République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 mars 2021 à 17h
2e législature - 3e année - 10e session - 59e séance
PL 12307-A et objet(s) lié(s)
Suite du premier débat
Le président. Nous passons au point suivant de l'ordre du jour, à savoir les PL 12307-A, M 2411-C et M 2444-B dont nous avions commencé le traitement lors de la dernière session; les travaux avaient été stoppés après les prises de position des rapporteurs. Je vais faire état des temps de parole restants. Nous sommes en catégorie II, soixante minutes, tous les groupes disposent donc encore de six minutes. En ce qui concerne les rapporteurs, il reste deux minutes deux à M. André Pfeffer, rapporteur de majorité sur les trois objets, une minute dix-huit à M. Romain de Sainte Marie, rapporteur de minorité sur le projet de loi, et deux minutes onze à M. Thomas Wenger, rapporteur de minorité sur les motions. Je donne la parole à M. Guy Mettan pour trois minutes.
M. Guy Mettan (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, je ne vais pas revenir sur les arguments qui plaident en faveur d'un soutien à la presse écrite genevoise, ceux-ci ont déjà été exposés lors de la première partie du débat et vous connaissez tous la situation dramatique dans laquelle se trouvent les médias aujourd'hui; les choses n'ont pas changé depuis le dépôt du projet de loi et des propositions de motions il y a plus de trois ans maintenant. Je vous invite simplement à valider tous ces objets.
La proposition de motion dont je suis l'auteur est plus que jamais d'actualité: il s'agit de prendre des mesures pour assurer un financement non seulement public, mais aussi privé en créant un fonds d'aide public-privé. Finalement, c'est un peu le sens dans lequel va le projet de loi qui vise la création d'une fondation publique, laquelle peut recourir à des ressources privées; c'est une façon de concrétiser le texte.
Histoire de ne pas refaire toute la discussion, je vous encourage à lire attentivement le rapport qui a été rendu. Je tiens d'ailleurs à souligner l'excellent travail effectué par la commission de l'économie, qui a pris la peine de procéder à des auditions détaillées, et je trouve que le rapport restitue très bien l'état actuel de la presse. Alors bon, je ne me fais pas trop d'illusions quant à l'issue du vote, mais pour l'histoire en tout cas, le travail accompli sera retenu.
En ce qui concerne le projet de loi, je présente un amendement consistant à supprimer la mention «sans but lucratif» à l'article 5, lettre a. En effet, l'un des problèmes de la fondation, c'est que ses conditions sont très contraignantes; au fond, si on l'instituait telle quelle, ce serait une fondation ad hoc pour «Le Courrier» ! Nous portons tous une grande estime à ce journal, mais ce serait pratiquement le seul à être concerné par le dispositif. Je propose d'élargir le champ afin d'englober d'autres médias que «Le Courrier», c'est-à-dire de biffer l'indication «sans but lucratif». Cet organe doit promouvoir une diversité médiatique la plus large possible. Résultat des courses, Mesdames et Messieurs: approuvez ces trois propositions. Merci.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, la disparition de quelque dix titres en Suisse romande ces dernières années ne peut pas et ne doit pas nous laisser indifférents, mais nous rendre attentifs aux divers problèmes qui se posent quant à l'évolution de la presse écrite, même si celle-ci a harmonieusement pris le tournant du numérique.
Pour rappel, notre constitution prévoit ceci en son article 28, alinéa 4: «Toute personne a droit à une information suffisante et pluraliste lui permettant de participer pleinement à la vie politique, économique, sociale et culturelle.» De même, l'article 220, alinéa 1, stipule: «L'Etat reconnaît l'importance d'une information diversifiée et encourage la pluralité des médias.»
Sur le plan fédéral, l'aide à la presse écrite prend la forme d'un taux de TVA plus favorable et d'une facturation des frais postaux inférieure à la normale. Les médias audio et audiovisuels, dans la mesure où ils sont au bénéfice d'une concession octroyée par la Confédération, reçoivent une partie de la rétrocession perçue à cet effet. Aucune autre mesure d'aide directe, publique ou privée, n'est cependant prévue tant au niveau national que cantonal en faveur des acteurs médiatiques.
Depuis vingt ans, de nombreux secteurs de l'économie ont dû s'adapter rapidement à de nouvelles réalités, de l'industrie en passant par le domaine bancaire et même l'agriculture. Or la presse, elle, ne s'est guère remise en question et n'a pas suivi le même chemin. D'autre part, on remarque que sous des formes diverses et appropriées, des journaux régionaux, en particulier dans les cantons du Valais et de Fribourg, jouissent toujours de la même audience, en raison notamment du fait qu'ils relaient de façon approfondie et régulière les activités locales, celles qui intéressent leurs lecteurs. A la «Tribune de Genève», une partie de la rédaction a été exportée vers Lausanne, ce qui fait que les journalistes perdent le contact avec une réalité de proximité.
On ne saurait toutefois envisager une aide publique directe pour un journal tel que la «Tribune de Genève», car les actionnaires de Tamedia semblent assez satisfaits des résultats financiers du groupe dans son entier. La fondation prévue par le PL 12307, compte tenu des critères exigés pour l'attribution de fonds - M. Mettan vient de le souligner -, ne financerait finalement que «Le Courrier», dont la ligne rédactionnelle n'est pas forcément neutre politiquement.
Au cours des débats, les Verts ont proposé de rédiger une nouvelle proposition de motion qui tiendrait compte des remarques émises lors des travaux de la commission; il s'agit de la M 2513 qui se trouve actuellement à la commission de l'économie. Sur cette base, le groupe démocrate-chrétien vous appelle à refuser le projet de loi 12307. Je vous remercie.
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, comme cela a été rappelé au cours du débat, ces dernières années, dans le paysage médiatique genevois et romand, on a assisté à la disparition de «La Suisse», à la fusion du «Journal de Genève» et du «Nouveau Quotidien» pour fonder «Le Temps», à la fermeture de «L'Hebdo». A cela s'ajoute la fusion de plusieurs rubriques de la «Tribune de Genève» et de «24 heures», ainsi que la réduction des équipes dans de nombreuses rédactions.
Or voici ce que rappelle la Commission fédérale des médias - je cite: «Dans une démocratie, les médias façonnent de manière décisive la pluralité des informations et des opinions et créent des biens d'intérêt public [...]». La création de biens d'intérêt public nous impose de garantir la diversité médiatique et une couverture des informations locales par la presse.
Il faut savoir que le rôle des médias n'est pas uniquement de transmettre et de diffuser, mais également de produire des informations vérifiées, étayées, analysées, contextualisées, mises en perspective. Ce travail de qualité est essentiel pour comprendre le monde complexe qui nous entoure, les très nombreux enjeux, qu'ils soient politiques, sociaux, économiques, scientifiques, sanitaires, dans toute leur profondeur et dans toutes leurs nuances.
Non seulement la réduction de l'offre médiatique revient à étriquer la pensée collective, mais cela pousse une partie de la population à chercher des informations sur d'autres canaux, par exemple en ligne, des contenus qui, eux, ne sont pas nécessairement vérifiés, analysés ou contextualisés. C'est un terreau très fertile pour les «fake news», les théories farfelues, voire complotistes, que nous avons pu voir émerger ces derniers temps.
D'ailleurs, dans un rapport publié pour répondre à un objet parlementaire, le Conseil fédéral reconnaît le problème: «Vu [...] la diminution des ressources journalistiques des titres en abonnement, il faut se demander si les événements intérieurs et extérieurs importants pourront être suffisamment couverts à l'avenir.» (Brouhaha. L'oratrice s'interrompt.)
Le président. Madame la députée, vous avez terminé ?
Mme Caroline Marti. Non, je n'ai pas terminé, Monsieur le président, j'attends juste que le silence se rétablisse.
Le président. Oui, il y a beaucoup de bruit de votre côté. Mesdames et Messieurs, faites silence pour Mme Marti !
Mme Caroline Marti. Merci beaucoup. Aujourd'hui, force est de constater que le modèle économique de la presse écrite est dans l'impasse. Nous devons formuler des propositions concrètes pour trouver des solutions de financement à ce bien qui, je le répète, est d'intérêt public. Aux yeux des auteurs du projet de loi, il serait dangereux de laisser les médias entre les seules mains d'acteurs privés, des acteurs économiques parfois plus soucieux de leurs profits ou de leur rentabilité que de la production d'une information de qualité.
A ce titre, la situation du paysage médiatique en France est extrêmement illustrative: on voit que plus d'une cinquantaine de médias, que ce soit des chaînes de télévision ou des titres de presse écrite, sont contrôlés par les plus grandes familles et les plus grandes fortunes du pays. Cette mainmise des entreprises du CAC 40 sur les médias est extrêmement préjudiciable pour l'indépendance de la presse vis-à-vis des milieux économiques, vis-à-vis de leurs intérêts.
S'il est indispensable de maintenir l'indépendance de la presse face aux milieux économiques, il est également essentiel d'assurer cette indépendance par rapport à l'Etat pour que les médias puissent continuer à jouer leur rôle et à poser un regard critique sur l'action publique. Alors vous me direz, Mesdames et Messieurs les députés, que ce projet de loi inclut la dotation initiale d'une fondation avec de l'argent public, mais il prévoit aussi, pour garantir l'indépendance de cet organe à l'égard de l'Etat, une composition paritaire de son conseil de fondation, conseil de fondation qui sera ensuite chargé de répartir les aides financières, soit un soutien au fonctionnement pour maintenir des titres existants, soit un encouragement à la création de journaux pour essayer de redynamiser et d'étendre le paysage médiatique de notre pays.
Ce conseil de fondation paritaire sera composé pour un tiers de représentants de l'Etat, choisis par lui pour leurs compétences dans le domaine journalistique, pour un tiers de journalistes élus par leurs pairs, donc par les associations professionnelles, et pour un tiers de représentants du lectorat qui seront tirés au sort parmi des personnes qui se seront portées volontaires.
Mesdames et Messieurs les députés, à chaque disparition de titre, à chaque fusion, à chaque vague de licenciements dans le domaine de la presse écrite ou des médias, on assiste à une avalanche de propositions de motions et de résolutions qui s'indignent, qui condamnent ces décisions. Malheureusement, s'indigner, condamner, cela ne suffit pas, et ce projet de loi apporte une proposition concrète, une proposition crédible pour financer la presse écrite tout en préservant son indépendance. Partant, nous vous remercions de l'adopter. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole va maintenant à M. François Baertschi. (Un instant s'écoule. Commentaires.)
Une voix. François, on t'attend !
Une autre voix. François !
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Quelques-uns de mes collègues étaient un peu dissipés, je vous prie de les excuser ! (Rires.)
Une voix. Ben voyons !
M. François Baertschi. Les deux propositions de motions s'en prennent aux restructurations menées à la «Tribune de Genève» et à l'ATS tandis que le projet de loi demande la création d'une fondation en faveur des médias écrits. Le MCG ne validera pas les deux premiers textes qui sont dépassés et relèvent de la simple posture. Quant au projet de loi, il propose une solution concrète: instituer une fondation. Si, à première vue, l'idée peut paraître convaincante, nous sommes arrivés à la conclusion que ce n'est pas la bonne solution. En effet, les conditions du financement sont très restrictives et lourdes; nous doutons de l'efficacité du dispositif.
Pour le MCG, il faut des médias genevois, mais pas n'importe lesquels, ils doivent avoir une direction à Genève et des employés locaux, pas importés de France voisine. La presse a un rôle essentiel à jouer pour la démocratie, qu'il s'agisse de la vie judiciaire, des nouvelles genevoises, de l'actualité parlementaire, de la vie quotidienne des Genevois. Dans ce contexte, quelle est la mission de l'Etat ? Empêcher que les rédactions genevoises soient détruites par la pression du personnel frontalier - c'est important, je le souligne -, par la pression des Lausannois qui veulent nous chiper notre TV, notre radio, nos journaux - c'est aussi une réalité.
En soutenant de tels propos, il est certain que le MCG dérange, mais ça ne fait rien, nous entendons à tout prix porter ce message. Genève a besoin de médias vraiment indépendants et pluralistes accomplissant un travail utile à tous; Genève a besoin d'une presse écrite forte, et non de titres au rabais consommant à haute dose du personnel frontalier et dirigés depuis l'autre bout du monde ou depuis l'autre bout du lac. La fondation proposée par ce projet de loi ne répond pas à nos attentes, et le MCG votera non. Merci, Monsieur le président.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, le droit à l'information de même que celui à la libre formation de l'opinion sont des droits fondamentaux de la démocratie. Or s'ils sont garantis par la constitution, la réalité infirme souvent l'application de ces principes de base. Nous ne cessons d'être confrontés à un appauvrissement des médias, notamment de la presse d'investigation. Les conditions de travail des employés, tous métiers confondus, se détériorent gravement: la pérennité de leurs postes, le respect de leurs compétences, leur indépendance et la préservation de leurs principes déontologiques sont constamment mis à mal.
Il est troublant de constater que cette situation est désignée comme inéluctable; on relève une sorte d'exhortation faite aux journalistes et aux usagers des médias à s'adapter et à se résigner aux mutations. Or il faut rappeler que ce sont essentiellement des stratégies commerciales et économiques qui ont largement alimenté, voire induit, les changements d'habitudes des lecteurs ainsi que les restructurations qui affectent les médias aujourd'hui. Notre groupe n'entend pas céder à ces appels, il est convaincu de la nécessité de préserver la diversité de l'information ainsi que la pluralité des médias. Comme d'autres ici, il l'affirme: il faut soutenir la presse.
Le projet de loi 12307 nous ouvre une voie; notre groupe vous propose de vous y engager. Certes, la question du financement public tel que visé par le texte provoque régulièrement des levées de boucliers. Mais, une fois de plus, nous reposons la même question: en quoi un financement de la presse par des fonds publics soumis à de strictes garanties d'indépendance serait-il plus dommageable que la concentration de nombreux médias entre les mains de grands groupes privés ? Quelle que soit la complexité de cette question, nous devons l'empoigner sérieusement.
Le projet de loi cherche à soutenir la création de nouveaux titres pour élargir le paysage médiatique de même que la production de contenu rédactionnel. Nous pensons qu'il faut aller de l'avant en suivant cette proposition. Il va de soi que le but de la fondation serait d'encourager la conception de contenu et d'information et non d'enrichir les actionnaires de certains grands groupes de presse. Ce sont là des principes essentiels et c'est pourquoi le groupe Ensemble à Gauche vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter le projet de loi 12307.
En ce qui concerne les rapports sur les motions, même si le temps a passé et que notre rythme de travail ou certaines tactiques de procrastination parlementaire nous ont conduits à rater le coche, notre groupe estime que leur valeur de fond n'a pas varié et qu'il serait condamnable de les enterrer discrètement après avoir joué la montre. Nous n'acceptons pas cette manière peu glorieuse de reléguer des objets dans l'ordre du jour de nos commissions, puis de leur reprocher ensuite de ne plus être d'actualité.
En commission, ces deux textes ne sont pas parvenus à rallier une majorité qui, en revanche, s'est entendue sur la perspective d'une motion de commission sur le financement d'une information citoyenne et locale dans la presse écrite via un contrat de prestations entre l'Etat et les partenaires. Mais ce n'est pas notre propos aujourd'hui. Restant attaché aux constats et aux invites de ces objets quant aux problèmes liés à la «Tribune de Genève» et à l'ATS, le groupe Ensemble à Gauche vous appelle, Mesdames et Messieurs les députés, à les renvoyer au Conseil d'Etat. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, beaucoup de choses ont déjà été dites. J'ajouterai que durant la période chamboulée que nous connaissons depuis une année, de nombreuses fausses informations ont circulé, ce qui démontre notre besoin toujours plus important de disposer de renseignements sûrs et sourcés, dont la provenance peut être déterminée. Il est essentiel de pouvoir se fier aux informations, il est important que le contexte, les incertitudes et les moyens d'action soient décrits de façon à ce que chacune et chacun puisse se forger une opinion éclairée.
A propos de la situation que nous vivons, de la circulation du virus, des mesures à prendre, tout et n'importe quoi a été entendu. Il est dès lors nécessaire que chacun puisse développer un point de vue averti. Un tel travail ne peut être effectué que par des journalistes dûment formés au sein de médias possédant une large liberté rédactionnelle. Que le résultat soit ensuite présenté sur papier ou sur un site internet ne revêt finalement que peu d'importance.
La presse écrite est financée à des degrés plus ou moins élevés par la publicité. Or celle-ci se voit progressivement siphonnée par les GAFA. Vous avez certainement remarqué qu'il devient compliqué de surfer sur le web sans être inondé de diverses publicités relativement ciblées. Si le modèle de financement par le seul lectorat se maintient à flot, comme le prouve l'exemple du «Courrier», il montre également ses limites.
J'aimerais citer un passage du rapport qui me paraît fort intéressant, l'audition de M. Amez-Droz. Celui-ci met en évidence à quel point le recyclage constitue une pratique courante, relevant «que des enquêtes ont été réalisées au niveau mondial et qu'elles ont montré que la presse écrite générait pratiquement 80% des informations mais que 80% des informations consommées étaient recyclées par des réseaux sociaux ou des tierces plateformes qui ne citaient pas leur source. En Suisse, il explique que 80% des news du service public de la radio romande sont du recyclage de contenus produits par les journaux dominicaux alémaniques» - c'est quand même préoccupant ! - «qui ont des moyens rédactionnels. Il termine en déclarant que la réalité romande est vraiment d'une très grande pauvreté en matière de production du contenu.»
Concentration, médias électroniques, captage de la publicité conduisent ainsi à une réduction notable de l'information citoyenne locale, sans bien entendu que de nouvelles options, par exemple les réseaux sociaux, aient pris le relais. En bonne logique libérale, on pourrait se dire que ce modèle d'affaires a vécu, qu'il suffit de laisser s'éteindre les journaux restants et de passer à autre chose. Mais non, nous ne nous résignerons pas à cette extrémité.
Le problème, c'est que les médias qui sont en train de prendre le dessus sont essentiellement des caisses de résonance de rares informations jetées en pâture, lesquelles ne sont souvent même pas vérifiées. A notre sens, il revient aux pouvoirs publics de promouvoir un contenu permettant aux citoyennes et citoyens de ce canton de participer à la vie de la cité ou à tout le moins de se forger une opinion éclairée sur ce qui s'y passe. D'autres pays comme la France ou la Suède ont déjà pris ce chemin, selon des modèles différents.
Pour terminer et pour en venir au projet de loi, celui-ci pourrait aller dans la direction souhaitée, mais les diverses auditions nous ont menés à la conclusion qu'une fondation localisée à Genève ne serait pas la solution idéale. Les Verts favorisent plutôt le principe d'un contrat de prestations qui serait plus général que la fondation et moins coûteux; cela permettrait de financer l'information locale et citoyenne de façon ciblée. A cet effet, cela a déjà été évoqué, la M 2513 «pour soutenir la présence de l'information citoyenne, locale et régionale dans la presse écrite» que nous avons rédigée a reçu une oreille attentive à la commission de l'économie, elle sera prochainement soumise à cette plénière.
En attendant, nous partageons pleinement les préoccupations exprimées dans les trois textes. Nous estimons toutefois que la solution proposée dans le projet de loi n'est pas la meilleure et que les invites des deux propositions de motions sont dépassées. En conséquence, nous nous abstiendrons sur l'ensemble de ces objets. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Emmanuel Deonna pour vingt-cinq secondes.
M. Emmanuel Deonna (S). Oui, merci, Monsieur le président. De très nombreux journalistes ont été licenciés ou contraints à se reconvertir ces derniers mois. Nous avons besoin d'une presse pluraliste, apportant des informations utiles à tous. Comme l'a rappelé Mme Marti, la composition paritaire du conseil de fondation telle que prévue par le projet de loi, avec un tiers de représentants de l'Etat, un tiers de représentants des journalistes et un tiers de représentants du lectorat, garantira un contenu de qualité à nos concitoyennes et concitoyens.
Le président. Je vous remercie. La parole va à M. Guy Mettan pour vingt-cinq secondes également.
M. Guy Mettan (HP). Merci, Monsieur le président. J'aimerais ajouter deux éléments qui n'ont pas été mentionnés pendant le débat. D'une part, le soutien à la presse a fait l'objet d'un vote au Conseil national, donc il s'agit d'une préoccupation commune à l'ensemble de la Suisse. D'autre part, le canton de Vaud a choisi une autre option: son Conseil d'Etat a présenté un projet de loi d'un montant de 6 millions de francs, actuellement en discussion devant le parlement vaudois, projet de loi qui prévoit des aides à la publicité par abonnement, ce qui me semble une bonne idée.
M. Patrick Saudan (HP). J'ai écouté M. Baertschi et je souhaite lui faire remarquer quelque chose tout à fait gentiment - vous transmettrez, Monsieur le président. Ce qu'il nous a fait comprendre implicitement, c'est que pour traiter de thématiques genevoises, il fallait des journalistes genevois. Je n'ai pas pu m'empêcher d'y voir une analogie avec certains courants de pensée actuels où on soutient que pour traduire un poète noir, il faut être un auteur noir, que pour évoquer telle ou telle problématique, il faut provenir de la même région ou être issu de la même population. Pour ma part, je trouve que des éclairages de l'extérieur, comme il y en a dans «Le Courrier international», par exemple, rendent la presse vraiment intéressante.
Par ailleurs, je partage complètement l'avis de mon préopinant M. Eckert: les médias se trouvent dans une situation dramatique, mais le projet de loi 12307 ne constitue malheureusement pas le meilleur instrument pour y remédier. Je me réjouis d'apporter ma voix à la proposition de motion des Verts en faveur de contrats de prestations pour soutenir la presse locale. Voilà, je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur. La parole revient à M. François Baertschi pour trois minutes et des poussières.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. J'aimerais réagir à ce que vient d'indiquer le député Saudan - vous transmettrez, Monsieur le président. Pour lui, c'est certain, il s'agit d'une question de principe. Quant à moi, j'ai une question plus élémentaire à poser. A Genève, on a tendance - c'est malheureusement ce qui se fait dans plusieurs médias - à éconduire les Genevois. Un média audiovisuel en particulier exclut systématiquement de ses rangs des journalistes et animateurs genevois ou ayant leurs racines à Genève - ils peuvent venir de tous les horizons, avoir toutes les nationalités - pour privilégier des gens hors sol. Cet acteur audiovisuel - ou plutôt audio, devrais-je dire - se livre invariablement à ce type de pratique, et ce n'est pas acceptable, on ne peut pas avoir des médias locaux sans aucune trace de personnel local, c'est complètement absurde !
C'est précisément l'erreur qui avait été faite avec le dernier rédacteur en chef de «La Suisse», dans les années 90 - fin des années 80, début des années 90 -, rédacteur en chef qu'on était allé chercher à Paris ! On était à plat ventre devant ce rédacteur adjoint - des rédacteurs adjoints, il doit y en avoir quinze ou vingt dans un journal comme «Le Point», autant dire qu'il s'agit presque de subalternes - qu'on a attiré à Genève et qu'on a traité comme un dieu, qui a commencé à licencier des employés, notamment une vieille journaliste genevoise, pour ensuite engager n'importe comment. Ce genre de politique rédactionnelle où on opère une véritable épuration des employés locaux, c'est ce qui s'est pratiqué dans de nombreux médias, c'est ce qui continue à se pratiquer aujourd'hui.
Je n'ai rien contre nos amis lausannois, j'ai même travaillé à Lausanne pendant un moment. Nous devons vivre en bonne entente, mais nous ne pouvons pas nous laisser phagocyter naïvement. Promouvoir l'identité genevoise n'a rien de réactionnaire, c'est plutôt une attitude progressiste visant l'expression d'une personnalité collective. Si on n'est pas à même de le faire dans le domaine des médias, c'est une dégradation générale de la société qui nous attend, j'ai le regret de le dire, on se retrouvera dans un champ de ruines à cause de ces pratiques. Dans ce contexte, je dois reconnaître qu'un titre sort du lot, ses journalistes résistent face à la situation: il s'agit du «Courrier». Même si je n'adhère pas à la ligne politique de ce journal, il faut admettre qu'il accomplit un excellent travail, et je lui tire mon chapeau. Merci, Monsieur le président.
M. Jacques Blondin (PDC). Le PDC est bien évidemment conscient de la situation délicate, voire absolument catastrophique, dans laquelle se trouve la presse écrite ainsi que de la place incommensurable que les GAFA sont en train de prendre. Le fait que nous votions non aujourd'hui ne représente en aucun cas un signe de désintérêt de notre part face à ces trois objets.
Il se trouve que le projet de loi visant la création d'une fondation genevoise pour la presse est jugé compliqué et ne constitue de loin pas la meilleure solution pour maintenir l'indépendance des médias - cela a été suffisamment commenté. Quant aux motions, lorsque l'on constate qu'on évoque les prestations de l'ATS aujourd'hui, on se dit simplement qu'on travaille trop lentement et que ces textes auraient dû être traités beaucoup plus vite.
Il a été question de la proposition de motion 2513 dont nous ne parlerons pas ce soir, mais le PDC s'y est associé et c'est par ce biais que nous reviendrons sur le thème des médias écrits - je suis un peu en avance sur l'ordre du jour d'une prochaine session. A ce propos, nous regrettons qu'une motion de commission n'ait pas été rédigée, car la majorité des partis se sont entendus autour d'un contrat de prestations pour aider la presse genevoise et nous sommes tous conscients que des montants conséquents seront nécessaires. Merci, Monsieur le président.
M. Jacques Béné (PLR). La presse écrite, ce n'est pas du tout mon domaine d'activité, mais quand j'entends certains propos ce soir... J'ai aussi participé au débat sur le sujet à la commission de l'économie, et si on peut effectivement être d'accord quant au droit à l'information, de quelle information parle-t-on exactement ? C'est quoi, une information juste ? J'aimerais bien qu'on nous en donne une définition précise.
Il n'y a jamais eu autant de contenus qu'aujourd'hui, que ce soit à la télévision, à la radio, sur les réseaux sociaux. Ce qui se passe, c'est que le public a besoin d'une information ciblée, à la demande. Nous sommes cent dans cette assemblée, Mesdames et Messieurs, et je pense que nous avons tous un avis sur les médias, sur ce qui y a été relaté pendant la campagne pour le Conseil d'Etat qui se termine dimanche; c'est quoi, l'information juste qui a été donnée durant cette campagne pour le Conseil d'Etat ? Au fond, ce qu'on veut dans ce parlement, c'est une information politisée. Mais dans quel sens la veut-on politisée ? M. Baertschi citait tout à l'heure «Le Courrier», indiquant qu'il s'agit du seul média écrit restant à diffuser des informations justes; je souhaiterais savoir quels sont les critères de définition d'une information juste.
Le problème a été soulevé en commission, Mesdames et Messieurs, notamment par M. Besençon qui est membre de la Commission fédérale des médias, ce qui n'est d'ailleurs pas du tout consigné dans le rapport de M. Romain de Sainte Marie qui se borne à répéter les propos tenus par des auditionnés qui, à mon avis, vivent dans le passé et n'ont pas encore compris qu'une transition numérique est en train de s'opérer. Le problème, donc, c'est que le journalisme ne finance plus le journalisme, voilà la réalité.
Bien sûr que nous devons préserver l'offre médiatique, mais faut-il soutenir les médias pour les journalistes ou bien faut-il soutenir le journalisme ? S'il s'agit d'aider les journalistes, alors déposons un projet de loi comme celui qu'on traitera demain en faveur des brasseurs, un projet de loi qui vient précisément à la rescousse des journalistes, mais ne parlons pas de subventionner les médias s'il est question des journalistes. De nos jours, on le sait, Mesdames et Messieurs, ça coûte beaucoup moins cher d'acheter du contenu que d'engager des rédacteurs. La Confédération l'a bien compris, puisqu'elle planche actuellement sur des modifications de la Constitution. Il faut laisser ce domaine à la Confédération, parce que plus il y a de distance entre le contenu et celui qui le finance, plus on a de garanties que l'information ne sera pas politisée.
La fondation que vous proposez, Mesdames et Messieurs, il est évident qu'elle sera totalement politisée. Preuve en est qu'on veut y placer des membres qui seront choisis de manière paritaire, mais pour garantir quoi ? Pour garantir qu'on sera une fois d'un côté, une fois de l'autre ? Non, Mesdames et Messieurs, les critères fixés dans ce projet de loi ne protègent absolument pas contre le risque de politisation, j'y vois plutôt une possible prise d'otage.
Le réel enjeu, Mesdames et Messieurs, c'est la distribution, pas le contenu. Le contenu existe partout, mais la distribution pour atteindre le public, c'est beaucoup plus compliqué, car la population ne veut plus payer pour ce dont elle n'a pas besoin, elle ne veut plus payer pour ce qui lui fait perdre du temps, elle veut une information ciblée. C'est là qu'il faut intervenir en se posant la question de la valeur ajoutée pour la démocratie et pour la communauté qui la finance.
Cette fondation n'apporte aucune valeur ajoutée, elle ne répond à aucune question, d'autant qu'elle s'adresse uniquement à la presse écrite et ne traite pas la problématique de l'audiovisuel et de l'audio. Comme ça a été dit en commission, notamment par M. Besençon, ce projet fait totalement fausse route et il faut le refuser, tout comme les propositions de motions qui l'accompagnent. Je vous remercie.
M. Thomas Wenger (S), rapporteur de minorité. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la presse genevoise et romande se meurt, les médias genevois et romands sont aux soins intensifs. A la commission de l'économie, les représentants du syndicat des journalistes Impressum nous ont communiqué quelques chiffres: en 2000, il y avait 232 titres en Suisse; en 2010, plus que 103 et en 2017, seulement 92. Imaginez la perte de diversité de la presse que nous connaissons aujourd'hui !
En ce qui concerne les postes dans les entreprises de médias en Suisse romande, il y avait 12 349 emplois en 2011; en 2017, plus que 10 372, c'est-à-dire 15% de moins, et certainement encore beaucoup moins à l'heure actuelle. La faute à la «facebookisation», à la «twitterisation», à la «tiktokisation», la faute aux GAFA qui mangent la plus grosse part du gâteau publicitaire et dont les parts continuent à progresser.
Alors arrêtez, Mesdames et Messieurs de la majorité de droite de ce Grand Conseil, de vous cacher derrière de fausses excuses ! Vous nous dites toujours: «Oui, il faut aider les médias, il faut aider notre presse genevoise et romande, mais pas maintenant, pas comme ça, plutôt au niveau suisse, en fait à l'échelle romande, pas via une fondation, si, mais de droit public, non, plutôt de droit privé...» Cessez de brandir ces fausses excuses, prenez vos responsabilités ! Le parti socialiste vous fait une proposition concrète, elle est sur la table; je vous demande de la voter et de nous soutenir. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. Monsieur Stéphane Florey, vous avez la parole.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité ad interim. M. de Sainte Marie ne s'exprime pas avant ? Parce que là, je remplace le rapporteur de majorité.
Le président. Ah, vous remplacez le rapporteur de majorité ? Très bien, alors je donne effectivement la parole à M. Romain de Sainte Marie, et je vous la repasserai ensuite. Monsieur Romain de Sainte Marie, c'est à vous pour une minute dix.
M. Romain de Sainte Marie (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je me permets de corriger quelques fausses informations données par M. le député Béné. Tout d'abord, celui-ci ne comprend pas que davantage d'information - c'est un fait, il y en a chaque année de plus en plus - ne coïncide pas nécessairement avec une information juste. Malheureusement, Monsieur le député, la quantité ne fait pas la qualité.
Ensuite, il s'agit bien ici de soutenir le métier de journaliste, celui qui assure le journalisme. Vous ne pouvez pas avoir de journalisme clair, garantissant une vérité de l'information, sans professionnels derrière. Nous ne pouvons pas légitimer le contenu qu'on retrouve sur les réseaux sociaux, relayé sur internet par d'autoproclamés rédacteurs, il n'assure pas l'objectivité de l'information.
La fondation que nous proposons de créer remplit précisément cette fonction. C'est un organe non politisé, mais public, et c'est là toute la différence avec les grands groupes de médias privés qui, eux, sont généralement politisés, puisque certains à leur tête sont même des élus au niveau fédéral. Il ne s'agit pas de considérer la valeur ajoutée monétaire, comme vous l'avez fait dans votre discours, Monsieur Béné, mais de promouvoir la valeur ajoutée pour la démocratie en soutenant le métier de journaliste. Mesdames et Messieurs, je vous remercie d'approuver ce projet de loi. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur. Je passe la parole à M. Stéphane Florey pour deux minutes et des brouettes.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je serai extrêmement bref, puisque quasiment tout a été dit sur le sujet. Je rappelle simplement que si l'utilité et l'importance de la presse sont indéniables - cela a été relevé par l'ensemble des intervenants -, la solution proposée, c'est-à-dire la création d'une fondation, n'est pas la bonne. Dès lors, Mesdames et Messieurs, je vous invite à refuser le projet de loi et à prendre acte des deux rapports du Conseil d'Etat sur les motions - et non à les renvoyer à l'expéditeur, comme le demande la minorité. En guise de conclusion, je répondrai à M. Béné au sujet de l'information juste en citant Coluche qui disait: «La seule chose exacte dans un journal, c'est la date.» Je vous remercie. (Rires.)
Une voix. Bravo !
Une autre voix. Je l'avais oubliée, celle-là !
Mme Anne Emery-Torracinta, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat adhère avec vous à un certain nombre de constats. Le premier, c'est que toute démocratie a besoin d'une presse libre, diversifiée et de qualité. Nous partageons également vos préoccupations quant à la situation actuelle en Suisse et ailleurs. Plusieurs d'entre vous ont évoqué l'immédiateté de l'information, la chasse au scoop, le fait que les journalistes ont de moins en moins le temps d'investiguer; le député Eckert a parlé du recyclage opéré par certains médias à partir d'autres contenus et sources d'information.
Pour ma part, j'observe souvent un phénomène intéressant s'agissant de la presse genevoise. Typiquement, si une association publie un communiqué de presse incendiaire sur l'attitude du gouvernement ou d'un département, que se passe-t-il ? Que font les journalistes qui, bien que ce ne soit pas leur faute, n'ont généralement pas le temps de réaliser un travail de fond ? En gros, ils écrivent rapidement un article qui reprend le résumé du communiqué; entre-temps, ils ont passé un coup de fil à la personne qui l'a rédigé, donc ils insèrent une citation au milieu et puis, à la fin, ils ajoutent deux lignes quant à la position du département, de la présidence ou du gouvernement - peu importe - sur cette question. Au fond, ce qu'on remarque, c'est que les professionnels des médias n'ont plus le temps d'effectuer un vrai travail de recherche et d'investigation, car c'est long, cela exige des moyens.
Ensuite, comme vous l'avez indiqué, les réseaux sociaux sont devenus la principale source d'information ou l'une des principales sources d'information de la population, un peu partout dans le monde, mais surtout, et c'est plus inquiétant, chez les jeunes. Je voudrais citer quelques chiffres d'une étude internationale de 2020: au sein de la population, tous âges confondus, les médias sociaux représentent 26% des sources d'information, les moteurs de recherche 25% et les sites internet des médias 28%. Chez les 18-24 ans, les réseaux sociaux constituent 38% des moyens d'information. Les jeunes d'aujourd'hui étant les lecteurs ou les auditeurs de demain, on peut s'interroger quant à leur capacité, à leur intérêt à chercher l'information dans la presse. Dans ce sens, l'arrivée en Suisse romande de titres comme «Watson» ou le «Blick», qui visent plutôt un public jeune, n'est pas forcément le signe d'une diversité et d'un renforcement de la presse. En effet, vous le savez, le gâteau publicitaire est limité et tout le monde tente d'y arracher sa part. Nous partageons ce constat avec vous; reste à savoir maintenant ce que nous pouvons faire pour venir en aide aux médias.
La position du Conseil d'Etat est la suivante. Tout d'abord, nous insistons sur le fait que nous ne pouvons pas nous limiter à un dispositif cantonal, la Confédération doit jouer un rôle clé dans ce domaine. A cet égard, le Conseil d'Etat se réjouit de l'adoption par le Conseil national, au début du mois, d'un paquet de 150 millions pour soutenir la presse. Sur ces 150 millions, 30 millions sont destinés aux médias en ligne et 120 millions à la presse; et sur ces derniers 120 millions, 40 millions concernent la distribution matinale ou dominicale des journaux. C'est un premier pas.
Cela étant, la subvention fédérale ne sera pas suffisante, il faut également mettre en place des programmes cantonaux. En septembre dernier, le Conseil d'Etat a chargé un groupe de travail composé de différents départements d'élaborer des propositions tout en tenant compte du positionnement fédéral. Nous étions en attente des décisions prises par le Conseil national, et comme il n'y a pratiquement plus de divergence avec le Conseil des Etats, nous pouvons véritablement nous mettre à l'oeuvre maintenant. Ainsi, dans quelques semaines ou mois, nous reviendrons vers vous avec des projets concrets.
Dans l'intervalle, le Conseil d'Etat encourage les départements à soutenir les médias locaux par un renforcement des prestations engagées avec eux ou par l'achat d'espaces publicitaires. Voici quelques exemples récents liés à la crise du covid: lors de la première vague au printemps et à l'été passés, une campagne de santé publique a été diffusée sur Léman Bleu qui s'appelait «Bouger sans sortir»; mi-juin, des espaces publicitaires ont été achetés dans la presse locale pour communiquer auprès des employeurs sur leurs responsabilités, notamment par rapport aux personnes sans permis de travail. Rien que pour ces campagnes, entre mars - début de la crise sanitaire - et septembre, le Conseil d'Etat et les différents départements ont dépensé plus de 90 000 francs. Depuis, d'autres actions ont été menées, d'autres partenariats ont été développés.
Ce que nous faisons très régulièrement aussi pour promouvoir les médias, c'est acheter systématiquement des annonces dans la presse locale lorsque des postes de cadres sont ouverts à l'Etat. Au DIP, nous avons mis en place un partenariat avec la «Tribune de Genève» et l'OFPC autour d'un cahier formation. Quant au DDE, il cofinance l'émission «Le monde de demain» sur Léman Bleu. Toute une série de partenariats de ce style existent.
En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat estime que le mieux serait d'attendre quelques semaines ou mois, que nous arrivions avec des propositions concrètes d'aide à la presse locale quand bien même, évidemment, le projet de loi et les motions présentent un intérêt certain. Cela étant, nous pensons qu'il est prématuré de les voter aujourd'hui. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la présidente du Conseil d'Etat. Nous procédons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 12307 est rejeté en premier débat par 53 non contre 35 oui et 3 abstentions.
Le président. En ce qui concerne les deux autres objets, M. Thomas Wenger sollicite le renvoi au Conseil d'Etat de ses rapports. Je mets cette requête aux voix.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2411 est rejeté par 55 non contre 32 oui et 8 abstentions.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2411.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2444 est rejeté par 54 non contre 32 oui et 5 abstentions.
Le Grand Conseil prend donc acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2444.