République et canton de Genève

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IN 161
Initiative populaire cantonale "Construisons des logements pour toutes et tous - Davantage de coopératives et de logements bon marché !"
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 26 et 27 janvier 2017.
IN 161-A
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la prise en considération de l'Initiative populaire 161 "Construisons des logements pour toutes et tous - Davantage de coopératives et de logements bon marché !"
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 26 et 27 janvier 2017.

Débat

Le président. Nous abordons l'initiative 161, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à M. le député Pierre Vanek.

M. Pierre Vanek (EAG). Merci, Monsieur le président. L'initiative 161 que nous allons renvoyer en commission aujourd'hui apparaît comme une évidence puisqu'elle exige de construire des logements pour toutes et tous. En effet, Mesdames et Messieurs, trouver un logement à Genève constitue un parcours du combattant, la pénurie fait rage tandis que les logements qu'on construit, le plus souvent inaccessibles, sont en parfaite inadéquation avec les besoins réels de la population. Maintenant, comme le demande cette initiative appuyée par l'ensemble de la gauche, des syndicats et des milieux de défense des locataires, il faut construire des logements abordables pour tout le monde. La constitution garantit théoriquement le droit au logement, il s'agit dès lors de faire de ce droit une réalité. Mesdames et Messieurs, cette initiative vise à corriger enfin la situation de l'immobilier à Genève en proposant une répartition des logements qui corresponde aux capacités financières des citoyens. Dans les zones de développement, on doit construire des logements pour toutes et tous !

Que demande cette initiative, Mesdames et Messieurs ? Elle demande de garantir que 80% des logements construits soient destinés à la location, assurant ainsi à tout le monde la possibilité de se loger. Aujourd'hui, on construit 50% de propriétés par étage et de villas, et le développement excessif de ce type d'habitations empêche l'écrasante majorité de la population de se loger. Par ailleurs, en prévoyant la construction de 50% de logements d'utilité publique en zone de développement - c'est un deuxième objectif de l'initiative - les deux initiatives - j'inclus la suivante, qui est complémentaire à celle-ci - ont pour but d'augmenter de manière conséquente le nombre de logements bon marché, alors que la loi ne fixe à l'heure actuelle qu'un objectif de 20% en la matière et qu'on ne compte même pas 10% de LUP dans le canton. Conséquence: les loyers sont bien trop élevés et pèsent lourdement sur le budget des familles et de la majorité de la population, ce qui place de nombreuses personnes dans une situation difficile. Cette initiative requiert également que des maîtres d'ouvrage sans but lucratif, comme les coopératives, mettent fin à la spéculation.

Mesdames et Messieurs, cette initiative doit être votée, et votée rapidement ! Le rapport du gouvernement cantonal dont nous sommes saisis - non pas celui sur la recevabilité de l'initiative, mais l'IN 161-A - l'admet très clairement: «Pour le Conseil d'Etat, les objectifs qui étaient espérés à la suite de l'introduction de l'article 4A LGZD n'ont été que très partiellement atteints.» C'est un euphémisme ! Le Conseil d'Etat ajoute: «En effet, à l'automne 2015, le parc de LUP ne se situait qu'à 9,89% du parc locatif genevois en lieu et place des 20% attendus.»

Le président. Il vous reste trente secondes.

M. Pierre Vanek. Voici ce qu'on nous dit encore dans ce rapport, Monsieur le président: «Les projections effectuées relèvent [...] qu'avec "une croissance moyenne de +0,2% par an, il faudrait attendre 50-70 années... pour atteindre l'objectif".» A l'évidence, cette initiative doit être soumise au souverain rapidement et, de ce point de vue là, nous la défendrons. L'idée de consacrer une année de plus à inventer un contreprojet...

Le président. Soyons rapides, Monsieur le député !

M. Pierre Vanek. ...ne nous agrée pas, nous voulons un vote populaire rapide et la mise en oeuvre dans la foulée des dispositions prévues par l'initiative.

Le président. C'est terminé.

M. Pierre Vanek. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. Bernhard Riedweg (UDC). Cette initiative va à l'encontre des lois et de l'économie du marché du logement. Comment peut-on exiger que, dans les périmètres situés en zone de développement, au moins 50% de l'ensemble des domiciles soient réalisés par des maîtres d'ouvrage sans but lucratif ? Très souvent, les maîtres d'ouvrage - aussi nommés investisseurs - sont des caisses de pension publiques et privées, des compagnies d'assurance ou des fonds d'investissement qui, de par leur fonction, disposent des ressources nécessaires - puisqu'ils les encaissent chaque année - pour procéder à des investissements dans l'immobilier, surtout en cette période de taux bas qui ne favorise pas les placements en obligations.

C'est grâce aux rendements sur leurs placements qu'ils sont en mesure de payer des rentes dans le cadre de la prévoyance professionnelle ou des polices d'assurance-vie. Il y a lieu de bien prendre en considération leur motivation à investir dans les logements urbains et suburbains: ils ont des comptes à rendre tant aux épargnants qu'aux cotisants. Si un minimum de rentabilité n'est pas assuré, ils se détourneront de l'immobilier et trouveront d'autres secteurs pour leurs placements.

Le plan directeur cantonal 2030 prévoit la construction de près de 50 000 logements en zone de développement, mais les maîtres d'ouvrage d'utilité publique ne disposent ni des structures ni des moyens financiers nécessaires pour réaliser ne seraient-ce que 25 000 logements ! On en conclut que l'un des objectifs principaux de l'IN 161 ne peut pas être atteint. Si le parc de LUP ne représente actuellement que 9,89% du parc locatif genevois au lieu des 20% attendus, la raison est à chercher dans le manque flagrant de rentabilité. L'Union démocratique du centre rejette l'IN 161 et favorisera un contreprojet que le Conseil d'Etat s'est proposé d'élaborer dans le courant du premier semestre 2017. Nous demandons par conséquent le renvoi à la commission du logement. Merci, Monsieur le président.

M. Mathias Buschbeck (Ve). Chères et chers collègues, j'aimerais tout d'abord rappeler que cette initiative a été lancée pour modifier les types de logements prévus en zone de développement. En effet, la répartition actuelle est issue de l'accord de 2006, qui arrive à échéance l'année prochaine, et il va donc de toute façon falloir trouver une nouvelle forme de répartition. Comme cela vient d'être dit par M. Riedweg, l'un des objectifs de l'accord était d'arriver à un seuil de LUP de 20%; aujourd'hui, nous en sommes loin, avec moins de 10%, et voilà pourquoi ceux qui ont lancé cette initiative, dont les Verts font partie, vous invitent à changer la répartition prévue dans cette loi.

L'un des grands avantages du texte tel que rédigé dans cette initiative par rapport à la version actuelle est sa simplification. D'ailleurs, le Conseil d'Etat ne dit pas autre chose dans son exposé des motifs, il indique qu'au sein de l'observatoire, tout le monde s'accorde à dire que le domaine de l'aménagement et du logement comprend de nombreuses couches législatives qui ne permettent pas d'y voir très clair. Cette initiative simplifie l'article 4B en uniformisant les types de logements à réaliser, quelle que soit la zone de fond.

Pour revenir à l'objectif de création des LUP mais sans entrer dans le détail, comme l'a fait M. Vanek, sur les types de logements prévus, il s'agit d'insister fortement sur la création de coopératives, dont nous sommes convaincus qu'elles constitueront une grande part de la solution au problème de l'accessibilité au logement à Genève. C'est la raison pour laquelle les Verts vous invitent à renvoyer cette initiative à la commission du logement. Je vous remercie.

Mme Geneviève Arnold (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien, sensible à la question du logement pour toutes et tous, a pris connaissance avec intérêt des réponses du Conseil d'Etat s'agissant des initiatives 161 et 162, qui sont intimement liées. L'accès aux LUP est pour nous évidemment acquis, celui aux logements de qualité pour la classe moyenne à prendre en considération, et il est primordial d'atteindre les objectifs fixés sans devoir attendre des décennies. N'oublions pas que la classe moyenne représente plus de 50% de notre population et qu'elle est en manque réel d'habitats. Cela constitue un enjeu majeur en matière de conception de nouveaux logements.

La solution des coopératives est très intéressante car elle permet une ouverture en termes de mixité, et elle doit absolument être intégrée dans tout nouveau projet d'urbanisation. L'accès à la PPE ne doit pas non plus être négligé; il existe en effet une population prête à investir dans l'immobilier, mais qui s'y voit entravée par les restrictions en matière de financement. Le Conseil d'Etat nous montre que tous les enjeux ne sauraient être pris en considération par ces deux initiatives, et c'est pourquoi les démocrates-chrétiens soutiendront la demande de renvoi à la commission du logement afin de les traiter dans le contexte des zones de développement.

M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, comme l'ont indiqué les députés Vanek et Buschbeck, nous allons fêter cette année les dix ans de la nouvelle politique du logement résultant d'un accord signé en 2006, un accord assez large mené par le conseiller d'Etat Mark Muller. C'était une démarche intéressante à l'époque, mais qui n'a malheureusement pas porté ses fruits. En effet, on est aujourd'hui loin des ratios prévus de 15% puis 20% de LUP après l'intégration de l'initiative de l'ASLOCA et des 30 millions du fonds LUP, on est même très loin du compte avec moins de 10% de logements sociaux, ce qui est largement insuffisant par rapport aux besoins de la population.

Sur la base de ce constat, les initiants - dont j'ai l'honneur de faire partie - proposent de revenir à la pratique qui était celle du département avant l'arrivée de M. Muller, avant 2005, à savoir de prévoir 80% de logements locatifs avec différents ratios, ce qui colle à la composition sociologique de la population et ressort également du rapport divers 1108 du Conseil d'Etat prévoyant la construction potentielle de 20% de logements en propriété par étage - voilà qui est déjà assez généreux par rapport aux besoins que M. Riedweg a présentés à juste titre comme s'élevant à 15% au maximum. Ce projet est donc plein de bon sens et en revient finalement à ce qui se faisait avec beaucoup de succès avant 2005 puisqu'on construisait entre 2000 et 3000 logements par année à l'époque; depuis, on a drastiquement chuté à 1000 logements - des chiffres historiquement bas - et c'est la raison pour laquelle le parti socialiste vous invite à voter cette initiative ce soir.

J'aimerais conclure mon propos en répondant à la critique conjointe de M. Riedweg et du Conseil d'Etat et en disant que ce projet ne va pas bloquer la construction de logements, pour une raison assez simple. Regardez les rendements possibles aujourd'hui, notamment sur les marchés obligataires: ce sont des rendements de 0%, quand ils ne sont pas négatifs ! Aussi, nous n'aurons aucune difficulté à trouver des personnes intéressées à investir dans la pierre, surtout dans des logements sociaux avec des rendements de 4,5% à 6% nets - qui sont d'ailleurs largement au-delà de ce que prévoit la loi à l'heure actuelle - à commencer par la caisse de pension de l'Etat de Genève.

Vous savez qu'un projet a été déposé par le parti socialiste - il est actuellement pendant devant la commission des finances - visant à augmenter les rendements de la caisse, à lui assurer une viabilité financière précisément en construisant ce type de logements. En privilégiant des opérateurs qui seront acquis à des investissements sur le long terme et non pas à des pratiques spéculatives très agressives sur les locataires, ce sera gagnant-gagnant, à savoir que nous permettrons aux caisses de pension de tourner sur le long terme tout en offrant à la population des logements qui répondent réellement à ses besoins, pas comme les 50% de propriétés par étage et de villas qui sont construites aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle cette initiative est plus que bienvenue, et il faut impérativement la voter ce soir. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)

M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il faut renvoyer cette initiative à la commission du logement et l'étudier attentivement. Certaines parties sont intéressantes, d'autres un peu moins - il faudra par exemple examiner les pourcentages de logements - mais une chose est sûre: à Genève, il faut booster la construction de logements par les coopératives. C'est une voie médiane, qu'on appelle, entre guillemets, la «troisième voie», et il n'y a pas de raison que Genève ne compte qu'entre 4% et 5% de coopératives alors que Zurich en comprend environ 20% et que des initiatives y sont même prises pour augmenter ce taux; il n'y a pas de raison de se limiter à Genève.

Je rappelle quand même que les coopératives, ce n'est pas la propriété du logement, c'est simplement la participation à la gestion. Le fait que les coopératives soient à but non lucratif ne crée pas de concurrence avec les privés ni avec les PPE, contrairement à ce que d'aucuns pensent. Je crois que c'est la bonne voie pour augmenter le nombre de logements à prix abordables, de logements sociaux pérennes sans l'intervention de l'Etat, si ce n'est un cautionnement pour certaines. Voilà la voie qu'il faut réserver.

En ce qui concerne le MCG, nous soutenons fortement la construction de logements par les coopératives pour répondre aux besoins prépondérants de la population, qui est en manque de logements; mais il y a carence de logements dans plusieurs catégories, pas seulement de LUP, il y a aussi un manque de logements pour des personnes à revenu plus élevé, et il faut également que nous y soyons attentifs pour éviter leur exode en France - ou plutôt, il s'agit de faire en sorte que ceux qui se sont exilés en France reviennent à Genève ! Nous vous recommandons donc vivement de renvoyer cette initiative à la commission du logement pour étude.

Mme Bénédicte Montant (PLR). Le parti libéral-radical soutiendra le renvoi de cette initiative à la commission du logement. Au départ, nous avions décidé de ne pas nous exprimer, mais comme tout le monde le fait, nous ne voulons pas rester muets. Nous prenons acte de l'appréciation de la validité de cette initiative par le Conseil d'Etat, tout en émettant quelques doutes à ce sujet.

Comme je l'ai dit, nous soutenons le renvoi à la commission du logement parce que nous sommes pour le fait de construire pour tous, c'est-à-dire dans un esprit d'équilibre. Ce renvoi en commission nous permettra d'étudier la question de cet équilibre, notamment celui du financement. En effet, comme chacun le sait, c'est la péréquation entre les logements en propriété et les autres qui permet d'assumer les financements, et nous pourrons prouver cette question en commission. Merci beaucoup.

M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Cette initiative, Mesdames et Messieurs les députés, marque le début d'un débat qui va durer quelques mois au sein de votre parlement avant qu'elle ne soit soumise à votation populaire. Il s'agit de revoir l'article 4A de la loi générale sur les zones de développement, qui est issu de l'accord sur le logement de 2006 et fixe des éléments très importants. On parle ici de politique du logement mais, en réalité, c'est tout un projet de société qui se cache là-derrière. Pourquoi ? Parce que cet article 4A définit la part des différents types de logements que nous devons réaliser dans chaque nouveau quartier que nous construisons. A cet égard, une chose devrait nous unir, à savoir que nous devons éviter les ghettos dans notre canton, nous devons éviter de concentrer dans un même endroit trop de logements sociaux comme nous devons par ailleurs éviter de construire dans un même endroit exclusivement des logements pour les personnes très aisées. La mixité sociale est l'un des fondements de notre équilibre politique et économique, de la stabilité démocratique de notre pays. Observons autour de nous les pays qui n'ont pas su mettre en oeuvre cette mixité sociale dans l'aménagement du territoire, voyez le prix à payer lorsqu'on réalise des quartiers déséquilibrés.

Le constat du Conseil d'Etat sur ces dix ans issus de l'accord sur le logement est un verre à moitié plein ou à moitié vide, selon la façon dont on le regarde. Certes, il a porté ses fruits: des logements sociaux ont été construits, de nouveaux quartiers sont sortis de terre, des PPE en nombre ont été bâties; toutefois, si l'on examine les chiffres de ces dix dernières années, on relève un déséquilibre dans la répartition entre logements subventionnés, logements locatifs non subventionnés et propriétés - que ce soit PPE ou villas - laquelle est la suivante: sur l'ensemble du parc locatif, on a construit 33% de logements subventionnés, 50% de villas et de PPE - un logement sur deux réalisé ces dix dernières années était une propriété privée ! - et seuls 17% de logements locatifs non subventionnés.

Nous pouvons en tirer deux conclusions. Le premier problème, Mesdames et Messieurs, concerne la classe moyenne, celle qui paie des impôts et n'a droit ni aux allocations - allocations d'études, allocations de logement, subsides d'assurance-maladie - ni à toute une série de prestations publiques ni aux logements subventionnés parce que, et c'est tant mieux, elle arrive à assurer sa propre autonomie financière. Cette classe moyenne, qui représente pourtant la majorité de la population - plus de 50% des ménages genevois ! - est matraquée par les charges qui lui incombent. Récemment, une étude a montré qu'à Genève, même si les salaires sont hauts en comparaison suisse, le pouvoir d'achat réel de la classe moyenne est fortement érodé pour trois raisons: les impôts, l'assurance-maladie - que mon collègue Poggia s'efforce de maîtriser - et le loyer, c'est-à-dire les charges de l'habitat.

Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas baser notre politique du logement sur deux seuls piliers, qui consisteraient d'un côté à favoriser la politique sociale, des logements d'utilité publique subventionnés - cette politique est importante et nécessaire, mais elle ne concerne qu'une minorité des gens dans ce canton - et de l'autre à ne servir que les personnes qui peuvent accéder à la propriété. Nous devons aujourd'hui fortement renforcer la création de logements en faveur de cette classe moyenne qui gagne trop pour bénéficier d'un logement subventionné mais ne gagne pas assez ou n'est pas assez fortunée pour accéder à la propriété. La majorité des citoyennes et citoyens de ce canton, Mesdames et Messieurs les députés, n'ont été servis que par 17% des logements construits ces dix dernières années. Voilà le premier échec de la politique du logement pratiquée ces dernières années, et voilà l'un des axes primordiaux sur lesquels le Conseil d'Etat veut baser son contreprojet.

Le deuxième élément a déjà été soulevé: l'accord de 2006 prévoyait d'atteindre 20% de logements d'utilité publique sur l'ensemble du parc locatif genevois; or nous en sommes à 10%. Si nous continuons à ce rythme, nous ne parviendrons à l'objectif de 20% que dans cinquante à septante ans. Mesdames et Messieurs, je suis pour la cohérence des outils législatifs; nous ne pouvons pas fixer dans la loi, comme vous l'avez fait il y a dix ans, un objectif de 20% de logements d'utilité publique et, dans le même temps, refuser d'augmenter la part de logements d'utilité publique.

Contrairement à ce qu'a dit M. Riedweg, le problème des logements d'utilité publique n'est pas leur rendement, pas du tout ! Le produit immobilier LUP est un placement extrêmement intéressant avec des rendements quasiment garantis par l'Etat de 4,5% à 6%. Dites-moi quel autre placement sur le long terme vous assure un tel rendement aujourd'hui ! Les 1500 logements à la caserne des Vernets, ce sont 100% de domiciles locatifs dont 1000 LUP, c'est-à-dire deux tiers de logements LUP; eh bien figurez-vous que cinq investisseurs parmi les plus grands groupes bancaires suisses étaient en concurrence pour obtenir ce marché de 1000 LUP, Monsieur Riedweg, donc je ne veux pas entendre dans ce parlement que le logement d'utilité publique serait un mauvais placement financier. Au contraire, c'est un bon placement financier, pas spéculatif, avec des rendements corrects mais pas abusifs et stables sur la durée, c'est un produit intéressant qui attire aujourd'hui surtout, vous l'avez dit, les caisses de pension. Là encore, nous devons faire un effort si nous voulons atteindre l'objectif de 20% inscrit dans la loi, il faudra également un correctif.

Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat estime que l'initiative 161 déposée par les milieux de gauche et des locataires va dans le bon sens, mais trop loin dans le bon sens: elle prévoit 50% de logements d'utilité publique subventionnés, donc soumis à la LGL, plus encore 30% de locatif, en créant une rigidité législative qui, aux yeux du Conseil d'Etat, va trop loin et déséquilibrerait les plans financiers et les structures de quartier dans l'autre sens. Par conséquent, le Conseil d'Etat reviendra auprès de vous prochainement - au plus tard d'ici la fin du premier trimestre 2017 - avec une proposition de contreprojet puisqu'il faut de toute façon modifier l'article 4A actuel. Nous ne soutenons pas le texte de l'initiative 161, nous devons trouver un compromis entre ce que nous avons vécu ces dix dernières années et ce que nous allons vivre dans le futur, et j'espère que votre parlement, Mesdames et Messieurs les députés, adoptera ce compromis en pensant avant tout à la classe moyenne, qui a été très mal servie ces dernières années, tout en étant cohérent quant à l'objectif des LUP qui, lui, peut et doit rester à 20%. Il faut peut-être un peu mieux régler le curseur, mais sans tout révolutionner. Voilà pour les travaux que je me réjouis d'entreprendre avec vous en commission.

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'est plus demandée.

L'initiative 161 et le rapport du Conseil d'Etat IN 161-A sont renvoyés à la commission du logement.