République et canton de Genève

Grand Conseil

I 1902
15. Interpellation de M. Jean Montessuit : Conséquences des lois fédérales sur le libre passage et l'acquisition de la propriété du logement sur les caisses de retraite publiques. ( )I1902

M. Jean Montessuit (PDC). C'est très probablement le 1er janvier prochain que la loi fédérale sur l'encouragement à la propriété du logement entrera en vigueur, au moyen de la prévoyance professionnelle et la loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité. Ces nouvelles dispositions ne seront pas sans incidence sur les caisses de pension des collectivités publiques.

Tout d'abord, l'encouragement à la propriété du logement. En vue d'une saine gestion des liquidités, il serait sans aucun doute utile de procéder à une estimation des futurs retraits en espèces et des mises en gage des prestations. Comme les taux techniques pratiqués par nos institutions de droit public sont largement inférieurs aux taux d'intérêts hypothécaires, on peut penser que les assurés d'ores et déjà propriétaires procéderont à des retraits en espèces pour rembourser tout ou partie de leur dette. Le versement anticipé en espèces entraînant une réduction des prestations de vieillesse ainsi que des rentes de survivants et d'invalidité, le législateur charge l'institution de prévoyance d'offrir elle-même une assurance complémentaire et de faire office d'intermédiaire pour la conclusion d'une telle assurance en matière de décès et d'invalidité.

Quelles mesures nos institutions de prévoyance de droit public ont-elles prévues et quelles sont leurs modalités de financement ? Ce sera ma première question.

L'article 19 de la loi stipulant que les institutions de prévoyance des corporations de droit public ne sont pas autorisées à tenir compte du découvert technique dans les calculs de prestations de sortie, on peut se demander quelles en seront les questions financières, sachant, par exemple, que le degré de couverture des prestations de libre passage est de 40% pour la CIA. Dans les institutions en primauté des prestations, la prestation de libre passage se détermine en fonction de la valeur actuelle des prestations acquises. Compte tenu du fait que ce sont essentiellement les jeunes assurés qui changent d'institution, la solidarité entre groupes d'âge deviendra encore plus coûteuse et la somme des prestations de sortie excédera de manière sensible le montant des prestations d'entrée.

Ce système risque de mettre en cause les modalités de financement des institutions de droit public à terme. Je demande donc au Conseil d'Etat si les conséquences du droit fédéral ont été examinées, et, le cas échéant, quelles sont les conclusions de cette étude.

M. Olivier Vodoz, conseiller d'Etat. Pour ceux qui sont encore là, je pourrais répondre oui et me rasseoir !

Néanmoins, le sujet est suffisamment important et, M. Montessuit ayant eu l'amabilité de me remettre le texte de son interpellation hier à la commission des finances, j'ai pu m'y préparer, avec l'aide de mes collaborateurs. Je vais donc pouvoir vous répondre immédiatement.

Monsieur Montessuit, vous posez des questions relatives aux conséquences des lois fédérales sur le libre passage et l'acquisition de la propriété du logement sur les caisses publiques de retraite.

Alors, permettez-moi tout d'abord de faire une première remarque de nature générale. Si ces deux lois fédérales entrent en vigueur le 1er janvier 1995, les ordonnances d'application ne sont toutefois pas connues à ce jour. Je ne vous cache pas que cela devient problématique, comme pour la TVA, de ne pas connaître encore l'ordonnance d'application qui va imposer à tout un chacun des modifications extrêmement considérables, notamment sur le plan de l'informatique.

En conséquence, il subsiste encore de nombreuses inconnues quant aux modalités pratiques de ces lois. Au surplus, un délai de cinq ans étant laissé aux institutions de prévoyance pour adapter leur réglementation au droit fédéral, cela devrait permettre aux institutions en question de bien mesurer l'impact des nouvelles lois fédérales avant de modifier leurs statuts. Vous devez donc savoir que ce problème est d'ores et déjà examiné dans le cadre des trois caisses de prévoyance de l'Etat de Genève.

J'en viens à votre première question divisée en deux parties sur l'encouragement à la propriété du logement.

A la première partie de votre question, je réponds que l'OFAS a autorisé les caisses de prévoyance à offrir à leurs assurés des prêts hypothécaires à taux préférentiel, au maximum 0,5% de moins que les taux de référence des banques cantonales. De ce fait, de nombreux assurés ont déjà obtenu de tels prêts et c'est la voie que les caisses de prévoyance veulent encourager en mettant toutefois en garde les assurés sur les éléments suivants :

- les conséquences du remboursement au niveau des prestations futures de la caisse;

- sur le fait que, si l'assuré veut effectuer un rachat d'année d'assurance, il devra payer un montant beaucoup plus élevé, le montant du rachat augmentant en fonction de l'âge et de l'évolution des salaires;

- enfin, sur l'obligation de souscrire une assurance invalidité/décès à la charge de l'assuré.

Bien que l'on ne s'attende pas, Monsieur l'interpellateur, à une avalanche de demandes, les études menées sur la congruence entre actifs et passifs des caisses montrent que la gestion des liquidités ne pose pas de problème. Si tel devait être le cas, la caisse peut, de toute façon, différer les demandes de remboursement en capital.

A la deuxième partie de votre question relative à l'encouragement à la propriété du logement, je vous réponds que la conclusion d'une assurance-invalidité/décès est obligatoire et sera entièrement à la charge de l'assuré. Toutefois, les caisses de prévoyance publiques cantonales ne désirent pas procéder elles-mêmes à la couverture de ce risque. Elles veilleront simplement à ce qu'une telle assurance soit conclue auprès d'un assureur autorisé par la loi fédérale.

Votre deuxième question concerne le libre passage. Pour ce qui est du premier élément de cette question, il est vrai que, pour les caisses en répartition, les assurés recevront néanmoins l'intégralité des prestations du libre passage et accession à la propriété, alors qu'une partie seulement de ces prestations est réellement financée. Cette nouvelle norme ne modifie guère la pratique actuelle et cela augmente bien entendu à chaque fois la garantie de l'Etat. C'est la raison pour laquelle nous sommes extrêmement attentifs à cette ordonnance.

Par contre, en cas de sortie d'un groupe d'assurés ayant signé une convention d'affiliation avec la CIA ou la CEH, que l'on appelle des employeurs externes, comme par exemple l'aéroport international de Genève ou l'Hospice général, il faudra, à l'avenir, considérer qu'il s'agit d'une dissolution partielle et, par voie de conséquence, l'employeur externe devra alors verser la différence résultant du déficit technique.

Sur ce point, je peux vous dire que j'ai donné des instructions et suggéré au directeur de la CIA, comme à celui de la CEH, d'écrire à toutes les associations et groupements affiliés externes pour attirer leur attention sur le fait qu'en principe les changements devant intervenir au 1er janvier 1995 leur poseront un certain nombre de problèmes et que, par conséquent, il faut savoir s'ils entendent résilier avant ou après la convention. Pour ma part, j'espère qu'ils ne la résilieront pas, mais ce n'était que justice de les informer de ce fait qui générera des sommes importantes à la charge de la caisse.

Pour la dernière partie de votre question, enfin, je vous indique ce qui suit. Globalement, les prestations de libre passage prévues par les statuts actuels de la CIA et de la CEH ne seront guère modifiées par la loi fédérale sur le libre passage, mais il se peut que les prestations de sortie soient quelque peu améliorées pour les jeunes assurés, sans pour autant remettre en cause les modalités de financement de la CIA et de la CEH. Pour la caisse de police, par contre, il faut s'attendre à une augmentation sensible de toutes les prestations de sortie, dont les conséquences sur l'équilibre financier à long terme devront être mesurées.

Voilà, Monsieur le député, ce que je pouvais vous dire, avant même d'avoir pris complètement connaissance des ordonnances sur l'application de la loi fédérale.

M. Jean Montessuit (PDC). Je remercie M. Vodoz, et je me déclare satisfait de sa réponse !

Cette interpellation est close.

 

La séance est levée à 19 h 30.