République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8835
Projet de loi de MM. Christian Brunier, Dominique Hausser, Sami Kanaan modifiant la loi sur le tourisme (I 1 60) (Amélioration des conditions pour les petites et les moyennes entreprises)

Préconsultation

M. Christian Brunier (S). Lors d'une rencontre avec des petits commerçants, nous nous sommes rendu compte que la taxe d'encouragement au tourisme empoisonnait les PME et les petits commerçants. C'est une taxe qui est peut-être peu élevée pour certains, mais néanmoins ce sont souvent les 1000 à 3000 F de trop pour un petit commerçant ou pour une petite entreprise.

Nous nous sommes donc intéressés à cette taxe pour mieux comprendre ce qui se passait. Nous avons vu que, dans les grandes lignes, cette loi pouvait tenir la route puisqu'on taxait plutôt les activités et les zones géographiques qui bénéficiaient du tourisme, et que le reste de la taxe était géré par voie réglementaire. (Brouhaha.)En essayant de comprendre ce qui se passait dans les règlements... (Le président agite la cloche.)...nous avons constaté, premièrement, peu de transparence. Par exemple, nous avons eu pas mal de peine à définir quelles étaient les zones de taxations, ce qui démontre que la transparence de l'Etat n'est pas encore réelle malgré les lois que nous avons votées. Si nous n'avions pas une collaboratrice parlementaire un peu têtue, je ne suis pas sûr qu'on aurait obtenu cette information. Nous avons donc décidé en premier lieu de modifier la loi pour rendre les choses plus transparentes, c'est pourquoi dans notre projet de loi nous proposons tout un arsenal de mesures, afin de rendre transparentes les modifications de zone ainsi que les taxations par activité économique. En effet, certaines activités sont plus taxées que d'autres. Or, là aussi, on pense qu'il y a peu de transparence concernant les motifs et niveaux de taxation des différentes activités. Nous demandons donc un certain nombre d'actes parlementaires et de publications dans la Feuille d'avis afin de rendre les choses plus transparentes.

Nous avons vu ensuite des choses qui nous ont encore plus dérangés: dans les zones géographiques soi-disant plus bénéficiaires du tourisme que d'autres, il y a des choses très étonnantes. Par exemple, si vous avez un commerce à l'intérieur des Pâquis, vous êtes forcément en zone A, la zone la plus taxée, alors que sur l'autre rive, aux Eaux-Vives, zone qui bénéficie également du tourisme, vous voyez que les quais sont en zone A, mais que les rues adjacentes sont soumises à une tarification beaucoup plus souple. On comprend mal pourquoi.

Plus inquiétant encore: si nous regardons la zone A autour de l'aéroport - le Conseil d'Etat considère que cette zone bénéficie du tourisme et je crois que nous sommes tous d'accord pour le dire - nous constatons avec étonnement que cette zone s'arrête à la limite de certains hôtels, et que certains hôtels qui sont dans cette zone échappent à la taxe.

Chose plus inquiétante et qui correspond à tout un registre de notre projet de loi: les calculs que nous avons faits par rapport à l'activité et à la zone. Un petit commerce est taxé de 1000 à 3000 F par année, alors que la grande surface commerciale dans le même secteur, peut-être même dans la même activité économique, plafonne à 5000 F, puisque telle avait été la décision du législateur à l'époque. Il est très facile de voir que c'est une petite taxe qui devient vite insupportable pour les tout petits, et une toute petite taxe pour les grandes surfaces et les grosses entreprises, puisqu'elle plafonne à 5000 F.

Notre projet de loi demande donc un déplafonnement, solidaire je dirais - on a dit 20 000 F, ça peut être plus ou moins - à ajuster en fonction du calcul économique, puisque nous voulons que cette taxe entre dans une neutralité fiscale. Nous aimerions que cette taxe un peu plus forte pour les grands commerces et entreprises puisse bénéficier aux plus petits, c'est pourquoi nous demandons l'exonération des entreprises et commerces ayant moins de quatre employés.

Pour conclure, nous pensons tout simplement, à travers ce projet de loi, donner plus de justice fiscale, comme je vous le disais, en faisant bénéficier les plus petits et en demandant un tout petit peu plus de solidarité aux grands, et nous demandons beaucoup plus de transparence. Je pense que sur ces deux axes nous devrions trouver une grande majorité de ce parlement, voire l'unanimité. Je vous demande juste de mettre en adéquation les théories que vous émettez tous dans vos programmes politiques avec vos actes. Merci d'avance.

Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Il est clair que la taxe tourisme est mal perçue par les commerçants, par l'ensemble des commerçants. Le règlement qui régit cette taxe est peut-être un peu obscur et mal compris par la plupart des gens. Ne serait-ce que pour cela, il y a un intérêt à examiner ce projet de loi, bien que je ne sois pas certaine que ce projet de loi soit beaucoup plus clair.

Sur le fond, je ne suis pas totalement persuadée que d'augmenter à 20 000 F la taxe tourisme pour certains commerces soit de nature à faire disparaître le malaise que les commerçants ressentent à payer cette taxe. Au contraire, je pense que certains considèreront que cette taxe est encore plus injuste avec le projet de loi socialiste qu'aujourd'hui. De plus, je m'étonne que le parti socialiste nous demande aujourd'hui de diminuer cette taxe puisqu'il y a quelques années, avec les autres partis de gauche, il avait fait un véritable chantage pour augmenter cette taxe tourisme afin de financer la Halle 6. Hier ils demandaient une augmentation massive, aujourd'hui ils nous disent vouloir la diminuer, en tout cas pour les petits commerces. Ils oublient de dire qu'ils l'augmentent massivement pour d'autres commerces.

Venons-en à la défense des petits commerces: je suis absolument ravie d'entendre que le groupe socialiste défend le petit commerce ! Je me réjouis de les voir faire lorsqu'il s'agira de laisser notamment les automobilistes venir jusqu'au centre-ville pour aller acheter dans les petits commerces... (Protestations dans la salle.)Nous vous attendons au contour.

M. Olivier Vaucher. Pas en 4X4 !

Mme Stéphanie Ruegsegger. Pas en 4X4, non... Je me réjouis de vous entendre défendre le petit commerce, car je vous rappelle qu'avant de payer des taxes les petits commerces souhaitent avant tout avoir des clients, et c'est ce qui importe pour eux.

Nous soutiendrons donc le renvoi en commission et verrons ensuite ce que nous ferons avec ce projet de loi.

M. Gilles Desplanches (L). Pratiquement tout a été dit, mais en tant que commerçant, je trouve que le projet de loi socialiste mérite d'être travaillé, parce qu'il faut tout de même reconnaître que nous les commerçants, petits ou grands, payons beaucoup trop de taxes. Je ne dis pas que je serai d'accord d'augmenter les taxes pour les plus grands commerces, mais je pense qu'il est vrai que les plus petits devraient bénéficier d'un tarif plus avantageux. Cette taxe est une occasion supplémentaire d'ajouter encore une certaine fiscalité.

Pour cette raison, je trouve que ce projet de loi doit être renvoyé en commission, auquel cas on se fera un grand plaisir d'y travailler. J'aimerais dire surtout que c'est la première fois que le parti socialiste fait un projet de loi qui concerne réellement les petites entreprises, et c'est également une raison pour nous de vous suivre sur le renvoi en commission, pour y travailler avec vous.

M. Pierre Kunz (R). Le parti radical s'étonne, comme ses cousins, de cette sollicitude subite - elle ne date d'ailleurs pas d'aujourd'hui, puisqu'on nous en a fait la preuve il y a quelque temps - de la gauche et du parti socialiste en particulier pour la fiscalité trop lourde de certains de nos concitoyens.

Il est vrai que la loi en question est critiquable, la pratique l'a montré et nous avons déjà eu l'occasion d'en parler dans ce parlement, mais il est curieux que, si la loi est considérée comme étant mauvaise pour les uns, elle soit bonne pour d'autres... Sauf à penser que désormais, les socialistes considèrent que la dégressivité des taxes en fonction du volume autant que la progressivité des impôts en fonction du revenu devient critiquable... Je me réjouis de reparler dans l'autre sens de la problématique de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, qui est excessif pour les hauts revenus et insuffisant pour les bas revenus !

Une voix. On te reconnaît bien là !

M. Christian Brunier. Article 24 !

M. Pierre Kunz. En ce qui concerne l'idée de base de ce projet de loi, les radicaux seront évidemment ravis si tous ensemble nous parvenons à réduire l'importance des taxes qui pèsent sur les entreprises. Il n'est bien entendu pas question d'augmenter les taxes qui pèsent sur les autres ! Mais cela mérite un débat, et ne serait-ce qu'en vertu de l'importance, de l'épaisseur de ce projet de loi, les radicaux se feront un plaisir de l'envoyer en commission.

Ce projet est renvoyé à la commission de l'économie.