République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 12 octobre 2018 à 15h30
2e législature - 1re année - 4e session - 26e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 15h30, sous la présidence de M. Jean Romain, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Serge Dal Busco, Mauro Poggia et Nathalie Fontanet, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Pierre Maudet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Antoine Barde, Jacques Béné, Bertrand Buchs, Pablo Cruchon, Patrick Lussi, Fabienne Monbaron, Rémy Pagani, Stéphanie Valentino, Rolin Wavre, Salika Wenger, François Wolfisberg et Christian Zaugg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Jacques Apothéloz, Olivier Baud, Pierre Bayenet, Natacha Buffet-Desfayes, Patrick Hulliger, Sylvie Jay et Christina Meissner.
Annonces et dépôts
Néant.
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de M. Jean-Marc Guinchard : Nouvelle réglementation fédérale en matière de conservation et d'archivage des dossiers médicaux : que compte faire le Conseil d'Etat ? (QUE-884)
Question écrite urgente de M. Patrick Dimier : Demande de compte-rendu de l'assemblée générale 2018 de la BNS et des actions du Conseil d'Etat à cette assemblée (QUE-885)
Question écrite urgente de M. Diego Esteban : Matériel de vote des Suisse-sse-s de l'étranger : le service des votations et élections (SVE) peut-il garantir que les ressortissant-e-s genevoi-se-s reçoivent toutes et tous leur matériel de vote dans les délais légaux ? (QUE-886)
Question écrite urgente de M. Diego Esteban : Evolution dans la comptabilisation des résultats des élections cantonales : le biffage est un comportement actif ! (QUE-887)
Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Est-il admissible que l'obtention d'une augmentation annuelle engendre une diminution du traitement salarial ? (QUE-888)
Question écrite urgente de M. Jean Batou : Les habitants de Genève ont-ils tous les mêmes droits de faire voler des drones ? (QUE-889)
Question écrite urgente de Mme Léna Strasser : Fermeture de la Haute école de musique de Neuchâtel, où en sont les négociations ? (QUE-890)
Question écrite urgente de M. Sylvain Thévoz : Nouvelle barrière au pont Butin : quelle concertation pour un tel projet ? (QUE-891)
Question écrite urgente de M. André Pfeffer : Etat des lieux de l'emploi indigène dans les multinationales étrangères (QUE-892)
Question écrite urgente de M. Jean Batou : Le conseiller d'Etat Pierre Maudet et/ou son ancien chef de cabinet Patrick Baud-Lavigne ont-ils reçu copie de tout ou partie des rapports de police établis par la Brigade de la sûreté intérieure (BSI) de la police cantonale, rédigés à l'attention du Service de renseignement de la Confédération (SRC) ? (QUE-893)
Question écrite urgente de M. Jean Batou : Les journalistes peuvent-ils exercer librement leur métier à Genève ? (QUE-894)
Question écrite urgente de M. Sylvain Thévoz : Conseil consultatif de sécurité : quelle transparence, quelle efficience, quels résultats ? (QUE-895)
Question écrite urgente de Mme Isabelle Pasquier : Quel encadrement proposé aux requérants mineurs non accompagnés pour orienter leur formation ? (QUE-896)
Question écrite urgente de Mme Delphine Bachmann : A quand des macarons pour les professionnels de la santé ? (QUE-897)
Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Les élèves aveugles - et leurs enseignants - sont-ils voués à se débrouiller seuls, sans le soutien nécessaire, faute de moyens ? (QUE-898)
Question écrite urgente de Mme Anne Marie von Arx-Vernon : Qui pour protéger la nuit de nos concitoyens ? (QUE-899)
Question écrite urgente de M. Simon Brandt : Déménagement de la RTS : un Conseil d'Etat spectateur ? (QUE-900)
Question écrite urgente de M. Marc Falquet : Exposition Body World à Palexpo : qu'en est-il des dénonciations auprès du procureur général pour atteinte à la paix des morts (art. 262 CP) et importation illicite en Suisse de cadavres et de restes d'une personne décédée ? (QUE-901)
Question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Les voyages à Taïwan (QUE-902)
Question écrite urgente de Mme Jocelyne Haller : Quelles mesures prises suite au décès de Yemane ? (QUE-903)
Question écrite urgente de Mme Helena Verissimo de Freitas : Tribunal administratif de première instance : audiences publiques ou audiences sur invitations interdites au public avec la complicité de la police lorsqu'il s'agit de renvoyer un jeune requérant victime de l'incendie des Tattes ? (QUE-904)
Question écrite urgente de M. Pierre Vanek : Rémunération du conseiller d'Etat Pierre Maudet : à chacun-e selon son travail ? (QUE-905)
QUE 884 QUE 885 QUE 886 QUE 887 QUE 888 QUE 889 QUE 890 QUE 891 QUE 892 QUE 893 QUE 894 QUE 895 QUE 896 QUE 897 QUE 898 QUE 899 QUE 900 QUE 901 QUE 902 QUE 903 QUE 904 QUE 905
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Le Conseil d'Etat nous informe qu'en accord avec son auteur, M. Simon Brandt, la réponse à la QUE 866 sera déposée lors de la session des 1er et 2 novembre 2018.
Questions écrites
Le président. Vous avez également trouvé sur vos places les questions écrites suivantes:
Question écrite de M. Pierre Bayenet : Pourquoi M. Pierre Maudet bénéficie-t-il d'une protection personnelle de la part de la police genevoise ? Pourquoi et à quel coût pour la collectivité ? (Q-3815)
Question écrite de M. Pierre Bayenet : Catherine Maudet a-t-elle bénéficié d'une violation du secret de fonction ? (Q-3816)
Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Annonce: Séance du vendredi 21 septembre 2018 à 16h
Cette question écrite urgente est close.
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Débat
Le président. Nous continuons nos urgences avec la M 2398-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. le député François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le rôle social des patrouilleuses scolaires est important, même s'il est souvent un peu ignoré. Ce sont des personnes qui font partie de notre environnement quotidien, que l'on voit vers les passages piétons à la sortie des écoles. Ce sont très souvent des habitantes de nos diverses communes et de nos quartiers et je crois qu'il faut d'abord leur rendre hommage. Personne ne le conteste, elles font un travail important de prévention et d'accompagnement, un travail humain, et ce sont des personnes qui méritent toute notre considération.
Qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi a-t-on déposé cette motion ? Parce qu'un règlement a été édicté qui ouvrait la porte à une privatisation. C'est une privatisation que les signataires ont estimée sournoise parce qu'elle laisse la porte ouverte - comme un cheval de Troie - à une privatisation plus importante; or, il est essentiel dans notre société de laisser ces postes à des personnes. On peut tout à fait trouver des remplaçants en cas de problème ou d'absence pour maladie, c'est quelque chose qui peut se faire, qui doit se faire. C'est vrai qu'il y a des listes d'attente pour les patrouilleuses scolaires. On peut également faire des échanges entre les communes; on peut demander à la police municipale de donner un coup de main quand c'est nécessaire. Ce sont des possibilités qui existent et il n'est pas nécessaire de prévoir l'apport de sociétés privées qui auront une autre philosophie de ce que sont les patrouilleuses scolaires. Je vous demande donc, comme la majorité de la commission, de soutenir la présente motion.
M. Raymond Wicky (PLR), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, en ce qui concerne la minorité de la commission, comme mon préopinant, il est évident que nous saluons le travail des patrouilleuses et des patrouilleurs scolaires qui non seulement assurent la sécurité des enfants du canton sur le chemin de l'école, mais amènent aussi une dimension sociale et un contact humain qui n'est pas à négliger, notamment avec des adultes qui ne font peut-être pas partie de leur environnement direct.
Par contre, j'aimerais apporter une certaine précision: on a quelque peu extrapolé la problématique de la réglementation. Si on regarde celle-ci de façon détaillée, on s'aperçoit tout d'abord qu'un remplacement par une société privée est possible exclusivement à certaines conditions. La première de ces conditions, c'est que ces remplacements soient tout à fait ponctuels et qu'ils ne durent pas. La durée est donc limitée. Bien entendu, ces recours à une société privée pour assurer des remplacements sont entièrement subordonnés à une autorisation du département qui doit évaluer si, effectivement, il y a des risques que certaines communes pratiquent systématiquement ce genre de délégations. Donc, la notion de privatisation latente est largement surestimée et exagérée. En allant dans le sens de la majorité de la commission, on va arriver à des situations dans lesquelles les communes du canton seront privées d'une certaine flexibilité et d'une réelle liberté de manoeuvre dans leur action. Toutes les communes ne sont pas comme Genève, Carouge ou Vernier où, comme l'a dit mon préopinant, il y a des listes d'attente pour accéder à cette fonction qui donne un petit revenu complémentaire à des familles. Dans des communes comme la mienne, avec mille habitants, je peux vous dire que s'il fallait mettre en place un système de patrouilleurs ou de patrouilleuses scolaires, on ne serait pas près d'en voir parce qu'on n'arriverait probablement pas à recruter les personnes nécessaires dans la commune.
Enfin, une autre chose un peu surprenante est de demander un report sur la police municipale. Il me semble que la police municipale - à qui on confie de plus en plus de missions - n'est pas seulement là pour faire traverser la rue à des enfants. Forte de ces considérations, la minorité de la commission vous demande de refuser cette motion qui est trop carrée par rapport à la problématique qu'elle entend traiter.
Le président. Je vous remercie. J'ai une demande d'un ou d'une députée portant le numéro 63, mais j'aimerais bien qu'on mette la carte afin que je puisse repérer le nom. Je pense qu'il s'agit de Mme Delphine Bachmann, à qui je passe la parole.
Mme Delphine Bachmann (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien rejoint l'avis du rapporteur de minorité. Sous couvert de dire que la sécurité de nos enfants serait en danger, on est en train de vouloir expliquer aux communes comment elles doivent travailler, comment elles doivent gérer les patrouilleurs et patrouilleuses scolaires. Je crois que, dans la plupart d'entre elles, cela se passe très bien avec le statut actuel. Nous pensons qu'il vaut mieux leur laisser la liberté de s'organiser, notamment pour les raisons citées précédemment: de petites municipalités peuvent avoir de la peine à s'organiser pour cela avec les employés municipaux. Nous estimons que ce n'est pas au canton d'imposer dans toutes les communes une manière de faire généralisée. C'est une atteinte à la liberté d'organisation de celles-ci. L'organisation des patrouilleuses scolaires est vraiment une compétence qui doit rester au niveau communal.
M. Jean Batou (EAG). Chers collègues, pour le groupe Ensemble à Gauche, ça ne fait aucun doute, il faut défendre de manière extrêmement ferme le rôle social, citoyen et de proximité des patrouilleuses scolaires et il ne faut pas sous-estimer les risques de privatisation de toutes les tâches de sécurité dans ce canton. Je vous rappelle qu'en Suisse, aujourd'hui, il y a 20 000 agents de sécurité privée, c'est-à-dire plus que tous les effectifs des police qui appartiennent aux collectivités publiques. On sait aussi que des géants de la sécurité comme Securitas occupent de plus en plus de place lors de missions publiques sous-traitées à des entreprises privées. A quand des patrouilleuses scolaires Securitas dans nos rues ? J'espère qu'on ne connaîtra jamais une évolution de ce type! Je le dis d'autant plus que le département de la sécurité est très prompt à privatiser des tâches de sécurité, comme on l'a vu lors de l'homérique bataille sur le convoyage des détenus. Nous avons toutes les raisons de nous méfier de ces exceptions qui deviennent progressivement la règle. Vous le savez tous également, dans la privatisation des tâches de sécurité, il y a toujours un dumping au niveau de la formation, des conditions de travail et des salaires des employés des entreprises de sécurité privée. C'est pourquoi notre groupe vous appelle instamment à soutenir cette motion.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Nous connaissons toutes et tous les dangers de la circulation routière pour nos enfants sur le chemin de l'école. On l'a dit à plusieurs reprises, les patrouilleurs et patrouilleuses jouent un rôle central pour la sécurité de nos enfants. On devrait d'ailleurs les multiplier dans certains quartiers parce que le chemin de l'école n'est souvent pas encore suffisamment sécurisé. Les patrouilleurs et patrouilleuses sont des acteurs et actrices de la commune et il est important pour les Verts que cette activité reste communale, notamment pour permettre une vision d'ensemble et un travail étroit avec la police municipale. Pour les Verts, il est important de ne pas prêter le flanc à une potentielle privatisation et de ne pas mettre le pied dans la porte, même si la porte est ici à peine ouverte: nous le reconnaissons, on parle plus d'exceptions. Quoi qu'il en soit, ne faisons pas de cette exception une règle, et c'est pour cette raison que les Verts soutiennent cette motion.
Je voudrais encore dire ici que même si les patrouilleurs et patrouilleuses jouent un rôle important en matière de sécurité, il y a d'autres leviers à activer, qu'on ne peut pas se passer de citer ici; on en a d'ailleurs parlé à la dernière session. Il s'agit de la sécurité de manière générale sur le chemin de l'école. Les Verts ont déposé une motion sur les plans de mobilité scolaire, les PMS, pour que ces outils soient largement valorisés dans les communes. J'aimerais faire un appel au Conseil d'Etat pour qu'il mette en place le plus rapidement possible ces plans de mobilité scolaire, de manière que la sécurité sur le chemin de l'école soit effective.
Mme Xhevrie Osmani (S). Mesdames et Messieurs les députés, notre groupe soutient cette motion qui vise à empêcher la privatisation de la sécurité des enfants, car elle permet d'éviter une généralisation ou un recours automatique à des sociétés privées par les communes éprouvant des difficultés à recruter des patrouilleuses et patrouilleurs scolaires. La modification réglementaire en question visant à autoriser le recours à des sociétés privées de manière exceptionnelle, quand il y a un manque de personnel, est en soi une chose que nous pouvons concevoir. Cependant, avec cette modification, le risque est que cette pratique devienne une habitude et l'exception la règle. Les patrouilleuses scolaires seraient progressivement mises à l'écart et on ferait l'impasse sur l'importance de la tâche de proximité assurée par ce personnel ainsi que sur le lien social que cette tâche préserve. Cela contribuerait à fragiliser le métier et les conditions de travail, alors qu'il s'agit d'un service très souvent assuré par des femmes pour qui cette rémunération intervient en complément d'un revenu généralement faible. Nous savons que l'externalisation d'une tâche se veut accompagnée d'économies, mais il ne faut pas oublier qu'une externalisation serait lourde, et si celle-ci devait être considérée comme une mesure d'économies, elle se ferait au détriment des conditions de travail des patrouilleuses.
Comme nous l'avons défendu en commission, nous estimons qu'il est important que toutes les solutions envisageables soient épuisées avant de recourir à une privatisation même partielle. Cette situation serait dommageable et regrettable, bien que nous comprenions qu'il s'agit d'un cas marginal à l'heure actuelle, celui de Collex-Bossy; le caractère urgent est peut-être un peu exagéré. Malgré tout, nous sommes d'accord avec le fond de ce texte, et c'est pour cette raison que nous appelons les autres députés à l'adopter. (Applaudissements.)
Mme Simone de Montmollin (PLR). Chers collègues, j'entends chez mes préopinants le souci d'une privatisation générale, mais ce n'est absolument pas de cela qu'il s'agit ! Lisez le règlement sur les patrouilleurs et patrouilleuses scolaires et vous pourrez vous en convaincre vous-mêmes. Cette modification a été introduite dans ce règlement suite à la difficulté rencontrée par de petites communes à trouver les forces vives en leur sein pour assurer ce rôle de patrouilleuses ou patrouilleurs. Parfois, il n'était pas possible de les trouver sur leur territoire ni dans des communes voisines ou encore auprès de la police municipale qui, on doit l'avouer, a certainement autre chose à faire que de s'occuper de ces tâches-là. L'avantage d'une telle modification, c'est qu'elle encadre les conditions dans lesquelles ce travail peut être fait, en exigeant exactement la même chose de ces sociétés privées que des patrouilleuses qui doivent être formées et doivent obtenir l'agrément du Conseil d'Etat. Ce cadre est fixé pour précisément éviter des débordements ou une généralisation de la pratique. Je vous invite à lire l'alinéa 3 de l'article 3 du règlement: «A titre exceptionnel et sur présentation de justificatifs, les communes qui rencontrent des difficultés momentanées en matière de recrutement ou de gestion des patrouilleuses peuvent demander au département l'autorisation de mandater [...]» Il ne s'agit donc pas de généraliser, il s'agit de prévoir une certaine flexibilité, de nouveau, pour les petites communes qui n'ont parfois pas d'autre choix que de recourir à de la main-d'oeuvre extérieure à la commune pour assurer momentanément la sécurité des enfants sur le trajet menant à l'école.
C'est pour ça que le PLR ne soutiendra pas cette proposition, il estime que les garde-fous sont suffisants et qu'il faut donner cette possibilité aux communes qui en ont besoin pour ne pas les laisser se retrouver momentanément sans solution. Nous vous remercions donc de ne pas soutenir cette motion.
M. Patrick Dimier (MCG). La république de Genève a pour tradition de s'appuyer sur un liant social fort, sur un maillage qu'un de ses plus grands philosophes, Jean-Jacques Rousseau, a appelé le contrat social. Ce contrat social impose - ou exige - que chacun des participants à ce contrat puisse compter sur l'autre, s'appuyer sur l'autre. L'intérêt des patrouilleuses scolaires - cela m'est démontré tous les matins dans le quartier où j'ai mon bureau - est qu'elles sont au contact direct avec les enfants, lorsque les parents ne sont pas là ou ont confié leurs enfants à des tiers. Les patrouilleuses scolaires savent très bien que les adultes qui accompagnent ces enfants ont la confiance des parents. Comment pensez-vous qu'il soit possible que des entreprises commerciales puissent remplir un tel rôle ? C'est tout simplement mission impossible. Comme l'a extrêmement bien souligné le rapporteur François Baertschi, on ne peut que soutenir ce fonctionnement qui implique chacun d'entre nous, chacune d'entre nous, pour constituer un contrat social solide et efficace.
M. François Lance (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je vais répéter encore une fois ce qui a été dit. A l'heure actuelle, les communes n'ont pas d'intérêt à déléguer cette tâche à des entreprises privées ! Les patrouilleuses et patrouilleurs scolaires assurent la sécurité des enfants de la commune, mais ont surtout un rôle social important, étant en contact avec les enfants et surtout les parents. Cette délégation à une entreprise privée pourrait être comprise lors d'indisponibilité d'une patrouilleuse ou d'un patrouilleur, en cas d'absence pour cause de maladie ou d'accident sans possibilité de remplacement par un agent de police municipale, en particulier dans les petites communes. Laissons cette possibilité de dernier recours aux communes ! Merci donc de refuser cette motion !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Daniel Sormanni pour une minute quatorze.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce sera très rapide. Mon préopinant vient de dire que les communes n'auraient pas intérêt à privatiser cette activité et qu'il faudrait leur laisser le choix. Si ce règlement cantonal n'avait pas été changé, cette motion n'aurait pas été déposée, c'est aussi simple que ça ! Ne laissons pas la porte ouverte à cette possibilité, parce qu'aujourd'hui, c'est une possibilité, et demain ce sera privatisé ! Ce serait une grave erreur, avec une rupture du lien social et de confiance entre les parents et ceux qui font traverser nos enfants aux passages piétons. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à voter cette motion.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est maintenant à M. le député François Baertschi pour quarante secondes.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Monsieur le président, elle ne sera pas si exceptionnelle que ça, cette délégation privée ! Il faut savoir que les sociétés privées devront financer la formation de leurs agents. Elles ne pourront donc pas intervenir pour une période trop limitée, elles auront tout intérêt à faire durer la délégation. Elles ne pourront pas échapper à cette durée de délégation.
Autre élément inquiétant, on entend déjà que des grandes communes suburbaines seraient prêtes à recourir à cette délégation - même la Ville de Genève, il paraît ! Mais ce sont des communes où on a la possibilité de trouver des personnes pour cette fonction ! Actuellement, il semble qu'il y ait la tentation dans certaines de ces communes de déléguer. Le danger est donc bel et bien là, à mon avis, et cette motion est tout à fait utile comme avertissement et signal d'alarme... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...ainsi que pour demander un soutien et donner une reconnaissance aux patrouilleuses scolaires qui ne sont pas toujours reconnues comme elles devraient l'être par certaines communes, malheureusement...
Le président. Voilà, Monsieur le député, c'est terminé !
M. François Baertschi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je passe la parole à M. le député Raymond Wicky pour quarante-cinq secondes.
M. Raymond Wicky (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Très rapidement, je crois qu'on s'emploie à peindre le diable sur la muraille là où il n'y a pas de diable ! Je ne veux pas répéter ce qu'a dit Mme de Montmollin, mais le règlement est absolument clair en la matière et vous savez très bien qu'on pourra toujours influencer le Conseil d'Etat s'il y avait des dérives en la matière. Enfin, on ne parle pas des grandes communes; le problème n'est pas lié à celles-ci, mais aux petites communes qui, de surcroît, encore une fois, se trouvent parfois totalement isolées dans notre campagne et n'ont pas forcément la possibilité de trouver des ressources dans les communes voisines. Donc, je vous invite encore une fois à refuser cette motion !
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de minorité. J'invite l'assemblée à voter sur ce que préconise la majorité, à savoir le renvoi de la motion au Conseil d'Etat.
Mise aux voix, la motion 2398 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 52 oui contre 34 non.
Débat
Le président. Nous abordons la proposition de résolution 864, Mesdames et Messieurs, et je passe immédiatement la parole à M. le député Thomas Wenger.
M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la Loterie romande est une association d'utilité publique, vous le savez, qui bénéficie du monopole des grandes loteries dans les six cantons romands. Elle reverse l'ensemble de ses bénéfices à des organisations qui poursuivent des buts d'utilité publique et de bienfaisance dans les domaines social, culturel et sportif.
Fin juin, la Loterie romande a annoncé la délocalisation de 20% de ses activités informatiques en Pologne, ce qui conduit à la suppression de sept postes de travail en Suisse. Cette délocalisation n'est pas la première: en 2005, la gestion du PMU romand a été externalisée en France et, en 2015, l'impression des tickets à gratter exportée en Amérique du Nord. Cette nouvelle annonce est intervenue quelques semaines seulement après l'acceptation, le 10 juin 2018 - vous vous en souvenez, Monsieur le président - de la loi sur les jeux d'argent en votation populaire, alors que les représentants des cantons, notamment romands, s'étaient fortement impliqués pour expliquer l'utilité publique de la Loterie romande ainsi que l'importance de ne pas la soumettre à la concurrence étrangère.
Cette suppression d'emplois en Suisse - sept postes, je le rappelle - est en totale contradiction avec les buts de cette société et l'image qu'elle devrait donner, et c'est parce que l'emploi ne doit justement pas être une loterie, Monsieur le président, que le parti socialiste demande au Conseil d'Etat d'intervenir via son représentant au sein du conseil d'administration pour que la Loterie romande renonce à la délocalisation de ces sept postes et maintienne l'emploi en Suisse. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La présidence est très sensible à votre jeu de mots ! Je passe la parole à M. le député Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. En tant que Grand Conseil, nous avons le droit, voire le devoir, de nous poser des questions quant à la voie choisie par la Loterie romande, étant toutefois rappelé que cette institution joue un rôle essentiel - cela a été dit, mais je tiens à le répéter - dans les domaines social, culturel et sportif grâce à l'aide et aux subventions qu'elle octroie. Voilà la question de fond.
Sur la forme, le Conseil d'Etat n'a pas à donner d'instructions au représentant genevois au conseil d'administration. Conformément aux dispositions du code des obligations, l'exercice de la haute direction de la société, l'établissement des directives nécessaires ainsi que la fixation de l'organisation de la société font partie des attributions du conseil d'administration. Ainsi, une résolution ne saurait contraindre le Conseil d'Etat à donner des instructions à son administrateur, ce serait contraire aux dispositions du code des obligations. C'est d'autant plus le cas que la Loterie romande a statut d'association au sens des articles 60 et suivants du code civil et qu'elle fonctionne comme un établissement autonome. Il n'est pas de bonne gouvernance que le parlement s'immisce dans sa gestion opérationnelle.
En revanche, l'autorité politique peut manifester sa désapprobation en adressant un courrier directement au conseil d'administration, et il faudrait le faire en concertation avec les autres Conseils d'Etat romands afin que cela ait plus de chance d'aboutir. Il aurait mieux valu que la résolution demande au gouvernement de manifester sa position et son questionnement au sein de la Conférence romande de la loterie et des jeux, afin que celle-ci s'adresse à la Loterie romande. Cela aurait permis un traitement plus rapide, plus efficace et certainement plus crédible. Cela étant, en raison du fond, le groupe démocrate-chrétien votera cette résolution. Je vous remercie.
M. Pierre Vanek (EAG). Je ne m'arrêterai pas aux questions de forme évoquées par mon préopinant, elles sont tout à fait secondaires. En effet, on peut parfaitement inviter le Conseil d'Etat à intervenir auprès de la Loterie romande via son représentant; il ne s'agit pas de lui donner des instructions formelles, ce qui serait malvenu, mais il faut et on doit intervenir. D'ailleurs, en préparant ma prise de parole, j'ai constaté qu'après le report d'un mois ou de quelques semaines de ce débat, les cantons respectifs de Fribourg, du Valais et du Jura sont entre-temps intervenus dans le même sens à travers leurs parlements et leurs Conseils d'Etat, donc nous ne faisons rien de bien révolutionnaire en sollicitant une action du gouvernement auprès de la Loterie romande.
J'ai été effaré en écoutant une interview à la RTS - c'était le 4 août, il me semble - du directeur de la Loterie romande qui faisait preuve d'une insensibilité affligeante quant à la problématique qui nous occupe. Il disait que dix postes allaient être supprimés au bénéfice de la restructuration d'une partie de l'activité informatique de la Loterie romande, que cinq de ces postes seraient reclassés à l'interne, qu'un employé prendrait sa retraite et que quatre personnes seulement avaient tiré le mauvais numéro, mais bénéficiaient d'un plan social mirifique, selon ses dires. Il déclarait en outre qu'il lui était parfaitement indifférent, ce sont à peu près ses termes, que l'activité informatique se fasse en Suisse ou en Pologne.
Ce discours managérial d'une banalité crasse, on l'entend régulièrement dans différents domaines: des directeurs d'entreprise expliquent ou tentent de justifier des mesures de délocalisation, de restructuration, de suppression d'emplois au nom de la rationalité et du profit. Eh bien dans le cas de la Loterie romande, ce type de discours n'est pas admissible pour toutes les raisons qui ont été développées par mes préopinants, et c'est pourquoi notre groupe votera cette résolution des deux mains. Merci.
M. Jean Rossiaud (Ve). Mesdames et Messieurs, les Verts ont signé et accepteront cette résolution. Le Conseil d'Etat doit évidemment intervenir pour éviter les délocalisations. L'importance de la Loterie romande a été soulignée et n'est plus à démontrer, je ne vais pas revenir sur le sujet.
Ce qui me préoccupe davantage, ce qui préoccupe davantage les Verts, c'est que la Loterie romande soit toujours plus autonome et donc toujours plus incontrôlable. Récemment, le Conseil d'Etat a donné son aval au projet de concordat intercantonal qui, à l'instar des autres concordats intercantonaux, est très antidémocratique. C'est une espèce d'aberration juridique, au fond, puisque aucun parlement cantonal ni même le Parlement fédéral ne s'autorise à intervenir dans le détail de ces accords. On l'a vu avec le concordat HES, par exemple: on explique aux parlements qu'ils doivent impérativement l'adopter afin de ne pas menacer une entreprise portée par tous les autres cantons, qu'ils ne peuvent rien changer sous peine que les acceptations par les autres cantons deviennent caduques. Il s'agit d'un déni de démocratie, et c'est ce qui me préoccupe le plus.
Naturellement, nous sommes très préoccupés par la délocalisation des emplois, mais aussi par le fait que des institutions d'intérêt public soient hors du contrôle démocratique et même d'un contrôle a posteriori. Les Verts vous demandent d'accepter cette résolution, et nous reviendrons sur la question du concordat à un autre moment. Je vous remercie.
M. Pierre Conne (PLR). Chères et chers collègues, le groupe libéral-radical votera la résolution pour rappeler que cette entreprise parapublique n'est justement pas une multinationale et qu'elle se présente elle-même comme un acteur important dans le développement socio-économique de Suisse romande. Pour le PLR, la Loterie romande doit faire preuve de cohérence entre ce qu'elle est et ce qu'elle fait, c'est-à-dire redistribuer l'intégralité de ses bénéfices à l'action publique.
S'agissant de la remarque de forme tout à fait pertinente émise tout à l'heure par notre collègue Jean-Marc Guinchard, il faut relever que la deuxième invite de cette résolution donne toute latitude au Conseil d'Etat pour intervenir également auprès des autres cantons romands, de manière à choisir la voie la plus efficace pour que ce texte aboutisse. Je vous remercie de votre attention.
M. Patrick Dimier (MCG). Monsieur le président, vous remercierez pour moi mon préopinant qui a exprimé l'essentiel de ce que je voulais dire. Je peux ainsi me concentrer sur un élément différent, l'histoire: la loterie a été créée par François Ier, et les Suisses devraient s'en souvenir, puisque c'était principalement pour financer ses guerres, notamment le mauvais épisode de Marignan. Il n'est pas question ici de refaire Marignan, il est au contraire question de l'éviter. Si, dans un premier temps, l'Europe craignait le plombier polonais, la preuve de la réussite à tout le moins économique de l'Europe, c'est qu'on n'a plus affaire au plombier polonais, mais à l'informaticien polonais; la question est désormais de savoir: à quand la roulette russe ?
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, je mets le texte aux voix.
Mise aux voix, la résolution 864 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 86 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Nous entamons maintenant notre dernière urgence, la R 867, qui est classée en catégorie II, trente minutes. La parole échoit à M. Wenger.
M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cette proposition de résolution vise une localisation équilibrée des activités de la RTS en Suisse romande. Il s'agit d'un texte interpartis qui a été signé par les socialistes, les Verts, Ensemble à Gauche, le PDC et le MCG - et nous ne désespérons pas de voir le PLR, voire l'UDC, se joindre à nous pour le soutenir.
Pourquoi une telle résolution ? Je vais rappeler quelques faits historiques. La télévision de service public est localisée à Genève depuis 1960, tandis que le téléjournal y est produit depuis 1981. Il faut insister sur la nécessité d'une décentralisation de la télévision et de la radio suisses romandes dans une confédération comme la nôtre, qui comporte plusieurs régions, plusieurs cantons, plusieurs langues: cela garantit non seulement l'adhésion de l'ensemble de la population au service public audiovisuel, mais également un traitement équitable de l'information dans les différentes régions.
Depuis quelques années, hélas, Genève vit une sorte d'hémorragie médiatique: on se souvient, même si c'était il y a un certain temps, de la disparition de «La Suisse», suivie de celle du «Journal de Genève»; plus récemment, la rédaction du «Temps» s'est déplacée à Lausanne alors qu'une partie importante de celle de la «Tribune de Genève» y a été délocalisée, pour reprendre le terme de la résolution précédente. Cette débâcle est extrêmement inquiétante à de nombreux égards.
Permettez-moi un peu de chauvinisme, Monsieur le président, en rappelant que Genève est la deuxième ville de notre pays et la première de Suisse romande, que Genève abrite le siège européen des Nations Unies ainsi que le siège mondial de l'Organisation mondiale de la santé, de l'Organisation mondiale du commerce et du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, que Genève, capitale des droits humains, est le siège du CICR. Je pourrais continuer comme ça longtemps...
M. Pierre Vanek. On ne s'en lasse pas !
M. Thomas Wenger. Alors puisqu'on ne s'en lasse pas, je vais encore citer des chiffres, Monsieur Vanek: Genève accueille... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...quelque 2700 conférences internationales et 3000 visites de chefs d'Etats, de ministres et de chefs de gouvernements par année, et compte plus de 40 000 fonctionnaires internationaux. Enfin, j'espère bien faire plaisir à M. Cuendet en précisant que Genève, c'est également une place financière et un centre économique reconnus à l'échelle internationale... (Commentaires.) Eh bien peut-être le PLR pourra-t-il se joindre à nous pour soutenir cette résolution ! C'est un carrefour scientifique grâce au CERN... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. Voilà, c'est terminé, Monsieur le député ! Je vous remercie et je passe immédiatement la parole à M. le député Thomas Bläsi. (Rires.)
Une voix. Il fait moins le malin !
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, lors de votre campagne contre l'initiative «No Billag», vous avez annoncé à la population que refuser «No Billag» reviendrait à conserver les emplois à Genève. Eh bien vous avez caressé le molosse dans le sens du poil, il s'est retourné et vous a mordu ! C'est de manière tout à fait désabusée que le groupe UDC s'abstiendra sur cette thématique, considérant que vous avez perdu tout moyen de pression sur la RTS. Merci, Monsieur le président.
Une voix. Bravo !
M. Guy Mettan (PDC). Les résolutions et motions sur les médias se suivent et se ressemblent, occupant régulièrement notre ordre du jour depuis une année: il y en a eu sur la «Tribune de Genève» puis sur «Le Matin», maintenant sur la RTS. Ces textes parlementaires sont similaires à la fois dans leur contenu - dramatique pour l'avenir des médias et de la presse en particulier - et dans leurs invites.
Dans le cas présent, il nous est proposé de maintenir un centre médiatique fort à Genève en matière d'audiovisuel, et on invite le Conseil d'Etat à tout mettre en oeuvre pour que ce soit le cas. Puisque j'ai moi-même lancé la discussion l'année dernière à propos de la «Tribune de Genève», le parti démocrate-chrétien va évidemment soutenir cette proposition aujourd'hui: en matière de médias, nous devons adopter une vision globale.
On peut toujours, comme l'UDC vient de le faire, reprocher tel ou tel comportement, telle ou telle erreur, tel ou tel acharnement de l'un ou l'autre média, mais il n'en demeure pas moins que c'est important pour une ville comme la nôtre de posséder un centre médiatique d'envergure, et il nous faut émettre un signal politique fort à ce niveau. Il ne s'agit pas d'agir contre la RTS ni contre tel ou tel éditeur; accepter cette résolution, c'est simplement suivre un principe d'action démocratique. Merci.
M. Pierre Eckert (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, chers collègues, Genève, village de pêcheurs au bord du lac de Lausanne, voilà le scénario élaboré par Tamedia dans le domaine des médias écrits - vous me direz, Monsieur le président, qu'il est normal pour une société privée telle que Tamedia de nourrir ses actionnaires, de privilégier la rentabilité par rapport au service public.
Or tel n'est pas le cas de la SSR qui accomplit un mandat de droit public, qui est financé par la redevance. Je rappelle, comme il a été dit tout à l'heure, que Genève a fortement contesté la fameuse initiative «No Billag» - dans les résultats de notre canton, l'opposition était importante - et nous sommes très déçus de voir que la SSR entend délocaliser une partie de ses activités à Lausanne. Je comprends bien qu'elle doit réaliser des économies, ainsi qu'elle l'a annoncé au moment de l'initiative «No Billag», mais je suis un peu perplexe quant à ce qu'elle est en train de faire.
Pendant cinquante ans, la SSR a opéré une séparation par média, implantant la radio à Lausanne et la télévision à Genève. D'ailleurs, je rappelle que le processus s'est terminé il n'y a pas très longtemps, et un certain nombre de bâtiments au boulevard Carl-Vogt ont été mis à disposition de l'Université de Genève. Maintenant, via la petite note qui nous a été transmise par la direction, on apprend que la SSR cherche plutôt à regrouper les secteurs par thématique, en plaçant l'ensemble de la division «Actualités» à Lausanne, donc changement de cap à 180 degrés !
Pour ma part, je trouve ça paradoxal: on veut par exemple supprimer la rédaction à Berne au profit de Zurich, alors qu'il s'agit justement d'un endroit où il se passe quelque chose dans le domaine de l'information, puisqu'on y trouve les autorités fédérales. La même chose pour Genève - M. Wenger l'a rappelé tout à l'heure - qui est quand même une capitale internationale; je ne parle pas des travaux de notre Conseil qui intéressent plutôt les médias locaux, mais pour la SSR, Genève en tant que capitale internationale devrait constituer un atout.
Alors je veux bien qu'on opère des regroupements selon les thématiques et qu'on place l'actualité à Lausanne, mais à ce moment-là, il faudrait garder d'autres choses ici, par exemple la culture sur tous les supports, radio, télévision, internet. Pour que nous puissions en discuter, je vous propose d'accepter la résolution proposée notamment par les Verts et de demander des éclaircissements à la SSR, car il faut qu'elle conserve un certain nombre d'activités à Genève.
M. François Baertschi (MCG). Le canton de Genève va-t-il se transformer en désert médiatique ? On se souvient encore de la disparition de «La Suisse», valeureux journal qui constituait un peu l'âme de Genève, suivie de celle du «Journal de Genève», puis ce fut le tour de la «Tribune de Genève» - je n'ai pas très bien compris la politique de ses éditeurs, mais disons que nous perdons aussi une partie de l'âme de Genève - et maintenant la télévision romande risque de ne plus être là, c'est une nouvelle portion de cette âme qui s'envole, sans parler des nombreux emplois dans notre canton.
Ce mécanisme destructeur, c'est celui de la mondialisation, d'une certaine façon, préfiguré par le triomphe du politiquement correct. Certains se rappelleront des débats homériques, les chroniques d'une Françoise Buffat dans la «Tribune de Genève» qui jouait un rôle éminemment politique et ne laissait personne indifférent. On se souvient d'une presse moins normée qu'elle ne l'est actuellement, qui avait sans doute de nombreux défauts, mais était bien plus vivante qu'elle ne l'est aujourd'hui. On va vers une destruction de l'âme de Genève, vers une «McDonaldisation» de notre société où tout se ressemble, où il n'existe plus de différences.
Ce qui est dramatique, c'est qu'on peut fabriquer des médias à l'autre bout de la Suisse, voire à l'étranger, on n'a même plus besoin de journalistes, on n'a plus besoin d'être humains. C'est l'autodestruction des médias, il faut absolument refuser ce massacre ! Or le déplacement de la télévision romande à Lausanne constitue un pas supplémentaire dans cette direction. En plus, ce ne sera même pas à Lausanne, mais à l'EPFL; pourquoi pas dans un laboratoire, tant qu'on y est, au milieu des bêtes d'expérimentation ? On placera quelques journalistes là, dans une cage, pour voir comment ils réfléchissent, comment ils travaillent ! Le groupe MCG refuse d'adhérer à ce type de société, Mesdames et Messieurs, et nous vous demandons de soutenir cette résolution avec enthousiasme.
Mme Simone de Montmollin (PLR). Monsieur le président, chers collègues, cette proposition de résolution invite le Conseil d'Etat à faire infléchir la stratégie de la RTS, notamment en lien avec la délocalisation de l'actualité. Or notre gouvernement a déjà donné sa position dans la presse par la voix de son président, nul doute qu'il poursuivra les discussions sans avoir besoin que notre Conseil l'y encourage.
Cela étant dit, le PLR se préoccupe également des conséquences que la centralisation des équipes à Lausanne ne manquera pas d'engendrer ici: possibles pertes de dynamisme dues à la délocalisation de forces vives, risques d'affaiblir un atout majeur pour la Genève internationale et la place économique. Quelles seront les contreparties à ce départ ? Des activités utiles et des emplois seront-ils conservés à Genève ? Pour l'heure, la direction de la RTS est assez vague, elle parle d'y développer la production culturelle et le divertissement - les fictions, par exemple - une stratégie qui n'est ma foi pas de nature à nous rassurer ni à nous convaincre.
Toutefois, nous devons reconnaître le contexte difficile dans lequel se trouve la SSR aujourd'hui: ces décisions interviennent alors que la branche des médias subit une transformation en profondeur, une mutation engendrée non seulement par la révolution numérique qui nécessite de se pencher sur les infrastructures technologiques et l'organisation du travail, mais aussi et surtout par l'initiative «No Billag» qui a conduit à une perte substantielle de la redevance - elle plafonne désormais à 1,2 milliard au lieu du 1,6 milliard précédemment octroyé.
Ces 400 millions font toute la différence, Mesdames et Messieurs: la situation économique impose désormais à la SSR des économies à hauteur de 100 millions par année jusqu'en 2024. Elle n'avait donc d'autre choix que de prendre des mesures drastiques, tout en poursuivant sa réorientation de fond, à savoir innover pour s'adapter à l'évolution des attentes et des technologies. Elle essaie de le faire sans couper dans les programmes et en limitant l'impact sur les emplois; elle doit le faire, selon nous, en garantissant que des développements attractifs seront réalisés à Genève, et le PLR y sera attentif. Pour l'heure, voter cette résolution ne modifiera en rien cet état de fait, et c'est la raison pour laquelle le PLR ne la soutiendra pas.
Le président. Merci, Madame la députée. Je cède à nouveau la parole à M. Wenger qui prend sur le temps de son groupe.
M. Thomas Wenger (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, dans mon exercice de nombrilisme genevois tout à l'heure, j'ai quelque peu perdu la notion du temps - ce qui me permet une transition pour vous vanter l'excellence de notre horlogerie et du tissu économique de notre canton ! (L'orateur rit.)
Une voix. Va à l'essentiel !
M. Thomas Wenger. Bon, je vais poursuivre mon intervention: je parlais du carrefour scientifique que représente notre canton avec le CERN, l'université, l'ensemble des entreprises qui travaillent dans les nouvelles technologies - biotechs, medtechs, cleantechs, ça fait beaucoup de «techs» ! Mais Genève est aussi une ville de culture, avec ses nombreux musées, ses théâtres, son opéra magnifique, et organise beaucoup d'expositions, de manifestations, également dans le domaine sportif. Voilà, j'ai terminé mon apologie chauvine de Genève.
Maintenant, comme mon collègue des Verts l'a dit, il est important que la division «Actualités» de la RTS reste à Genève, parce qu'il y a énormément de choses à dire sur tout ce qui se passe dans la région. En effet, Genève se situe au coeur d'une métropole de plus d'un million d'habitants qui englobe une partie du canton de Vaud et de la France voisine - on parle de métropole lémanique - et il est fondamental que nous conservions l'information.
C'est pourquoi nous demandons à l'ensemble des groupes de soutenir cette résolution. J'ai bien entendu l'intervention de ma collègue PLR, mais nous aimerions vraiment que le PLR et l'UDC nous rejoignent afin que tous les partis fassent front ensemble. La SSR doit maintenir la division «Actualités» à Genève. Merci beaucoup.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, le plan de délocalisation de la division «Actualités» présenté par la RTS le 19 septembre dernier s'inscrit dans un contexte de réorganisation et de mutation des médias particulièrement alarmant. Depuis quelques années, nous sommes confrontés à un affaiblissement général de la presse qui se manifeste plus spécifiquement en Suisse romande.
Ce phénomène constitue un danger majeur pour la libre formation de l'opinion et les libertés démocratiques; divers titres en ont payé le prix fort. Le métier de journaliste offre désormais peu de perspectives, et nombreux sont les professionnels de la branche à adopter d'autres champs d'activité. Recul des rentrées publicitaires, restructurations, concentration des rédactions, licenciements sont foison. Partout, le journalisme est en danger, notamment en Suisse romande. L'uniformisation qui résulte de la concentration des rédactions met en péril le journalisme d'investigation, la pluralité et la diversité de l'information. Or de l'avis des spécialistes, la décentralisation des activités de la RTS est nécessaire dans notre paysage confédéral, car elle permet une adhésion identitaire.
Face à l'érosion de ce service public fondamental que constitue la presse - dont le rôle est inscrit dans notre Constitution, je vous le rappelle - et devant cette nouvelle offensive, le parlement doit prendre clairement position et défendre cet instrument indispensable à l'exercice de la démocratie. C'est pourquoi nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à soutenir la résolution 867 afin que, comme le requièrent les invites, la RTS renonce au transfert de la division «Actualités» de Genève à Lausanne et que la décentralisation actuelle de ses activités soit maintenue. Je vous remercie de votre attention.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat partage votre préoccupation, il l'a même anticipée, vous le savez, en intervenant immédiatement lors de l'annonce du déplacement partiel de l'information à Lausanne. Notre gouvernement s'est énergiquement engagé contre l'initiative «No Billag», il en serait aujourd'hui bien mal récompensé, et je comprends évidemment les frustrations et l'amertume exprimées dans cette salle. Je ne voudrais pas sombrer dans l'autosatisfaction genevo-genevoise: tout discours visant à glorifier Genève pourrait être compris de l'autre côté de la Versoix comme une manière de déprécier Lausanne. Néanmoins, Genève est Genève, et je pense que tout propos supplémentaire est superflu. Je vous remercie. (Rires.)
Une voix. Bravo !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat, et je lance le vote sur cette proposition de résolution.
Mise aux voix, la résolution 867 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 57 oui contre 25 non et 8 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous continuons avec l'ordre du jour en passant au PL 12170-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Le rapporteur de minorité, M. Jean-François Girardet, est remplacé par M. Jean-Marie Voumard. Je passe la parole à Mme Simone de Montmollin.
Mme Simone de Montmollin (PLR), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, adopté par 11 voix contre 3 et 1 abstention, ce projet de loi est central pour la république ! Il propose une modification très minime, mais utile, de la loi sur l'administration des communes, afin d'alléger les communes d'une des tâches administratives assumées par elles lors de la nomination ou de la mutation d'officiers de sapeurs-pompiers volontaires. Actuellement, l'article 30A prévoit un rôle consultatif des Conseils municipaux lors de la nomination ou de la mutation d'officiers, indépendamment de la fonction de ceux-ci. Ce projet de loi propose de limiter cette voix consultative à la nomination des chefs de corps et de l'abroger pour les autres officiers, sauf en Ville de Genève, où les pratiques diffèrent.
Pourquoi supprimer cette prérogative ? Plusieurs arguments ont été évoqués. Il arrive très souvent que, vu le calendrier des séances du Conseil municipal, ses préavis interviennent après que l'exécutif a donné son accord. Par ailleurs, de mémoire de l'auteur du projet de loi, aucun cas d'une éventuelle divergence entre le Conseil municipal et l'exécutif n'a pu être rapporté. Troisièmement, il existe des mutations obligatoires soumises à des réglementations séparées, comme les départs à la retraite, qui ne peuvent souffrir aucune exception: il n'y a donc pas de préavis à donner dans ces cas-là. Enfin, dans les communes de taille moyenne à grande, le Conseil municipal n'a pas toujours une vision globale de la fonction ou de la personne: ainsi, la valeur ajoutée d'un préavis n'est que marginale, tant pour l'entité qui le donne que pour celle qui le reçoit. Tous les auditionnés - tant l'Association des communes genevoises que le département - sont favorables à cette modification, qui ne constitue pas en soi une révolution, mais bien une amélioration de la fluidité des processus dans les communes.
La minorité qui refuse cette modification explique que ce projet de loi traduit une méconnaissance des liens qui unissent la population aux sapeurs-pompiers volontaires et que maintenir cette pratique permettrait à la population de rester informée. Il nous semble qu'il y a d'autres occasions plus concrètes pour tisser des liens avec les sapeurs-pompiers: certaines manifestations, par exemple, en sont le témoin. Le rapport de minorité dit aussi que supprimer le préavis représenterait un déni démocratique qui irait à l'encontre de la valorisation du rôle des Conseils municipaux. Il nous semble que valoriser ceux-ci est en effet nécessaire, mais qu'ils seraient mieux valorisés avec de vraies prérogatives, celle-ci n'en constituant pas vraiment une. Tous les auditionnés l'ont confirmé, parmi lesquels le vice-président de la Fédération genevoise des sapeurs-pompiers: les Conseils municipaux ne seront pas lésés par l'acceptation de ce projet de loi, que la majorité vous encourage à soutenir. Je vous remercie.
M. Jean-Marie Voumard (MCG), rapporteur de minorité ad interim. J'aimerais rectifier ce qui vient d'être dit: le vice-président de la Fédération genevoise des sapeurs-pompiers a indiqué qu'il n'avait d'argument ni en faveur ni en défaveur de ce projet de loi.
Mme Simone de Montmollin. Qui ne dit mot consent !
M. Jean-Marie Voumard. Voilà ! En son article 134, la constitution parle de participation - je me permets de vous lire l'article: «Les communes encouragent la population à participer à l'élaboration de la planification et des décisions communales. Les autorités en rendent compte dans la motivation de leurs décisions.» Le premier représentant de la population d'une commune est quand même le Conseil municipal ! C'est en priorité par son canal que la population est informée et qu'elle peut participer aux décisions communales, notamment, en l'occurrence, la présentation des nominations des officiers de la compagnie des sapeurs-pompiers volontaires. Des efforts considérables sont consentis par les communes en matière de sécurité, en particulier pour les véhicules du feu, et il nous semble prioritaire de rendre du sens aux dépenses publiques distribuées pour cela. Par conséquent, le groupe MCG vous demande de refuser ce projet de loi et de maintenir le statu quo.
Mme Delphine Bachmann (PDC). Le parti démocrate-chrétien ira dans le sens de la rapporteure de majorité: après les différentes auditions menées, il s'avère qu'il s'agit avant tout d'une simplification administrative et fonctionnelle pour les communes. Je suis apparemment souvent d'accord avec M. Wicky, aujourd'hui ! Je le remercie pour sa proposition. Nous allons dans le sens qui est le nôtre habituellement: nous soutenons les communes quand nous le pouvons. Nous accepterons donc ce projet de loi.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce parlement marche sur la tête ! Lorsque nous discutions tout à l'heure des patrouilleurs et patrouilleuses scolaires, on se plaignait que certaines communes avaient des difficultés à en trouver. Maintenant, parce que, semble-t-il - en tout cas, c'est ce que dit le rapport - une commune a dit qu'elle avait des difficultés, que ça lui compliquait la tâche, qu'il conviendrait de supprimer cette prérogative, ce projet de loi prévoit de supprimer des compétences aux communes ! C'est ça que vous voulez ? Je rappelle que parmi les communes de tous les cantons suisses, les communes genevoises sont celles qui ont le moins de pouvoir ! C'est incontestable, elles n'ont pas grand-chose à dire. Leurs parlements ne sont pas vraiment des parlements, ce ne sont que des organes délibératifs. (Remarque.) Vous voulez encore enlever un petit bout de leurs prérogatives.
Je crois qu'on ne se montre pas rationnel ! En quoi est-ce compliqué de devoir passer devant le Conseil municipal pour recueillir ce préavis concernant les pompiers volontaires ? Ce n'est rien du tout ! Ça prend quelques minutes ! On va dans la mauvaise direction. A Genève, il faut plutôt donner aux communes des pouvoirs supérieurs à ceux qu'elles ont aujourd'hui. Or, ce projet de loi inutile vise à leur enlever encore un peu de pouvoir. Laissons-les quand même un peu décider de leur destin. Les sapeurs-pompiers volontaires représentent un lien entre le Conseil municipal, l'exécutif et la population. Je ne vois pas en quoi on va gagner du temps avec cette modification, c'est une erreur; les tâches administratives qu'on veut supprimer sont extrêmement minimes. Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à rejeter ce projet de loi totalement inutile.
M. Raymond Wicky (PLR). Je ne peux pas être d'accord avec l'opinion que mon projet de loi est totalement inutile, vous le comprendrez bien ! J'aimerais tout d'abord remercier ma collègue du PDC, qui a expliqué que le but est fort simple et consiste à alléger les choses du point de vue administratif. Pourquoi ? Tout simplement parce que la formulation actuelle de la loi sur l'administration des communes contient une différence de traitement relativement importante entre la Ville de Genève et les communes. A Genève - vous n'ignorez pas que je suis bien placé pour le savoir - je faisais à peu près ce que je voulais en compagnie du magistrat de tutelle... (Exclamations. Rire. Remarque.)
M. Daniel Sormanni. C'est quoi, ce boulot !
M. Raymond Wicky. Cher collègue, je ne vous ai pas interrompu; si vous aviez la politesse d'en faire de même, ce serait fort sympathique, merci. Comme je le disais, nous faisions cela en concertation avec le magistrat de tutelle alors que dans les communes, on soumet les nominations ou mutations au Conseil municipal pour un préavis qui n'est pas contraignant ! «Etes-vous d'accord que tel ou tel parte à la retraite ?», par exemple, alors que c'est fixé par voie réglementaire ! C'est une perte de temps totalement inutile que d'aller demander un préavis qui n'est pas contraignant; on ne peut pas aller contre les règles en usage. C'est là un premier élément.
Une deuxième chose m'a paru importante quand j'ai rédigé ce texte: laisser une fonction à l'appréciation directe du Conseil municipal, celle des commandants de compagnie. L'expérience nous a appris que dans certaines communes, la nomination du commandant de compagnie pouvait prendre une tournure éminemment politique. Il ne s'agit donc pas de retirer des compétences aux communes, compétences qu'elles n'ont d'ailleurs pas, puisque c'est réglé par voie réglementaire. Il s'agit simplement d'éviter des passages inutiles devant le Conseil municipal. Il y a plusieurs magistrats municipaux dans la salle, ils savent très bien que lors de nominations de sapeurs-pompiers volontaires aux postes d'officiers, il faut déjà trouver les gens, ce qui n'est déjà pas facile; ensuite, ça se règle en principe entre le commandant de compagnie et le magistrat de tutelle, après quoi on transmet une information au Conseil municipal, qui ne va pas refuser des propositions de nominations, car de toute façon, les conseillers municipaux ne vont pas prendre la place des intéressés !
Fort de ces considérations, je vous invite à voter ce projet de loi modeste, certes, mais qui permettra d'éviter quelques tâches administratives; on en parle tous les jours, chaque fois que nous siégeons ici: si on peut alléger, allégeons. Merci de votre attention.
M. Philippe Poget (Ve). Mesdames et Messieurs, chers collègues, la position des Verts est la même que celle du rapport de majorité. Ce projet de loi certes modeste a été adopté très clairement par la majorité de la commission. En effet, il va retirer une prérogative aux Conseils municipaux - sauf en Ville de Genève - mais cette prérogative n'est que consultative. A mon sens, contrairement à ce qu'ont prétendu certains de nos collègues, il n'aboutira pas à une démotivation des conseillers municipaux ou à un désintérêt pour la fonction de sapeur-pompier volontaire. L'allégement administratif qu'on avance ne sera pas très important: cette tâche occupe les conseillers municipaux peut-être quelques minutes par année, mais en même temps, le maintien de ce préavis consultatif n'apporte pas grand-chose, et certainement pas une plus-value, à leur noble fonction. Si on voulait revaloriser les conseillers municipaux, il faudrait plutôt leur octroyer d'autres prérogatives que celle-là. C'est bien la confirmation de la nomination du chef de corps qui doit rester de la compétence du Conseil municipal: celui-ci est directement placé sous l'autorité du conseiller administratif concerné ou du maire, et c'est lui qui doit être reconnu par le Conseil municipal, puisque c'est lui qui représente le lien entre le politique et la population. Comme M. Wicky l'a très bien dit, les autres fonctions relèvent de l'organisation interne et de directives. Les Verts vous invitent donc à accepter ce projet de loi.
M. Eric Leyvraz (UDC). Soyons brefs: tous les acteurs impliqués sont d'accord concernant cette simplification administrative. L'UDC acceptera ce projet de loi.
M. Alberto Velasco (S). Tout a été dit, je ne vais pas en rajouter. Considérant, Monsieur le président, que ce projet de loi ne changera pas les destinées de notre république - loin de là - nous allons l'accepter.
M. Thierry Cerutti (MCG). Tout d'abord, comparaison n'est pas raison. M. Raymond Wicky évoque les pompiers de la Ville de Genève: ce sont des professionnels, salariés; ils ont un système clairement différent de celui des autres communes. Je vous rappelle qu'on parle ici de pompiers volontaires: ils ne sont pas salariés, ils touchent une prime, un dédommagement. Le système et le fonctionnement en Ville de Genève n'ont rien à voir avec ceux des communes. C'est le premier élément.
Deuxièmement, bien sûr que c'est éminemment politique ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) On est d'accord de garder aux Conseils municipaux la prérogative du préavis consultatif sur la nomination du commandant, mais pas sur celle des officiers. Mais je vous rappelle juste que les officiers placés en dessous du commandant sont potentiellement les futurs commandants ! C'est important que les Conseils municipaux puissent donner leur avis, parce que justement, il y a un enjeu politique, il y a un enjeu de proximité, et aussi d'amitié, émotionnel.
Le président. C'est terminé !
M. Thierry Cerutti. Une fois de plus, on veut dénigrer et dévaloriser la fonction de conseiller municipal; c'est scandaleux, nous dénonçons cela.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Raymond Wicky pour une minute douze.
M. Raymond Wicky (PLR). Merci, Monsieur le président, ce sera largement suffisant. Excusez-moi, cher collègue, mais j'observe une méconnaissance crasse de l'organisation ! En définitive, en Ville de Genève, le SIS est responsable à la fois des professionnels et des volontaires. La seule différence, et pardonnez-moi de prolonger ma prise de parole, est que le principe de la nomination est différent: les officiers professionnels sont nommés par le Conseil d'Etat alors que les officiers volontaires le sont par le chef de département. Dans les deux cas, cela se fait sur proposition du magistrat concerné, qui règle ces propositions en compagnie du Conseil administratif, comme je l'ai dit auparavant. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie. Nous passons au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12170 est adopté en premier débat par 66 oui contre 15 non.
Le projet de loi 12170 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 12170 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 68 oui contre 16 non.
Débat
Le président. Nous passons à l'objet suivant, classé en catégorie II, quarante minutes de temps de parole. Le rapport de minorité est de M. Bernhard Riedweg, remplacé par M. Marc Fuhrmann. Sitôt que M. Velasco la demandera, je lui donnerai la parole. (Commentaires.) Voilà, vous avez la parole, Monsieur le rapporteur.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, je tiens à relever que cette proposition de motion a été extrêmement bien rédigée par notre ancienne collègue, Mme Meissner. La commission a fait un travail très intéressant en auditionnant plusieurs entités, ce qui nous a permis de répondre aux questions soulevées par cet objet qui faisait suite à l'affaire Adeline. Si on revient à ses invites, la motion demandait de renégocier les conditions de détention dans les cantons romands dans le cadre du concordat latin, en particulier de mettre fin définitivement aux sorties éducatives pour les criminels violents, sexuels ou dangereux pour la société. Elément très délicat, c'est là-dessus que les débats ont donc porté.
Comme vous le savez, la réinsertion de ces criminels est éminemment importante; on sait très bien que si ces criminels - qui doivent un jour sortir de détention - ne sont pas réinsérés comme il se doit, il y a une augmentation du risque de récidive. Quels que soient les crimes commis, ces personnes sont condamnées à un certain nombre d'années de prison, mais avec l'espoir de sortir un jour et de se réinsérer. Si on supprime ces possibilités, si on ne laisse aucune possibilité à ces détenus de se réinsérer un jour dans la société, il est prouvé par les statistiques qu'ils vont récidiver. Il en va de même pour les conditions de détention: si la personne en prison a très peu d'espoir de sortir, elle devient presque folle. Vous savez que les prisons sont construites en laissant croire aux détenus qu'il y a une possibilité de s'en échapper. Voilà, il y a donc eu débat et les travaux de la commission ont abouti au refus de cette motion.
M. Marc Fuhrmann (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, certains éléments de cette proposition de motion restent entièrement d'actualité dans le cadre du concordat romand qui nous voit accueillir un certain nombre de ces prisonniers par définition dangereux pour la société ou ayant commis des crimes sexuels. Il n'y a pas de vision commune pour définir la dangerosité des criminels; chaque canton a sa pratique et sa compréhension de la question. Nous qui recevons à Genève certains de ces criminels d'autres cantons, nous appliquons notre propre règle, quitte à les remettre dans la rue, dans le cadre de ces mesures de réinsertion, avec l'éventualité qu'ils sévissent à nouveau. La motion demande qu'on ait un format commun ou en tout cas une certaine compréhension commune entre cantons. Remettre dans les rues chez nous, à Genève, une proportion plus élevée de ce type de criminels dangereux n'est certainement pas l'objectif.
Un autre élément de cette motion était lié aux coûts. Evidemment, nous recevons un certain montant pour nous occuper de ces prisonniers, mais il faut savoir aussi que Genève dépense beaucoup plus pour ces mesures dites de réinsertion. On peut penser à l'épisode tragique des cours d'équitation qui s'est très mal terminé. Chez nous, cela est facturé beaucoup plus cher que ce que le canton touche comme contrepartie pour ces mesures-là. Nous estimons donc globalement que cette motion a toujours sa raison d'être. Du travail doit bien sûr être accompli, l'objectif n'est pas qu'il n'y ait aucune préparation à la sortie de prison, mais il faut revoir la portée, l'ampleur et, surtout, les coûts de cette préparation.
M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, j'attire votre attention sur le fait que le titre de cet objet est trompeur. Sous couvert de vouloir uniformiser les pratiques romandes, ce qui en soi pourrait constituer un but louable, l'objectif des motionnaires est en réalité bel et bien d'interdire les sorties. Je vous invite à relire les invites de la motion qui visent expressément - en tout cas l'une d'entre elles - à mettre un terme à toutes sorties pour les délinquants dangereux ou sexuels. Ça, c'est le premier problème.
Le deuxième problème est que cette motion est en réalité incompatible avec le droit supérieur, avec le droit fédéral. Je vous rappelle que l'article 84 du code pénal - que beaucoup d'entre nous n'ont jamais lu - oblige les cantons à prévoir des congés et des sorties. Cet article 84 prévoit que «des congés d'une longueur appropriée sont accordés au détenu». Pourquoi ? «Pour lui permettre d'entretenir des relations avec le monde extérieur, de préparer sa libération [...]» Tout cela, bien sûr, pour autant que le détenu ne soit pas dangereux ou que son comportement en détention ne s'y oppose pas. Pourquoi est-ce que le droit fédéral prévoit cela ? Parce qu'il faut à tout prix éviter ce qu'on appelle les sorties sèches, à savoir qu'un détenu, après avoir passé un certain nombre d'années en prison, coupé de la société, de sa famille et du monde du travail, soit mis sur le trottoir et doive se débrouiller tout seul. La sortie sèche conduit à la récidive, et c'est ce qu'on veut éviter ! On ne peut pas revenir sur le crime commis dans le passé: on peut seulement le déplorer et le regretter, on peut avoir de la compassion pour les victimes, mais ce qu'il faut, c'est éviter à tout prix la récidive, faire tous les efforts possibles pour l'éviter !
Pour empêcher la récidive, il faut un passage progressif de la prison à la liberté, et le système suisse est assez bien conçu, il faut l'admettre, puisqu'il prévoit toute une évolution, une progression, avec d'abord une détention en lieu fermé, puis un passage vers un milieu ouvert, avec des sorties régulières pour permettre au détenu de voir sa famille, d'entretenir des contacts sociaux. Ensuite, on a le travail externe, la libération conditionnelle, et tout à la fin, la libération définitive. Les sorties jouent un rôle essentiel puisque le juge examine ce qui s'est passé pendant celles-ci, comment le délinquant s'est comporté, afin de voir s'il est possible de passer à l'étape suivante et si, finalement, le détenu pourra être libéré conditionnellement. Tout ça a un coût, certes, mais cela permet surtout d'économiser beaucoup d'argent: si un délinquant peut effectuer un travail externe, ça permettra de faire en sorte qu'il dépende moins de l'aide sociale. Surtout, si un détenu peut bénéficier de la libération conditionnelle, il ne sera plus à la charge de l'Etat pendant un tiers de sa peine. Je vous rappelle qu'un prisonnier détenu en milieu fermé coûte des centaines de francs par jour ! On estime que c'est environ 400 F par jour à Genève. C'est donc à la fois bien pour le détenu et bien pour la société, parce que la liberté conditionnelle nous protège tous contre la récidive des délinquants. C'est bien pour les finances de l'Etat, parce que ça diminue le coût que nous fait supporter le système carcéral. Il faut donc à tout prix éviter de céder à l'instrumentalisation de la douleur des victimes, parce que c'est bien ça, en réalité, que vise cette motion.
Puisqu'il me reste trente secondes, je souligne encore que cette motion est très imprécise puisqu'elle invite le Conseil d'Etat à mettre fin aux sorties «pour les criminels violents, sexuels ou dangereux». Je vous rappelle qu'un délinquant sexuel, ça peut être un homme - un garçon - de 19 ans qui a eu des relations sexuelles avec une fille consentante de 15 ans. Ce serait déjà un délinquant sexuel. Avec cette motion, il n'y aurait plus de sorties possibles, alors qu'il ne s'agit pas de quelqu'un de particulièrement dangereux. Et qu'est-ce qu'un délinquant dangereux ? Est-ce quelqu'un qui a roulé trop vite en voiture et qui est mis en prison ? Est-ce qu'on devrait condamner cette personne à une peine sans libération conditionnelle possible ? Bien sûr que non ! Il y a ici une imprécision qui n'est pas tolérable et une telle motion doit finir dans la poubelle.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens tout d'abord à remercier M. Velasco qui a parfaitement résumé son excellent rapport. Je ne vais pas revenir dessus, M. Bayenet a aussi rappelé l'essentiel. Par contre, le parti démocrate-chrétien veut appuyer le refus de cette motion qui date de 2013. Depuis, la CEP a rendu son rapport, qui a été commenté. Curabilis est opérationnel, avec des ajustements qui interviendront continuellement; le département a pris des mesures qui, elles aussi, seront adaptées régulièrement. Le parti démocrate-chrétien est particulièrement convaincu que la sociothérapie et les sorties éducatives resteront indispensables pour que les personnes réintégrables dans notre société puissent éviter la récidive. Cette motion n'a donc plus sa raison d'être; peut-être qu'elle n'a jamais eu de raison d'être, sauf au prétexte des émotions justifiées par le drame que nous avons cité. C'est pourquoi le parti démocrate-chrétien la refusera.
M. Alexandre de Senarclens (PLR). Le PLR considère que cette motion est arrivée à un moment d'émotion, suite au drame d'Adeline, comme l'a très bien dit la députée von Arx-Vernon. Les choses ont beaucoup changé depuis lors et cette motion est devenue sans objet. Il y a eu l'harmonisation du 31 octobre 2013 voulue par la conférence latine des directeurs de justice et police. Le département de la sécurité a anticipé et répondu aux invites et une confiance réciproque a été instaurée entre les cantons en développant une pratique univoque et similaire, pour que les cas soient traités de la même manière dans chaque canton.
Pour ce qui est de l'autre invite demandant de mettre fin aux sorties éducatives pour les criminels, il faut savoir qu'elle est, dans les faits, illégale. Nous avons un code pénal qui prône la réinsertion. La prison, c'est pour punir, évidemment, mais c'est également pour amender, pour améliorer le criminel et pour le préparer à sa sortie qui survient un jour ou l'autre. Cette invite n'est pas réaliste, n'est pas légale et n'est pas souhaitable. Pour ces motifs, le PLR refusera cette proposition de motion.
M. François Baertschi (MCG). Monsieur le président, cette proposition de motion est intéressante, elle met en avant une problématique, celle des criminels dangereux et du laxisme de notre société, comme on l'a vu avec l'affaire Adeline qui a été un véritable révélateur. Evidemment, il faut aller dans la direction d'une meilleure écoute des victimes; il faut mieux les protéger pour aller dans le sens d'un plus grand respect de notre vie en société; il faut édicter des règles plus nettes, avec plus de vigueur que ce qu'on a fait pendant toutes ces années. Tout ça, c'est quelque chose d'important, c'est quelque chose qui nous pousserait à accepter cette motion, malheureusement. Il est certain qu'on empiète sur le travail du juge: est-ce à nous, législateurs, d'intervenir et de dire au Conseil d'Etat qu'il doit agir d'une manière, qu'il doit faire ceci ou cela, qu'il doit intervenir et contraindre le pouvoir judiciaire ? On arrive ici à la limite de ce que constitue notre travail. Dans ces conditions, le groupe MCG s'abstiendra, parce qu'il y a un réel problème qu'il ne faut pas nier; il y a une réelle difficulté, mais ce qui est exigé n'est pas réalisable. Il faudrait le demander d'une manière différente pour aller dans la même direction, nous nous abstiendrons donc.
Mme Marion Sobanek (S). Monsieur le président, cette proposition de motion a été déposée sous le coup de l'émotion causée par l'affaire tragique survenue à la Pâquerette. C'est terrible de le dire, mais on ne peut pas éviter certains drames; je le dis avec beaucoup de compassion pour les victimes, mais on ne peut pas avoir une sécurité absolue car on ne sait pas comment les gens réagissent. Depuis, ce qu'il était possible de faire légalement a été accompli. Comme mes préopinants l'ont très bien expliqué, une partie des demandes de cette motion n'a pas pu être réalisée.
J'aimerais ajouter à cela que l'article 75 du code pénal stipule que le but de la détention est aussi la réhabilitation: chaque détenu, que ce soit dans le cadre d'une peine ou de mesures, a le droit à une certaine réinsertion. En principe, à la fin, une sortie survient et il serait préférable que la personne qui sort de prison, qui devient un jour notre voisin, soit quelqu'un en qui on peut de nouveau avoir confiance. Bien sûr, les récidives existent, mais elles surviennent plus fréquemment dans des pays où les peines sont encore plus dures que chez nous. Par contre, dans des pays comme la Hollande, qui investissent énormément dans l'éducation, qui travaillent avec le détenu, le taux de récidive est étonnamment plus bas. Si des peines très dures empêchaient un délinquant de commettre des méfaits, ça se saurait et le monde entier aurait le même code. Or, ce n'est pas du tout le cas.
A Genève, c'est le SAPEM qui évalue les possibilités de sorties. On ne peut donc pas interdire les sorties des détenus. Notre collègue Me Bayenet en a très bien expliqué la fonction. Maintenant, si nous voulons que ces sorties aient lieu, il faut qu'il y ait une évaluation. Malheureusement, au moment où l'on parle d'une harmonisation entre les cantons, on ne prend d'habitude pas le «top» des mesures, on uniformise souvent vers le bas. Genève a été à la pointe de la réinsertion en Suisse, grâce au formidable travail du professeur Bernheim à qui je rends hommage ici. Actuellement, nous avons un peu reculé dans notre travail, mais il ne faudrait pas reculer davantage. Ce type de motion n'a pour moi plus de sens et il faut la refuser.
Mme Paloma Tschudi (Ve). Les Verts refuseront cette motion. Nous nous sommes exprimés à plusieurs reprises sur la nécessité de réfléchir à de meilleures méthodes de réinsertion et nous encourageons donc les soins thérapeutiques et les sorties éducatives. Comme l'a dit ma préopinante, il est primordial que les détenus amenés un jour à sortir puissent bénéficier de ces mesures afin d'être accompagnés dans le processus de libération. De plus, comme d'autres députés l'ont relevé, nous avons pu constater que de nombreuses mesures ont été mises en place depuis le tragique drame qu'a connu notre canton.
Je souhaiterais encore souligner que, lorsque l'auteure de ce texte l'a déposé, sa motivation première venait de sa volonté de pouvoir se sentir en sécurité en tant que femme. Je pense que pour permettre aux femmes - et donc à l'auteure de ce texte - de se sentir en sécurité dans les rues de Genève, il serait peut-être plus judicieux de voter enfin des lois qui rappellent à la population que les femmes sont bien les égales des hommes !
Mme Christina Meissner (PDC), députée suppléante. Eh oui, j'avais déposé cette motion le 27 septembre 2013: ça fait bien longtemps ! A cette époque, elle faisait sens, dans le contexte de l'affaire Adeline. Les questions qu'elle posait méritaient des réponses. Les propositions faites auraient certes pu être modifiées pour ne pas enfreindre le code pénal. Enfin, voilà, du temps a passé et nous nous retrouvons cinq ans plus tard ! Heureusement, la révision et l'uniformisation des pratiques concordataires ont été accomplies entre-temps. On peut remercier les gouvernements cantonaux respectifs d'avoir travaillé plus vite que notre parlement. Aujourd'hui, cinq ans plus tard, je ne peux que remercier les rapporteurs de majorité et de minorité pour leur retenue ainsi que mes collègues pour leurs interventions et dire, ma foi, que cette motion n'a effectivement plus lieu d'être.
M. Thomas Bläsi (UDC). En dehors de la déclaration du Conseil d'Etat qui a affirmé avoir déjà appliqué toutes les recommandations préconisées par le rapport de la commission d'enquête parlementaire, rien ne nous permet de le confirmer si ce n'est une confiance béate. La commission de contrôle de gestion ayant été chargée de ce travail de vérification, il conviendrait d'attendre ses résultats avant de rejeter cette motion. Les derniers événements connus et publics qui se sont déroulés à Curabilis plaideraient également dans le sens d'attendre le résultat du travail de la commission, pour savoir si, effectivement, ses recommandations sont appliquées ou non. Donc, par souci de cohérence, le groupe UDC vous demande le renvoi de cette proposition de motion à la commission de contrôle de gestion pour lier ces points.
M. Marc Fuhrmann (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Monsieur le président, je voulais juste terminer avec la vision de la minorité sur cette motion. En gros, un élément clé était de réduire les risques pour la population lors des sorties des criminels violents, sexuels ou dangereux. Evidemment, la définition précise de ce qui est considéré comme violent ou dangereux reste à établir, mais, en soi, l'esprit de cette motion était que la société et ses membres les plus faibles ne subissent pas les risques de dérapage de ces criminels. Les exemples récents et moins récents sont tout aussi dramatiques qu'inacceptables; ils ne doivent plus arriver à l'avenir !
Le deuxième élément portait sur les coûts de ces mesures. Là aussi, je pense qu'il y a clairement du travail à faire par rapport au prix de ce qui est dépensé pour ces cours de réinsertion ou ces activités. On pense toujours à l'équitation, je crois que ça va nous rester dans l'esprit encore un bon moment, alors qu'une grande partie de notre population genevoise ne verra jamais l'échine d'un cheval ! C'est pour ça qu'il faut malgré tout accepter cette motion.
Le président. Merci, Monsieur. M. Bläsi demande un renvoi à la commission de contrôle de gestion, que je vous ferai voter juste après l'intervention de M. Velasco à qui je passe la parole.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, il faut d'abord relever que cette proposition de motion a permis de répondre à un certain nombre de questions qui se posaient non seulement au sein de la commission, mais aussi parmi les citoyennes et citoyens. Cela donnait la possibilité au Conseil d'Etat d'apporter un éclairage sur les travaux effectués, de faire une mise au point sur les procédures et les recommandations. Un élément fondamental est ressorti quand même: cette motion est contraire au droit fédéral. Alors quand mon collègue parle d'envoyer cette motion à la commission de contrôle de gestion... Par principe, cette motion est contraire au droit fédéral ! M. Bayenet l'a relevé, d'autres aussi. Je vous recommande donc de ne pas la renvoyer à cette commission.
Ensuite - je finirai par là - pour répondre au rapporteur de minorité, le coût d'un détenu en prison est de 300 F par jour ! On a donc non seulement tout avantage à maintenir un détenu le moins longtemps en prison, mais surtout à faire en sorte qu'il ne revienne pas en prison après en être sorti ! Parce que chaque fois qu'il y a récidive, ça coûte cher au détenu et à la société. Cette motion voulant éviter les sorties et empêcher la réinsertion contrevient à ce principe. Nous vous demandons, au nom de la commission et de la majorité, de la refuser.
Le président. Je vous remercie. Je lance le vote sur la demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2176 à la commission de contrôle de gestion est rejeté par 81 non contre 7 oui et 2 abstentions.
Le président. Je passe maintenant la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Je remercie Mme la première signataire de la motion d'avoir indiqué que celle-ci n'était plus d'actualité. C'est vrai, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et, surtout, beaucoup de travail a été accompli en cinq années. Peut-être aurait-il fallu retirer cette motion, mais puisqu'elle doit faire l'objet d'un vote, je voudrais quand même rappeler que, depuis lors, les autorisations de sortie des détenus ont été réglées par voie de concordat, les directives consécutives à la modification de la loi d'application du code pénal ont été votées, la gestion de l'évaluation de la dangerosité dont on a parlé ici dans un autre contexte a été traitée avec des tableaux décisionnels, conformément au rapport de M. Ziegler rendu précisément à la suite de ce drame. Et, aujourd'hui, le concordat romand travaille sur un concept harmonisé de l'évaluation de la dangerosité proche du système ROS alémanique. Donc, le travail a été accompli, nous avons bien avancé, même si je ne dis pas que tout est parfait. La réaction qui a été la vôtre était judicieuse, elle a été celle aussi du Conseil d'Etat. Vous pouvez faire de ce texte ce que bon vous en semblera, mais quoi qu'il en soit, les invites exprimées ont été entendues et anticipées. Je vous remercie.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur cette motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 2176 est rejetée par 74 non contre 7 oui et 12 abstentions.
Débat
Le président. Nous abordons la M 2296-B, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Je passe d'emblée la parole à l'auteur de la motion, à savoir M. le député Patrick Saudan.
M. Patrick Saudan (PLR). Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais tout d'abord rappeler le contexte dans lequel cette motion a été rédigée. Mon très regretté ex-collègue Gabriel Barrillier et moi-même l'avons déposée en octobre 2015; c'était un peu, vous me permettrez l'expression, Monsieur le président, une motion coup de gueule ! Elle faisait suite au sentiment d'exaspération que Gabriel et moi-même ressentions devant la dégradation de la salubrité de notre espace public.
Que demandait cet objet ? Il demandait au Conseil d'Etat, à travers quatre invites, de réactiver le plan canton-communes; de mettre en place une meilleure signalétique, avec des messages plus dissuasifs; d'étudier l'offre des lieux d'aisance et de réévaluer le rôle des agents de sécurité municipaux. Cette motion a été étudiée à la commission judiciaire et de la police, dont les membres l'ont soutenue à l'unanimité. Je tiens aussi à mentionner qu'elle a été accueillie très favorablement par l'Association des communes genevoises et qu'elle a été renvoyée au Conseil d'Etat en janvier 2017.
Or la réponse du Conseil d'Etat - vous transmettrez, Monsieur le président - me laisse un peu insatisfait, et même déçu. En effet, si je relève que des efforts de collaboration entre le gouvernement, le procureur général et la Ville de Genève sont mentionnés, que la loi pénale genevoise a été renforcée, avec la qualification des actions de souillure comme infractions, je dois malheureusement constater que la réponse du Conseil d'Etat est extrêmement lacunaire et qu'elle ne répond en rien aux invites ! C'est particulièrement vrai pour deux d'entre elles: le renforcement de la signalétique et surtout l'étude des lieux d'aisance dans le canton pour voir si on peut en augmenter le nombre. Le PLR ne va pas demander le renvoi de son rapport au Conseil d'Etat mais espère qu'à l'avenir le gouvernement s'occupera sérieusement de cette thématique. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'est plus demandée.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2296.
Débat
Le président. Nous traitons à présent la M 2339-A en catégorie II, trente minutes. La parole échoit au rapporteur de majorité, M. Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, cet objet a été traité lors de deux séances de la commission de l'économie. Suite à l'audition du chef du département, la question essentielle qui s'est posée a été la définition de l'émolument. Le texte qui vous est soumis propose de porter le montant du permis G, c'est-à-dire le permis frontalier, à 10 000 F au lieu des 400 F et des poussières qu'il coûte à l'heure actuelle.
Il faut savoir qu'il existe une définition légale fédérale ainsi que des définitions légales cantonales de l'émolument, et que toute une série d'arrêts faisant jurisprudence tant cantonale que fédérale précisent qu'un émolument doit - j'insiste sur ce verbe - correspondre à un travail administratif précis et avéré. Il n'est donc pas possible de laisser aux cantons la possibilité de décider eux-mêmes ce qu'ils entendent percevoir comme somme. Dans le cas du permis G, un cadre est fixé par la Confédération et le canton dispose d'une certaine latitude s'il souhaite augmenter le montant de l'émolument, mais cette latitude est relativement restreinte et ne porterait en tout cas pas le plafond jusqu'à 10 000 F.
Comme vous l'aurez lu dans le rapport qui vous est soumis, le MCG a fait preuve d'une vision extensive des définitions de l'émolument et reproché à la majorité de la commission d'avoir une vision plutôt restrictive; il estime que le canton a toute latitude pour imposer les tarifs qu'il souhaite. Or rappelons qu'en droit, il n'y a pas de vision restrictive ou extensive, il y a simplement un respect de la légalité. J'ajouterai en conclusion, tout en vous recommandant de refuser ce texte, qu'il est quasiment impossible pour une petite entreprise de s'acquitter d'un montant de 10 000 F. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la situation actuelle à Genève est difficile, dramatique même: notre canton compte plus de 100 000 travailleurs frontaliers. Nous avons atteint un seuil critique qui crée une surconcurrence sur le marché de l'emploi, une baisse des salaires, une pression gigantesque sur les employés. Ce flot de main-d'oeuvre inonde le marché du travail genevois. Regardez la détresse, la difficulté tant des jeunes que des travailleurs âgés qui ont toutes les peines du monde à se réinsérer sur le marché, à trouver leur place dans la société. Cela inquiète beaucoup le MCG, et c'est la raison pour laquelle nous avons déposé cette motion.
Certes, 10 000 F représente beaucoup d'argent, mais quand on prend en compte le coût de l'aide sociale pour les personnes sans emploi ou exclues du monde professionnel, il s'agit d'une somme minime, d'autant plus qu'une partie de ces fonds pourrait justement servir à la réinsertion des travailleurs qui ont été exclus du marché de l'emploi, parce que c'est bien ça le gros problème auquel nous sommes confrontés, et nous devons impérativement trouver des solutions. Voilà pourquoi nous avons déposé ce texte dans lequel nous proposons que les montants prélevés servent au dispositif de retour à l'emploi, c'est clair et net. Cette motion a aussi le mérite de lancer le débat. Je vous demande donc de la soutenir.
M. François Lefort (Ve). Une fois n'est pas coutume - c'est extrêmement rare - je dirai un mot du rapport de minorité. Je suis d'avis que les rapports de minorité ne sont pas assez lus, alors que leur concision donne généralement une idée épurée de la pensée de leurs auteurs. Dans l'introduction du présent rapport, nous pouvons lire: «Soit le MCG en fait trop, soit il n'en fait pas assez. L'un et l'autre ne sont pas possibles simultanément sur le même sujet.»
Eh bien, Monsieur le rapporteur de minorité, permettez-moi de vous dire que c'est justement possible, et vous nous en donnez la preuve avec cette motion qui demande de fixer l'émolument du permis G à 10 000 F. En nous soumettant cette proposition, vous en faites trop; dans le même temps, vous ne faites rien, parce que personne ne suivra cette drôle d'idée qui ne règle en rien le problème de la surchauffe économique de notre région, surchauffe qui sous-tend évidemment le problème du besoin de travailleurs frontaliers.
Pourquoi personne ne vous suivra ? Parce que cette demande est inapplicable; et pourquoi est-elle inapplicable ? Parce qu'elle est contraire au droit fédéral, ce qui signifie qu'elle est illégale, malheureusement. Le Conseil d'Etat est venu vous le dire en commission, mais vous ne le croyez pas, parce que vous venez encore défendre votre texte devant nous. Très bien, nous en prenons acte.
Cela étant, nous vous rappelons que vous avez un conseiller national à l'Assemblée fédérale qui pourrait éventuellement porter cette drôle d'idée devant le Conseil national. Ici, nous ne pourrons que vous décevoir, car nous sommes impuissants à vous satisfaire: nous refuserons de prendre en considération votre proposition. Merci.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, certains qualifient cette proposition de drôle d'idée; pour ma part, je pense plutôt que de drôles de propos sont tenus ici, parce que la thématique est tout ce qu'il y a de plus actuelle. Voyez les difficultés que rencontre le Conseil fédéral à trouver un accord avec l'Europe, qui demande que nous baissions davantage encore la garde, que nous renoncions aux mesures de contrôle du marché de l'emploi en Suisse et à Genève - où on en fait plus qu'ailleurs, heureusement. Il reste beaucoup de travail à effectuer.
Quoi que vous en pensiez, nous avons délibérément placé la barre très haut pour provoquer le débat, et le débat a eu lieu, d'abord en commission, maintenant en plénière. On nous dit: «Rendez-vous compte, c'est dramatique, un petit employeur ne pourra pas payer 10 000 F !» (L'orateur hausse le ton.) Mais s'il engage un résident, Mesdames et Messieurs, il ne va pas les payer, ces 10 000 F ! (Exclamations.) Voilà, je vous réveille un peu avant la Revue ! Je le répète: s'il engage un résident, il n'aura pas à payer ces 10 000 F !
C'était bien là le but de la manoeuvre, à savoir inciter l'ensemble des employeurs de Genève à faire l'effort de recruter des résidents genevois en passant par l'office cantonal de l'emploi, qui a grandement amélioré ses performances: on trouve maintenant à l'OCE des candidats qui correspondent aux postes. Les entreprises du canton qui font cet effort n'auront pas à s'acquitter de la taxe, et celles qui ne le font pas - parce qu'il y en a toujours qui ne font pas l'effort, malheureusement, et même les employeurs le regrettent - eh bien elles payeront la taxe, c'est aussi simple que ça ! Lorsqu'on ne trouve pas les compétences sur le terrain, parce qu'il s'agit d'une profession qui ne connaît pas le chômage, ça se justifie, formidable, tant mieux, ça fera baisser le taux de chômage; là aussi, l'entreprise aura une justification et ne payera pas la taxe.
Aussi, Mesdames et Messieurs, vous avez tout faux quand vous pensez que ça va pénaliser les employeurs, ça pénalisera ceux qui ne veulent pas jouer le jeu, et il y en a encore beaucoup ! Nous voulons que toutes les sociétés jouent le jeu et passent par l'office cantonal de l'emploi ! Merci de soutenir cette motion !
M. Jacques Blondin (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion est un brin provocatrice - c'est un euphémisme. Son postulat est que les frontaliers sont responsables de tous les maux - ou en tout cas de beaucoup d'entre eux - et qu'il faut par conséquent tout mettre en oeuvre pour diminuer le recours à ce type de main-d'oeuvre. Or tant l'objectif que les moyens précisés dans l'exposé des motifs sont contraires à la réalité du terrain: les frontaliers ne sont pas responsables du chômage genevois, les syndicats l'admettent, l'observatoire genevois du marché du travail ne les désigne pas comme tels, et le nombre de chômeurs en regard de celui des frontaliers ne permet pas d'envisager de remplacer les uns par les autres par une simple analyse quantitative.
Les frontaliers sont nécessaires à notre économie, au fonctionnement de nos institutions. Que feraient l'hôpital, les cliniques, les EMS sans eux ? Ils représentent 30% des effectifs dans ces secteurs. Que feraient nos PME sans possibilité de trouver les spécialistes recherchés ? Je me permets de mentionner l'entreprise dans laquelle je travaille, où nous engageons des frontaliers par nécessité: même dans un secteur comme le mien, soit les fruits et légumes, nous avons besoin de vendeurs qui parlent allemand, et vous savez tous comme moi qu'à Genève, l'une des carences est la maîtrise de la langue allemande, donc nous avons souvent recours à des personnes de l'extérieur, notamment d'Alsace, et elles s'intègrent évidemment dans la périphérie.
Cette mesure ferait exploser le coût de ce qui reste tout de même un émolument, le multipliant par 25 - voire par 40, selon les références que l'on prend; elle est contraire au droit supérieur, exagérément prohibitive et à la seule charge des employeurs. Ce seraient des millions supplémentaires pour les entreprises genevoises dans un contexte déjà très coûteux. Par ailleurs, n'oubliez pas que dans le cadre de la mise en oeuvre de l'initiative contre l'immigration de masse, la mesure de l'annonce préalable à l'OCE fonctionne depuis le 1er juillet et peut amener quelques compensations s'agissant des problématiques liées aux chômeurs.
Enfin et surtout, évitons de monter la population genevoise contre les frontaliers, nous n'avons pas besoin d'un climat délétère et ce ne sont pas des boucs émissaires. Regardons la réalité économique en face et apportons les solutions adéquates. Le PDC rejette cette motion sans hésitation aucune. Merci.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion s'appuie sur le présupposé que le recours aux travailleurs frontaliers ne constitue qu'une charge. On ne peut que s'étonner de cette vision orientée qui ne prend pas en compte la réalité tangible que représente l'apport économique des frontaliers à Genève. S'ils ne faisaient que coûter, qui pourrait croire un seul instant que les entreprises et les autorités de ce canton ne s'en seraient pas rendu compte et auraient agi contre leur propre intérêt ?
En commission, l'essentiel des débats a tourné autour de la notion d'émolument, cela a été dit. Selon la constitution, celui-ci doit correspondre à la couverture des frais administratifs, ce dont on est bien loin avec le montant de 10 000 F proposé dans ce texte. Ce que les motionnaires demandent, ce n'est pas la couverture des frais administratifs, ils veulent en fait pénaliser les frontaliers pour des responsabilités qu'ils leur imputent dans la dégradation de la situation sociale d'une certaine partie de nos concitoyens. C'est une posture de mauvais aloi, c'est une manière, comme l'a dit M. Blondin, de désigner des boucs émissaires.
Mais surtout, il faut se rappeler le moment où cette motion a été déposée. Il s'agit d'un texte outrancier et propagandiste, qui n'est pas plus pertinent qu'il n'est légal, qui occulte la réalité économique transfrontalière de notre canton et attise la division entre travailleurs en opposant les personnes à l'aide sociale et les frontaliers. Il faut éviter ce genre d'amalgame, cela n'a aucun sens. Vous connaissez le contexte de l'emploi dans ce canton, les difficultés de recrutement, le fait que des politiques de priorité aux chômeurs s'appliquent, alors ne venons pas dire que les frontaliers sont les ennemis des personnes à l'aide sociale, c'est faux, c'est une manière particulièrement déplorable de considérer l'espèce humaine et c'est surtout le fondement d'une profonde injustice sociale à laquelle nous ne pouvons pas souscrire. Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à refuser ce texte. Je vous remercie de votre attention.
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, il y a d'abord l'aspect factuel: on parle ici d'un émolument que le MCG cherche à transformer en taxe, ce qui serait illégal et totalement disproportionné - l'argument juridique a été mentionné. La commission de l'économie a balayé cette motion justement en raison de cet argument juridique.
Mais là derrière, car il ne faut pas s'arrêter là, il y a le discours politique du MCG qui n'en est pas à sa première tentative; je pense qu'environ huit ou neuf objets sur dix du MCG comportent le terme «frontaliers» dans leur titre, tous les prétextes sont bons pour s'en prendre aux travailleuses et travailleurs frontaliers, peut-être pas pour les éliminer - le terme est fort - mais du moins pour les empêcher d'accéder à Genève. On a même entendu des arguments environnementaux, comme quoi il s'agirait de préserver la qualité de vie dans notre canton !
J'ai été particulièrement sensible aux propos de M. Sormanni tout à l'heure, qui disait que les employeurs doivent jouer le jeu; bien évidemment que les employeurs doivent jouer le jeu, mais il ne s'agit pas de monter les travailleurs genevois contre les travailleurs frontaliers. Nous constituons un seul et même bassin de population, et la croissance des frontaliers n'est pas liée à une décroissance de Genève, au contraire: nous connaissons une progression en matière d'emplois qui s'accompagne d'une augmentation des travailleurs frontaliers, et c'est tant mieux.
Si les entreprises doivent jouer le jeu, ce n'est pas en refusant d'embaucher des frontaliers, puisqu'ils contribuent au travail dans ce canton, c'est plutôt en instaurant un cadre économique qui fait défaut aujourd'hui. Le MCG se trompe dans son discours, car le réel problème vient d'un manque d'encadrement et de mesures d'accompagnement. Prenons l'exemple du commerce de détail que nous connaissons bien, puisqu'on en a débattu lors de la dernière session du Grand Conseil: le cadre est absent, il n'y a pas de conventions collectives de travail alors que c'est un secteur sinistré dans lequel les salaires subissent de fortes pressions en raison de la concurrence.
Eh bien c'est justement à la question du revenu et des conditions de travail qu'il faut apporter une réponse. Attiser la haine des travailleurs frontaliers ne sert à rien, c'est une erreur. A ce propos, je vous invite à signer le référendum contre le passage en force de la loi sur les horaires d'ouverture des magasins le dimanche. Nous devons retrouver un véritable esprit de partenariat social qui amènera la paix plutôt que de nous perdre dans le discours haineux du MCG. Je vous engage donc, Mesdames et Messieurs, à rejeter cette motion.
M. André Pfeffer (UDC). L'augmentation constante du nombre de frontaliers interpelle, et cette motion soulève un réel problème. Parallèlement à la forte progression d'octrois de permis G, le taux de chômage augmente tandis que de plus en plus de Genevoises et de Genevois sollicitent l'aide sociale. Certes, cette motion ne constitue pas la réponse adéquate, cela a déjà été relevé. Les règles liées aux permis G sont fixées dans la législation fédérale et le montant d'un émolument ne peut couvrir que les frais administratifs. Mais le problème existe.
Depuis l'entrée en vigueur des bilatérales, les frontaliers ne se limitent plus à la seule région limitrophe; les permis G sont dorénavant issus de l'ensemble des pays de l'Union européenne. Quelles sont les mesures adéquates ? Est-ce que le principe de préférence indigène est suffisant ? Nous ne le pensons pas. Le déséquilibre de revenus entre la France et la Suisse est trop grand: à Genève, un professeur de secondaire gagne trois fois plus que son collègue français; idem pour un chauffeur de bus et de nombreuses autres professions. L'offre est totalement déséquilibrée, le recrutement se fait maintenant dans un bassin qui contient des millions de personnes.
Je rappelle qu'en 2016, Genève a perdu 2,2% de ses emplois, soit 6800 postes sur un ensemble de 315 000 postes. Je répète: en 2016, Genève a perdu 6800 postes de travail ! Durant cette période, la population a crû de 8033 habitants, le nombre de frontaliers de 6,1%. La bonne réponse, pour l'UDC, c'est notre projet de loi «Genève d'abord», un texte réaliste, similaire à celui approuvé dans le canton du Tessin. Pour sauvegarder l'emploi, mais aussi le niveau des revenus et le pouvoir d'achat, Genève ne peut pas éviter la réintroduction d'un contingent. Merci de votre attention.
M. Serge Hiltpold (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je vais commencer avec un petit commentaire sur le titre de cette motion, à savoir: «Taxons les frontaliers de manière équitable à 10 000 F le permis G». Décidément, nous n'avons pas la même notion de l'équité ! Ensuite, le deuxième considérant indique que les demandeurs d'emploi genevois se trouvent confrontés à une concurrence déloyale; voilà qui est intéressant. Je rappelle, Mesdames et Messieurs, que les secteurs conventionnés exigent des minimums salariaux; que vous soyez résident ou frontalier, le revenu minimum est le même pour tous, donc c'est absolument faux.
Venons-en maintenant au fond de la problématique économique. J'aimerais indiquer que les entreprises genevoises et romandes sont composées de différents travailleurs. Ce qui nous oppose complètement au MCG dans ce débat, c'est que pour nous, ces travailleurs fournissent les sociétés. Si vous n'avez plus de main-d'oeuvre, qui va réaliser les travaux, qui va remplir les mandats ? La concurrence à l'interne du pays, donc des autres cantons, ou la concurrence extranationale, ce qui engendre une diminution des effectifs.
J'ai souvent dit dans cet hémicycle que les employeurs ont un rôle à jouer, mais ils en ont assez d'être sans arrêt critiqués. Dans le domaine de la construction, par exemple, nous déployons de gros efforts pour la formation: les apprentis représentent plus de 10% de la main-d'oeuvre, un taux particulièrement stable. Or on critique nos conditions de travail à longueur de semaine, à longueur d'année, nous sommes des «négriers», entre guillemets, et au bout d'un moment, ce discours n'est plus audible. Nous faisons des efforts, nous collaborons avec l'office cantonal de l'emploi. Vous savez, j'ai 18 collaborateurs; avec douze employés, mon niveau de vie ne va pas changer, j'aurai simplement six emplois en moins, c'est tout. Voilà mon constat, et je crois que nous sommes plusieurs à le partager: il y en a marre des textes comme ça !
Regardez la réalité économique: que ce soit dans le secteur de la santé, de la construction, de l'agriculture ou de l'industrie, si on tient compte des personnes de la génération du baby-boom qui vont partir et des budgets qu'on alloue aux formations scientifiques et académiques, expliquez-moi comment vous allez faire tourner les entreprises ! Pour moi, il faut arrêter de rigoler avec des textes pareils. Cette motion ne mérite aucune considération et je vous remercie de bien vouloir la refuser.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Daniel Sormanni pour vingt-trois secondes.
M. Daniel Sormanni (MCG). Je serai très rapide, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés. Voyez la «Tribune de Genève» du jour: «Vu le nombre de frontaliers, il faut un contrôle, sinon c'est la porte ouverte au travail au noir et au dumping social.» Ce sont les syndicats européens qui le disent, il est nécessaire d'instaurer des contrôles. Ce n'est pas une mesure contre les frontaliers, mais bel et bien contre les employeurs qui ne jouent pas le jeu et ne recrutent pas dans le bassin local quand c'est possible...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député...
M. Daniel Sormanni. Voilà la différence ! Ce n'est pas contre les frontaliers, c'est... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. Je vous remercie et donne la parole à M. François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais juste ajouter un élément. Certains trouvent excessif le coût demandé par notre motion pour le permis G, mais si on calculait réellement ce que coûtent les frontaliers à notre société en regard du développement de l'aide sociale, du chômage et de la précarité dans notre canton, le résultat serait impressionnant. Or personne ne veut chiffrer ce coût. Si l'on prend cet élément en considération, notre motion a toute sa logique.
Le président. Merci. Monsieur Saudan, il vous reste onze secondes.
M. Patrick Saudan (PLR). Merci, Monsieur le président. Les propos de M. Baertschi sont intolérables. Il faut simplement lui rappeler, Monsieur le président, que les frontaliers scolarisent leurs enfants de l'autre côté de la frontière et que leurs frais de santé sont généralement assurés par la France, donc ils ne coûtent pas très cher à notre canton. Merci.
Le président. Je vous remercie... (Remarque.) Monsieur Baertschi, vous n'avez plus de temps de parole.
M. François Baertschi. Mais j'ai été mis en cause, Monsieur le président !
Le président. Il reste trente secondes à M. Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je précise juste que les frontaliers payent des impôts, eux, et que cette motion est tout simplement inapplicable, obsessionnelle, irréaliste et contraire au droit. Je vous remercie.
Le président. Merci. Monsieur Saudan, je vous demanderai de ne pas gifler votre pauvre micro quand vous avez terminé ! J'octroie encore quinze secondes à M. François Baertschi pour qu'il puisse répondre.
M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. On tombe dans l'invective, c'est dommage. Je répète qu'il ne s'agit pas de lutter contre les frontaliers, mais d'aider les résidents genevois.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur de minorité, et je lance le vote sur la prise en considération de cette motion.
Mise aux voix, la proposition de motion 2339 est rejetée par 74 non contre 11 oui et 1 abstention.
Le président. Mesdames et Messieurs, nous nous retrouvons à 18h.
La séance est levée à 17h45.