République et canton de Genève

Grand Conseil

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M 2327-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Jean-Michel Bugnion, Boris Calame, Magali Orsini, Jean-Marc Guinchard, Frédérique Perler, Emilie Flamand-Lew, François Lefort, Anne Marie von Arx-Vernon, Béatrice Hirsch, Jean-Luc Forni, Geneviève Arnold, Sophie Forster Carbonnier, Bertrand Buchs, Delphine Klopfenstein Broggini, Mathias Buschbeck, Roger Deneys, Cyril Mizrahi, Jean-Charles Rielle, Yves de Matteis, Christian Frey, Lydia Schneider Hausser pour que les détenues aient la possibilité d'exécuter leur peine dans des conditions correctes

Débat

Le président. L'ordre du jour appelle la M 2327-B et je passe la parole à Mme Klopmann.

Mme Sarah Klopmann (Ve). Merci, Monsieur le président. Il s'agit là d'une excellente motion Verte visant à ce que les femmes détenues bénéficient de conditions de détention dignes et correctes. La réponse du Conseil d'Etat, par contre, est beaucoup moins correcte. On y trouve un historique et le rappel de ce fait assez scandaleux - que j'avais d'ailleurs plusieurs fois signalé ici - à savoir que des femmes qui étaient détenues à la prison de Riant-Parc en régime de semi-liberté ont été mises à Curabilis lorsqu'on a vendu cette prison, parce qu'on ne savait plus où les parquer. Elles étaient donc officiellement en semi-liberté, et tout à coup on les a enfermées complètement à Curabilis. J'avais alors posé une question écrite, à laquelle on m'avait répondu que c'était effectivement le cas mais qu'en contrepartie elles étaient dans des locaux neufs. Génial, c'est formidable ! Et ça ne s'arrête pas là... J'ai continué à poser des questions, et on nous a dit ensuite que tout était réglé, qu'il ne fallait pas s'inquiéter et qu'il y avait une solution pour tout le monde. Puis il se trouve qu'à la commission des visiteurs j'ai découvert qu'en fait ce n'était pas du tout le cas et que ces femmes n'avaient pas retrouvé des conditions de détention correspondant à leur jugement, dans la mesure où en tout cas certaines d'entre elles étaient à Champ-Dollon. En l'occurrence, je pense que le département a dû voir nos procès-verbaux de commission et constater qu'on avait découvert le pot aux roses, car dans cette réponse il est enfin admis - on nous dit enfin la vérité ! - que ces femmes sont à Champ-Dollon. C'est un scandale ! Ces femmes sont donc à Champ-Dollon, et alors là on ne va pas nous dire que les locaux sont neufs... Elles n'ont toujours pas de semi-liberté et se trouvent dans un établissement avec des personnes en attente de jugement alors qu'elles sont en train d'exécuter leur peine, dans des conditions qui ne sont pas celles qui sont prévues, dans un semi-étage qu'on leur a alloué comme ça, à la va-vite, mais qui n'est pas du tout conçu pour elles, et du coup elles sont souvent enfermées 23 heures sur 24, alors qu'elles sont censées être en semi-liberté. Elles n'ont aucune possibilité de sortir des cellules en dehors de l'heure de la balade ou de certains ateliers; il existe un atelier de bois pour cinq ou six personnes maximum, je crois, et sinon - grande chance - il y a l'atelier repassage ! Ouh là là, génial ! C'est formidable ! Eh bien oui, ce ne sont que des femmes !

En outre, on nous dit que tout va être réglé grâce à la planification pénitentiaire, mais cette planification est vraiment incohérente selon les Verts, on l'a déjà relevé plusieurs fois. Elle est censée tout régler, mais je ne sais pas comment il va être possible, en créant un bâtiment, de résoudre la question des parloirs intimes ou familiaux ainsi que la problématique des sans-papiers, des femmes, de la surpopulation... A un moment donné, on doit arrêter de rigoler avec ça ! Il faut simplement cesser d'enfermer dans ce genre de conditions des gens qui n'ont pas à l'être, et surtout redonner à ces femmes censées être en semi-liberté précisément des conditions de semi-liberté. C'est purement scandaleux ! (Applaudissements.)

Une voix. Bravo !

M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il faut être assez franc en la matière. Je suis d'abord entièrement d'accord avec tout ce qu'a dit ma préopinante. Franchement, à Genève on en est encore à l'âge de la pierre si on se compare avec d'autres établissements comme Hindelbank en Suisse allemande. C'est invraisemblable ! Et quelle considération pour les femmes, qu'on n'a cessé de transbahuter, comme le disait Mme Klopmann ? Riant-Parc, Curabilis, Champ-Dollon, demain Les Dardelles, et quoi encore ?! En outre, leurs conditions sont absolument déplorables. Ces femmes n'ont généralement pas accès aux ateliers de formation: on se contente de leur proposer des ateliers occupationnels - de la poterie, du tissage, etc. - mais rien qui puisse leur apporter une formation professionnelle. Genève est très en retard, il y a véritablement de quoi être fâché, et ce rapport du Conseil d'Etat est totalement insuffisant. Merci.

Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien partage cette colère et cette indignation. J'ai moi aussi constaté ce qui a été évoqué précédemment et j'appelle de mes voeux que si un jour une construction du type des Dardelles aboutit enfin, elle contienne ce qui nous est promis, à savoir un véritable espace pour les femmes avec ce qui est indispensable, c'est-à-dire des ateliers qualifiants qui leur permettent de ne plus être aussi vulnérables en sortant de prison qu'elles l'étaient en y entrant. En effet, la plupart de ces femmes sont des personnes qui ont été particulièrement exposées à la délinquance par leur condition de grande vulnérabilité, et aujourd'hui ce que nous pouvons constater, c'est qu'avec des ateliers occupationnels qui sont totalement sous-dotés et irrespectueux des conditions des femmes, elles sortiront de détention en étant aussi vulnérables qu'elles l'étaient auparavant, si ce n'est plus. Nous sommes donc indignés, nous trouvons que c'est inadmissible à notre époque et nous devons absolument continuer à dénoncer cette réalité. Ce n'est pas acceptable, et vous pouvez compter sur moi pour le dénoncer aussi souvent que nécessaire. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

Mme Lydia Schneider Hausser (S). Monsieur le président, ce sera très court car je ne vais pas répéter ce qui vient d'être dit. Je souhaite simplement demander que ce rapport soit renvoyé au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Madame. Je vais actionner la sonnette pour appeler les députés au vote, puis je mettrai aux voix votre demande.

Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 2327 est adopté par 75 oui et 4 abstentions.

Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 2327 est donc refusé.