République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2663-A
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier la proposition de motion de Mme et MM. Christian Zaugg, Jocelyne Haller, Jean-Charles Rielle, Jean Batou, Olivier Baud : Langue des signes et communication du Conseil d'Etat
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VI des 29 et 30 octobre 2020.
Rapport de M. Jean Romain (PLR)

Débat

Le président. Nous passons à l'examen de la M 2663-A et je cède la parole à M. Yves de Matteis.

M. Yves de Matteis (Ve). Merci, Monsieur le président. Je suis titulaire de la commission des droits politiques, mais au moment où cette motion a été traitée, j'ai malheureusement dû me faire remplacer. A la lecture de ce rapport, j'ai constaté qu'aucune audition n'avait été effectuée, et je dois dire qu'en tant que membre d'une association de personnes malentendantes, il me semble qu'il existe une certaine «méconception» à l'égard de ce sujet, je pense notamment au fait que la langue des signes est totalement différente de l'écrit pour les populations concernées. Je demande donc le renvoi en commission de ce texte. Merci, Monsieur le président.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous lire une petite communication qui m'a été transmise par M. Zaugg, qui ne peut pas être avec nous aujourd'hui:

«Chers députés, j'aimerais vous dire que je considère que ma motion relative à la langue des signes n'a pas été bien traitée par la commission des droits politiques. Je vous rappelle que cette démarche m'a été proposée par des personnes en situation de handicap, qui se sont étonnées du fait que les communications et les conférences de presse du Conseil d'Etat n'étaient pas traduites en langue des signes comme cela se fait pour le Conseil fédéral. Je vous indique également que la LHand - la loi sur l'égalité pour les handicapés - énonce dans son article 14, alinéa 4, que la Confédération peut soutenir les mesures prises pour rendre les émissions télévisées accessibles aux handicapés de l'ouïe ou de la vue. Ceci démontre clairement que les autorités fédérales soutiennent ce type de démarche. On voit bien en ce moment, avec l'incroyable augmentation de la pandémie, que cette motion a tout son sens et qu'il est discriminant de proposer aux malentendants de lire dans les médias des extraits de conférences de presse beaucoup plus tard.

«La commission des droits politiques n'est pas allée au bout de sa démarche; elle devrait auditionner pour le moins l'Association genevoise des malentendants et le Conseil d'Etat, raison pour laquelle nous demandons le renvoi de cette motion à la commission des droits politiques.» Je vous remercie.

M. Jean Romain (PLR), rapporteur. Je crois que les choses ont été suffisamment claires et que la commission, présidée par M. Vanek, a fait son travail. J'aimerais pour ma part ajouter trois éléments. Premièrement, nous n'avons pas pu parler des coûts que représenterait la traduction simultanée des conférences de presse du Conseil d'Etat, parce qu'à aucun moment le motionnaire n'a indiqué une fourchette de prix. Deuxièmement, nous sommes confrontés au même type de difficulté que le Grand Conseil s'agissant d'un éventuel mandat donné à un média privé pour défendre ce qui relève de la politique. Il est effectivement assez difficile de demander à un média privé de mettre en place des sous-titres ou une traduction en langue des signes. C'est exactement à ce problème que le Grand Conseil, notamment en confiant certaines tâches à Léman Bleu, s'est heurté. Troisièmement, et c'est l'argument le plus fort, la question de l'utilité d'une telle mesure s'est posée. En effet, les conférences de presse du Conseil d'Etat sont immédiatement - c'est-à-dire une demi-heure après - mises en ligne sur le site, si bien qu'on peut en lire le contenu, ce qui n'est pas le cas pour les séances du Grand Conseil. On peut donc se demander s'il est très utile, pour gagner une demi-heure, de payer des gens pour effectuer ce travail de traduction en langue des signes. Cela semble d'autant moins nécessaire qu'il n'y a pas forcément une grande audience - à part la presse, évidemment.

Je pense que le plus sage est d'accepter les conclusions de la commission et de ne pas renvoyer cette motion à quelque commission que ce soit. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons nous prononcer sur la demande de renvoi en commission qui a été formulée.

Des voix. Il y a des demandes de parole !

Le président. Oui, j'ai bien vu, mais je vous soumets d'abord le renvoi à la commission des droits politiques. Monsieur de Matteis, c'est bien ce que vous avez proposé ? (Remarque.) Merci.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2663 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté par 36 non contre 27 oui et 2 abstentions.

Le président. Nous continuons le débat et je cède le micro à M. Cyril Mizrahi.

M. Cyril Mizrahi (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, je ne peux que souscrire aux arguments qui ont été présentés par Yves de Matteis et Jocelyne Haller: il ne me semble en effet pas très sérieux d'avoir fait ce travail sans auditionner les associations des personnes principalement concernées par ces questions.

Quand j'entends Jean Romain déclarer qu'on peut lire les points de presse et que tout va très bien, je me dis qu'on a encore un petit bout de chemin à parcourir ! Comme vous le savez, Mesdames et Messieurs, l'interprétation et le sous-titrage de nos débats pour les personnes sourdes et malentendantes ont été inscrits dans la loi portant règlement du Grand Conseil. Nous devons vraiment mener une réflexion - qui n'est pas uniquement axée sur les coûts - parce qu'un article de la constitution genevoise stipule clairement que la communication de l'Etat doit être accessible. Or une communication écrite est tout simplement discriminatoire et exclut les personnes dont la langue première est celle des signes, qui n'a absolument rien à voir avec la langue orale. Il est donc réellement nécessaire d'engager une réflexion, Mesdames et Messieurs, surtout à l'heure actuelle. Nous sommes confrontés à une situation de pandémie et j'ai moi-même reçu copie d'un message adressé notamment à M. Poggia de la part d'associations qui se plaignent de ne pas disposer d'informations dans des formats accessibles. On sait que dans ce contexte très particulier de nombreuses conférences de presse se tiennent, il y en a régulièrement, et cette population est complètement exclue de ces informations. Elle ne se rend pas compte de ce qui se passe, elle ne se rend pas compte de l'évolution des consignes sanitaires, qui est déjà suffisamment malaisée à comprendre pour les personnes qui peuvent facilement suivre ces points de presse et accéder à l'information.

En ces temps de pandémie, je vous invite donc vraiment à entendre ces organisations et à voir quels sont les besoins. Peut-être n'est-il pas nécessaire d'avoir une traduction systématique, mais durant cette période, dans cette situation particulière qui est la nôtre, où les choses évoluent tellement vite, il faut qu'il y ait une compréhension instantanée au travers d'une langue immédiatement intelligible pour ces personnes. Cette langue est ancrée dans notre constitution ! En conclusion, je ne peux que vous encourager à accepter le renvoi de ce texte à la commission des droits politiques. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Bertrand Buchs (PDC). Je ne vais pas revenir sur le fond, mais je m'interroge sur le fonctionnement de certains partis politiques. Si on regarde le résultat du vote en commission, on constate que les trois socialistes ont dit non à ce texte. Il faudrait donc peut-être que les députés de ce groupe se mettent d'accord entre eux avant de refaire le débat aux extraits ! Quant au commissaire EAG, il s'est abstenu. Ainsi, même le membre d'Ensemble à Gauche n'a pas voté en faveur de sa motion ! Je trouve par conséquent qu'on est en train de marcher sur la tête... Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Mizrahi, j'ai une question à vous poser. Vous avez conclu votre intervention en disant que vous nous encouragiez à accepter le renvoi de ce texte en commission. Est-ce que ça signifie que vous demandez formellement le renvoi en commission ?

M. Cyril Mizrahi (S). Oui, Monsieur le président ! Et comme le suggère mon collègue Yves de Matteis, pour que l'on ait un regard complémentaire, je propose le renvoi à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne), puisqu'il s'agit de l'application de la disposition constitutionnelle concernant la langue des signes et l'accessibilité des communications. Et je demande le vote nominal ! Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, c'est le cas. Je prie l'assemblée de se prononcer sur cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2663 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est rejeté par 39 non contre 33 oui et 1 abstention (vote nominal).

Vote nominal

Le président. Nous votons maintenant sur la proposition de motion elle-même. (Remarque.) Madame Haller, je ne peux pas vous donner la parole: nous sommes aux extraits et vous êtes déjà intervenue sur cet objet, votre groupe n'a donc pas la possibilité de s'exprimer à nouveau. Nous passons dès lors au vote.

Mise aux voix, la proposition de motion 2663 est rejetée par 37 non contre 27 oui et 5 abstentions.