République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1060
13. Proposition de motion de MM. René Ecuyer, Gilles Godinat, Christian Ferrazino, Jean Spielmann et Pierre Vanek sur les dysfonctionnements du département des finances. ( )M1060

LE GRAND CONSEIL,

Vu les problèmes de fonctionnement au sein du département des finances;

Vu les graves conséquences qui en résultent en ce qui concerne l'encaissement des impôts indispensables au bon fonctionnement de l'Etat;

Vu les articles 15 et suivants de la loi sur la surveillance de la gestion administrative et financière et l'évaluation des politiques publiques du 19 janvier 1995;

invite le Conseil d'Etat

- à lui présenter un rapport sur la perception des impôts dus pour l'exercice 1995 et le fonctionnement du nouveau système informatique de l'administration fiscale;

- charge la commission externe d'évaluation des politiques publiques de contrôler la gestion du département des finances et plus particulièrement du service des taxations de l'administration fiscale et de faire rapport à ce sujet à la commission des finances du Grand Conseil.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le groupe de l'Alliance de gauche avait déposé une motion M 1030 sur les dysfonctionnements au département des finances qui a été débattue lors de la séance du 1er décembre 1995. Cette motion était motivée notamment, mais pas exclusivement, par le retard dans l'expédition des bordereaux d'impôts. A la suite d'explications données par M. Olivier Vodoz en sa qualité de président du Conseil d'Etat et de responsables du département des finances, le Grand Conseil n'avait pas donné suite à cette motion.

Aujourd'hui, notre groupe revient à la charge pour plusieurs motifs. Tout d'abord les rentrées fiscales pour l'exercice 1995 n'ont pas correspondu aux attentes et on peut se demander dans quelle mesure elles n'ont pas été sur-évaluées. D'autre part, le Grand Conseil a le droit de savoir si tous les bordereaux de l'exercice 1995 ont bien été envoyés avant le 31 décembre 1995, ce que certains mettent en doute, et quelle est la part des impôts qui n'a pas pu être encaissée en 1995 en raison du retard dans la notification des bordereaux.

D'autre part, il s'avère que les erreurs commises par le service de taxation sont multiples. L'expédition des déclarations d'impôts pour l'exercice 1996 s'est faite tardivement. Les réclamations de contribuables sont nombreuses, comme cela pouvait être constaté par de longues files d'attente dans le bâtiment de l'administration fiscale. Le système informatique de l'administration fiscale ne fonctionne toujours pas correctement et il nous a été rapporté qu'il y aurait pour 6 millions de matériel informatique inutilisé dans les sous-sols du bâtiment précité. Est-ce exact ?

Enfin et surtout le nombre des contrôleurs fiscaux - moins de l0 fonctionnaires sans directeur ! (alors qu'ils étaient au nombre de 15, avec un directeur il y a 25 ans) - est manifestement insuffisant et le contrôle des déclarations fiscales se fait d'une manière superficielle, ce qui ne peut qu'encourager certains fraudeurs. Plusieurs communes se plaignent de ne pas pouvoir obtenir des éclaircissements sur le montant des recettes fiscales qui leur ont été attribuées et se trouvent dans l'impossibilité de présenter leurs comptes pour l'exercice écoulé et d'établir leur budget pour 1996.

Il y a indiscutablement des problèmes de dysfonctionnement au département des finances et il nous semble indispensable, au moment où l'on parle d'une gestion plus efficiente de l'Etat, que celle du département des finances fasse l'objet d'un examen de la part de la commission externe d'évaluation des politiques publiques créée précisément pour des missions de ce type. A ce sujet, il serait intéressant de connaître les missions qui ont été confiées à cette commission depuis sa création et leur résultat, le Grand Conseil n'ayant reçu aucun rapport à ce sujet.

Nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que cette motion recevra bon accueil de votre part.

Débat

M. René Ecuyer (AdG). Quand nous signalions, il y a quelques mois, les dysfonctionnements du département des finances, nous avions l'impression de parler dans le désert ou d'exagérer, voire de fabuler !

Les problèmes que nous soulevions - et que nous continuons à soulever - ont été trop souvent minimisés par le département et parti-culièrement par M. Vodoz.

On laissait entendre que nous ne parlions que de problèmes isolés ou exceptionnels. On nous disait, par exemple, que les retards dans l'envoi des bordereaux étaient imputables à la mise en route d'un système informatique auquel il fallait s'habituer.

Force est de reconnaître que les problèmes sont plus graves : on a eu tort de minimiser et de relativiser les difficultés rencontrées. Le département a agi avec trop de précipitation en introduisant un système informatique aux conséquences désastreuses pour un grand nombre de contribuables.

Ce changement de système a grandement modifié les habitudes des contribuables, ainsi que celles des taxateurs et du personnel de l'administration fiscale. La principale conséquence de cette précipitation - j'insiste sur le terme «précipitation», étant convaincu qu'il fallait agir avec plus de réflexion - fut la désorganisation de nombreux budgets familiaux. En effet, quand une taxation attendue en juin est expédiée, accompagnée d'un supplément, en fin d'année, il faut sacrifier le pécule perçu à cette époque pour payer le supplément d'impôt ou solliciter un délai.

Par ailleurs, nous avons souvent attiré l'attention du Conseil d'Etat sur les erreurs de taxation. Là encore, on nous a affirmé qu'il s'agissait de cas isolés. Or voici les documents d'une cinquantaine de cas que nous avons traités dans un office social pour la période d'octobre à fin novembre, ce n'est pas rien ! Le canton a voulu privilégier quelque peu le revenu AVS, mais si l'on oublie de signaler la déduction autorisée, qui peut être de l'ordre de 6 000 à 10 000 F, la hausse de la taxation sera importante.

J'ai aussi des exemples d'omission de la déduction de 10% prévue sur la prévoyance professionnelle, également considérée comme un revenu privilégié. Cette omission a lieu parce que le système prévoit des pages spécifiques et des reports, la feuille Z servant de récapitulatif. Vraisemblablement, l'administration fiscale n'a pas pensé que ces formulaires de déclaration étaient incompréhensibles pour beaucoup de gens. Dans la liste des oublis, citons les déductions sur la fortune; les cotisations d'assurance-maladie qui représentent environ 8 000 F par an pour une famille; les déductions sur le troisième pilier. On a même constaté la présence de revenus fantômes... Tout à coup, on repère 10 000 F en trop, on procède à une vérification et l'on découvre une erreur de taxation !

Les contribuables n'ont plus confiance en l'administration fiscale; ils se demandent ce qui s'y passe. Fort heureusement, beaucoup sont avertis du montant relatif de leurs impôts par les fiduciaires et les services sociaux qui remplissent leur déclaration.

Au vu de tant de taxations surfaites, voire abusives, nous étions obligés d'intervenir, et nous avons constaté des erreurs énormes. Prenons pour exemple la déduction personnelle, automatiquement intégrée dans le barème actuel, et qui représente 10 383 F pour une personne seule et 20 662 F pour un couple. Si elle n'est pas déclarée, imaginez la taxation ! En effet, ces déductions personnelles, ces déductions pour les couples et les enfants, ne sont pas des cadeaux. Dès lors, il ne faut pas minimiser l'attitude d'une administration qui omet de remédier aux oublis des contribuables.

Ces cas ne sont pas exhaustifs, ils ne concernent que les mois d'octobre et de novembre. Il y en a d'autres en décembre, janvier et février. Les taxations provisoires - nombreuses en raison des dysfonctionnements informatiques - ont été suivies de taxations définitives incorrectes.

Confrontés à cette situation, les gens sont interloqués, car, pour eux, l'administration fiscale est infaillible. Aussi supposent-ils avoir mal rempli leur déclaration. De ce fait, une majorité silencieuse a acquitté des taxations surfaites...

Une voix. Et ceux qui ont reçu des taxations inférieures ?

M. René Ecuyer. Il y en a eu certainement ! Je suppose qu'ils sont assez nombreux, et que l'Etat a perdu de l'argent.

Néanmoins, le problème demeure, et il faut absolument le résoudre. Je répète que le citoyen, en général, n'imagine pas que l'administration puisse se tromper. On peut en discuter avec les personnes qui viennent à l'AVIVO, mais beaucoup n'ont pas le réflexe de venir nous trouver. Elles s'imaginent s'être trompées, et qu'elles doivent payer 1 200 F au lieu de 200 F.

Le département a fait une erreur d'appréciation en introduisant au plus vite un nouveau système de taxation. Il n'était pas mûr pour se lancer dans une telle opération. La preuve en est fournie par les taxations 1996 erronées qui parviennent en ce moment aux contribuables.

Je reconnais que l'administration a toujours été compréhensive quand nous lui prouvions qu'elle s'était trompée dans des taxations pour l'exercice 1995. Les erreurs ont été corrigées. Mais le problème, pour 1996, est que les contribuables doivent acquitter des acomptes mensuels calculés sur la base de la taxation erronée de 1995. Alors non seulement nous intervenons pour faire rectifier les taxations 1995 mais aussi pour faire modifier le montant des acomptes mensuels de 1996. Et cela concerne uniquement les personnes qui se sont aperçues de la surtaxe de leurs revenus ! Les autres ont acquitté une augmentation d'autant plus injuste que la population avait été informée qu'il n'y aurait pas de hausse d'impôts en 1995.

Il nous faut tirer des conclusions de cette affaire minimisée à tort. Reconnaissez, Monsieur le président Vodoz, qu'il y a de la gabegie, et qu'il faut l'éliminer...

Une voix. On a compris !

Le président. Concluez, Monsieur le député !

M. René Ecuyer. J'y arrive ! Nous demandons, dans notre motion, de mandater la commission externe d'évaluation des politiques publiques, car nous attendons un examen objectif du fonctionnement de l'administration fiscale et la solution des problèmes qui préoccupent de nombreux contribuables. Il faut absolument rétablir la confiance, et que chacun paie son dû sans avoir le sentiment d'être «arnaqué» !

Mme Christine Sayegh (S). Il est vrai que nous rencontrons de nombreux problèmes au sein de l'administration fiscale, notamment au niveau de la taxation. Ceci engendre des difficultés tant pour les contribuables que pour l'administration. En effet, les taxateurs reconnaissent que le système informatique, nécessitant diverses manipulations, n'est pas au point, puisqu'il ne traite que vingt déclarations par jour au lieu des soixante prévues ! Les erreurs de taxation sont nombreuses. Beaucoup de taxations provisoires deviennent définitives avec le temps; des contribuables sont taxés à la place d'autres, les formulaires détachables ayant été confondus.

Pour remonter à l'origine de ces dysfonctionnements, des questions doivent être posées, des problèmes doivent être examinés.

Nous estimons que la commission fiscale est la plus à même pour commencer ce travail. C'est pourquoi notre groupe vous propose de lui renvoyer cette motion.

M. Jean Spielmann (AdG). J'estime qu'il ne suffit pas de renvoyer cette motion à la commission fiscale, et je vais m'en expliquer.

Si l'on compare l'infrastructure du service des impôts, quand il était établi à la rue Fazy, à la structure actuelle, et si l'on compare le nombre de contribuables de l'époque avec celui d'aujourd'hui, on prend conscience de développements disproportionnés.

De la rue Fazy, le service des impôts s'est déplacé dans un bâtiment de cinq étages, aux Eaux-Vives, avant de s'installer à la rue du Stand, dans un hôtel des finances doté d'un immense appareil administratif au sujet duquel il faut s'interroger. Comment fonctionne-t-il ? Comment les contribuables perçoivent-ils l'efficacité des services publics ? Le problème revêt trois aspects, le premier étant celui que je viens de présenter.

En effet, il nous faut étudier le fonctionnement de l'administration fiscale qui débouche sur une sorte d'auto-alimentation : les multiples feuilles d'impôt, les modifications qui interviennent chaque année et que beaucoup de gens ne comprennent pas, le traitement automatique des déclarations avec le programme Excel, lequel ne cesse d'être adapté du fait des nouvelles dispositions et numérotations des feuillets. C'est un fatras administratif gigantesque et inutile.

L'informatique est le deuxième aspect du problème. Nous devons en débattre de manière constructive, sans se renvoyer les responsabilités et sans les faire porter aux fonctionnaires et aux responsables du département. Il y a quelques années, on a décidé, au niveau de l'Etat, de mettre en route un système informatique extraordinairement compliqué : le RDBC, avec la volonté d'en faire un système «propriétaire». Cette machine a été déclarée inutilisable, bonne pour la ferraille, après les tentatives des spécialistes, durant cinq ou six ans, pour la faire fonctionner ! Elle n'a rien produit pendant tout ce temps ! Alors, pourquoi et comment est-il possible qu'une administration en arrive à développer un tel système ? Pourquoi n'est-elle pas capable, ou en mesure, de se doter d'un instrument informatique qui permet simplement de faire des projections, des déclarations fiscales, pour que chacun reçoive les papiers auxquels il a droit, afin de s'acquitter normalement de ses impôts ? Compte tenu de la situation actuelle, ces questions sont légitimes.

L'incompréhension des citoyens constitue le troisième aspect du problème. Je dispose de multiples exemples, basés sur dossiers, mais je n'en citerai que deux.

Une modeste rentière AVS nous a présenté la copie de sa déclaration simplifiée - j'ignore ce qu'on entend par là, car il faut trouver le feuillet correspondant, le décoder, le remplir et en récapituler le contenu ! Cette personne, qui ne payait pratiquement pas d'impôts depuis des années, a reçu un chèque de 10 000 F de l'administration fiscale ! Elle s'est rendue à l'hôtel des finances - qui n'entreprendrait pas une telle démarche en recevant pareil cadeau du fisc ! - où on lui a dit d'écrire, de recourir... bref, de se plier à tout un fatras administratif, alors qu'il aurait été si simple de la remercier, de lui demander d'excuser cette erreur et de rétablir la situation !

Un autre modeste contribuable s'est vu taxer sur une fortune d'un million de francs, alors qu'il n'avait pas gagné à la loterie ! Il lui a fallu, pour se faire entendre, remplir des papiers, recourir et entrer dans des discussions interminables. D'où l'étonnement, puis l'exaspération bien compréhensible des citoyens !

Ce troisième aspect du problème englobe, en fait, les deux premiers : le citoyen qui acquitte ses impôts - même s'il a beaucoup de peine à remplir les nouveaux feuillets si «pratiques» - est en droit d'exiger de l'administration fiscale qu'elle fonctionne correctement. Et en tant que députés, nous avons le devoir de poser ces trois questions :

1. Pourquoi un tel «gonflement» administratif pour effectuer, souvent mal, le travail qui se faisait dans le petit bâtiment d'en face, il y a quelques années ?

2. Pourquoi avoir acquis un système informatique si compliqué qu'il n'a servi à rien ? Qu'envisage-t-on pour remédier à la situation présente ?

3. Comment rendre plus efficaces le service public et l'administration fiscale au niveau de la taxation ? C'est indispensable pour assurer les recettes de l'Etat et rétablir la confiance des contribuables.

Il en va de la responsabilité de ce parlement de nommer une commission de gestion pour résoudre ces problèmes et établir un rapport. Je doute, en effet, que la commission fiscale soit à même d'entreprendre des investigations.

Pour travailler d'une manière efficace, les fonctionnaires concernés doivent être rassurés et motivés. Il n'est tout de même pas impossible d'organiser un service moins compliqué que le service actuel où plus personne ne se retrouve et ne retrouve rien ! Cela ne peut plus continuer ! Il faut résoudre les problèmes et ouvrir de nouvelles perspectives.

Voilà la motivation de notre motion. Tout le monde aura compris la nécessité de nommer une commission de gestion pour l'étudier et nous rendre son rapport.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Contrairement à ce que vous affirmez, Monsieur le député Ecuyer, je n'ai jamais minimisé les soucis et les difficultés. D'ailleurs, vous m'en avez donné acte en janvier, quand j'ai parlé, à l'occasion d'une première motion, de nos problèmes et de nos difficultés.

En tant que chef du département des finances, je n'ai guère apprécié la situation générée par les difficultés rencontrées dès l'été 1995. Comme le disait fréquemment un de mes collègues de l'ancienne législature, je me suis «investi personnellement»; j'ai discuté avec les taxateurs et les chefs de service. La loi votée en 1993 devant leur procurer une assistance informatique, le projet a été conçu et préparé avec les utilisateurs de l'administration, ce qui était de bonne politique, et en consultant ATAG, à Lausanne, spécialiste fiscal.

Je vous ai également dit - et cela s'est vérifié a posteriori - que l'introduction du système IAO en 1995 aurait dû être différée jusqu'en 1997 au moins, les années paires étant des années de double taxation, l'impôt fédéral direct venant s'ajouter aux impôts cantonal et communal.

C'est parce que les services de l'administration fiscale ont considéré, d'après les tests opérés, qu'il pouvait entrer en vigueur en 1995 que le nouveau programme d'assistance aux taxateurs a été introduit l'an dernier.

Je ne reviendrai pas sur les détails déjà expliqués et que nous reprendrons à nouveau en commission. En revanche, il serait bon, Mesdames et Messieurs les députés, qu'outre les contacts que vous entretenez, chaque quinzaine, avec la direction de l'administration fiscale à l'occasion des séances de la commission fiscale, vous rencontriez également les taxateurs et les chefs de service qui s'occupent notamment du secteur de la taxation des personnes physiques.

Assumant pleinement mes responsabilités de chef du département, je me suis excusé auprès des contribuables. Je vous l'ai dit en janvier et l'ai répété à l'occasion d'une interpellation de M. le député Longet : des problèmes de saisie, liés au système informatique et à l'introduction du programme IAO, se sont posés; répercutés sur une chaîne informatique aboutissant à l'émission du bordereau fiscal et de sa mise sous pli, ils ont causé de regrettables erreurs.

J'ai fait arrêter la chaîne à la fin de l'été. Nous avons dû tripler, en conséquence, le nombre des déclarations provisoires pour pouvoir les contrôler ensuite une à une. Nous avons terminé ce travail de contrôle, il y a quelques jours seulement, en ce qui concerne les salariés, sauf les déclarations nécessitant un complément d'information.

Je tiens à rendre hommage ici à mes collaboratrices et collaborateurs de l'administration fiscale - et je remercie M. Ecuyer de l'avoir dit - parce qu'en dépit des surcharges de travail, de l'attitude agressive, souvent légitime, du contribuable protestant au téléphone ou de vive voix, ils ont su rester serviables, même s'ils n'ont pas toujours pu donner satisfaction à chacun. Vous savez que leur métier n'est pas facile. Vous savez aussi que l'administration fiscale genevoise est la plus compréhensive de ce pays. Elle essaie toujours de trouver des solutions.

Parallèlement à l'introduction au 1er janvier 1995 de ce nouveau mode de taxation, est entrée en vigueur, sur le fond, la nouvelle loi sur les barèmes fiscaux, avec la fameuse courbe lisse établie par le professeur F. Carlevaro. Le seuil d'assujettissement n'existant plus, le contribuable ne pouvait pas comparer - et je vous l'avais dit - son bordereau 1995 à celui de 1994. Il pourra le faire avec le bordereau 1996.

Ce cumul de problèmes allié au fait - et nous en avons été remerciés - d'avoir introduit deux déclarations simplifiées, de couleur différente, l'une pour les retraités qui n'ont que leur pension et l'autre pour les salariés sans fortune, a certainement également perturbé les contribuables, et je m'en suis aussi excusé.

Des solutions, basées sur les diagnostics posés en fin d'année, ont été trouvées pour garantir une taxation 1996 dans les meilleures conditions possibles. J'ai arrêté des décisions dans ce sens qui sont entrées en force. Afin d'exercer un double contrôle, les taxateurs travaillent d'abord sur papier, la saisie provisoire a lieu ensuite. Si la machine aboutit à un autre résultat, le bordereau est automatiquement rejeté.

Toutes ces turbulences, qui ont débuté en été 1995, se résorbent, certes, mais lentement. Elles se sont répercutées sur toutes les chaînes, et, comme je l'ai dit à M. le député Longet, elles ont faussé un grand nombre d'acomptes provisionnels, mais ils ont tous été corrigés. Ces erreurs ont également affecté les décomptes des feuilles d'assurance-maladie et des surtaxes HLM.

L'administration fiscale est accusée, à tort, d'un autre élément perturbateur : l'inscription du lieu de travail. Or je vous rappelle que le service de la taxation se base sur les certificats de salaire émis par les employeurs. Compte tenu des déplacements des «back office» entre la ville et les communes suburbaines, bon nombre de sociétés ont inscrit «lieu de travail : ville de Genève», alors qu'elles se situent à Lancy, à Carouge, à Vernier, par exemple. Les employeurs ayant été inattentifs, une série de mutations ont dû être opérées. Nous avons écrit à toutes les grandes entreprises pour qu'elles précisent, sur les certificats de salaire, le site exact des postes de travail.

L'administration fiscale travaillant sur la base des données de l'office cantonal de la population, nous avons dû assurer trente-trois mille mutations en 1995.

Tous les problèmes ont été identifiés, et c'est pour vous les expliquer en détail que je souhaite le renvoi de la motion à la commission fiscale. Vous y entendrez les collaborateurs et taxateurs de l'administration fiscale. Vous recevrez un rapport - parce que j'ai demandé un audit, bien entendu ! - d'Arthur Andersen sur IAO. En effet, il faut que nous sachions si IAO est valable ou pas. Selon la réponse, nous continuerons avec ce système ou nous y renoncerons. Je recevrai, d'ici quelques semaines, le rapport Andersen, et je le communiquerai volontiers à la commission fiscale.

Un dernier mot sur la commission externe d'évaluation des politiques publiques. Je n'ai pas d'objection à ce que vous lui renvoyiez la motion ultérieurement. Simplement, à teneur de la loi, ce n'est pas de sa responsabilité. En revanche, il serait utile que vous entendiez son président, M. Delley, et certains de ses membres au sujet de cette motion qu'ils connaissent.

Mais sachez, Mesdames et Messieurs les députés - et je le dis ici à l'attention de la population - que l'administration fiscale met tout en oeuvre, suite aux difficultés rencontrées, pour faciliter la tâche des contribuables, à qui, au nom du département des finances, je réitère mes excuses.

Je vous remercie de renvoyer cette motion à la commission fiscale.

Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission fiscale.