République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 22 avril 2016 à 15h45
1re législature - 3e année - 3e session - 14e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 15h45, sous la présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Anne Emery-Torracinta et Mauro Poggia, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Pierre Maudet, Luc Barthassat et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Anne Marie von Arx-Vernon, Beatriz de Candolle, Roger Deneys, Lionel Halpérin, Serge Hiltpold, Frédéric Hohl, Carlos Medeiros, Bénédicte Montant, Philippe Morel et Eric Stauffer, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Maria Casares, Christian Decorvet, Patrick Dimier, Jean-Charles Lathion, Patrick Malek-Asghar, Nathalie Schneuwly, Charles Selleger et Alexandre de Senarclens.
Annonces et dépôts
Le président. La pétition suivante, parvenue à la présidence, est renvoyée à la commission des pétitions:
Pétition : Grand projet Vernier-Meyrin-Aéroport : pétition contre le déclassement (P-1973)
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Séparation des pouvoirs ! (QUE-460)
Question écrite urgente de M. Thierry Cerutti : Le parlement ordonne - la commission de gestion exécute ! (QUE-461)
Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : HUG : favoriser l'embauche ou la précarité ? (QUE-462)
Question écrite urgente de M. Christo Ivanov : Est-ce que Genève Tourisme veut la peau des forains genevois ? (QUE-463)
Question écrite urgente de M. Boris Calame : C'était le 17 avril 2015 : trois p'tits tours et puis plus rien... (QUE-464)
Question écrite urgente de M. Patrick Lussi : Distribution aux médias des appels à témoin (QUE-465)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Combien de bénéficiaires du permis frontaliers (G) ont été engagés en 2015 ? (QUE-466)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Combien de départs à la retraite à l'Etat de Genève en 2015 ? (QUE-467)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Le Petit et le Grand Etat se conforment-ils à la directive de la préférence cantonale ? (QUE-468)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Combien d'engagements à l'Etat en 2015 ? (QUE-469)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Combien de chômeurs engagés à l'Etat en 2015 ? (QUE-470)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Combien de postes d'apprentis à l'Etat en 2015 ? (QUE-471)
Question écrite urgente de M. Eric Stauffer : Combien d'élèves en « maturité professionnelle » formés par l'Etat en 2015 ? (QUE-472)
Question écrite urgente de Mme Frédérique Perler : Bourses d'études, pourquoi tant de retard ? (QUE-473)
Question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Panama papers : que fait concrètement le département des finances pour récupérer ce qui a été caché au fisc genevois ? (QUE-474)
Question écrite urgente de Mme Sarah Klopmann : Le magistrat Luc Barthassat fait-il du vélo d'appartement pendant que les cyclistes genevois.e.s risquent leur vie sur les routes mal aménagées ? (QUE-475)
Question écrite urgente de Mme Jocelyne Haller : Service des prestations complémentaires (SPC) : pourquoi l'accès à des prestations de service public devrait-il dépendre du hasard ou de la chance ? (QUE-476)
Question écrite urgente de M. Marc Falquet : Attestation de non-poursuite avec antécédents : après le casier judiciaire, voici le « casier civil » ! L'application de la loi fédérale ne risque-t-elle pas de générer l'exclusion de nombreuses personnes du marché du logement, du marché de l'emploi ou du crédit hypothécaire ? (QUE-477)
Question écrite urgente de M. Christian Dandrès au sujet des loyers au m2 payés par les entreprises privées sises au 23, avenue de France - Immeuble administratif avenue de France, IAF/FIPOI (QUE-478)
Question écrite urgente de M. Christian Dandrès : Convoyage et surveillance des détenus (QUE-479)
Question écrite urgente de Mme Caroline Marti : Déduction fiscale des frais de représentation : quelles pertes de recettes pour l'Etat de Genève ? (QUE-480)
QUE 460 QUE 461 QUE 462 QUE 463 QUE 464 QUE 465 QUE 466 QUE 467 QUE 468 QUE 469 QUE 470 QUE 471 QUE 472 QUE 473 QUE 474 QUE 475 QUE 476 QUE 477 QUE 478 QUE 479 QUE 480
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Questions écrites
Le président. Vous avez également trouvé sur vos places la question écrite suivante:
Question écrite de M. Boris Calame : Dis-moi avec qui tu vis, je te dirai ce que tu vivras ? (Q-3773)
Le président. Cette question écrite est renvoyée au Conseil d'Etat.
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous reprenons nos urgences et passons à la proposition de motion 2317. Je passe la parole au premier signataire, M. le député Jean Batou.
M. Jean Batou (EAG). Merci, Monsieur le président. Vous avez reçu une motion dont les invites ont été amendées, parce que la situation a quelque peu changé depuis le moment du dépôt de cet objet. Je vais d'abord la présenter, cela ne change pas le fond du problème. Tout d'abord, j'aimerais rappeler que cette proposition de motion est liée à la résolution que nous avons votée hier, puisqu'il s'agit de trouver de nouvelles recettes sans élever les impôts, ce qui est possible, en luttant contre la fraude fiscale. La fraude fiscale est évidemment quelque chose de très difficile à estimer, mais je me suis basé sur David Hiler qui dirigeait le département précédemment et qui l'estimait à 500 millions. Si on tient compte de l'augmentation de l'assiette fiscale depuis une dizaine d'années, il doit s'agir aujourd'hui de 600, 650 millions, allez savoir ! Il y a, dans cette réserve considérable issue de la fraude fiscale, la possibilité d'accroître les recettes de l'Etat et donc de répondre à un certain nombre d'objectifs prioritaires pour la population.
Vous savez qu'actuellement, le service de la taxation est débordé et qu'au cours des dernières années, le taux de taxation des déclarations fiscales, au cours de l'année, qui était de l'ordre de 87% il y a cinq ans, est tombé à 76%. L'administration fiscale n'arrive donc plus à suivre dans le traitement des déclarations d'impôts. Cela pose déjà problème. Par ailleurs, pour ce qui est des contrôleurs, ce qui est une autre chose, c'est-à-dire ceux qui vont contrôler qu'il n'y ait pas de sous-déclaration ou de fraude volontaire au fisc et qui sont donc là pour lutter pour l'égalité fiscale - parce qu'il n'est pas normal que ceux qui paient correctement leurs impôts doivent payer pour ceux qui fraudent - leur nombre est insuffisant. Ils sont actuellement vingt-cinq et ils rapportent chacun aux recettes publiques 5,8 millions et non pas 5,3 millions comme je l'avais noté par erreur dans les considérants. 5,8 millions pour un fonctionnaire qui effectue un travail de contrôle fiscal. Cela signifie qu'en en engageant cinq, comme le proposait d'ailleurs le Conseil d'Etat dans la mesure 26 du projet de budget 2016 - cette fois, par exception, je tomberai d'accord avec M. Dal Busco - il serait possible de recueillir 25 à 30 millions de recettes publiques supplémentaires, ce qui est à peu près le montant que représentent les coupes linéaires de 1% sur les postes et les subventions, et sur lequel portait le différend entre le Conseil d'Etat et la fonction publique. Il s'agissait de 38 millions, mais nous sommes dans des chiffres de cet ordre. Donc, en luttant résolument contre la fraude fiscale, il est possible de répondre à ce type de besoins, sans avoir à faire descendre dans la rue des dizaines de milliers de personnes, ou à forcer les fonctionnaires à faire grève pendant plusieurs jours. Cette motion invite donc le Conseil d'Etat à engager, dans les plus brefs délais, cinq contrôleurs fiscaux de plus avec l'objectif de recueillir 25 à 30 millions de francs supplémentaires dans les recettes publiques du canton de Genève.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vous signale que vous avez entamé le temps de votre groupe. La parole est à M. le député Stéphane Florey.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion qui consiste à fliquer l'administration...
Une voix. Oh ! (Commentaires.)
M. Stéphane Florey. ...et qui considère que tout contribuable est un fraudeur, est, d'un point de vue moral, totalement inadmissible...
Des voix. Ah ! (Commentaires.)
M. Stéphane Florey. ...et remet complètement en cause le principe de confiance entre l'Etat et les contribuables. Ensuite, cette motion est basée sur de simples suppositions: vous supposez que cela pourrait éventuellement rapporter des recettes, alors que vous n'avez aucun moyen d'évaluer techniquement ces chiffres... (Remarque.) ...seule l'administration pouvant le faire ! C'est donc un très mauvais calcul que vous faites. De plus, vous ne parlez surtout pas de quels moyens il va falloir engager pour justement augmenter le nombre de fonctionnaires. Vous ne donnez pas la solution quant à où vous allez couper pour engager ces personnes, parce qu'il faudra bien trouver les moyens, étant donné qu'aujourd'hui nous ne les avons pas. Vous ne faites donc aucune compensation, ce qui pose déjà un problème vu la situation actuelle et les futures négociations qui s'annoncent à peu près mal pour le budget 2017. Enfin, on se pose la question: est-il vraiment nécessaire d'augmenter encore le nombre de fonctionnaires alors que la plupart des partis ici présents suivent le Conseil d'Etat dans sa volonté de réduire de 5% les charges en personnel et les charges de fonctionnement ?
Quant aux possibilités qui avaient déjà été proposées, il y a notamment une idée que nous avions déposée et qui a été reprise par le Conseil d'Etat «in corpore», à savoir d'augmenter le temps de travail à 42 heures. Un fonctionnaire d'administration met grosso modo dix minutes pour contrôler une déclaration. Si vous augmentez le temps de travail à 42 heures par semaine, cela veut dire qu'il va travailler 24 minutes en plus. En 24 minutes, il fait déjà deux déclarations de plus.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Stéphane Florey. Donc, si vous multipliez cela par le nombre de fonctionnaires, puis par le nombre de jours par année, vous récupérez déjà largement le potentiel que vous déclarez. Dernière chose, si vous voulez vraiment attaquer les vrais fraudeurs fiscaux, penchez-vous sur les sans-papiers, car eux, non seulement ils touchent un salaire, mais en plus ils ne paient pas d'impôts et ne participent pas à l'effort collectif, et pour ces gens-là l'administration ne fait absolument rien ! Elle ferme les yeux, ce qui est véritablement scandaleux ! C'est là que réside le vrai problème et si vous voulez augmenter les recettes fiscales...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Stéphane Florey. ...penchez-vous sur le cas des sans-papiers et après on pourra discuter ! (Rire.) Nous refuserons cette motion. Je vous remercie. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
M. Romain de Sainte Marie (S). Mesdames et Messieurs les députés, dire qu'il est moralement inadmissible... (Rire.) ...de vouloir lutter contre la fraude fiscale est quand même assez piquant ! On pourrait ouvrir un débat sur des questions d'éthique et de morale; le groupe socialiste a tendance à penser qu'il est plutôt moralement inadmissible de légitimer et de ne pas chercher à lutter contre la fraude fiscale. Maintenant, il a été prouvé à maintes reprises, notamment par le Conseil d'Etat dans sa réponse à une question écrite urgente du groupe Ensemble à Gauche, que vraisemblablement, chaque contrôleur fiscal rapporte 5,8 millions de francs. De même dans le canton de Vaud, on sait que l'augmentation du nombre de contrôleurs fiscaux faisait partie du paquet RIE III, et ce toujours dans le même but: rapporter des recettes supplémentaires. Il ne s'agit pas de faire du flicage, simplement de faire respecter les lois. Vous transmettrez, Monsieur le président, à l'UDC que le parti socialiste est attaché à l'Etat de droit et que le respect des lois... (Remarque.) ...notamment en matière fiscale est une composante de cet Etat de droit. Dans notre situation financière actuelle dont on sait, je ne vais pas le répéter, qu'elle est particulièrement délicate, avec une baisse des recettes fiscales liée à des baisses d'imposition, une menace avec cette réforme RIE III selon comment elle sera appliquée, il serait raisonnable d'engager des contrôleurs fiscaux supplémentaires pour accroître ces recettes. Il serait d'autant plus raisonnable d'écouter avec la plus grande attention la Cour des comptes et la direction de l'administration fiscale cantonale qui, toutes les deux, tirent la sonnette d'alarme parce que le nombre de dossiers a augmenté ces dernières années de plus de 3% annuellement alors que les effectifs de l'administration fiscale, eux, n'ont pas du tout augmenté. M. Batou l'a très bien exprimé tout à l'heure et très clairement dans l'exposé des motifs: les retards dans les contrôles des dossiers sont de plus en plus importants et, par conséquent, les rentrées fiscales diminuent. Si l'on veut accompagner le traitement des dossiers avec un minimum de sérieux et si l'on veut, c'est vrai, accroître la transparence et le contrôle en matière de fiscalité pour faire respecter les lois, il est aujourd'hui impératif d'augmenter en conséquence les contrôleurs fiscaux et donc d'accepter cette motion proposée par Ensemble à Gauche. Je vous remercie.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe des Verts soutiendra également cette motion pour toutes les raisons qui viennent d'être bien indiquées tant par M. Batou que par M. Romain de Sainte Marie. En effet, nous constatons depuis quelques années que l'administration fiscale manque de moyens, que les retards s'accumulent et qu'il est nécessaire d'agir. On peut aussi souligner que la Cour des comptes a rendu un rapport sur ce sujet et le groupe des Verts estime aussi, comme l'indiquait cette dernière, que l'administration fiscale devrait peut-être parfois s'attaquer d'abord aux plus gros dossiers avant de commencer par les plus petits qui rapportent moins d'argent. Les recettes fiscales qui entreraient ainsi dans les comptes de notre république seraient vraiment les bienvenues au moment où nous demandons à tout le monde de se serrer la ceinture et souvent aux plus faibles du canton d'accepter des mesures d'économie. Enfin, je voulais rebondir sur les propos de M. Florey qui semble penser qu'en taxant les sans-papiers, on pourrait obtenir des rentrées fiscales extraordinaires. Monsieur Florey, je pense que si ces personnes étaient vraiment riches, elles seraient ici avec un forfait fiscal, elles ne seraient pas ici sans papiers. (Rire.) Je crois que vous méconnaissez vraiment la situation de ces personnes-là... (Remarque.) ...qui seraient extrêmement heureuses de pouvoir payer des impôts si leur situation était régularisée. (Remarque.) Bref, je vous invite à soutenir cette motion qui arrive au bon moment dans les débats et je vous remercie de l'accueil favorable que vous lui réserverez.
M. Vincent Maitre (PDC). Cette motion est frappée au coin du bon sens, du moins dans sa version amendée et dans sa version amendée uniquement, puisque, initialement, on tentait par une troisième invite de faire revenir par la fenêtre ce qui avait été chassé par la porte lors du budget. Aujourd'hui, elle est frappée au coin du bon sens et, à titre personnel, je m'en réjouis puisqu'il s'agit à la base d'une proposition du Conseil d'Etat. Je suis ravi de voir qu'Ensemble à Gauche et le parti socialiste ont retrouvé la raison, eux qui, les semaines précédentes, n'ont cessé de demander la démission du ministre des finances, de le calomnier, de mettre les pieds au mur, en annonçant par exemple, alors même qu'aucune négociation n'était entamée sur RIE III que, de toute façon, il y aurait un référendum. Ils ont retrouvé la raison et j'en suis absolument ravi, comme je disais; cela présage du meilleur pour la suite des discussions. Je les remercie donc de suivre les propositions de Serge Dal Busco.
M. Yvan Zweifel (PLR). Le groupe PLR aimerait remercier l'ensemble des groupes présents de faire des propositions pour améliorer la situation financière du canton. Cela démontre au moins que chacun a compris que la situation financière n'était effectivement pas bonne. Permettez-moi néanmoins d'émettre quelques doutes sur la proposition qui nous est faite ici par le groupe Ensemble à Gauche. Celui-ci nous propose un certain nombre de recettes supplémentaires, tant mieux, mais de recettes totalement hypothétiques ! Pourquoi hypothétiques ? Certains l'ont déjà évoqué, parce que les contrôleurs actuels s'occupent déjà des plus gros dossiers et, s'ils trouvent des recettes supplémentaires, c'est proportionnel; si vous engagez des contrôleurs supplémentaires, ils vont s'occuper de plus petits dossiers. Peut-être trouveront-ils des recettes supplémentaires, mais elles ne seront pas aussi importantes... (Exclamation. Remarque.) ...que celles que l'on trouve aujourd'hui. La simple moyenne... (Remarque.) ...que vous faites à partir de ces 5,8 millions qui seraient rapportés par chaque contrôleur fiscal ne s'applique tout simplement pas ici; vous l'avez compris, on ne peut pas faire une simple règle de trois.
Ensuite, M. de Sainte Marie a relevé que les dossiers sont en retard. Il a raison sur ce point, nous sommes tout à fait au clair là-dessus. Mais dire que cela amène donc moins de recettes, ce n'est pas vrai, Monsieur de Sainte Marie ! Ce n'est pas parce qu'un dossier est en retard en termes de taxation que le contribuable, lui, n'a pas payé ses impôts puisque je vous rappelle que l'on paie des acomptes provisionnels: vous pouvez payer des acomptes provisionnels et attendre votre taxation. Je vous signale d'ailleurs que, lorsqu'on reçoit la taxation, on n'a pas forcément davantage d'impôts à payer. A titre personnel, cela fait trois ans qu'à chaque fois que je reçois ma taxation - parfois très en retard, du reste - l'Etat me rembourse de l'argent. Je l'en remercie d'ailleurs ! Comme quoi, moi, et je ne suis certainement pas le seul... (Remarque.) ...je paie plus d'argent, ce qui permet à l'Etat de fonctionner alors que cet argent ne lui est pas dû puisqu'il me le rembourse après. Donc...
M. Alberto Velasco. Malgré les jetons de présence ?!
M. Yvan Zweifel. Malgré les jetons de présence, Monsieur Velasco ! Si vous voulez, vous pouvez changer de fiduciaire, j'en connais une très bonne qui s'occupera de vos impôts ! (Rires.) Donc, Mesdames et Messieurs, oui, il y a des retards, mais cela ne signifie pas qu'il y a moins de recettes et ce n'est pas parce qu'on engage davantage de contrôleurs que les recettes augmenteront.
Enfin, pour régler la situation des dossiers en retard, on peut aussi procéder à un certain nombre d'améliorations techniques et non pas humaines. Nous venons d'ailleurs de voter cet après-midi 11,5 millions de francs pour des améliorations techniques pour l'administration fiscale; c'est aussi cela qui aidera à rattraper les retards et à améliorer la situation. Nous pouvons donc nous remercier puisque ce projet de loi a été voté à l'unanimité. Et puis, Mesdames et Messieurs, soyons sincères, le PLR aurait préféré des mesures structurelles d'économies à ces mesures supplémentaires, à ces projets d'hypothétiques recettes...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Yvan Zweifel. Merci, Monsieur le président. ...dont on ne sait absolument pas si elles vont être utiles ou non. Ensemble à Gauche en sait quelque chose - un exemple en lien avec les TPG, pour lequel vous nous expliquiez en long et en large qu'une baisse des tarifs serait compensée tout à fait mathématiquement, simplement par le fait que davantage de gens prendraient les transports publics - nous a démontré que malheureusement votre manière de compter n'était pas tout à fait adéquate. Puisque ces recettes...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Yvan Zweifel. ...resteront totalement hypothétiques, nous préférons des économies et nous vous proposons de refuser cette motion.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Salika Wenger pour une minute et quarante secondes.
Mme Salika Wenger (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Je suis étonnée de la réaction de tous les députés de cette assemblée, surtout à droite. Cette motion n'énonce que des évidences et je me demande toujours si ces députés qui s'opposent constamment à la levée de l'impôt n'ont pas oublié quelle était la véritable fonction première d'un parlement, à savoir de lever l'impôt ! On a un peu l'impression que tout a été détourné: certaines personnes se préoccupent du bien commun et pensent qu'il faut effectivement lever l'impôt, en tout cas pour couvrir les besoins communs de la population, et d'autres disent que non, il n'y a pas de fraudeurs, il n'y a rien du tout, tout va bien, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, ce qu'on vient de vérifier d'ailleurs avec l'histoire des «Panama papers»: il n'y avait rien du tout non plus ! Je suis donc en train de vous demander, Mesdames et Messieurs de la droite, à quoi jouez-vous, puisque notre fonction consiste à lever l'impôt ? (Remarque.)
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Salika Wenger. Comme vous avez l'air de le refuser, j'ai envie de dire, je ne sais pas, peut-être pourriez-vous faire autre chose ?
M. François Baertschi (MCG). A son entrée au parlement - en 2006, si je ne m'abuse - le MCG, par l'entremise de son président, député à l'époque, Roger Golay, qui est maintenant conseiller national, avait déjà fait une proposition visant à augmenter le nombre de contrôleurs. Nous nous sommes donc réjouis quand elle a été redéposée par Ensemble à Gauche et nous l'avons tout à fait soutenue, tout simplement pour une raison très claire: nous estimons qu'il ne faut pas augmenter les impôts, et si on ne veut ni augmenter les impôts, ni toucher aux prestations, le passage par une augmentation du nombre de contrôleurs est presque inévitable. Nous avons d'ailleurs repris une des mesures du Conseil d'Etat par le biais de l'amendement déposé par Jean Batou. Je pense que la sagesse est quand même de défendre cette motion. Il faut avoir les moyens de notre politique, quelle qu'elle soit. On peut parler de réformes et de tout ce qu'on veut, il n'en reste pas moins que le navire de l'Etat a besoin de moyens, que ce soit pour les hôpitaux, l'enseignement, toutes les tâches relevant de la sécurité et toutes les tâches importantes. D'ailleurs, une de nos inquiétudes porte également sur la question des frontaliers, liée aux baisses de taxation avec les quasi-résidents, qui constitue aussi un problème. Je doute que ce soient les sans-papiers qui sont sans un sou, sans un sou légal... (Remarque.) ...qui vont permettre de remplir la caisse de l'Etat. Je crois que c'est une douce illusion. Essayons d'être plus clairs, précis... (Remarque.) ...et réalistes et demandons d'aller chercher l'argent où il se trouve de manière modérée en favorisant les résidents genevois. C'est pour cela que nous soutenons avec grand intérêt le texte d'Ensemble à Gauche. (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Daniel Sormanni pour une minute huit.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons effectivement soutenir cette proposition de motion avec l'amendement déposé qui clarifie les choses. Aujourd'hui, nous sommes placés devant une réalité dont il faut tenir compte, et à partir du moment où il y a un barème d'impôts, il faut faire en sorte qu'il soit respecté et le mieux possible. Chacun doit payer son écot et je pense que le meilleur moyen d'y arriver c'est en effet d'augmenter légèrement le nombre de taxateurs et de contrôleurs - c'était d'ailleurs une proposition du Conseil d'Etat - de façon à ce que l'impôt soit recouvré, tout simplement. C'est une mesure de bon sens et nous vous invitons tout d'abord à voter l'amendement et ensuite la motion en discussion immédiate.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, hier je vous ai signifié tout le mal que je pensais quant au fait d'aggraver les barèmes d'impôts et de supprimer des dispositifs qui nous permettent de garder des contribuables intéressants dans notre république. Cette position, évidemment, je la maintiendrai toujours, mais il y a un «mais»: quelque chose va de pair avec la loi, quelle qu'elle soit, et en l'occurrence les dispositions en question sont souhaitables; le contrôle va de pair avec la loi, tout comme l'égalité de traitement et le respect de la loi qui doivent être assurés. Il ne peut donc pas y avoir de perception juste et équitable de l'impôt sans contrôle, sans ressources pour vérifier que tel est réellement le cas. Le Conseil d'Etat lui-même a proposé, vous l'avez vu, dans la mesure 26 du budget 2016, cinq contrôleurs supplémentaires. Le montant que nous espérions retrouver par ce biais-là était moins important que celui que les motionnaires prétendent vouloir atteindre aujourd'hui. On peut «garantir», entre guillemets, une production d'environ 2 millions, mais au-delà de ce chiffre, cela relève probablement de circonstances un peu exceptionnelles - ces éléments relevaient des derniers exercices. Le chiffre que nous voulons avancer est donc d'à peu près 2 millions par contrôleur.
Il s'agit là d'engager des personnes, mais on peut y parvenir également en suivant les recommandations de la Cour des comptes: en améliorant certaines prestations, en dégageant des moyens au sein même de l'administration fiscale, notamment par l'administration en ligne et par toute une série de prestations auxquelles nous travaillons. Je me permets de vous adresser des remerciements de la part du Conseil d'Etat puisque vous avez bien voulu voter tout à l'heure un crédit d'investissement qui va précisément dans ce sens-là. Il appartient au Conseil d'Etat, en charge de l'administration, d'affecter de manière adéquate ces ressources que nous allons pouvoir dégager. Nul doute qu'une part de ces ressources peut et doit être affectée à un contrôle un peu accru. Alors quel que soit le sort que vous allez réserver à cette motion, Mesdames et Messieurs, sachez que le Conseil d'Etat prend ses responsabilités en la matière et dotera les services de l'administration et en particulier de l'administration fiscale de manière adéquate.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement qui a été évoquée tout à l'heure et que vous avez reçue. Il s'agit, d'une part, de remplacer la deuxième invite de la motion par le texte suivant: «à engager cinq contrôleurs fiscaux supplémentaires dans les plus brefs délais, ce qui devrait permettre d'augmenter les recettes fiscales d'un montant de 25 à 30 millions». D'autre part, il s'agit de biffer la troisième invite. Est-ce clair pour tout le monde ? Cela semble être le cas. Je vous fais tout d'abord voter sur la demande d'amendement de M. Jean Batou.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 76 oui contre 10 non et 1 abstention.
Mise aux voix, la motion 2317 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 57 oui contre 31 non et 1 abstention. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Premier débat
Le président. Nous reprenons notre ordre du jour ordinaire avec le PL 11082-A et je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Jean Sanchez.
M. Jean Sanchez (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, qui commence à dater, était motivé par une intention tout à fait louable, qui consistait à vouloir alléger la bureaucratie. La LIAF fixe un seuil de 200 000 F par entité subventionnée, et cette dépense pouvait être ainsi examinée. Ce projet de loi propose d'augmenter le barème à 500 000 F. Si l'on peut discuter de la somme, la majorité de la commission des finances observe que l'on parle quand même ici de plusieurs millions au total. Le Conseil d'Etat de l'époque appuyait ce projet de loi en arguant du fait que depuis la mise en place des politiques publiques, il y avait eu une évolution mais, aujourd'hui, on ne peut pas dire qu'elle est satisfaisante. Cela dit, à l'époque déjà on pouvait relever des problèmes de gestion dans des petites associations, il s'agit donc de rester efficient. En conséquence, la majorité de la commission vous invite à ne pas voter ce projet de loi.
Présidence de Mme Christina Meissner, première vice-présidente
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Je passe la parole à la rapporteure de première minorité ad interim, Mme Béatrice Hirsch, qui remplace Mme Anne Marie von Arx-Vernon.
Mme Béatrice Hirsch (PDC), rapporteuse de première minorité ad interim. Je vous remercie, Madame la présidente de séance. Le rapporteur de majorité l'a dit, ce projet de loi date un peu: il a été déposé il y a trois ans, et deux ans et demi se sont écoulés depuis son étude en commission. Eh bien le temps passé n'a fait que confirmer les problèmes soulevés par les auteurs de ce projet de loi et a pu démontrer que la LIAF, même si elle remplit une bonne partie de ses objectifs, a des effets pervers, qu'il convient de corriger. En parallèle, il y a maintenant un an et demi, le Conseil d'Etat proposait, dans son plan de mesures lié au projet de budget 2015, la mesure 47 intitulée «Révision de la LIAF». Dès lors, pour pouvoir discuter du seuil, comme le disait d'ailleurs le rapporteur de majorité, qui est aujourd'hui fixé dans la LIAF à 200 000 F - le parti démocrate-chrétien voulait le fixer à 500 000 F, mais ce montant est discutable - le PDC vous propose de renvoyer cet objet en commission, ainsi que le demande du reste le rapporteur de deuxième minorité, afin de pouvoir remettre l'ouvrage sur le métier.
La présidente. Merci, Madame la rapporteure. Je passe la parole à Mme Lydia Schneider Hausser, rapporteure de deuxième minorité ad interim, sur le renvoi en commission.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de deuxième minorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Bien évidemment, nous soutiendrons ce renvoi en commission, puisqu'il était demandé par le rapporteur de deuxième minorité que je remplace. Cela d'autant plus que le conseiller d'Etat de l'époque, M. David Hiler, recommandait également l'entrée en matière de ce projet de loi au moment de son étude en 2013.
Pour ce qui est de savoir si la somme est bonne ou pas, c'est effectivement en examinant ce projet de loi que nous pourrions nous en rendre compte, avec les retours que nous feraient les départements qui effectuent un suivi sur toutes ces indemnités et aides financières, ainsi que sur les contrats de prestations. D'ailleurs, je ne sais plus le numéro de la mesure, mais le Conseil d'Etat actuel a inscrit dans son programme lié au budget le fait de revoir, de mener une nouvelle réflexion sur ces attributions LIAF et sur tout le mécanisme qui leur est lié, que ce soit en termes de seuil de matérialité comme de processus, lequel, de l'avis également du Conseil d'Etat actuel, prend énormément de temps, pour une efficience qui n'est pas toujours nécessaire, dans la mesure où un suivi plus simple pourrait être effectué pour certains des subventionnés de la LIAF. Nous soutiendrons donc le renvoi en commission afin d'accomplir un travail sérieux sur cette question de seuil de matérialité, c'est-à-dire d'entrée des entités subventionnées dans la LIAF.
La présidente. Merci, Madame la rapporteure. Le rapporteur de majorité souhaite-t-il s'exprimer sur le renvoi en commission ? Monsieur Sanchez ?
M. Jean Sanchez. Non merci, Madame la présidente !
La présidente. Dans ce cas je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, à la faveur de cette demande de renvoi en commission je me permets d'intervenir pour rappeler, comme vient de le faire Mme la députée Schneider Hausser, que le Conseil d'Etat a effectivement proposé dans son plan de mesures de simplifier la LIAF - il s'agissait de la mesure 47 intitulée «Simplification de la LIAF» - parce que nous considérons que le dispositif actuellement en vigueur est extrêmement gourmand en ressources tant pour l'administration que pour les entités subventionnées. Le Conseil d'Etat a donc mené une réflexion assez approfondie sur ces problématiques - et on sait combien la question de la LIAF tient à coeur aux membres de la commission des finances - mais nous n'avons pas abouti à un projet ficelé que nous pourrions soumettre à la commission des finances: nous préférions venir devant cette commission pour vous entretenir des pistes que le Conseil d'Etat pourrait envisager de vous proposer. Cette demande de renvoi en commission tombe donc à point nommé, parce que ce serait effectivement l'occasion d'aborder ce problème dans une plus grande globalité. Je vous invite par conséquent, Mesdames et Messieurs, au nom du Conseil d'Etat, à bien vouloir suivre cette proposition de renvoi en commission.
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais donc mettre aux voix cette demande de renvoi à la commission des finances.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11082 à la commission des finances est adopté par 77 oui contre 10 non.
Premier débat
La présidente. Nous abordons à présent le PL 11339-A. Le rapporteur de majorité, M. Roger Deneys, est remplacé par... (Un instant s'écoule.) ...M. Alberto Velasco ! Merci ! Vous avez la parole, Monsieur.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité ad interim. Madame la présidente, c'est normalement M. Deneys qui aurait dû présenter son rapport, mais je le remplace. J'aimerais dire que nous avons étudié ce projet de loi en commission et qu'il s'est avéré qu'à l'heure actuelle, par une directive du président du Conseil d'Etat François Longchamp, il est justement conseillé aux services de l'administration de s'adresser en principe d'abord à l'office cantonal de l'emploi et de veiller à ce que les emplois de l'administration soient pourvus à travers ce moyen.
Par ailleurs, ce qu'on a pu aussi apprendre lors de nos travaux, c'est que si on légiférait de la sorte, il y aurait un recours de la part de l'Union européenne, étant donné les relations économiques entre la Suisse et l'Union européenne, de même que les accords bilatéraux, lesquels feraient que ce projet de loi serait automatiquement attaqué. En revanche, il semble qu'une directive telle que l'a proposée le président du Conseil d'Etat n'est quant à elle pas attaquable, et l'administration nous a donc conseillé de ne pas légiférer en la matière et d'appuyer plutôt la politique que mène aujourd'hui le Conseil d'Etat dans ce domaine.
Il nous est également apparu pendant les travaux que si l'on adoptait le projet de loi de nos amis, de nos collègues - lequel, on le veut bien, part d'un excellent état d'esprit, puisqu'il vise à essayer d'employer les chômeurs qui sont ici, en utilisant donc la main-d'oeuvre déjà sur place - eh bien pour l'administration, pour les syndicats, pour les partis, il serait aujourd'hui assez difficile de l'appliquer, parce que ça supposerait une administration assez importante, et que l'efficacité n'y serait pas. Ce qu'on a donc pu comprendre, c'est que l'application même de ce que nous proposent nos collègues serait difficile aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, mon groupe ainsi que la majorité de la commission vous recommandent de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, tout en considérant que l'esprit dans lequel il a été déposé pourrait être salué. J'en ai terminé, Madame la présidente.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, concrètement, de quoi s'agit-il ? Pour clarifier le débat qui nous occupe actuellement, ce projet de loi demande que, dans l'administration publique, il n'y ait que des résidents qui puissent être engagés. Clairement, c'est de cela qu'il s'agit. Cette pratique d'engagement pour des postes à responsabilité dans la fonction publique ou au service de la population est un principe qui est également adopté dans la plupart des pays. En France ou en Italie, par exemple, vous ne verrez jamais des gens engager des personnes qui n'habitent pas le pays. Concrètement, ce projet de loi demande donc qu'on donne la priorité à nos résidents dans le domaine de l'engagement et qu'on arrête également d'engager des frontaliers pour des postes clés. Prenons l'exemple tout bête de Monaco: à Monaco, c'est clair, si vous voulez travailler dans l'administration monégasque, eh bien il vous faut être monégasque, tout simplement. On peut aussi citer l'exemple du Tessin, qui a fait voter récemment une initiative populaire. Tout le monde a décrié cette initiative populaire, en indiquant qu'il était interdit de favoriser l'engagement des résidents, et bien sûr des arguments un peu futiles ont été utilisés pour éviter que cette initiative n'aboutisse. Eh bien, résultat des courses, le tribunal tessinois a tranché, validant le principe de la priorité de l'emploi pour les résidents. Alors si dans le canton du Tessin le système fonctionne très bien, le MCG n'arrive pas à comprendre pourquoi ce qui marche bien dans d'autres cantons ne pourrait pas fonctionner et s'appliquer à Genève.
Par ailleurs, Genève reste quand même l'un des cantons possédant le taux de chômage le plus élevé. Genève, c'est le canton de Suisse dans lequel il y a passablement, voire beaucoup trop de frontaliers qui travaillent, et nous avons également de nombreuses personnes qui sont à la recherche d'un emploi. Ce projet de loi demande donc tout simplement de remettre les pendules à l'heure, de favoriser l'emploi pour nos jeunes en leur donnant la possibilité de trouver une place lorsqu'ils sortent de formation, et de privilégier bien sûr les résidents dans l'administration publique. Ça s'appelle du bon sens, Mesdames et Messieurs les députés, et je vous encourage à soutenir ce projet de loi qui est rempli de bon sens, qui n'est pas du tout illégal et qui de toute façon ne pourra pas faire l'objet d'un recours de la part de la Communauté européenne, comme voudrait le faire entendre notre député socialiste.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous incite donc à appuyer ce projet de loi, qui découle du bon sens. Je le répète, ce projet demande tout simplement que, dans l'administration publique, on engage des résidents. Ils peuvent être au bénéfice d'un permis C, d'un permis B, suisses, genevois, mais nous demandons que l'on n'engage que des résidents dans l'administration publique. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage à soutenir notre projet de loi, celui du MCG. (Exclamations. Quelques applaudissements.)
M. Christo Ivanov (UDC). Le PL 11339 présente effectivement l'avantage d'apporter une réponse à une problématique reconnue par tous, y compris par le Conseil d'Etat, puisque ce projet de loi reprend les directives du Conseil d'Etat concernant l'engagement de ses employés. Le problème est que cette pratique est apparemment discriminatoire, même s'il faut constater que l'amendement proposé réduit cette discrimination. Le texte qui nous est soumis vise à privilégier d'engager 50% de ressortissants étrangers, puisqu'ils représentent cette proportion de personnes au chômage. Finalement, on continue donc à discriminer des ressortissants suisses, qu'ils soient à Genève ou ailleurs.
Au sein de l'office cantonal de l'emploi, il existe le label «1+ pour tous» pour les chômeurs de longue durée, que j'ai d'ailleurs appliqué et utilisé dans mon entreprise. Il convient donc d'encourager le programme «1+ pour tous» mis en place par l'OCE.
Le groupe UDC pense que cette problématique doit être abordée au moment de la nécessaire réforme des AIMP. A ce moment-là, il faudra fixer des conditions-cadres pour qu'il y ait une certaine équité vis-à-vis de tous ceux et de toutes celles qui postulent pour un emploi. Notre groupe est très sceptique quant à l'impact de ce projet de loi, qui reste discriminatoire principalement envers les Suisses. En conclusion, le groupe UDC s'était abstenu en commission, mais refusera ce projet de loi pour les raisons indiquées précédemment.
M. Gabriel Barrillier (PLR). Madame la présidente de séance, chers collègues, il a déjà été signalé et rappelé que depuis 2006 dans un département, et depuis exactement février 2013 dans les autres, une directive transversale interdépartementale précise très clairement la priorité à donner aux chômeurs du canton lors de l'engagement de fonctionnaires. Cette directive de 2013 - j'ai vérifié, et la commission également - a encore été précisée dans son détail en 2014. Elle contient une procédure extrêmement détaillée, incitative, inquisitrice pour obliger les départements du petit Etat, et subséquemment du grand Etat, à donner la priorité aux chômeurs genevois et habitant Genève. Et ce que demande ce projet de loi, c'est de remonter la directive dans une loi.
Le PLR est très sensible à cette problématique de l'engagement de travailleurs et de fonctionnaires en donnant d'abord une certaine priorité à nos collègues et aux habitants du canton. Nous y sommes sensibles, bien sûr que nous y sommes sensibles, chers collègues, mais j'attire votre attention sur le fait que, suite à l'acceptation de l'initiative sur l'immigration de masse, cette problématique de l'emploi en Suisse est évolutive: nous ne savons pas encore maintenant comment cette initiative va être appliquée. Il va y avoir des évolutions, des changements, et c'est la raison pour laquelle nous pensons que ce projet de loi est prématuré, Mesdames et Messieurs les députés. Il est préférable de maintenir la directive interdépartementale, d'en assurer le contrôle - et je pense que le département ou les départements font en sorte, Monsieur le conseiller d'Etat, qu'elle soit appliquée avec exactitude - avant de changer la loi, au risque, suivant ce qui se passera sur le plan fédéral, de devoir revenir en arrière ou de devoir modifier la législation genevoise. Donc oui, c'est un sujet extrêmement important, et on doit y être attentif. Cela dit, il me semble qu'en commission on nous avait indiqué - j'ai un chiffre en tête - qu'à Genève le nombre de frontaliers dans l'administration, dans la fonction publique au sens large, se situe globalement entre 3 et 3,5%. Peut-être est-ce trop, mais en tout cas cela me paraît être un chiffre qui ne doit pas non plus nous permettre de peindre le diable sur la muraille. Nous sommes donc opposés à ce projet de loi, en attendant de savoir comment l'initiative sur l'immigration de masse sera appliquée en Suisse dans les mois qui viennent, puisque les solutions doivent nous être proposées d'ici à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs, notre groupe a refusé ce projet de loi en commission et il continuera évidemment dans cette voie. Les motifs qui nous y conduisent sont nombreux. J'aimerais tout d'abord dire que ce projet arrive de manière inopportune et qu'il est superflu, notamment parce que la directive cantonale existe déjà, comme cela a été mentionné. Mais plus encore, ce projet de loi prévoit des dispositions qui risquent fort d'être invalidées par le Tribunal fédéral, ce qui est quand même plutôt inquiétant, avec par ailleurs des dispositifs tellement lourds qu'ils s'apparenteraient plus à des usines à gaz qu'à autre chose.
L'un des éléments qui a été présenté et invoqué par les auteurs de ce projet de loi était notamment le fait d'assortir la directive cantonale d'un aspect de développement de la formation, voire éventuellement de reclassements professionnels. Mais à ce moment-là, on serait tenté de leur demander pourquoi avoir modifié la LPAC, la loi relative au personnel de l'administration publique, plutôt que la loi sur les mesures cantonales, qui aurait été, elle, mieux adaptée à une intention de ce type-là. Eh bien notre hypothèse est qu'en réalité il ne s'agit pas de développer la formation ou le reclassement professionnel: il s'agit surtout de fermer les frontières et d'instaurer une forme de discrimination entre les travailleurs résidents et frontaliers...
Une voix. Oui ! Oui !
Mme Jocelyne Haller. ...d'ailleurs certains ne s'en cachent pas. (Commentaires.) Pour nous, ce type de discrimination n'est pas admissible, et vouloir donner force de loi à un concept aussi discutable, pour le moins révulsif, dirais-je, ou qui n'a rien d'enviable - je ne trouve pas le mot ! - que la préférence cantonale n'est pas acceptable à nos yeux. A plus forte raison quand il s'agit finalement de nier la réalité économique de ce canton ou bien de ne vouloir qu'une forme d'isolationnisme, ou simplement des rapports économiques totalement unilatéraux, dans lesquels les avantages sont uniquement pour nous et les désavantages uniquement pour les autres. Je vous rappelle que Genève exporte une bonne partie de son chômage, de même qu'une bonne partie de ses problèmes de logement, alors vouloir mettre des frontières comme cela sans admettre qu'il puisse y avoir des contreparties et qu'il existe effectivement un jeu économique qui peut être profitable des deux côtés est simplement un non-sens, auquel nous ne pouvons souscrire. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce que j'entends m'inquiète profondément et je crois qu'il faudrait peut-être remettre un peu l'église au milieu du village, comme on dit. D'abord, c'est vrai que la première version de la directive avait été mise en place par M. Longchamp, puis elle a été complétée, améliorée et étendue à tout l'Etat, y compris le grand Etat, par notre magistrat du MCG, M. Poggia, et on l'en remercie. Par ailleurs, je confirme qu'il est effectivement extrêmement difficile de la faire appliquer jusqu'au bout. Certes, des efforts sont faits, mais on constate aussi qu'un certain nombre d'entités ne respectent pas cette directive et continuent la politique qu'elles ont menée précédemment, à savoir des engagements de frontaliers alors qu'il y avait des candidats du cru qualifiés pour le poste. On a du reste un exemple - mais je ne vais pas le citer - qui va probablement conduire M. Poggia à demander le licenciement de la personne en question, pour pouvoir engager le candidat qui aurait été pressenti et qui était du cru. Alors finalement je pense que si on en arrive à ce point, c'est qu'il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans cette république. A Genève, on a le taux de chômage le plus élevé de Suisse, on ne fait pas vraiment d'efforts, en tout cas pas suffisamment, et si on n'est pas derrière les entités, derrière les services qui engagent, eh bien cette directive est diversement appliquée ! C'est la raison pour laquelle on voulait l'introduire dans la loi. Et moi je m'inscris en faux contre ceux qui disent qu'il ne faut surtout pas la faire figurer dans la loi, parce que le Groupement des frontaliers va déposer un recours à la Cour européenne. Eh bien qu'il dépose un recours ! De toute façon je crois qu'il en a déjà déposé un contre la directive, alors au point où on en est, ça ne changera pas grand-chose. Qu'il le fasse, ça m'indiffère totalement, c'est son problème !
D'autre part, quand on voit tout le débat qui a lieu au niveau fédéral - Monsieur le président, vous transmettrez à M. Barrillier pour son information, même s'il doit le savoir, mais il l'a omis - eh bien l'une des discussions actuelles consiste évidemment à savoir comment appliquer l'initiative du 9 février, et aujourd'hui le Conseil fédéral est soutenu pratiquement par tous les partis aux Chambres fédérales. En effet, même le PLR indique finalement la préférence nationale comme étant une option, le PDC, par la voix de son président, M. Darbellay, l'avait déjà déclaré, et même le parti socialiste, par la voix de son chef de groupe et de son président, a dit que dans le fond ça pouvait être une option. Et je crois que cela va même plus loin, puisqu'on parle là de préférence nationale. Alors voyez-vous, Mesdames et Messieurs, je pense qu'on doit faire cet effort, on doit être exemplaire dans l'administration, car il y a une valeur d'exemplarité par rapport à tout le secteur privé qui, lui, ne fait pas cet effort, ou ne le fait que très partiellement. Certains jouent le jeu, d'autres non, et je crois qu'on doit y veiller.
Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, moi je suis atterré de voir finalement l'UDC rejoindre Ensemble à Gauche ! Allez, on ouvre les frontières et on ne s'occupe plus de ça ! Ils vont même refuser le projet de loi qui va dans leur direction. (Commentaires.) Mais bon, les temps changent, visiblement, et je crois que... (Brouhaha.)
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Daniel Sormanni. Oui, je termine ! Je crois que finalement on n'est pas dans le bon trend. Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il est temps d'effectuer un changement de cap. Aujourd'hui, il y a entre 90 000 et 100 000 frontaliers dans le canton de Genève, pour 240 000 emplois. Alors c'est vrai que des emplois ont été créés, on continue d'en créer, mais ils bénéficient aux frontaliers et non pas à nos chômeurs. En conséquence, Mesdames et Messieurs, il vous faut absolument voter ce projet de loi...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député !
M. Daniel Sormanni. ...qui est empreint de bon sens et qui permettra très certainement de leur donner du travail et de les faire sortir de l'assistance publique.
M. Christian Dandrès (S). La lutte contre le chômage de longue durée est une bataille fondamentale, et je pense que cette bataille-là mérite mieux que les réponses qui sont données par le MCG avec ce projet de loi. On se dédouane un peu à bon compte avec le hochet de la préférence cantonale ou nationale, lequel est malheureusement repris par le PLR qui, de ce point de vue, est assez décevant. En effet, un accord politique a été signé en mars de l'année dernière dans lequel tous les partis, y compris le PLR et l'UDC, au niveau fédéral, ont soutenu le principe de la préférence nationale, ce qui à mon avis est un problème de taille.
Je pense que pour avoir une politique efficace en la matière, il faut quand même s'interroger sur les causes du chômage de longue durée. On a certes connu un développement économique important du canton, ce qui est effectivement à saluer, mais on doit voir que ce développement s'est fait sur la base d'une politique économique axée sur le tertiaire et que cette politique-là a notamment eu comme impact de diminuer l'importance du secteur primaire. Si vous consultez les données statistiques publiées par le canton, vous verrez qu'en l'espace de quinze ans, on a perdu presque 4% dans le secteur primaire. Et je vous assure que les personnes qui ont été licenciées dans ce secteur-là n'ont pas trouvé de travail dans le secteur tertiaire. Ce ne sont pas les mêmes personnes, et ce sont ces chômeurs-là qui vont devenir des chômeurs de longue durée, qu'il ne sera pas possible de «recycler», entre guillemets, ou de réemployer dans le cadre du petit Etat ou du grand Etat. En effet, si vous consultez sur le site internet de l'Etat le bulletin des places vacantes, qui est public, vous verrez que les postes qui s'ouvrent aujourd'hui - j'ai regardé tout à l'heure - sont des postes d'architecte-urbaniste, de médecin, de greffier-juriste ou autre, métiers qui ne me semblent pas être actuellement ceux des chômeurs de longue durée du canton. C'est pour cette raison que je parle de hochet pour enfants sages - ou pas sages, en l'occurrence, venant du MCG - avec la préférence cantonale, car à mon avis ça n'aura aucun impact sur la durée du chômage et sur le fait que des personnes vont rester sur le carreau.
Je pense qu'il faut développer une véritable réflexion sur une économie diversifiée qui permette de garantir, sur le long terme, des emplois pour plusieurs générations. Et cette économie mérite un débat de fond; elle mérite mieux que celui que nous avons au sein du Grand Conseil et que la politique menée par le Conseil d'Etat depuis plus de vingt ans, qui consiste à dire: jouons exclusivement sur la question de la concurrence fiscale et développons le secteur tertiaire, avec effectivement un impact sur la dimension foncière également, qui peut aussi tuer l'artisanat et la construction. Je crois qu'on doit garder ces aspects à l'esprit et qu'il n'y a pas de solution toute faite, c'est pourquoi je trouve regrettable qu'on arrive avec une solution à l'emporte-pièce comme celle de la préférence cantonale, ce d'autant que le canton de Genève sait aussi très largement piocher dans la région frontalière quand il le souhaite, et qu'il le fait également au détriment du contribuable français, qui participe à l'effort de financement et de formation de collaborateurs qui, par la suite, sont engagés dans le tertiaire. Je pense donc qu'il faut avoir une approche globale, dialectique et intelligente sur cette problématique, et ne pas voter des projets tels que celui-ci, même si effectivement la dimension symbolique peut avoir un certain impact. (Applaudissements.)
Mme Frédérique Perler (Ve). Chers collègues, le groupe des Verts persistera dans le refus de ce projet de loi pour toutes les raisons qui ont été évoquées, dans la mesure où le fait d'inscrire dans la loi les principes énoncés dans la directive cantonale qui est actuellement appliquée très largement pose un problème au niveau du droit fédéral et international... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et qu'il ne fait pas l'ombre d'un doute que cette disposition-là serait invalidée par le Tribunal fédéral.
Au final, après huit auditions et un long travail en commission, qui a été développé ici par les uns et les autres, il ressort que ce projet de loi rate sa cible dans son objectif, certes louable, de réinsérer les chômeurs sur le marché du travail. Mais cette problématique de réinsertion, on l'a entendu, relève plutôt de l'amélioration du fonctionnement du traitement du chômage à Genève, et cette problématique doit être contextualisée sur un plan plus économique afin de trouver des réponses adéquates. J'en veux pour preuve que le récent rapport de la Cour des comptes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...a pointé un certain nombre de difficultés dans le fonctionnement de l'office cantonal de l'emploi et donc de la réinsertion des chômeurs, et qu'il a énoncé plusieurs améliorations à apporter. Tout cela pour vous dire, Mesdames et Messieurs, qu'on ne trouvera dans ce rapport de la Cour des comptes aucune trace concernant le moindre regret quant au fait que la Suisse ait signé des conventions bilatérales. C'est bien dire que le remède est inapproprié dans ce contexte-là, et je m'étonne que les signataires de ce projet de loi persistent dans cette voie. En conclusion, je le répète, le remède n'est pas approprié en l'état, et le groupe des Verts vous invite donc à refuser ce projet de loi.
Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, on l'a dit, ce projet de loi vise à inscrire la préférence cantonale dans la loi, en ce qui concerne l'administration cantonale, certes, mais aussi les autres établissements soumis à la LPAC, à savoir notamment les HUG. Aujourd'hui - on l'a également rappelé - cette préférence cantonale existe sous la forme d'une directive, qui est déjà assez contraignante comme ça; dès lors, l'inscrire dans la loi et risquer, comme l'ont très bien dit certains de mes préopinants, de la faire annuler par le TF serait quand même pour le moins piquant, car ça risquerait bel et bien d'enterrer cette préférence cantonale plutôt que de la figer dans le marbre, comme le voudrait le MCG.
Si le PDC peut partager le souci des auteurs de ce projet de loi de diminuer le chômage et de préserver l'emploi à Genève, le parti démocrate-chrétien est en revanche convaincu, à l'instar d'autres groupes qui ont déjà exprimé leurs doutes à ce sujet, que ce projet de loi n'aura pas la moindre influence bénéfique soit sur le chômage, soit sur le maintien de l'emploi à Genève.
J'aimerais à présent m'arrêter un instant sur les HUG, puisqu'il a beaucoup été question d'administration. Imaginons simplement, Mesdames et Messieurs, ce qu'impliquera l'engagement de chaque frontalier, qui devra être soumis à l'attestation d'une commission composée de le-la directeur-trice du service de la main-d'oeuvre étrangère au sein de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail, d'un-e représentant-e du service employeur de l'OCE, d'un-e représentant-e de l'office cantonal de la population et d'un-e représentant-e de l'office pour l'orientation, la formation professionnelle et continue... Cela s'appelle une usine à gaz ! Pour ceux qui peuvent déjà se représenter, au niveau de l'hôpital, la taille du département RH et le tournus qu'il y a dans cette institution, eh bien sachant qu'aujourd'hui - cela a été dit et confirmé par le directeur des ressources humaines des HUG, M. Hertzschuch - 42% du personnel permanent des HUG est frontalier... (Remarque.) ...vous pouvez juste imaginer l'augmentation de la bureaucratie que cela représenterait ! Et par là même, en termes de qualité des soins, ça veut simplement dire aussi l'engagement de temporaires, l'engagement de journaliers, qui - ne vous inquiétez pas - viennent aussi de l'autre côté de la frontière. Donc ce qu'il y a de sûr, c'est que ce n'est un plus ni pour l'emploi, ni pour le fonctionnement de nos institutions. Le PDC vous encourage dès lors à refuser ce projet de loi. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à Mme Danièle Magnin.
Mme Danièle Magnin (MCG). De combien de temps est-ce que je dispose, Monsieur le président ? (Un instant s'écoule.)
Le président. Vous n'avez plus de temps de parole, je suis désolé !
Mme Danièle Magnin. C'est ce que je pensais ! Merci ! (Rires. Commentaires.)
Le président. Je suis navré ! Je passe donc la parole au rapporteur de minorité Sandro Pistis, pour cinquante-deux secondes.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais tout d'abord revenir sur le terme «discriminatoire». Ce n'est pas vrai, cette loi n'est pas discriminatoire. Je pense qu'aujourd'hui, si on doit parler de discrimination, eh bien la discrimination est subie par les Genevois qui se voient licenciés. On a tout récemment évoqué le cas d'un EMS dans lequel plus de sept personnes habitant le canton de Genève ont été licenciées - cela a fait la une de la «Tribune de Genève» - et où, en lieu et place, ce sont des frontaliers qui ont été engagés.
Par ailleurs, j'ai entendu certains députés s'exprimer, mais je pense qu'il s'agissait plutôt de langue de bois face à un vrai problème que notre canton connaît aujourd'hui. A Genève, quasiment la moitié des travailleurs sont des frontaliers, on ne peut plus continuer à aller dans ce sens-là !
Enfin, je suis quand même surpris de l'attitude d'un groupe qui, sur le plan fédéral, soutient à juste titre une initiative pour limiter...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Sandro Pistis. ...l'immigration de masse et qui, lorsqu'il faut voter sur le plan cantonal pour la priorité de l'emploi aux résidents, fait volte-face. Je trouve ça quand même scandaleux.
Le président. C'est terminé, Monsieur le député, je vous remercie. La parole est au rapporteur de majorité Alberto Velasco, pour une minute dix-huit.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, ce projet de loi soulève un problème qui dépasse très largement le territoire genevois. C'est la mondialisation libérale, mes amis ! On pensait que cette mondialisation libérale allait permettre aux pays du Sud de récolter les emplois qu'ici on diminuait, mais le résultat est tout le contraire, ce sont des rapports au niveau européen et mondial qui le disent ! Non, Mesdames et Messieurs, il n'y a pas d'emplois dans le Sud, et ces gens viennent ici concurrencer les travailleurs autochtones, effectivement. Malheureusement, cette libéralisation qui n'a pas été accompagnée des cautèles sociales fait qu'aujourd'hui les travailleurs doivent s'arracher les emplois, ce qui est dramatique. Mais, chers collègues du MCG...
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. Oui, Monsieur le président ! ...votre projet de loi n'amène aucune solution, malheureusement, car le problème n'est pas là. C'est avec des réformes sociales importantes qu'il faut aujourd'hui une solidarité au niveau européen mais, encore une fois, l'Europe s'est construite avec un statut libéral, le monde est entré dans une libéralisation à outrance, et les conséquences, c'est ça, chers collègues. C'est ça ! Et, vous voyez, nous-mêmes ici dans ce parlement nous sommes démunis face à ça, Mesdames et Messieurs, voilà le drame auquel nous sommes soumis...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Alberto Velasco. ...et auquel d'autres parlements sont soumis. Je regrette, mais pour les raisons techniques que j'ai exposées précédemment, on ne pourra pas entrer en matière sur ce projet de loi.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi vise à inscrire dans la loi précisément ce qui se fait aujourd'hui - et qui fonctionne très bien - au niveau des directives, lesquelles ont été renforcées au cours de ces cinq dernières années. On a donc cette obligation d'annonce des postes vacants à l'office cantonal de l'emploi dix jours avant que ceux-ci ne soient rendus publics, et ça marche extrêmement bien; dès lors, il y a réellement une préférence qui est donnée aux demandeurs d'emploi. Cette pratique a été étendue au grand Etat, enfin aux établissements de droit public - aux principaux, du moins - et depuis mai 2014 on a renforcé ce privilège, si on peut dire, ou en tout cas cette priorité pour les demandeurs d'emploi en faisant en sorte qu'ils soient obligatoirement reçus par les recruteurs dans les services. Donc véritablement ce système fonctionne, Mesdames et Messieurs, et il fonctionne parce qu'il est aujourd'hui inscrit de manière souple dans les directives. En revanche, s'il était inscrit dans la loi, il pourrait réellement être attaqué et il serait attaquable.
J'aimerais encore ajouter que, d'après les chiffres de 2012 que je possède, ce dispositif a permis à l'Etat - petit et grand Etat - d'engager près de 500 personnes; 500 personnes, Mesdames et Messieurs ! C'est donc dire que le dispositif fonctionne parfaitement et qu'il n'y a absolument aucune raison d'ancrer cela dans la loi. Je vous invite par conséquent, au nom du Conseil d'Etat, à bien évidemment refuser ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant... (Remarque.) Monsieur Pistis ?
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de minorité. J'aimerais juste demander le vote nominal, s'il vous plaît !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Manifestement oui. Nous allons donc nous prononcer sur l'entrée en matière de ce projet de loi au vote nominal.
Mis aux voix, le projet de loi 11339 est rejeté en premier débat par 71 non contre 17 oui et 2 abstentions (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous abordons six projets de lois de bouclement en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. le rapporteur de majorité.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Comme vous l'avez relevé, il s'agit de projets de lois de bouclements de crédits. Certains de ces crédits ont été bouclés alors que les travaux ont été terminés il y a plus de vingt ans. Je ne vais pas rentrer dans les détails. Une majorité de la commission a décidé de refuser l'entrée en matière, en invoquant entre autres le problème du délai: comme je l'ai dit en préambule, certains crédits ont été bouclés quinze voire vingt ans après l'achèvement des travaux, ce qui n'a pas permis à la commission de connaître notamment les raisons de certains dépassements de crédits. Au nom de la majorité de la commission des travaux, je vous invite à refuser ces projets de lois.
M. Bertrand Buchs (PDC), rapporteur de minorité ad interim. C'est une discussion récurrente que nous avons déjà eue de multiples fois lors des extraits. Il faut savoir qu'il y a eu un retard considérable de l'Etat sur les projets de lois de bouclement. 222 ont déjà été rendus, il en reste 12. Ceux dont nous parlons ici sont parmi les derniers. On peut accepter ou refuser ces objets, mais refuser ne sert à rien, puisque de toute façon, les dépenses ont été faites. Ce qui est important, c'est de savoir si les dépenses ont été conformes aux usages - c'est le cas - s'il n'y a pas eu de dilapidation de l'argent public. Le département s'est excusé, il a reconnu le manque de célérité concernant les projets de lois en retard. Le Grand Conseil les a approuvés indirectement en approuvant le budget et les comptes de l'Etat lors des années concernées. Si reproche il y a, il faudra alors convenir que sa responsabilité de contrôle est aussi engagée et qu'il n'y a pas lieu de viser uniquement l'administration et le pouvoir exécutif. La transparence - mentionnée par le rapporteur de majorité tout à l'heure - est préservée. En effet, que vaut-il mieux faire du point de vue du contrôle de la gestion publique ? Garder ces projets de lois dans un tiroir et laisser le soin de régler ce problème aux générations futures, ou au contraire en parler ouvertement en commission, mettre les choses sur la table et régler le problème une fois pour toutes ? Je répète ici que nous arrivons à la fin de tous ces travaux de bouclement. La minorité recommande d'adopter ces projets de lois. Je vous remercie.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste rejoint très clairement le rapporteur de minorité. Il aimerait indiquer qu'il s'agit de 6 projets de lois de bouclement certes, mais qu'au départ, nous avions 38 projets de lois de bouclement, dont évidemment la plus grande partie a été acceptée; que sur ces 6 projets de lois, 5, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la détention, comportent un surplus des dépenses, mais qui s'explique: le département a fourni les explications. Il faut relever que dans ces 6 projets de bouclement, il y a 23 millions d'économies relatives. Le groupe socialiste a trouvé qu'on ne pouvait en tout cas pas dire que l'argent public avait été dilapidé. Comme le rapporteur de minorité l'a souligné, le département a fait preuve de transparence. Nous avons eu l'occasion de rappeler qu'en 2011, il y avait plus de deux cents projets de lois qui n'avaient toujours pas été bouclés. Le parti socialiste préfère voir le verre à moitié plein qu'à moitié vide. Il constate les efforts du département en matière de transparence: non seulement les explications ont été données, mais ces projets de lois de bouclement arrivent peu à peu à la commission des travaux. En conséquence, le parti socialiste préfère saluer le travail fourni et remercie le rapporteur de minorité.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Quand j'ai découvert, alors que j'étais nouveau député dans cette législature, l'ampleur des bouclements de crédits qui n'avaient pas été effectués, j'ai été assez impressionné. Normalement, un crédit doit être bouclé assez rapidement dans l'année. Là, nous avions un train de 222 projets de lois qui devaient être examinés. Sur ces 222, un paquet de 36 nous avait été proposé, et parmi ces 36, 30 sont passés aux extraits un jour où nous n'y prêtions pas attention, mais les 6 derniers nous paraissaient particulièrement symptomatiques, en tout cas à un certain nombre de commissaires, de ce qu'il ne fallait absolument pas faire en matière de gestion des deniers publics. Laisser traîner les dossiers assez longtemps de sorte que les personnes responsables des dépassements de crédit, qui auraient pu donner des explications, ne sont plus là, voire sont mortes, ce n'est pas une façon correcte, à mon avis, de gérer les deniers publics. Sur ces crédits, nous n'avons pas eu un certain nombre de réponses et nous ne les aurons jamais, puisque les dossiers sont beaucoup trop anciens.
Cela étant dit, il faut remercier les collaborateurs et surtout le Conseil d'Etat, qui a pris la décision, lors de la dernière législature, de mettre fin à ces pratiques et de refaire sortir tous ces crédits, raison pour laquelle nous nous sommes retrouvés au fur et à mesure de la législature avec de nombreux crédits à boucler. Le Conseil d'Etat a eu le courage de revenir enfin vers le Grand Conseil pour liquider tous ces crédits et mettre fin à cette situation qui était inacceptable. Merci au Conseil d'Etat de l'avoir fait, merci aux collaborateurs qui ont eu ce travail pénible à faire et ont dû assumer les manquements de leurs prédécesseurs devant la commission et devant le Grand Conseil. Les Verts ne peuvent cependant pas passer l'éponge et dire que tout a été correctement fait. On ne peut pas non plus dire que tout a été mal fait puisque aujourd'hui nous pouvons boucler ces crédits, raison pour laquelle les Verts se sont abstenus en commission.
M. Jacques Béné (PLR). Vous aurez constaté que le groupe PLR a refusé ces bouclements en commission pour la simple et bonne raison que les personnes concernées par ces projets ne sont pas venues nous expliquer les différences - soit dépassements, soit économies - qui pouvaient exister. Dans un projet de loi notamment, il y a 20% d'économies sans qu'on puisse nous expliquer pourquoi ces économies sont effectives dans le cadre du bouclement. La proposition du PLR est que le Conseil d'Etat, dorénavant, après avoir fait table rase sur tous ces projets de lois de bouclement qui datent, vienne plus régulièrement devant la commission des travaux pour au moins informer des dépassements ou des économies qui seraient faites dans certains projets de lois. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) On a vu aussi que dans un des projets de lois, les économies qui ont pu être faites ont été passées dans d'autres classifications pour d'autres projets: ce sont des choses qu'on ne peut pas admettre, et c'est dans ce sens que le PLR - j'espère que ce sera la dernière fois - refusera l'entrée en matière sur ces projets de lois. Je vous remercie.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je comprends tout à fait que certains dans cette salle ressentent un certain agacement, un mécontentement, et qu'il faut trouver dans le rapport de majorité l'expression de ce mécontentement et de cette frustration, peut-être. J'ai déjà eu l'occasion - plusieurs d'entre vous l'ont relevé - de dire qu'un très grand progrès a été fait, avec un travail de fond... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et je transmettrai les remerciements que M. Buschbeck a adressés à mes collaborateurs de l'office des bâtiments. Il faut dire qu'il se fait un grand travail d'épuration extrêmement salutaire. Je peux prendre l'engagement - comme je l'ai déjà fait devant ce Grand Conseil - que désormais, on ne procédera plus de cette manière, mais très rigoureusement, avec des propositions de bouclement dans les délais, même si c'est difficile... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est difficile de parler dans une salle où tout le monde mène des conversations séparées, je voulais le dire ! ...même si c'est difficile de présenter des projets de bouclement dans des délais extrêmement courts, soit ceux que la loi prévoit, car boucler des chantiers qui sont parfois d'importance prend du temps: il y a des délais de garantie. Néanmoins, nous nous ferons un point d'honneur à les respecter ou à tenter de les respecter, et en tout cas, nous nous faisons un point d'honneur à agir de manière transparente à l'égard de votre Grand Conseil et de la commission des travaux. Pour ces raisons, et fort de cet engagement que je réitère devant vous, je vous demande de bien vouloir voter ces bouclements pour qu'on puisse passer véritablement à une nouvelle ère. Merci d'avance.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous pouvons passer aux votes successifs sur ces projets de lois de bouclement, tout d'abord le 11352.
Mis aux voix, le projet de loi 11352 est adopté en premier débat par 33 oui contre 31 non et 17 abstentions.
Le projet de loi 11352 est adopté article par article en deuxième débat.
Mis aux voix, le projet de loi 11352 est rejeté en troisième débat dans son ensemble par 35 non contre 33 oui et 18 abstentions.
Le président. Nous passons aux projets de lois suivants.
Mis aux voix, le projet de loi 11357 est rejeté en premier débat par 39 non contre 34 oui et 14 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 11361 est rejeté en premier débat par 40 non contre 34 oui et 15 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 11365 est rejeté en premier débat par 52 non contre 32 oui et 4 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 11376 est rejeté en premier débat par 35 non contre 34 oui et 22 abstentions.
Mis aux voix, le projet de loi 11387 est rejeté en premier débat par 44 non contre 31 oui et 15 abstentions.
Premier débat
Le président. Nous traitons à présent le PL 11414-A en catégorie II - cinquante minutes. Le rapporteur de majorité, M. Jean-Marc Guinchard, est remplacé par Mme Béatrice Hirsch, à qui je passe la parole.
Mme Béatrice Hirsch (PDC), rapporteuse de majorité ad interim. Merci beaucoup, Monsieur le président. Vous avez dit que je vous remplaçais, mais à l'évidence ce n'est pas possible: vous êtes irremplaçable ! (Exclamations.) Je vais malgré tout essayer de résumer quelque peu ce que vous avez fort bien exprimé dans votre rapport de majorité. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'un projet de loi déposé par Ensemble à Gauche, cosigné par le MCG, qui vise à modifier la composition du conseil d'administration de la Banque cantonale dans le but d'accroître la représentation des partis politiques. Concrètement, cela ferait passer ce conseil d'administration de onze membres maintenant à grosso modo vingt membres. Je ne vais pas trop m'attarder sur la forme, mais le rapporteur que je représente a tenu à souligner que la rédaction négligée de ce texte ne faisait quand même qu'entacher un minimum la crédibilité sur le fond.
Résumons donc la question: est-ce qu'une représentation plus politique au niveau d'un conseil d'administration en améliore le fonctionnement et le contrôle par ce Grand Conseil ? Les auteurs du projet de loi pensent que la représentation des partis politiques rend au Grand Conseil le pouvoir sur ces institutions. Si rien n'est moins sûr en règle générale, c'est encore moins sûr dans le cas particulier de la Banque cantonale de Genève. En effet, tout le monde se souvient qu'au début des années 2000 cette banque a rencontré des difficultés - le mot est faible - que nous connaissons, et à cette époque tous les partis politiques s'accordaient à dire que la politisation du conseil d'administration n'avait fait que contribuer à la débâcle de la banque. (Commentaires.) Aujourd'hui, le code suisse des bonnes pratiques en matière de gouvernance des entreprises prévoit que les conseils d'administration doivent être suffisamment restreints pour responsabiliser les administrateurs. Par ailleurs, on peut aussi relever que la FINMA risque d'exiger de procéder à un examen préalable de chacun des candidats du Grand Conseil au conseil d'administration et qu'en cas de refus d'une candidature - cela a été mentionné dans le rapport - on ne peut exclure des implications personnelles dommageables pour le candidat. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Enfin, en comparaison intercantonale, il est intéressant de souligner qu'à l'exception de celle de Bâle-Ville, toutes les autres banques cantonales ont des conseils d'administration qui comptent de sept à neuf membres.
En conclusion, la majorité de la commission législative a estimé que ce projet de loi mettait à mal une institution indispensable au canton, dont le fonctionnement actuel donne entière satisfaction, après avoir connu les affres du risque de mise en faillite, et qu'il fallait donc refuser son entrée en matière.
M. Cyril Mizrahi (S), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, la question qui est au coeur de ce projet de loi, au-delà des questions de rédaction, est finalement relativement simple. Il s'agit en réalité de savoir si l'on veut donner suite à plusieurs votes du peuple qui ont été extrêmement clairs et qui demandent une représentativité démocratique. Il ne s'agit pas pour le Grand Conseil de remettre la main sur le conseil d'administration de la Banque cantonale, mais au contraire - et bien sûr dans le respect de la nécessaire compétence de ces administrateurs - d'avoir un équilibre entre les différentes sensibilités politiques représentées dans ce canton, car il est quand même ici question d'une banque cantonale, d'une banque qui a un rôle d'intérêt public à remplir pour l'ensemble de la collectivité genevoise.
Cela étant, Mesdames et Messieurs, chers collègues, il nous est apparu en préparant cette séance que le rapport sur ce projet de loi a été déposé en octobre 2015 et qu'entre-temps - en janvier 2016 - à la suite d'un rapport de la commission des finances, ce parlement a voté la loi 11586, qui change la structure de l'actionnariat de la banque. Cela pose donc aujourd'hui des problèmes techniques pour l'examen de ce projet de loi que la commission législative a étudié à la lumière de l'ancienne version de la loi, antérieure au 1er avril 2016, alors que maintenant, depuis cette date, nous sommes sous l'empire d'une nouvelle version de la loi sur la Banque cantonale. Dès lors, devant le risque de contradictions par rapport aux amendements qui ont été formulés sous l'ancienne réglementation, je vous propose - avec l'accord de mon collègue rapporteur de deuxième minorité, me semble-t-il - de renvoyer cet objet en commission afin qu'il soit réétudié à la lumière de la nouvelle version de la loi travaillée à la commission des finances.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, mon préopinant Cyril Mizrahi a tout dit et je me rallie à ses propos: nous soutenons effectivement le renvoi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je repasse la parole à la rapporteure de majorité Béatrice Hirsch sur le renvoi en commission.
Mme Béatrice Hirsch (PDC), rapporteuse de majorité ad interim. Merci beaucoup, Monsieur le président. Je pense que la modification effectuée par la commission des finances ne remet absolument pas en question le fait que ce n'est pas une bonne idée de modifier la composition du conseil d'administration. Dès lors, pour refuser l'entrée en matière de ce projet de loi, il ne vaut pas la peine de le renvoyer en commission.
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Serge Dal Busco sur le renvoi en commission.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Monsieur le président, vous avez l'amabilité de me passer la parole. Je ne l'avais pas demandée, mais ce n'est pas grave ! J'aimerais dire qu'effectivement sur le fond la modification de la loi, notamment de la structure de l'actionnariat, ne change rien selon nous à la problématique qui vous est soumise ce soir. Par conséquent, de notre point de vue il n'y a pas lieu de renvoyer ce projet de loi en commission pour l'examiner à la lumière de ces faits nouveaux.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi en commission, sur laquelle j'appelle l'assemblée à se prononcer.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11414 à la commission législative est adopté par 48 oui contre 25 non et 15 abstentions.
Premier débat
Le président. Le prochain point à l'ordre du jour est le PL 11490-A, dont nous débattons en catégorie II, quarante minutes. Je cède la parole au rapporteur de majorité, M. Alberto Velasco.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. En ce qui me concerne, je serai bref. Je résume la loi qui nous est proposée aujourd'hui par une déclaration de la représentante de l'Etat, qui disait que suite à la modification de la LGAF, il s'agissait de prendre la décision d'exclure de la compétence du Grand Conseil l'approbation des comptes et des rapports de gestion de sociétés qui ne sont pas des institutions de droit public cantonal et qui, par conséquent, sont régies par d'autres systèmes juridiques. Cette proposition a été soumise sous l'angle formel à la commission, qui l'a acceptée.
Monsieur le président, je tiens à ajouter que personnellement, en tant que député, je peux très bien me prononcer sur les comptes d'une institution de droit public, mais je ne tiens en revanche pas du tout à assumer les responsabilités du conseil d'administration d'une société anonyme de droit privé. Il serait grave que le Grand Conseil se substitue à un conseil d'administration d'une entité privée régie par le code des obligations pour approuver des comptes, ça reviendrait en quelque sorte à décharger celui-ci de ses responsabilités. C'est la raison pour laquelle nous, socialistes, avons adopté ce projet de loi. Quant aux gens qui ne sont pas d'accord avec cette proposition, je leur propose de déposer un projet de loi pour faire en sorte que les entités de droit privé comme Palexpo deviennent publiques. Voilà, Monsieur le président, je reprendrai la parole par la suite.
Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de minorité. Je voudrais juste rappeler ce que dit la loi actuelle... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à son article 3, alinéa 2: «Les articles suivants sont applicables aux institutions cantonales de droit public, ainsi qu'aux entités de droit public ou privé faisant partie du périmètre de consolidation [...]». La LGAF stipule encore, plus loin, à l'article 58: «Le Grand Conseil a notamment les compétences suivantes: [...] approuver les états financiers des entités du périmètre de consolidation». Voilà la loi qui est applicable aujourd'hui et jusqu'à nouvel ordre puisque nous n'avons pas encore voté ce projet de loi.
Depuis que je suis députée dans ce Grand Conseil, nous n'avons pas une seule fois été en mesure d'approuver les comptes individuels de Palexpo SA ou de la FIPOI, pas une seule fois - c'est d'ailleurs la raison pour laquelle, à deux reprises, j'ai refusé personnellement de voter les comptes consolidés. On n'a donc pas appliqué la loi qui était valable jusqu'à présent, ceci pour des raisons diverses et variées: par exemple, lorsque j'étais membre de la commission de contrôle de gestion, j'ai demandé à consulter ces comptes dont nous ne disposions pas et nous avons reçu une vague photocopie de bilan, comme si nous ne savions pas que les comptes comprennent, au sens du code des obligations, le bilan, le compte de pertes et profits, le rapport de révision et surtout l'annexe qui donne tous les détails de fonctionnement de l'entité en question. Il s'agit véritablement, dans ces entités de droit privé, de roitelets qui sont à la tête d'entreprises où l'Etat est soit majoritaire, soit propriétaire, et qui se comportent comme s'ils engageaient leurs propres capitaux privés et n'avaient de comptes à rendre à personne.
On nous dit que la consolidation représente une opération technique assez compliquée, qui consiste à éliminer les créances réciproques; certes, nous le savons, mais cela reste malgré tout essentiellement une addition, et quand on doit approuver les comptes consolidés du grand Etat, cela implique qu'on ait approuvé au préalable les comptes individuels de chacune des entités qui le composent. Aussi, je ne vois pas la nécessité de modifier la loi actuelle, je verrais plutôt celle de la faire enfin appliquer, ce qui n'a pas été le cas jusqu'à maintenant. Je vous signale que les Ports Francs vont bientôt entrer dans la catégorie des entités de droit privé faisant partie du périmètre de consolidation. Quant à la FIPOI, M. Longchamp m'a dit, devant témoins... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qu'elle n'en faisait pas partie; mais si, elle en fait partie ! Elle est consolidée selon une méthode particulière mais, dans la mesure où l'Etat possède 50% des actions, il n'y a aucun doute: elle fait partie du périmètre de consolidation.
Voilà pourquoi je trouve qu'il n'est pas nécessaire de changer la loi et je persiste à dire que ce n'est pas parce qu'un réviseur et une assemblée générale ont déjà approuvé les comptes au sens du droit des obligations que cela empêche la commission des finances et ce Grand Conseil de les approuver également. C'est ainsi que ça se passe avec l'aéroport et les Services industriels: il y a des assemblées générales et des rapports de révision extrêmement détaillés réalisés par de grandes fiduciaires de la place, et on trouve tout à fait normal de passer encore une fois derrière, ne serait-ce que pour approuver formellement les comptes - ce qui suppose déjà qu'on nous les ait fournis ! En effet, en ce qui concerne la FIPOI, il y a toujours des problèmes de dates insensés qui font qu'on ne peut pas les consulter, on est obligé d'approuver les comptes consolidés sans avoir eu ceux de la FIPOI pour des raisons de délais. Je suppose que le Conseil d'Etat les obtient dans un délai raisonnable, alors il faut absolument trouver un moyen pour que la commission des finances puisse les avoir aussi afin de se prononcer. Voilà, Monsieur le président, ce sera tout pour le moment. Je vous remercie.
M. Eric Leyvraz (UDC). Deux entités de droit privé faisant partie du périmètre de consolidation de l'Etat, soit Palexpo SA et la Fondation des immeubles pour les organisations internationales, n'arrivent pas à rendre leurs comptes dans les délais impartis par la loi. Rappelons que Palexpo appartient à 79% à l'Etat tandis que la FIPOI est détenue à 50% par la Confédération et à 50% par l'Etat de Genève. Il s'agit de deux entités dont le bilan respectif dépasse les 100 millions, elles doivent donc figurer dans les comptes consolidés. Mais ce n'est pas la faute de la FIPOI si elle ne peut pas remettre ses comptes dans les délais parce que cela dépend du calendrier défini par la Confédération.
De plus, les enregistrements tardifs n'ont qu'une influence minime sur le résultat des comptes consolidés, et on peut légalement approuver ceux-ci sans forcément avoir approuvé les comptes individuels de chacune des entités consolidées. En effet, les comptes consolidés sont autonomes par rapport aux comptes individuels d'entités de droit privé, qui sont acceptés par les actionnaires et pas par le pouvoir législatif. Ces entités sont régies par le code des obligations, non pas par le droit public cantonal. Aussi, restons pragmatiques et acceptons ce projet de loi. Je veux quand même rappeler que si, par hypothèse, les comptes de la FIPOI et de Palexpo présentaient des problèmes, ils demeurent toujours accessibles aux députés. Je vous recommande donc de voter cette loi, merci.
M. Yvan Zweifel (PLR). Mesdames et Messieurs, en tant que députés du Grand Conseil, qui est l'organe supérieur de contrôle de l'administration et du Conseil d'Etat, nous avons notamment pour fonction d'approuver les comptes. Mais quels comptes ? Ceux de l'Etat et, par extension, les comptes consolidés, c'est-à-dire ceux de l'Etat additionnés de toutes les institutions, fondations et autres sociétés regroupées dans le fameux périmètre de consolidation qu'évoquait tout à l'heure la rapportrice de minorité. Cela ne signifie pas que nous devions alors approuver les comptes statutaires de chacune des entités individuelles. Dans le secteur privé, par exemple - Mme Orsini le sait parfaitement et vous le lui transmettrez, Monsieur le président - il existe des maisons mères qui possèdent des filiales, et l'assemblée générale de la maison mère vote les comptes consolidés, qui comprennent les comptes de la maison mère et ceux des filiales, mais pas les comptes statutaires de chaque filiale, tout simplement parce que certaines de ces entités pourraient se trouver dans un autre pays, donc être soumises à d'autres normes comptables ou législatives, et qu'on ne peut évidemment pas se soustraire à un conseil d'administration local qui a voté selon les règles en vigueur à cet endroit.
Il en va exactement de même ici, et M. Leyvraz l'a très bien expliqué: on ne peut décemment pas, en tant que députés, voter - ou revoter, finalement - les comptes statutaires de Palexpo SA puisque l'organe suprême de cette entreprise est son assemblée générale, et non pas ce Grand Conseil. Que se passerait-il d'ailleurs, Mesdames et Messieurs, si l'assemblée générale de Palexpo SA votait quelque chose sur les comptes et que nous votions ensuite autre chose ? Cela créerait évidemment un imbroglio qui serait difficile à démêler - en fait, non, pas tant que ça puisque, comme l'a souligné M. Leyvraz, Palexpo SA, en tant que société anonyme, est soumise au code des obligations qui, aux dernières nouvelles, relève du droit fédéral, lequel est supérieur au droit public cantonal, et c'est donc bien celui-là qui s'appliquerait. Qui plus est, tous ceux qui pensent ici qu'il s'agit d'une boîte noire et que les membres des assemblées générales se réunissent en faisant leurs trucs dans leur coin devraient savoir que, l'Etat étant actionnaire majoritaire de Palexpo SA, c'est bien lui qui nomme ses représentants lors de cette assemblée générale; nous sommes ainsi bien représentés et participons parfaitement à l'approbation de ces comptes statutaires. Il s'agit ici des comptes consolidés, ce n'est pas la même chose.
S'agissant de la FIPOI, la problématique est légèrement inverse: c'est une fondation de droit privé mais dont le fonctionnement est différent puisque nous la partageons à 50% avec la Confédération et qu'elle est soumise au droit supérieur et donc à un contrôle à l'échelle fédérale. Ce projet de loi est important car il nous permettrait simplement de respecter le droit supérieur et de nous montrer logiques et conséquents par rapport à ce qui se passe par exemple dans le privé. Pour conclure, je rejoins évidemment les propos du rapporteur de majorité: devons-nous, en tant que députés, prendre des responsabilités que nous n'avons pas, par exemple dans une société anonyme ou dans la FIPOI - vous savez ce qui s'y est passé - alors que la loi, la logique et les règles ne le préconisent pas ? Je ne le crois pas et, en ce sens, je rejoins parfaitement ce qu'a dit le rapporteur de majorité. Par conséquent, le groupe PLR vous propose de suivre le rapport de majorité et donc d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Bertrand Buchs (PDC). Je serai bref car tout a déjà été dit. Ce projet de loi est salutaire: il permet de modifier une particularité et de clarifier les choses. Je rejoins Mme Orsini quant à la difficulté à laquelle nous faisons face au moment d'intégrer ces deux entités dans les comptes consolidés de l'Etat. Or ce problème n'existera justement plus si on décide d'enlever ces deux entités des comptes consolidés puisqu'elles n'ont strictement rien à y faire. De plus, si quelqu'un a des questions à poser sur la gestion financière de Palexpo ou de la FIPOI - on l'a fait pour celle-ci, on a discuté de multiples heures à ce sujet - il en a le droit, il peut auditionner le Conseil d'Etat et les personnes qui y travaillent. Les choses sont donc faites, le parlement ne perd pas le contrôle sur ces deux entités, mais il fallait prendre cette mesure de clarification, qui est saine. Je vous remercie.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui nous concerne, nous ne voterons pas ce projet de loi. Nous trouvons tout de même un peu facile, sous prétexte qu'on fait face à un problème de temporalité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...lié au vote sur les comptes consolidés de l'Etat - et donc sur les entités privées qui ont été citées, dont l'Etat est actionnaire majoritaire s'agissant de Palexpo et copropriétaire à 50% avec la Confédération concernant la FIPOI - de supprimer tout simplement l'approbation de ces comptes, c'est un peu trop facile. De toute manière, on ne peut pas supprimer ces entités du périmètre consolidé puisqu'elles en font partie de par leur qualité et leur chiffre d'affaires. Je crois qu'il est faux de se dire que puisqu'on rencontre une difficulté, alors on se cache la tête sous l'oreiller. C'est la politique de l'autruche !
Au final, ça signifie que nous n'avons pas, en tant que députés, à nous préoccuper de ces entreprises, que nous nous en lavons les mains; mais le jour où elles seront en difficulté, vous serez les premiers à venir demander comment il est possible qu'on n'ait rien remarqué et pourquoi on n'a pas fait de contrôle ! A partir du moment où on vote ces comptes consolidés, je pense qu'on doit pour le moins y avoir accès, on y est obligé puisque, de fait, elles font partie du périmètre consolidé, sinon ça n'a pas de sens. Mesdames et Messieurs, il ne s'agit ni d'une société privée, ni d'un autre pays, il s'agit de l'Etat de Genève et de sociétés genevoise pour l'une, suisse et genevoise pour l'autre, donc les règles sont différentes.
On a parlé tout à l'heure de la Banque cantonale - bon, il s'agissait de la représentation des partis politiques, mais c'est la même chose; tout le monde pleurait quand la Banque cantonale a fait 2 milliards ou je ne sais plus combien de pertes, mais c'est marrant, personne n'a rien vu venir ! Je crois que c'est un peu facile de dire ça parce que le jour où on aura des difficultés... A la FIPOI, il y a certes eu des problèmes de gestion mais, par miracle, aucun argent ne s'est évaporé à ce jour - en tout cas pas à notre connaissance; mais le jour où ça arrivera, on nous dira: «Vous, les députés, vous avez voté le périmètre consolidé, donc vous êtes responsables !» Eh bien non, si on veut être responsable, on doit obtenir ces comptes. En conséquence, nous vous demandons de suivre le rapport de minorité et de refuser ce projet de loi du Conseil d'Etat, qui est vraiment trop facile: parce qu'on fait face à une difficulté, alors on ne demande plus d'approuver les comptes ?! Non, ce n'est pas sérieux, c'est - je le répète encore une fois - l'autruche qui met la tête dans le sable.
Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de minorité. Je suis quand même étonnée d'apprendre que la loi en vigueur jusqu'à présent n'est pas conforme au droit supérieur, il faut vraiment des raisons d'opportunité pour qu'on s'en aperçoive et qu'on nous dise que, de toute façon, on s'est permis de ne pas appliquer cette loi depuis le début de la législature ! Je trouve ça totalement anormal: parce qu'on considère que, un de ces jours, on déposera un projet de loi pour faire rentrer les choses dans l'ordre, on se permet de ne pas appliquer la loi pour l'instant ? C'est une méthode de fonctionnement que je désapprouve totalement. Voilà donc deux années consécutives que cette plénière vote des comptes consolidés sans appliquer la loi, c'est-à-dire approuver les comptes individuels de Palexpo SA et de la FIPOI !
Ceci mis à part, je suis bien convaincue, puisqu'on parle de responsabilité, qu'on ferait face au même problème avec des entités de droit public comme l'aéroport ou les SIG, où - je vous le répète - il y a une assemblée générale, un réviseur et des comptes déjà approuvés par le conseil d'administration. Il est donc évident que la commission des finances ne va pas vraiment entrer dans le détail de tous ces comptes et faire confiance à un réviseur jouissant d'une certaine notoriété. Mais cela ne signifie pas qu'elle ne serait pas tenue pour responsable si, par ailleurs, on lui avait caché quelque chose de grave, et je ne vois finalement pas tellement la différence entre la responsabilité en matière d'institutions de droit public et celle en matière de sociétés de droit privé.
Pour ma part, c'est toujours par la presse que j'ai appris que Palexpo SA avait créé des filiales, jamais en tant que membre de la commission de contrôle de gestion ! Jamais, jamais je n'ai eu d'information privilégiée de la part de ces personnes qui auraient jugé utile d'informer leur actionnaire majoritaire - ce d'autant plus que, comme vous le savez, on prête serment pour le secret le plus absolu quand on a l'honneur de siéger dans un conseil d'administration de ce genre, donc il est hors de question d'aller rendre compte de quoi que ce soit à qui que ce soit. Il est évident que c'est une boîte noire - vous transmettrez à M. Zweifel, s'il vous plaît, Monsieur le président - c'est bel et bien une boîte noire. Voilà, ce sera tout pour le moment. (Rires.)
Le président. Ce n'est pas pour le moment, Madame Orsini: nous arrivons à la fin du débat ! Je passe la parole au rapporteur de majorité, M. Alberto Velasco.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. En ce qui concerne les comptes consolidés, tout a été éclairci: quand on vote les comptes consolidés, ça ne signifie pas qu'on approuve les comptes individuels, c'est clair. Mais je tiens à rappeler encore une fois que ces entités de droit privé - ce sont, je le répète, des sociétés anonymes - ont des conseils d'administration et subissent des audits internes, dont nous pouvons lire les rapports. Pour ma part, je suis très content que ce Grand Conseil n'ait pas approuvé les comptes de la FIPOI, faute de quoi on se retrouverait vraiment dans une certaine «m....» ! Nous, la commission des finances, avons justement auditionné la FIPOI, qui est venue nous parler, et nous avons vu les comptes. Mais je suis très content que le conseil d'administration ait approuvé ces comptes et assume ses responsabilités.
Je tiens aussi à dire, Mesdames et Messieurs, qu'il faut faire la différence entre les comptes et la gestion: quand la commission de l'énergie examine les comptes des SIG, elle ne s'attarde pas seulement sur les chiffres, elle auditionne les SIG, les fait venir et analyse leur gestion. Il n'en va pas de même pour les entités privées, et je ne vois pas pourquoi nous passerions du temps à examiner la gestion de Palexpo alors qu'il s'agit d'une société anonyme. Ceci dit, Madame Orsini, si vous le souhaitez, vous pouvez déposer dès demain matin un projet de loi pour demander que Palexpo et la FIPOI deviennent des entités publiques autonomes, et on pourra en rediscuter à ce moment-là. Mais, pour le moment, il ne sert à rien de poursuivre ce débat, Mesdames et Messieurs, et je crois qu'on peut passer au vote.
M. Daniel Sormanni (MCG). Monsieur le président, vous transmettrez ceci à M. Velasco: puisqu'il s'agit d'une société privée, eh bien proposez de vendre Palexpo, ainsi le problème sera résolu ! Non, tout ça n'est pas sérieux. Je ne comprends pas: vous vouez donc une confiance absolue à toutes ces fiduciaires qui contrôlent les institutions ? En ce qui me concerne, je suis assez sceptique et j'en veux pour preuve la grande fiduciaire connue de la place qui révisait la Banque cantonale - je vais la citer - à savoir Ernst & Young, qui a tellement bien contrôlé les comptes que tout le monde n'y a vu que du feu - ou alors certains ont mis un bandeau devant les yeux voire la tête dans le sable comme l'autruche ! Non, nous sommes députés au Grand Conseil et nous approuvons ces comptes consolidés, c'est un minimum. Ayons le courage de faire notre travail jusqu'au bout, soyons cohérents ! C'est la raison pour laquelle je vous invite à refuser ce projet de loi qui n'a aucun sens, qui n'est que de la poudre aux yeux pour nous empêcher de faire notre travail et de voter les comptes consolidés de l'Etat en toute connaissance de cause. Merci.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député, et cède la parole à M. Yvan Zweifel pour trente-huit secondes.
M. Yvan Zweifel (PLR). Trente-huit secondes ? D'accord. Vous transmettrez à M. Sormanni, Monsieur le président, qu'il faut savoir opérer une distinction entre le fait de prendre connaissance des comptes et les accepter. Dans le cadre des comptes consolidés, le PLR - tout comme, me semble-t-il, l'ensemble de ce parlement - souscrit à votre propos: il est évident que pour voter les comptes consolidés, il faut au moins avoir à disposition les comptes statutaires, mais ce n'est pas la même chose que d'accepter à nouveau des comptes qui ont déjà été approuvés par l'organe suprême de ces entités - en l'occurrence, pour Palexpo SA, son assemblée générale. Ce n'est pas la même chose, Monsieur Sormanni ! Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut recevoir ces comptes, mais ce n'est pas ce que dit ce projet de loi. Celui-ci stipule simplement qu'ils ne doivent pas être acceptés individuellement par notre Grand Conseil puisqu'ils ont déjà été adoptés par leur organe suprême, ce n'est pas la même chose, Monsieur Sormanni. (Commentaires.)
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Merci, Monsieur le député. Je repasse la parole à la rapporteure de minorité, Mme Magali Orsini, qui dispose encore d'une minute vingt.
Mme Magali Orsini (EAG), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. Je rappelle que les comptes individuels de Palexpo - je ne suis plus sûre s'il s'agissait de Palexpo ou de la FIPOI, mais je crois bien que c'était Palexpo - figuraient enfin à l'ordre du jour de notre dernière plénière affectée à cet effet mais, par un hasard extraordinaire, nous ne les avons pas eus et ce point a été supprimé de l'ordre du jour au dernier moment. Pour la deuxième année consécutive, donc, on n'a toujours pas eu l'occasion de voter les comptes individuels de Palexpo. Si ce n'est pas là de la mauvaise volonté d'appliquer une loi qui est encore en vigueur au moment où je vous parle...! Ça vous donne une idée de l'état d'esprit qui règne dans ces entités de droit privé.
Je voudrais encore ajouter un mot: ces possessions-là, qu'on appelle entre guillemets les «bijoux de famille» de l'Etat de Genève, entrent en ligne de compte pour les agences de notation. En effet, quand l'Etat de Genève veut emprunter à des banques, c'est bien parce qu'il est également actionnaire de Palexpo ou de la FIPOI qu'on lui propose des prêts à un certain taux. Ceci n'est pas négligeable et, encore une fois, étant donné le secret absolu qu'on exige des administrateurs, il est impératif que les membres de cette assemblée, que ce soit à la commission des finances ou en plénière, aient la possibilité d'approuver les comptes individuels de ces entités. Il suffit d'appliquer la loi actuelle, qui est parfaite; n'y changeons rien !
M. Alberto Velasco (S), rapporteur de majorité. Monsieur le président, je tiens à rappeler une fois encore que ce Grand Conseil poursuit avant tout une mission politique et qu'il ne s'agit pas de le transformer en fiduciaire, c'est clair et net. Il y a des outils pour cela, nous recevons des documents, certaines responsabilités sont affectées aux conseils d'administration, et c'est ainsi. Je vous le répète, Madame: déposez un projet de loi demain matin pour faire en sorte que Palexpo devienne une entité publique, et tout changera ! Pour le moment, il en est ainsi et, pour ma part, je ne tiens pas à assumer la responsabilité des autres.
M. Serge Dal Busco, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je crois comprendre dans la défense assez acharnée que mène, comme à son habitude, Mme Orsini de ses positions, qui consistent à refuser le projet de loi déposé par le Conseil d'Etat, qu'il y aurait finalement une limitation de l'accès à l'information - elle a par exemple parlé de boîte noire. Ce n'est absolument pas le cas, Madame Orsini: le parlement et en particulier la commission des finances disposent d'un accès complet aux comptes de ces entités, il n'y a aucun problème. Il faut opérer une distinction entre l'information à laquelle vous souhaitez pouvoir accéder et la question de l'approbation des comptes, ce sont deux choses totalement différentes.
La question de l'approbation, en tout cas s'agissant de Palexpo SA - cela a été souligné par plusieurs d'entre vous - est tout simplement relative au respect du code des obligations. Monsieur Sormanni, nous avons beau être à Genève, nous n'en sommes pas moins en Suisse et nous devons respecter le droit supérieur. Quant aux questions qui ont été abondamment commentées s'agissant de la FIPOI, puisqu'il s'agit d'une fondation de droit privé détenue à parts égales par la Confédération et le canton, nous rencontrons des problèmes en raison des procédures fédérales qui rendent les choses extrêmement peu pratiques. Alors, Mesdames et Messieurs, pour les raisons très claires et pragmatiques que je viens de vous indiquer, notamment la conformité au droit supérieur, il faut évidemment approuver ce projet de loi, qui ne remet pas du tout en cause l'accès légitime à l'information dont dispose ce Grand Conseil. Je vous remercie.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat, et appelle l'assemblée à se prononcer sur cet objet.
Mis aux voix, le projet de loi 11490 est adopté en premier débat par 67 oui contre 22 non.
La loi 11490 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11490 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 66 oui contre 28 non.
Le président. Mesdames et Messieurs, je lève la séance et vous octroie une pause de quinze minutes. Rendez-vous à 18h !
La séance est levée à 17h45.