République et canton de Genève

Grand Conseil

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PL 11603-A
Rapport de la commission des affaires communales, régionales et internationales chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Christina Meissner, Bernhard Riedweg, Stéphane Florey, Patrick Lussi, Christo Ivanov modifiant la loi sur l'administration des communes (LAC) (B 6 05) (Pour une répartition des tâches issue de la concertation)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session X des 12 et 13 novembre 2015.
Rapport de majorité de M. François Lance (PDC)
Rapport de minorité de M. Bernhard Riedweg (UDC)

Premier débat

Le président. Pour notre urgence suivante, le PL 11603-A, je passe la parole au rapporteur de majorité, M. François Lance.

M. François Lance (PDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les auteurs de ce projet de loi estiment que dans le cadre du traitement des trains de projets de lois sur la répartition des tâches entre les communes et le canton, il faut prévoir dans la loi sur l'administration des communes - la LAC - que les organes exécutifs et délibératifs des communes soient consultés et fassent part de leurs observations sur des projets de lois qui revêtent une importance toute particulière pour les communes. Aujourd'hui, la LAC prévoit que «lorsqu'un projet de portée législative ou réglementaire de rang cantonal concerne spécifiquement une ou plusieurs communes, l'Association des communes genevoises, la Ville de Genève et les communes particulièrement concernées [soient] en règle générale consultées». Je crois pouvoir dire que l'ensemble de la commission est sensible à ce principe d'information, de consultation et de concertation avec les communes, ceci particulièrement dans le cadre de ce processus de répartition des tâches entre le canton et les communes. Toutefois, une majorité de la commission estime d'une part que la disposition actuellement inscrite dans la LAC est suffisante, et que, d'autre part, ce principe de concertation est mentionné dans la loi-cadre votée le 24 septembre dernier en séance plénière. Enfin, après un démarrage un peu difficile, le processus de concertation mis en place entre le Conseil d'Etat et l'ACG est satisfaisant; je rappelle que l'ACG, qui défend les intérêts des quarante-cinq communes, est l'interlocuteur reconnu par le Conseil d'Etat. Il ressort également des travaux de la commission que ce sont les exécutifs communaux qui ont la responsabilité d'informer leurs Conseils municipaux respectifs sur l'évolution des négociations sur la répartition des tâches entre communes et cantons.

La majorité de la commission estime que la modification proposée par ce projet de loi est superfétatoire. Mesdames et Messieurs les députés, compte tenu des explications et des prises de position exprimées durant les deux séances de commission consacrées à l'examen de cet objet, la majorité de la commission vous recommande de ne pas entrer en matière sur ce projet de loi tel que présenté à la commission. Je reviendrai éventuellement sur les amendements proposés par le rapporteur de minorité.

M. Bernhard Riedweg (UDC), rapporteur de minorité. C'est par sept voix pour, cinq voix contre et trois abstentions que l'entrée en matière sur ce projet de loi a été refusée en commission. Ainsi, lorsqu'un projet de loi modifie la répartition des tâches entre le canton et une commune, son Conseil administratif et son Conseil municipal ne seront pas systématiquement consultés, ce qui est un manquement à la démocratie, surtout dans les grandes communes. Vous n'êtes pas sans savoir que ces prochaines semaines, la répartition des tâches entre le canton et toutes les communes battra son plein, et cette répartition sera âprement négociée dans le cadre de nombreuses politiques publiques. Le premier train de lois sur la répartition des tâches a déjà été transmis à la commission des affaires communales, régionales et internationales. Le fait que le Conseil municipal ne sera pas considéré comme un partenaire dans les négociations est une solution de facilité, ce qui est à déplorer. Les articles 11, 135 et 147 de la constitution fraîchement révisée prévoient que l'Etat «informe largement, consulte régulièrement et [mette] en place des cadres de concertation», ce qui vaut pleinement pour la répartition des tâches entre le canton et les communes. Par conséquent, nous estimons qu'il faut absolument inscrire ce principe de consultation dans la loi sur l'administration des communes. Je laisse à l'auteur de ce projet de loi, Mme Christina Meissner, le soin de vous présenter les deux amendements figurant à la page 11 du rapport et vous remercie d'ores et déjà de leur réserver un accueil favorable.

Présidence de M. Antoine Barde, président

Mme Christina Meissner (UDC). Le rapporteur de majorité l'a dit: dans la LAC, aujourd'hui, il est clairement écrit que quand un texte de loi «concerne spécifiquement une ou plusieurs communes, l'Association des communes genevoises, la Ville de Genève et les communes particulièrement concernées sont en règle générale consultées». Cela ne veut pas dire systématiquement. Or, dans le cas des projets de lois qui découleront des décisions concernant les tâches, par définition, toutes les communes sont concernées par tous ces projets de lois qui nous seront proposés. Ainsi, il est nécessaire de pouvoir les consulter toutes. A la suite des discussions en commission, il s'est avéré que la formulation utilisée, c'est-à-dire «les organes des communes» qui devaient «être consultés», impliquait que le Conseil d'Etat lui-même se charge de consulter directement tous les conseillers municipaux. Notre idée était évidemment bien éloignée de cela. Ainsi, nous avons déposé des amendements proposant des reformulations, afin qu'il s'agisse véritablement d'une concertation entre autorités cantonales et exécutifs communaux: c'est ce que propose l'amendement A que vous avez trouvé à vos places. Ensuite, il nous appartenait de souligner aussi la nécessité de l'information aux Conseils municipaux par les exécutifs communaux sur les discussions et modifications qui auront lieu dans la répartition des tâches. C'est l'objet du deuxième amendement, l'amendement B, que vous avez trouvé sur vos tables et que j'ai signé avec MM. Yves de Matteis, Alberto Velasco et Jean-François Girardet. Enfin, je mentionne le dernier amendement, celui qui figure dans le rapport de minorité à la page 11, qui rappelle à l'article 2, alinéa 4, la nécessité à chaque étape de la procédure que les communes puissent disposer d'un délai suffisant pour faire valoir leur position, ce qui est quand même nécessaire. Il y aura des discussions complexes sur des sujets complexes.

Ces trois amendements, je vous demande de les soutenir car ils permettent véritablement d'implémenter ce que notre constitution a demandé: un véritable dialogue, un principe de subsidiarité et une réflexion qui s'établissent pour cette répartition des tâches entre les communes et le canton de manière totalement égalitaire et transparente.

M. Yves de Matteis (Ve). Je vais être relativement bref, mais quand même dire la raison de ces allées et venues, puisqu'il y a eu passablement d'hésitations dans cette commission. A priori, personnellement, j'étais plutôt bien disposé par rapport à ce projet de loi puisqu'il parlait de concertation, d'information, etc. Beaucoup de personnes l'ont dit en commission, et en dehors aussi: cela pouvait paraître superfétatoire, puisque la constitution parle déjà de concertation entre l'Etat et les communes, que l'avant-projet de loi-cadre en parle aussi, on l'a mentionné, et ce concept de consultation-concertation est même contenu dans beaucoup de discours du Conseil d'Etat, à commencer par ceux de son président, M. Longchamp. Cependant, comme disait le prince de Talleyrand dans son adage célèbre repris de manière plus populaire par la suite: si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant. A mon sens, c'est vraiment dans la LAC, c'est-à-dire, quand même, le texte de loi qui précise les rapports entre le canton et les communes, que cela doit figurer, et pas seulement s'agissant de cette procédure de désenchevêtrement, mais pour celles qui pourraient venir par la suite - parce que ma foi, ça pourrait très bien encore avoir lieu dans dix ou vingt ans. Cela légitime donc à soi seul le fait de l'inclure dans la LAC.

Lors d'une deuxième lecture, cependant, j'étais beaucoup plus réservé par rapport à ce projet de loi, parce que le texte de départ disait que c'étaient à la fois les Conseils administratifs - les exécutifs des communes - mais aussi leurs délibératifs qui devaient être consultés. Or, on a déjà pu voir à la CACRI à quel point consulter les exécutifs de quelques communes, ou de la majorité des communes, avait été difficile et compliqué: cela nécessite toute une procédure de consultation. Du coup, comment faire avec quarante-cinq délibératifs ? Quarante-cinq parlements, dont celui de la Ville de Genève qui comprend quatre-vingts personnes, un peu moins que ce Grand Conseil. C'est ce qui fait que j'ai finalement voté contre ce projet de loi, car il me semblait que c'était totalement superfétatoire.

Dans les deux amendements présentés ensuite par Mme Meissner, les termes sont plus clairs: on parle vraiment d'autorités communales, et en général, par autorités, on entend l'exécutif. Nous avons malgré tout précisé qu'il fallait remplacer ce terme d'«autorités» par «exécutifs» pour être tout à fait clair et montrer qu'il s'agissait de consulter uniquement les exécutifs.

L'amendement B n'est pas un sous-amendement, mais un vrai amendement selon lequel les exécutifs communaux informent leurs Conseils municipaux respectifs de la procédure de modification de la répartition d'une tâche et des projets de lois qui s'y rapportent; c'est faire preuve d'une transparence élémentaire ! Toutes les communes, tous les exécutifs des communes devraient au minimum informer leurs Conseils municipaux de procédures qui peuvent avoir des conséquences extrêmement lourdes. Admettons qu'une entente soit établie entre l'Etat et une commune - par exemple, que celle-ci abandonne toute prérogative en matière de culture - et que cela soit ensuite réglé par un projet de loi: le Conseil municipal se retrouverait devant un fait accompli, ne pourrait plus réagir, ne pourrait même pas sanctionner son Conseil administratif. C'est donc vraiment la raison qui préside au dépôt de ces amendements tels que nous les présentons.

M. Gabriel Barrillier (PLR). Chers collègues, les bras m'en tombent ! (Exclamations.) Je regarde madame... Trop de consultations créent la paralysie: soyons sérieux ! A la CACRI, nous avons digéré, disséqué le projet de loi-cadre sur la répartition. Je viens de vérifier: sur dix articles de cette loi qui a été votée, six parlent de concertation et de consultation avec les communes: les articles 6, 7, 9, alinéa 3, etc. Le mandat constitutionnel est clair, on l'a rappelé: il existe une obligation de consultation des communes. Je l'ai dit en commission, cette volonté, ce souci de vouloir consulter à tous les stades, à chaque fois, dénote une certaine suspicion. Parlons sans langue de bois: beaucoup sont opposés à cette nouvelle répartition. Tout à coup surgit une alliance entre les socialistes, porte-parole de la Ville de Genève, qui sont contre cette répartition...

Une voix. C'est pas vrai !

M. Gabriel Barrillier. ...l'UDC et le MCG; vous vous réveillez tout à coup pour essayer de paralyser et de bloquer cette nouvelle répartition. Mais s'il vous plaît ! (Commentaires.) Je sais bien que la soirée est un peu longue ! Mais il y a bien de la suspicion, une volonté de retarder toute cette procédure de réorganisation territoriale à Genève ! La consultation est prévue, je le répète, à tous les articles ! Qu'est-ce que vous voulez de plus ? En outre - je terminerai par là - vous dites très justement dans votre amendement qu'on doit consulter les exécutifs. Vous auriez très bien pu écrire qu'on consulte les exécutifs et les législatifs, c'est-à-dire les Conseils municipaux; j'ai eu un peu peur, mais vous êtes quand même restés raisonnables et avez mentionné seulement les exécutifs. Je vous rappelle que l'autonomie communale est une réalité et que les exécutifs, les communes sont libres de s'organiser pour ces consultations. Donc, je vous en supplie: arrêtons de faire de la «consultationite» à tout prix, au risque de paralyser tout le mouvement en cours ! Je vous remercie.

M. Jean-François Girardet (MCG). Je suis bien content de prendre la parole après notre ancien président, le député Barrillier, parce que ses propos reflètent bien l'état d'esprit des discussions qui ont eu lieu à la CACRI. Effectivement, les partis qui ont des membres dans les exécutifs communaux ne se soucient pas trop de la manière dont ces exécutifs vont représenter la population de leur commune. Par contre, les partis dépourvus de membres dans les exécutifs, mais qui reflètent le vote d'une bonne proportion de la population municipale, voient avec suspicion l'octroi de pouvoirs de représentation dans leur commune à leurs exécutifs respectifs au niveau de l'ACG. Car c'est bien comme ça que le canton va consulter les communes, en demandant aux exécutifs de donner des avis sur des projets de lois qui vont passer devant notre Grand Conseil et dont le projet de loi-cadre donnait un certain nombre de garanties pour que la population puisse être consultée.

Par ce projet de loi que nous présente l'UDC Mme Meissner, nous remettons simplement la discussion au niveau des Conseils municipaux et nous demandons qu'ils puissent s'exprimer, être consultés, être informés; non pas que les Conseils municipaux bloquent le processus, mais qu'ils puissent donner leur avis pour que, fort de cet avis de la majorité du Conseil municipal, un conseiller administratif puisse représenter réellement la volonté populaire exprimée par le Conseil municipal. C'est de la compétence du Conseil administratif ou de l'exécutif, des maires et des adjoints, d'organiser l'information, d'organiser également la consultation de la population, pour ensuite être muni de cette consultation, qui ne devrait pas prendre des siècles, mais simplement se résumer à une information large, ouverte et transparente. C'est bien ce que demandent les amendements, que M. de Matteis a bien présentés. Je vous remercie de les voter, parce qu'ils nous donnent l'assurance que la population pourra ainsi coopérer et se voir sollicitée pour appuyer tous ces projets de lois sur le point de nous arriver.

M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les conseillers municipaux... (Exclamations.) Excusez-moi ! (Commentaires.) Oui, j'ai passé une semaine au Conseil municipal, j'espère que vous me pardonnerez, Mesdames et Messieurs les députés ! C'est un lapsus quand même significatif.

J'apprécie de plus en plus M. Barrillier: il manie bien l'art oratoire et l'art de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Moi, Monsieur Barrillier, j'ai pour principe dans la vie de considérer que les réformes ne se font pas contre les gens, mais avec les gens. En l'occurrence, je vous donne un scoop, Monsieur Barrillier: nous nous sommes mis d'accord avec le Conseil d'Etat pour répartir les tâches concernant la culture. Nous sommes entrés en matière sur la gouvernance du Grand Théâtre, sur le fait que le système d'exploitation, les frais de gestion de la Nouvelle Comédie seraient à la charge unique de la Ville de Genève. Nous nous sommes mis d'accord sur le fait que la BGE - la Bibliothèque de Genève - passe le cas échéant sous la responsabilité de l'Etat de Genève et qu'il y ait un processus de prise en charge par la municipalité de ses six cycles d'orientation. Sauf que si nous ne mettons pas au courant nos conseillers municipaux respectifs, dans les communes - parce qu'il y a sept ou huit autres cycles d'orientation qui se trouvent dans les communes - j'imagine les problèmes qu'il y aura quand le Conseil d'Etat arrivera en annonçant qu'il s'est mis d'accord ou qu'il a la loi pour lui, que les communes doivent reprendre les cycles d'orientation et que c'est pesé et vendu. Imaginons la réaction, Mesdames et Messieurs, si nous ne mettons pas au courant nos conseillers municipaux respectifs, si nous ne les consultons pas, si nous ne leur faisons pas adopter des motions de principe sur ces questions essentielles ! Il s'agit quand même de charges, même si le système qu'on nous présente avec la caisse commune pendant trois ans d'abord, puis un verrouillage et l'augmentation des centimes additionnels des uns et des autres - de manière un peu autoritaire quand même - même si tout ça risque d'aller au «collapse», comme on dit, avec pour résultat que dans cinq ou six ans, on n'aura aucune réforme. Je plaide donc et j'ai toujours plaidé pour que ça ne se fasse pas contre les gens, y compris dans les services dont j'ai la charge et que j'ai réformés en profondeur. Or, pour que ces réformes ne se fassent pas contre les gens, il faut que cette concertation ait lieu dès le départ, Mesdames et Messieurs les députés ! Vous devez prendre en compte le volume des enjeux: dans le cas de la BGE, par exemple, vu la richesse de ses collections - elle possède des incunables et des livres extrêmement précieux - ce sont des millions qui vont être transférés à l'Etat de Genève, si ce transfert se fait. Tout ce processus ne va pas se passer comme un long fleuve tranquille, bien au contraire, si nous ne prévoyons pas dès le départ la concertation comme pivot, comme élément central dans cette problématique.

Monsieur Barrillier, je vous apprécie beaucoup, mais de là à dire qu'avec trop d'information, ou de consultation - je ne sais pas comment vous avez exprimé cela - ça ne va pas aller... Pour nous, nous sommes dès le départ entrés dans ce processus.

Le président. Il vous reste vingt secondes.

M. Rémy Pagani. Merci ! Même si nous avons renâclé au départ, j'ai le plaisir de vous dire que, sur la culture, nous avons passé un accord avec le Conseil d'Etat et nous nous y tiendrons. Et pour que nous nous y tenions, il faut que cette concertation ait lieu, et nous soutiendrons non seulement les amendements mais aussi le texte de départ qui nous semble tout à fait cohérent avec ce que je viens d'énoncer. Je vous remercie de votre attention, et veuillez m'excuser de vous avoir confondus avec un autre cénacle !

Mme Irène Buche (S). Le groupe socialiste avait refusé l'entrée en matière en commission car il n'était pas convaincu par la formulation proposée, mais le principe même de la concertation est pour nous fondamental. Ce principe est prévu dans la constitution; nous avons été déçus par le refus de certaines dispositions que nous avions proposées pour le projet de loi-cadre et nous estimons aujourd'hui fondamental que ce principe soit également prévu dans la LAC: l'article qui parle de consultation des communes dit que «la Ville de Genève et les communes particulièrement concernées sont en règle générale consultées», mais ce n'est pas suffisant, surtout pour des projets de nouvelle répartition des tâches. C'est pourquoi nous soutiendrons tous les amendements proposés aujourd'hui, et nous vous invitons à en faire de même.

M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien soutiendra la majorité - qui va, il me semble, devenir une minorité - et ne votera pas les amendements. Honnêtement, c'est du bon sens ! Le bon sens veut que les Conseils administratifs des communes tiennent au courant leurs Conseils municipaux. Vous êtes dans des partis qui ont des représentants dans tous les Conseils municipaux et vous allez quand même discuter avec ces gens et les tenir au courant de ce qui se passe au Grand Conseil ! Pourquoi inventer une usine à gaz ? L'Etat négocie avec l'ACG et théoriquement, l'ACG doit être représentative de toutes les communes. Je vous ferai déjà remarquer que quand il y a une décision de l'ACG, les Conseils municipaux de toutes les communes peuvent s'y opposer en votant sur ces décisions, d'accord ? Ce droit existe ! Vous allez compliquer les choses au maximum.

Par ailleurs, je suis effaré par ce qu'a dit M. Pagani - vous lui transmettrez, Monsieur le président. Je me rends compte que l'Etat qui décide maintenant de négocier avec les communes et l'ACG mène des négociations parallèles avec la Ville de Genève. On décide sur la culture avec la Ville de Genève, mais on se moque des autres communes ! On va décider ce qui est bien pour la Ville de Genève, mais on ne tient pas au courant les autres communes de ce qui est bon pour elles. J'ai entendu que les cycles d'orientation sont remis aux communes: merci pour Carouge, ma commune, qui en a deux ! On ne lui a pas demandé si elle était d'accord ou pas de les reprendre à son compte. Là-dessus, je pense qu'il n'y a pas besoin d'inventer les choses, c'est simplement une question de bon sens: il faut que chacun prenne son bâton de pèlerin, discute avec ses représentants dans les communes et leur dise de faire attention à certaines choses.

Mme Beatriz de Candolle (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, à nouveau, pour régler les éventuels dysfonctionnements des cinq grandes communes, on fait fi des quarante autres et on légifère en créant des doublons de lois existantes et d'articles de notre constitution. Soyons sérieux et arrêtons avec ces couches de mille-feuille qui ne font qu'alourdir et renchérir le processus décisionnel ! J'aimerais vous dire en outre que les magistrats communaux ne sont pas des dissimulateurs, et c'est dans l'intérêt de la population qu'ils informent leurs Conseils municipaux respectifs des lois et des décisions qui touchent leurs communes. Nous refuserons donc tous ces amendements.

Mme Christina Meissner (UDC). Monsieur le président, juste pour revenir sur ce que j'ai entendu précédemment, je rappelle: pas de suspicion, juste une mise en cohérence de la constitution et des lois entre elles, de la loi-cadre et de la LAC. En votant ce projet de loi et les amendements, ce Grand Conseil montrera son respect de toutes les instances de gouvernance. Le bon sens, c'est bien; s'assurer de son application, c'est encore mieux !

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je passe la parole à Mme Simone de Montmollin pour quarante-cinq secondes.

Mme Simone de Montmollin (PLR). Merci, Monsieur le président. Je suis très heureuse d'apprendre ce soir qu'un accord a été trouvé entre le canton et la Ville de Genève, un accord qui aurait fait suite à des discussions concertées entre autorités cantonales et communales, cela sans disposition légale. C'est la preuve que lorsque des magistrats se mettent autour d'une table et qu'ils doivent discuter pour arriver à une solution commune, suivie et solide, ils y arrivent, et cela indépendamment de dispositions qui les y contraindraient.

Le président. Il vous faut conclure.

Mme Simone de Montmollin. Je vous encourage donc à refuser ces amendements et à refuser ce projet de loi.

M. François Lance (PDC), rapporteur de majorité. Effectivement, le rapporteur de majorité est devenu rapporteur de minorité. Personnellement, je regrette un peu le revirement de certains membres de la CACRI. Nous aurions pu continuer ce débat à la CACRI, je regrette que ces propositions n'aient pas été effectuées en commission.

Quelques remarques sur ces amendements, car à mon sens ils sont importants. Tout d'abord, quand on dit dans le premier que «tout projet de loi modifiant la répartition d'une tâche entre le canton et les communes est élaboré de manière concertée entre les autorités cantonales et les exécutifs communaux», cela signifie, il me semble, que le Conseil d'Etat doit prendre contact avec les quarante-cinq exécutifs communaux... (Commentaires.) ...pour se concerter avec eux. Quand je lis cet amendement, ce n'est pas clair ! Deuxièmement, les exécutifs communaux, pour moi, c'est l'ACG, interlocuteur officiel du Conseil d'Etat.

Ensuite, concernant l'amendement demandant d'informer le Conseil municipal: encore une fois, il appartient aux Conseils administratifs, les exécutifs, d'informer leurs Conseils municipaux de l'évolution des dossiers, et je ne pense pas qu'il soit nécessaire de l'inscrire comme obligation dans la LAC. Ce qui est bizarre, c'est qu'on ajouterait ces amendements à l'article 2 de la LAC, qui s'appelle «Autonomie communale». Donc, là aussi, cela suscite des doutes. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il faut aussi prendre en considération la diversité des communes. Certaines petites communes n'ont pas les moyens de répondre rapidement au Conseil d'Etat sur des prises de position; souvent, les communes se réfèrent à la position de l'ACG s'agissant de ces propositions de modifications de lois. L'obligation d'informer le Conseil municipal, comme je l'ai déjà dit, est une obligation même du Conseil administratif. Cela voudrait dire aussi que certains Conseils municipaux auraient peut-être tendance à déposer des motions et des résolutions pour retarder un processus qui est déjà long. Je rappelle le processus mis en place conjointement par le Conseil d'Etat et l'ACG: il y a d'abord une concertation au sein de l'ACG, entre les quarante-cinq communes, et ensuite, entre une délégation de l'ACG et une délégation du Conseil d'Etat. D'après ce que je vois, cette concertation fonctionne et je trouve dommage de tout remettre en cause. Pour toutes ces raisons, je propose un renvoi à la commission des affaires communales, régionales et internationales afin de réétudier ces trois amendements. (Exclamations.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Les rapporteurs et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer à ce propos. Le souhaitez-vous, Monsieur le conseiller d'Etat ? (Remarque.) Vous avez la parole.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Le Conseil d'Etat soutient le renvoi en commission, Mesdames et Messieurs les députés. Manifestement, on tente de régler des comptes par personnes interposées, en prenant le canton en otage en raison de défiances que l'on a de toute évidence à l'encontre des exécutifs communaux voire de l'Association des communes genevoises. On voudrait nous demander, à nous, canton, dans une négociation déjà compliquée - je ne vous dis pas les difficultés pour fixer des rendez-vous et pour se voir avec l'ACG ! - de discuter maintenant avec les Conseils administratifs, les exécutifs des communes. C'est tout simplement impossible ! Pour qu'ensuite ces exécutifs retournent à leurs Conseils municipaux et qu'après cela ils reviennent vers nous et nous donnent le résultat de leurs discussions ? Vous voulez enterrer le désenchevêtrement canton-communes en compliquant de manière excessive ce processus déjà particulièrement complexe !

Encore une fois, réglez vos comptes là où ils doivent être réglés ! Si vous considérez que vos exécutifs ne sont pas dignes de confiance, eh bien, dites-le-leur et changez-en ! Si vous considérez que l'assemblée des communes genevoises ne fait pas son travail, ne représente pas les communes, dites-le-lui ! Je peux vous dire en tout cas qu'elle défend bien les intérêts des communes, qu'elle ne lâche rien et que les discussions ne sont pas faciles, contrairement à ce que laisse entendre M. Pagani dans le domaine de la culture. Je peux vous dire que dans le domaine des affaires sociales, c'est particulièrement difficile d'arriver à des solutions, parce que tout le monde sait la difficulté qu'il y a à remplir certaines politiques publiques. Donc, ne votez pas cette demande qui vous est faite à la hâte: renvoyez cela en commission, écoutez le Conseil d'Etat, entendez l'ACG et vous verrez qu'il s'agit finalement de conseillers municipaux qui éprouvent une défiance à l'égard de certains exécutifs et qui veulent régler des comptes par l'intermédiaire de ce projet. Le canton n'est pas là pour cela ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat, et j'invite l'assemblée à se prononcer sur cette demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11603 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est rejeté par 55 non contre 32 oui.

Le président. Monsieur Cerutti, vous voulez prendre la parole ?

M. Olivier Cerutti (PDC). Oui, Monsieur le président !

Le président. Il vous reste vingt-cinq secondes.

M. Olivier Cerutti. C'est suffisant ! Je trouve que ce que vous êtes en train de faire ce soir, Mesdames et Messieurs les députés, c'est ubuesque. Vous êtes en train de mettre à plat ce qui a été prévu par la constitution, c'est-à-dire cette répartition des tâches entre les communes et le canton. Nous nous trouvons ici face à un projet mal ficelé, qui doit retourner en commission ! Excusez-moi, mais je refais cette demande ! Merci, Monsieur le président ! Vous êtes en train de saboter un acte essentiel pour notre république: c'est véritablement scandaleux ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je vais vous faire voter sur cette nouvelle demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 11603 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est rejeté par 56 non contre 30 oui et 1 abstention.

Le président. Nous passons au vote d'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 11603 est adopté en premier débat par 53 oui contre 31 non et 1 abstention.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 2, alinéa 3, ainsi que d'un sous-amendement. Voici l'amendement, que vous trouvez à la page 11 du rapport de minorité:

«Art. 2, al. 3 (nouveau)

3 Tout projet de loi modifiant la répartition d'une tâche entre le canton et les communes est élaboré de manière concertée entre les autorités cantonales et communales.»

Le sous-amendement de M. Yves de Matteis et consorts, que vous avez reçu à vos places, consiste à remplacer les mots «et communales», à la fin, par «et les exécutifs communaux». Nous votons d'abord sur ce sous-amendement.

Mis aux voix, ce sous-amendement est adopté par 55 oui contre 29 non et 1 abstention.

Le président. Nous allons maintenant voter sur l'amendement ainsi modifié par le sous-amendement. La teneur de l'amendement est donc devenue la suivante:

«Art. 2, al. 3 (nouveau)

3 Tout projet de loi modifiant la répartition d'une tâche entre le canton et les communes est élaboré de manière concertée entre les autorités cantonales et les exécutifs communaux.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 55 oui contre 30 non.

Le président. Nous passons au second amendement de la minorité, toujours à la page 11 du rapport de minorité, ainsi libellé:

«Art. 2, al. 4 (nouveau)

4 A toutes les étapes de la procédure de répartition des tâches, les autorités cantonales compétentes veillent à ce que les communes disposent d'un délai approprié pour faire valoir leur position.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui contre 29 non.

Le président. Enfin, nous sommes saisis d'un amendement présenté notamment par M. de Matteis, que vous avez reçu à vos places et que je vous lis:

«Art. 2, al. 5 (nouveau)

Les exécutifs communaux informent leurs conseils municipaux respectifs de la procédure de modification de la répartition d'une tâche et des projets de lois s'y rapportant.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 56 oui contre 30 non.

Mis aux voix, l'art. 2 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Le président. Le troisième débat est-il demandé ? (Remarque.) Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Mauro Poggia.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Le Conseil d'Etat ne demandera pas le troisième débat... (Exclamations. Huées. Applaudissements.) Le Conseil d'Etat ne demandera pas le troisième débat, dans l'attente d'un examen de la conformité avec le droit supérieur du projet de loi... (Remarque.) ...que vous vous apprêtez à voter. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Si ce projet de loi est conforme à la constitution, le Conseil d'Etat demandera ultérieurement le troisième débat, bien évidemment. (Applaudissements. Huées.)

Suite du débat: Séance du vendredi 18 décembre 2015 à 10h