République et canton de Genève

Grand Conseil

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RD 1434
Rapport de la commission législative concernant l'application de l'article 113 de la constitution de la République et canton de Genève à l'épidémie du virus Covid-19 et l'examen de l'arrêté du Conseil d'Etat lié à l'état de nécessité (arrêté adopté le 8 octobre 2021)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 11 et 12 novembre 2021.
Rapport de majorité de Mme Danièle Magnin (MCG)
Rapport de première minorité de M. Pierre Vanek (EAG)
Rapport de deuxième minorité de M. André Pfeffer (UDC)
R 980
Proposition de résolution de Mmes et MM. Danièle Magnin, Céline Zuber-Roy, Edouard Cuendet, Diego Esteban, Jean-Marc Guinchard approuvant l'arrêté du Conseil d'Etat du 8 octobre 2021
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 11 et 12 novembre 2021.

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous entamons le programme des urgences de la session. Le premier point réunit le RD 1434 et la R 980, classés en catégorie II, trente minutes. La parole échoit à Mme Danièle Magnin.

Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. La commission législative s'est penchée sur le nouvel arrêté du Conseil d'Etat rendu le 8 octobre 2021. Notre gouvernement a pris la décision de ne pas délivrer de certificat covid aux personnes qui se soumettent à des tests dits ciblés et répétitifs. Le dépistage préventif à large échelle permet de lutter contre la pandémie de covid-19 dans divers domaines et contextes. Ainsi, la possibilité a été donnée aux entreprises et institutions de tester gratuitement leurs collaborateurs de manière régulière. Pour cela, une stratégie cantonale a été mise en place.

Les tests ciblés et répétitifs donneront désormais droit à une attestation, et non à un certificat, dont la validité sera limitée au contexte dans lequel elle est émise, à savoir dans les universités, les hautes écoles ou les entreprises qui ont introduit ce système. Encore une fois, les gens se verront délivrer une attestation, non un certificat. Cela signifie que les étudiants qui seront allés se faire tester à l'université pour suivre des cours le vendredi, par exemple, ne pourront pas se servir du document produit pour aller s'amuser, faire la fête, se rendre au cinéma ou au restaurant, danser en boîte de nuit, cela par souci d'égalité de traitement avec les autres qui, eux, sont obligés de payer leur test de dépistage.

Sur cette base, la majorité de la commission législative a décidé d'accepter cette nouvelle modification par 5 oui, 2 non et 2 abstentions. Les deux votes négatifs font l'objet de rapports de minorité dont je ne vous parlerai pas, les rapporteurs le feront certainement très bien eux-mêmes. Mesdames et Messieurs, la commission législative vous invite à approuver l'arrêté du Conseil d'Etat du 8 octobre 2021. Je vous remercie.

M. Pierre Vanek (EAG), rapporteur de première minorité. Comme l'a expliqué Mme Magnin, les tests ciblés et répétitifs ont été institués par l'alinéa 1 de l'article 11 nouveau qui figure dans l'arrêté du Conseil d'Etat, et ils sont mis en oeuvre en application de la stratégie cantonale de dépistage fixée par le service du médecin cantonal, conformément à l'ordonnance fédérale. Tout ceci est bel et bon.

Toutefois, l'article 11 comporte un second alinéa, et c'est celui-ci qui, à nos yeux, est malvenu, problématique et kafkaïen. Il indique qu'un résultat négatif obtenu dans le cadre d'un dépistage ciblé et répétitif ne donne pas droit à la délivrance d'un certificat covid, mais d'une attestation dont la validité est limitée. Cela veut dire qu'une partie significative de la population genevoise aura été testée, qu'elle aura par ce biais reçu un résultat négatif tout à fait officiel et médicalement reconnu, mais que le document, à teneur de cet alinéa 2 parfaitement arbitraire, ne sera pas pris en compte d'un point de vue administratif pour la remise d'un pass.

Ainsi, une information médicale pertinente existe suite à un testing effectué régulièrement, mais le citoyen, la citoyenne, l'habitant qui s'est prêté à la démarche dans le cadre, je le rappelle, d'une stratégie cantonale de dépistage officielle à laquelle il collabore ne pourra pas faire valoir cette information, c'est-à-dire utiliser une donnée médicale le concernant directement, pour bénéficier d'un certificat covid, lequel n'atteste pourtant pas autre chose que le résultat du test. La personne concernée sera contrainte, par cet alinéa 2 que je propose de supprimer, de réaliser un autre dépistage inutile, matériellement et médicalement superfétatoire, et dont la seule fonction, puisqu'il est privé et payant, est d'embêter les gens pour les pousser à se faire vacciner.

Cela relève d'une logique kafkaïenne: le gouvernement n'ose pas assumer une obligation vaccinale, pas même l'indication claire: «Vous devez vous vacciner», il entretient le mythe de la liberté vaccinale, du libre choix, mais multiplie les brimades et les embêtements à l'égard des personnes qui n'ont pas recours au vaccin. C'est un problème, c'est absurde, ce n'est pas acceptable, et l'idée qu'il y aurait là derrière une quelconque égalité de traitement est insensée. De fait, on détruit une information qui existe, on refuse de l'utiliser, on dit à quelqu'un qui s'est prêté au jeu...

Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe.

M. Pierre Vanek. Oui, sur le temps de mon groupe, volontiers ! ...et qui participe à la stratégie cantonale: «Vous n'avez pas le droit de vous servir de cette donnée, vous êtes prié de repasser dans la file d'attente et de refaire un test.» C'est absurde ! Alors il ne s'agit pas d'une affaire très importante, mais c'est symbolique d'une volonté d'exhorter les gens à la vaccination non par l'encouragement, non par l'application d'une politique publique décidée démocratiquement, basée sur des faits scientifiques, mais par des brimades administratives, ce qui est de nature à susciter et à accroître les résistances.

De ce point de vue là, ce que le conseiller d'Etat nous a dit en commission est inadmissible. Il m'excusera de le citer, mais il considère que les gens qui bénéficient de tests gratuits dans le cadre de la stratégie cantonale de dépistage sont des profiteurs du système s'ils font valoir leur résultat négatif pour obtenir un certificat covid. Des profiteurs ?! On instaure à l'alinéa 1 un processus de dépistage ciblé, répétitif, hebdomadaire pour des raisons de prévention, et ensuite on traite celles et ceux qui collaborent à cette démarche de profiteurs, on leur dit qu'ils ne peuvent pas se servir de l'information obtenue. Encore une fois, c'est absurde !

En ce qui me concerne, j'ai été recruté par l'armée suisse quand j'avais vingt-huit ans - après, ils n'ont plus voulu de moi - et on a pris mes mesures: je faisais un mètre quatre-vingt-trois. Eh bien, toute ma vie, je me suis servi de cette donnée physiologique en en faisant état à différents endroits, à titre médical pour calculer mon BMI dont je vous entretiendrai une autre fois et pour d'autres raisons. Si l'armée avait dit: «Non, cette mensuration constitue un secret militaire, vous n'avez pas le droit de vous en servir», ç'aurait été idiot, et il est tout aussi idiot de refuser que les gens emploient le résultat de leur test pour obtenir un pass covid.

Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, mon rapport contient une proposition d'amendement à la résolution, qui demande au Conseil d'Etat d'abroger l'alinéa 2 de l'article 11 introduit par l'arrêté. Il s'agit d'aller dans le sens que je viens de vous décrire. En vous invitant à faire cela, je ne m'adonne pas à une politique d'extrême gauche particulièrement radicale, puisque c'est la vision même du Conseil fédéral que le Conseil d'Etat n'a pas souhaité suivre. Berne a indiqué: «Les tests doivent servir à délivrer un certificat covid», et le Conseil d'Etat, plus royaliste que le Conseil fédéral, n'a pas voulu s'engager dans cette voie-là. (Applaudissements.)

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Notre collègue M. Pierre Vanek a raison: le Conseil d'Etat ne veut pas imposer la vaccination, mais multiplie les brimades, les contrôles et les interdictions pour forcer les indécis à passer sous la seringue. Les Genevoises et les Genevois sont libres de se faire vacciner ou pas; ils doivent être considérés avec respect, et non manipulés. Cette manière de traiter les citoyens est inacceptable. Notre gouvernement confond situation d'urgence nécessitant des mesures exceptionnelles pour sauver des vies et politique politicienne visant à inciter ou à contraindre tel ou tel à adopter certains comportements.

Deuxième problème: la gabegie et les incohérences de gestion. En effet, il existe des règles différentes pour les transports publics, les restaurants, les lieux publics, les réunions politiques; il existe des contrôles différents pour les restaurants, les écoles, les lieux publics; enfin, il existe même des sanctions différentes: amendes pour les restaurateurs, rien pour les lieux publics, etc.

Il faut également relever les multiples déclarations contradictoires du Conseil d'Etat, lequel a une attitude de donneur de leçons, se vante d'être le meilleur, se disperse avec des tombolas et autres. Or malheureusement, il faut le constater, ses résultats sont extrêmement médiocres, pour ne pas dire catastrophiques. Pour rappel, lors de la deuxième vague, le canton de Genève était champion d'Europe des infections. Lors des première, deuxième, troisième et quatrième vagues, Genève a obtenu de plus mauvais résultats qu'un autre canton aux conditions similaires, soit avec des frontaliers, un aéroport international et un habitat dense. Bref, l'exécutif gagnerait à se montrer moins arrogant et un peu plus crédible et efficace.

Comme je l'ai déjà signalé à de nombreuses reprises, conformément à l'article 113, alinéa 3, de notre constitution, approuver cet arrêté ou le refuser ne change strictement rien. C'est probablement pour cette raison que les groupes dits gouvernementaux voteront oui tandis que les deux partis sans responsabilités gouvernementales voteront non. Merci de votre attention.

Mme Céline Zuber-Roy (PLR). L'arrêté du Conseil d'Etat est fondamentalement juste et correspond au système mis en place avec le pass covid. Pour rappel, il s'agit avant tout que les gens soient immunisés contre le virus. Cette immunité, on l'obtient soit par la vaccination, soit suite à une guérison. Si une personne n'est pas immunisée, elle peut avoir accès au certificat en effectuant un test qui, depuis le 1er octobre, est payant. Une telle mesure est adéquate, ce n'est pas à la société de passer à la caisse sous prétexte que certains ne veulent pas se faire vacciner. La question de ceux qui ne peuvent pas est différente, dans ce cadre-là, la Confédération prend en charge les tests. Voilà le dispositif de base.

Après, les gens peuvent tout de même accéder à certaines activités nécessitant un pass sanitaire; je pense à l'université. Il existe un droit à l'éducation, et même les personnes qui ne sont pas immunisées sont autorisées à poursuivre leur formation. Ainsi, le Conseil d'Etat a très rapidement institué des possibilités de dépistage de masse gratuit pour que les étudiants puissent continuer à aller en cours, ce qui est légitime.

Par contre, il n'y a aucune raison que ces jeunes profitent du résultat de leur test pour se rendre ensuite en discothèque, à la différence d'un apprenti, par exemple, qui ne bénéficie pas de cette option sur son lieu de travail. Il y aurait là une différence de traitement qui ne se justifie absolument pas. Il est approprié d'avoir décidé que le testing gratuit est limité au contexte dans lequel il est émis. Si quelqu'un souhaite obtenir un pass covid à portée plus large, eh bien je rappelle qu'il y a la vaccination ou la preuve de guérison; les tests sont désormais payants.

Le PLR soutiendra l'arrêté du Conseil d'Etat. Je profite de mon intervention pour revenir sur une discussion que nous avons eue le mois passé à propos d'une proposition de résolution du MCG demandant la prise en compte du test sérologique pour attester une guérison. Ce qui paraissait visiblement impossible il y a un mois a par chance été rendu possible quelques jours plus tard par la Confédération, ce qui est bien, parce que cela rend le système cohérent. Maintenant, une personne qui peut prouver qu'elle a eu la maladie a accès au pass sanitaire. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Notre dispositif est à présent logique. Je souhaitais le souligner en vue de la votation du 28 novembre, car les citoyens...

Le président. Merci...

Mme Céline Zuber-Roy. ...seront amenés à se prononcer sur cette question. Il est important que le certificat covid reste en vigueur...

Le président. Merci, Madame la députée.

Mme Céline Zuber-Roy. ...comme alternative à la vaccination obligatoire pour éviter une fermeture des magasins.

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames les honorables députées, Messieurs les honorables députés - j'aime bien cette formule qui allie passé et présent -, les Verts vont vous refaire leur fameux vote pizza avec un petit peu de poivron, un petit peu de tomate et bien entendu de la mozzarelle. Pour certains dans notre parti, par la vaccination, le Conseil d'Etat a la volonté de préserver les plus faibles, et nous devons absolument prendre les mesures les plus fortes possible pour que toute la population soit protégée.

Une autre partie du groupe réunit des gens qui sont attachés à la liberté et qui craignent que les dispositions établies en ce moment conduisent à un surcroît de résistance et à une polarisation du débat, d'autant plus que la votation fédérale approche et que nous remarquons une dichotomie de plus en plus importante entre les positions cantonales et fédérales.

Il faut relever que dans les EPH, soit les établissements accueillant des personnes handicapées, une partie des employés auront leur test payé, mais ne pourront pas s'en servir pour aller au restaurant avec les bénéficiaires. Cela engendrera un surcoût extrêmement important juste pour encadrer les résidents, pour les emmener quelque part, parce que l'attestation délivrée suite à un dépistage pour aller travailler ne sera plus valable pour accompagner les bénéficiaires à un autre endroit.

Aujourd'hui, une partie du groupe - et une partie seulement - éprouve de l'appréhension face à certaines dérives. On se rend compte que la santé publique, en cette période de covid, est fortement touchée. M. le conseiller d'Etat nous assure que le taux de suicide n'a pas augmenté ou demeure à peu près stable, mais les psychologues et psychiatres nous confient qu'ils sont à saturation. Les jeunes enfants, qui ne sont pourtant pas concernés par les problèmes de vaccination, ont de plus en plus besoin d'appui à l'école, ce qui constitue pour moi un indicateur important. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Quant aux étudiants, ils se retrouvent dans des situations de précarité et de stress psychologique extrêmement difficiles...

Le président. Merci...

M. Christian Bavarel. ...alors qu'ils ne sont pas le premier public touché ou en danger à cause du virus...

Le président. Il vous faut conclure.

M. Christian Bavarel. Eh bien pour conclure, je dirai simplement: restons vigilants face à une politique d'extrême gauche...

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Christian Bavarel. ...particulièrement radicale...

Le président. Je passe maintenant la parole...

M. Christian Bavarel. ...qui nous permet de refaire l'histoire...

Le président. ...à M. Jean-Marc Guinchard.

M. Christian Bavarel. ...des partis politiques au sein de ce canton.

Le président. A vous, Monsieur Guinchard.

M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, un chiffre: 3900. 3900, c'est le nombre de contaminations qu'a connues la Suisse ces dernières vingt-quatre heures. Je le relève simplement à l'intention des gens qui prétendent que la crise est derrière nous et que nous sommes sortis d'affaire.

Je préfère nettement la politique actuelle du Conseil d'Etat qui vise à préserver les soins intensifs pour éviter leur surcharge et à protéger les plus faibles d'entre nous. Je prendrai l'exemple des établissements médico-sociaux: lors de la première vague, s'il y a eu 1400 guérisons, il y a également eu plus de 500 décès, c'est-à-dire 10% de la totalité de nos aînés qui résident en EMS. Mesdames et Messieurs, soyons sérieux: on ne peut pas soutenir que tout va pour le mieux.

J'estime que le gouvernement, par les mesures édictées, parvient à éviter un confinement qui serait catastrophique sur le plan social, économique et des relations personnelles. Il est facile pour certains députés que nous avons entendus, dont les groupes n'ont pas de responsabilités gouvernementales, de donner des leçons et d'accuser le Conseil d'Etat de faire tout faux. Aujourd'hui, ce qui doit primer, c'est la volonté de préserver les plus faibles, c'est d'empêcher à tout prix un nouveau confinement.

Regardez ce qui se passe au Danemark, en Suède ou en Allemagne: ces pays en reviennent à des confinements compte tenu de l'augmentation des cas et surtout de la suroccupation des services de soins intensifs. Maintenant, aux soins intensifs, ne sont plus admises que des personnes non vaccinées, et il n'est pas normal que celles-ci fassent peser sur les autres une responsabilité qu'elles ne veulent pas assumer pour des raisons diverses et variées.

Dans les établissements médico-sociaux, on exige des tests datant soit de moins de vingt-quatre heures, soit de moins de septante-deux heures, tant pour le personnel que pour les visiteurs. Certains députés au sein de la commission... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...ont jugé ce dispositif excessif et trop lourd; je rappelle que ce dépistage est gratuit pour ceux qui s'y soumettent, simple à réaliser, et permet de protéger non seulement les résidents des EMS...

Le président. Merci...

M. Jean-Marc Guinchard. ...mais également leurs familles et le personnel en évitant des absences à répétition.

Le président. C'est terminé.

M. Jean-Marc Guinchard. Le groupe démocrate-chrétien vous recommande dès lors, Mesdames et Messieurs, de prendre acte du RD 1434...

Le président. Merci, Monsieur le député !

M. Jean-Marc Guinchard. ...et d'accepter la R 980. Je vous remercie.

M. Stéphane Florey (UDC). Bon, en ce qui me concerne, je crois qu'il faut mettre un terme au délire collectif qui est en train de s'instaurer ce soir, notamment via l'intervention que je viens d'entendre. A un moment donné, Mesdames et Messieurs, il faut arrêter de diviser la population, de monter les gens les uns contre les autres, c'est un vrai délire collectif ! C'est exactement ce que vous êtes en train de prôner.

Ce Grand Conseil ferait mieux de s'intéresser un peu plus à ce qu'on pourrait qualifier de pseudo-magouilles: on donne toujours les marchés publics à la même personne et après, comme par hasard, on s'exclame: «Ouh là là, les chiffres sont mauvais, les contaminations augmentent parce que le taux de vaccination est en baisse !» Je suis désolé, mais à un moment donné, il faut juste arrêter. Il faut arrêter de prendre les gens pour des imbéciles ! La vaccination reste et doit rester...

Une voix. Obligatoire !

M. Stéphane Florey. ...une décision personnelle, chacun prend ses responsabilités, mais arrêtez de faire peur aux citoyens. Monsieur Poggia, vous savez très bien de quoi je parle; méfiez-vous, parce que certains ont été destitués pour moins que ça ! (Exclamations.) Voilà ce que j'avais à dire. Merci. (Commentaires.)

Le président. Monsieur le député, je vous rappelle que c'est à la présidence que l'on s'adresse dans cette salle. Je transmettrai vos propos à M. le conseiller d'Etat, mais en des termes plus modérés. Monsieur Patrick Lussi, c'est à vous pour une minute quarante-quatre.

M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mon but n'est pas de faire entendre une voix dissonante par rapport à mon parti, mais dans ma vie, j'ai toujours essayé de ne pas me tromper d'ennemi. On est ici en train d'attaquer des mesures, en train de disserter sur des textes alors que la cause réelle de nos ennuis actuels est un virus dont l'incidence est en augmentation. Je crois que nous devrions tous avoir l'humilité d'accepter qu'il n'y a pas d'attaque de nos libertés, mais que nous sommes simplement confrontés à un problème qui semble de plus en plus important et dépasser tout le monde. C'est la raison pour laquelle, personnellement, je m'abstiendrai lors du vote. Merci, Monsieur le président.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Eric Leyvraz pour une minute et six secondes.

M. Eric Leyvraz (UDC). Je vous remercie, Monsieur le président. Dans la même ligne que mon collègue M. Lussi, je suis en totale opposition avec mon parti. Merci.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Alberto Velasco (S). Chers collègues, il y a une évidence: ce qu'on constate aujourd'hui, d'après les chiffres et les études, c'est que la seule façon de s'en sortir, c'est la voie de la vaccination. C'est la seule façon de s'en sortir ! Après, certaines personnes ne peuvent pas se faire vacciner pour x raisons, il faut en tenir compte. Vous voyez, l'autre jour, quelqu'un me disait: «Toi, tu es vacciné, tu dois porter un masque pour me protéger.» Je lui ai répondu: «Mais est-ce que toi, tu me protèges ? Est-ce que tu me protèges ? Tu pourrais très bien te faire vacciner et me protéger aussi.» Il y a une confusion, le concept de liberté individuelle nous échappe.

Ce qui est plus grave, chers collègues, c'est qu'au sein de ce Grand Conseil, cette question n'a pas été tranchée. Comment voulez-vous que les citoyens et citoyennes suivent les autorités si même le parlement n'a pas arrêté une position, à savoir qu'aujourd'hui, c'est le vaccin qui doit primer ? Pourquoi est-ce que je vous dis ça ? Regardez la situation en Espagne et au Portugal: là-bas, les gens sont vaccinés à 80%, presque à 90%, eh bien ce sont les deux pays d'Europe où le taux d'incidence est le plus bas actuellement, ils sont en train de s'en sortir. Il est donc évident que la vaccination constitue la seule solution.

Aux membres de l'UDC, je rappelle qu'il y a eu le siècle des Lumières. Il y a eu le siècle des Lumières, chers collègues ! Et vous êtes en train de revenir en arrière, vous pensez que la science ne veut rien dire, quoi ! Franchement ! S'il y a un parti ici qui divise la population, Mesdames et Messieurs, c'est bien l'UDC avec toutes ses campagnes au niveau national ! C'est l'UDC qui a divisé les citoyens et citoyennes de ce pays et de ce canton. Alors s'il vous plaît, prenons nos responsabilités une fois pour toutes !

Pour ma part, je ne suis pas pour les vaccins; je me suis fait vacciner alors que je n'en aurais pas eu besoin, mais c'est une question de responsabilité personnelle vis-à-vis des autres, de l'ensemble de la société. A un moment donné, il va falloir sortir de cette crise. Pensez au coût, on ne pourra pas allouer chaque année 150 ou 160 millions à l'Hôpital cantonal en raison d'un déficit continuel. Je préférerais réserver cette somme pour l'enseignement, par exemple, pour la formation. Voilà, Mesdames et Messieurs, notre groupe prendra acte du rapport divers. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie et je rends la parole à M. André Pfeffer pour une minute huit.

M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Cet arrêté n'a rien à voir avec les pro-vax et les anti-vax. Je répète: cet arrêté n'a rien à voir avec les pro-vax et les anti-vax ! Pour bénéficier d'un certificat covid, il existe actuellement trois options: le vaccin, la guérison ou les tests. Au niveau suisse, il y a une égalité de traitement entre ces trois catégories. A Genève, une fois de plus, la règle est différente: les vaccinés et guéris ont liberté de mouvement, tandis que les testés, surtout ceux qui ont peu de moyens, sont parqués dans une autre catégorie. A notre avis, cette démarche est inacceptable. Merci de votre attention.

Mme Danièle Magnin (MCG), rapporteuse de majorité. Il y a quelques sages dans cette assemblée qui ont bien compris que le problème, ce ne sont pas les dispositions, ce ne sont pas les mesures - les mesurettes -, c'est bien le virus lui-même. Plusieurs maladies gravissimes qui ont plombé l'humanité depuis ses débuts ont été éradiquées grâce au vaccin. Je pense par exemple à la variole; les férus d'histoire savent que le roi Louis XV en est mort, que quasiment toute la famille de Louis XIV en est décédée et que c'est finalement Louis XVI, un peu plus éclairé que les autres, qui a décidé d'être inoculé et de faire inoculer ses proches - sauf la reine Marie-Antoinette qui, venant d'Autriche, l'était déjà, parce que dans ce pays, on était plus ouvert aux sciences.

Je rappelle également que les vaccins sont apparus dès le IXe siècle en Chine et qu'ils ont sauvé des millions de gens. Encore aujourd'hui, nous vaccinons nos enfants... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, s'il vous plaît ! (Le président marque un temps d'arrêt en attendant que le silence se rétablisse.) Poursuivez.

Mme Danièle Magnin. Merci. Nous vaccinons nos enfants peu de temps après leur naissance - dans les trois mois, me semble-t-il - avec le vaccin DiTePerPol, c'est-à-dire diphtérie, tétanos, pertussis - c'est la coqueluche - et poliomyélite. Sans cela, le taux de mortalité infantile serait extrêmement élevé.

Il apparaît que les gens ont perdu conscience de ce que représentaient les maladies dans le passé, de la manière dont on a réussi à les éliminer. La variole n'existe plus que dans un ou deux laboratoires en vue de recherches. La polio est éradiquée depuis 1988, je crois. Ce n'est que par la vaccination que ces pathologies gravissimes, qui semaient le deuil dans toutes les couches de la société, ont pu être écartées. Alors au lieu de vous acharner sur des détails, sur de petites choses, Mesdames et Messieurs, pensez donc à la vie, je vous prie ! Et votez cet arrêté, merci.

M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous assistons dans cet hémicycle à une reproduction de ce que l'on voit et entend malheureusement au sein de la population. Vous transmettrez de ma part à M. le député Florey, Monsieur le président, qu'il n'a pas besoin de se faire vacciner: je lui offre un prix, celui de visiter les soins intensifs des Hôpitaux universitaires de Genève. Ce qui est grave, ce n'est pas de n'avoir pas encore compris la sévérité du problème, c'est de penser avoir compris le problème. Monsieur Florey, vous êtes donc le bienvenu aux HUG afin de constater par vous-même ce qu'il en est.

En écoutant ce débat et en observant ce qui se passe ailleurs, je me demande si la Suisse n'a pas été trop bonne dans sa gestion de l'épidémie, si finalement elle n'a pas été trop efficace, trop pudique aussi en ne montrant pas les conséquences dramatiques du virus. Dans des pays comme l'Italie, l'Espagne ou le Portugal, où pratiquement chaque citoyen a perdu des membres de sa famille, des proches, des amis à cause de la maladie, les gens n'ont pas hésité une seule seconde à se faire vacciner.

Encore une fois, se faire vacciner ou pas constitue un droit personnel. Ce qui est intolérable, c'est que celles et ceux qui ont opté pour faire passer leur liberté individuelle avant la solidarité collective nous fassent croire qu'ils sont les champions des libertés et que nous devrions les remercier de lutter à notre place pour maintenir celles-ci.

Dans cette assemblée, les extrêmes se rejoignent pour des motifs diamétralement opposés. Jusqu'ici, l'extrême gauche a tenu un discours extrêmement autoritaire, incitant les autorités à imposer la vaccination, ce à quoi j'ai systématiquement répondu que je voyais mal le canton de Genève introduire seul la vaccination obligatoire - vous verriez les réactions non seulement de la population genevoise, mais de l'ensemble du pays ! Il s'agit d'une décision qui, le cas échéant, doit être prise à l'échelle fédérale.

Ce qui est tout de même absurde, c'est qu'un pays comme le nôtre qui est une démocratie, qui a dit aux citoyens: «Vous et vous seuls allez faire le choix», souffre aujourd'hui d'une prétendue faiblesse, puisqu'on vient reprocher aux autorités de ne pas avoir imposé la vaccination. On leur fait même un procès d'intention: elles ne l'auraient pas imposée parce qu'elles ne sont pas certaines que le vaccin soit véritablement efficace et sans conséquences. C'est fort triste, car d'une certaine manière, c'est un appel à l'autorité ferme et dure alors que nous vivons dans un pays qui, de tout temps, a cultivé la démocratie directe, le dialogue et la recherche du consensus.

Il est vrai que nous souffrons beaucoup, notre société souffre beaucoup de ce débat qui va en se durcissant, et à mesure que s'approche la votation du 28 novembre, on sent les positions se radicaliser. Mais la question que nous devons nous poser est la suivante, Mesdames et Messieurs: qui a une attitude liberticide ? Est-ce le gouvernement qui essaie de trouver des alternatives à des mesures radicales comme la fermeture de certains secteurs économiques dans lesquels le virus, nous le savons, circule beaucoup plus rapidement ? Ou celles et ceux qui continuent à considérer qu'il faut patienter le temps qu'une immunité collective s'acquière naturellement, ce qui peut nous mener à des années d'attente selon le variant qui sera alors en circulation ?

Nous parlons ici d'un arrêté ponctuel et, comme toujours, le débat s'étend à l'ensemble de la problématique. L'UDC reproche aux autorités de diviser la population alors que, certains l'ont souligné, il suffit de voir ce qui se passe au niveau fédéral pour se rendre compte que c'est précisément ce parti qui fait feu de tout bois dans le cadre de la pandémie pour attirer à lui l'ensemble des opposants, des opposants dont les situations sont parfois indépendantes les unes des autres, puisque certaines personnes sont pour le vaccin et contre le pass, et vice versa. On voit autant de cas de figure qu'il peut en exister.

Pour répondre à Mme la députée Zuber-Roy, que je remercie par ailleurs pour ses propos et son soutien ainsi que celui de son groupe, la sérologie a effectivement été retenue par le droit fédéral. J'avais indiqué, lorsque cette proposition avait été faite - je l'avais d'ailleurs accueillie positivement -, qu'il fallait que cela soit réglé à l'échelon fédéral, et le canton de Genève était intervenu officiellement pour que l'on prenne véritablement en considération cette question. Comme vous l'avez vu, elle a été prise en considération; il faut simplement tenir compte du fait qu'un résultat sérologique positif ne nous permet pas de déterminer à quand remonte la contamination, raison pour laquelle le certificat est attribué pour une période de nonante jours seulement, et pas pour une année comme pour les vaccinations et les guérisons.

Pour en revenir brièvement à l'arrêté, c'est vrai, il faut le dire, la Confédération a pris des décisions qui visent à inciter à la vaccination; certains diront contraindre, mais non. La preuve, c'est que nous n'avons contraint personne, puisque les personnes qui ont choisi de ne pas se faire vacciner ont aussi choisi d'assumer une partie des conséquences de leur choix. Oui, la Confédération a pris des mesures pour amener les gens à se faire vacciner. L'une d'entre elles, c'est de rendre le test payant à partir d'une certaine date, tout en le maintenant gratuit pour celles et ceux qui prendraient une première dose de vaccin le temps qu'ils reçoivent la seconde. Il y a une logique derrière tout cela.

A Genève, nous avons malgré tout considéré, et cela concerne l'université de même que les hautes écoles, qu'il fallait absolument trouver une dérogation à cette règle stricte pour que les étudiants puissent suivre les cours de manière présentielle, comme on dit aujourd'hui, compte tenu des effets néfastes sur le plan social de l'isolement imposé jusqu'ici. Ainsi, nous avons mis en place la possibilité d'effectuer des dépistages répétés comme en entreprise.

De là à permettre à ces jeunes qui ont fait le choix - légal, légitime même - de ne pas se faire vacciner d'obtenir le même résultat que celles et ceux qui font l'effort que leur demande la Confédération, il y a un pas que nous ne pouvions pas franchir. D'où cet alinéa 2 que l'extrême gauche voudrait voir supprimer, non pas pour ouvrir toute grande la porte du test, mais au contraire pour forcer l'autorité à utiliser une autre voie qui serait celle de l'obligation vaccinale - je me suis déjà prononcé à ce sujet.

Mesdames et Messieurs, je pense que le débat doit rester serein et, partant, je ne peux pas admettre que l'on parle de «magouilles», pour reprendre le terme d'un député. Celui qui a prononcé ce mot devra s'en expliquer dans le cadre de la proposition de motion qu'il a déposée, et s'il est honnête - je suis sûr que c'est le cas -, il pourra présenter ses excuses une fois que toutes les explications auront été données. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, je soumets à vos votes l'amendement de M. Pierre Vanek qui ajoute ceci au texte de la proposition de résolution:

«mais demande au Conseil d'Etat:

d'abroger l'alinéa 2 de l'article 11 (nouveau) introduit par cet arrêté.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 18 oui et 5 abstentions.

Mise aux voix, la résolution 980 est adoptée par 72 oui contre 14 non et 5 abstentions.

Résolution 980

Le Grand Conseil prend acte du rapport divers 1434.