République et canton de Genève

Grand Conseil

GR 421-A
Rapport de la commission de grâce chargée d'étudier le dossier de Madame Q. C.

M. Pierre Kunz (R), rapporteur. Mme Q.C. est née en 1969 et demande au Grand Conseil de la gracier pour le solde d'une mesure d'expulsion prononcée contre elle, une première fois de cinq ans, le 9 mai 2000 - par conséquent jusqu'au 9 mai 2005 - et une deuxième fois suite à un second jugement, soit du 21 mars 2003 au 9 mai 2008. Elle demande sa grâce sous prétexte qu'elle entend se marier avec un homme qu'elle a rencontré dans l'intervalle - et celui-ci le confirme.

Mme Q.C. a été condamnée une première fois en mai 2000 pour lésions corporelles et infraction à la loi sur le séjour des étrangers. En 2003, comme elle était toujours dans le pays, elle a été inculpée pour rupture de ban et emprisonnée. Elle a été condamnée à trois mois de prison, sous déduction de la préventive, et à la prolongation, précisément, de son expulsion ferme du territoire jusqu'en mai 2008. Les motifs de cette situation sont qu'elle était en rupture de ban, sans attaches sérieuses en Suisse, qu'elle a menti de manière répétée sur son identité et en utilisant des faux papiers. Par ailleurs, elle est suspectée d'activités louches diverses et de complicité de meurtre. De plus, cette personne, serveuse de son état - officiellement - a été amenée à soumettre son compte bancaire au juge, qui y a trouvé 90 000 F.

C'est sur la base de tous ces faits que, sans opposition mais avec quelques abstentions, la commission vous recommande de rejeter la demande de grâce de Mme Q.C.

M. Alberto Velasco (S). A l'heure où l'on nous demande de voter pour Schengen, pour l'ouverture des frontières, etc., j'aimerais dire quelques mots à propos de ce dossier. Voilà une personne, venue chez nous pour travailler - non pas pour déposer ses millions à la banque, elle est serveuse. Puisqu'elle a travaillé, il est donc tout à fait possible qu'elle ait fait des économies et, par conséquent, il est désagréable d'entendre qu'elle est suspectée de choses et d'autres. Et j'en suis désolé ! Parce que, dans des situations semblables, des personnes ayant rencontré quelqu'un qui vivait dans le canton et qui possédait un permis ont obtenu la grâce. Ainsi, ces personnes ont pu fonder une famille. Alors, si Mme. Q.C. a rencontré quelqu'un dans le canton, il serait logique - comme on l'a fait par le passé - de lui permettre de vivre avec la personne qu'elle a rencontrée. Et je ne comprends pas pourquoi notre commission a rejeté la grâce alors que cette personne n'a commis qu'une infraction: elle a enfreint la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers.

Vous savez très bien, Monsieur, que des centaines de personnes sont obligées de commettre cette infraction pour gagner leur vie ! En échange de leur force de travail, elles sont souvent très mal rémunérées, et ceci pendant des années ! Un jour, elles se font prendre, paient une amende ou font de la prison, et ensuite on les renvoie chez elles... Mais elles reviennent, et Mme Q.C. est revenue et a réessayé. Eh oui, c'est comme ça, la vie ! Cette personne réessaie parce qu'elle n'a pas d'autres solutions pour survivre; alors, on le lui reproche et on la recondamne !

Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui me concerne, je voterai la grâce pour cette personne, et je pense que mon groupe le fera également.

M. Pierre Kunz (R), rapporteur. Je voudrais juste souligner à l'intention de M. Velasco que, d'abord, Mme Q.C. a été condamnée pour coups et blessures. De plus, ce ne sont pas les membres de la commission qui disent: «elle est suspectée de...», ce sont les tribunaux qui ont fondé leur décision d'expulsion sur un certain nombre de constats et de dénonciations qui ont fait apparaître que Mme Q.C., je le répète, semblait impliquée dans des trafics de travailleurs clandestins, dans des trafics de drogue et, si vous voulez tout savoir, dans des organisations de rencontres sexuelles illégales. (Commentaires.)Ceci, pour que vous preniez votre décision en toute connaissance de cause !

Donc, je répète que ce n'est pas la commission qui l'a suspectée, mais bien les tribunaux, et cela figure dans les ordonnances.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet de la grâce) est adopté par 36 oui contre 11 non et 10 abstentions.