus de 107 millions, ce qui représente au total 485 millions. A la lecture de ces deux chiffres, on pourrait naïvement penser que, finalement, sans le covid, l'exercice 2020 était proche de l'équilibre: 498 millions de déficit moins 485 millions de coûts covid égalent quasiment zéro. Vous vous doutez bien que la réalité est tout autre ! Pour rappel, les effets cumulés des réformes votées en 2019 - RFFA, IN 170, CPEG - et de la crise covid laissaient présager un déficit proche du milliard. Alors par quel tour de passe-passe est-on arrivé à diviser ce déficit par deux ? La réponse vient de la résilience de l'économie et de la fiscalité genevoises - entreprises, personnes physiques et fortune - qui, contrairement à ce que dit la gauche, contribuent largement et généreusement à l'effort demandé. En effet, il y a eu en 2020 une augmentation importante des revenus fiscaux auxquels s'ajoute une part supplémentaire du bénéfice de la BNS pour un montant de 445 millions qu'il ne faut pas oublier. Ces chiffres confirment le constat largement partagé que le canton de Genève souffre d'une crise des dépenses et non pas des recettes, étant bien évidemment entendu que les prestations à la population doivent être délivrées et que le covid a pesé lourd. Le résultat négatif, ne l'oublions pas, est bon à prendre au regard du budget, mais le déficit structurel demeure. Il est donc plus que jamais indispensable de prendre des mesures structurelles pour contenir l'augmentation des charges de fonctionnement de l'Etat. Ce constat est partagé par le Conseil d'Etat. Vous pouvez le lire dans ses conclusions à la page 23 du rapport sur les comptes individuels. Donc, partant du principe que le Conseil d'Etat tiendra ses promesses, le PDC votera ce projet de loi. Merci.

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, évidemment, le parti socialiste aurait beaucoup de griefs à formuler sur la gestion du Conseil d'Etat 2020 - cela a été évoqué par plusieurs de mes collègues lors des débats que nous avons menés hier -, notamment sur la protection insuffisante des travailleuses et des travailleurs qui ont été très fortement affaiblis par les conséquences de cette crise du covid; les dysfonctionnements majeurs à l'OCE; l'absence de soutien pour les locataires; des délais ou des retards parfois absolument inacceptables à l'office cantonal de la population et des migrations; une politique fiscale qui préserve les intérêts des plus fortunés et qui renforce de ce fait les inégalités dans le canton, pour ne citer que quelques-uns de ces griefs.

Mais force est de constater que cette année 2020 est en tous points exceptionnelle. Nous avons vécu une crise sanitaire sans précédent dans l'histoire récente avec bien sûr des conséquences organisationnelles - il a quand même fallu fermer les écoles, renforcer très fortement les capacités de notre hôpital, il a fallu que les services puissent continuer leur travail dans des conditions, encore une fois, absolument sans précédent -, des conséquences économiques, nous le savons toutes et tous, et des conséquences sociales extrêmement graves.

Or en dépit de cette situation inédite, l'Etat a continué à fonctionner, les prestations ont continué à être délivrées, de nouvelles aides ponctuelles - bien qu'insuffisantes dans bien des domaines, comme je le rappelais tout à l'heure - ont pu être mises sur pied très rapidement, l'hôpital a plié mais n'a pas cédé, et d'autres institutions - il y en a énormément, mais je ne citerai que le cas de l'IMAD - ont assuré des tâches nouvelles pour répondre aux nouveaux besoins occasionnés par cette crise et absorber une très forte augmentation des besoins.

Par ailleurs, il est important de souligner que le Conseil d'Etat a dû gérer cette crise avec un budget qui ne lui permettait pas de répondre aux besoins évalués, même avant qu'elle survienne: je rappelle l'épisode du budget 2020, où la droite a très clairement affaibli les services publics et les services de l'Etat par le refus de la quasi-totalité des postes demandés par le Conseil d'Etat et en rognant très fortement sur la ligne 31. Dans ces conditions, on ne peut évidemment pas en faire le reproche au gouvernement. Raison pour laquelle nous accepterons cette année le rapport de gestion. Je vous remercie.

M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Ecoutez, c'est quand même surprenant d'entendre la droite, qui, comme un seul homme, se plaint aujourd'hui d'une crise des dépenses, des charges qui pèseraient trop lourd dans le budget, et j'ai l'impression que, pour beaucoup ici, la crise est déjà oubliée. L'idée qu'une grande partie de la population est menacée de basculer dans la précarité, dans la pauvreté, et ce de manière durable, qu'une grande partie de la population aujourd'hui souffre et va souffrir durablement de la crise est déjà complètement occultée. L'idée qu'il faut que ce parlement trouve l'unité pour faire face à la crise est finalement déjà oubliée. C'est l'unité dont le parlement et le Conseil d'Etat avaient besoin lorsqu'il s'agissait de verser des indemnités aux cadres des entreprises, lorsqu'il s'agissait de verser des indemnités aux patrons de manière générale, une unité qui, de toute façon, a toujours volé en éclats, dès qu'il s'est agi de protéger les salariés, d'aider modestement les locataires, qui sont quand même majoritaires dans ce canton. A chaque fois, cette unité a disparu et puis, aujourd'hui, la priorité, c'est de nouveau de faire des économies.

Mais, Mesdames et Messieurs, il faut bien comprendre que, pour la majorité de la population de ce canton, la crise n'est pas terminée, loin de là ! Elle déploie pleinement ses effets sur le front social et va continuer à le faire demain ! Et encore les années suivantes ! Il est donc urgent, urgent, de mettre en place un plan d'urgence face à la crise sociale ! Et ce plan-là, ce parlement refuse de le mettre en place ! C'est-à-dire que ce que nous avons vu de ces débats, avec des gargarismes de la droite qui nous invite à remercier les plus riches de ce canton, c'est, une fois de plus, un aveuglement total face aux travailleuses et travailleurs, à celles et ceux qui ont été en première ligne, parfois au péril de leur santé, à celles et ceux qui ont perdu leur revenu ou leur travail, qui se retrouvent dans une situation extrêmement difficile ! Et puis, on nous a parlé toute l'après-midi d'hier de remercier le personnel soignant; d'accord, mais comment le remercier ? En baissant les salaires ? Parce que c'est ça, les propositions de ce gouvernement ! En rognant trois années sur quatre les annuités ? Parce que c'est ça, les propositions de ce gouvernement ! En sabrant peut-être dans leur retraite ? Parce que ça aussi, ça fait partie du programme du gouvernement ! En réalité, Mesdames et Messieurs, la plupart des personnes qui nous ont exhortés à remercier le personnel soignant, à remercier celles et ceux qui ont oeuvré contre la crise, nous ont dit, la dernière fois qu'on a débattu d'un geste de remerciement concret: «Ne vous inquiétez pas, ils ont déjà reçu un panier garni !» Voilà où nous en sommes quant au mépris de celles et ceux qui travaillent au quotidien contre la crise, qu'elle soit sanitaire ou sociale, et quant au mépris globalement...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Jean Burgermeister. Je termine, de toute façon. ...des personnes qui ont besoin d'un plan d'aide et en urgence.

Je l'ai dit, il est absurde de sortir de cette crise sans en tirer les conséquences. Elles sont doubles: il y a d'abord une nécessité accrue, vitale, de renforcer massivement les services publics - on pense à la santé en premier lieu évidemment - et aussi d'opérer une transition écologique, ou plutôt une rupture écologique, et non pas une transition, puisqu'elle doit être rapide et profonde. Sans cela, nous sommes appelés à rencontrer rapidement une nouvelle pandémie comme celle que nous connaissons aujourd'hui, parce que la pandémie actuelle n'est pas une surprise, quoi qu'on ait pu dire. Bien sûr, elle a pris tout le monde de court, je ne dis pas que je l'avais prévue, mais de nombreuses voix scientifiques s'étaient élevées depuis des années pour dire que le risque était croissant, et ce risque va continuer à augmenter tant que nous restons dans ce système capitaliste productiviste, qui est prédateur pour l'ensemble du globe et la plupart des êtres humains. C'est pourquoi, évidemment, vous l'aurez sans doute compris, Ensemble à Gauche refusera ce rapport de gestion.

M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de première minorité. Vous aurez compris au débat que l'on a tenu toute la journée d'hier qu'il s'agit ici de découpler, lorsque l'on parle de la gestion du Conseil d'Etat, sa partie ordinaire de sa partie extraordinaire. En ce qui concerne celle-ci, le groupe PLR et la minorité de la commission des finances souhaitent évidemment se joindre à tous ceux qui ont remercié d'abord les services de l'Etat, qui dans cette crise ont certainement surperformé, notamment certains services - on pense évidemment au secteur sanitaire, mais aussi à tous les autres, qui ont continué à offrir des prestations pendant cette période, que ce soit aux entreprises ou à la population, j'y reviendrai d'ailleurs. Merci évidemment aussi aux services du département des finances et notamment à notre conseillère d'Etat Nathalie Fontanet pour toutes les explications qui ont pu être fournies à la commission lors de l'étude de ces comptes et pour la transparence dans toutes les réponses que nous avons pu obtenir.

Je le disais, sur la partie extraordinaire, il n'y a pas grand-chose à dire: elle était justement extraordinaire. On ne peut que remercier le Conseil d'Etat d'avoir fait au mieux avec les moyens qui étaient à disposition et surtout avec des informations qui changeaient au fil du temps. Il a fallu s'adapter. Le Conseil d'Etat l'a fait au mieux. On peut formuler des critiques; seule l'histoire, je le répète, dira ce qui a été fait juste et ce qui a été fait mal, ce qui aurait pu être mieux fait et ce qui aurait pu être moins bien fait.

En ce qui concerne la gestion ordinaire - car on ne peut pas juste l'écarter en se disant: «Ah, l'année a été extraordinaire, on ne se concentre que là-dessus !» -, il est fondamental pour le groupe PLR de rappeler que le problème n'est pas tant l'année 2020. On ne peut pas dire que l'année 2020, pour ce qui est de la gestion ordinaire, était plus catastrophique qu'une autre. Mais c'est l'accumulation de toutes ces années 2020, 2019, 2018, 2017, 2016, 2015, 2014, j'en passe et des meilleures: au fil du temps, personne, ni le Conseil d'Etat - ni celui-ci ni les précédents - ni en particulier la gauche de ce parlement n'a pris conscience de l'évolution de la situation, parce que précisément, les recettes fiscales remplissaient les caisses de l'Etat, n'en déplaise à ceux qui pensent encore que ce n'est pas le cas. Les chiffres sont parlants sur ce point. Je le répète encore une fois, on est passé de 3,5 milliards de recettes fiscales en 1998 à plus de 7 milliards vingt ans après. Cela a été masqué par ces rentrées fiscales massives et on a pu dépenser, dépenser, dépenser, dépenser à tort et à travers. Il se trouve que lorsque les ressources se tarissent, mais que les charges, elles, continuent à croître, il y a un moment où la situation n'est tout simplement plus tenable.

En ce sens, Mesdames et Messieurs, cette crise sanitaire, qui s'est transformée par la suite en crise sociale et économique, doit être un signal d'alarme. Pas le signal d'alarme, parce que cela fait longtemps qu'on en émet, des signaux d'alarme, mais elle doit être «le» signal d'alarme définitif pour nous avertir que ce genre de crise peut ressurgir et que les conséquences de cette crise peuvent également ressurgir. Il s'agit dès lors de mettre en place une politique qui permette d'avoir de côté des moyens à disposition, pour que, si une crise devait revenir, l'on puisse agir et qu'on en ait les moyens sans se dire: «Mon Dieu, les caisses sont vides ! Qu'est-ce que je vais faire ?» Il est vraiment temps, Mesdames et Messieurs, de prendre conscience de cela. J'entends les cris de la gauche qui affirme qu'il faut faire plus, pour ci, pour ça, pour les précarisés. Personne ici ne soutient qu'il n'y a pas de précarisés dans notre canton, que les choses soient bien claires !

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Yvan Zweifel. Mais si on veut aider ces personnes, il faut mettre en place une gestion qui permette de dégager des moyens pour pouvoir tout de suite, en cas de crise, répondre à la situation, et ce n'est en aucun cas ce que vous faites.

La droite de ce parlement, la droite responsable et raisonnable n'en est même pas à demander des économies ! On en est simplement à essayer de limiter la hausse des charges ! Car contrairement à ce que soutient notamment Ensemble à Gauche, qui nous répète sans cesse qu'il y a de l'austérité et des économies, Mesdames et Messieurs, chaque année - chaque année ! -, les charges de l'Etat augmentent et chaque année elles augmentent de manière plus importante que la population. Nous dire ici qu'on a fait des économies, y compris d'ailleurs aux HUG... Allez regarder les comptes des HUG: jamais, aucune année, les charges des HUG n'ont baissé ! Il s'agit de dire la vérité, la vérité chiffrée, qui d'ailleurs est votée - puisqu'on la votera tout à l'heure - chaque année par ce parlement, y compris par la gauche.

Sur le fameux et lancinant débat de la crise des dépenses par opposition à la crise des recettes, nous avons eu cette année l'arbitrage de ce débat: celui neutre et scientifique d'un institut reconnu par tous, l'institut BAK, avec son rapport que vous trouvez, je le rappelle, en annexe de mon rapport de minorité et qui indique clairement que nous nous trouvons dans une crise des dépenses et en aucun cas - en aucun cas ! - dans une crise des recettes. (Commentaires.) Pourtant, Mesdames et Messieurs, malgré ces constats flagrants, eh bien, rien: il ne se passe rien ! C'était le cas avec les anciens conseillers d'Etat, c'est toujours le cas avec le Conseil d'Etat actuel. Pourtant, paradoxalement, dans cette crise, nous avons vu justement l'agilité de l'Etat, les services qui se sont réorganisés, un Conseil d'Etat qui a réorganisé un certain nombre de choses pour répondre à la crise. Il y est parvenu pendant la crise, il devrait pouvoir aussi le faire en situation ordinaire - évidemment pas à flux tendu, comme cela a été le cas dans cette situation extraordinaire, mais on doit pouvoir le faire, puisqu'on a démontré que c'était possible.

C'est parce qu'il n'y a pas de prise de conscience de ce Conseil d'Etat et vraisemblablement de la majorité de ce parlement, et ce n'est pas parce que la gestion 2020 est plus particulièrement catastrophique qu'une autre, mais parce qu'il n'y a toujours pas de prise de conscience après des années, des années, des années et des années, que la majorité... la minorité - pardon ! - responsable et raisonnable de ce parlement vous invite à refuser la gestion 2020. (Applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que cette année 2020 a été particulière; alors même que le budget ne prévoyait évidemment pas... Cette année aurait dû être, entre guillemets, un peu plus «tranquille», mais le covid-19 a tout bouleversé. Il a entraîné un certain nombre de dépenses supplémentaires, s'élevant à plus de 400 millions, qu'heureusement le canton a pu effectuer afin de soutenir nos entreprises. Evidemment, cela a aussi entraîné un certain nombre de hausses au sein des HUG, puisqu'un surplus de plus 15 000 francs par patient covid est assumé par les contribuables genevois, alors qu'il devrait être assuré par les caisses maladie. C'est un pur scandale !

Quand la crise covid est arrivée, ce déficit avait été estimé entre 800 milliards... entre 800 millions - pardon - et 1 milliard; heureusement, il est moindre. Tant mieux ! On s'en réjouit. Cela a aussi été possible grâce à la hausse - j'allais presque dire miraculeuse - des recettes fiscales. Peut-être qu'on a juste réussi du point de vue technique à faire en sorte qu'on soit en dessous de ces 500 millions de déficit; à voir, mais les comptes ont été présentés de cette manière-là, sans compter la contribution de la Banque nationale, qui a été considérable cette année - mais il est quand même juste que la Banque nationale rétribue correctement ses actionnaires, à savoir les cantons.

Bien sûr qu'on pourrait se dire que le canton se retrouve dans une crise des dépenses, mais il y avait un certain nombre de choses qu'il était de toute façon nécessaire d'assumer ! Force est de constater que cela a été possible, et je remercie aussi tous les acteurs qui ont oeuvré dans ce sens: naturellement, le Conseil d'Etat, toutes les directions et le personnel qui ont assumé et délivré les prestations, qui ont fait des efforts surhumains, non seulement dans le secteur sanitaire, mais également dans le secteur économique, pour pouvoir distribuer les aides votées par ce Grand Conseil; ils ont réussi cette mission. Ils et elles ont tous et toutes réussi cette mission. Dans ces conditions, le MCG va approuver les comptes 2020 qui sont à l'image de cet effort collectif. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole va au rapporteur de deuxième minorité, M. Jean Burgermeister, pour une minute cinquante-deux.

M. Jean Burgermeister (EAG), rapporteur de deuxième minorité. Très bien, je serai donc rapide. C'est simplement pour répondre au rapporteur de première minorité, M. Zweifel, qui nous explique que les charges augmentent plus vite que la population. Il prend l'exemple des HUG. J'avais justement donné cet exemple hier, mais je vais le répéter, il devait être en train de ne pas m'écouter - ça peut lui arriver, malheureusement: entre 2015 et 2019, la croissance de la population était de 3,1%. Dans le même temps, le nombre d'hospitalisations a augmenté de 7,9% et le nombre de prises en charge ambulatoires de 12,2%, c'est-à-dire quatre fois plus vite que la croissance de la population ! C'est dû, d'une part, à l'intégration des cliniques de Joli-Mont et Montana... (Remarque.) ...mais surtout au vieillissement de la population et à l'augmentation des maladies chroniques. Voilà un exemple factuel, qu'est celui qu'a pris M. Zweifel tout à l'heure, qui montre que les besoins de la population, précisément pour diverses raisons - également en raison de l'augmentation de la pauvreté et des temps d'étude -, croissent plus rapidement que la population elle-même. Si on applique les recettes du PLR - à savoir: pas d'augmentation des charges supérieure à l'augmentation de la population -, ces dernières années, les HUG n'auraient pas pu répondre aux trois quarts de la hausse des besoins en prise en charge ambulatoire. Voilà ce que signifient, concrètement, les recettes du PLR. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

Par ailleurs, je l'ai dit et je le répète, nous sommes aussi victimes d'un libre-échange qui coûte très cher, puisqu'une grande partie de l'argent dépensé de l'Etat sert à subventionner des loyers qu'on ne peut pas encadrer... (Remarque.) ...à cause du PLR, et des assurances-maladie qu'on ne peut pas revoir à la baisse à cause du PLR. L'ensemble de ce libre-échange...

Le président. Merci.

M. Jean Burgermeister. Je finis, Monsieur le président. ...qui profite à quelques-uns, coûte plus de 600 millions en 2020 à l'Etat de Genève. Cela veut dire qu'avec une couverture d'assurance-maladie...

Le président. Merci.

M. Jean Burgermeister. ...publique, nous n'aurions pas de déficit.

M. André Pfeffer (UDC). Il a été dit et redit que l'exercice 2020 était particulier. Cette gestion était effectivement extraordinaire en raison de la crise, mais il y a aussi cette gestion tout à fait ordinaire. Si on établit une comparaison des comptes 2019 et des comptes 2020, on s'aperçoit que, du point de vue des recettes, le niveau est resté identique. Je répète: en 2019, les recettes étaient de 8,898 milliards et, en 2020, elles ont progressé de 2 millions. Elles sont ainsi passées à 8,99 milliards. En revanche, les dépenses entre ces deux exercices ont énormément augmenté. En 2019, les dépenses courantes étaient de 8,712 milliards et elles sont passées à 9,359 milliards en 2020. Il y a donc eu une augmentation de 647 millions. Evidemment, la partie liée à la crise sanitaire qui s'élève à 378 millions n'est absolument pas contestée et discutée. Cependant, cela a augmenté pratiquement d'autant pour l'exercice ordinaire. C'est cette partie-là que notre groupe n'accepte pas. Comme cela a été dit par le rapporteur de première minorité, c'est une constante, c'est régulier: toujours, année après année, les dépenses de l'Etat augmentent. Par conséquent, nous ne pouvons pas accepter cette partie-là et c'est pour cette raison que le groupe UDC refusera ce rapport de gestion. Merci de votre attention.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Je dois avouer que je n'avais pas prévu de prendre la parole aujourd'hui, parce que, dans le traitement de ces comptes, je pense que les positions de tous les groupes ont été largement explicitées. Mais il se trouve qu'il y a des choses qui ne doivent plus être dites au sein de ce parlement. Aujourd'hui, nous entendons que nous avons jusqu'ici dépensé à tort et à travers. Ah bon ? Ce sont des prestations à la population ! A la population qui se trouve dans une situation fragile, délicate; toutes les prestations votées au sein de ce parlement ont bénéficié directement à la population genevoise. Alors il va falloir m'expliquer où on dépense à tort et à travers !

J'ai aussi entendu des propos sur le rapport BAK. C'est assez drôle, parce que, au sein de ce parlement, depuis que ce rapport est sorti, on l'utilise à tout-va pour essayer de justifier toutes les positions plus ou moins austères qu'on peut tenir ici. Franchement, c'est malhonnête ! (Remarque.) Le département lui-même a pu à maintes reprises nous expliquer qu'une lecture aussi littérale ne pouvait pas être faite et qu'il y a des nuances à apporter à un texte qui est beaucoup plus compliqué que ce que vous essayez de montrer. On nous parle de prise de conscience. De prise de conscience au sein de ce parlement sur le fait que rien ne va, que la gestion ne va pas bien, depuis plusieurs années, que c'est quelque chose qui dure depuis très longtemps... Je ne dis pas que tout va bien dans le fonctionnement de l'Etat, mais en blâmer la gauche, je trouve ça franchement gonflé ! Il faut regarder les majorités de ce parlement: à aucun moment la gauche n'a pu dicter ses politiques, que ce soit au sein de l'exécutif ou au sein du législatif. Donc si effectivement il y a un problème, il faut regarder qui l'a créé !

Je terminerai en relevant qu'en définitive, on a quand même fait mieux que ce qui était prévu: on prévoyait 1 milliard de déficit, on se retrouve avec un peu moins de 500 millions. Pour ce qui est des finances, en général, on peut dire quand même qu'elles sont bonnes: on arrive toujours à obtenir des financements des privés, ce qui signifie que ce gouvernement bénéficie encore d'une certaine crédibilité auprès des institutions privées.

Enfin, je terminerai en disant que 2020 a effectivement été une année particulière, difficile, et pour tout le monde, également pour ce gouvernement, qui a fait de son mieux. Dans un contexte particulier, il ne nous reste qu'à accepter ces comptes, à voter ce rapport de gestion et à attendre le Conseil d'Etat au tournant pour les prochaines années. Merci.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. J'aimerais dire au rapporteur de première minorité, qui se plaint du fait que la gauche serait dépensière, que, comme l'a relevé ma préopinante, la gauche n'était pas majoritaire au Conseil d'Etat en 2020 ! La gauche n'était pas majoritaire au sein de ce Grand Conseil en 2020 ! Par conséquent, s'il y a eu des politiques soi-disant dépensières, il ne peut s'en prendre qu'à son groupe ou à la majorité de droite de ce parlement. Mais il ne peut pas constamment venir fustiger la gauche. La gauche a un principe, c'est celui de la répartition des richesses - ça, c'est vrai. Vous, vous êtes pour que les riches deviennent toujours plus riches... (Commentaires.) ...et nous on veut effectivement qu'il y ait une répartition des richesses.

Par ailleurs, c'est pour une raison très simple, Mesdames et Messieurs: ce qui est important dans notre république, c'est l'avenir des familles, l'avenir des enfants ! Pour cela, on a effectivement besoin de créer des infrastructures, on a besoin de créer des prestations pour que ces enfants aient un avenir. J'aborde ce point parce que la stratégie du PLR a toujours été de dire qu'on ne peut pas changer structurellement le fonctionnement de cette république - que ce soit l'économie ou l'Etat - et que, par conséquent, la meilleure façon de procéder, c'est de fermer le robinet: en fermant le robinet, on aura moins d'argent à dépenser et ce ne sera pas nous, ce sera le peuple qui aura décidé de baisser les impôts. Mais ça, c'était à bon escient. Vous avez fait ça pour ne pas permettre de satisfaire... Et notamment qu'il y ait dix-sept ou dix-huit élèves par classe, par exemple, vous voyez, on ne peut pas le faire ! Parce qu'on n'a pas les moyens de le faire. On l'a constamment dit dans ce parlement.

Cela étant dit, je tiens à relever un élément, c'est que - et ça, c'est à l'attention du Conseil d'Etat - l'avenir est difficile. La société est en train de muter fortement, que ce soit du point de vue de l'emploi ou du temps de travail; les formations vont changer et on ne peut pas dire que l'avenir soit très radieux pour les uns et les autres, et là le Conseil d'Etat doit apporter des solutions ou des propositions.

J'aimerais finir par un élément important. Vous savez, la rue de Carouge à Genève est une rue très populaire et commerçante. Il y a des petits commerces partout. Or ce que je constate, c'est que ces petits commerces, qui créent du lien social - c'est là que les gens vont à la mercerie, à l'herboristerie, au petit bistrot -, sont en train de disparaître, parce que de grandes sociétés, notamment zurichoises, achètent des immeubles et demandent à ces petits commerces de dégager. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Bon nombre de ces commerçants ont investi là leur deuxième pilier et ils ne peuvent même pas laisser le pas de porte pour essayer de se payer une retraite. Ils sont plusieurs dans ce cas, et ça, c'est un problème. On ne peut pas laisser, dans des rues populaires, des rues qui sont très sympathiques pour la population et qui amènent un lien social...

Le président. Merci.

M. Alberto Velasco. ...des entités transformer socialement ces rues, parce qu'elles y achètent un immeuble, qu'elles y installent des commerces haut de gamme et...

Le président. Il faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. Alberto Velasco. Ce n'est pas possible; c'est un élément extrêmement grave qui se passe aujourd'hui à Genève et que le Conseil d'Etat n'a pas pris...

Le président. Merci.

M. Alberto Velasco. ...en compte. Enfin, je terminerai par dire aussi que, vous savez, dans la crise, effectivement...

Le président. C'est terminé, Monsieur le rapporteur. Merci. Pour conclure ce débat, je cède la parole à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je ne peux pas conclure ce débat sans remercier une fois encore l'ensemble des collaborateurs et collaboratrices de la fonction publique. J'aimerais relever que vous avez refusé, Mesdames et Messieurs les députés, la politique publique B, donc la politique publique liée aux ressources humaines transversales et aux collaborateurs et collaboratrices. Pourtant, pendant cette année 2020, ils se sont engagés, ils n'ont pas manqué de travailler, pour certains de façon beaucoup plus - beaucoup, beaucoup plus - intense. Je pense qu'il est quand même important de leur rendre hommage dans le cadre des comptes de cette année 2020.

Je souhaite vous remercier également, Mesdames et Messieurs les députés, parce que vous n'avez pas siégé dans des conditions toujours fabuleuses: les séances de commission se sont déroulées pendant cette année 2020 par vidéoconférence, et pourtant, vous étiez là, au rendez-vous; vous avez voté les projets de lois urgents, vous avez permis au Conseil d'Etat, à notre canton, de faire en sorte que les effets de cette crise soient les moins importants possible.

J'aimerais rappeler un élément par rapport à la dette qui a beaucoup été reprochée au canton de Genève et au gouvernement et vous indiquer qu'au cours des dix dernières années, ce sont 3,5 milliards que le canton de Genève a donnés... (Brouhaha.)

Une voix. Silence !

Mme Nathalie Fontanet. ...dans le cadre de la péréquation entre les cantons et la Confédération. 3,5 milliards, parce que nous sommes un canton riche. Il va de soi que si ces moyens avaient été affectés au remboursement de la dette, elle ne serait pas au même niveau. (Brouhaha.)

Enfin, un dernier point... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Madame la conseillère d'Etat. J'entends des voix du côté du groupe Ensemble à Gauche, et ce n'est pas normal, parce que vos micros ne sont pas activés ! Madame la conseillère d'Etat, vous pouvez poursuivre.

Mme Nathalie Fontanet. Merci. Un dernier point, Mesdames et Messieurs: on a beaucoup parlé de durabilité. Votre parlement, dans sa majorité, est très conscient de cet élément. La durabilité doit également s'appliquer aux finances publiques. Le nerf de la guerre, c'est effectivement l'argent. (Commentaires.) Sans des finances publiques saines et durables, nous ne pourrons pas financer les prestations à la population. Je me réjouis donc que non seulement au sein de notre gouvernement cette question soit aujourd'hui considérée comme essentielle, mais également au sein de votre parlement, parce qu'on ne peut pas parler de durabilité sans s'inquiéter de la durabilité des finances publiques. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous fais voter sur ce projet de loi dans son ensemble.

Mise aux voix, la loi 12907 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 47 oui contre 34 non et 1 abstention.

Loi 12907