République et canton de Genève

Grand Conseil

Discours du président du Conseil d'Etat, M. Laurent Moutinot

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Le 3 décembre 2001, le Conseil d'Etat élu pour la législature 2001-2005 prêtait serment, ici même, devant vous, de servir la République et annonçait, dans le discours de Saint-Pierre, son programme de législature.

Aujourd'hui, alors que la guerre a éclaté en Irak, le président de la Confédération a rappelé qu'une guerre déclenchée sans l'autorisation des Nations Unies, de même que le refus obstiné d'un pays de se soumettre aux résolutions des Nations Unies, sont un comportement contraire au droit international et entraînent par là même la neutralité de la Suisse dans ce conflit. Nos pensées se tournent aujourd'hui vers les populations civiles dont les souffrances nous font horreur.

Le Conseil d'Etat réaffirme la vocation de Genève, ville de paix et de résolution des conflits internationaux par la négociation. Notre mission est de fournir le cadre adéquat, fait de sécurité et de liberté, pour permettre la discussion entre les belligérants.

L'élection de Mme Micheline Calmy-Rey au Conseil fédéral a entraîné une élection partielle au Conseil d'Etat et, au moment où M. Charles Beer vient de prêter serment, le Conseil d'Etat entend préciser comment il poursuivra l'action gouvernementale pour la deuxième moitié de cette législature.

Permettez-moi tout d'abord de rendre hommage à mes collègues qui ont assuré, pendant la période où nous avons siégé à six au lieu de sept, toutes les tâches gouvernementales au prix d'un effort personnel important, afin que le fonctionnement des institutions ne soit pas troublé par la vacance d'un siège. Je tiens en particulier à rendre hommage à Mme Martine Brunschwig Graf qui a magistralement assumé la lourde tâche de deux départements simultanément.

Depuis son élection, M. Charles Beer a été invité à plusieurs séances par le Conseil d'Etat, afin de déterminer l'action du gouvernement dans sa nouvelle composition. C'est ainsi que je puis vous assurer de la parfaite continuité de la politique du Conseil d'Etat; certes, y aura-t-il quelques inflexions, dues à l'arrivée de notre nouveau collègue et au changement de titulaire de deux départements, mais le Conseil d'Etat tient à réaffirmer les engagements qu'il a pris devant vous le 3 décembre 2001.

La conjoncture économique et le contexte politique ont cependant changé depuis 2001. Plutôt que de vous livrer une version réactualisée - les principes demeurant inchangés - du discours de Saint-Pierre, j'entends souligner quelques impératifs fondamentaux de l'action politique du Conseil d'Etat :

- en premier lieu, nous devons, sans minimiser les difficultés et défis auxquels nous avons à faire face, nous réjouir de vivre dans un pays en paix, où les libertés sont garanties par la loi, par la stricte application du principe de la séparation des pouvoirs et par la vigilance constante des citoyennes et des citoyens. Sachons reconnaître notre bonheur et trouvons-y les ressources de mieux combattre les injustices et les discriminations !

- en deuxième lieu, il convient d'affirmer que l'autorité de l'Etat, que le Conseil d'Etat partage avec le Grand Conseil et le pouvoir judiciaire, est la garante du bien commun. Dans les luttes d'intérêts, face aux puissances démesurées de l'argent, face aux dérives idéologiques extrémistes, face aux menaces du terrorisme, face à l'exploitation des faibles, face à l'individualisme forcené, seul l'Etat peut assurer l'égalité devant la loi, l'égalité des chances, l'égalité de chacune et de chacun en dignité.

- enfin, et alors que les temps deviennent plus durs, il faut réaffirmer la nécessité d'une solidarité forte à l'égard de tous ceux que la conjoncture économique, la maladie, l'âge ou d'autres facteurs placent dans une situation difficile. L'égoïsme mine la cohésion sociale et fragilise l'ensemble de la société, y compris ceux qui croient, à tort, pouvoir faire cavalier seul. Seule une société solidaire, attentive aux besoins des plus démunis, peut progresser vers plus de justice et plus de sécurité.

Le Conseil d'Etat a certes la tâche de la gestion au quotidien, mais l'autorité que lui confère la constitution n'a de sens que s'il exerce son pouvoir en ne perdant jamais de vue les valeurs essentielles sur lesquelles est fondée notre République.

Je puis vous assurer que c'est avec la conscience aiguë des valeurs républicaines de liberté, de fraternité et d'égalité que nous répondrons tous les sept aux exigences de notre serment de magistrat.

(L'assemblée chante le «Cé qu'è lainô», accompagné à l'orgue.)