Séance du jeudi 19 mai 2022 à 20h30
2e législature - 5e année - 1re session - 2e séance

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Jean-Luc Forni.

Assistent à la séance: Mme et MM. Serge Dal Busco, président du Conseil d'Etat, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Mauro Poggia, Anne Emery-Torracinta, Antonio Hodgers et Fabienne Fischer, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Thierry Cerutti, Marjorie de Chastonay, Jennifer Conti, Patrick Dimier, Diego Esteban, Christian Flury, Adrien Genecand, Véronique Kämpfen, Philippe Morel, Youniss Mussa, Patrick Saudan, Vincent Subilia, Salika Wenger et Christian Zaugg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Glenna Baillon-Lopez, Denis Chiaradonna, Florian Gander, Aude Martenot, Corinne Müller Sontag, Jean-Pierre Pasquier, Helena Rigotti, Gabriela Sonderegger et Pascal Uehlinger.

Annonces et dépôts

Néant.

E 2832
Tirage au sort de la commission de grâce (15 membres titulaires et 17 membres suppléants) (la présidence du Grand Conseil choisit, en plus, la présidence de la commission parmi les membres du Bureau)

Le président. Nous passons au tirage au sort de la commission de grâce, composée de 15 membres titulaires et de 17 membres suppléants. Sont tirés au sort:

Titulaires: Mmes et MM. Cyril Aellen (PLR), Pierre Nicollier (PLR), Fabienne Monbaron (PLR), Antoine Barde (PLR), Youniss Mussa (S), Badia Luthi (S), Caroline Marti (S), Boris Calame (Ve), David Martin (Ve), Claude Bocquet (PDC), Jean-Marc Guinchard (PDC), Ana Roch (MCG), Daniel Sormanni (MCG), Jean Burgermeister (EAG) et Marc Falquet (UDC).

Suppléants: Mmes et MM. Francine de Planta (PLR), Raymond Wicky (PLR), Alexandre de Senarclens (PLR), Pierre Conne (PLR), Romain de Sainte Marie (S), Grégoire Carasso (S), Cyril Mizrahi (S), Philippe de Rougemont (Ve), Pierre Eckert (Ve), Christina Meissner (PDC), Patricia Bidaux (PDC), Françoise Sapin (MCG), Sandro Pistis (MCG), Pablo Cruchon (EAG), Pierre Vanek (EAG), Christo Ivanov (UDC) et Patrick Lussi (UDC).

Annonce de la présidence de la commission de grâce: Séance du vendredi 20 mai 2022 à 16h30

E 2821
Election d'une juge suppléante ou d'un juge suppléant au Tribunal civil (entrée en fonction immédiate)
E 2823
Election d'une procureure ou d'un procureur, en remplacement de M. Endri GEGA, élu juge au Tribunal administratif de première instance (entrée en fonction : 1er juin 2022)
E 2824
Election d'une juge assesseure ou d'un juge assesseur au Tribunal administratif de première instance, spécialisé en matière de construction, d'urbanisme et d'hygiène publique pour statuer en matière de constructions (pris en dehors de l'administration), en remplacement de M. Michel GROSFILLIER, démissionnaire (entrée en fonction : 1er juillet 2022)
E 2825
Election d'une juge assesseure ou d'un juge assesseur à la Commission de conciliation en matière de baux et loyers du Tribunal civil, représentant les bailleurs, en remplacement de M. Claude ROEDER, démissionnaire (entrée en fonction : 1er juillet 2022)

Le président. La liste des élections vous a été envoyée par messagerie. Il en est pris acte.

Elections

PL 12945-A
Rapport de la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) chargée d'étudier le projet de loi constitutionnelle de Mmes et MM. Jean-Pierre Pasquier, Véronique Kämpfen, Pierre Nicollier, Antoine Barde, Jean Romain, Alexis Barbey, Céline Zuber-Roy, Murat-Julian Alder, Pierre Conne, Jacques Béné, Serge Hiltpold, Helena Rigotti, Sylvie Jay, Fabienne Monbaron, Francine de Planta, Alexandre de Senarclens, Charles Selleger, Joëlle Fiss, Raymond Wicky, Bertrand Buchs, Jean-Charles Lathion modifiant la constitution de la République et canton de Genève (Cst-GE) (A 2 00) (Pour une protection forte de l'individu dans l'espace numérique)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 19, 20 mai, 2 et 3 juin 2022.
Rapport de Mme Céline Zuber-Roy (PLR)

Premier débat

Le président. Nous arrivons aux urgences et nous commençons avec le PL 12945-A, classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Céline Zuber-Roy, à qui je donne la parole.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. La commission des Droits de l'Homme a étudié le PL 12945, déposé le 28 avril 2021, au cours de trois séances, en septembre 2021 et mars 2022. Ce projet de loi vise à inscrire le droit à l'intégrité numérique dans la constitution genevoise. Il est la reprise d'une initiative populaire PLR, avortée en raison de la difficulté à récolter des signatures en période de pandémie.

Le développement technologique, en particulier numérique, lance de nombreux défis à notre société. Dans ce cadre, une meilleure protection des citoyens et de leurs données est un enjeu fondamental. Les travaux de la commission ont confirmé qu'il y a un intérêt, sur le plan tant symbolique que juridique, à ajouter un nouveau droit fondamental dans notre constitution. Grâce à l'engagement du département, qui a mis en place un groupe de travail incluant des experts, le texte a pu être amendé afin d'être précisé et complété. Il a ainsi été décidé de créer un nouvel article consacré uniquement à cette thématique plutôt que de la rattacher à un droit déjà existant, comme la protection de la sphère privée et la liberté personnelle. (Brouhaha.) L'objectif est que le nouvel article 21A serve de courroie de transmission entre la liberté personnelle et la protection de la sphère privée. (Brouhaha.)

Une voix. Chut !

Le président. S'il vous plaît ! Un peu de silence, s'il vous plaît.

Mme Céline Zuber-Roy. Merci. Il a également été jugé utile de préciser la notion d'intégrité numérique, car ce concept est récent et n'est pas défini par la jurisprudence. Ainsi, un deuxième alinéa a été prévu pour énoncer, à titre exemplatif, des composantes de ce droit. Sont listés: le droit d'être protégé contre le traitement abusif des données liées à la vie numérique, le droit à la sécurité dans l'espace numérique, le droit à une vie hors ligne ainsi que le droit à l'oubli. Cette définition permet de donner un cadre initial à ce nouveau droit fondamental, mais ne vise en aucun cas à empêcher son évolution au fil du temps à travers la jurisprudence. Un alinéa 3 a également été ajouté afin de lutter contre la fracture numérique. L'Etat se voit ainsi attribuer la mission de favoriser l'inclusion numérique et de sensibiliser la population aux enjeux du numérique. De plus, l'Etat devra s'engager en faveur du développement de la souveraineté numérique de la Suisse.

Pour finir, il convient d'apporter deux précisions. Ce nouvel article ainsi complété paraît suffisamment précis pour ne pas nécessiter de loi d'application. Deuxièmement, en tant que droit fondamental cantonal, il s'appliquera principalement à l'administration cantonale genevoise, aux communes, aux établissements publics autonomes ainsi qu'à tout autre organisme de droit public ou de droit privé chargé d'accomplir des tâches de droit public cantonal ou communal. De ce fait, il serait souhaitable que ce droit, à terme, soit repris au niveau fédéral. Pour l'ensemble de ces raisons, la commission des Droits de l'Homme vous invite, Mesdames et Messieurs, à accepter le projet de loi amendé.

M. Pierre Vanek (EAG). C'est un droit fondamental nouveau que nous inscrivons dans la constitution. C'est important d'inscrire des droits fondamentaux nouveaux dans la constitution. Je trouve donc qu'on bâcle le travail en traitant ce point en urgence - les gens n'ont pas pu forcément se préparer -, en trente minutes, ce qui me donne par exemple trois minutes de parole, alors que ça va finir en votation populaire ! Je serais donc enclin, et je le ferai à la fin de mon intervention, à demander un renvoi en commission de ce projet de loi. Je pense en effet que dans l'enthousiasme suscité par la matérialisation de l'initiative du PLR qui n'avait pas abouti, la commission a un tout petit peu, je ne dirai pas bâclé le travail, mais elle a été un peu vite en besogne; elle n'a pas abordé tous les aspects de la question.

Il s'agit en effet ici du recyclage d'une initiative PLR dont on nous dit qu'elle n'a pas pu aboutir parce qu'il y avait le covid; mais enfin, la gauche a fait aboutir une, deux initiatives fiscales durant cette période. Je crois aussi qu'elle n'a probablement pas abouti non parce que le sujet est inintéressant, mais parce que les gens n'ont pas bien compris ce que voulait le texte ! L'initiative disait juste: «Toute personne a le droit à la sauvegarde de son intégrité numérique.»

Ensuite, la commission a traité cette affaire - une petite commission; j'ai beaucoup de respect pour la commission des Droits de l'Homme, mais enfin, l'affaire a été traitée par une petite commission de neuf membres, en trois séances. Pourquoi si vite ? Parce que - M. Dal Busco pourra en témoigner tout à l'heure - son département s'est entiché de l'affaire et a mis en route une machine de réflexion autour de cette question. Il a consulté toutes les régies publiques, le préposé à la protection des données, l'Université de Genève, etc., mais le travail législatif «de réflexion», entre guillemets, a été fait par le département qui a soumis un paquet tout prêt à la commission des Droits de l'Homme, et ce n'est pas très bien ! Normalement, les commissions du parlement doivent plutôt faire elles-mêmes le travail sur ce genre de questions - il s'agit en effet de l'introduction d'un nouveau droit fondamental. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)

J'ai préparé un amendement que vous avez tous reçu, que j'ai pris la peine de vous envoyer en début de séance, qui rajoute un alinéa formulé comme ceci: «L'intégrité numérique inclut le droit de toute personne à l'information sur les données personnelles numériques qui la concernent et qui sont détenues par autrui, le droit au contrôle effectif de chacune et chacun...»

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Vanek. Je conclus ! «...sur ces données numériques personnelles et le droit à la protection contre toute exploitation marchande de ces données qui ne serait pas explicitement autorisée par la personne concernée.» Or ces éléments-là ne figurent pas dans le projet de loi. Le projet de loi prévoit...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Pierre Vanek. Oui, mais ça démontre bien ce que je disais, Monsieur le président: on ne peut pas discuter dans ces conditions de l'introduction d'un nouveau droit fondamental - ça va finir en votation populaire ! Donc je me tais volontiers, Monsieur le président, mais je demande en conséquence que cet objet soit d'abord renvoyé en commission pour qu'on discute à fond de cette affaire et qu'on se mette d'accord ! Je pense...

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Pierre Vanek. ...qu'on peut se mettre d'accord. Et ensuite, Mesdames et Messieurs...

Le président. J'ai bien compris que vous demandiez le renvoi en commission.

M. Pierre Vanek. ...qu'on en discute ici en prenant un peu plus de temps...

Le président. C'est terminé !

M. Pierre Vanek. ...que la petite demi-heure qui est accordée à l'inscription d'un nouveau droit fondamental... (Le micro de l'orateur est coupé.)

Le président. Voilà. Sur le renvoi en commission, je passe la parole à la rapporteure.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Je remercie le groupe Ensemble à Gauche de me redonner trois minutes de parole - non, excusez-moi, je ne m'exprime pas sur le temps du rapporteur mais sur celui qui est accordé lors d'une demande de renvoi en commission.

Je suis surprise de la position d'Ensemble à Gauche, parce qu'ils étaient présents en commission; si l'opposition à l'alinéa 3 a effectivement donné lieu à une abstention, il n'y a pas eu d'autre proposition. Je comprends donc que M. Vanek regrette de ne pas pouvoir s'exprimer davantage, mais la représentante d'Ensemble à Gauche n'a ni contesté le temps de parole décidé par la commission ni fait d'autres propositions.

J'ai dû être brève dans mes explications relatives au groupe d'experts mis en place par le département; je trouve intéressant, si on regarde l'amendement de M. Vanek et son argumentaire, qu'il se base sur un excellent article du professeur Mahon, figure reconnue en la matière. Ça tombe bien, le professeur Mahon faisait partie du groupe d'experts à l'origine de la proposition d'amendement qui a été intégralement reprise par la commission.

S'agissant d'un droit fondamental, je dois le dire, l'article que nous proposons est assez long si on le compare à ceux relatifs aux autres droits fondamentaux. En principe, ils sont assez brefs. Là, on a déjà trois alinéas et M. Vanek propose d'en rajouter encore; nous pensons qu'il faut au contraire s'en tenir à ce qui a été fait. Un droit fondamental est appelé à rester longtemps - on l'inscrit dans notre charte fondamentale - et c'est la jurisprudence qui le fera évoluer, notamment dans sa définition. C'est comme cela que ça fonctionne et c'est très bien.

Pour ces raisons, je vous invite à refuser le renvoi en commission proposé par M. Vanek, à refuser ensuite son amendement et à accepter le projet de loi tel qu'amendé par la commission.

Le président. Merci, Madame la rapporteure. Le Conseil d'Etat ne souhaitant pas s'exprimer, j'invite l'assemblée à se prononcer sur le renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12945 à la commission des Droits de l'Homme (droits de la personne) est adopté par 46 oui contre 19 non.

PL 13006-A
Rapport de la commission judiciaire et de la police chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LaLP) (E 3 60) (Mise en conformité avec le droit fédéral)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 24 et 25 février 2022.
Rapport de Mme Dilara Bayrak (Ve)

Premier débat

Le président. Nous abordons la prochaine urgence, soit le PL 13006-A, qui est classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Dilara Bayrak, à qui échoit la parole.

Mme Dilara Bayrak (Ve), rapporteuse. Oui, merci, Monsieur le président. Le PL 13006 a été traité à la commission judiciaire et de la police durant trois séances, les 16 décembre 2021, 13 et 20 janvier 2022. Il s'agit d'un texte technique qui permet la mise en conformité avec le droit supérieur suite à la modification de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite en 2018. Plusieurs éléments ressortent de cet objet qui nous ont été présentés sous la forme de cinq axes.

Tout d'abord, Mme Fontanet nous a expliqué que la réorganisation des offices avait rendu l'adoption d'un projet de loi de ce type fortement nécessaire; je pense notamment à la réforme de l'office cantonal des poursuites et de l'office cantonal des faillites, qui ont été restructurés et placés sous la responsabilité d'un seul et même préposé. Le deuxième axe consiste à régler une incohérence qui demeure dans la LaLP, il s'agit d'une question de contrôle entre la Cour des comptes et la chambre de surveillance des offices.

Le troisième point, et c'est celui qui a été le plus discuté au sein de la commission, concerne la notification des actes. En effet, il y a aujourd'hui une certaine lacune qui fait que plusieurs actes doivent être invalidés suite à l'impossibilité de les notifier correctement aux personnes qui en sont les destinataires. Le texte prévoit de déléguer cette activité en partie aux communes, étant précisé qu'elle fait l'objet d'un défraiement et qu'il n'y a donc aucun transfert de charges. L'ACG nous a contactés à ce sujet et a demandé d'être auditionnée, chose qui a été faite. Au final, il s'avère que les inquiétudes de l'ACG étaient surtout liées à l'ensemble des transferts de charges prévus par le Conseil d'Etat; la commission a compris ces craintes, mais a jugé bon d'aller de l'avant, car ce projet de loi consiste surtout en une mise en conformité nécessaire afin de ne pas répéter plusieurs actes de notification et que les actions puissent être menées à terme.

L'avant-dernier élément a trait à l'accès direct des offices au RDU en matière de saisie, de séquestre ou de faillite. Cela permet d'aller beaucoup plus vite dans le traitement des affaires et d'éviter de demander aux personnes concernées de répéter les sommes qui ont été indûment récoltées. Cinquième et dernier axe: la suppression de la mention d'agent d'affaires dans la LPAA. Cette notion a été retirée de la LaLP, et sa présence dans la LPAA rendait celle-ci contraire au droit fédéral.

Pour toutes ces raisons et suite à l'audition de l'ACG, la commission a décidé à une grande majorité d'adopter ce projet de loi, avec un refus d'Ensemble à Gauche. J'aimerais bien savoir pourquoi, car il n'y a pas eu d'arguments allant dans ce sens lors des auditions et discussions internes de la commission. Merci, Monsieur le président.

M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, je souhaite remercier le département pour le bon travail qui a été exécuté afin d'améliorer l'efficience des offices. Vous avez même fait participer les collaborateurs et collaboratrices, ce qui est vraiment à relever, c'est remarquable. On ne peut que saluer les belles améliorations apportées, notamment en ce qui concerne la qualité de vie au travail et l'efficacité des prestations, donc merci !

Le président. Je vous remercie et cède à présent la parole à M. François Baertschi.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président, et félicitations pour votre brillante élection ! Pour revenir sur le sujet qui nous occupe maintenant, il s'agit d'une mise en conformité du droit cantonal avec la législation fédérale. Un élément a retenu notre attention en particulier, et ce n'était pas la question des agents d'affaires qui est un point assez mineur, voire secondaire, c'est un problème dépassé, donc on ne va pas entrer dans le détail technique de ce genre de chose.

En revanche, ce projet de loi a le mérite de reprendre les règles fédérales qui stipulent que ce sont les communes, en collaboration avec les polices cantonales, qui traitent les notifications de poursuites. On sait qu'il y a des oppositions à ce type de pratique dans certaines communes, mais c'est pourtant quelque chose de positif qui leur permet d'être impliquées. Il s'agit aussi d'une tâche de proximité, c'est logique, c'est ce qui se fait dans les autres cantons et on ne voit pas pourquoi il faudrait une genevoiserie de plus. Pour une fois que le droit fédéral est intelligent, je vous propose de le suivre et de voter cet objet. Merci.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de votre confiance ainsi que la rapporteure pour la qualité de son rapport. Merci beaucoup.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, c'est le moment de voter.

Mis aux voix, le projet de loi 13006 est adopté en premier débat par 72 oui et 7 abstentions.

Le projet de loi 13006 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 13006 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 71 oui et 8 abstentions (vote nominal).

Loi 13006 Vote nominal

PL 12968-A
Rapport de la commission des travaux chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 55 503 000 francs pour l'aménagement du site du Vengeron et octroyant à l'entreprise Cauderay Y. sàrl une concession d'occupation des eaux publiques d'une durée de 40 ans
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 19, 20 mai, 2 et 3 juin 2022.
Rapport de majorité de M. Grégoire Carasso (S)
Rapport de minorité de M. Rémy Pagani (EAG)

Premier débat

Le président. Voici l'urgence suivante: le PL 12968-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je donne la parole à M. Grégoire Carasso.

M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président, et félicitations pour votre brillante élection ! Mesdames et Messieurs, chers collègues, le PL 12968 a été étudié à la commission des travaux durant neuf longues séances. Il ouvre un crédit d'investissement de 55 millions de francs pour l'aménagement du site du Vengeron. Outre la revalorisation complète des lieux sous l'angle environnemental et des loisirs, le projet s'inscrit dans un contexte cantonal plus large. Avec la réalisation de la magnifique plage des Eaux-Vives, l'Etat s'est engagé à libérer la rade des entreprises lacustres. Le but du texte est donc triple: il s'agit de construire à la fois un port professionnel pour et avec les sociétés portuaires, un parc public avec une grève naturelle et, en matière écologique, de renaturer l'embouchure du Vengeron en créant des îles favorables à la faune et à la flore lacustres qui, fonction importante, protégeront également l'ensemble du site des vagues.

Durant les travaux, les commissaires ont passé en revue quatre problématiques principales que je résume à votre attention. Tout d'abord, il convient de souligner que l'entier des aménagements, et c'était un enjeu spécifique au projet, restent très bas pour limiter l'emprise sur les vues. En comparaison avec d'autres ouvrages connus, si l'on prend comme référence le Port-Noir, par exemple, on s'aperçoit qu'ici - démonstration en a été faite en commission -, l'empiétement est beaucoup plus mesuré, notamment pour tout ce qui concerne les aspects portuaires. A Port-Choiseul, actuellement en cours de rénovation, l'ampleur est plus ou moins similaire.

Rassurés sur ce point, nous nous sommes ensuite questionnés, avec une intensité variable selon les sensibilités politiques, quant à la compatibilité du réaménagement du Vengeron avec le projet de la traversée du lac; au soulagement de certains, exprimé de manière plus ou moins sincère, la commission a constaté qu'il était compatible avec celui-ci.

S'agissant des enjeux et équilibres financiers, relevons que cet investissement public à hauteur de 55 millions s'accompagne d'investissements privés de près de 7 millions à la charge des entreprises lacustres, lesquelles vont construire leurs bâtiments et équipements pour les amarrages dans le port.

Enfin, et j'en terminerai par là, Monsieur le président, chers collègues, le point de vue des communes de Bellevue et de Pregny-Chambésy a été dûment pris en compte; le projet, qu'on pourrait raisonnablement qualifier de modèle pour ce qui est de la concertation, a vu sa copie initiale nettement améliorée grâce à l'intégration de l'opinion des deux communes que je viens de citer. Forte de ces différents paramètres au terme d'un examen réparti sur neuf séances, la commission des travaux vous invite, à une très large majorité, à soutenir ce crédit d'investissement. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de minorité. Mon collègue Carasso a résumé l'ensemble du projet, mais il reste des points de friction que j'aimerais relever. Il a notamment passé comme chat sur braise sur l'implantation du départ de la fameuse traversée du lac. Chacun connaît la bretelle du Vengeron, et elle partirait directement par-dessus la plage actuelle, ce qui posera un vrai problème à long terme. On va quand même dépenser 55 millions - ce n'est pas une petite somme - pour réaménager un site qui correspond aujourd'hui à un besoin populaire, qui n'aurait pas besoin de travaux et qui se verra peut-être traversé de part en part par une infrastructure routière - autoroutière ! -, car il est toujours question de ce projet que nous ne soutenons par ailleurs pas. Voilà l'un des problèmes.

Ensuite, il y a la participation des uns et des autres, bien que l'effort commun de la Ville de Genève et du canton se concrétise par l'aménagement de cette installation au Vengeron dans le but de faire disparaître tous les bateaux qui se trouvent en aval du jet d'eau sur le quai marchand des Eaux-Vives et, je l'espère, sur celui des Pâquis, parce que là aussi, toute une série d'embarcations devraient être retirées pour enfin libérer l'espace et faire profiter nos concitoyennes et concitoyens de cette vue magnifique.

Sauf que, ici encore, il faut relever un certain nombre de problèmes. D'abord, malheureusement, rien ne se passe, il y a toujours des bateaux alors qu'on nous avait vanté les mérites du port de la plage des Eaux-Vives qui a été inauguré dernièrement, et puis surtout il y a des récalcitrants qui n'ont pas donné leur accord; au contraire, ils se sont opposés à ce transfert. Je me tourne vers le conseiller d'Etat qui se dit sans doute: «Mais enfin, Pagani, il est pour ce projet !» Je sais, pour les avoir fréquentés, que ces gens bénéficient de rentes de situation depuis très longtemps et ne sont pas disposés - ils l'ont d'ailleurs fait savoir à la commission - à dégager ce merveilleux panorama, ce bien commun qui devrait être à la disposition de tous les promeneurs et habitants.

Pour finir, Monsieur le magistrat, là où j'ai un véritable souci, c'est quant à la question de savoir si les berges du lac Léman, ce lac qui nous est propre...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Monsieur.

M. Rémy Pagani. Oui, tout à fait, Monsieur le président, merci. Je vous félicite au passage pour votre élection à la présidence ! (Remarque.) Eh bien il faut en profiter, tant qu'on peut se féliciter, il faut y aller ! On a donc étudié une proposition émanant pour l'instant d'une minorité, mais qui sera largement majoritaire quand elle se transformera en initiative, à savoir faire en sorte que toutes les rives du lac soient à la disposition de nos concitoyennes et concitoyens. Ici, on s'aperçoit que la plage va un jour subir les affres autoroutières, c'est un paravent pour cacher le fait que la population genevoise n'a toujours pas accès, alors que la Constitution fédérale comme la constitution cantonale le prévoient, à l'entier des berges du lac, ce qui est déplorable. C'est la raison pour laquelle nous nous opposerons à cette feuille de vigne visant à dissimuler les problèmes qui subsistent et qui subsisteront jusqu'à ce que des habitants lancent une initiative pour qu'enfin on leur donne accès à l'ensemble des rives du lac, ce à quoi ils ont droit, d'autant plus que le climat, je vous le rappelle, et on le constate encore ces derniers jours, va aller en se réchauffant de plus en plus; l'accessibilité à l'eau sera donc toujours plus réclamée par nos concitoyennes et concitoyens. Merci.

M. Stéphane Florey (UDC). Bon, on peut adhérer à ce que M. Pagani vient de dire. Sur le fond, il a raison, mais la problématique qui nous est soumise ce soir ne concerne pas du tout le sujet qu'il vient de développer. Il faut considérer ce projet de loi comme l'aboutissement d'un long processus qui a commencé avec la plage des Eaux-Vives, s'est poursuivi avec le réaménagement des quais et se conclura avec le déménagement des bateaux de là où ils se trouvent actuellement. Voilà la finalité de ce texte et, ma foi, oui, cela entraîne un certain nombre de conséquences.

Alors on peut être d'accord ou pas sur la concession, on peut discuter de tout ce qu'on veut, Mesdames et Messieurs, mais pourquoi faudrait-il maintenant remettre en question ce qui a été négocié de longue date, ce qui a permis à la population genevoise de disposer d'une plage supplémentaire, laquelle est déjà surfréquentée aujourd'hui ? Il n'y a qu'à voir les photos qui circulent en ce moment sur le net, c'est une vraie réussite.

Voilà, nous sommes donc arrivés à l'aboutissement de l'opération avec ce projet de loi qu'il faut adopter, ne serait-ce que pour tenir les engagements pris depuis le début, c'est-à-dire qu'il n'y aura pas d'aménagement de plage, il n'y aura pas de réagencement des quais sans déménagement de toutes - je dis bien: toutes ! - les entreprises concernées par cette affaire. Le vote de ce soir va concrétiser l'ensemble des discussions qui durent depuis des années, et c'est ce long processus qu'il nous faut à présent valider.

C'est la raison pour laquelle l'UDC acceptera ce projet de loi et vous invite à tenir vos engagements, même si les personnes présentes maintenant ne sont peut-être plus celles qui ont oeuvré depuis le début, en finalisant la démarche lancée à l'époque par Robert Cramer, que je vois encore babouches aux mains et lunettes de soleil sur le nez ! Il avait fêté la fin de son mandat... (Commentaires.) Des tongs, oui, merci, Monsieur Jean Romain, il s'agissait de tongs ! Il portait des tongs, un tuba et célébrait la fin de son mandat sur une victoire qui était la concrétisation de ce projet. Aujourd'hui, il faut tenir ces engagements, et je vous enjoins dès lors de voter ce projet de loi. L'UDC vous en remercie. (Applaudissements.)

M. François Lefort (Ve). Que dire après l'excellente intervention du député Stéphane Florey, après les très justes propos du rapporteur de minorité Rémy Pagani ? Tout ce qu'ils ont indiqué est vrai. Nous sommes à la fin d'une longue histoire, celle de la plage des Eaux-Vives, que nous avons initiée en décembre 2009, et il ne s'agissait pas de babouches, mais de tongs que le conseiller d'Etat Robert Cramer arborait avec un tuba et des lunettes de soleil ! Très bien. Nous sommes donc à la fin d'une longue histoire qui a commencé par des promesses faites à des entreprises: si nous voulions une plage aux Eaux-Vives, il fallait déplacer ces sociétés, et nous sommes enfin - enfin ! - arrivés au moment où il est possible de le faire dans de bonnes conditions.

Tout ce qui a été relevé est juste, tellement juste d'ailleurs que nous aurions pu voter ce projet aux extraits ! Evidemment, nous sommes tellement d'accord, même M. Pagani est d'accord; mais il a quand même déposé un excellent rapport de minorité. Tout cela aurait pu être voté demain après-midi en cinq minutes, mais nous sommes obligés d'en parler, donc soyons reconnaissants à M. Pagani de pouvoir en débattre, parce que tout ce qu'il a souligné est véridique.

L'accès à l'eau, bien sûr ! Or l'objectif de la plage des Eaux-Vives était précisément de créer un accès à l'eau, un début d'accès à l'eau pour une partie de la population qui n'en dispose pas, en particulier maintenant qu'il fait chaud. Voyez, Mesdames et Messieurs, comme les températures grimpent ces jours-ci, nous avons besoin de nous baigner, tous. Voilà.

Cela étant, pour le surplus, je répète que nous aurions pu adopter le texte aux extraits; il se trouve que nous ne l'avons pas fait. Les Verts soutiennent ce projet de loi qui permet de déplacer les entreprises lacustres, ce que nous leur devons, parce que nous le leur avons promis il y a quatorze ans. C'est donc la fin d'une histoire qui a été extrêmement longue. Ne perdons plus de temps, votons l'objet ce soir ! Les Verts valideront naturellement ce projet de loi. Merci.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. La parole revient à M. Olivier Cerutti.

M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président. Quelques mots afin de vous féliciter pour votre magnifique élection: 88 voix, c'est presque un record, presque ! En tout cas, ça l'est pour le parti démocrate-chrétien, étant donné que ça n'arrive pas régulièrement. Félicitations, Monsieur le président ! (Commentaires.) Ce n'est peut-être pas le sujet du débat de ce soir, mais je tenais à le dire. (Applaudissements.)

Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, nous sommes devant un crédit d'investissement de 55 millions. En effet, ce sont des sous. Nous avons pu apprécier à la commission des finances... Non, pas à la commission des finances, à celle des travaux ! ...la qualité de ce projet. Je crois que nous sommes tous d'accord là-dessus. M. Pagani a tout de même souhaité déposer un rapport de minorité, voilà pourquoi nous discutons de cet objet maintenant. Merci, Monsieur Pagani, de nous accorder ce débat ! De temps en temps, c'est vrai, il faut se faire plaisir; c'est vrai, à tout âge, il faut savoir se faire plaisir, vous avez bien raison. (Rires.)

Des voix. Bravo !

M. Olivier Cerutti. Oui, oui, Monsieur Pagani ! (Rires.) Cela étant, les quelques vérités que vous nous assénez ce soir, c'est l'épaisseur du trait. On en prend acte, le Conseil d'Etat a compris qu'il y avait une vraie volonté politique derrière ce projet et qu'il fallait aller de l'avant, et vite. Mesdames et Messieurs, le parti démocrate-chrétien votera ce crédit de 55 millions...

Une voix. Le Centre, bordel !

M. Olivier Cerutti. Non, nous sommes encore démocrates-chrétiens jusqu'à la fin de la législature, Madame la présidente du Centre ! (Commentaires. Rires.)

Une voix. Vas-y, Olivier, vas-y !

M. Olivier Cerutti. Mais oui ! (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, laissez l'orateur s'exprimer...

M. Olivier Cerutti. Je n'en disconviens pas, cher Monsieur !

Le président. Laissez-le s'exprimer, parce que le temps s'écoule.

M. Olivier Cerutti.  Ça ne fait rien, j'ai toujours mon temps à disposition, Monsieur le président, je vous remercie. (Remarque.) Un tout petit peu ! Je voulais simplement indiquer qu'il fallait accepter le texte ce soir.

La seule chose qui est intéressante, avec ce rapport de minorité, c'est de se rappeler qu'il y a la traversée du lac. Eh oui, Mesdames et Messieurs, la traversée du lac ! Eh bien on se rend compte qu'on peut même la réaliser en effectuant les aménagements pour 55 millions au Vengeron. Dont acte. Le parti du Centre ou le parti démocrate-chrétien, c'est selon, soutiendra ce projet de loi. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Serge Hiltpold (PLR). Tout d'abord, je remercie les deux rapporteurs. Le PLR a refusé le projet de loi en commission, parce qu'il nourrissait un certain nombre de doutes, donc on peut se rallier non seulement au rapporteur de majorité sur la majeure partie des éléments relevés, mais également au rapporteur de minorité que je remercie pour son objectivité quant au mélange des genres qu'il y a eu sur la distribution des droits distincts et permanents.

Le groupe PLR souligne plusieurs aspects positifs, à commencer par la logique du projet qui consiste à déplacer les activités portuaires, mais critique fondamentalement son coût. En effet, je pense qu'on perd un peu la raison s'agissant de la dépense des deniers publics. Il est question de 55 millions pour transférer les entreprises lacustres, mais ce déménagement ne représente en fait que 17,5 millions tandis que le prix de l'aménagement paysager visant à construire des îles avec des pieux s'élève à 15 millions. On est donc face à un aménagement paysager qui constitue 24,2% du coût global de l'ouvrage, et je pense que ça mérite en soi un débat en séance plénière.

Par rapport à l'ambiance qui a prévalu à la commission des travaux, ça a été relaté par le rapporteur de majorité que je remercie, il y a eu un certain mélange des genres quant au déplacement des sociétés. Evidemment, le PLR n'est pas contre les entreprises, mais contre la mauvaise utilisation des deniers publics. Il s'agit notamment d'éviter des rentes de situation ainsi que certains passe-droits accordés à une société en particulier - que je ne nommerai pas - s'agissant d'un droit distinct et permanent long, avec la demande - et là, je le dis très volontiers - d'un ancien chancelier, qui est tout de même censé défendre les intérêts de l'Etat, que des activités privées soient prises en charge par des collectivités publiques. C'est précisément ce point-ci, je vous le dis franchement, qui a braqué les commissaires PLR.

Le PLR n'est pas contre le développement de ce projet, mais je pense que rien que pour ça, il mérite une clarification. Ce genre d'objets ne doivent pas être traités aux extraits, un vrai débat public et un véritable acte démocratique doivent avoir lieu. Maintenant, on l'a dit, le savoir-faire des entreprises portuaires est nécessaire, tout comme il est capital de dégager les quais et de respecter les engagements pris. Toutefois, le coût est trop élevé pour nous; c'est la raison pour laquelle les commissaires PLR, dans un accès de mauvaise humeur, on va dire, ont refusé le projet de loi, notamment pour ces problèmes spécifiques, mais... (La fin des propos de l'orateur est inaudible.)

Une voix. Très bien.

M. François Baertschi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce débat est intéressant, parce qu'il révèle d'étranges contradictions. Commençons par la gauche qui part en guerre contre la privatisation des rives du lac. Fort bien. Mais, au même moment, on assiste à la privatisation d'un espace public central de Genève, à savoir la plaine de Plainpalais, par le Cirque du Soleil, lequel appartient maintenant à une grande entreprise chinoise: c'est du gros business, du capitalisme dur, ils alignent les millions, ils achètent l'âme de Genève pour occuper le centre de la ville, la gauche vend l'âme de Genève à de grands financiers ! Bravo, la gauche genevoise ! Vous trahissez vos idéaux et là, vous venez avec des arguments qui ne tiennent pas la route alors qu'il s'agit d'un excellent projet.

L'autre paradoxe provient d'un milieu tout aussi étonnant. Le PLR nous dit qu'il faut éviter les rentes de situation. C'est ce qu'a indiqué son commissaire: «Nous estimons qu'il y a une rente de situation.» D'accord. J'évoquerai encore la plaine de Plainpalais; vous me direz que c'est la gauche qui en est responsable, évidemment, mais en ce qui concerne les rentes de situation, je ne suis pas sûr que le PLR ait toujours été exemplaire. Alors peut-être veut-il se racheter aujourd'hui, je ne sais pas, mais en agissant ainsi, il attaque une petite PME officiant dans le domaine lacustre, comme cela a été souligné. Qu'est-ce qu'on veut ? On cherche à fragiliser des emplois, à détruire une activité locale dynamique ! Il y a là vraiment quelque chose de choquant, parce qu'on est dans l'ordre du dogme, du dogmatisme, de l'idéologie aveugle.

Il y a l'idéologie aveugle de la gauche qui crée le malheur, il y a l'idéologie aveugle d'une certaine droite, prétendument libérale, qui cause également le malheur. Et Genève dans tout ça ? Que fait-on ? Nous avons un magnifique projet, et le MCG le soutiendra comme il l'a fait en commission. Nous vous demandons de le voter avec conviction pour Genève, pour l'activité lacustre, pour les habitants, pour le lac et pour l'avenir de notre belle cité. Merci, Mesdames et Messieurs les députés.

Le président. Merci bien. Je repasse la parole à M. François Lefort pour une minute dix.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Autant nous avons beaucoup ri tout à l'heure s'agissant du rapport de minorité, autant les paroles du commissaire PLR me font penser à autre chose. Nous parlons ici de protection de la biodiversité. La suite de la plage des Eaux-Vives, qui se concrétisera avec l'infrastructure du Vengeron, relève également de ce domaine. Il a mentionné les travaux qui lui semblent pharaoniques, les dépenses importantes pour le volet écologique, mais protéger la biodiversité, c'est aussi maintenir la stabilité de notre environnement... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...et les montants qu'il a cités sont essentiels pour sauvegarder notre environnement, la qualité de vie de notre population qui, dans le futur, sera soumise à des contextes climatiques changeants. Que dire de plus ?

Le président. Il vous faut conclure.

M. François Lefort. Oui, je vais conclure. Outre que ces sommes sont fondamentales, Mesdames et Messieurs, elles sont également cruciales pour la trésorerie des entreprises membres des organisations patronales qu'il défend...

Le président. C'est terminé.

M. François Lefort. ...et donc vous comprendrez qu'il faut absolument voter ce projet de loi qui servira les finances de ces sociétés... (Le micro de l'orateur est coupé.)

M. Rémy Pagani (EAG), rapporteur de minorité. Je suis assez satisfait de la discussion générée par mon rapport de minorité, parce que celui-ci porte précisément sur les rentes de situation. Il y a une entreprise, dont je ne citerai pas le nom par égard pour elle, qui est complètement...

Une voix.  Ça figure dans le rapport.

M. Rémy Pagani. Oui, ça figure dans le rapport. ...qui est subventionnée à 100% par l'Etat de Genève, qui fournit une prestation tout à fait correcte et qui, par ce biais, prétend avoir le droit de rester dans des bureaux au bord du lac, de rénover des bateaux... Voilà trente ans qu'ils rénovent le même bateau, et j'aurais aimé entendre ce soir le Conseil d'Etat... (Commentaires.) Oui, j'ai constaté que c'était toujours le même bateau; ça fait trente ans que je me promène sur le quai bas des Eaux-Vives, et c'est toujours le même bateau ! Je ne sais pas comment ils font, mais c'est toujours le même bateau.

J'aurais aimé entendre le Conseil d'Etat s'engager aujourd'hui même à rompre les baux et à les renouveler d'année en année jusqu'à ce que cette plage soit créée, j'aurais aimé, comme M. Hiltpold vient de le signaler, entendre le Conseil d'Etat dire: «Oui, nous allons mettre en concurrence» - ouh là là, le mot qu'il ne faut pas prononcer ! - «ces entreprises qui bénéficieront de plus d'une dizaine de millions» - je ne dis pas gratuitement, mais qui seront mis généreusement à leur disposition. Voilà, donc j'espère que le Conseil d'Etat s'impliquera pour mettre le holà à ces prébendes.

Le président. Merci. Monsieur Grégoire Carasso, vous avez la parole pour deux minutes quarante-sept.

M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Des critiques ont été formulées sur la rente de situation, on assiste à une tentative d'opposition assez inadéquate concernant la portée économique du projet. Mesdames et Messieurs, on ne parle que d'une entreprise, et encore, celle qui est sans doute le moins directement concernée par les activités lacustres qui seront développées sur le site.

Je vous rappelle simplement un ordre de grandeur, parce que sur les 55 millions, 17 millions seront dédiés au volet portuaire et 7 millions proviendront des entreprises privées: deux tiers, un tiers, c'est un partenariat public-privé important de ce point de vue là. Venons-en aux 17 millions pour l'axe des loisirs: c'est l'aménagement d'une plage avec une grève naturelle, c'est l'installation-rénovation d'une buvette, ce sont trente places d'amarrage et 150 espaces pour les paddles, petits bateaux à voile, etc.

Enfin, il y a la dimension nature qu'on a si peu évoquée avec la création d'îles et la renaturation du Vengeron. Pour un montant de 20 millions sur les 55, c'est la création de zones d'eaux calmes permettant le développement, je le souligne, des macrophytes, ce sont des roselières, un secteur de type Cariçaie et deux grèves pour que les oiseaux puissent se reposer et se nourrir.

Il s'agit d'un beau projet à l'échelle cantonale qui libère les quais en déplaçant les entreprises lacustres au Vengeron et, sur ce périmètre, il s'agit d'un ouvrage remarquablement équilibré entre ses dimensions économiques que je viens de rappeler, mais aussi environnementales et de loisirs.

C'est la raison pour laquelle, Monsieur le président, chers collègues, j'espère qu'une majorité se dégagera pour soutenir ce crédit d'investissement et que les petites contrariétés passagères, abondamment mises en évidence dans le rapport ainsi que durant le débat de ce soir, ne nous priveront pas d'une majorité confortable. Je vous remercie.

Une voix. Bravo. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur. Pour conclure la discussion, je cède la parole au président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco.

M. Serge Dal Busco, président du Conseil d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. A mon tour de vous féliciter très chaleureusement pour votre brillante élection ! Je ne sais pas quels éléments je peux ajouter à l'excellent rapport - tant écrit qu'oral - du rapporteur de majorité, si ce n'est souligner que la commission a été pleinement convaincue par le projet qui lui a été présenté par le Conseil d'Etat, un projet parfaitement équilibré, comme M. Carasso vient de le rappeler - y compris d'un point de vue financier, puisqu'on est pratiquement au million près -, avec trois pôles.

Il importait au Conseil d'Etat d'offrir une alternative crédible et économiquement supportable aux entreprises que l'on va prier - de manière assez impérieuse, je dois dire - de quitter les lieux qu'elles occupent depuis des années. Comme vous l'avez indiqué très justement vous aussi, Monsieur le rapporteur de minorité... Je vous ai côtoyé dans votre fonction précédente, nous avons collaboré quelques années de manière très fructueuse, je vous ai connu ambitieux et engagé dans l'objectif de déplacer de la rade des activités qui, tout à fait objectivement, n'ont plus de raison de s'y trouver. Aussi suis-je très étonné, je vous l'avoue, Monsieur Pagani, par les propos que vous tenez aujourd'hui, parce que je vous ai entendu à maintes reprises défendre des positions exactement inverses. Il nous importait donc d'offrir une alternative pour ces sociétés lacustres, car il est essentiel que leur viabilité économique soit assurée, nous devons créer ces conditions-là.

Chacun aura pu constater que les deux autres dimensions du projet, c'est-à-dire la question des loisirs, de l'accès à l'eau d'une part et le volet environnemental d'autre part, sont également très importantes. D'ailleurs, le projet qui avait été voté dans la liesse... J'ai bien aimé la description de M. le député Lefort tout à l'heure quand il évoquait les tongs - enfin, il n'est pas le seul à en avoir parlé -, le tuba et les lunettes de soleil; pour ma part, j'ai encore le souvenir du collier de fleurs hawaïen que M. Cramer arborait fièrement, et il avait bien raison de le faire. Cela étant, par rapport au projet qui avait été adopté en décembre 2009, me semble-t-il, des améliorations notables ont été apportées, des associations environnementales ont pesé sur l'évolution de l'ouvrage, et force est de constater aujourd'hui que c'est une totale réussite avec cet aspect environnemental, cette roselière et cette partie située à l'arrière, cela montre bien qu'il est possible de développer des projets extrêmement équilibrés.

C'est exactement cette ambition-là que nous avons pour le Vengeron et ce n'est pas de l'argent public gaspillé, c'est de l'argent investi pour notre population qui bénéficiera d'installations tout à fait attrayantes à cet endroit-là, ce sont des investissements faits au profit de la biodiversité et de l'environnement dans un contexte presque urbain. Enfin, le projet permet de dégager la rade, nous aspirons à ce qu'elle soit très attractive, encore plus qu'aujourd'hui, bien sûr.

En toute objectivité, j'ai de la peine à imaginer - nous avons de la peine à imaginer, au Conseil d'Etat - que l'on puisse être contre ce projet et j'espère - j'en suis convaincu, mais je l'espère ardemment - qu'il y aura une très large majorité pour suivre la majorité de la commission en acceptant, dans quelques instants, ce projet de loi. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Nous passons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 12968 est adopté en premier débat par 57 oui contre 28 non.

Le projet de loi 12968 est adopté article par article en deuxième débat.

Mise aux voix, la loi 12968 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 56 oui contre 30 non (vote nominal).

Loi 12968 Vote nominal

PL 12588-A
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les établissements publics médicaux (LEPM) (K 2 05)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session II des 1er et 2 juillet 2021.
Rapport de majorité de M. Sylvain Thévoz (S)
Rapport de minorité de M. François Baertschi (MCG)

Premier débat

Le président. Nous passons à l'urgence suivante, le PL 12588-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole au rapporteur de majorité, M. Sylvain Thévoz.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, le projet de loi 12588 du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les établissements publics médicaux a été traité en sept séances. Au terme de ses travaux, la commission l'a accepté par 9 oui, 2 non et 4 abstentions. Ce texte reflète ce que la Cour des comptes avait préconisé en 2017 et ne pose aucun problème de fond. Pour rappel, les dix-sept recommandations émises par la Cour des comptes ont été acceptées. Au 30 juin 2020, douze d'entre elles avaient déjà été mises en oeuvre, dont trois ont été closes dans la période sous revue. Le 9 octobre 2019, le Conseil d'Etat a déposé ce projet de modification de loi au Grand Conseil, pour formaliser une situation existant de fait.

Sur le fond, ce projet de loi vise notamment à permettre au conseil d'administration des HUG de siéger sans tout ou partie des membres du comité de direction, en fonction des objets traités, en réponse à la recommandation 5 de la Cour des comptes. Celle-ci avait en effet exprimé sa préoccupation face à un conseil d'administration composé d'un trop grand nombre de membres. Elle considérait que la taille de ce conseil et celle du bureau méritaient d'être repensées afin de garantir une plus grande implication des membres de ces instances. La Cour des comptes considérait que les règles nouvelles en matière de composition de ce conseil devaient donner de meilleures garanties quant à l'éventail des compétences requises et quant à leur caractère effectif. Il n'est pas évident de trouver près de vingt personnes qui disposent des compétences nécessaires pour assurer la conduite d'un hôpital universitaire; mais si le nombre de personnes est réduit, on y arrive certainement plus facilement.

Le point principal de l'observation de la Cour des comptes portait sur la relation entre le nombre d'administrateurs et leur implication, considérant... (Brouhaha.)

Des voix. Chut !

M. Sylvain Thévoz. Merci ! ...que si leur nombre était réduit, leur implication serait meilleure. C'est ce qui est réalisé avec ce projet de loi, qui ramène le nombre de membres du conseil d'administration des HUG à un chiffre situé entre neuf et onze, dont deux membres élus par le personnel. Les observations de la Cour des comptes rejoignaient largement ce qu'on peut observer dans les autres hôpitaux universitaires de Suisse, dont les conseils d'administration sont beaucoup plus réduits que celui des HUG. Ce projet de loi du Conseil d'Etat reflète donc ce que la Cour des comptes avait préconisé à l'époque. En outre, il dispense formellement le conseil d'administration de la négociation des conventions tarifaires et des autres tarifs avec les assureurs, dans la mesure où cette activité est réalisée depuis des années par la direction générale des HUG. Ce projet de loi du Conseil d'Etat légifère sur une situation qui, de facto, prévaut aux HUG; le vote de ce projet de loi permettra simplement de se mettre en adéquation avec les recommandations de la Cour des comptes. Pour toutes ces raisons, la majorité vous invite à le soutenir.

Le MCG est le seul groupe qui s'est opposé à l'adoption de ce projet de loi en commission. Il l'a refusé pour une seule raison, liée à l'article 20, et ce n'est pas une surprise qu'il revienne ce soir avec un amendement à ce sujet - amendement que la majorité vous invite bien entendu à refuser. Brièvement, sur l'article 20, le Conseil d'Etat avait proposé de supprimer, à la lettre c de cet article, uniquement le représentant du canton de Vaud au conseil d'administration, parce qu'il ne venait jamais, par accord tacite. Ce n'était pas, dixit M. Poggia, «une mesure de défiance» vis-à-vis du canton de Vaud qui était proposée, mais il faut savoir que les HUG sont un établissement public autonome, alors que le CHUV est un service de l'Etat de Vaud; le Conseil d'Etat genevois ne désignait ainsi aucun représentant genevois au conseil d'administration du CHUV - qui d'ailleurs n'existe pas. Il s'agissait donc pour le Conseil d'Etat d'enlever une anomalie, une asymétrie, ce que le canton de Vaud a compris dès le début. Toutefois, comme l'article 20, lettre c, prévoit qu'un membre soit nommé sur proposition des présidents des Conseils départementaux des départements français limitrophes et que le Conseil d'Etat ne proposait pas de supprimer cette mention, dixit M. Poggia encore, pour ne «pas créer un couac diplomatique avec la France», la commission a refusé la suppression du représentant vaudois du conseil d'administration. Suite à cela, le MCG a proposé de supprimer les deux représentants vaudois et français, ce qu'il propose à nouveau aujourd'hui. En deux mots, la majorité vous invite à refuser ces amendements. Ces deux sièges sont importants pour notre bonne entente avec nos voisins vaudois et pour une bonne coopération au niveau hospitalier... (Commentaires.) ...avec nos voisins français. Ils ne portent pas à conséquence et ne péjorent pas le conseil d'administration. Nous vous proposons donc de voter dans l'ensemble ce projet de loi du Conseil d'Etat. Merci de votre attention.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. Sur la plus grande partie de ce projet de loi, à savoir les objectifs et ce qui était proposé, nous étions tout à fait d'accord, parce que cela tombait sous le sens. Néanmoins, il y a un point qui a toute son importance: ce sont les deux représentants de France voisine et du canton de Vaud. (Remarque.) Une fois de plus, nous nous rendons compte que Genève donne sans recevoir, c'est-à-dire que nous donnons deux sièges de conseil d'administration à la fois au canton de Vaud et à la France voisine, or le canton de Vaud ne se rend même pas à ces réunions. Quant à la France voisine, on nous indique que nous devrions avoir une collaboration utile avec elle, mais quelle collaboration ? Plus les années passent, moins les Français collaborent avec l'hôpital - ce qui était l'hôpital cantonal et qui est devenu les HUG. Le MCG désire cette collaboration, mais nous voulons qu'elle ait lieu sur pied d'égalité et pas qu'elle constitue une forme de soumission.

Alors on nous tient certains propos qui vont toujours dans le même sens: donnons à la France, donnons au canton de Vaud certains avantages, comme ça, nous pourrons avoir une collaboration ! Mais cette collaboration, nous ne l'avons pas, on nous la vend de manière imparfaite. Je rappellerai le problème de l'école de pharmacie, où nous nous sommes fait avoir: nous avons dépensé beaucoup d'argent, nous pensions qu'une collaboration saine pouvait se faire avec le canton de Vaud. Malheureusement, cela a un peu pécloté - il faut quand même dire ce qui est ! Et dans tous les domaines, on se retrouve dans une situation où le canton de Genève est incapable de défendre ses intérêts. C'est pour cela que nous avons déposé cet amendement qui demande de faire ce qui est logique, c'est-à-dire d'enlever le représentant vaudois - qui ne vient jamais d'ailleurs -, car nous n'avons pas la réciproque; avec la France et les hôpitaux français, nous n'avons pas non plus la réciproque, je ne vois du reste pas comment nous pourrions l'obtenir: la structure est tellement différente que c'est impossible ! Une fois de plus, nous avons donc une politique régionale boiteuse, qui là comme ailleurs est insupportable. Le MCG la refuse et vous demande de la refuser avec détermination. C'est la raison pour laquelle, si les amendements ne sont pas votés, le groupe MCG rejettera le projet de loi.

M. Didier Bonny (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, comme le rapporteur de majorité l'a fort bien exprimé dans son compte rendu, ce projet de loi vise à répondre à certaines recommandations que la Cour des comptes a émises dans son rapport de 2017, telles que celles de permettre au conseil d'administration des HUG de siéger sans les membres du comité de direction en fonction des objets traités, ou encore de dispenser formellement le conseil d'administration de la négociation des conventions tarifaires et des autres tarifs avec les assureurs, dans la mesure où cette activité est réalisée depuis des années par la direction générale des HUG.

Au cours des travaux de la commission de la santé, il a également été question de la composition des comités de gestion. Les Vertes et les Verts soutiennent le changement proposé par le Conseil d'Etat, qui consiste à ajouter une représentation RH en leur sein. Concernant la représentation vaudoise au conseil d'administration, puisque le siège n'est jamais occupé par cette dernière, il aurait été logique aux yeux des Vertes et des Verts qu'elle disparaisse de la loi. La majorité ne l'a pas souhaité, la députation Verte peut vivre avec cela. (Commentaires.) Concernant le siège dévolu à une représentation française, les Vertes et les Verts sont d'avis qu'il faut le maintenir. Il est important de pouvoir échanger sur les problématiques de santé avec nos voisins car, comme nous ne l'avons que trop bien vu au cours de ces deux dernières années, le virus ne connaît pas de frontières. Compte tenu de ce qui précède, la députation Verte ne votera pas l'amendement proposé par le MCG.

Pour ce qui est de l'amendement du PLR, qui veut diminuer drastiquement le nombre des membres du conseil d'administration - proposition qui fait l'objet du PL 12769 du même PLR, dont le rapport se trouve au point 89 de notre ordre du jour -, les Vertes et les Verts s'y opposeront. Cette question mérite un débat à elle toute seule et il n'est pas correct de la part du PLR de faire revenir par la fenêtre ce qui a été mis dehors par la porte lors du vote du PL 12769 par la majorité de la commission de la santé.

En conclusion, la députation Verte votera donc ce projet de loi, tel qu'adopté par la majorité de la commission de la santé. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Emmanuel Deonna pour une minute trente-cinq.

M. Emmanuel Deonna (S). Merci, Monsieur le président. Le rapporteur de majorité l'a rappelé, en plus des compétences qu'elles amènent avec elles, les personnes qui siègent au conseil d'administration remplissent une fonction de contrôle démocratique. Le Grand Conseil est attaché au principe de la présence des partis politiques dans les conseils d'administration des régies publiques et il le réaffirme ce soir. Ce projet de loi précise un certain nombre de critères de compétences et d'indépendance, tout en maintenant ce contrôle démocratique. Le fait que des représentants du personnel siègent au conseil d'administration représente par ailleurs un avantage évident. En effet, ils sont directement impliqués au sein de l'institution. Les comités de gestion ont un devoir de gestion au sein des départements; un travail en silos et sans concertation n'est pas souhaitable. L'administrateur a le devoir de contrôle de l'application au sein des départements des décisions prises par le conseil d'administration. Celui-ci doit pouvoir accéder au département par le biais des comités de gestion et par celui des représentants du personnel.

M. Pierre Nicollier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, je vais commencer par citer deux extraits du rapport 120 de la Cour des comptes: «les attributions formelles du conseil d'administration, définies dans la loi sur les établissements publics médicaux il y a plus de 20 ans, ne sont plus en adéquation avec l'activité stratégique du conseil d'administration»; «le conseil travaille de manière plus efficace lorsqu'il conserve une taille limitée tout en réunissant des administrateurs fortement engagés dans leur fonction, indépendants, apportant à l'entreprise une large diversité de compétences et d'expérience ainsi que des profils variés [...]» Sur la base de ce constat, pour pallier cette situation, le Conseil d'Etat a choisi le service minimum dans ce projet de loi, sans s'atteler au problème de fond. Les HUG, avec leur conseil comptant vingt membres, représentant toutes sortes d'intérêts divergents, ne sont pas bien armés pour relever les défis qui s'annoncent. Devons-nous attendre un événement défavorable majeur pour mettre en place une gouvernance en bonne et due forme dans l'établissement principal de formation de nos professionnels de santé et plus grand prestataire de soins du canton ?

Le fonctionnement des HUG est anachronique, en particulier si on le compare à tous les autres hôpitaux universitaires suisses. Les conseils de ceux-ci comptent entre cinq et neuf membres représentatifs des compétences nécessaires au bon fonctionnement d'un hôpital. Durant nos travaux, un administrateur des HUG a confirmé à la commission que les problèmes au sein du conseil naissent de la double casquette de politicien et d'administrateur. Pour rappel, le rôle principal d'un administrateur est de défendre les intérêts de l'institution, et les objectifs de l'institution sont clairement définis dans la loi. Selon la fondation Ethos, les administrateurs devraient être sélectionnés selon le plan stratégique de l'institution, en rapport à une matrice de compétences nécessaires au soutien de ce plan stratégique.

Le Grand Conseil remplit déjà son rôle de surveillance démocratique au travers des lois votées annuellement pour approuver les budgets et les comptes ainsi que le rapport d'activité. Chaque année, nous recevons les représentants du personnel. Notre rôle politique est assumé avec sérieux. Le fonctionnement actuel ne doit pas perdurer, ni pour les patients ni pour les collaborateurs de l'institution. Nous vous invitons donc à soutenir ces amendements qui doivent permettre aux HUG de se préparer avec sérieux aux défis de notre système de santé. Les HUG méritent mieux que le service minimum proposé dans ce projet de loi. Merci.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède maintenant la parole à M. Bertrand Buchs.

M. Bertrand Buchs (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président, et je vous félicite pour votre élection stalinienne à la présidence du Grand Conseil !

Des voix. Bravo !

Une voix. On a élu Burgermeister ? (Commentaires.)

Une autre voix. Le PDC se trouve toujours divin ! (Exclamations. Commentaires.)

M. Bertrand Buchs. C'est normal, c'est normal, Monsieur Romain ! (Remarque.) Non, revenons à ce projet de loi. Je souscris à ce qu'a dit M. Nicollier, et le PDC-Le Centre va soutenir les amendements du PLR, parce que le rapport de la Cour des comptes est un document important, extrêmement critique, qui a remis les choses en place, et il faut le suivre. Il faut le suivre notamment sur la question du fonctionnement et de la professionnalisation du conseil d'administration des HUG.

Ce n'est pas anodin d'avoir parlé de la représentation du canton de Vaud dans le conseil d'administration: on voit que dans le canton de Vaud, on fonctionne différemment, que son représentant ne vient jamais, ce qui signifie qu'il ne s'intéresse pas du tout au fonctionnement des Hôpitaux universitaires de Genève, qui devraient travailler en concertation et en équilibre avec le canton de Vaud et le canton de Genève. Ce n'est pas anodin, parce que, dans le canton de Vaud, le directeur est directement rattaché au conseiller d'Etat et il n'y a pas de conseil d'administration. Or ce qu'on observe ces dernières années, c'est une perte de puissance de l'hôpital cantonal de Genève par rapport à celui du canton de Vaud. En termes de fonctionnement, on est clairement en train de passer derrière le CHUV; on est clairement en train de perdre la prépondérance dont on avait d'habitude en étant le premier hôpital de Suisse romande; on est clairement en train d'être relégués quasiment en deuxième ligue, et il faut faire extrêmement attention à cela. Il faut donc resserrer de façon conséquente le conseil d'administration, se doter de personnes qui soient des professionnels, qui puissent travailler sur le fonctionnement d'un hôpital. Sachez qu'à Lausanne, ils fonctionnent avec l'Ecole polytechnique fédérale, ce qui est extrêmement important.

Par ailleurs, le MCG a relevé qu'on avait un problème avec la France, ce qui est vrai, parce qu'on n'a plus le bassin de population qu'on connaissait auparavant, à savoir le bassin de population du Grand Genève. Mais cela ne veut pas dire non plus qu'il faut rejeter les représentants de la France: il faut leur parler et il faut discuter avec eux. Leur fermer la porte n'est pas une bonne solution, mais c'est vrai qu'il y a un problème sur ce point-là. Il faut donc resserrer le conseil d'administration; nous devons avoir un conseil d'administration professionnel pour que l'hôpital cantonal de Genève puisse continuer à être le meilleur de la Romandie. Je vous remercie.

Une voix. Bravo !

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, à l'origine, le traitement de ce projet de loi aurait dû être relativement simple, puisque ce qu'il proposait semblait frappé au coin du bon sens. Il y avait quand même un large consensus autour de la question d'un recentrage dans le mode de fonctionnement du conseil d'administration des HUG, des choses qui semblaient tout à fait pertinentes. Or, à la faveur des travaux sur ce projet de loi, finalement, d'aucuns ont estimé utile et pertinent de raviver la guerre des conseils d'administration; c'est ce que souhaite faire l'amendement de M. Nicollier, qui nous propose simplement de ramener la composition du conseil d'administration des HUG à un nombre situé entre neuf et onze personnes. Une demande que le Conseil d'Etat, dans son projet de loi, n'avait pas reprise.

Je trouve intéressant de vous rappeler que le président du conseil d'administration des HUG a lui-même témoigné du fait que la problématique du fonctionnement des HUG ne se posait pas en fonction du nombre de membres; il a même dressé le constat que, depuis un certain nombre d'années, les compétences de ce conseil d'administration montaient en puissance et que, de ce point de vue là, il ne s'agissait pas d'un problème de fonctionnement. Je trouve quand même utile de citer M. Balestra, dont l'audition avait été demandée - là, je ne fais que lire le rapport: pour M. Balestra, «le politique a déjà essayé à deux reprises de professionnaliser un conseil d'administration en le réduisant à neuf administrateurs, choisis uniquement pour leurs compétences et non pour leurs appartenances politiques. Le peuple n'a jamais accepté cette proposition. Il trouve cette approche non fondée vis-à-vis de certains politiciens qui ont de grandes compétences. En tant que président d'un conseil d'administration, il ne ressent pas l'urgence que la loi évolue sur ce point.» Le parlement non plus, qui, à la faveur de la révision de la LOIDP, a confirmé la présence des partis représentés au Grand Conseil dans les conseils d'administration des établissements publics autonomes. Il y a même rétabli, pour certains, notamment au sein des Etablissements publics pour l'intégration et de l'Hospice général, une représentation des partis représentés au Grand Conseil.

M. Balestra dit encore plus précisément: «la représentation de chaque parti politique présent au Grand Conseil au sein du conseil d'administration» - pour lui, en ce qui le concernait à l'époque - «des SIG, respectivement des HUG», dont il a été le président du conseil d'administration, «favorise la compréhension de l'évolution de l'entreprise par le politique». (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) «Les conseils d'administration actuels sont de bons conseils. En tant que président, il est important» - le cas échéant - «de rappeler à l'ensemble des administrateurs qu'un conseil d'administration a le rôle de haute autorité sur une organisation» et que ce n'est pas le lieu pour des débats politiques. Mais ce n'est pas non plus le lieu où il faut évacuer, éluder toute considération politique: tout ce que nous faisons est politique.

Le président. Il vous faut conclure, Madame la deuxième vice-présidente.

Mme Jocelyne Haller. Merci, Monsieur le président. En l'occurrence, c'est un mauvais procès qui est fait, c'est une opportunité que le PLR a saisie...

Le président. Merci.

Mme Jocelyne Haller. ...qui n'est respectueuse ni de la volonté populaire ni des décisions de ce parlement...

Le président. Merci, Madame la deuxième vice-présidente.

Mme Jocelyne Haller. ...qui avait réglé cette question de manière... (Le micro de l'oratrice est coupé. Commentaires.)

M. Thomas Bläsi (UDC). Beaucoup de choses ont été dites, en particulier par Mme Haller; je comptais en effet aussi revenir sur l'audition de M. Balestra - c'est désormais chose faite -, qui avait fait le panégyrique des conseils d'administration. L'UDC a toujours soutenu une représentation populaire et politique au sein des conseils d'administration des entités publiques; cet ADN politique ne fait que se confirmer. Je prends comme exemple la tendance des conseils de direction à ne pas soumettre la totalité des dossiers ou des informations aux conseils d'administration, se satisfaisant de faire de ceux-ci des sortes de chambres d'enregistrement soumises à leurs quatre volontés. Cela impose par corollaire à notre groupe de soutenir la possibilité de réunions à huis clos pour ces conseils d'administration, pour rééquilibrer un peu les forces au sein des différents conseils d'administration. Notre groupe prend acte par ailleurs de la volonté du PLR de professionnalisation des conseils d'administration, qui s'est exprimée en commission et dans ce plénum.

Concernant l'amendement proposé par le MCG, l'UDC le soutiendra. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que des déséquilibres sont constatés entre le CHUV et les HUG. Par le passé, nous avions passablement discuté à la commission de la santé sur les nominations des professeurs aux HUG, dans le cadre desquelles des professeurs du CHUV participaient aux commissions électives, ce qui ne nous semblait pas tout à fait équitable par rapport aux nominations qui intervenaient au CHUV. Voilà, j'en ai terminé. Je vous remercie, Monsieur le président.

M. François Baertschi (MCG), rapporteur de minorité. A entendre un des députés s'exprimer dans cette enceinte, on penserait que les HUG sont un hôpital de district de mauvaise qualité, un hôpital même pas de second rang, un hôpital de brousse. Or les HUG n'ont pas à rougir de ce qu'ils sont et de ce qu'ils font. Il suffit de voir les classements internationaux objectifs - chacun pourra les consulter s'il le désire -, qui sont très clairs à ce sujet. On a quand même la chance à Genève d'avoir un hôpital cantonal de très haut niveau, un hôpital universitaire devrais-je dire - j'emploie l'expression un peu à l'ancienne, mais il est vrai que c'est une vieille tradition. C'est aussi une tradition de haute valeur, dont nous héritons actuellement, et nous héritons également de toutes ses qualités.

Alors bien évidemment, les Genevois sont critiques et ils ont raison de l'être. Néanmoins, ce n'est pas une raison pour dénigrer, détruire quelque chose de haute valeur. On est souvent injuste envers soi-même à Genève, on a des complexes. C'est pour ça d'ailleurs qu'on se sent obligé de faire un peu la cour à nos amis vaudois et à nos amis français. Et malheureusement, on se retrouve dans une situation qui finit par être soit absurde soit impossible.

J'aimerais relever un autre élément, qui est aussi important: le conseil d'administration ne fait pas tout ! Les HUG sont une communauté qui compte bien plus de 10 000 personnes. Je ne sortirai pas le chiffre ici, parce que, mea culpa, je ne l'ai plus en tête, mais ce sont quand même des équipes nombreuses, des équipes de qualité, et le conseil d'administration joue certes un rôle central, joue certes un rôle décisionnel important, mais il ne faut pas croire qu'en réduisant le nombre ou en l'augmentant, on va réaliser des prouesses et des miracles ! C'est une douce illusion !

Je me souviens également d'avoir entendu dans ce débat un député nous dire: «Le virus ne connaît pas les frontières.» Mais les patients, eux, les connaissent ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Et les patients français qui devraient être soignés par les HUG, comme cela a été le cas à certaines époques, comme cela devrait être le cas si on entretenait de vraies relations et si la France nous donnait la possibilité d'entretenir des relations équilibrées et intelligentes... Tout le monde en profiterait. Malheureusement, on se trouve dans un véritable dialogue de sourds et on nous dit: «Donnez des sièges de conseil d'administration !» Non ! Si c'est pour donner des strapontins, pour donner des jetons de présence à des gens qui ne servent à rien...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.

M. François Baertschi. Oui, Monsieur le président, je conclus. ...ça sert à quoi ? Ça sert à financer deux-trois personnes, à leur faire faire du tourisme en ville de Genève... Mais c'est ridicule !

Le président. C'est terminé, Monsieur.

M. François Baertschi. C'est pour ça que je vous demande de voter l'amendement du MCG. Merci.

Le président. Merci beaucoup. Je passe la parole au rapporteur de majorité pour trente-six secondes.

M. Sylvain Thévoz (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. On sort de deux années de crise covid, où plus que jamais, il a été démontré qu'une collaboration entre les cantons et entre les Etats était nécessaire. Il est complètement absurde de supprimer les postes de ces deux représentants aujourd'hui. Bertrand Levrat a été décoré de la Légion d'honneur. (Remarque.) Ce serait pour le moins incongru de supprimer le représentant français du conseil d'administration des HUG. (Remarque.) Pour ce qui est de la proposition du PLR, elle contrevient à une décision populaire; elle créerait une anomalie par rapport à tous les autres conseils d'administration des grandes régies: les HUG seraient les seuls à avoir un conseil d'administration extrêmement réduit, a contrario des SIG qui fonctionnent à merveille avec un conseil d'administration élargi, de vingt membres, avec une représentation populaire, politique, qui permet de prendre des décisions plutôt pondérées et qui contribue plutôt à la stabilité. Merci de refuser ces deux amendements. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Je donne encore la parole à M. le député Didier Bonny pour vingt-sept secondes.

M. Didier Bonny (Ve). Merci, Monsieur le président. Je serai extrêmement bref. Puisque la Cour des comptes a été citée s'agissant de la réduction du nombre de membres du conseil d'administration, je me permets de citer le rapport de Mme Haller... (Remarque.) ...sur le PL 12769, qui se trouve au point 89 de notre ordre du jour: «Un commissaire Vert» - en l'occurrence, moi-même - «revient sur les refus du peuple de ces réductions des conseils d'administration, il demande si la Cour des comptes peut faire fi des résultats de deux votations populaires. M. Paychère lui répond que la Cour n'a pas fait de cette question de la taille du conseil d'administration une recommandation, car elle considère que c'est avant tout une question qui relève des compétences du Grand Conseil, voire du peuple.» Dont acte ! (Commentaires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Lefort, votre groupe n'a plus de temps de parole. (Remarque.) Je cède le micro à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.

Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. J'excuse l'absence de notre collègue Mauro Poggia, qui est retenu ailleurs et m'a chargée d'intervenir sur ce projet de loi pour rappeler que cet objet déposé par le Conseil d'Etat visait à permettre au conseil d'administration des HUG de siéger sans le comité de direction et à faire en sorte que le conseil d'administration n'ait pas à négocier toutes les conventions tarifaires, mais qu'il soit chargé de veiller à ce que la direction s'en occupe. Ce projet de loi visait aussi à modifier la composition du comité de gestion pour y ajouter le responsable des ressources humaines. Cet objet faisait effectivement suite, comme cela a été indiqué, à une recommandation de la Cour des comptes. Le département avait également proposé de supprimer la représentation vaudoise au conseil d'administration des HUG. En revanche, il est peut-être important de relever que le département n'avait jamais proposé de supprimer la représentation française de ce même conseil, bien au contraire: cela a été expliqué, la collaboration s'est révélée absolument essentielle pendant cette période de crise covid. Dans ce contexte, le Conseil d'Etat vous encourage à voter le projet de loi tel qu'il est sorti des travaux de commission et vous remercie pour le travail accompli.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je vous invite à vous prononcer sur l'entrée en matière.

Mis aux voix, le projet de loi 12588 est adopté en premier débat par 86 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 7, lettre h (nouvelle teneur).

Le président. Nous sommes saisis de plusieurs amendements à l'article 20. Le premier provient de M. Nicollier et vise notamment à réduire le nombre de membres du conseil d'administration. Il se présente comme suit:

«Art. 20 Composition (nouvelle teneur)

1 Le conseil d'administration prévu à l'article 6 de la présente loi est constitué de 9 à 11 membres, qui présentent des compétences dans un ou plusieurs domaines suivants: santé, gestion, ressources humaines, finances, droit, assurances et transfert technologique. Le profil des membres doit pouvoir garantir une formation d'opinion autonome et objective. Les membres doivent en outre s'identifier aux objectifs stratégiques du canton.

2 Parmi ces membres figurent 2 membres élus par le personnel.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 57 non contre 36 oui.

Le président. Nous passons aux amendements proposés par M. Baertschi: premièrement, toujours à l'article 20, il s'agit d'abroger le chiffre 1° de la lettre c, et donc de supprimer du conseil d'administration le représentant du canton de Vaud. Le vote est lancé. (Commentaires.)

Une voix. Il est jamais présent !

Une autre voix. Il est jamais présent, il sert à rien ! (Commentaires.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 73 non contre 18 oui.

Le président. Vous êtes priés de vous prononcer maintenant sur le deuxième amendement de M. Baertschi, qui propose d'abroger cette fois le chiffre 2° de la lettre c, et donc de supprimer le représentant français.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 73 non contre 17 oui.  (Commentaires pendant la procédure de vote.)

Mis aux voix, l'art. 20A, al. 5 (nouveau), est adopté.

Le président. Nous passons à l'article 21A, pour lequel nous sommes saisis d'un deuxième amendement de M. Nicollier. Il s'agit de biffer la lettre a, les lettres b à e devenant donc les lettres a à d.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 57 non contre 35 oui.

Mis aux voix, l'art. 21A, al. 2 (nouveau), al. 3 (abrogé), est adopté.

Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 12588 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 79 oui contre 11 non et 2 abstentions (vote nominal).

Loi 12588 Vote nominal

PL 13128
Projet de loi du Conseil d'Etat relatif aux aides financières en application de l'ordonnance COVID-19 culture pour l'année 2022
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 19, 20 mai, 2 et 3 juin 2022.

Premier débat

Le président. La prochaine urgence que nous avons à traiter est le PL 13128. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz pour la présentation de cet objet.

M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Je vous remercie, Monsieur le président. A mon tour de vous féliciter pour votre brillante élection ! Mesdames les députées, Messieurs les députés, le Conseil d'Etat a le plaisir de vous adresser une fois encore un projet de loi visant à soutenir la culture à Genève. Ce sera très vraisemblablement le dernier: sauf à imaginer que la pandémie reprenne activement dans notre pays, il est prévu que nous clôturions l'aide aux milieux culturels genevois par ce PL 13128 que nous vous présentons aujourd'hui, et je tiens d'emblée à vous remercier d'en avoir accepté le traitement en urgence.

Une décision de la Confédération est tombée mi-avril, le Conseil fédéral a communiqué sa volonté de prolonger les indemnités pour perte d'activité dans le secteur culturel de fin avril à fin juin, de sorte que nous pouvons maintenant couvrir les six premiers mois de l'année. L'objectif est en effet d'assurer l'indemnisation pour la première partie de 2022, puisque entre janvier et février, voire mars, nous étions encore dans un contexte de limitation des activités. Il convient également de rappeler qu'un certain nombre de pays en Europe ou dans le monde appliquent toujours des restrictions sur les événements culturels et que nos artistes suisses rencontrent des difficultés pour s'y rendre et, partant, ne peuvent jouir pleinement de leur pratique.

Le deuxième volet de ce texte vise les projets de transformation. Il s'agit là d'une invention du Conseil fédéral, appuyée par les cantons, pour encourager les entreprises culturelles à modifier leurs usages, à imaginer de nouvelles pratiques par des actions très concrètes, soutenues elles aussi par les cantons et la Confédération, à remanier un certain nombre d'activités, notamment à l'égard d'un public nouveau qu'il faut remotiver, à montrer leur capacité d'évoluer et de prévoir des situations variées. Là encore, nous souhaitons que les institutions culturelles se sentent plus fortes à l'occasion d'une reprise ou d'une relance des manifestations.

Enfin, le troisième axe du projet de loi 13128 consiste en une aide complémentaire cantonale que nous avons ciblée sur des bourses de recherche, ce qui permettra aux actrices et acteurs culturels de bénéficier d'un coup de pouce bienvenu.

L'autre intention du projet de loi concerne non pas un oubli, mais du moins un parti pris du Conseil fédéral de ne pas soutenir les fondations de droit public, ce qui ne pose pas de problème en Suisse alémanique et majoritairement en Suisse romande, car bon nombre d'opéras revêtent la forme soit de fondations privées, soit de sociétés anonymes, comme c'est le cas à Zurich; or à Genève, nous sommes très pénalisés, puisque deux institutions majeures ont un statut de fondation de droit public et sont donc exclues des indemnisations fédérales et cantonales.

Avec le vote de votre Conseil en faveur de cet objet, nous pourrons indemniser les actrices et acteurs culturels durant la période du 1er janvier au 30 juin, nous pourrons également accompagner les entreprises culturelles dans leur transformation jusqu'en octobre 2023, puisque le déploiement de l'activité pourra se dérouler jusque-là. Par ailleurs, il est à relever que Berne appuie notre volonté de soutenir le milieu culturel en faisant en sorte que pour un franc versé par le canton, un franc soit versé par la Confédération, ce qui constitue évidemment un apport précieux.

Un dernier élément s'agissant des finances: je souhaite souligner l'excellente collaboration que nous avons nouée durant tout le processus de gestion avec les communes genevoises, au premier rang desquelles la Ville de Genève, communes qui ont participé au financement des diverses mesures. Je le signale, parce que bien souvent, lorsqu'on évoque la relation entre l'Etat et les communes, on a malheureusement tendance à ne remarquer que ce qui ne fonctionne pas. Or, dans le cas d'espèce, les différents projets de lois ont vraiment été appuyés par les uns et par les autres, ce qui a permis d'atténuer la facture cantonale. Ce d'autant que les villes et communes genevoises n'étaient pas obligées de le faire; elles l'ont fait parce qu'elles ont voulu s'engager en faveur de l'activité et des entreprises culturelles, et cette coopération se retrouve dans le présent PL 13128.

Une fois que votre parlement l'aura voté, j'espère avec la clause d'urgence prévue à son dernier article, nous développerons immédiatement le processus d'indemnisation pour les institutions culturelles concernées. Il s'agit de nous montrer réactifs, comme nous l'avons été avec les autres projets de lois, pour venir en aide au milieu culturel genevois, et je vous remercie d'avance pour votre soutien.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Au nom du groupe socialiste, je ne peux que me féliciter de la prolongation de l'ordonnance fédérale. J'aimerais également remercier le Conseil d'Etat et plus particulièrement le département de la cohésion sociale d'avoir porté ce projet de loi en faveur de la culture devant nous aujourd'hui.

Le président. Madame la députée, il faut prendre la parole debout, s'il vous plaît.

Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Ah oui, excusez-moi ! J'ai tellement pris l'habitude de rester assise !

Je voudrais souligner un élément sur les aides complémentaires cantonales. Il nous paraît évident, en tant que socialistes, que les bourses de recherche telles qu'elles sont proposées dans le texte qui nous est présenté couvrent également les projets visant à reconstruire un réseau professionnel ou à réintégrer le système de diffusion, que ce soit à l'échelle locale, régionale, voire internationale, ces deux axes étant fondamentaux pour la relance des personnes physiques oeuvrant dans le secteur culturel. En effet, c'est en soutenant la créativité et la capacité d'entreprendre, mues par la même énergie dont les acteurs et actrices culturels ont fait montre pendant la période de pandémie - travaillant sans relâche alors même que le covid les touchait de près, alors que les institutions et autres lieux de production et de diffusion étaient fermés -, que nous leur permettrons, grâce aux bourses de recherche, de renouer avec l'indépendance financière.

Je rappelle enfin que nous avons tous et toutes ici défendu l'ouverture des lieux culturels pendant la crise, qu'à l'unanimité, nous nous sommes accordés pour dire que la culture est essentielle dans le quotidien de chacun et chacune. Aussi, je souhaite avec conviction, et le parti socialiste avec moi, apporter mon soutien au projet de loi qui nous est soumis ce soir, parce que les acteurs et actrices culturels en ont besoin pour traverser les moments difficiles que nous connaissons, nous devons leur permettre de rebondir. Je vous remercie d'ores et déjà pour votre vote. (Applaudissements.)

Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR). Comme cela a été rappelé, nous nous prononçons ce soir sur des aides financières qui seront accordées aux entreprises culturelles. Si le PLR ne remet pas en cause ce soutien, puisqu'il concerne un secteur qui a été durement touché par la crise du covid, nous contestons en revanche le fait que nous devions traiter ce texte en urgence ainsi que la méthode par laquelle le texte nous a été soumis. En effet, tous les projets de lois ayant trait à la pandémie ont pu être examinés au minimum lors d'une séance à la commission de l'économie. Cette fois, nous nous retrouvons sans même une présentation de l'objet, quand bien même, je le répète, tout le monde est convaincu de sa nécessité.

Il n'empêche que cela ne doit pas éclipser l'explication qui doit nous être donnée ni, plus largement, la vision culturelle du département. En effet, voilà un moment que nous attendons un certain nombre de réponses, aussi bien le parlement que les acteurs de la culture et de l'art en général, lesquels sont dans l'attente de savoir, comme je viens de le dire, quelle vision de la culture développe le département, quel futur ils doivent imaginer dans le canton de Genève et surtout quelle sera la répartition des tâches et des différents coûts. Bien que cela ait été décidé il y a quelques années dans la loi sur la répartition des tâches, on sait que les choses sont remises en question, car cette loi n'a pas abouti au résultat escompté pour les acteurs de la culture.

Aussi, même si nous accepterons ce texte en urgence, le groupe PLR demande formellement qu'il soit présenté et explicité devant la commission de l'économie. Je vous remercie. (Applaudissements. Commentaires.) Celui-ci, oui ! (Commentaires.)

Le président. A la commission de l'économie ou à celle de la culture, Madame la députée ?

Mme Natacha Buffet-Desfayes. A la commission de l'économie, puisqu'il concerne le covid.

Une voix. Elle a raison !

Mme Natacha Buffet-Desfayes. Mais oui, ils ont tous été traités là-bas. (Commentaires.)

Le président. Très bien. Nous poursuivons le débat. Monsieur André Pfeffer, c'est à vous.

M. André Pfeffer (UDC). Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi propose trois types d'aides. Il y a d'abord une prolongation de l'ordonnance covid-19 culture jusqu'au 31 décembre 2022, soit des subsides cofinancés par la Confédération à hauteur de 50%. Dans ce contexte, la part cantonale s'élève à 7,5 millions. Ensuite, ce sont des financements supplémentaires couverts intégralement par le canton. La troisième catégorie regroupe des indemnités conjointes de la Ville de Genève et de l'Association des communes genevoises définies par une convention.

Le mode de distribution est connu: il s'agit de soutenir les acteurs culturels de même que les librairies, maisons d'édition, magasins de disques, galeries d'art et enseignements artistiques. L'un des critères du programme consiste à plafonner les aides à 300 000 francs par bénéficiaire. A part ces informations, c'est le flou total. Qui sont les bénéficiaires ? Personne ne le sait. Est-ce que les nouveaux bénéficiaires ont déjà profité des aides précédentes ? C'est l'inconnu. Qui est concerné par les indemnisations à 100% à la charge du canton ? C'est le mystère. Pour les subsides communs de la Ville de Genève et de l'Association des communes genevoises, est-ce que la convention existe déjà ?

Le groupe UDC a toujours accepté les financements liés aux ordonnances fédérales. Pour rappel, il est question de donner un coup de pouce aux professionnels à qui on a interdit de travailler et qui ont subi d'importants dommages. Nous voterons dès lors ce projet de loi, mais trouvons inacceptable qu'il nous soit présenté aussi tardivement. En effet, la Confédération avait déjà décidé au mois de décembre 2021 qu'elle prolongerait le dispositif jusqu'à la fin de cette année. Comme l'a relevé le groupe PLR, l'UDC déplore également que ce texte nous soit soumis en urgence et que nous devions prendre position sur le siège sans avoir pu en discuter ni l'étudier en commission. Merci de votre attention.

Mme Corinne Müller Sontag (Ve), députée suppléante. Mesdames et Messieurs les députés, les indemnités de l'ordonnance covid-19 culture ainsi que les aides complémentaires cantonales ont très largement démontré leur pertinence et leur efficience. Les mesures prises en complémentarité par la Confédération, le canton et les communes ces dernières années se sont avérées décisives pour permettre aux actrices et acteurs culturels de surmonter la crise sanitaire, et personne ne le remet en question ici.

Les dynamiques de production spécifiques aux activités culturelles se distinguent par leur créativité, bien sûr, mais aussi par leur dimension artisanale et par leur forte individualisation; elles ont été, nous le savons tous, lourdement impactées par la crise sanitaire; celle-ci a grippé des mécanismes déjà fragiles et porté sur le devant de la scène la précarité de la plupart de ses acteurs et des métiers de la culture en général.

Mais la pandémie aura également été l'occasion pour les pouvoirs publics de mesurer la nécessité d'apporter des réponses spécifiques aux besoins de tout un secteur d'activité. A cet égard, la Ville de Genève, le canton et la Confédération ont fait montre d'inventivité en proposant des solutions nouvelles sur la prolongation desquelles nous nous prononçons aujourd'hui; cette prolongation est impérative. L'ensemble de la société a également réalisé à quel point la vitalité de la scène culturelle compte pour tout un chacun.

La période actuelle de reprise est particulièrement délicate; le coût de l'arrêt des activités a mis à mal les logiques de projets tandis que la situation de la plupart des artistes et des autres métiers de la culture, déjà précaire en temps normal, demeure fragile. Ces aides sont absolument nécessaires, nous vous invitons dès lors à soutenir ce projet de loi sans le renvoyer en commission; il répond à un réel besoin et son dispositif a largement fait ses preuves ces dernières années. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Le président. Merci bien. La parole va à M. Jacques Blondin.

M. Jacques Blondin (PDC). Monsieur le président, je vous remercie. A mon tour, je vous félicite pour votre brillante élection ! (Rires. L'orateur rit.) Mesdames et Messieurs les députés, le mieux est l'ennemi du bien. Nous sommes en train de traiter ce projet de loi sur le siège suite à de nombreuses interventions dans ce plénum de M. Pfeffer - vous transmettrez, Monsieur le président -, lequel devrait être content, puisqu'il critiquait précisément le fait que nous examinions ces urgences fédérales à la commission de l'économie sans en avoir «le droit», entre guillemets: nous émettions des préavis et, au sein de cette assemblée, nous avions la possibilité d'obtenir des réponses aux questions posées. Aujourd'hui, on respecte la procédure.

Peut-être une petite critique, Monsieur le conseiller d'Etat. Vous avez parlé de mi-avril; on aurait peut-être eu le temps, en accélérant le processus, d'examiner le texte en commission, ce qui aurait évité les remarques préalables. Cela étant, on ne peut pas refuser à la culture ce que nous avons accepté pour tous les autres secteurs économiques. Il y a une prolongation des mesures fédérales avec une participation d'un franc pour un franc, soit 50% de la Confédération, et quelques contributions - enfin, 1,6 million quand même - du canton, et je pense que nous le devons aux milieux de la culture qui ont été fortement impactés par la crise.

Alors on peut refaire toute la théorie, reprendre le temps de discuter, mais si on ne veut pas perdre ce subside fédéral, il faut voter l'objet. En passant à côté de l'urgence, il y a le risque que cette contribution tombe, et ce serait vraiment un comble vis-à-vis de nos citoyens et de ceux qui d'une part vivent de la culture, d'autre part la pratiquent. Pour ce qui est du groupe PDC, nous allons adopter ce projet de loi tout en espérant qu'à l'avenir, non seulement on n'ait plus ce genre d'urgence, ce serait la meilleure des choses, mais surtout qu'on «respecte les procédures», entre guillemets. Mais on voit que quand on respecte les procédures, il y a quand même des critiques qui pleuvent, et elles proviennent en général de ceux qui émettent les réticences les plus fortes. Merci, Monsieur le président.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe Ensemble à Gauche soutient bien entendu ce texte, défend de manière générale toutes les aides qui peuvent être apportées à la culture, mais est aussi obligé de rejoindre certains propos des intervenants précédents. En effet, il est anormal, Monsieur le conseiller d'Etat, que nous soyons mis ainsi devant le fait accompli. Le projet de loi a été déposé hier, le 18 mai !

Alors nous devons le voter, il y a des délais, nous n'allons pas le renvoyer à la commission de l'économie, mais j'aimerais tout de même souligner, et je remercie la députée Natacha Buffet-Desfayes de l'avoir rappelé, que nous avons une commission de la culture dans ce parlement, même si certains semblent l'avoir oublié. Elle porte le nom complet de «commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport», mais en une année, nous n'y avons pas parlé une seule fois de culture.

Comme je l'ai dit, il n'est pas question maintenant de renvoyer cet objet en commission, on est d'accord, mais il y a un vrai problème et vous êtes obligé de l'admettre, Monsieur le magistrat. S'il y a des projets culturels à Genève, il faudrait peut-être daigner une fois venir devant la commission nous les présenter. Dans le cas d'espèce, ce n'est pas tout à fait l'objectif, mais je suis quand même d'accord avec cet avis.

Bon, évidemment, quand il s'est agi de voter le soutien aux entreprises, le PLR l'a fait sur le siège sans hésiter, sans aucun état d'âme. Alors faisons de même pour la culture, peut-être pas sans état d'âme, mais avec un message: parlons une fois culture à Genève, donnons une vraie vie à ce milieu, une véritable suite à la volonté populaire de bénéficier d'une politique culturelle d'envergure cantonale. J'espère qu'avec les changements de présidence au sein des commissions, Monsieur le conseiller d'Etat Thierry Apothéloz, vous viendrez un jour devant celle de la culture nous présenter votre politique culturelle; c'est mon souhait. Merci. (Applaudissements.)

M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, je vous sens chafouins et c'est tout à fait compréhensible, puisque vous avez été saisis du projet de loi de cette façon et que vous devez vous prononcer en urgence. Il se trouve que la convention doit être signée d'ici au 31 mai. Votre Conseil siège pendant ces deux jours, puis les 2 et 3 juin, dont les séances sont rattachées à la présente session, donc il n'y aura pas de nouveaux objets; fin juin, ce sont les comptes: si nous avions respecté l'organisation traditionnelle, cela nous aurait renvoyés à septembre, voire octobre, ce qui fait que les gens qui attendent des aides depuis le 1er janvier n'y auraient évidemment pas trouvé leur compte. C'est la raison pour laquelle nous avons dû procéder de la sorte.

Ensuite, je rappelle à toutes fins utiles que le Bureau lui-même a demandé au Conseil d'Etat à réitérées reprises d'arrêter de présenter les projets de lois en amont, avant qu'ils soient déposés. Même si ce n'est pas une excuse, je souhaiterais que vous soyez aussi cohérents que possible, surtout lorsque nous respectons la procédure exigée par le Bureau.

Cela étant, quelques éléments de réponse, d'abord à l'intention de Mme la députée qui s'impatiente de connaître la ligne directrice des politiques culturelles cantonales et du projet de loi: je me réjouis que vous ayez encore quelques jours pour répondre à la consultation que nous avons lancée sur ces deux documents fondateurs d'un nouveau cap pour la politique culturelle du canton. Il s'agit pour nous de nous appuyer sur une base légale formelle qui soit travaillée et réponde aux commentaires non seulement des différents partis, mais également de l'ensemble des partenaires. En ce sens, nous attendons des réponses de votre part, et je me réjouis que les retours positifs du PLR sur ces deux textes nous servent à traiter ce projet de loi à la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport, comme cela a été évoqué par M. le député Baud.

Le deuxième élément est lié au souhait formulé que je vous présente le bilan de l'aide covid culture au sein de la commission de l'économie: je m'y rendrai volontiers à l'invitation de sa présidence. Vous constaterez que nous avons été extrêmement actifs depuis mars 2020: dès que le Conseil fédéral a communiqué ses orientations et décisions s'agissant de l'indemnisation fédérale, appuyée par le canton et les communes en ce qui concerne Genève, nous avons oeuvré pour que vous soyez saisis rapidement des dispositifs d'aide conséquents que vous avez octroyés avec les trois précédents projets de lois.

Je signale enfin que le Conseil fédéral a pris la décision de prolonger les mesures à fin juin le 13 avril, Monsieur le député Pfeffer. Nous nous sommes immédiatement mis au travail pour être en capacité de faire deux choses: non seulement rédiger ce projet de loi, mais surtout négocier la convention avec nos partenaires, ce qui a pris un certain temps, mais a permis de parvenir à ce que l'ensemble des acteurs poursuivent leur activité de collaboration visant à soutenir la culture à Genève. Encore une fois, je vous remercie pour votre appui.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. A présent, nous procédons au vote.

Mis aux voix, le projet de loi 13128 est adopté en premier débat par 77 oui (unanimité des votants).

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les art. 1 à 8.

Le président. Nous nous prononçons à présent sur l'article 9 «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.

Mis aux voix, l'art. 9 est adopté par 78 oui contre 1 non et 1 abstention (majorité des deux tiers atteinte).

Troisième débat

Mise aux voix, la loi 13128 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 78 oui et 1 abstention (vote nominal).

Loi 13128 Vote nominal

M 2847
Proposition de motion de Mmes et MM. Sylvain Thévoz, Patricia Bidaux, Jocelyne Haller, Didier Bonny, Léna Strasser, Bertrand Buchs, Amanda Gavilanes, Pierre Vanek, François Lefort, Jean-Marc Guinchard, Grégoire Carasso, Nicole Valiquer Grecuccio, Diego Esteban, Christina Meissner, Marta Julia Macchiavelli, Thomas Wenger, Jean-Charles Rielle pour une orientation rapide et efficace des primo-arrivants ukrainiens à Genève
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 19, 20 mai, 2 et 3 juin 2022.

Débat

Le président. Nous terminons notre séance avec l'urgence suivante, la M 2847. Je passe la parole au premier signataire, M. Sylvain Thévoz.

M. Sylvain Thévoz (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, depuis le début de la guerre en Ukraine, 50 000 Ukrainiens et Ukrainiennes sont arrivés en Suisse; hier encore, selon les sources officielles du SEM, 307 personnes sont arrivées en Suisse. 2589 permis S sont attribués à Genève, et hier encore dans notre canton ce statut a été attribué à 33 personnes.

Depuis le déclenchement de la guerre, il y a pratiquement trois mois donc, un lieu d'accueil, un «welcome center», s'est mis en place à la gare Cornavin, piloté uniquement par des bénévoles. Au début, ce sont des personnes qui ont mis un gilet bleu et qui se sont rendues aux alentours des quais pour orienter, accueillir les personnes qui fuyaient la guerre et arrivaient ici après une errance en Europe de plusieurs jours, de plusieurs nuits, dans des conditions, on le sait, dramatiques, parfois avec simplement un sac en plastique, ce qu'elles ont pu arracher à leur appartement avant de fuir et d'arriver à Genève, dans un endroit - faut-il le rappeler ? - dont elles ne connaissaient parfois rien, ni la langue, ni les lieux d'accueil, ni les capacités de logement. Cet accompagnement bénévole s'est fait de manière spontanée. Depuis trois mois, il faut le saluer, celui-ci a réussi - il y a eu des articles de presse à ce sujet, il y a eu une petite couverture de la mise en place de ce dispositif - à offrir un accueil de première ligne, de 8h à 22h, sept jours sur sept, à envoyer les gens vers le «hotspot», lieu d'accueil à la rue Verdaine piloté par l'Armée du salut, et puis, maintenant, à les réorienter vers Chandieu, le nouveau lieu d'accueil - piloté aussi par l'Armée du salut - ou vers Palexpo, où, vous le savez, il y a maintenant un hébergement.

Mais cela n'est évidemment pas pérenne. L'Etat ne peut pas imaginer se reposer uniquement sur des forces bénévoles pour offrir un accueil d'une telle importance, dans des conditions, vous le savez, extrêmement difficiles. Les bénévoles sont en partie - et il le faut - ukrainophones ou russophones, pour pouvoir simplement comprendre ce que les personnes veulent et les orienter au mieux, mais ce sont aussi très souvent des personnes qui elles-mêmes ont fui la guerre et qui se trouvent dans des situations de vie très difficiles. Elles sont aussi confrontées, dans l'accueil des personnes, à des traumatismes, à des situations de vie parfois extrêmement difficiles, et là non plus, il n'y a ni encadrement, ni formation, ni accompagnement de ces bénévoles.

Que cela puisse durer et que cela puisse se faire d'une manière stable, professionnelle et claire est donc difficilement envisageable. Pour ajouter à la difficulté, les normes et les prescriptions - parfois du SEM, parfois de l'Hospice - changent, ce qui demande une grande adaptabilité, alors que les bénévoles travaillent selon des «shifts» qui eux, bien sûr, sont soumis aux aléas de leur vie quotidienne. On a beaucoup parlé de la traite, des craintes de traite d'êtres humains. Il faut savoir qu'à la gare, le soir, se trouve parfois toute une faune, des gens qui sont attirés, il faut le dire, par ces personnes en situation de fragilité. Il s'agit donc d'une situation à haut risque, où, là encore, des bénévoles se retrouvent à devoir gérer les personnes qui arrivent et un environnement qui n'est pas toujours des plus bienveillants, qui exige aussi des deux associations qui aujourd'hui coordonnent et pilotent ces bénévoles de savoir à qui elles ont affaire. Ce sont des bénévoles qui ne peuvent pas être identifiés avec un casier judiciaire, dont on connaît très peu l'identité, et si quelqu'un met un gilet bleu, il est difficile de savoir, dans l'urgence, au nom de qui cette personne agit et qui elle représente vraiment, ce qui constitue là aussi des risques pour l'accueil.

Les grandes villes d'Europe et particulièrement d'Allemagne ont mis en place des dispositifs solides, professionnalisés, d'accueil des réfugiés. Aujourd'hui, à Genève, on se repose uniquement sur des bénévoles, sur des forces fragiles. Le risque est aujourd'hui que ce «welcome center» cesse ses activités par manque de soutien et en partie par manque de financement, avec aussi la limite imposée par CFF Immobilier, qui prolonge l'attribution d'un petit local jusqu'à fin juin, mais qui ne s'est pas engagé au-delà. Il est véritablement nécessaire que le Conseil d'Etat et l'Hospice général s'impliquent pour pérenniser ce lieu. Pour rappel, selon les prévisions du SEM, on comptera 120 à 140 000 réfugiés en Suisse d'ici fin août, donc imaginez encore 90 000 personnes arrivant en Suisse. Bien sûr, tout cela est lié aux aléas de la guerre.

Cette motion demande, et je vous remercie d'avoir voté l'urgence ce soir, de pérenniser ce lieu, d'offrir un accompagnement professionnel, d'encadrer ces bénévoles, afin qu'on ne rejoue pas sur le front de l'accueil des réfugiés ukrainiens ce qu'on a pu voir sur le front du sans-abrisme: des dispositifs qui fonctionnent et qui tout à coup s'écroulent par manque de ressources ou par manque d'accompagnement. Quand vous devez les recréer et les remettre en place, c'est évidemment bien plus coûteux et cela demande beaucoup plus de temps, et entre le temps de l'effondrement et celui de la reconstruction, des gens se retrouvent littéralement à la rue.

Le parti socialiste et toutes les personnes qui, au sein de la commission des affaires sociales, ont oeuvré à la création de ce texte vous remercient donc de le soutenir et de le voter sur le siège. Nous invitons le Conseil d'Etat à faire en sorte que ce «welcome center» soit pérennisé, solidifié et qu'une réflexion soit lancée pour éventuellement en ouvrir un à l'aéroport ou à la gare Dorcière, étant donné que les points d'entrée sont bien entendu multiples à Genève. Il est vital que ces personnes soient rapidement orientées et prises en charge. Merci de votre attention.

Mme Joëlle Fiss (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, le PLR tient tout d'abord à exprimer sa solidarité envers les réfugiés ukrainiens arrivant à Genève dans un état de détresse extrême. Ils peuvent compter sur nous, ils doivent le savoir.

Le PLR estime que cette motion n'est pas aboutie. Il serait judicieux de la renvoyer en commission. Dans ce texte, on invite le Conseil d'Etat à pérenniser le «welcome center» des réfugiés, parce qu'il «risque» de fermer. Il serait très utile d'obtenir davantage d'informations sur ces risques, de s'assurer ainsi que cette motion puisse apporter une réelle valeur ajoutée et que l'offre en place du canton corresponde réellement aux besoins des réfugiés.

En ce qui concerne ce qui vient d'être dit sur les bénévoles, il est important que cette question soit revue. C'est une expérience que je trouve personnellement extraordinaire, que ce soit pour des chômeurs, des étudiants ou des militants. S'il y a un problème avec ces bénévoles, discutons-en, invitons-les en commission et retournons au travail ! Merci beaucoup.

Une voix. Très bien !

M. Didier Bonny (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, le formidable élan de solidarité qui a eu lieu en Europe, en Suisse et dans notre canton suite au déclenchement de la guerre en Ukraine est à souligner. Que la société civile se mobilise au même titre que l'Etat démontre que la solidarité est une valeur qui a encore tout son sens. Toutefois, le bénévolat peut avoir ses limites et doit à tout le moins être soutenu par des professionnels dans la durée. C'est exactement le cas du «welcome center» à la gare de Cornavin, qui a répondu à une urgence, mais qui doit, dès lors qu'elle se prolonge, pouvoir compter sur un engagement clair de l'Etat. Il est impératif que des personnes qui arrivent à Genève après avoir traversé différentes épreuves puissent recevoir des informations et un accueil de qualité. Eviter dans toute la mesure du possible d'ajouter encore du stress à des personnes qui ont tout perdu paraît pour le moins raisonnable. Il s'agit également d'éviter que ces réfugiés ukrainiens, dont la grande majorité sont des réfugiées et des enfants, ne se trouvent confrontés à des personnes qui voudraient profiter de leur détresse.

En conclusion, les Vertes et les Verts soutiennent bien évidemment les invites de la motion et espèrent, compte tenu de l'urgence, que le Conseil d'Etat n'attendra pas les six mois réglementaires pour donner une réponse à cette motion. Cette dernière phrase, vous l'aurez compris, montre bien que pour les Vertes et les Verts, il n'est pas question de renvoyer cette motion en commission. Nous ne pouvons pas attendre. Le Conseil d'Etat recevra, si cette motion est votée, des consignes souhaitées par le Grand Conseil, et il pourra y répondre de la meilleure des manières possibles. Nous lui faisons confiance. Renvoyons donc cette motion dès ce soir ! Merci.

M. André Pfeffer (UDC). L'accueil et l'assistance aux réfugiés sont unanimement soutenus. Mais la question posée par cette motion est la suivante: faut-il pérenniser le «welcome center» de Cornavin et éventuellement en créer deux autres à l'aéroport de Cointrin et à la gare routière ? Aujourd'hui, le nombre d'arrivées de réfugiés baisse fortement. De quelque 1500 à 1800 réfugiés ukrainiens par jour, nous sommes actuellement à seulement quelques centaines, comme l'indique la «Tribune de Genève» d'aujourd'hui. Les renseignements et les facilités d'enregistrement ont été fortement améliorés. Au sujet de cette motion, il serait absolument nécessaire d'avoir l'avis de la task force qui pilote l'accueil des réfugiés. Quel est réellement le besoin ? Quel est l'apport réel de ce «welcome center» ? Les informations dont nous disposons sont effectivement très lacunaires. Les questions sont encore très nombreuses. Pour cette raison, le groupe UDC soutiendra le renvoi de cette motion en commission. Merci de votre attention.

Une voix. Pas en commission !

Le président. Quelle commission, Monsieur le député ?

M. André Pfeffer. La commission des affaires sociales.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole à Mme Jocelyne Haller.

Mme Jocelyne Haller (EAG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, M. Thévoz a abondamment expliqué de quoi il s'agissait et quelle était la situation des personnes qui sont aujourd'hui contraintes de venir chercher un refuge dans notre pays et dans notre canton. J'ai entendu Mme Fiss dire que finalement, on n'est pas sûrs et qu'il faudrait prendre du temps pour bien examiner la question. Le problème, c'est que les bénévoles qui aujourd'hui remplissent cette tâche d'accueil sont à bout ! En l'occurrence, il est urgent de ne pas attendre ! Si nous voulons éviter que cette équipe soit à bout, qu'elle soit sur les genoux et qu'elle ne soit plus en mesure d'assurer la prestation - qu'elle assure aujourd'hui bénévolement... Et on pourrait s'interroger également sur le fait que ce sont des bénévoles qui s'acquittent d'une tâche aussi importante que celle-là ! On l'a vu aussi avec la crise covid: ce sont d'abord les associations qui ont réagi, qui sont allées sur le terrain, qui ont fourni des réponses aux personnes en difficulté. Il faut saluer cet effort-là, mais à un moment donné, il faut que l'Etat se donne les moyens d'intervenir et qu'il donne les moyens à ceux qui sont sur le terrain de pouvoir remplir cette tâche, et ce de la manière la plus adéquate possible. Ces personnes revendiquent un soutien professionnel et souhaitent pouvoir véritablement donner une réponse de qualité.

Un autre élément est important: aujourd'hui, nous devons faire en sorte que ce «welcome center» dispose des moyens d'assister et d'accueillir correctement les personnes qui y font appel et lui donner des moyens supplémentaires, mais n'oublions pas qu'il n'y a pas que les réfugiés ukrainiens - et Dieu sait si nous sommes solidaires de ceux-ci ! Il y a tous les autres candidats à l'asile ! Pour ces derniers, on n'a pas déroulé de tapis rouge. Alors donnons les moyens au «welcome center» d'effectuer son travail correctement, mais réfléchissons et donnons aussi à tous les organes qui aujourd'hui doivent intervenir pour tous les autres candidats à l'asile les moyens d'assurer un accueil digne et respectueux de ces personnes ! (Applaudissements.)

Mme Patricia Bidaux (PDC). Monsieur le président, en préambule, je n'oublierai pas de vous féliciter... (Exclamations.) ...pour votre brillante élection, avec un score spectaculaire ! (Commentaires.) Voilà qui est fait.

La situation en Ukraine demande une attention comme elle n'a plus été requise depuis les années 40 dans l'histoire de l'Europe. Cependant, il ne s'agit pas non plus d'oublier l'ensemble des primo-arrivants qui quittent leur pays ! Cette motion porte un message de solidarité, elle met en avant la nécessité de donner à celles et ceux qui s'engagent bénévolement la formation nécessaire afin d'orienter les arrivants vers l'aide qui leur est indispensable. Je reviens sur la question de la traite des êtres humains, non sans le souvenir de notre excellente collègue Anne Marie von Arx-Vernon, qui a vraiment lutté contre ce crime et qui a déposé un projet de loi à ce sujet, voté par ce Grand Conseil en 2019.

Le «welcome center» doit être un lieu visible qui informe et qui oriente, et cela non pas au mois de septembre mais aujourd'hui. Le PDC-Le Centre a, dès le début de la guerre et de l'accueil des personnes réfugiées arrivant d'Ukraine, proposé aux parlementaires de la commission des affaires sociales de former un groupe interparlementaire qui s'inquiète des réfugiés ainsi que des familles les accueillant. Une rencontre a eu lieu avec les associations en première ligne; il convient ici de les remercier pour leur engagement et pour la mise en oeuvre des actions soutenues par la Confédération. Des associations qui, je le rappelle, étaient déjà en première ligne de l'aide à la population durant le covid.

Ainsi, cette motion demande de donner aux bénévoles qui sont au front non seulement des moyens pour la formation, afin que, comme je l'ai mentionné, ils puissent délivrer les renseignements attendus, mais aussi et surtout des compétences pour détecter les personnes en situation de faiblesse et risquant de faire l'objet de trafic d'êtres humains.

En conclusion, le PDC-Le Centre remercie la population genevoise qui s'engage et vous demande de soutenir cette motion.

Une voix. Merci ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à Mme Joëlle Fiss pour deux minutes dix-neuf.

Mme Joëlle Fiss (PLR). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, la question qui se pose là n'est pas celle de l'aide aux réfugiés ukrainiens. Nous soutenons totalement l'aide aux réfugiés ukrainiens, que ce soit clair ! Je l'ai dit, tout le monde peut compter sur le PLR pour la soutenir. La question qui se pose ici, c'est vraiment: est-ce que le «welcome center» risque de fermer ? C'est ça, la question ! Il ne faut pas aller plus loin. Cette motion, telle qu'elle est rédigée, repose sur des éventualités. C'est ça, le problème: il n'y a pas de certitude dans le texte de cette motion. C'est pour cela que nous estimons qu'il est très important de se pencher là-dessus. D'ailleurs, l'accueil des réfugiés constitue en réalité seulement un volet de l'aide aux réfugiés ukrainiens: n'oublions pas l'éducation, l'apprentissage du français, la petite enfance, les questions d'aides sociales, etc. Il y a donc énormément de thèmes à traiter, qui sont extrêmement sérieux pour nous. Par conséquent, cette motion, qui repose sur des éventualités, ne remplit actuellement pas les conditions nécessaires à son adoption. Merci.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Madame la députée. Je rends la parole à l'auteur de la motion, M. Sylvain Thévoz, pour quarante secondes.

M. Sylvain Thévoz (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai bien écouté les débats. Je pense que renvoyer cette motion en commission serait une erreur. Cela reviendrait à la tuer, parce que l'urgence est actuelle, et la traiter en septembre en commission, c'est une manière peut-être élégante mais en tout cas radicale de l'évacuer. Aujourd'hui, la situation au «welcome center» est critique, j'en fais part pour y être allé: ce sont des bénévoles qui s'épuisent, Mme Haller l'a dit; ce sont des bénévoles à risque, parce qu'il y a des personnes d'origine russe qui sont extrêmement exposées en effectuant ce travail sans aucune protection; ce sont des bénévoles qui demandent - parce qu'une partie du travail de l'Hospice est sous-traité dans ce «welcome center» - les noms des personnes, qui contactent Palexpo pour voir s'il y a de la place et qui effectuent petit à petit un travail de travailleurs sociaux, de psychologues, à la sortie de situations de guerre, d'une manière complètement sauvage, bénévole, à risque, avec toutes les possibles tensions que j'ai rappelées. (Commentaires.)

Le président. C'est terminé, Monsieur le député.

M. Sylvain Thévoz. Aujourd'hui, il faut bien entendu... (Commentaires.) Je terminerai là-dessus, si vous le permettez. ...simplement encadrer ce centre, bénéficier de ces ressources, de ces personnes qui parlent le russe et l'ukrainien... (Protestations.) ...et, plutôt que de les laisser partir dans la nature, les utiliser à bon escient. Merci de votre compréhension et de votre écoute.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Danièle Magnin pour trois minutes.

Mme Danièle Magnin (MCG). Je n'aurai pas besoin d'autant que ça, je vous remercie, Monsieur le président ! (L'oratrice rit.) Mesdames et Messieurs les députés, il m'a été dit, et il semble que cela soit dans la presse, qu'il n'y a plus d'arrivées de réfugiés ukrainiens à Genève en ce moment. Je n'ai pas vérifié cette information; j'aurais aimé qu'éventuellement le conseiller d'Etat Apothéloz nous informe à ce sujet. Ce que j'ai entendu, c'est que les Ukrainiens préféreraient la Suisse allemande. Je ne sais pas si c'est exact, mais je pense que... (Commentaires.) Voilà, il y a peut-être des raisons de langue, il y a peut-être des raisons que j'ignore, mais je ne sais pas si ce «welcome center» est réellement nécessaire. Quoi qu'il en soit, j'aimerais être informée à ce sujet avant de voter, et si je n'ai pas cette information, dans ce cas-là, je préférerais, comme certains l'ont suggéré, envoyer cette motion en commission. Merci. (Commentaires.)

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député François Lefort pour cinquante-six secondes.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Cette discussion prend une tournure assez surréaliste. La première chose qui est surréaliste, c'est que des bénévoles aient été obligés d'organiser ce «welcome center». Et ce que demande cette motion, c'est que ce soit l'Etat qui prenne cette responsabilité et qui assure, en notre nom, l'accueil de ces réfugiés. C'est le minimum. Il ne faut donc évidemment pas renvoyer ce texte en commission. Ce petit message consiste simplement à demander, en notre nom, que l'Etat se charge de l'accueil des réfugiés et que cela ne repose pas sur des bénévoles qui s'épuisent. Merci.

M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Cette motion vise aussi à faire en sorte que la reconnaissance des bénévoles par votre parlement soit assurée, et le Conseil d'Etat accueillera avec bienveillance ce texte. Lorsque des personnes proposent des services, que ceux-ci se trouvent dans la gare, qu'elles obtiennent, grâce à l'Hospice général, un local - qui pour l'instant est ouvert jusqu'au 30 juin de cette année -, que ces personnes souhaitent être actives - c'est en effet ce qu'elles disent -, parce qu'elles vivent des situations difficiles pour elles et qu'elles veulent se mettre à la disposition de la communauté qui arrive, on ne va pas leur dire: «Surtout pas, ne le faites pas, c'est le canton qui doit le faire !» Nous avons donc accueilli cette proposition et nous l'avons même financée, puisque l'Hospice général contribue aux frais des bénévoles, ce qui prouve que nous sommes particulièrement attentifs à les soutenir.

Il est vrai que la situation est critique, puisque, cela a été dit, les bénévoles s'épuisent, ils sont régulièrement en activité, ils traitent de sujets difficiles, ils réceptionnent des personnes qui fuient une contrée en guerre, ce qui a un impact psychologique important, et que nous sommes au-delà de la question d'urgence, dans une situation où il faut davantage les soutenir. C'est ainsi que je comprends cette motion. Le signal qu'envoie ce parlement à l'égard de ces personnes est important, tout comme il l'est à l'égard de l'Hospice général.

Pour répondre à Mme la députée Magnin, nous nous trouvons face à deux phénomènes: d'une part, il y a encore aujourd'hui des personnes qui arrivent en Suisse et qui sont attribuées aux cantons selon la clé de répartition usuelle de l'asile - en l'occurrence, 5,8% des arrivées en Suisse sont affectées au canton de Genève, lequel est en sous-occupation par rapport à ce qui est prévu par cette clé de répartition. Or lorsqu'un canton se trouve en situation de sous-occupation, c'est-à-dire que c'est un canton vert, comme c'est le cas pour nous - il y a effectivement des cantons rouges, c'est-à-dire en suroccupation par rapport à ce que prévoit la clé de répartition, comme Bâle, Zurich et Berne -, on procède à un rééquilibrage, en l'occurrence d'à peu près 500 personnes aujourd'hui, et nous le faisons petit à petit. Je vous confirme donc qu'il y a à Genève encore 130 à 140 personnes accueillies à Palexpo.

Certains propos m'ont un peu fâché; ce sont ceux de Mme Haller, que j'apprécie pourtant énormément, et qui reconnaît bien souvent les activités de l'Etat. Mais dans son propos, on a l'impression qu'il n'y a que des bénévoles qui agissent dans la crise ukrainienne. J'aimerais dire devant vous à quel point la mobilisation des actrices et des acteurs de l'Etat est fantastique. En effet, l'Hospice général se mobilise 7/7 jours, 24/24 heures, pour accueillir dans des conditions extraordinaires des personnes qui fuient la guerre. Nous avons monté en quelques jours un dispositif d'accueil, nous multiplions les lieux d'accueil, pour que l'étape de Palexpo soit la plus courte possible et que nous disposions, avec les familles d'accueil qui acceptent de prendre des personnes en leur sein, de possibilités d'action.

J'aimerais également relever à quel point la mobilisation des HUG est exemplaire: ils effectuent plusieurs centaines de visites d'enfants et de femmes - en procédant à un check-up d'abord, puis en assurant un suivi. Il y a des ruptures de prise en charge médicales qu'il faut pouvoir reprendre, notamment s'agissant de maladies chroniques graves. Je souhaite encore saluer le monde de l'enseignement, qui se mobilise pour augmenter les capacités de classes, accueillir en son sein des enfants qui ont vécu un traumatisme grave. Ce sont des enseignantes et des enseignants qui sont capables de revenir même après leur retraite pour donner un coup de main; des classes d'accueil qui se montent pour permettre à l'ensemble des personnes accueillies de bénéficier d'activités. J'aimerais encore citer la FASe qui se mobilise avec les associations jeunesse pour offrir des loisirs, etc. Je ne peux laisser passer l'idée qu'au fond, il n'y a que des bénévoles qui sont actifs. Certes, ils sont très complémentaires. Ils disposent d'une compétence que nous n'avons pas, à savoir la maîtrise de l'ukrainien. Par conséquent, nous sommes fiers et heureux de l'ensemble du dispositif cantonal, communal - puisque des communes se sont également mobilisées - et associatif, qui permet, même s'il reste un rude travail à accomplir, d'accueillir dans la dignité ces personnes qui fuient un pays en guerre. Merci encore une fois, Mesdames les députées, Messieurs les députés, de votre soutien. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission des affaires sociales, sur laquelle je vous invite à vous prononcer.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2847 à la commission des affaires sociales est rejeté par 44 non contre 36 oui.

Mise aux voix, la motion 2847 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 45 oui contre 28 non et 8 abstentions (vote nominal).  (Applaudissements à l'annonce du résultat.)

Motion 2847 Vote nominal

Le président. Mesdames et Messieurs, nous avons bien travaillé. Au nom de tout le Bureau, merci encore de votre confiance, je vous souhaite une bonne nuit et nous nous retrouvons demain ! (Acclamations. Applaudissements.)

La séance est levée à 23h.