République et canton de Genève

Grand Conseil

Séance extraordinaire

Prestation de serment du nouveau conseiller d'Etat, M. Charles Beer

La séance est ouverte à 17h, en la cathédrale Saint-Pierre, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président.

Prennent place sur le podium:

M. Laurent Moutinot,président du Conseil d'Etat, conseiller d'Etat chargé du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement;

M. Robert Cramer,vice-président du Conseil d'Etat, conseiller d'Etat chargé du département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie;

Mme Martine Brunschwig Graf,conseillère d'Etat chargée du département des finances;

M. Carlo Lamprecht,conseiller d'Etat chargé du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures;

Mme Micheline Spoerri,conseillère d'Etat chargée du département de justice et police et sécurité;

M. Pierre-François Unger,conseiller d'Etat chargé du département de l'action sociale et de la santé;

M. Charles Beer,conseiller d'Etat chargé du département de l'instruction publique;

M. Robert Hensler,chancelier.

M. Bernard Lescaze, président du Grand Conseil;

M. Pascal Pétroz, premier vice-président du Grand Conseil;

Mme Françoise Schenk-Gottret, deuxième vice-présidente du Grand Conseil;

M. Jean-Claude Dessuet, secrétaire du Grand Conseil;

Mme Morgane Gauthier, secrétaire du Grand Conseil;

Mme Jeannine de Haller, secrétaire du Grand Conseil;

M. André Reymond, secrétaire du Grand Conseil;

Mme Maria-Anna Hutter, sautier du Grand Conseil.

M. Daniel Zappelli, procureur général;

Mme Martine Heyer, présidente de la Cour de Justice;

M. Raymond Courvoisier, président de la Cour de cassation;

M. Philippe Thélin, président du Tribunal administratif;

Mme Claude-Nicole Nardin, présidente du Tribunal de première instance;

M. Stéphane Esposito, président des juges d'instruction;

M. Raphaël Martin, président de la Commission de surveillance des offices des poursuites et faillites;

Mme Anne-Françoise Comte Fontana, présidente du Tribunal de la jeunesse;

M. Thierry Wuarin, président du Tribunal tutélaire et justice de paix;

M. Pierre-Yves Demeule, président de la juridiction des Prud'hommes;

M. Serge Gobat, chef du commissariat;

M. Christian Coquoz, chef de la police;

M. Urs Rechsteiner, chef de la police judiciaire.

(Pendant l'entrée du Conseil d'Etat et jusqu'à ce que toutes les personnes prenant place sur le podium soient installées, M. François Delor, organiste, et M. Christophe Héritier, trompettiste, jouent un extrait de "Watermusic" de Georg Friedrich Haendel.)

Exhortation

Le président. Je prie l'assistance de bien vouloir se lever.

Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Veuillez vous asseoir !

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. les députés Claude Aubert, Caroline Bartl, Blaise Bourrit, Gilles Desplanches, Erica Deuber Ziegler, René Ecuyer, Philippe Glatz, Alexandra Gobet Winiger, Michel Halpérin, David Hiler, Christian Luscher, Claude Marcet, Mark Muller, Jacques Pagan, Pierre Schifferli, Ivan Slatkine, Pierre Vanek, ainsi que Christian Grobet, retenu au Conseil national.

Appel nominal des députés

Le président. Je prie M. le secrétaire de procéder à l'appel nominal des députés.

Esther Alder (Ve), Bernard Annen (L), Thierry Apothéloz (S), Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC), Gabriel Barrillier (R), Florian Barro (L), Luc Barthassat (PDC), Jacques Baud (UDC), Jacques Baudit (PDC), Christian Bavarel (Ve), Janine Berberat (L), Claude Blanc (PDC), Marie-Paule Blanchard-Queloz (AdG), Loly Bolay (S), Christian Brunier (S), Thomas Büchi (R), Gilbert Catelain (UDC), Alain Charbonnier (S), Anita Cuénod (AdG), Jeannine de Haller (AdG), Marie-Françoise de Tassigny (R), René Desbaillets (L), Jean-Claude Dessuet (L), Hubert Dethurens (PDC), Antoine Droin (S), John Dupraz (R), Jean-Claude Egger (PDC), Alain Etienne (S), Laurence Fehlmann Rielle (S), Jacques Follonier (R), Pierre Froidevaux (R), Yvan Galeotto (UDC), Morgane Gauthier (Ve), Renaud Gautier (L), Mariane Grobet-Wellner (S), Jean-Michel Gros (L), Janine Hagmann (L), Jocelyne Haller (AdG), André Hediger (AdG), Hugues Hiltpold (R), Antonio Hodgers (Ve), Robert Iselin (UDC), Jacques Jeannerat (R), Sami Kanaan (S), René Koechlin (L), Pierre Kunz (R), Michèle Künzler (Ve), Nicole Lavanchy (AdG), Bernard Lescaze (R), Georges Letellier (UDC), Sylvia Leuenberger (Ve), Ueli Leuenberger (Ve), Anne Mahrer (Ve), Blaise Matthey (L), Alain-Dominique Mauris (L), Guy Mettan (PDC), Alain Meylan (L), M. Souhail Mouhanna (AdG), Stéphanie Nussbaumer (Ve), Jean-Marc Odier (R), Rémy Pagani (AdG), Pascal Pétroz (PDC), Jacqueline Pla (S), Patrice Plojoux (L), Pierre-Louis Portier (PDC), Véronique Pürro (S), André Reymond (UDC), Albert Rodrik (S), Maria Roth-Bernasconi (S), Jean Rémy Roulet (L), Stéphanie Ruegsegger (PDC), Françoise Schenk-Gottret (S), Patrick Schmied (PDC), Louis Serex (R), Carlo Sommaruga (S), Jean Spielmann (AdG), François Thion (S), Olivier Vaucher (L), Alberto Velasco (S), Pierre Weiss (L), Ariane Wisard (Ve).

(Le quatuor à cordes de l'Orchestre de la Suisse romande interprète "Festmusik" - ouverture - de Georg Friedrich Haendel.)

E 1193-A
Prestation de serment de M. BEER Charles, nouveau conseiller d'Etat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons maintenant procéder à la prestation de serment de M. Charles Beer, nouveau conseiller d'Etat.

Je prie l'assistance de bien vouloir se lever.

Monsieur le conseiller d'Etat, je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant cette lecture, vous tiendrez la main droite levée. Une fois cette lecture terminée vous baisserez la main. Puis, à l'appel de votre nom, vous vous approcherez des Saintes Ecritures, vous lèverez à nouveau la main droite et prononcerez les mots: je le jure ou je le promets.

Veuillez lever la main droite !

«Je jure ou je promets solennellement:

d'être fidèle à la République et canton de Genève, d'observer et de faire observer religieusement la constitution et les lois, sans jamais perdre de vue que mes fonctions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;

de maintenir l'indépendance et l'honneur de la République, de même que la sûreté et la liberté de tous les citoyens;

d'être assidu aux séances du Conseil et d'y donner mon avis impartialement et sans aucune acception de personnes;

d'observer tous les devoirs que nous impose notre union à la Confédération suisse et d'en maintenir, de tout mon pouvoir, l'honneur, l'indépendance et la prospérité.»

Veuillez baisser la main !

(M. Charles Beer, conseiller d'Etat, s'approche des Saintes Ecritures et, la main droite levée, prête serment.)

Le président. Monsieur le conseiller d'Etat, le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite plein succès dans vos nouvelles fonctions.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de vous asseoir.

(Quatuor "Dissonances" - andante - de Wolfgang Amadeus Mozart interprété par le quatuor à cordes de l'Orchestre de la Suisse romande. )

Discours du président du Grand Conseil, M. Bernard Lescaze

Le président. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat,

Monsieur le procureur général,

Mesdames et Messieurs les représentants des autorités judiciaires,

Mesdames et Messieurs les représentants des autorités fédérales et communales,

Monsieur le chancelier,

Mesdames et Messieurs les députés,

Mesdames et Messieurs les représentants des autorités militaires, ecclésiastiques et universitaires,

Mesdames et Messieurs les représentants du corps diplomatique et consulaire,

Mesdames et Messieurs les invités,

Mesdames et Messieurs,

Chères concitoyennes, chers concitoyens,

Depuis près de six siècles, ce lieu est celui où les citoyens genevois viennent assister à la prestation de serment de leurs autorités. Car au rite de l'élection succède toujours celui du serment de l'élu qui répondait au serment que devait prêter l'électeur lui-même: «Nous promettons et jurons devant Dieu [...] d'élire et nommer en l'office [...] ceux que nous pensons être propres et idoines [...] pour conduire et gouverner le peuple en bonne police et conserver la liberté de la Ville et qu'en élisant nous aurons égard au bien public et non pas à quelque affection particulière ni de haine ni de faveur».

Prêter serment devant le peuple revient à s'engager à le servir. L'ancienne République de Genève accordait une attention toute particulière à la promesse solennelle de ses élus parce qu'elle y voyait la garantie, au-delà des passions humaines, que le nouveau magistrat n'aurait pour but de son action que le bien commun. La formule du serment était toute simple: «Nous promettons et jurons de maintenir l'honneur et la gloire de Dieu et la pure religion, et nous acquitter fidèlement du devoir de notre office, de maintenir et défendre de tout notre pouvoir la liberté, les édits et les droits de la Ville, de bien administrer ce que nous aurons entre nos mains, d'exercer bonne et droite justice, rendant à un chacun ce qui lui appartient soutenant les bons et punissant les mauvais sans haine ni faveur.» En prêtant serment aujourd'hui, dans une forme adaptée au XXIe siècle, vous n'avez fait que vous inscrire, Monsieur le conseiller d'Etat, dans la lignée de tous ceux qui, avant de prendre leurs fonctions, ont prêté un serment semblable.

Vous êtes investi en un moment particulièrement troublé, alors que le monde s'apprête à entrer en guerre les yeux grands ouverts, malgré le refus et la réprobation du plus grand nombre, par la seule volonté de quelques-uns et ce, en violation des règles du droit international et de tout l'édifice de la résolution pacifique des conflits patiemment échafaudé depuis plusieurs décennies par l'humanité, en particulier dans cette cité. Malgré l'échec momentané de la paix, nous devons être convaincus que les efforts menés pour conduire les hommes hors de la barbarie et des conflits sanglants ne sont pas vains et qu'il est du devoir de tout magistrat de les poursuivre, à quelque niveau qu'il se situe, selon ses moyens.

La politique est un art de la séduction. Vous y avez réussi puisque vous avez été élu, mais elle a ceci de commun avec la céramique qu'il s'agit aussi d'un art du feu. Alors que des ministres étrangers déclarent sans sourciller qu'il y a un temps pour parler et un temps pour tuer, je vous souhaite de ne connaître que le premier.

Par une décision collégiale du gouvernement - et la collégialité est bien l'une des valeurs essentielles de nos exécutifs qui sont une sorte d'assemblage de cépages, dont l'alchimie demeure toujours incertaine - vous allez reprendre la charge de conduire le département de l'instruction publique. Quel nom magnifique pour un dicastère, conservé depuis plus de cent cinquante ans ! Il ne s'agit pas seulement de la formation et de la jeunesse, ni de l'éducation cantonale, mais bien d'éduquer, de former et d'instruire le public, c'est-à-dire tous les habitants de Genève, dans le respect des principes de l'école publique et laïque définis dès 1846.

Le département que vous reprendrez a eu à sa tête, à plusieurs reprises des personnalités illustres. Comment ne pas citer ici Antoine Carteret, créateur de l'université, notamment de la faculté de médecine, réformateur de l'école primaire, Georges Favon, trop tôt disparu, André Oltramare, qui le premier, vers 1927, eut l'intuition de ce qui deviendrait trente-cinq ans plus tard le cycle d'orientation. Il était latiniste et socialiste, ce qui n'a jamais été incompatible. Enfin André Chavanne qui a marqué de son empreinte la seconde moitié du XXe siècle. Ces modèles ne sauraient vous effrayer, ils devraient plutôt vous stimuler.

Tant de défis attendent le nouveau magistrat que je ne saurais résister à la tentation de lui délivrer, à mon tour, après tant d'autres un conseil que j'emprunte à un illustre inconnu, Paul Laffitte: «Méfiez-vous des idées arrêtées et des vérités en marche, car l'immobilité des premières est suspecte et, des secondes, on ne peut dire par quels chemins elles passeront.»

Bonne route, Monsieur le conseiller d'Etat. Les voeux du Grand Conseil vous accompagnent dans l'accomplissement de votre tâche.

(Quatuor "Dissonances" - allegro - de Wolfgang Amadeus Mozart interprété par le quatuor à cordes de l'Orchestre de la Suisse romande.)

Le président. La parole est à M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat.

Discours du président du Conseil d'Etat, M. Laurent Moutinot

M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Le 3 décembre 2001, le Conseil d'Etat élu pour la législature 2001-2005 prêtait serment, ici même, devant vous, de servir la République et annonçait, dans le discours de Saint-Pierre, son programme de législature.

Aujourd'hui, alors que la guerre a éclaté en Irak, le président de la Confédération a rappelé qu'une guerre déclenchée sans l'autorisation des Nations Unies, de même que le refus obstiné d'un pays de se soumettre aux résolutions des Nations Unies, sont un comportement contraire au droit international et entraînent par là même la neutralité de la Suisse dans ce conflit. Nos pensées se tournent aujourd'hui vers les populations civiles dont les souffrances nous font horreur.

Le Conseil d'Etat réaffirme la vocation de Genève, ville de paix et de résolution des conflits internationaux par la négociation. Notre mission est de fournir le cadre adéquat, fait de sécurité et de liberté, pour permettre la discussion entre les belligérants.

L'élection de Mme Micheline Calmy-Rey au Conseil fédéral a entraîné une élection partielle au Conseil d'Etat et, au moment où M. Charles Beer vient de prêter serment, le Conseil d'Etat entend préciser comment il poursuivra l'action gouvernementale pour la deuxième moitié de cette législature.

Permettez-moi tout d'abord de rendre hommage à mes collègues qui ont assuré, pendant la période où nous avons siégé à six au lieu de sept, toutes les tâches gouvernementales au prix d'un effort personnel important, afin que le fonctionnement des institutions ne soit pas troublé par la vacance d'un siège. Je tiens en particulier à rendre hommage à Mme Martine Brunschwig Graf qui a magistralement assumé la lourde tâche de deux départements simultanément.

Depuis son élection, M. Charles Beer a été invité à plusieurs séances par le Conseil d'Etat, afin de déterminer l'action du gouvernement dans sa nouvelle composition. C'est ainsi que je puis vous assurer de la parfaite continuité de la politique du Conseil d'Etat; certes, y aura-t-il quelques inflexions, dues à l'arrivée de notre nouveau collègue et au changement de titulaire de deux départements, mais le Conseil d'Etat tient à réaffirmer les engagements qu'il a pris devant vous le 3 décembre 2001.

La conjoncture économique et le contexte politique ont cependant changé depuis 2001. Plutôt que de vous livrer une version réactualisée - les principes demeurant inchangés - du discours de Saint-Pierre, j'entends souligner quelques impératifs fondamentaux de l'action politique du Conseil d'Etat :

- en premier lieu, nous devons, sans minimiser les difficultés et défis auxquels nous avons à faire face, nous réjouir de vivre dans un pays en paix, où les libertés sont garanties par la loi, par la stricte application du principe de la séparation des pouvoirs et par la vigilance constante des citoyennes et des citoyens. Sachons reconnaître notre bonheur et trouvons-y les ressources de mieux combattre les injustices et les discriminations !

- en deuxième lieu, il convient d'affirmer que l'autorité de l'Etat, que le Conseil d'Etat partage avec le Grand Conseil et le pouvoir judiciaire, est la garante du bien commun. Dans les luttes d'intérêts, face aux puissances démesurées de l'argent, face aux dérives idéologiques extrémistes, face aux menaces du terrorisme, face à l'exploitation des faibles, face à l'individualisme forcené, seul l'Etat peut assurer l'égalité devant la loi, l'égalité des chances, l'égalité de chacune et de chacun en dignité.

- enfin, et alors que les temps deviennent plus durs, il faut réaffirmer la nécessité d'une solidarité forte à l'égard de tous ceux que la conjoncture économique, la maladie, l'âge ou d'autres facteurs placent dans une situation difficile. L'égoïsme mine la cohésion sociale et fragilise l'ensemble de la société, y compris ceux qui croient, à tort, pouvoir faire cavalier seul. Seule une société solidaire, attentive aux besoins des plus démunis, peut progresser vers plus de justice et plus de sécurité.

Le Conseil d'Etat a certes la tâche de la gestion au quotidien, mais l'autorité que lui confère la constitution n'a de sens que s'il exerce son pouvoir en ne perdant jamais de vue les valeurs essentielles sur lesquelles est fondée notre République.

Je puis vous assurer que c'est avec la conscience aiguë des valeurs républicaines de liberté, de fraternité et d'égalité que nous répondrons tous les sept aux exigences de notre serment de magistrat.

(L'assemblée chante le «Cé qu'è lainô», accompagné à l'orgue.)

Le président. Je déclare la cérémonie de prestation de serment du nouveau conseiller d'Etat close.

Je passe la parole à M. Dominique Louis pour quelques informations pratiques.

(Orgue et trompette - Concerto en ré majeur de Giuseppe Torelli.)

(Sur le parvis de la cathédrale, la fanfare commence à jouer.)

La séance est levée à 18h.