République et canton de Genève

Grand Conseil

GR 323-A
Rapport de la commission de grâce chargée d'étudier le dossier de Monsieur M. M.

M. Thierry Apothéloz (S), rapporteur. Je tiens à rappeler en introduction que le droit précise qu'on ne peut pas rejuger un homme et que celui qui purge sa peine ne peut être rejugé pour les mêmes faits. Aussi je vous prie d'avoir à l'esprit, lors de mon exposé de la demande de grâce de M. M., le fait qu'il a un enfant et que cela est important pour lui et sa femme. Ce monsieur est né en 1977 au Bangladesh. Il a des rapports conflictuels avec ses parents et il décide d'émigrer en France où il obtient la nationalité française. En 1991, il est installé à Annemasse où il a naturellement fréquenté Genève. Le 27 mars 1998, M. M. est arrêté par la police genevoise et conduit à la prison de Champ-Dollon pour avoir participé à une agression avec deux autres personnes. En avril 1998, une seconde plainte pénale est déposée contre lui, notamment pour contrainte sexuelle. La Cour correctionnelle le condamne alors à trois ans de réclusion. Et, puisque à cette époque M. M. n'avait pas d'attaches sérieuses avec la Suisse, il a été expulsé pour une durée de dix ans.

Alors qu'il exécute sa peine, il correspond avec une femme qui deviendra sa femme, Mme J., ressortissante suisse domiciliée à Genève, qu'il connaissait de vue. Des liens épistolaires très forts se sont petit à petit noués et Mme J. est allée rendre visite à M. M. à la prison de Gorgier. A sa sortie de prison, en avril 2000, M. M. est renvoyé en France. Il n'a cependant pas pu se résoudre à quitter celle qu'il aimait, ce qui l'a conduit à revenir à Genève. Le 15 novembre 2000, M. M. est reconnu coupable de rupture de ban et condamné à trente jours d'emprisonnement. A cette époque, Mme J. est tombée enceinte de M. M. Ils ont alors décidé d'offrir un cadre stable à leur futur enfant et décident de se marier. Leur mariage a été célébré en France, à Maisons-Alfort, le 7 avril 2001. Ainsi le 31 août 2001, Mme M. donne naissance à Genève au petit A. I. M. M. toujours frappé par l'interdiction de séjour en Suisse, Mme et M. M. ont envisagé de s'installer en France. Toutefois la mère de Mme M. est atteinte d'un cancer généralisé et a besoin de sa fille auprès d'elle. Son père est également âgé et malade. Mme M. a également le devoir de s'occuper de son petit frère de 13 ans et de sa soeur de 16 ans. Elle est elle-même très affectée par la situation familiale et tombe en dépression, ce qui l'oblige à suivre un traitement auprès d'un psychiatre thérapeute. Il n'est alors pas concevable pour elle de quitter Genève où elle a toutes ses attaches.

M. M. est décrit par sa belle-famille comme étant un merveilleux père et l'accueil qui lui est réservé est très favorable. Pour mettre fin à une situation dramatique où M. M. a dû par deux fois revenir à Genève, M. M. a décidé de déposer son recours en grâce contre la décision d'expulsion. Aujourd'hui, M. M. patiente tant bien que mal en France où il a des contacts épisodiques avec son épouse et son fils. Récemment, M. a décidé de partir trois mois en Chine pour une mission dont nous ne connaissons pas les détails.

Aujourd'hui, nous pouvons considérer que M. M. a payé sa dette auprès de la société. Par ailleurs sa situation est fondamentalement différente de ce que nous avions connu auparavant. Ainsi faut-il préciser qu'à ce jour et depuis sa sortie de prison, il n'a plus occupé la police si ce n'est pour une rupture de ban? La majorité de la commission refuse toutefois d'accorder la grâce de l'expulsion prononcée par la Cour correctionnelle. J'en ai terminé, Monsieur le président.

Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet du recours) est adopté.