République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2176-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier la proposition de motion de Mme et MM. Christina Meissner, Marc Falquet, Patrick Lussi, Christo Ivanov, Stéphane Florey, Bernhard Riedweg : Uniformisons la pratique romande en matière d'exécution des peines
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XIII des 23, 24 février et 2 mars 2017.
Rapport de majorité de M. Alberto Velasco (S)
Rapport de minorité de M. Bernhard Riedweg (UDC)

Débat

Le président. Nous passons à l'objet suivant, classé en catégorie II, quarante minutes de temps de parole. Le rapport de minorité est de M. Bernhard Riedweg, remplacé par M. Marc Fuhrmann. Sitôt que M. Velasco la demandera, je lui donnerai la parole. (Commentaires.) Voilà, vous avez la parole, Monsieur le rapporteur.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, je tiens à relever que cette proposition de motion a été extrêmement bien rédigée par notre ancienne collègue, Mme Meissner. La commission a fait un travail très intéressant en auditionnant plusieurs entités, ce qui nous a permis de répondre aux questions soulevées par cet objet qui faisait suite à l'affaire Adeline. Si on revient à ses invites, la motion demandait de renégocier les conditions de détention dans les cantons romands dans le cadre du concordat latin, en particulier de mettre fin définitivement aux sorties éducatives pour les criminels violents, sexuels ou dangereux pour la société. Elément très délicat, c'est là-dessus que les débats ont donc porté.

Comme vous le savez, la réinsertion de ces criminels est éminemment importante; on sait très bien que si ces criminels - qui doivent un jour sortir de détention - ne sont pas réinsérés comme il se doit, il y a une augmentation du risque de récidive. Quels que soient les crimes commis, ces personnes sont condamnées à un certain nombre d'années de prison, mais avec l'espoir de sortir un jour et de se réinsérer. Si on supprime ces possibilités, si on ne laisse aucune possibilité à ces détenus de se réinsérer un jour dans la société, il est prouvé par les statistiques qu'ils vont récidiver. Il en va de même pour les conditions de détention: si la personne en prison a très peu d'espoir de sortir, elle devient presque folle. Vous savez que les prisons sont construites en laissant croire aux détenus qu'il y a une possibilité de s'en échapper. Voilà, il y a donc eu débat et les travaux de la commission ont abouti au refus de cette motion.

M. Marc Fuhrmann (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, certains éléments de cette proposition de motion restent entièrement d'actualité dans le cadre du concordat romand qui nous voit accueillir un certain nombre de ces prisonniers par définition dangereux pour la société ou ayant commis des crimes sexuels. Il n'y a pas de vision commune pour définir la dangerosité des criminels; chaque canton a sa pratique et sa compréhension de la question. Nous qui recevons à Genève certains de ces criminels d'autres cantons, nous appliquons notre propre règle, quitte à les remettre dans la rue, dans le cadre de ces mesures de réinsertion, avec l'éventualité qu'ils sévissent à nouveau. La motion demande qu'on ait un format commun ou en tout cas une certaine compréhension commune entre cantons. Remettre dans les rues chez nous, à Genève, une proportion plus élevée de ce type de criminels dangereux n'est certainement pas l'objectif.

Un autre élément de cette motion était lié aux coûts. Evidemment, nous recevons un certain montant pour nous occuper de ces prisonniers, mais il faut savoir aussi que Genève dépense beaucoup plus pour ces mesures dites de réinsertion. On peut penser à l'épisode tragique des cours d'équitation qui s'est très mal terminé. Chez nous, cela est facturé beaucoup plus cher que ce que le canton touche comme contrepartie pour ces mesures-là. Nous estimons donc globalement que cette motion a toujours sa raison d'être. Du travail doit bien sûr être accompli, l'objectif n'est pas qu'il n'y ait aucune préparation à la sortie de prison, mais il faut revoir la portée, l'ampleur et, surtout, les coûts de cette préparation.

M. Pierre Bayenet (EAG), député suppléant. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, j'attire votre attention sur le fait que le titre de cet objet est trompeur. Sous couvert de vouloir uniformiser les pratiques romandes, ce qui en soi pourrait constituer un but louable, l'objectif des motionnaires est en réalité bel et bien d'interdire les sorties. Je vous invite à relire les invites de la motion qui visent expressément - en tout cas l'une d'entre elles - à mettre un terme à toutes sorties pour les délinquants dangereux ou sexuels. Ça, c'est le premier problème.

Le deuxième problème est que cette motion est en réalité incompatible avec le droit supérieur, avec le droit fédéral. Je vous rappelle que l'article 84 du code pénal - que beaucoup d'entre nous n'ont jamais lu - oblige les cantons à prévoir des congés et des sorties. Cet article 84 prévoit que «des congés d'une longueur appropriée sont accordés au détenu». Pourquoi ? «Pour lui permettre d'entretenir des relations avec le monde extérieur, de préparer sa libération [...]» Tout cela, bien sûr, pour autant que le détenu ne soit pas dangereux ou que son comportement en détention ne s'y oppose pas. Pourquoi est-ce que le droit fédéral prévoit cela ? Parce qu'il faut à tout prix éviter ce qu'on appelle les sorties sèches, à savoir qu'un détenu, après avoir passé un certain nombre d'années en prison, coupé de la société, de sa famille et du monde du travail, soit mis sur le trottoir et doive se débrouiller tout seul. La sortie sèche conduit à la récidive, et c'est ce qu'on veut éviter ! On ne peut pas revenir sur le crime commis dans le passé: on peut seulement le déplorer et le regretter, on peut avoir de la compassion pour les victimes, mais ce qu'il faut, c'est éviter à tout prix la récidive, faire tous les efforts possibles pour l'éviter !

Pour empêcher la récidive, il faut un passage progressif de la prison à la liberté, et le système suisse est assez bien conçu, il faut l'admettre, puisqu'il prévoit toute une évolution, une progression, avec d'abord une détention en lieu fermé, puis un passage vers un milieu ouvert, avec des sorties régulières pour permettre au détenu de voir sa famille, d'entretenir des contacts sociaux. Ensuite, on a le travail externe, la libération conditionnelle, et tout à la fin, la libération définitive. Les sorties jouent un rôle essentiel puisque le juge examine ce qui s'est passé pendant celles-ci, comment le délinquant s'est comporté, afin de voir s'il est possible de passer à l'étape suivante et si, finalement, le détenu pourra être libéré conditionnellement. Tout ça a un coût, certes, mais cela permet surtout d'économiser beaucoup d'argent: si un délinquant peut effectuer un travail externe, ça permettra de faire en sorte qu'il dépende moins de l'aide sociale. Surtout, si un détenu peut bénéficier de la libération conditionnelle, il ne sera plus à la charge de l'Etat pendant un tiers de sa peine. Je vous rappelle qu'un prisonnier détenu en milieu fermé coûte des centaines de francs par jour ! On estime que c'est environ 400 F par jour à Genève. C'est donc à la fois bien pour le détenu et bien pour la société, parce que la liberté conditionnelle nous protège tous contre la récidive des délinquants. C'est bien pour les finances de l'Etat, parce que ça diminue le coût que nous fait supporter le système carcéral. Il faut donc à tout prix éviter de céder à l'instrumentalisation de la douleur des victimes, parce que c'est bien ça, en réalité, que vise cette motion.

Puisqu'il me reste trente secondes, je souligne encore que cette motion est très imprécise puisqu'elle invite le Conseil d'Etat à mettre fin aux sorties «pour les criminels violents, sexuels ou dangereux». Je vous rappelle qu'un délinquant sexuel, ça peut être un homme - un garçon - de 19 ans qui a eu des relations sexuelles avec une fille consentante de 15 ans. Ce serait déjà un délinquant sexuel. Avec cette motion, il n'y aurait plus de sorties possibles, alors qu'il ne s'agit pas de quelqu'un de particulièrement dangereux. Et qu'est-ce qu'un délinquant dangereux ? Est-ce quelqu'un qui a roulé trop vite en voiture et qui est mis en prison ? Est-ce qu'on devrait condamner cette personne à une peine sans libération conditionnelle possible ? Bien sûr que non ! Il y a ici une imprécision qui n'est pas tolérable et une telle motion doit finir dans la poubelle.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens tout d'abord à remercier M. Velasco qui a parfaitement résumé son excellent rapport. Je ne vais pas revenir dessus, M. Bayenet a aussi rappelé l'essentiel. Par contre, le parti démocrate-chrétien veut appuyer le refus de cette motion qui date de 2013. Depuis, la CEP a rendu son rapport, qui a été commenté. Curabilis est opérationnel, avec des ajustements qui interviendront continuellement; le département a pris des mesures qui, elles aussi, seront adaptées régulièrement. Le parti démocrate-chrétien est particulièrement convaincu que la sociothérapie et les sorties éducatives resteront indispensables pour que les personnes réintégrables dans notre société puissent éviter la récidive. Cette motion n'a donc plus sa raison d'être; peut-être qu'elle n'a jamais eu de raison d'être, sauf au prétexte des émotions justifiées par le drame que nous avons cité. C'est pourquoi le parti démocrate-chrétien la refusera.

M. Alexandre de Senarclens (PLR). Le PLR considère que cette motion est arrivée à un moment d'émotion, suite au drame d'Adeline, comme l'a très bien dit la députée von Arx-Vernon. Les choses ont beaucoup changé depuis lors et cette motion est devenue sans objet. Il y a eu l'harmonisation du 31 octobre 2013 voulue par la conférence latine des directeurs de justice et police. Le département de la sécurité a anticipé et répondu aux invites et une confiance réciproque a été instaurée entre les cantons en développant une pratique univoque et similaire, pour que les cas soient traités de la même manière dans chaque canton.

Pour ce qui est de l'autre invite demandant de mettre fin aux sorties éducatives pour les criminels, il faut savoir qu'elle est, dans les faits, illégale. Nous avons un code pénal qui prône la réinsertion. La prison, c'est pour punir, évidemment, mais c'est également pour amender, pour améliorer le criminel et pour le préparer à sa sortie qui survient un jour ou l'autre. Cette invite n'est pas réaliste, n'est pas légale et n'est pas souhaitable. Pour ces motifs, le PLR refusera cette proposition de motion.

M. François Baertschi (MCG). Monsieur le président, cette proposition de motion est intéressante, elle met en avant une problématique, celle des criminels dangereux et du laxisme de notre société, comme on l'a vu avec l'affaire Adeline qui a été un véritable révélateur. Evidemment, il faut aller dans la direction d'une meilleure écoute des victimes; il faut mieux les protéger pour aller dans le sens d'un plus grand respect de notre vie en société; il faut édicter des règles plus nettes, avec plus de vigueur que ce qu'on a fait pendant toutes ces années. Tout ça, c'est quelque chose d'important, c'est quelque chose qui nous pousserait à accepter cette motion, malheureusement. Il est certain qu'on empiète sur le travail du juge: est-ce à nous, législateurs, d'intervenir et de dire au Conseil d'Etat qu'il doit agir d'une manière, qu'il doit faire ceci ou cela, qu'il doit intervenir et contraindre le pouvoir judiciaire ? On arrive ici à la limite de ce que constitue notre travail. Dans ces conditions, le groupe MCG s'abstiendra, parce qu'il y a un réel problème qu'il ne faut pas nier; il y a une réelle difficulté, mais ce qui est exigé n'est pas réalisable. Il faudrait le demander d'une manière différente pour aller dans la même direction, nous nous abstiendrons donc.

Mme Marion Sobanek (S). Monsieur le président, cette proposition de motion a été déposée sous le coup de l'émotion causée par l'affaire tragique survenue à la Pâquerette. C'est terrible de le dire, mais on ne peut pas éviter certains drames; je le dis avec beaucoup de compassion pour les victimes, mais on ne peut pas avoir une sécurité absolue car on ne sait pas comment les gens réagissent. Depuis, ce qu'il était possible de faire légalement a été accompli. Comme mes préopinants l'ont très bien expliqué, une partie des demandes de cette motion n'a pas pu être réalisée.

J'aimerais ajouter à cela que l'article 75 du code pénal stipule que le but de la détention est aussi la réhabilitation: chaque détenu, que ce soit dans le cadre d'une peine ou de mesures, a le droit à une certaine réinsertion. En principe, à la fin, une sortie survient et il serait préférable que la personne qui sort de prison, qui devient un jour notre voisin, soit quelqu'un en qui on peut de nouveau avoir confiance. Bien sûr, les récidives existent, mais elles surviennent plus fréquemment dans des pays où les peines sont encore plus dures que chez nous. Par contre, dans des pays comme la Hollande, qui investissent énormément dans l'éducation, qui travaillent avec le détenu, le taux de récidive est étonnamment plus bas. Si des peines très dures empêchaient un délinquant de commettre des méfaits, ça se saurait et le monde entier aurait le même code. Or, ce n'est pas du tout le cas.

A Genève, c'est le SAPEM qui évalue les possibilités de sorties. On ne peut donc pas interdire les sorties des détenus. Notre collègue Me Bayenet en a très bien expliqué la fonction. Maintenant, si nous voulons que ces sorties aient lieu, il faut qu'il y ait une évaluation. Malheureusement, au moment où l'on parle d'une harmonisation entre les cantons, on ne prend d'habitude pas le «top» des mesures, on uniformise souvent vers le bas. Genève a été à la pointe de la réinsertion en Suisse, grâce au formidable travail du professeur Bernheim à qui je rends hommage ici. Actuellement, nous avons un peu reculé dans notre travail, mais il ne faudrait pas reculer davantage. Ce type de motion n'a pour moi plus de sens et il faut la refuser.

Mme Paloma Tschudi (Ve). Les Verts refuseront cette motion. Nous nous sommes exprimés à plusieurs reprises sur la nécessité de réfléchir à de meilleures méthodes de réinsertion et nous encourageons donc les soins thérapeutiques et les sorties éducatives. Comme l'a dit ma préopinante, il est primordial que les détenus amenés un jour à sortir puissent bénéficier de ces mesures afin d'être accompagnés dans le processus de libération. De plus, comme d'autres députés l'ont relevé, nous avons pu constater que de nombreuses mesures ont été mises en place depuis le tragique drame qu'a connu notre canton.

Je souhaiterais encore souligner que, lorsque l'auteure de ce texte l'a déposé, sa motivation première venait de sa volonté de pouvoir se sentir en sécurité en tant que femme. Je pense que pour permettre aux femmes - et donc à l'auteure de ce texte - de se sentir en sécurité dans les rues de Genève, il serait peut-être plus judicieux de voter enfin des lois qui rappellent à la population que les femmes sont bien les égales des hommes !

Mme Christina Meissner (PDC), députée suppléante. Eh oui, j'avais déposé cette motion le 27 septembre 2013: ça fait bien longtemps ! A cette époque, elle faisait sens, dans le contexte de l'affaire Adeline. Les questions qu'elle posait méritaient des réponses. Les propositions faites auraient certes pu être modifiées pour ne pas enfreindre le code pénal. Enfin, voilà, du temps a passé et nous nous retrouvons cinq ans plus tard ! Heureusement, la révision et l'uniformisation des pratiques concordataires ont été accomplies entre-temps. On peut remercier les gouvernements cantonaux respectifs d'avoir travaillé plus vite que notre parlement. Aujourd'hui, cinq ans plus tard, je ne peux que remercier les rapporteurs de majorité et de minorité pour leur retenue ainsi que mes collègues pour leurs interventions et dire, ma foi, que cette motion n'a effectivement plus lieu d'être.

M. Thomas Bläsi (UDC). En dehors de la déclaration du Conseil d'Etat qui a affirmé avoir déjà appliqué toutes les recommandations préconisées par le rapport de la commission d'enquête parlementaire, rien ne nous permet de le confirmer si ce n'est une confiance béate. La commission de contrôle de gestion ayant été chargée de ce travail de vérification, il conviendrait d'attendre ses résultats avant de rejeter cette motion. Les derniers événements connus et publics qui se sont déroulés à Curabilis plaideraient également dans le sens d'attendre le résultat du travail de la commission, pour savoir si, effectivement, ses recommandations sont appliquées ou non. Donc, par souci de cohérence, le groupe UDC vous demande le renvoi de cette proposition de motion à la commission de contrôle de gestion pour lier ces points.

M. Marc Fuhrmann (UDC), rapporteur de minorité ad interim. Monsieur le président, je voulais juste terminer avec la vision de la minorité sur cette motion. En gros, un élément clé était de réduire les risques pour la population lors des sorties des criminels violents, sexuels ou dangereux. Evidemment, la définition précise de ce qui est considéré comme violent ou dangereux reste à établir, mais, en soi, l'esprit de cette motion était que la société et ses membres les plus faibles ne subissent pas les risques de dérapage de ces criminels. Les exemples récents et moins récents sont tout aussi dramatiques qu'inacceptables; ils ne doivent plus arriver à l'avenir !

Le deuxième élément portait sur les coûts de ces mesures. Là aussi, je pense qu'il y a clairement du travail à faire par rapport au prix de ce qui est dépensé pour ces cours de réinsertion ou ces activités. On pense toujours à l'équitation, je crois que ça va nous rester dans l'esprit encore un bon moment, alors qu'une grande partie de notre population genevoise ne verra jamais l'échine d'un cheval ! C'est pour ça qu'il faut malgré tout accepter cette motion.

Le président. Merci, Monsieur. M. Bläsi demande un renvoi à la commission de contrôle de gestion, que je vous ferai voter juste après l'intervention de M. Velasco à qui je passe la parole.

M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, il faut d'abord relever que cette proposition de motion a permis de répondre à un certain nombre de questions qui se posaient non seulement au sein de la commission, mais aussi parmi les citoyennes et citoyens. Cela donnait la possibilité au Conseil d'Etat d'apporter un éclairage sur les travaux effectués, de faire une mise au point sur les procédures et les recommandations. Un élément fondamental est ressorti quand même: cette motion est contraire au droit fédéral. Alors quand mon collègue parle d'envoyer cette motion à la commission de contrôle de gestion... Par principe, cette motion est contraire au droit fédéral ! M. Bayenet l'a relevé, d'autres aussi. Je vous recommande donc de ne pas la renvoyer à cette commission.

Ensuite - je finirai par là - pour répondre au rapporteur de minorité, le coût d'un détenu en prison est de 300 F par jour ! On a donc non seulement tout avantage à maintenir un détenu le moins longtemps en prison, mais surtout à faire en sorte qu'il ne revienne pas en prison après en être sorti ! Parce que chaque fois qu'il y a récidive, ça coûte cher au détenu et à la société. Cette motion voulant éviter les sorties et empêcher la réinsertion contrevient à ce principe. Nous vous demandons, au nom de la commission et de la majorité, de la refuser.

Le président. Je vous remercie. Je lance le vote sur la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2176 à la commission de contrôle de gestion est rejeté par 81 non contre 7 oui et 2 abstentions.

Le président. Je passe maintenant la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Je remercie Mme la première signataire de la motion d'avoir indiqué que celle-ci n'était plus d'actualité. C'est vrai, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et, surtout, beaucoup de travail a été accompli en cinq années. Peut-être aurait-il fallu retirer cette motion, mais puisqu'elle doit faire l'objet d'un vote, je voudrais quand même rappeler que, depuis lors, les autorisations de sortie des détenus ont été réglées par voie de concordat, les directives consécutives à la modification de la loi d'application du code pénal ont été votées, la gestion de l'évaluation de la dangerosité dont on a parlé ici dans un autre contexte a été traitée avec des tableaux décisionnels, conformément au rapport de M. Ziegler rendu précisément à la suite de ce drame. Et, aujourd'hui, le concordat romand travaille sur un concept harmonisé de l'évaluation de la dangerosité proche du système ROS alémanique. Donc, le travail a été accompli, nous avons bien avancé, même si je ne dis pas que tout est parfait. La réaction qui a été la vôtre était judicieuse, elle a été celle aussi du Conseil d'Etat. Vous pouvez faire de ce texte ce que bon vous en semblera, mais quoi qu'il en soit, les invites exprimées ont été entendues et anticipées. Je vous remercie.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur cette motion.

Mise aux voix, la proposition de motion 2176 est rejetée par 74 non contre 7 oui et 12 abstentions.