République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2374-A-I
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Florian Gander, Ronald Zacharias, Sandro Pistis, Pascal Spuhler, Sandra Golay, Daniel Sormanni, Thierry Cerutti, Jean-François Girardet, Françoise Sapin, Christian Flury, Jean-Marie Voumard, Patrick Dimier, Henry Rappaz, Christian Decorvet : Noctambus jusqu'au bout du jeudi
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 24, 25 et 31 janvier 2019.
Rapport de M. André Python (MCG)

Débat

Le président. Nous abordons maintenant la M 2374-A-I en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de M. André Python, à qui je passerai la parole dès qu'il sera installé ! (Un instant s'écoule.) C'est à vous, Monsieur.

M. André Python (MCG), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Cette proposition de motion a été déposée en raison de l'engouement des jeunes pour les sorties du jeudi soir - un phénomène connu sous le nom de «jeudredi» - en plus du vendredi. Nous savons tous que de plus en plus de jeunes adultes renoncent à acheter une voiture, car c'est très coûteux et cela encombre les routes. L'obtention du permis de conduire est du reste souvent hors de portée de leur bourse. Le Noctambus, écologique et peu cher, est donc un moyen de rentrer chez soi en toute sécurité. L'Association des communes genevoises ne soutient pas cette motion pour des raisons financières, mais la sécurité de notre jeunesse n'est-elle pas primordiale ? Pour ces motifs, Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de réserver un bon accueil à cette motion en la votant. Je vous remercie.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le parti socialiste accueille plus que favorablement cette motion proposant d'adapter les horaires des Noctambus, parce qu'elle répond à la pétition du Collectif pour une vie nocturne riche, vivante et diversifiée que ce Grand Conseil avait largement soutenue, je le rappelle, en décembre 2015. Le Conseil d'Etat avait fait siennes les différentes recommandations de cette pétition, notamment sur les horaires de bus, et avait ainsi créé la fiche A21 du plan directeur cantonal qui vise à développer et à valoriser la vie nocturne dans ses dimensions culturelles et festives. Je vous rappelle du reste que notre parlement avait très largement accepté la mise à jour du plan directeur cantonal, dont la création de cette fameuse fiche A21. Pour l'ensemble de ces raisons, il convient de soutenir cette motion, qui constitue un tout petit pas en faveur de la mise en oeuvre d'une politique de la vie nocturne au profit non seulement de la jeunesse, mais aussi, on peut le dire, des adultes. Je vous remercie.

M. François Lance (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion a pour but d'adapter l'offre des Noctambus en fonction des changements d'habitudes des noctambules, en lien avec l'élargissement des plages d'ouverture des établissements publics, spécialement le jeudi soir, devenu prisé pour les sorties. L'objectif est louable, mais les prestations des Noctambus sont gérées par une association qui comprend deux composantes, le réseau urbain et le réseau régional. Cette motion vise en particulier le réseau urbain, qui est financé pour moitié par quatorze communes, dont la Ville de Genève, et pour moitié par les TPG. L'association se charge de toute l'administration, tandis que les TPG s'occupent de l'exploitation.

Ce texte a été amendé afin que l'actualisation se fasse sur la base des besoins actuels des usagers, et non pas uniquement le jeudi soir. Il a aussi été demandé d'envisager un supplément de tarif pour l'utilisation des Noctambus de façon à financer le développement de l'offre, en particulier la nuit du jeudi. Le groupe PDC votera cette motion telle qu'amendée en commission afin que l'association puisse réfléchir à l'adaptation des prestations aux besoins des usagers.

M. Florian Gander (MCG), député suppléant. Je suis très satisfait que cette motion ait été acceptée en commission, en tout cas par la majorité. L'amendement est extrêmement précis et bénéfique, et je ne peux que le soutenir. Je voulais juste rappeler - et c'est peut-être un petit pied de nez aux communes qui n'étaient pas favorables à ce texte - que les Noctambus ont certes un coût, mais que la sécurité de nos résidents jeunes et moins jeunes n'a pas de prix selon moi. En tous les cas, je vous remercie infiniment d'avoir soutenu cette motion, et j'espère qu'elle pourra être appliquée dans les meilleurs délais.

Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, vous n'êtes pas sans savoir que la plupart des activités de la vie nocturne de notre canton sont organisées au centre-ville. Vous savez certainement aussi que depuis 2015 et la nouvelle teneur de la LRDBHD, les bars sont automatiquement ouverts jusqu'à 2h du matin le jeudi soir. Aujourd'hui, une jeune personne qui habite loin du centre et qui sort le jeudi n'a pas d'autre choix que de prendre un taxi - ou de faire appel à Uber, nous en parlions lors de la dernière session - pour rentrer à la maison. En effet, les Noctambus, qui sont une alternative idéale à la voiture pour rentrer de soirée, ne sont actifs que les vendredis et samedis soir. Ces circonstances, Mesdames et Messieurs les députés, créent d'importantes formes de discriminations: la vie nocturne ne serait réservée qu'à une infime partie de la population, un petit groupe de privilégiés, celleux qui habitent au centre-ville ou qui ont les moyens de se payer un taxi pour rentrer. Il est temps que l'offre des Noctambus s'adapte à l'évolution des habitudes et aux nouveaux horaires d'ouverture des bars !

J'en profite pour noter que cette motion fait suite à l'excellent travail - que je salue - de jeunes qui se sont organisés en association autour du Collectif pour une vie nocturne riche, vivante et diversifiée. Cela démontre l'importance de la demande qui existe aujourd'hui pour ce type de services. Les Noctambus sont un moyen bon marché et plus écologique que la voiture pour rentrer chez soi. A ce propos, les Verts sont opposés à un éventuel supplément de tarif. Je rappelle en effet que ce service s'adresse principalement aux jeunes qui, de facto, n'ont pas de revenu, hormis une petite rémunération provenant d'un job d'étudiant ou un salaire d'apprenti. Les Noctambus doivent également être encouragés parce que c'est un moyen sûr pour rentrer chez soi - vous l'avez dit - grâce à la présence de médiateurs, ce qui est évidemment une bonne chose. C'est un lieu sûr pour toutes les minorités de genre, qui sont susceptibles d'être victimes de harcèlement sexuel et sexiste dans l'espace public.

Mesdames et Messieurs les députés, rendez-vous à l'évidence: Calvin est mort et les jeunes sortent le jeudi. (Exclamations.) Ils doivent toutes et tous pouvoir jouir pleinement de leur droit de faire la fête. Nous vous encourageons donc à dire oui aux Noctambus le jeudi en acceptant cette excellente motion. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Fabienne Monbaron (PLR). Le PLR relève que cette motion est louable: elle a effectivement pour but de permettre aux adeptes du «jeudredi» - principalement des jeunes - de rentrer chez eux en transports publics le jeudi, sachant qu'aujourd'hui les Noctambus ne circulent pas ce soir-là. En revanche, comme bien souvent, le mode de financement n'est pas prévu - c'est le principal défaut de ce texte. A ce jour, Noctambus est une association privée; elle est financée par les communes et touche une subvention de 1 million de francs des TPG. Ses prestations sont accessibles au moyen d'un titre de transport valable, sans surcoût par rapport à l'offre diurne. J'ajoute qu'aucune ville de Suisse ne propose d'offre le jeudi soir et que le niveau des surtaxes de fin de semaine se situe entre trois et cinq francs.

Lors des diverses auditions effectuées, on a constaté que le regroupement associatif Collectif Nocturne à l'origine de cette idée était partagé sur la question du financement de cette nouvelle offre, les deux représentants auditionnés ayant émis des avis contraires quant à la possibilité de demander à l'utilisateur une surtaxe pour cette prestation, dont le coût est tout de même compris entre 750 000 et 1 million de francs selon les estimations. Le refus de cette majoration est motivé par le fait que les jeunes ont peu de moyens et qu'il appartiendrait donc aux collectivités publiques de prendre en charge ces coûts. De son côté, le comité unanime de l'Association des communes genevoises a décidé de ne pas soutenir cette motion, estimant que les communes participent déjà largement au financement de l'existant. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Par ailleurs, aucune demande à ce sujet ne lui est parvenue. Il s'avère également que les dépenses liées à ce nouveau service seraient similaires à celles du week-end, mais que les recettes seraient inférieures en raison d'une fréquentation moindre. Le groupe PLR avait formellement proposé l'ajout d'une invite en vue d'envisager un supplément de tarif pour les Noctambus du jeudi soir, mais cette suggestion a été refusée. (Brouhaha.)

Le président. Une seconde, Madame Monbaron ! J'aimerais qu'il y ait un peu plus de calme. (Un instant s'écoule.) Voilà, vous pouvez poursuivre.

Mme Fabienne Monbaron. Merci ! A ce jour, nous pensons toujours qu'une surtaxe est nécessaire pour cette offre supplémentaire destinée à environ 4700 personnes, contre 7000 le week-end. Cette surtaxe existe ailleurs, alors que les transports publics coûtent déjà plus cher que chez nous. Elle est requise chaque nuit et représente un montant raisonnable qui ne dépasse pas le prix d'une bière ou d'un soda. Les utilisateurs potentiels des Noctambus du jeudi en auront d'ailleurs probablement consommé dans la soirée, et certainement plus d'une fois !

Nul doute que nous aurons l'occasion d'aborder à nouveau ce sujet avec l'arrivée du Léman Express, qui va grandement modifier les habitudes et relancer la réflexion sur tout ce qui gravite autour. Dans l'intervalle, nous resterons sur notre position et refuserons cette motion.

M. Thierry Cerutti (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a dit tout à l'heure, le Mouvement Citoyens Genevois est pour la mobilité douce, pour les transports en commun, et cette motion le démontre parfaitement. Nous nous soucions aussi de la sécurité de nos jeunes, de nos adolescents: nous voulons qu'ils puissent s'amuser et sortir en toute sécurité, plutôt que de seulement rester cloîtrés chez eux devant leur PlayStation. Ils doivent pouvoir socialiser avec les autres résidents de notre canton ! Nous vous remercions donc de soutenir cette motion. (Applaudissements.)

Le président. Merci. La parole n'étant plus demandée, nous passons au vote.

Mise aux voix, la motion 2374 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 65 oui contre 29 non et 2 abstentions.

Motion 2374