République et canton de Genève

Grand Conseil

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8. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : «Pour sauver cette planète : arrêtez cette pollution affreuse !» ( -)P1248
Rapport de Mme Juliette Buffat (L), commission des pétitions

En date du 12 mai 1999, Mlle Anaïs Stitelmann, écolière de 10 ½ ans, assistée par sa logopédiste Mme Catherine Clastres, a déposé une pétition signée par 11 personnes « pour sauver notre planète » auprès du Grand Conseil qui l'a transmise à la Commission des pétitions. Cette commission l'a traitée lors de ses séances des 7 et 14 juin 1999 sous la sympathique présidence de M. Louis Serex, le procès-verbal étant rédigé de la plume de Mme Pauline Schaefer.

La teneur de la pétition est la suivante :

Pétition(1248)

« pour sauver cette planète : arrêtez cette pollution affreuse ! »

Mesdames etMessieurs les députés,

Pour sauver notre terre :

Il ne faut plus détruire les forêts parce que nous ne pourrons plus respirer et beaucoup d'espèces d'animaux disparaîtront.

Arrêtez de détruire les forêts !

Il ne faut plus que les pétroliers lâchent le pétrole dans les mers.

Arrêtez de détruire les mers et les océans !

Les voitures polluent aussi beaucoup et il faudrait que par famille il n'y ait qu'une voiture : utilisez des patins à roulettes, des vélos, j'aimerais bien qu'il y ait à nouveau des carrosses et des chevaux.

Arrêtez de rouler pendant la nuit !

Ne réparez pas votre frigo tout seul, allez poser vos piles, plastiques, papiers, PET, etc. aux endroits prévus.

J'ai 10 ½ ans, je m'appelle Anaïs et je ne veux pas que la planète devienne une poubelle.

N.B. : 590 signatures

Mlle Anaïs Stitelmann, p.a. Mme Catherine Clastres, logopédiste ARLD11, rue Jacques-Dalphin, 1227 Carouge

Travaux de la commission

Audition de la pétitionnaire, Mlle Anaïs Stitelmann, assistée de Mme Catherine Clastres, logopédiste (7 juin 1999)

La pétitionnaire est une enfant de 10 ans, domiciliée à Carouge et fréquentant l'école des Allobroges. Elle vient accompagnée de sa logopédiste chez qui elle suit un traitement pour des difficultés d'apprentissage de l'écriture. Cette logopédiste a aidé Anaïs à mettre ses idées par écrit et à rédiger le texte de sa pétition, pensant que cela était un bon exercice pour elle tout en lui permettant d'exprimer ce qui lui tenait à coeur et qui la préoccupait depuis plusieurs mois.

Anaïs nous explique qu'elle a été sensibilisée à la pollution de diverses manières :

via des émissions de télévision, en particulier sur la problématique de la mer et des pétroliers qui déversent leur contenu dans les mers ;

par son propre vécu d'enfant qui vit en ville et qui souffre des odeurs d'émanations de gaz de voitures et par le bruit qu'elles font en circulant dans les rues la nuit ;

par des lectures de livres en autodidacte.

Elle précise que ces sujets n'ont pas été abordés à l'école mais qu'elle en a parlé à ses camarades de classe qui ont trouvé cela « bête », contrairement à son maître d'école.

Discussion (14 juin 1999)

L'ensemble de la commission a été touchée par le jeune âge de cette pétitionnaire et par son sens démocratique précoce. Il y a eu une discussion nourrie au sujet de sa minorité et de ses droits civiques en tant que mineure, mais le président de la commission nous a tous rassurés en citant un extrait de la page 30 du fascicule sur le Droit de pétition, daté de 1986, chapitre III, procédure pour l'examen des pétitions adressées au Grand Conseil qui dit dans son article 1 que « l'auteur peut être Suisse ou étranger, majeur ou mineur ».

Cette enfant exprime clairement des inquiétudes et des angoisses qui sont partagées par nombre de gens, citoyens, députés, groupements et militants écologistes. Preuve en est les nombreuses lois genevoises qui visent à protéger nos arbres et nos forêts, à encourager le recyclage des déchets ou les dimanches sans voiture. Certaines lois sont anciennes, d'autres récentes, d'autres encore en cours d'élaboration. Toutes attestent du fait que nombre de députés sont conscients et préoccupés par les problèmes de pollution, ne serait-ce qu'à l'échelle cantonale.

Plusieurs commissaires ont relevé le fait que la pétitionnaire n'ait pas pu aborder ses soucis écologiques dans le cadre scolaire. Ces députés pensent que l'école devrait transmettre plus d'informations dans le domaine de l'environnement, de l'écologie et de la pollution, ceci afin de sensibiliser les enfants à ces problématiques présentes à l'échelle planétaire. L'intention serait d'attirer leur attention sur les gestes de la vie quotidienne qui permettent de préserver et de protéger l'environnement. Cette prise de conscience des enfants pourrait même motiver leurs parents à en faire autant. Une commissaire a cité dans ce sens une expérience communale de sensibilisation à la déchetterie qui avait conduit à l'élaboration avec les élèves de l'école d'un film vidéo intitulé « Billy au pays du recyclage », expérience très enrichissante qui pourrait être développée sur le plan cantonal.

Vote

Afin d'encourager ce type de démarche démocratique précoce et de la prendre au sérieux, et afin de transmettre au Conseil d'Etat les préoccupations écologiques de nos concitoyens, la majorité de la Commission des pétitions a voté le renvoi au Conseil d'Etat par 9 oui (2 AdG, 1 R, 1 L, 3 S, 2 Ve) contre 3 non (1 R, 2 L) et une abstention (1 DC).

Nous vous proposons donc, Mesdames et Messieurs les députés, de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

Débat

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Au-delà de ce que cette pétition a de touchant, puisqu'elle émane d'une petite fille de 10 ans, pleine d'enthousiasme et de naïveté - naïveté apparente qui n'exclut pas une grande clairvoyance - il faut remarquer qu'elle pose des questions fondamentales comme un nombre croissant d'êtres humains se les posent. Cette enfant n'a pas puisé ses idées à l'école, mais dans ses lectures. Ce sont ses réflexions personnelles. Pour ceux qui ne l'auraient pas lue, il s'agit de sauver cette planète en arrêtant la pollution affreuse qui nous entoure.

Je m'adresse à la présidente du département de l'instruction publique pour lui faire part de quelques réflexions. Cette petite fille nous fait part de ses préoccupations sur la situation en matière de pollution et sur les problèmes écologiques. Elle nous dit que ses camarades de classe ont jugé que ses préoccupations étaient bêtes et qu'elle n'a pas eu d'informations à ce sujet à l'école. Ses réflexions personnelles et ses lectures l'ont amenée à faire cette démarche.

En commission nous nous sommes inquiétés de cet état de fait et cela nous a confortés dans une idée que nous avons déjà depuis quelque temps - en tout cas, nous les Verts : l'information est lacunaire en matière d'écologie à l'école. Vous hochez la tête, Madame la présidente... Je sais qu'il est difficile d'interférer dans les programmes, les horaires, les groupes pédagogiques, je pense pourtant qu'il est nécessaire de faire quelques efforts. Je le répète, il y a très peu d'informations fournies à ce sujet, que ce soit au niveau de l'école primaire ou du cycle. Cela dépend des enseignants. Certains, passionnés par l'écologie, vont évoquer le sujet, mais la majorité - il faut bien le reconnaître - n'en parle pas.

Je tenais à vous indiquer cette voie et nous espérons qu'elle sera suivie.

Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons bien entendu accueillir cette pétition.

Toutefois, quelque chose me dérange dans le fonctionnement de la commission des pétitions. On prend effectivement l'habitude de traiter les sujets en commission sans permettre à l'autorité concernée de donner sa position, éventuellement de prendre connaissance de certains faits, ou même de fournir quelques informations. Alors, je suis bien d'accord que tout n'est pas parfait, mais le département de l'instruction publique comporte un service de l'environnement !

Je me suis rendue sur le terrain avec mon collègue Cramer, il n'y a pas très longtemps, pour voir comment sont donnés les cours, notamment en collaboration avec le service de l'énergie et M. Genoud. Je peux vous affirmer que la volonté est là et que ce créneau se développe, même si je suis consciente que ce n'est pas encore suffisant. Mais si j'avais eu l'occasion d'être auditionnée, j'aurais au moins pu vous donner un aperçu des actions qui sont menées et j'aurais pu prendre connaissance des endroits où l'on ne donne pas encore ces cours, ce que je ne sais toujours pas aujourd'hui... Cette pétition étant renvoyée au Conseil d'Etat, vous aurez un rapport à ce sujet.

Mais il me semble injuste de prétendre que nous ne nous préoccupons pas de ce problème ! Il est toutefois juste d'affirmer que les choses dépendent parfois de la conviction des enseignants et de penser que les choses peuvent être améliorées.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande formellement d'avoir des égards pour les conseillers d'Etat et de bien vouloir vous intéresser à ce qu'ils ont à dire en les auditionnant lorsque vous traitez des pétitions qui concernent leur département. Sinon, nous prenons connaissance des sujets en séance plénière ! (Applaudissements.) 

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.