République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 24 novembre 2016 à 17h
1re législature - 3e année - 10e session - 53e séance
PL 11687-A
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au point suivant de l'ordre du jour, en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole au rapporteur de majorité.
M. François Lance (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une majorité de la commission estime que ces modifications à ce concordat ont été attentivement étudiées à la commission interparlementaire ainsi qu'à la commission des affaires communales, régionales et internationales; elles sont considérées comme mineures. La modification du concordat permettra entre autres la modernisation et le développement de la prise en charge des personnes mineures, la mise en commun des ressources et des expériences... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et au canton de Genève de revoir les tâches incombant au centre de détention pour personnes mineures de La Clairière et de répondre à l'évolution des besoins.
Présidence de Mme Christina Meissner, première vice-présidente
En raison de ce qui précède, et à travers ce projet de loi, la majorité de la commission vous demande d'autoriser le Conseil d'Etat à adhérer au concordat sur l'exécution de la détention pénale des personnes mineures des cantons romands et partiellement du Tessin. On précise qu'un concordat ne peut être amendé, mais seulement ratifié ou refusé par notre Grand Conseil. La majorité de la commission vous demande donc d'autoriser le Conseil d'Etat à adhérer à ce concordat.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Avant de passer la parole à la rapporteure de minorité, je demande un peu silence, s'il vous plaît. Merci. Madame Isabelle Brunier, je vous passe la parole.
Mme Isabelle Brunier (S), rapporteuse de minorité. Merci, Madame la présidente de séance. Il est clair, et cela a été rappelé, que s'agissant des concordats, les Grands Conseils des cantons concernés n'ont quasiment qu'un rôle de chambre d'enregistrement. Mais en l'occurrence, ce rapport de minorité ouvre la possibilité d'une discussion, et ce n'est pas un luxe. En effet, ce rapport était surtout motivé, au départ, par les aspects sociaux qui nous paraissaient largement oubliés: les questions de la distance, du temps de parcours, des coûts induits par les visites aux détenus pour leurs familles, mais aussi pour les professionnels chargés du suivi des dossiers de ces détenus, avocats, assistants sociaux, psychologues, etc. Mais en définitive, il est aussi heureux que ce rapport de minorité existe parce qu'on a appris, depuis le moment où il a été rédigé - c'est la presse vaudoise qui en a amplement fait état au printemps dernier - que la prison des Léchaires est largement sous-exploitée et qu'il y a maintenant un problème économique avec cette infrastructure qui tourne à bas régime. Voulue au début des années 2000, à un moment où la délinquance juvénile explosait, elle a été mise en service seulement en 2014, alors que la tendance s'était largement inversée, ce dont on peut d'ailleurs se réjouir. Dans l'intervalle, on a aussi privilégié des mesures avisées, éducatives plutôt que d'enfermement. Il y a donc clairement une surestimation des besoins. C'est la raison pour laquelle d'une part la question du partage de la facture d'exploitation et d'autre part celle de l'avenir des Léchaires sont clairement posées, tout comme la question - qui peut paraître annexe mais est néanmoins liée - de l'avenir de La Clairière. L'article de journal auquel je me réfère principalement, paru dans «24 heures», annonçait en février que le concordat latin devait se réunir prochainement pour discuter de la répartition des détenus mineurs. J'espère, et sans doute la majorité de ce plénum également, que le Conseil d'Etat pourra nous donner des informations à ce sujet, puisque entre-temps des négociations ont dû avoir lieu; nous aimerions savoir en particulier ce qu'il en est des coûts induits, mais aussi de la réelle utilité de cette prison des Léchaires, étant entendu que malheureusement, le concordat ne pouvant qu'être accepté, ce rapport de minorité n'existe que pour avoir quelques réponses que nous espérons obtenir si M. Maudet veut bien nous les donner.
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi d'attirer votre attention sur la complexité de la problématique à laquelle nous sommes ici confrontés. D'un côté, les Léchaires: prison concordataire organisée initialement en deux secteurs, exécution de peine d'un côté et détention préventive pour mineurs de l'autre; en tout 36 places au départ. Toutefois, pour des motifs de remplissage, donc de rentabilité, elle s'est récemment réorganisée: 18 places sont maintenant réservées pour la détention des jeunes adultes, de 18 à 25 ans, ce qui ne laisse plus que 18 places pour les mineurs de Romandie. De l'autre côté, à Genève, nous avons La Clairière, établissement concordataire qui comporte à l'heure actuelle deux secteurs: celui de l'observation - observation pénale - mais aussi les placements civils demandés par le TPAE qui d'ailleurs multiplie ce type de demandes, et celui de la détention préventive. La détention préventive, Mesdames et Messieurs les députés, est fixée, définie par une première période de sept jours d'incarcération, durant laquelle le Tribunal des mineurs doit étayer le dossier en vue soit d'en demander la prolongation, soit de juger la cause. Il faut donc oeuvrer rapidement, avec une enquête très réactive, y compris vis-à-vis de la famille du prévenu.
Effectivement, donc, comme le dit le rapport de minorité, le placement aux Léchaires de tout mineur romand en détention préventive non seulement l'éloigne de sa famille et de ses amis, mais complique grandement le travail des juges cantonaux, le temps nécessaire au transport, à l'organisation et à la conduite de l'enquête constituant un frein supplémentaire. Et même si le placement en détention des mineurs connaît une forte décrue en général, un pic est toujours possible, comme le prouve la dernière période estivale de La Clairière, où dix mineurs ont été incarcérés en préventive conjointement.
La vision théorique du concordat, qui transfère toute la détention préventive aux Léchaires, est donc mise à mal par la réalité du terrain. La prison vaudoise ayant réduit ses places de 50%, elle ne pourra pas toujours faire face au nombre de demandes de la région romande et les juges cantonaux des mineurs ne pourront instruire correctement tous les cas dans les délais impartis, si tous les mineurs en préventive sont placés hors canton. Bref, il y a fort à parier que cette disposition du concordat restera lettre morte pendant longtemps. Faut-il pour autant refuser de le signer ? La réponse est ici politique: le rejeter équivaut à rejeter ses autres dispositions, qui constituent des avancées juridiques approuvées par tous, et à donner un signal très négatif à la collaboration intercantonale, ce qui complique encore l'exécution du concordat des détenus majeurs cette fois, qui n'a pas besoin de cela. Ajoutons le fait que le signer ne provoquera pas, de facto, un exode de nos mineurs aux Léchaires. Les Verts soutiennent cette signature, mais demandent à la Conférence latine des chefs des départements de justice et police de se pencher à nouveau sur cette problématique de la détention préventive des mineurs. Je vous remercie.
M. Eric Leyvraz (UDC). Il est clair que l'UDC accepte ce projet de loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à ce concordat. S'il y a quelques problèmes concernant la distance à parcourir pour les visites des familles des détenus, il s'agit comme toujours d'un compromis. Nous sommes convaincus que la mise en commun des ressources et des expériences améliorera la détention de ces mineurs. Il nous semble tout à fait normal, dans une logique d'économies, de partager des institutions. C'est d'ailleurs dommage que vous n'ayez pas la même approche concernant d'autres types de détention - deux cantons proches construisent actuellement deux prisons qui vont être très coûteuses.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que je suis extrêmement surpris d'entendre que certains députés veulent accepter ce concordat ce soir de la sorte. Une majorité de ce Grand Conseil est préoccupée chaque année par les questions budgétaires, et le fait que nous ayons un budget 2017 déficitaire devrait nous inciter à regarder de plus près cette proposition de concordat. Il s'agit de mettre des jeunes, des mineurs - y compris des mineurs en préventive, ça figure dans le rapport - aux Léchaires, à Palézieux, dans le canton de Vaud, plutôt qu'à La Clairière, dans le canton de Genève. Des mineurs en préventive, ça signifie des frais de déplacement pour la justice, qui sont à la charge du canton, de notre collectivité, alors que quand ces personnes sont à La Clairière, les frais sont nettement moindres. En plus, je vous rappelle qu'il y a aujourd'hui des problèmes concernant le transfert des détenus, selon la catégorie de personnel, et les coûts ne sont pas négligeables: on n'a pas besoin de multiplier ceux-ci en éloignant des détenus. Il est tout simplement incompréhensible que les personnes qui se sont occupées de ce concordat n'aient pas apporté la moindre réponse à cette question dans ce rapport. Il n'y a pas de chiffres, on ne sait pas combien il y a de transferts durant une année, combien ça coûte - c'est tout simplement anormal !
Et puis, Mesdames et Messieurs les députés, il ne faut pas oublier autre chose: ce n'est pas seulement la justice qui doit se déplacer, c'est aussi le mineur en détention, quand il a un congé le week-end, et qui se retrouve à Palézieux. La nature est jolie là-bas, oui, mais il doit retourner à Genève ! Avez-vous pensé au coût d'un billet de train jusqu'à Genève pour un jeune détenu qui n'a peut-être pas beaucoup de moyens ? C'est pour l'inciter à commettre un nouveau délit et à prendre le train sans billet ? Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de concordat concernant les Léchaires n'a tout simplement pas été étudiée correctement. La commission a fait ce qu'elle pouvait, ce n'est pas la commission des visiteurs; je vous incite à renvoyer ce projet de loi à la commission des visiteurs pour qu'on étudie aussi les coûts et les propositions alternatives afin de diminuer des frais inutiles à notre canton.
La présidente. Merci, Monsieur le député. Sur cette demande de renvoi, seuls les rapporteurs peuvent s'exprimer. Je passe la parole au rapporteur de majorité.
M. François Lance (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente de séance. Le rapporteur de majorité de la commission des affaires communales, régionales et internationales n'est pas favorable à ce renvoi, puisque cette modification du concordat a déjà été traitée en 2015 par différentes commissions et en particulier la commission interparlementaire. Il s'agissait de modifications mineures à ce concordat. Il n'est donc pas nécessaire de renvoyer cet objet en commission.
Mme Isabelle Brunier (S), rapporteuse de minorité. J'aurai évidemment la position inverse, d'autant plus qu'effectivement, aucun chiffre ne nous a été donné. Vraisemblablement, aucun chiffre n'avait non plus été donné à la délégation qui s'est rendue à la commission interparlementaire; ou en tout cas, s'il y en a eu, ils ne nous ont pas été transmis. Nous avons donc dû traiter ce sujet sans avoir les informations chiffrées et sans connaître l'impact réel de ce concordat. Je soutiens donc, et la minorité avec moi, le renvoi à la commission des visiteurs, certainement mieux outillée pour enquêter sur le sujet.
La présidente. Merci, Madame la députée. Je passe la parole au conseiller d'Etat, M. Pierre Maudet... (Remarque.) ...qui ne la prend pas. Nous pouvons donc procéder au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11687 à la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil est rejeté par 47 non contre 35 oui.
La présidente. Nous poursuivons nos débats. Je passe la parole à M. le député Bernhard Riedweg.
M. Bernhard Riedweg (UDC). Merci, Madame la vice-présidente. Ce concordat permet d'apporter des solutions au problème complexe de la délinquance juvénile et à ses manifestations parfois très violentes. (Brouhaha.) La modification du concordat permettra la modernisation et le développement de la prise en charge des mineurs, la mise en commun des ressources et des expériences d'une part, et de revoir les tâches incombant au centre de détention pour personnes mineures ainsi que de répondre à l'évolution des besoins d'autre part. Il s'agit d'encadrer, d'éduquer et de protéger une minorité de jeunes délinquants difficiles, car la seule privation de liberté comme réponse à la délinquance n'est pas suffisante. Les mineurs condamnés font l'objet d'un suivi par des assistants sociaux, des éducateurs et des psychologues qui travaillent en réseau; on ne distingue plus l'éducationnel et le thérapeutique. Les tribunaux des mineurs adaptent les mesures prises en fonction de l'évolution du mineur avec un encadrement de plus en plus doux, le but étant de sortir dès que possible les mineurs de l'enfermement. Il s'agit essentiellement de jeunes qui dysfonctionnent en foyer et qu'il convient de recadrer; il faut souvent appliquer des mesures de protection qui sont prises pour des mineurs qui peuvent s'exposer à des risques. Les tribunaux prennent de moins en moins de décisions d'enfermement, la dangerosité des personnes mineures étant évaluée par une commission d'évaluation de la dangerosité.
Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président
Pour l'encadrement d'un des 19 mineurs à La Clairière, située dans notre canton... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...le coût journalier en 2015 était de 767 F, étant donné qu'il faut compter deux personnes d'encadrement par mineur ! Les détenus peuvent être condamnés aux frais de prise en charge hôtelière, mais le droit pénal des mineurs atténue cet aspect afin d'éviter de charger leur futur; le Tribunal des mineurs peut - à des fins pédagogiques - faire contribuer le mineur aux frais d'encadrement et sa famille peut également être mise à contribution si elle dispose de biens. La commission des affaires communales, régionales et internationales et l'Union démocratique du centre, tout comme la commission interparlementaire, vous demandent de ratifier ce concordat qui ne peut ni être amendé ni renvoyé dans une commission tierce. Merci, Monsieur le président.
M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, nous sommes intimement convaincus que les solutions qui vont dans le sens de l'intercantonalité sont des solutions d'avenir, qui sont appréciées, quelle que soit la thématique à laquelle elles se rapportent. Certes, ces solutions parfois ne sont pas absolument parfaites. Mais où trouve-t-on des solutions parfaites aujourd'hui ? Nous pensons, de plus, que le problème de la localisation et de la proximité de la famille, évoqué notamment dans le rapport de minorité, n'est pas propre à cette prison concordataire: on peut donner d'autres exemples, et on peut aussi imaginer que d'autres parlements ont déjà évoqué cette problématique. J'aimerais aussi vous rappeler qu'à l'échelle européenne, la Suisse romande, c'est un petit timbre-poste; ce qui paraît une distance absolument gigantesque, une soixantaine de kilomètres, permettez-moi de le dire, cela me fait doucettement rigoler. C'est pourquoi, en ce qui concerne le groupe PLR, nous soutiendrons ce concordat et nous vous proposons de l'accepter tel quel.
Une voix. Bravo !
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, oui, oui, oui et oui, il faut que notre Conseil d'Etat adhère au concordat sur l'exécution des peines des mineurs. Maintenant, j'aimerais rassurer M. Deneys: il sait très bien qu'à la commission des visiteurs, nous allons travailler sur les conditions de détention, d'accompagnement et d'intégration des mineurs; il n'était donc de toute manière pas nécessaire de renvoyer ce rapport à la commission. Nous savons que c'est bien en participant à ce concordat qu'on peut faire évoluer la prise en charge, que ce soit aux Léchaires ou à La Clairière: c'est bien évidemment en contribuant aux travaux qu'on peut encore rationaliser ou répartir les mineurs d'une manière plus intelligente. Je pense aussi que la distance, décriée par certains, est un avantage dans d'autres cas, pour que des mineurs ne soient justement pas trop vite à nouveau en contact avec une famille pathogène ou avec un environnement d'amis «criminogène», pourrait-on dire. Dans certains cas, ce qui peut apparaître comme un inconvénient forme un net avantage, et je crois que nous ne pouvons que renforcer notre Conseil d'Etat en adhérant à ce concordat des mineurs comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant à satisfaction. Je vous remercie.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Le groupe MCG, bien que d'accord sur le fond de ce projet de loi, va aussi demander le renvoi à la commission des visiteurs, juste pour éclaircir la situation. (Commentaires.) De quelle commission les membres de la commission interparlementaire proviennent-ils ? De la commission des visiteurs. Pourquoi ce projet de loi a-t-il été traité par la commission des affaires communales, régionales et internationales ? Qu'en est-il ? Je demande donc le renvoi à la commission des visiteurs, merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un renvoi en commission. Les rapporteurs souhaitent-ils s'exprimer ? (Commentaires.) Ce n'est pas le cas. Mesdames et Messieurs, je vous invite à vous prononcer sur cette demande.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11687 à la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil est rejeté par 47 non contre 39 oui.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que selon l'article 230A, alinéa 3 de la loi portant règlement du Grand Conseil, c'est bien la commission des affaires communales, régionales et internationales qui est compétente pour traiter de cet objet. Nous poursuivons notre débat. Je passe la parole à M. le député Christian Zaugg.
M. Christian Zaugg (EAG). Monsieur le président, chers collègues, je tenais à vous indiquer, en tant que président de la commission des visiteurs officiels, que la situation a considérablement changé en ce qui concerne la détention des mineurs. En effet, tant l'établissement genevois de La Clairière que celui des Léchaires sont très loin d'être remplis. Il y a indiscutablement un danger à ne pas aller plus loin dans l'étude véritable de cette proposition: le danger, à terme, c'est l'éventuelle fermeture de La Clairière. Je pense, chers collègues, que cela mérite encore un petit tour en commission. (Protestations.) C'est la raison pour laquelle je demande, au nom de mon groupe, Ensemble à Gauche, le renvoi de cet objet à la commission des visiteurs. (Commentaires.)
Le président. Monsieur le député, j'accepte tout à fait votre demande; mais nous venons de voter sur la même requête, et je vous ai renvoyé à l'article de notre règlement qui décrit les compétences de la CACRI. Je vous l'ai dit, la CACRI est bien compétente pour cet objet. Maintenez-vous votre demande de renvoi à la commission des visiteurs ?
M. Christian Zaugg. Je le maintiens !
Le président. Bien. Mesdames et Messieurs, je soumets cette demande à votre vote. (Commentaires. Le président agite la cloche.)
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11687 à la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil est rejeté par 50 non contre 37 oui.
Le président. Nous poursuivons notre débat. Je passe la parole à M. le député Roger Deneys.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je suis extrêmement chagriné d'entendre que cette proposition de renvoi en commission n'a pas été acceptée. C'est vrai, cela a été étudié à la commission des affaires communales, régionales et internationales, mais les chiffres n'ont pas été évoqués, la question des coûts des transferts de détenus n'a pas été évoquée. Dans le cadre du budget, cela représente des coûts considérables que d'avoir un établissement à Genève comme La Clairière et un autre au-delà de Lausanne, à Palézieux, de devoir organiser le transfert des détenus pour des audiences et des auditions au Palais de justice, les avocats qui doivent se rendre à Palézieux parce qu'il y a aussi là-bas des places de détention préventive; cela représente... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...plusieurs dizaines, voire centaines de milliers de francs par an. Mesdames et Messieurs les députés, si on est responsable et qu'on veut des budgets équilibrés, on ne peut pas voter cette proposition telle quelle. On le lit à la page 11, la réflexion portera sur la réaffectation de la deuxième partie de La Clairière ! En clair, on voudrait fermer La Clairière, donc fermer l'établissement genevois, pour mettre tous ces jeunes à Palézieux. C'est bien ça le problème ! Mme von Arx a raison de dire que dans certains cas, il faut peut-être éloigner les jeunes de Genève; mais dans d'autres cas, c'est complètement contre-productif et ça coûte cher ! Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je demande le renvoi à la commission des affaires communales, régionales et internationales - puisqu'il semble que c'est la commission qui doit s'en occuper - afin qu'elle obtienne au moins les chiffres et les coûts et que notre Grand Conseil se prononce en connaissance de cause, avec les chiffres et les coûts pour le budget. On ne peut pas vouloir des budgets à l'équilibre et ne pas se préoccuper des dépenses !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, le scrutin est ouvert sur cette demande de renvoi en commission. (Remarque.) Vous êtes tous là, ça suffit !
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11687 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est rejeté par 47 non contre 41 oui.
Le président. Nous poursuivons nos débats. Je passe la parole à M. Eric Stauffer, pour deux minutes.
M. Eric Stauffer (HP). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je me dois d'intervenir, ayant siégé à la commission des visiteurs officiels pendant dix ans à peu près. J'entends certains de mes collègues dire qu'il y a un établissement à Palézieux, qu'il y en a un à Genève, La Clairière; j'aimerais rappeler que tout cela est articulé au sein du concordat latin et qu'à Genève, nous sommes aussi redevables vis-à-vis des autres cantons, et inversement. J'estime - vous me pardonnerez si vous ne me comprenez pas - que nous sommes un peu des enfants gâtés ! On parle de 60 kilomètres de distance - au pire, dans l'hypothèse de travail que La Clairière ferme. Allez voir dans les autres pays européens: vous constaterez...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. ...vous constaterez qu'il n'y a pas une prison préventive tous les 12 kilomètres... (Remarque.) ...et que certaines personnes font parfois 200 à 250 kilomètres pour être simplement auditionnées. Donc on parle un peu en enfants gâtés. Je conclurai, Monsieur le président, si vous daignez me prêter un peu d'attention... (L'orateur s'arrête de parler un instant.) Merci, Monsieur le président. Je conclurai en demandant une motion d'ordre pour qu'on puisse arriver directement au vote avec une déclaration finale. Comme on en est à la troisième demande de renvoi en commission et que les lampes se sont allumées à gauche, je pense qu'ils vont continuer à demander des renvois en commission. Je propose donc une motion d'ordre pour une déclaration finale par groupe, et plus d'autre prise de parole.
Le président. Bien, vous demandez une motion d'ordre qui interdirait aux députés de parler jusqu'aux déclarations finales, avec un député par groupe au maximum. Je mets aux voix cette motion d'ordre.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée par 42 non contre 36 oui.
Le président. Nous poursuivons nos débats. Je passe la parole à M. le député Jean-Michel Bugnion.
M. Jean-Michel Bugnion (Ve). Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, pour répondre à M. Deneys: il faut nuancer, quand même. Les coûts énormes qu'il prévoit ne concernent que trois, quatre mineurs, peut-être cinq au maximum. Ils ne peuvent pas être aussi exorbitants. Ensuite, à la commission des visiteurs, nous avons en effet visité les Léchaires. Je peux vous dire que c'est une prison qui est, maintenant, totalement remplie, puisque 18 places pour les adultes et les jeunes adultes...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Jean-Michel Bugnion. Je conclus. Non seulement elle est remplie, mais elle est très bien gérée; les détenus jeunes ont beaucoup d'ateliers à disposition et un suivi de qualité. Je ne pense pas que nous soyons perdants, et je pense que de toute façon, comme je vous le disais avant, la détention préventive à La Clairière...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Jean-Michel Bugnion. ...va devoir continuer. Nous n'allons donc pas, pour le moment en tout cas...
Le président. C'est terminé !
M. Jean-Michel Bugnion. ...envoyer nos jeunes aux Léchaires. J'ai terminé, merci, Monsieur le président, et mes excuses !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Lydia Schneider Hausser. (Remarque.) Non, désolé, vous n'avez plus de temps de parole. Je cède donc le micro à M. le conseiller d'Etat Pierre Maudet.
M. Pierre Maudet, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Je salue d'abord le souci et l'intérêt de ce parlement pour la question de la détention des mineurs, question importante, sensible, au sujet de laquelle on a pu constater - il faudrait quand même en prendre acte aujourd'hui - une diminution globale de la délinquance juvénile et donc une diminution du recours aux infrastructures pénitentiaires dévolues aux mineurs. C'est plutôt réjouissant; par les temps qui courent, dans le domaine pénitentiaire, il faut souligner les bonnes nouvelles !
Bonne nouvelle à tempérer cependant - et je salue le propos de M. Bugnion, parce qu'il est exact: les Léchaires sont aujourd'hui remplies. 18 places sont dévolues aux mineurs, 18 autres places sont occupées quasi entièrement par de jeunes adultes, et il y a encore un potentiel de développement pour 18 places. Mais je crois pouvoir dire après un peu plus d'une année d'exercice que cet établissement, conçu de manière modulaire pour un développement progressif, a été correctement planifié. Je précise aussi qu'en bonne intelligence avec le Tribunal des mineurs, nous avons recours à La Clairière pour de la préventive, parfois jusqu'à sept jours d'affilée. Ces sept jours sont précisément ceux durant lesquels l'instruction est menée. Je peux vous garantir ici qu'on diminue, enfin, on limite au maximum les coûts de convoyage. Je salue à ce propos le souci soudain et subit du député Deneys s'agissant des budgets publics... (Remarque.) ...des budgets dans le domaine pénitentiaire en particulier; et je me réjouis de l'entendre tenir ce même discours, par cohérence, à propos d'autres établissements pénitentiaires en dehors du canton, qu'il appelait de ses voeux. Vous noterez avec moi ici l'incohérence totale de plaider pour des bâtiments pénitentiaires en dehors du canton lorsqu'il s'agit des adultes mais à l'intérieur du canton lorsqu'il s'agit des mineurs. Evidemment, il n'est pas à une contradiction près.
Ce qu'il faut retenir ici, Mesdames et Messieurs - et la CACRI a très bien fait son travail - c'est que la collaboration intercantonale est fondamentale dans le domaine pénitentiaire, et que Genève, de ce point de vue là, a quand même un certain retard. Je ne vous ferai pas l'injure de vous rappeler ici les quarante-cinq ans que Genève a mis pour assumer la réalisation de l'établissement Curabilis. Le canton de Vaud a pris ses responsabilités, nous l'avons soutenu il y a quelques années. Il s'agit de l'acter maintenant dans ce concordat, dont M. Riedweg a rappelé à juste titre qu'on ne pouvait ni le modifier, ni l'amender, ni a priori le refuser, puisqu'il y a un engagement et qu'il faut respecter la parole donnée. J'entends que certains sont peu préoccupés par cette parole. Nous nous retrouverons lorsqu'il s'agira de parler d'autres établissements, et je me réjouis de faire à ce moment-là la démonstration qu'en effet, il est pertinent, notamment pour de gros établissements, de les construire sur notre territoire pour épargner les coûts de convoyage qui vous causent du souci. Mais sur la question des mineurs et de ce concordat, il est essentiel de donner ce soir un signe aux cantons voisins, aux cantons romands, et de montrer que nous jouons véritablement la carte intercantonale. Je vous remercie de votre attention. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. J'ai le plaisir de saluer à la tribune un groupe de l'Université ouvrière de Genève accompagné par M. Claude Gerber, responsable de formation. Il vient nous rendre visite dans le cadre d'un cours sur le système politique. (Applaudissements.)
Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 11687 est adopté en premier débat par 70 oui contre 21 non.
La loi 11687 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter sur l'entier de ce projet de loi.
Une voix. Vote nominal ! (Protestations.)
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. (Remarque.) Monsieur Deneys, s'il vous plaît !
Mise aux voix, la loi 11687 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 70 oui contre 21 non (vote nominal).