République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7606
9. Projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit extraordinaire destiné à l'étude de la réalisation, du financement et de l'exploitation d'un réseau de chauffage à distance CADIOM. ( )PL7606

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit :

Article 1

Un crédit de 1 000 000 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour couvrir les frais des études liées à la construction, au financement et à l'exploitation d'un réseau de chauffage à distance par des tiers investisseurs.

Art. 2

L'utilisation du crédit est liée au résultat des études de faisabilité. En cas de réalisation du projet, les frais des études seront couverts par les tiers investisseurs.

Art. 3

Ce crédit ne figure pas au budget d'investissement 1997. En cas de non-réalisation du projet, il sera comptabilisé sur la rubrique 58.01.00.508.01.

Art. 4

Le financement de ce crédit est assuré par le recours à l'emprunt, dans les limites du plan directeur fixant à environ 250 millions de francs le maximum des investissements annuels, dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 5

L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur résiduelle et est porté au compte de fonctionnement.

Art. 6

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, du 7 octobre 1993.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Ce projet de loi a pour objectif de mettre à disposition un montant de 1 000 000 F destiné à couvrir les frais d'étude pour la réalisation, le financement et l'exploitation d'un réseau permettant de conduire la chaleur résultant de l'incinération des ordures ménagères aux Cheneviers pour alimenter la région d'Onex ; projet portant le nom de CADIOM (Chauffage A Distance à partir de l'Incinération des Ordures Ménagères).

Cette étude de détail comportera l'inventaire exhaustif de toutes les étapes et de leurs solutions de nature technique, juridique et administrative permettant d'aboutir à un cahier des charges d'appel d'offres public pour le choix d'un groupe pluridisciplinaire assurant, sur la base d'un contrat de concession, le financement, l'exécution, l'exploitation et la gestion complète de CADIOM.

Ce projet de loi s'inscrit dans une structure de réalisation et d'exploitation tournée vers le partenariat.

Les frais de cette étude seront à charge de ses auteurs pour autant que les conditions économiques soient favorables à l'engagement du projet et que ceux-ci soient au bénéfice de la concession.

Bref rappel historique

Lors du vote du crédit de construction des Cheneviers III, le Grand Conseil avait demandé qu'un concept de récupération d'énergie soit étudié avec une possibilité de se raccorder sur un réseau de chauffage à distance.

En 1988, un groupe de travail chargé de l'élaboration du concept, composé de représentants des Services industriels de Genève (SIG) et des départements concernés à l'époque par ce projet, engageait ses travaux.

L'idée sous-jacente consistait à réaliser une liaison par conduites enterrées transportant de l'eau chaude entre l'usine des Cheneviers (UIOM) et la chaufferie du Lignon, propriété des SIG, et de pouvoir ainsi relier celle-ci à l'infrastructure existante du chauffage à distance (CAD), exploité par les SIG.

Lesdites conduites traverseraient la région Onex-Lancy, ce qui permettrait de faire bénéficier ces zones fortement développées de la chaleur ainsi transportée par la conduite.

En 1991, le groupe de travail rendait une étude technico-économique qui démontrait la faisabilité de ce projet. Cependant, cette première étude relevait que l'équilibre financier ne pourrait être obtenu qu'avec un investissement de l'Etat d'au moins 50 millions de francs dans le scénario le plus réaliste. Le solde, soit environ 17 millions de francs investis par les SIG, serait rentabilisé par la vente de la chaleur.

Malgré l'intérêt remarqué de ce projet, tant pour la politique énergétique que pour celle de l'environnement, la situation financière de l'Etat ne permettait pas un investissement de cette importance.

Il est à noter que l'office fédéral de l'énergie (OFEN), à qui le projet avait été présenté, s'était engagé à apporter une contribution financière voulant souligner l'importance qu'il accordait à ce concept.

En 1995, le département des travaux publics et de l'énergie (DTPE) a rouvert ce dossier à la lumière, en particulier, de nouvelles techniques de réalisation de réseau de distribution de chaleur.

Ce réexamen a permis de mettre en évidence, dans l'étude initiale, une surestimation des coûts, en général, et, plus particulièrement, en ce qui concerne le réseau. Pour ce dernier, une réévaluation des investissements pour la conduite à distance conduisait à une diminution de l'ordre de 8 à 10 millions de francs.

En 1996, dans le cadre du projet de restructuration de l'usine des Cheneviers, considérant la nécessité de revoir et d'améliorer la valorisation de l'énergie produite par l'entreprise, le département de l'intérieur, de l'environnement et des affaires régionales a donné un total appui et une nouvelle impulsion au projet CADIOM allant dans le même sens que le DTPE.

CADIOM représente, en effet, l'une des solutions possibles à envisager pour l'utilisation de l'énergie thermique inutilisée jusqu'ici et qui constitue une charge importante pour le milieu naturel, par le réchauffement des eaux du Rhône qu'elle occasionne.

Pour le Conseil d'Etat, comme pour l'entreprise, dont le régime juridique évolue vers un statut d'autonomie, la mise en valeur de la chaleur produite constitue à la fois une mesure de politique environnementale visant la sauvegarde du milieu naturel et une opération de portée économique, procurant au futur établissement une recette supplémentaire contribuant à l'allégement de ses charges financières.

En septembre 1996, le Conseil d'Etat était saisi des résultats d'une étude de faisabilité extraite d'une analyse de plusieurs variantes. Ce nouveau projet privilégiait la solution d'une conduite d'une puissance de 60 MW reliant l'usine des Cheneviers à la cité nouvelle d'Onex. Ce choix était effectué sur la base de deux contraintes prioritaires :

1. le prix de revient de la chaleur;

2. les délais de réalisation;

Cette nouvelle variante, qui ne comprend pas la liaison Onex - Le Lignon, pourrait être réalisée dans des délais relativement courts particulièrement imposés par la vétusté des installations de chauffage actuelles et par l'avancement du projet d'urbanisation à Cressy, situé à proximité du tracé de la conduite.

Dans une première étape, les raccordements des bâtiments de la cité nouvelle d'Onex seraient réalisés à hauteur de 30 MW. Cette puissance couvrirait la demande d'une partie des immeubles. Dans un deuxième temps, et afin d'utiliser la pleine capacité de l'installation, des contrats supplémentaires pourront être établis jusqu'à concurrence de 60 MW.

Il est intéressant de relever que cette solution permettrait d'avoir un prix de la chaleur à l'entrée d'Onex attractif.

Suite des travaux

Fort des résultats de l'étude de faisabilité précitée, le DTPE a choisi de confier la suite du programme comportant l'étude de réalisation et l'analyse des modalités de mise en place des structures de financement et d'exploitation à un groupe pluridisciplinaire réunissant des compétences et expériences dans les domaines de la conception des systèmes énergétiques, de la construction de réseaux de distribution de chaleur, de l'exploitation et de la maintenance d'installations thermiques, de financement de projets d'infrastructures, enfin de structuration juridique de projets.

Le choix de ce mandataire sera fait à partir d'un ensemble de groupes pluridisciplinaires dits «préqualifiés» ayant été préalablement retenus sur la base des qualités présentées et du montant annoncé par chacun d'eux pour réaliser l'étude demandée.

A cet effet, le département a fait paraître durant le mois de février un avis de préqualification (annexé).

Au total, douze groupes structurés ont répondu à l'avis de préqualification. Parmi ces dossiers, neuf ont été retenus en tant que préqualifiés.

Il leur est actuellement demandé de procéder à une évaluation du coût global de l'étude, laquelle devrait prendre en compte toutes les données du problème, à savoir notamment :

- la puissance disponible à l'usine des Cheneviers;

- la fiabilité de la production de chaleur;

- les conditions de fourniture de la chaleur au réseau par l'usine des Cheneviers;

- le «gisement» des chaufferies raccordables à l'intérieur du périmètre de distribution ;

- les conditions de raccordement en fonction de l'état et de l'âge des chaufferies;

- la nature des contrats avec les consommateurs et la structure des tarifs;

- l'état foncier des terrains concernés pour le choix et les conditions du tracé;

- les lois et règlements en vigueur et en usage concernant, par exemple, le report, en tout ou partie, sur les charges locatives, du coût facturé de la chaleur consommée.

Le crédit requis est conditionnel, car il sera demandé au groupe préqualifié retenu de préfinancer les études faisant l'objet du présent projet de loi. A l'issue des études, si la démonstration de la faisabilité tant économique que technique est faite et que le projet CADIOM est confié à un groupe pluridisciplinaire pour sa réalisation, les frais d'études seront pris en charge par le groupe pluridisciplinaire et intégrés au projet. A défaut, la présente demande de crédit devra permettre d'indemniser le groupe pluridisciplinaire préqualifié ayant effectué les études.

Quelques données techniques et environnementales

La puissance thermique actuellement disponible à l'UIOM pour le projet CADIOM (2 fours d'ordures ménagères en service permanent - fours 5 et 6) est d'environ 30 MW.

La fourniture de cette chaleur pour alimenter le réseau CADIOM implique une diminution de la puissance électrique d'une des turbines à vapeur de l'UIOM de l'ordre de 7,3 MW El. en régime de pointe.

A ce jour, les installations ont été réalisées à l'intérieur de l'UIOM afin de pouvoir mettre à disposition de la chaleur pour CADIOM.

Les quantités d'hydrocarbures substituées par la chaleur récupérée de l'UIOM pourraient atteindre environ 13 000 TEP ou 16 millions de litres de mazout par an, ce qui correspond à la consommation d'environ 23 000 habitants pour le chauffage et la production d'eau chaude sanitaire.

Il va sans dire qu'il résulterait d'une telle diminution de consommation une réduction importante des quantités de substances polluantes émises dans notre environnement, notamment sous la forme de dioxyde de carbone (CO2), d'oxydes d'azote (NOx) et de dioxide de soufre (SO2).

On peut relever également une diminution très sensible des rejets de chaleur, c'est-à-dire une diminution de la pollution thermique de l'air et de l'eau.

Conclusion

Compte tenu de l'intérêt de ce projet pour les politiques énergétique et environnementale de notre canton, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de l'accueil que vous réserverez à ce projet.

Annexe : avis de préqualification au projet CADIOM.

ANNEXE

9

Préconsultation

La présidente. Je vous en prie, je ne peux pas taper la cloche et parler simultanément, alors soyez un peu plus silencieux !

Ce projet de loi traite d'énergie et, pour ma part, j'en déploie beaucoup !

M. Chaïm Nissim (Ve). (Tollé dans la salle.)

La présidente s'adressant à l'assemblée. Etes-vous contents de vous ?

Des voix. Oui !

La présidente. Eh bien, je ne vous félicite pas !

Une voix. Oh !

M. Chaïm Nissim. Merci, Madame la présidente ! Je ne vous prendrai que 30 secondes, Mesdames et Messieurs les députés ! Je n'ai pas beaucoup parlé ce soir...

La présidente. ...alors, je chronomètre, car c'est rare ! (Rires.) En avant, c'est parti !

M. Chaïm Nissim. Ce projet, prétendument écologique, ne l'est pas ! En effet, lorsqu'on le compare avec celui de deux couplages chaleur/force à Onex et éventuellement un troisième au Lignon, on constate que, d'une part, il est beaucoup plus cher et, d'autre part, plus centralisé. Il diminue notre autonomie en matière d'électricité, puisqu'il va aboutir à une baisse de la puissance produite, au lieu de générer une augmentation dans le cas des couplages chaleur/force. Ce projet est moins décentralisé, plus polluant. Pour ces raisons, nous le refuserons !

Une voix. Très bien !

La présidente. Vous le refusez !

Mme Janine Berberat (L). Formellement, et en application à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat, ce projet de loi devrait être renvoyé à la commission des travaux. Mais, compte tenu qu'il est essentiellement question d'énergie, que la commission connaît bien ce sujet, qu'elle a pris un peu d'avance et souhaiterait poursuivre ses travaux et, surtout, vu l'urgence de ce projet, je vous propose son renvoi à la commission de l'énergie, et j'espère que vous me suivrez dans cette démarche, ceci afin d'accélérer le processus.

Ce projet est renvoyé à la commission de l'énergie et des Services industriels.