République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10892-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur la réduction temporaire des augmentations annuelles dues aux membres du personnel (B 5 17)
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de première minorité de M. Eric Stauffer (MCG)
Rapport de deuxième minorité de M. Roger Deneys (S)

Premier débat

Le président. Le débat est classé dans la catégorie I: débat libre. Je vous informe que nous terminerons en tout cas le premier débat ce soir.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Ecoutez, après le sujet des SIG, nous abordons ce soir un autre thème qui ne fait pas plaisir, puisqu'il s'agit de supprimer l'annuité de la fonction publique. Ce n'est pas un sujet qui nous rend très heureux et, je tiens à le dire, ce n'est pas de gaîté de coeur que nous nous sommes résolus, au fond... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à suspendre l'annuité pour l'année 2012.

Mais, dans l'examen général du budget que nous avons fait en commission des finances, nous avons opté - en tout cas une majorité de la commission - pour un équilibre des sacrifices, en nous disant que toutes les catégories, à la fois de contribuables mais surtout de bénéficiaires des prestations de l'Etat, devaient participer à l'effort pour trouver un budget. Il se trouve que les fonctionnaires ont été aussi mis à contribution. Voilà la proposition que nous faisons ce soir. Je dirai que le premier argument est cet équilibre des sacrifices.

Lors des débats de la commission, certains ont proposé de supprimer l'annuité totale pendant les années 2012 et 2013. Nous, nous nous sommes résolus à ne la supprimer que pour l'année 2012. Pourquoi ? Parce qu'il faut tenir compte du fait que, si crise il y a, il n'est pas sûr qu'elle se prolonge; peut-être assisterons-nous, l'année prochaine, à un retournement de conjoncture. Certains instituts de prévisions estiment d'ailleurs que cela est possible, et il ne serait pas juste de pénaliser les fonctionnaires pendant deux années de suite. C'est pourquoi nous vous proposons d'en rester là et d'accepter la suspension de l'annuité pour une année seulement.

Je dirai enfin qu'il faut accepter ce projet de loi, parce que de lui dépend l'acceptation d'un budget demain. Or si le budget est refusé et que nous devons passer aux douzièmes provisoires, il n'y aura de toute façon pas d'annuité, puisque le régime des douzièmes provisoires reprend les conditions de l'année 2011; cela veut dire que les annuités seront suspendues. Dans ce cas, je ne vois pas l'intérêt qu'il y aurait à ne pas voter ce projet de loi, puisque, si on ne le votait pas, il n'y aurait pas de budget, et que, s'il n'y avait pas de budget, il n'y aurait pas d'annuité, de toute façon !

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais dire en préambule. Je vous invite vivement à ne pas prolonger la discussion et à voter ce projet de loi tel quel.

Présidence de M. Gabriel Barrillier, premier vice-président

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, on vient d'assister à un fabuleux numéro du rapporteur de majorité, qui, avec son parti, est censé défendre les familles et le bien-être, et qui, comme première mesure d'économies sur un budget déficitaire, vient précisément prôner l'appauvrissement de cette classe moyenne des familles en leur supprimant les annuités. J'estime que vous - un parti qui défend l'équité de traitement, qui en plus vient plébisciter des places d'apprentissage pour les sans-papiers - eh bien, vous devriez appliquer ce principe aussi aux fonctionnaires de l'Etat, et je dirai même en premier lieu aux fonctionnaires de l'Etat.

J'en veux pour preuve, Mesdames et Messieurs, que l'on vient de s'écharper pendant deux heures sur un tout autre sujet, les Services industriels; or je n'ai entendu personne, à part le MCG, venir dire qu'il n'était pas normal que, dans l'effort consenti, les fonctionnaires qui travaillent aux Services industriels avaient, eux, les annuités à 100%, plus un bonus correspondant à un quatorzième salaire. On peut essayer de prendre pour des imbéciles une partie de la population; on peut essayer de prendre pour des imbéciles les fonctionnaires, qui ont quand même dédié leur carrière au service de la communauté et pour l'intérêt général, mais, à un moment, cela suffit ! Alors sachez, et sachez-le de manière très ferme, que le groupe MCG défend les fonctionnaires de la fonction publique, grand et petit Etat. Pour preuve, vous verrez le nombre d'amendements que nous allons déposer demain pour cela.

Et puis je dirai, chers collègues, que, finalement, ce sont des économies de bouts de chandelle. Pourquoi ? Parce qu'on parle d'une dizaine de millions. Figurez-vous que, dans le cadre peut-être un peu plus - vous corrigerez, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité... (Remarque.) Mais vous verrez que, des économies, on peut en trouver. On pourrait déjà commencer par annuler la prime d'engagement aux frontaliers, la ristourne des impôts à la source, retenus en appliquant le minimum fédéral ! On sait, bien sûr, Mesdames et Messieurs les députés, que, lorsqu'il s'agit des allocations familiales, même le PDC est pour appliquer le minimum fédéral ! Cela, on le sait. Ils ne veulent pas augmenter les allocations familiales pour payer plus ! (Commentaires.) Là aussi, nous aimerions le minimum fédéral. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mais là, vu que c'est quelque chose qu'ils donnent, le résultat des courses est que ce sont 3% à la place des 2% - le minimum fédéral - de ristourne sur les impôts à la source. Le lien est direct, Mesdames et Messieurs les députés, avec ce projet de loi. Pourquoi ? Parce que ce seraient 10 millions d'économies que nous pourrions trouver instantanément en appliquant le minimum fédéral.

Alors je vous demande, Mesdames et Messieurs du PDC, Mesdames et Messieurs du PLR et Mesdames et Messieurs de l'UDC, de ne pas sanctionner les fonctionnaires à cause d'une gestion qui n'a pas été à la hauteur des espérances de la population. Il est vrai que la conjoncture économique n'a pas beaucoup aidé; il est vrai que nous sommes encore des privilégiés dans notre canton; il est vrai aussi que nous avons une économie suffisamment forte pour être en mesure de parer à cela; mais, de grâce, ne déployons pas nos foudres toujours sur les plus faibles, ceux qui ne peuvent rien dire, ceux à qui on va enlever 100 F, 200 F, 300 F ou 500 F par année, et qui ont déjà de la peine à boucler leur mois ! Ce n'est pas toujours facile, notamment pour les familles monoparentales.

Alors je vous le dis, je pense que, dans un souci de solidarité et d'équité de traitement entre les différents fonctionnaires au sein de l'Etat - petit Etat, grand Etat et établissements publics autonomes - il ne serait pas acceptable aujourd'hui que ce Grand Conseil ratiboise les plus faibles d'entre nous, tout en octroyant des primes pour les cadres supérieurs, qui eux ne se voient pas affectés par ces mesures. Il y aurait là une double injustice. Evidemment, dans ces conditions, le MCG ne pourrait que soutenir ces mouvements d'humeur qui se répercutent dans la rue, c'est-à-dire les manifestations. Nous avons eu un petit exemple ce soir, avec 400 personnes qui sont venues manifester devant le Grand Conseil. Mesdames et Messieurs, si vous vous amusez à couper ces annuités, je pense que les mouvements sociaux vont s'amplifier et que, finalement, il n'y aura pas un vainqueur à la sortie, mais deux perdants, c'est-à-dire le Grand Conseil... (Remarque.) ...et la population, qui n'aura plus les prestations, parce que les fonctionnaires seront en grève.

Je sais, Monsieur le grand argentier, Monsieur le conseiller d'Etat David Hiler, que vous avez toujours une solution magique de dernière minute. Donc je vous en conjure, sortez-nous un lapin de votre chapeau, trouvez-nous les millions qui manquent, afin que les fonctionnaires ne soient pas touchés dans leur intégrité financière, dans leur famille, de façon qu'ils puissent conserver leur pouvoir d'achat, et que la foudre ne s'abatte pas toujours sur les plus faibles ! Merci.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je ne savais pas que notre ministre des finances s'appelait David Copperfield, mais je suis heureux de l'apprendre et me réjouis de voir l'apparence du lapin en question ! J'espère qu'il sera avec des petits oignons ou des olives; c'est tout à fait délicieux ! Mais soyons plus sérieux.

Mesdames et Messieurs les députés, avant de discuter du fond de ce projet de loi... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...j'aimerais, au nom des socialistes, rendre hommage à l'ensemble des collaborateurs de la fonction publique et à l'ensemble des collaborateurs des institutions subventionnées. Les fonctionnaires, les personnes qui travaillent dans des institutions subventionnées sont la base, le ciment, de notre société dans la dimension des prestations d'intérêt général qu'ils fournissent à l'ensemble de nos concitoyens. Tant pour l'école, l'éducation, que pour la culture, que pour la santé, sans les fonctionnaires, sans leur dévouement... (Remarque.) La sécurité, bien entendu. Sans leur dévouement, leur sens de l'intérêt général, au-delà des caricatures qui peuvent fleurir ici et là, je crois qu'il faut rendre hommage à l'engagement, au dévouement et au sens de l'intérêt collectif des fonctionnaires. Je crois qu'il faut vraiment les remercier et être conscients de leurs efforts, parce que, année après année, leurs conditions de travail se dégradent pour différentes raisons.

Faut-il rappeler les effets néfastes du néolibéralisme ? Faut-il rappeler la précarisation rampante d'une part grandissante de la population ? Cela veut dire des conditions d'accueil toujours plus difficiles; des gens sont toujours plus acculés à des situations extrêmes et doivent faire face à des situations dans lesquelles ils n'ont pas de solution immédiate, donc ils expriment leur haine, leur hargne et leur mécontentement envers les personnes qui représentent l'Etat - les communes, les collectivités publiques, les institutions subventionnée. Et toutes ces personnes font ce travail dans un environnement où l'Etat - le Grand Conseil, le Conseil d'Etat - multiplie les exigences ! En termes d'indicateurs ! En termes d'efficience ! En plus, quand on est au Grand Conseil pour voter le budget, Mesdames et Messieurs les députés et Mesdames et Messieurs les concitoyennes et concitoyens qui nous écoutez, c'est bien simple, les députés ne font rien de ces indicateurs ! Ils ne les lisent même pas et ils décident arbitrairement de fixer un montant du déficit au budget: 350 millions ! Les indicateurs, on s'en fiche ! Aucun indicateur n'a été utilisé pour établir le montant dogmatique du déficit acceptable, soit les 350 millions prônés par le PLR, avec la complicité des Verts et, évidemment, le PDC, qui tient la chandelle.

Dans ces circonstances, pour les socialistes, il est tout simplement inacceptable de vouloir faire porter ces efforts d'abord à la fonction publique. Faut-il rappeler que, après quelques années d'excédents, nous avons emmagasiné une réserve conjoncturelle de l'ordre d'un milliard de francs ! Cette réserve conjoncturelle a été prévue, justement, pour des années difficiles et notamment des retournements de conjoncture, qui sont toujours difficiles à prévoir, et on ne peut le reprocher à personne. Maintenant, en cas de retournement de conjoncture, est-ce que le bateau coule pour autant ? La réponse est non ! Et l'Etat de Genève, aussi petit paquebot soit-il, n'en reste pas moins un paquebot ! Orienter ses dépenses et, éventuellement, prévoir de nouvelles recettes, cela prend un certain temps ! Il n'est pas possible de prendre des mesures immédiates sans mettre en péril les fondements de notre démocratie et le tissu social de notre société ! Et cela, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ne le veulent pas. Donc, si la situation est si grave que cela, pourquoi ne pas aussi demander aux fonctionnaires de faire des efforts... Mais la situation est-elle si grave que cela aujourd'hui ? (Commentaires.) La réponse est non, parce que nous avons d'une part cette réserve conjoncturelle et, d'autre part, un plan de mesures du Conseil d'Etat, qui vise aussi, et à raison, à imaginer de nouvelles recettes.

J'ai sous les yeux un document qui vous fera certainement plaisir: «Les quatre axes de l'action à mener.» C'est le Conseil d'Etat: «Afin de poursuivre la politique volontariste de réduction de la dette, le coût total des baisses fiscales ne devra pas dépasser 150 millions de francs, échelonnés sur 2009 et 2010.» De quand date ce magnifique document ? (Commentaires.) Cela date du 10 avril 2008; c'est la «Présentation du compte d'Etat 2007», où il y avait un excédent de revenu de 786 millions de francs ! Indiqué en gros sur la première page ! «Il s'agit du meilleur résultat jamais réalisé par l'Etat de Genève, conséquence de quatre années de forte croissance économique et de la très bonne maîtrise des charges» ! Mesdames et Messieurs, la réalité est que, en 2009, vous avez - vous avez ! - voté une baisse d'impôts dont l'ampleur annoncée était de 400 millions de francs par année. Le Conseil d'Etat indiquait que 150 millions, c'était peut-être raisonnable, pour les classes moyennes, pour les familles, pour le splitting - toutes, mesures raisonnables. Mais que s'est-il passé dans ce Grand Conseil ? Ce sont 400 millions de francs de baisse de recettes fiscales - baisse annoncée ! - qui ont été votés par la majorité - en gros, composée de tout ce parlement, des populistes MCG et UDC, du PLR, la nouvelle Entente PLR-Verts, avec évidemment le PDC qui tient la chandelle. (Commentaires.) Eh bien, la réalité c'est que, dans cette configuration... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...vous avez ruiné l'Etat, vous avez contribué à ruiner l'Etat, et que, pour rétablir la situation... (Remarque.) Des recettes, aussi ! ...il convient de prévoir de nouvelles recettes.

Donc, les socialistes, Mesdames et Messieurs les députés, sont attachés à l'existence d'un budget, sont attachés à l'existence du fonctionnement sain et naturel de la collectivité publique, mais, pour cela, il faut des équilibres ! Il faut que les efforts soient partagés ! Quand des personnes ayant 100 millions de fortune ont économisé 2 millions de francs sur leurs impôts - une seule personne ! - eh bien, je trouve tout à fait scandaleux de ne pas mettre dans la même balance de nouvelles recettes à prévoir vers ces personnes privilégiées ! Il y a éventuellement des efforts à consentir, de la part de la fonction publique. Mais quand c'est d'abord la fonction publique, c'est tout simplement scandaleux, inadmissible, et il n'est pas possible d'entrer en matière avec une façon de raisonner pareille !

Ainsi, les socialistes vous invitent à refuser ce projet de loi. Pour nous, le fait d'avoir un déficit dogmatique à 350 millions est totalement absurde ! Un déficit doit être mesuré en fonction de la sincérité budgétaire - justement, des recettes fiscales prévues, des dépenses que l'on ne peut pas contourner ! Le Conseil d'Etat a suffisamment rappelé qu'un certain nombre de dépenses dépendaient d'exigences fédérales, d'initiatives votées, voire de lois - votées aussi par vous, Mesdames et Messieurs les députés !

Pour toutes ces raisons, le retour à l'équilibre ne doit pas se faire sur un dogme de déficit qui plairait au PLR ! C'est totalement absurde. Et si c'est votre façon de fonctionner, il est tout simplement impossible d'y associer les socialistes, qui aiment fonctionner sur les faits et les efforts partagés, au nom de la solidarité bien comprise. Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de refuser ce projet de loi ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de deuxième minorité. Vous êtes quasiment dans le temps qui est imparti pour la première tranche. Maintenant, la parole est à M. le député Jacques Jeannerat.

M. Jacques Jeannerat (R). Quand un Etat comme celui de Genève compte moins d'un demi-million d'habitants et affiche en même temps une dette de 11 milliards de francs; quand on sait que l'indice cantonal des prix à la consommation, à fin novembre, en valeur annuelle, affiche le chiffre de -0,4%; quand on sait que la crise économique nous frappe de plein fouet; quand les entreprises luttent chaque jour pour survivre et maintenir des emplois... Il y a pire, Mesdames et Messieurs, pour des fonctionnaires de cet Etat, que d'avoir le même salaire en 2012 qu'en 2011, surtout quand ces derniers ont la garantie de l'emploi. Je vous invite à voter ce projet de loi tel qu'il ressort de la commission des finances.

M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG va refuser l'entrée en matière de ce projet de loi, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les mesures sur les conditions salariales qui ont été prises à l'égard de la fonction publique - c'est-à-dire les fonctionnaires et les employés de l'Etat - l'ont été sans aucune discussion avec les partenaires sociaux, les syndicats. C'est du jamais vu, puisque, même lorsqu'il y avait le gouvernement monocolore, il y avait une discussion. Les mesures étaient prises en juin, ce qui laissait le temps aux organisations syndicales de pouvoir intervenir, de discuter, de chercher des possibilités d'accords concernant ces mesures; aujourd'hui ce n'est pas du tout le cas. Une telle attitude du Conseil d'Etat relève d'un profond mépris envers la fonction publique, ce qui est inadmissible. Cela représente carrément une rupture du dialogue social.

De plus, en l'état, malgré les amendements qui risquent de passer par la suite, il n'y a aucune garantie que ceux-ci puissent satisfaire l'ensemble du parlement, le groupe MCG, ni même la fonction publique. C'est pour cela que nous allons aussi refuser le projet, puisqu'il implique une baisse de salaire, en l'état - je dis bien: «en l'état»; c'est une baisse de salaire qui est due aux cotisations accrues pour les caisses de prévoyance. Donc ce serait une première - une première - que les fonctionnaires connaîtraient, c'est-à-dire un avenir avec une baisse de salaire.

Il ne faut pas oublier, déjà, les efforts considérables que la fonction publique a faits dans les années nonante, et qui, elle, a perdu déjà 10% de son pouvoir d'achat depuis cette époque ! Ces 10% n'ont jamais été rattrapés, si ce n'est par une petite compensation: le pont de fin d'année. C'est, au demeurant, la compensation de la non-indexation des salaires; ce sont aujourd'hui 400 millions de la masse salariale qui sont économisés par rapport à ces fameux 10% sur l'indexation. Beaucoup de fonctionnaires sont encore confrontés à cette diminution salariale. Alors on demande toujours plus aux fonctionnaires - il y a des coupes linéaires, on demande de faire plus avec moins - et puis, on propose de diminuer encore leurs conditions salariales. Il me semble que cela suffit, de faire passer les fonctionnaires plusieurs fois à la caisse, simplement, alors que l'on constate, même, que le budget des investissements explose ! Pourquoi ? Pour que la droite puisse servir ses petits copains, les bâtisseurs - leurs architectes et tous ceux qui produisent derrière ces bâtiments, ces constructions.

Donc j'appelle vivement les Verts à refuser ce projet de loi. Ce serait aussi une première, que les Verts acceptent une diminution des salaires de la fonction publique ! Vous n'êtes pas ici pour faire plaisir à votre ministre des finances, M. Hiler ! Vous avez une fonction déterminante. Sinon, vous allez perdre votre âme... Et n'aurez plus que votre enveloppe corporelle qui siégera à votre place ! (Rires.)

Je vous rappelle les propos de mon ami Souhail Mouhanna... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui disait toujours que la richesse d'une entreprise, c'est le personnel. Aujourd'hui, on doit fidéliser le personnel - pas le démotiver pour économiser trois pour mille du budget... (Commentaires.) ...pour économiser trois pour mille du budget, par rapport à de telles mesures.

Je vous invite donc à refuser l'entrée en matière de ce projet de loi et à reprendre les mécanismes salariaux. Je pense que le personnel de la fonction publique en fait suffisamment pour, comme je l'ai dit auparavant, pour ne pas qu'on le démotive. (Applaudissements.)

M. Edouard Cuendet (L). Tout d'abord, on a beaucoup entendu dire dans cette enceinte que les fonctionnaires faisaient de gros sacrifices. Je rappellerai quand même qu'on leur a récemment accordé à tous, même à ceux qui viennent d'entrer dans leur profession, un treizième salaire - de manière générale. On leur a accordé, dans plusieurs cas, des revalorisations de fonction. On vient de voir que, une fois de plus, le Conseil d'Etat a cédé pour les laborantins des HUG: il y a eu une revalorisation de fonction. Contrairement à l'immense majorité des gens qui travaillent, les fonctionnaires bénéficient d'un pont de fin d'année depuis des décennies, dont le Conseil d'Etat, d'année en année, nous dit qu'il va le supprimer: on attend toujours ! Surtout, en cette période de crise qui touche l'emploi, les fonctionnaires bénéficient d'un avantage énorme, qui n'a pas de prix, la sécurité de l'emploi, il ne faut pas l'oublier.

La mesure qui est proposée aujourd'hui, notamment par le PDC, est en réalité, comme quelqu'un l'a dit, très modeste en termes financiers, mais elle a son impact quand même sur le budget - pour permettre un accord sur un budget dont Genève a besoin - et n'affecte que très peu, en vérité, la rémunération de la fonction publique.

Ce qui me surprend dans cette affaire, c'est la réaction - la surréaction - de la fonction publique, dont je ne conteste pas le droit de grève, d'ailleurs. Mais c'est une réaction inquiétante à deux points de vue. D'abord, on a entendu le Cartel intersyndical dire que, pour lui, la seule mesure envisageable pour régler la crise - dont il reconnaît la gravité - eh bien, la seule option envisagée est une augmentation massive des impôts... Je vous le dis déjà, le groupe PLR s'opposera avec la dernière énergie, avec toute l'énergie voulue, contre toutes les hausses d'impôts !

D'ailleurs, les contribuables, taillables et corvéables à merci pour la gauche, n'en ont pas toujours pour leur argent. Je dois dire que beaucoup de parents, qui ont vu certains fonctionnaires abandonner leur école à 15h aujourd'hui, n'ont apporté qu'un soutien très relatif à cette grève. Quand on voit notamment les résultats plus que mitigés de l'étude PISA...

Voici un autre exemple, qui m'a été relaté par l'un de mes collègues du PLR. Il a été pris dans les bouchons causés par la grève des fonctionnaires aujourd'hui; il a vu une ambulance bloquée dans le trafic, deux ambulanciers devoir sortir le brancard, puis, à pied, aller à l'hôpital... Si c'est cela, la conception du service public, la conception de la fonction publique, je m'inquiète un peu !

Mon deuxième souci, ce sont évidemment les caisses de pension. Et personne n'en a parlé ici ! M. Deneys l'a fait, mais il n'a pas pris la chose par le bon bout. En commission des finances, on commence à traiter le projet de fusion CIA-CEH, mais, chers collègues, cela va être extrêmement difficile dans ces conditions. Je rappelle en l'occurrence que la CIA, à mon avis, a certainement passé - on n'a pas exactement les chiffres, mais, vu les conditions des marchés actuels, eh bien, elle a certainement passé sous la barre fatidique des 50% de taux de couverture. Ou bien, elle est extrêmement limite, ce qui est déjà un cataclysme. Je rappelle aussi que les engagements en pied de bilan pour les caisses de pension de l'Etat sont à 5,7 milliards et que les plans qui nous sont proposés devront coûter 4 milliards; il faudra bien les financer ! Et, évidemment, ce sont une fois de plus les contribuables qui vont passer à la caisse. Eh bien, je peux vous dire que les contribuables vont être très échaudés en voyant déjà la réaction de la fonction publique envers une petite mesure de quelques millions, quand les milliards qui vont devoir être engagés seront discutés ! Donc, je peux dire que ce projet est déjà très mal enclenché si la fonction publique réagit de manière aussi épidermique concernant une mesure si peu douloureuse !

Par conséquent, cela étant dit, je vous invite à voter ce projet de loi, qui a obtenu une large majorité à la commission des finances. Notamment, je salue ici la démarche du PDC - qui, dans ce budget, a fait cette démarche-là, c'était l'une des seules. Je vous remercie du soutien à cette loi.

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, dans notre règlement du Grand Conseil, l'article 24 stipule que, lorsque des personnes sont concernées par un vote - personnellement concernées - elles ne prendront pas part au vote. De ce fait, sur nos bancs, il y a quelques absents, certains sont à la buvette - rassurez-vous, ce ne sont pas toutes ces personnes-là qui sont concernées - et n'y prendront donc pas part. C'est pourquoi, au moment du vote, vous verrez quelques absents sur nos bancs.

La deuxième chose que je tenais à vous dire, c'est que voter ce projet de loi sert de préparation au budget de demain. Alors on peut raconter tout ce qu'on veut, si l'on a décidé de ne pas adopter le budget, cela revient à ne pas voter l'annuité. Et vous pouvez même proposer, du côté du MCG, de tripler, de quadrupler l'annuité. Comme vous nous avez déclaré que, de toute façon, vous ne voterez pas le budget, le résultat est là, en réalité vous ne votez donc pas l'annuité ! Personne n'est dupe ! Votre discours n'est qu'un discours... C'est, de manière verbale, la possibilité d'indiquer que, cette annuité, vous voulez la défendre, mais comme vous n'allez en réalité pas adopter le budget, eh bien, vous ne défendez pas cette annuité.

Pour les Verts, l'annuité est quelque chose d'important. Il faut effectivement se rendre compte que lorsqu'on entame une carrière, l'annuité concerne surtout les personnes qui en sont au début. Ensuite, il y a une partie des gens qui arrivent à ce qu'on appelle «en fond de classe», soit au bout des annuités, et qui, eux, ne sont pas touchés par les mesures dont il est question. C'est pourquoi le signe que nous voulons donner n'est pas la suppression de l'annuité. Car elle va punir des gens pendant un moment ! Cette annuité, ils ne la récupèrent jamais. Pendant dix ou quinze ans, ils vont traîner ce manque d'annuité.

Les Verts sont d'accord avec la proposition du Conseil d'Etat - et nous allons la soutenir ce soir - de procéder à une diminution d'une demi-annuité. Parce que, oui, la situation de notre canton est compliquée; oui, un effort doit être fait; mais, non, nous ne voulons pas de mesures qui soient drastiques. Et nous combattrons les suppressions totales d'annuités. Nous pensons que c'est une mauvaise idée; c'est aussi un mauvais signe en termes de management de personnes qui s'engagent et travaillent dans la fonction publique. Oui, nous avons un souci budgétaire; et, oui, un effort va être demandé à la fonction publique. Nous le regrettons, mais il va être demandé à toute la population ! Je vous rappelle que, dans deux ans, si nous n'avons pas réussi à retrouver l'équilibre budgétaire au sein de notre canton, un mécanisme se produira, c'est le frein à l'endettement. Il se mettra automatiquement en marche et nécessitera de retrouver un équilibre. Soit par une baisse de prestations, soit par une hausse d'impôts, un équilibre devra être trouvé ! La mesure, c'est un système à choix, que le parlement et le peuple ont voulu. Et je vous rappelle simplement que la menace est celle-ci: que, plus tard, cela fasse extrêmement mal.

Nous, ce que nous proposons, c'est de travailler de manière plus lissée - avec moins de chocs. C'est pour cela que nous accepterons l'entrée en matière de ce projet de loi, de même que l'amendement proposé, afin que ce soit une demi-annuité qui soit supprimée. Si, par hasard, cet amendement devait ne pas passer, alors les Verts refuseraient ce projet de loi.

M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, je ne peux pas entendre que l'Entente fasse la morale à la fonction publique. Le débat que nous avons ce soir est le rendez-vous que vous avez pris en votant la baisse d'impôts en 2009 ! Par un hasard assez heureux, on retrouve à la table des rapporteurs M. Mettan, qui était l'un des signataires du PL 10199 et qui avait prétendu, avec l'Entente, l'UDC, le MCG et les Verts, que le débat que nous avons ce soir n'aurait pas lieu !

La baisse d'impôts qui a été votée en 2009 était une folie compte tenu de la situation économique qui s'annonçait alors ! La baisse d'impôts a été acceptée par ce parlement alors que la crise des subprimes avait éclaté depuis deux ans ! Et le crash boursier de l'automne 2008 faisait encore rage pendant les débats qui avaient lieu sous l'ancienne législature. Monsieur le président, la Banque Lehman Brothers faisait faillite en septembre 2008, alors que les bons apôtres de l'Entente soutenaient que la baisse d'impôts - bientôt suivie par le Conseil d'Etat - n'aurait aucun effet sur les finances du canton... Or il n'était pas besoin d'être grand prophète à cette époque-là pour deviner, en 2009, le sort de nos recettes budgétaires pour l'avenir ! Alors, j'aurais aimé entendre les appels à la prudence et à la raison que le député Jeannerat nous sert ce soir ! On voit ici le mépris que l'Entente porte à l'égard des finances cantonales et du service public qui en découle.

Ce soir, le Conseil d'Etat a fait un pas de plus dans cette attitude que je considère comme déplorable, alors qu'il avait annoncé à la population - le rapporteur de minorité l'a indiqué - que le canton avait les moyens d'assumer ces baisses d'impôts. Aujourd'hui, de manière unilatérale, il demande aux 27 000 fonctionnaires de payer ! Pire encore, le choix de l'asymétrie a été fait. Tandis que l'on demande des efforts aux salariés, l'Entente refuse de demander une part correspondante aux 25 000 ménages qui disposent de revenus allant au-delà de 200 000 F par année, alors qu'ils sont les bénéficiaires de la baisse d'impôts de 200 millions ! Voilà pour le fond.

Maintenant, il reste la question de la forme. Celle-ci est à l'image du contenu de ce projet de loi ! Les prévisions budgétaires catastrophiques pour 2012 sont connues du gouvernement depuis septembre 2011; malgré cela, le Conseil d'Etat a décidé de déposer ce projet de loi un mois à peine avant le débat de ce soir, sans qu'aucune négociation sérieuse n'ait été faite avec les partenaires sociaux !

Je souris, quand j'entends le Conseil d'Etat faire la morale au secteur privé en lui rappelant l'importance de la concertation sociale, alors qu'il est parfaitement incapable, lorsqu'il s'agit de ses salariés, de les consulter avant de prendre une décision pareille !

Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes appellent à rejeter sèchement ce projet de loi et à réfléchir à des mécanismes de solidarité permettant de faire payer aux 25 000 personnes qui ont bénéficié de ces 200 millions de baisse d'impôts. (Applaudissements.)

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il faut juste revenir à des réalités et arrêter de délirer. Nous sommes dans une réalité qui parle de réduction temporaire de l'annuité - il n'y a pas de tabou pour le parti démocrate-chrétien - et il n'est pas question de dire: «On sacrifie la fonction publique d'abord.» Qu'est-ce qui est sacrifié, en ce moment ? Ce sont M. et Mme Tout le Monde, ce sont les petites entreprises, ce sont les foyers tout à fait modestes, qui vont se trouver en situation de working poors - alors que, pour le moment, ils vont encore très bien, merci. Mais ce n'est en aucun cas la fonction publique qui est sacrifiée !

On essaie juste de solidariser, de mutualiser les sacrifices. Ce n'est pas une honte, ce n'est pas un gros mot ! Et effectivement, quand sécurité de l'emploi il y a, je ne pense pas que ce soit du mépris que de dire: «Peut-être pouvez-vous faire momentanément un effort, on a besoin de vous.» Nous respectons les fonctionnaires, et le parti démocrate-chrétien a la plus grande reconnaissance pour le travail qui est fourni par la fonction publique. Donc pas de populisme autour de cela ! Il est complètement indécent de penser que, parce que l'on ose dire qu'il y a peut-être lieu de faire un effort dans ce domaine, on méprise les gens. Non ! On veut juste qu'il y ait une répartition à peu près équitable - même si c'est évidemment difficile - de ce que l'on va demander à M. et Mme Tout le Monde, parce que, effectivement, on est dans une procédure de crise et on doit répondre. Alors il n'est pas populaire de proposer ce genre de chose. Evidemment que cela fait bien de dire: «On va proposer des augmentations de primes, et on pourrait même proposer un quatorzième salaire.» Mais vous savez, ceux qui nous inondent de paroles en ce moment, avec leur diarrhée verbale, que ce soit le MCG ou le parti socialiste, ce sont ceux qui ne vont pas voter le budget ! Donc s'il n'y a pas d'annuité, s'il n'y a pas d'engagement de policiers, s'il n'y a pas d'engagement de fonctionnaires pour la formation, c'est à eux que vous voudrez vous en prendre... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...parce qu'ils ne vont pas voter le budget ! Donc tout ce qu'ils vont vous dire n'est que du bluff !

Nous, nous voulons un budget. Nous sommes un parti gouvernemental, nous sommes sérieux et responsables, nous ne sommes pas populistes ! (Commentaires.) Evidemment que ce n'est pas populaire, mais nous vous demandons de bien vouloir accepter ce projet de loi, qui est douloureux, certes, mais pragmatique ! Parce que nous voulons un budget pour Genève, et pour, justement, que la fonction publique puisse continuer à travailler avec les moyens dont elle a besoin ! (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est maintenant à M. le député Eric Bertinat.

M. Eric Bertinat (UDC). Merci, Monsieur le député... Monsieur le président, pardon ! (Rires.)

Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, on connaît la réaction portant à dire: «Oui, on veut des logements, mais pas devant ma fenêtre.» Je pense que la réaction d'une partie de la fonction publique s'inscrit tout à fait dans cette démarche: «Oui, on a un budget catastrophique; oui, on a un déficit colossal...» - on vous dit 350 millions, mais en réalité c'est 410 millions sans les 60 millions des SIG. «Oui, il faut faire des efforts, mais pas chez nous.» C'est un peu cela que l'on entend de la part de certaines catégories de la fonction publique qui ont manifesté bruyamment tout à l'heure. L'effort qui leur est demandé dans un premier temps était d'une demi-annuité, c'est 6 millions. Il est vrai que ce n'est pas énorme. Mais enfin, comme l'a fort justement dit ma collègue Anne-Marie von Arx-Vernon, c'est un effort, un geste de solidarité envers tous ceux qui, déjà maintenant, commencent à souffrir. Je pense particulièrement aux PME et à la catégorie des commerçants, à Genève, qui eux voient vraiment la crise arriver. Finalement, ces mêmes personnes qui payent des impôts, ne serait-il pas légitime qu'on leur retourne en quelque sorte l'ascenseur et qu'on leur dise: «Oui, on s'en rend quand même compte et on est prêt à faire un effort» ?

Alors demi-annuité ou annuité complète, cela ne va pas changer grand-chose pour l'UDC, qui ne veut pas de ce budget, mais enfin, on va quand même travailler dans l'esprit de tenter de sauver les meubles. C'est-à-dire que si l'on peut avoir l'annuité complète, tant mieux. C'est 15 ou 16 millions, sauf erreur. Ce n'est quand même pas rien. Si l'on doit se contenter d'une demi-annuité, on s'en contentera. Ce qui serait, à mon avis, inconvenant en ces temps extrêmement difficiles d'un point de vue économique, c'est de passer comme chat sur braises sur ces difficultés et de laisser la fonction publique, telle une caste d'intouchables, comme l'a signifié notre collègue Golay, alors que d'autres, encore une fois, non seulement voient arriver la crise économique, mais la subissent déjà. Alors, dans un premier temps, l'UDC votera ce projet de loi. Si l'amendement qui nous sera proposé par le Conseil d'Etat, de revenir à une demi-annuité, passe, on fera avec et l'on reparlera de tout cela demain matin.

Mme Loly Bolay (S). Tout à l'heure, un préopinant du parti radical nous rappelait la dette de l'Etat de Genève: 11 milliards ! (Commentaires.) Oui, Mesdames et Messieurs les députés: 11 milliards - oui, Monsieur Jeannerat. Mais heureusement que l'on a fait le transfert d'actifs, il y a quelques années, sinon cette dette aurait été bien plus considérable. Mais la faute à qui, Mesdames et Messieurs les députés ? Les partis de l'Entente et l'UDC, vous pratiquez comme à Berne: le principe des caisses vides. D'abord, on fait des cadeaux ! On fait des cadeaux aux nantis, qui n'en ont pas besoin. Ensuite, puisqu'il y a moins de recettes, il faut couper dans le social et sacrifier la fonction publique, ce que vous être en train de faire maintenant. (Brouhaha.)

Alors, on vous le rappelle aujourd'hui - mais on va vous le rappeler encore demain, quand on votera le budget - cette baisse d'impôts nous coûte très, très cher. Mais vous êtes les fautifs de cette baisse d'impôts. Parce que, gouverner, c'est prévoir. Or nous, les socialistes, étions totalement opposés à cette baisse d'impôts, car on nous avait dit que les années à venir seraient catastrophiques. (Brouhaha.) Mais, bien évidemment, vous avez voulu faire un cadeau à vos amis. Que s'est-il passé en 2009 ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.) En 2009, l'Etat de Genève a donné une indemnité aux cadres supérieurs de la classe 27: 8,3%, l'équivalent d'un quatorzième salaire. Voilà, on a encore une fois fait bénéficier ceux qui n'ont pas besoin d'en avoir plus ! Mais on les fait bénéficier... On leur a dit: «On est très gentils, on vous donne encore un salaire de plus - quatorze salaires.»

Le parti socialiste vous a indiqué qu'il était prêt à entrer en matière pour dire: «Ecoutez, cette annuité, on est d'accord... Mais alors, on touche ceux qui, en 2009, ont profité de cette indemnité extraordinaire.» Eh bien non ! Non, pas du tout ! On veut encore pénaliser ceux qui, aujourd'hui... Car, à l'Etat, vous savez, il y a des petits salaires ! Que va-t-il se passer en 2012 ? Il y a l'augmentation des primes de caisse maladie... Il y a des gens qui connaissent des augmentations d'impôts... Que va-t-il arriver ? Eh bien, en définitive, ils auront un pouvoir d'achat qui sera moindre. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, ce que vous nous demandez.

J'aimerais aussi vous rappeler que, pendant une année - depuis l'année dernière, toute cette année - vous n'avez pas arrêté de nous dire: «Davantage de policiers: il faut que l'on reconnaisse le travail que les policiers effectuent sur le terrain, car ce qu'ils font est remarquable»... Et c'est comme cela que vous leur montrez votre reconnaissance ?! C'est comme cela que vous le faites ?! En leur disant: «Vous travaillez beaucoup, mais vous devez aussi faire un effort. Parce que, voyez-vous, nous avons fait des cadeaux à nos amis, donc vous, vous devez passer à la caisse. Malgré le fait que l'on vous aime beaucoup - car nous vous aimons, vous, les policiers - vous devez faire cet effort-là»... Vous êtes une bande d'hypocrites, Mesdames et Messieurs les députés, parce que vous n'êtes pas du tout cohérents avec vos discours !

Le parti socialiste vous l'a dit, on était prêts à entrer en matière, mais uniquement pour toucher les hauts cadres - et pas pour toucher tout le monde qui fait des sacrifices ! C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ce projet de loi. Nous verrons ensuite l'amendement de M. le conseiller d'Etat Hiler sur la demi-annuité, nous en parlerons tout à l'heure. (Quelques applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que je donnerai la parole aux trois rapporteurs et au Conseil d'Etat pour terminer. Entretemps, la parole est à Mme Prunella Carrard.

Mme Prunella Carrard (S). D'abord un premier mot - vous transmettrez à ma préopinante du PDC, Mme von Arx-Vernon - pour dire que le PDC n'a pas voté le budget en Ville de Genève, donc nous n'avons pas de leçon à recevoir au niveau du budget cantonal. (Commentaires. Le président agite la cloche.)

J'en viens à la suite. En temps de crise, Mesdames et Messieurs, nous estimons que c'est aux plus riches d'être solidaires, et non aux moins bien lotis. (Brouhaha.) Certains l'ont compris, ce sont des exemples internationaux, mais tout de même: Mario Monti, en Italie, a décidé qu'il renonçait à son salaire de premier ministre; et de très riches Américains ou Français ont proposé de payer plus d'impôts afin d'essayer d'enrayer la crise. Donc il y a des possibilités, et certaines personnes extrêmement bien loties sont prêtes à mettre la main au porte-monnaie. (Commentaires.)

Alors oui, Madame von Arx-Vernon, on fait d'abord passer à la caisse la fonction publique, et on ne mutualise pas, pour l'instant, les efforts, puisqu'on n'a pas vu arriver la suppression des privilèges fiscaux pour les plus fortunés. Mais on ne demande pas de hausse d'impôts, aujourd'hui; on vous demande simplement de revenir à la situation de 2009, ce qui nous permettra d'engranger à nouveau près de 400 millions pour les caisses de l'Etat, afin d'essayer de rééquilibrer petit à petit les budgets.

Je terminerai par dire que, au niveau de l'Etat, si certains d'entre vous ont regardé les grilles salariales, il y a des fonctionnaires qui vivent avec moins de 4000 F net... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...par mois. Et 4000 F net par mois, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas beaucoup ! Oui, une annuité de plus ou de moins peut faire une différence certaine lorsqu'on a une famille à nourrir.

Je terminerai là, car tout a été dit par mes préopinants socialistes, et je vous demande de refuser ce projet de loi.

M. Roger Golay (MCG). On parle de mesures... Je rappelle simplement que les effets induits sur les employés et les fonctionnaires de l'Etat, eh bien, cela va porter, pour certains, entre une année, pour le mieux - et encore, il y aura des effets sur leur caisse de prévoyance - et vingt-deux ans, pour les plus jeunes ! Alors voilà ce qui n'est pas normal ! On dit: «Soyez solidaires»... Mais pas temporairement ! Au lieu de leur accorder peut-être quelque chose - s'il avait eu des discussions avec la fonction publique - et de leur dire: «D'ici à une année, si la croissance reprend, on réintroduit votre annuité»... Eh bien non, ce n'est pas le cas; là c'est sur une très longue durée. Donc des gens vont supporter cette crise pendant vingt-deux ans, alors que l'on va traverser des périodes fastes, des périodes de croissance, etc. Et c'est là que ce n'est pas normal.

Je tiens à rappeler ceci aux Verts, qui ne veulent pas voter, prétendument parce qu'il y a l'article 24. Très bien, mais c'est lorsqu'il y a un intérêt personnel. Comme vous demandez une réduction de vos salaires pour les fonctionnaires, vous pouvez très bien voter ! Assumez votre rôle, avec votre groupe ! Est-ce que ce sera la première fois que l'on verra les Verts diminuer les salaires de la fonction publique ? Alors soyez solidaires aussi par là !

Puisque je parle de solidarité, soyez aussi solidaires, vous, les députés ! Quel est l'effort que vous faites pendant les législatures, afin de réduire les dépenses du Grand Conseil ? Aucun. Je n'ai jamais vu d'effort de votre part. (Commentaires.) Vous continuez à dépenser ! Sans compter ! (Protestations. Le président agite la cloche.) (Commentaires.) J'en «profite aussi» ! Mais nous, MCG, avions déjà renoncé ! Nous avions renoncé aux augmentations des jetons de présence. (Commentaires.) Là, nous, nous sommes conformes à nos dires. Or vous, vous n'êtes pas solidaires, mais les autres doivent l'être... Soyez cohérents envers vous-mêmes ! (Commentaires.) J'ai terminé, Monsieur le président, je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je rappelle que vous devez vous adresser à la présidence, si possible. La parole est à Mme Marie-Thérèse Engelberts.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président. Donc je vais m'adresser à vous, et vous transmettrez à Mme von Arx-Vernon. Je vous en remercie.

Je voulais simplement dire que «diarrhée verbale», pour moi, évoquait quelque chose en médecine qui est de l'ordre du trouble intestinal, très désagréable - je crois que tout monde l'a connu - associé à des manifestations perturbantes et malodorantes. Je laisse donc à Mme von Arx-Vernon, Monsieur le président... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...comme je le disais, la qualité d'un niveau d'expression et de subtilité manifeste de langage et de vocabulaire. Je laisse aussi à la préopinante le fait d'associer le phénomène de la diarrhée à l'expression populiste, voire, comme elle l'a dit, populaire. (Brouhaha.) Je pense que tout le monde sera très content d'être traité de cette manière ! Et avec quel brio, quel enthousiasme ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Et quel support du PLR, par des applaudissements nourris et nombreux ! (Remarque.) J'ai envie de continuer sur le même sujet, Madame la députée - et conseillère nationale. Sous les applaudissements nourris du PLR, cela nous laisse confus, voire interloqués... (Remarque.) ...même si cela ne gêne pas certains... (Remarque. Commentaires.) Bon, quand elle aura terminé, je pense... (Commentaires. Rires.)

Le président. Poursuivez, Madame la députée !

Mme Marie-Thérèse Engelberts. Merci ! Avec quel brio, et sous les applaudissements nourris... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...du PLR, cela nous laisse confus et interloqués face à ce langage ordurier ! (Commentaires.)

Une voix. Bravo !

Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je donne la parole à M. Pierre Weiss.

M. Pierre Weiss (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que l'on ne peut quand même pas dire n'importe quoi sur les chiffres ! Quand il est prétendu, du côté socialiste, que les baisses d'impôts ont causé les trous dans les finances publiques, c'est faux ! En l'an 2000, l'impôt sur les personnes physiques a rapporté 2,8 milliards - en l'an 2000 ! En l'an 2010: 3,6 milliards ! Je vous laisse calculer la différence. Même pour les socialistes, c'est une augmentation. Les comptes de l'an 2010, à 3,6 milliards, vont passer, au projet de budget 2012, à 3,8 milliards: 200 millions de plus pour les personnes physiques ! Que l'on m'explique si, du côté des personnes physiques, qui ont été les seules bénéficiaires des baisses d'impôts, cela se traduit par une réduction des recettes pour l'Etat ! Non, il y a plus de recettes pour l'Etat, notamment parce qu'il y a eu un certain nombre de secteurs économiques qui ont très bien fonctionné, en particulier celui que vous vomissez: le secteur financier. S'il y a des problèmes aujourd'hui en matière de recettes, c'est justement à cause des problèmes qui touchent les entreprises. C'est précisément un secteur qui, jusqu'à ce jour, n'a pas bénéficié de diminution de la fiscalité. Et vous savez fort bien que M. Hiler se prépare à modifier cet aspect-là, sinon les entreprises, notamment celles qui ont des activités internationales, partiront !

Deuxième erreur commise par certains, ce sont les chiffres qui ont été donnés sur les salaires. Le salaire brut le plus bas, en annuité zéro, de la classe 4 - et je vous prie de préciser combien de personnes se trouvent dans cette classe de salaire - est de 4066 F par mois, x13 ! C'est 52 378 F par an ! Combien de salariés du secteur privé, effectivement, rêveraient d'avoir ce salaire ? Et vous osez dire que, lorsqu'il n'y a pas d'augmentation, il y a une diminution ? Je crois, Monsieur Golay, que, là aussi, l'enquête PISA devrait vous montrer qu'à Genève il y a de très mauvais résultats en mathématiques ! Je crains de voir où vous vous trouvez.

Le troisième point... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...concerne les dépenses sociales. Les dépenses sociales dans le budget 2012 sont en augmentation par rapport au budget 2011, sont en augmentation par rapport aux comptes 2010 ! Il faut en être conscient. Cet Etat assume ses responsabilités à l'égard des plus faibles de notre société. Or les plus faibles de notre société, ce n'est pas la fonction publique.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, le Bureau a décidé de clore la liste. Vont encore s'exprimer: MM. Buchs, Desbaillets, Saudan, les trois rapporteurs et le Conseil d'Etat. Monsieur Buchs, vous avez la parole.

M. Bertrand Buchs (PDC). J'aimerais revenir sur la baisse d'impôts, sur ce débat concernant la baisse d'impôts. Je souhaite dire ici que la baisse d'impôts a été votée par le peuple. On n'arrête pas de dire qu'il faut respecter les décisions du peuple - on l'a entendu lors de la discussion sur la gouvernance et certaines régies de l'Etat - et, quand le peuple vote une baisse d'impôts, on vient nous dire: «Ah, il ne fallait pas la voter ! Le peuple a tort.» La baisse d'impôts, ça a été pour les classes moyennes. Et les classes moyennes... (Remarque.) Oui, la baisse d'impôts a été pour les classes moyennes ! Et les classes moyennes ont eu besoin de cette baisse d'impôts. Cette dernière a aussi permis à l'économie de fonctionner. Parce que, quand on gagne un peu d'argent, on le redépense pour autre chose et l'économie fonctionne. Donc la baisse d'impôts n'a pas été un vol ! Elle est utile ! Je vous rappelle que le canton de Vaud, l'année prochaine, va baisser les impôts ! (Remarque.) Le canton de Vaud va baisser les impôts, parce que, quand on fait un grand bénéfice, on doit aussi faire participer la classe moyenne. C'est toujours la classe moyenne qui paie tout... plein pot ! Elle n'a qu'une chose à faire: ne rien dire et se taire. Et la classe moyenne n'est pas dans la rue.

J'aimerais quand même que vous vous rendiez compte de la situation économique actuelle, que vous vous rendiez compte que, les employés privés, eh bien, on leur supprime leur treizième salaire, on les met à la porte séance tenante... Ces gens-là n'ont rien pour se retourner ! Or vous avez la garantie de l'emploi, vous avez un bon salaire; et lorsqu'on demande de faire un effort, lorsque les gouvernements demandent de faire un effort momentané... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...il faut l'accepter ! Car, de toute façon - de toute façon ! - il faudra aussi demander un effort à la classe moyenne. Alors si vous voulez que la classe moyenne vote une hausse d'impôts, il faudra aussi que quelque chose soit fait au niveau de la fonction publique. Sinon, ce ne sera pas possible.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. René Desbaillets (L). J'ai une petite question qui me turlupine. (Remarque.) Je ne suis pas beaucoup dans les chiffres, je ne fais pas partie de la commission des finances, etc. J'ai une question qui turlupine un petit patron, qui a beaucoup de contacts avec d'autres petits patrons de PME genevoises, et notamment aussi leurs employés. La question est: que vaut en francs la sécurité de l'emploi ? Personne n'a vraiment essayé de savoir ce que cela valait. Et je fais juste un petit calcul, un petit constat: l'employé du privé qui se retrouve au chômage a 20% de moins de salaire. Alors une demi-annuité par rapport à -20%, je pense que ce n'est pas un très gros sacrifice pour la fonction publique. (Applaudissements.)

M. Patrick Saudan (R). Ce soir, on ne parle pas de mépris pour la fonction publique. On ne fait pas la morale, on parle juste de solidarité, d'une répartition équitable des sacrifices. Vous transmettrez à Mme Bolay que, comme l'a dit le député Weiss, on n'a pas coupé dans l'aide sociale durant ces cinq dernières années, les budgets de l'aide sociale ont été en constante augmentation. Concernant le quatorzième salaire, qu'elle a remis en cause, ce quatorzième salaire, qui est octroyé à certains hauts fonctionnaires du petit Etat et à beaucoup, beaucoup de médecins au sein des HUG, est l'une des rares possibilités de retenir des cadres de haute valeur à Genève. Il faut le savoir, dans la fonction publique, les cadres supérieurs sont mal payés, Madame Bolay, au contraire des petits salaires, qui sont généralement supérieurs à ceux des autres cantons. Si vous voulez avoir une fuite des cerveaux vers d'autres cantons ou dans le privé, annulez ce genre de méthode.

En tant que fonctionnaire, en tant que haut cadre, et n'étant pas au maximum de mes annuités, je tiens à vous dire que je ne me sens pas concerné par l'article 24 et que je voterai la suppression totale de l'annuité.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Tout à l'heure, M. Deneys a dit que le parti démocrate-chrétien portait la chandelle... Je suis heureux d'apporter un peu de lumière, Monsieur le rapporteur de minorité, pour éclairer simplement les débats obscurs qui essaient de semer la confusion dans cette enceinte ! Et que vous menez comme rapporteur de minorité. Pourquoi ? Parce que la vraie solidarité avec la fonction publique n'est pas la démagogie dont vous faites preuve ce soir, Messieurs les rapporteurs de minorités ! La vraie responsabilité, la vraie solidarité, c'est de pouvoir assurer les salaires des fonctionnaires sur le long terme ! Or, en vous écoutant, que constate-t-on ? On constate qu'en fait vous trahissez cette fonction publique sous prétexte de la soutenir. Pourquoi la trahissez-vous ? Vous la trahissez parce que vous refusez d'envisager toute mesure de réduction du déficit de l'Etat. Cela veut dire que vous voulez accroître son déficit; cela veut dire que vous voulez accroître son endettement; cela veut dire que vous menez la même politique que les socialistes grecs, qui ont mené l'Etat grec à la faillite ! Et la faillite de l'Etat signifie que l'on ne peut plus payer les fonctionnaires ! (Commentaires. Le président agite la cloche.) On ne peut plus payer les fonctionnaires ! C'est cela que nous voulons éviter. Nous voulons un Etat responsable, qui limite les déficits... (Commentaires.) ...qui limite les déficits de manière à pouvoir assurer la paie des fonctionnaires. Voilà la première chose.

La deuxième chose a été rappelée par M. Cuendet, avec les caisses de pension. Il va falloir injecter 2 milliards dans les caisses de pension de la fonction publique. Ou plus ! Qui va payer ces 2 milliards ? Ce ne sont pas les fonctionnaires, ce sont les contribuables du canton de Genève. Qui sont ces contribuables ? C'est le secteur privé. Sans secteur privé, il n'y a pas d'Etat, il n'y a pas de fonctionnaires, il n'y a pas de milliards pour la caisse de pension. Simplement, par solidarité aussi avec ces travailleurs du privé - qui eux, pour la plupart, n'auront pas le droit à des augmentations, parce que le secteur privé vit dans une crise - eh bien, je vous demanderai un tout petit peu de solidarité aussi avec les travailleurs du secteur privé, qui contribuent à financer votre caisse de pension et la caisse de pension de la fonction publique. Donc la solidarité, la responsabilité avec la fonction publique, c'est nous qui l'avons, ce n'est pas vous !

J'aimerais aussi rappeler que la proposition de suspendre la demi-annuité, c'est vrai, a été faite par le Conseil d'Etat. Qui est l'employeur ! Si l'employeur a jugé que cela pouvait être possible de suspendre une demi-annuité pendant deux ans, nous, nous estimons que nous pouvons la suspendre en totalité pendant une année. Nous proposons un exercice équivalent, mais sur une année. Si l'employeur a jugé que c'était possible, je ne vois pas pourquoi nous, nous ne pourrions pas le suivre.

Il s'est trouvé aussi que les défenseurs de la majorité ne sont pas des gens obtus. Le Conseil d'Etat nous a dit qu'il allait faire une proposition pour rétablir la demi-annuité, et qu'il allait proposer de compenser cette demi-annuité par des propositions de diminution du déficit équivalente. Cela n'a pas été fait. Le Conseil d'Etat nous a proposé un projet de loi qui visait à réduire les frais de perception de 3% à 2%, mais ce n'est pas une proposition que nous pouvons étudier ce soir et pendant ce budget; c'est une proposition qui doit aller en commission et qui n'est pas valable dans le cas qui nous occupe ce soir.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, je vous enjoins de voter ce projet de loi, sans amendement, de manière que les vrais responsables, ceux qui veulent vraiment soutenir la fonction publique, puissent le faire via ce projet de loi et surtout via le vote du budget demain.

Présidence de M. Pierre Losio, président

M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de première minorité. La main dans le sac, Monsieur Mettan ! Vous êtes pris la main dans le sac, pour délit aggravé de mauvaise foi. (Commentaires.) Eh bien oui ! Vous venez de dire, il y a quelques secondes: «La proposition du Conseil d'Etat de réduire de 3% à 2% n'est pas une proposition que nous avons pu étudier.» Figurez-vous que... (Remarque.) Si, Monsieur Mettan, puisque le MCG, il y a quelque deux ans, a déposé exactement le même projet de loi, le PL 10604, qui a été traité en commission fiscale. Et je vais vous dire, Monsieur Mettan, qu'il est passé en séance plénière, le 14 avril 2011 à 17h - vous voyez que cela ne fait pas si longtemps que cela. Et des membres de votre parti ont même pris la parole. M. Michel Forni, par exemple, qui a évidemment balayé ce projet de loi parce qu'il venait du MCG. Maintenant, nous sommes très curieux de voir que ce projet de loi vient du Conseil d'Etat. Finalement, on saura qui va assumer ses responsabilités pour introduire le minimum fédéral; il y a le Mémorial, donc j'invite les auditeurs à le consulter, concernant ce projet de loi. Vous voyez, Monsieur Mettan, ce projet a été étudié en commission, il y avait un rapporteur de majorité et un rapporteur de minorité - finalement, tous les éléments ont déjà été donnés. Le rapporteur de majorité était Jean-Michel Gros et le rapporteur de minorité MCG était Pascal Spuhler. Voilà !

Tout cela pour vous dire que ce projet a été étudié. Et si le Conseil d'Etat l'a déposé, c'est qu'il était valable. J'aimerais vous rappeler ici les déclarations du Conseil d'Etat, à l'époque, puisque M. David Hiler avait fait une très longue déclaration, en disant - je cite - que, pour l'instant, ce projet de loi devait être refusé, mais que le Conseil d'Etat se réservait la possibilité, si la situation se détériorait, de reproposer...

Une voix. Il est hors sujet, Monsieur le président !

M. Eric Stauffer. Ah, je suis hors sujet ? On ne parle pas du projet de loi sur la fiscalité ? Excusez-moi... (Remarque.)

Le président. Monsieur Jeannerat, il est 22h55, on finit tranquillement !

M. Eric Stauffer. Vous pouvez rétablir...

Le président. Finissez, poursuivez, Monsieur Stauffer.

M. Eric Stauffer. Bref, je continue. Donc, M. le conseiller d'Etat a dit ceci - encore une fois, c'est sur le site du Grand Conseil. Je cite M. David Hiler: «Par conséquent, la position du Conseil d'Etat est, en substance, la suivante: à l'heure actuelle, refusez ce projet de loi. Si nous sommes amenés, à la suite d'un accord entre la Suisse et l'Union européenne, à devoir trouver des mesures compensatoires pour s'épargner trop de soucis en notre bonne république, nous n'aurons aucun état d'âme à mettre cette taxe à 2%.»

La situation aujourd'hui commande, Monsieur le conseiller d'Etat, de pousser ce projet de loi qui avait été déposé par le MCG, mais qui est maintenant redéposé par le Conseil d'Etat. Et cela nous donne, Monsieur Mettan, cette équité... (Remarque.) ...et cette chose que vous chérissez absolument: l'harmonie du consensus. Vous voyez, le déficit ne va pas s'aggraver et nous pourrons satisfaire les milliers de fonctionnaires en maintenant leur annuité. Alors maintenant, on va voir si vous assumer vos responsabilités.

Ensuite, j'aimerais dire ceci aux éminents membres du PLR, puisque j'ai entendu dans les déclarations - vous transmettrez, Monsieur le président - que, si les gens n'étaient pas bien payés, c'était la fuite des cerveaux. Alors j'en déduis par ces déclarations que, au niveau - à la ramasse - auquel sont payés les députés, nous n'avons plus que la lie de ceux-ci, puisque les cerveaux sont tous partis dans le secteur... (Brouhaha.) ...privé et, donc, ne font pas de politique, parce que cela ne paie pas. Donc nous en prenons acte. (Commentaires.)

Le président. Chut !

M. Eric Stauffer. En outre, je souhaite quand même rappeler une chose aux éminents membres de la droite, concernant la situation actuelle. J'aimerais que l'on me rappelle de quelle majorité est le gouvernement. Parce que, si j'ai bon souvenir, il n'est pas à majorité de gauche ! Il est bien à majorité de droite ! Donc finalement, on voit aujourd'hui que les économies doivent être faites sur les fonctionnaires, et non pas dans d'autres domaines, puisque nous entendons les pleureuses dire: «L'Etat est trop gros ! Il faut le réduire !» Tout cela appuyé par l'UDC. «Il faut moins de fonctionnaires !» Rappelez-moi qui est aux commandes de l'exécutif. Qui a fait cette machine étatique qui aujourd'hui est trop grosse et en déficit ? Je vous le demande. Mais je demande surtout aux citoyens de s'en souvenir lors des prochaines votations. Parce que là, finalement, il y a quand même une légère incohérence dans le discours politique.

Mesdames et Messieurs, je crois qu'il faut être cohérents. (Commentaires.) Je crois que nous ne pouvons pas décemment réduire l'engagement, la motivation, des fonctionnaires qui ont dédié leur carrière au service de la communauté et au service d'autrui. J'estime qu'il faut les respecter. J'espère bien, Monsieur le conseiller d'Etat, que vous serez suffisamment persuasif, puisque, à l'évidence, le Mouvement Citoyens Genevois, lorsqu'il avait présenté ce projet de loi, n'avait pas été assez convaincant. Cet objet avait été balayé, je peux même vous donner les résultats du vote, par 70 non contre 14 oui. Eh bien, nous verrons. Je souhaite de tout coeur, et notamment pour les fonctionnaires de l'Etat, que vous puissiez être convaincant, récupérer ces millions qui manquent, pour rétablir cette demi-annuité et faire en sorte que les fonctionnaires aient la totalité des mécanismes salariaux. C'est en tout cas le voeu le plus cher qu'émet ce soir le Mouvement Citoyens Genevois.

Je vous demande de refuser l'entrée en matière de ce projet de loi.

M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai l'impression que c'est vraiment une question de méthode qui pose problème. Personne, et en particulier pas les socialistes, ne conteste que, si des efforts doivent être faits, ils peuvent aussi l'être par les fonctionnaires; personne ne conteste que, si des efforts doivent être faits, ils peuvent aussi l'être par les subventionnés; personne ne conteste que, si des efforts doivent être faits, ils peuvent aussi l'être par les SIG, en contribuant davantage au budget cantonal.

Maintenant, ces efforts, il l'a été évoqué par certains, sont une question de répartition équitable entre différents bénéficiaires de prestations, bénéficiaires de subventions et salariés. En réalité, tout se négocie, bien entendu ! Mais, ici, il n'y a aucune symétrie dans ces efforts: on demande aux subventionnés de faire plus avec moins. Parce que la population, la précarité et les besoins augmentent, et parce que la population évolue dans ses fonctionnements sociétaux de consommation. Pour ces simples raisons, on demande de faire plus avec des subventions diminuées ! Aux fonctionnaires, on leur demande de faire plus avec des salaires figés ! Où est l'effort de ceux qui gagnent de l'argent ? Où est la contribution de ceux qui ont des moyens, des moyens élevés parfois, pour éventuellement contribuer à ce retour à l'équilibre ?

Ici, dans ce projet de budget 2012, le Conseil d'Etat nous demande de piquer du fric aux SIG; maintenant, de ne pas payer davantage les fonctionnaires, et puis, de baisser les subventions ! Mais il n'y a pas d'efforts demandés aux personnes ayant des revenus élevés, alors qu'elles pourraient aussi contribuer ! On ne dit pas qu'il faut les priver de tout revenu, mais il s'agit de répartir ces efforts entre les personnes qui ont la capacité de le faire. Cet équilibre n'est pas atteint avec ces deux projets de lois, celui sur les SIG et celui-ci, sur la fonction publique et les collaborateurs des subventionnés. Alors, Mesdames et Messieurs les députés, c'est aussi chez les autres... (Brouhaha.) Effectivement, c'est aussi chez les autres qu'il faut aller chercher des moyens supplémentaires, on ne peut pas toujours demander aux mêmes de faire des efforts.

Les socialistes ont déposé le projet de loi 10883, qui est actuellement à la commission fiscale. Ce projet de loi demande trois choses: l'abolition du bouclier fiscal, l'imposition à des taux plus élevés des revenus au-delà de 800 000 F par an, et la taxation des fortunes - et ce sont les fortunes nettes - supérieures à 1,5 million. Ce projet de loi, avec ces trois mesures, permet de générer 100 millions de francs de recettes supplémentaires, selon les estimations 2008 fournies par l'administration fiscale avant-hier.

Pour cette simple raison, je pense qu'il est raisonnable de dire qu'avant d'adopter ce projet de loi, qui demande aux fonctionnaires de faire un effort de 12 millions et aux subventionnés de faire un même effort de 12 millions, il serait juste opportun d'entendre le message de ce Grand Conseil sur les questions de recettes fiscales supplémentaires ! On ne peut pas demander de réduire un déficit de 400 millions... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...à la fonction publique et aux subventionnés: l'effort doit être partagé !

Et nous, socialistes, sommes attachés au budget, nous ne sommes pas dogmatiques sur 350 millions ou 450 millions, nous demandons une répartition des efforts ! C'est pour cela que nous demandons un signal de la part de ce Grand Conseil, et en particulier de deux partis. Le MCG a beau jeu, ce soir, de se plaindre du traitement infligé aux fonctionnaires, alors qu'il a précisément voté cette baisse d'impôts aux conséquences annoncées dans le projet de loi ! Relisez le rapport sur le projet de loi 10199, c'est indiqué, vous avez toutes les simulations et des estimations des recettes fiscales après l'adoption de ce projet de loi. Les députés ont voté en connaissance de cause ! Et si ce projet de loi n'avait pas été adopté ici, le peuple n'aurait pas eu à se prononcer. Donc ce sont bien les députés qui ont la responsabilité de cette baisse d'impôts et qui doivent en assumer les conséquences, en particulier au MCG.

L'autre parti auquel j'aimerais m'adresser, ce sont les Verts. Les Verts, à un moment donné, doivent choisir. Aujourd'hui, le capitalisme connaît une crise comme jamais, une crise sans précédent, une crise structurelle qui menace l'ensemble de notre système économique mondial: cette société doit changer ! Le capitalisme est fini ! (Commentaires.) Pour que l'on puisse en sortir un jour, avec un monde si possible meilleur, il faut un projet de société ! Ce projet de société doit être construit sur des valeurs écologiques et des valeurs sociales. Eh bien, les Verts, un jour, doivent choisir quel modèle économique et quel modèle de société ils défendent ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) S'agit-il pour eux de conforter le système capitaliste et sa déchéance programmée ? Ou s'agit-il pour eux d'envisager un nouveau projet de société ? (Brouhaha.)

La responsabilité du vote de ce budget, c'est aussi la responsabilité pour les prochaines élections et pour l'avenir de notre canton. Il faut savoir où nous voulons aller, il faut choisir ce que nous voulons faire payer, et à qui ! Dans ce sens, ces partis, le MCG - parce qu'il ne peut pas demander le beurre et l'argent du beurre - et les Verts - parce qu'ils ne peuvent pas changer la société... (Remarque.) ...en défendant un système qui la détruit - eh bien, pour ces simples raisons, doivent prendre leurs responsabilités ! (Brouhaha.)

Un déficit de 450 millions n'est pas un problème intrinsèque pour Genève ! (Brouhaha.) C'est la méthode des efforts répartis qui doit être trouvée pour sortir de cette situation ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à refuser l'entrée en matière de ce projet de loi. Vivre sur des douzièmes provisionnels pendant quelques mois, avant de trouver un accord qui peut être réaliste, qui répartit les efforts, ce n'est un drame pour personne ! Je vous invite vraiment à dire non à ce projet de loi.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est Mme Emery-Torracinta.

Mme Anne Emery-Torracinta (S). Merci, Monsieur le président... (Commentaires.) Mais... Attendez, peut-être, de me laisser parler !

Le président. La parole est à Mme Anne Emery-Torracinta, qui va justifier sa position, non pas politique...

Mme Anne Emery-Torracinta. D'aucuns pourraient s'étonner que certains membres de la fonction publique votent ce soir pour ou contre ce projet de loi. J'aimerais dire que, pour ma part, je ne suis pas du tout concernée par l'article 24, puisque j'ai la chance d'être au maximum des annuités, donc mon salaire ne changera pas, que l'on n'accepte ou non ce projet de loi. Et je prendrai part au vote.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez parlé de beaucoup de choses. Je ne pourrai pas intervenir sur tous les sujets que vous avez soulevés; certains trouveront une réponse dans le débat de demain.

D'abord, je ne suis pas sûr, à entendre les orateurs, que tout le monde ait bien saisi la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui. Le Conseil d'Etat a proposé une demi-annuité à la place d'une annuité, et ce pendant deux ans, étant admis que, si la situation pouvait se modifier - on peut toujours rêver - on pouvait en rediscuter. Deuxièmement, la commission des finances a décidé - du moins sa majorité - de ne pas verser d'annuité du tout. Le Conseil d'Etat, donc, défend l'entrée en matière sur ce projet de loi et dépose un amendement pour revenir à sa position initiale, qui est celle d'une demi-annuité.

Le souci du Conseil d'Etat est le suivant. Le Conseil d'Etat souhaite que la réforme du cycle d'orientation puisse se faire dans de bonnes conditions, que des écoles de police puissent être ouvertes, qu'il ne faille pas diminuer des postes de gardiens pour pouvoir payer ceux qui, de stagiaires, vont passer à gardiens. Le Conseil d'Etat souhaite que les EMS ouverts aient des dotations suffisantes, que les EPH à ouvrir aient des dotations suffisantes. Or cela ne peut pas se faire sans budget ! Ceux qui souhaitent que nous le fassions voteront donc le budget. Vous êtes extrêmement difficiles à concilier, Mesdames et Messieurs les députés, et c'est bien normal. Toujours est-il qu'il y a une loi qui prévoit qu'il faut 51 personnes pour voter le budget et que nous devons faire avec les exigences des uns et des autres.

Sur la relation avec la fonction publique - cela me permet d'ailleurs d'introduire ce que je développerai un peu lorsqu'il sera question de l'amendement du Conseil d'Etat - si le Conseil d'Etat n'a pas d'emblée ouvert des négociations sur la demi-annuité ou même sur la suppression de l'annuité, pour dire que l'on se met d'accord sur la demi-annuité, il y a une raison très simple: nous n'aimons pas cette méthode ! Nous n'aimons pas toucher les annuités. Cela ne signifie pas que nous ayons un coeur exagérément sensible, cela signifie que la mesure est injuste ! Parce qu'elle ne touche pas tout le monde et que, tant que nous ne connaissions pas l'indexation, le niveau d'inflation - que nous connaissons au 30 octobre - il ne nous était pas possible de nous prononcer sur la question de l'annuité. Si nous avions eu 0,3% ou 0,4% d'indexation - ce qui était parfaitement possible - c'est sur ce levier que nous aurions agi et nous n'aurions pas agi sur l'annuité. Une mesure est assez compréhensible. C'est compliqué d'augmenter les salaires de la fonction publique si les revenus généraux de la société n'augmentent pas. L'autre est en effet injuste, parce qu'une partie - et chacun dans sa catégorie des mieux payés - y échappe totalement. C'est vrai qu'elle est injuste.

Maintenant, d'un autre côté, il paraissait difficile, lorsque le Conseil d'Etat venait avec un certain nombre de propositions de nature fiscale, lorsque le Conseil d'Etat appelait un certain nombre de régies - pas dans les proportions que vous avez finalement décidées - à contribuer à l'effort, de simplement dire: «On ne touche rien.» C'est la raison pour laquelle, la fonction publique ne perdant strictement rien sur l'inflation, puisqu'il n'y en a pas - il n'y en aura d'ailleurs vraisemblablement pas l'année prochaine, si vous avez consulté le dernier rapport de la BNS - nous avons pensé que c'était une solution équilibrée. En effet, il ne nous paraissait pas possible qu'il n'y ait rien ! du tout ! pour la fonction publique, la mieux payée de Suisse, tout de même - 13% de plus que la Suisse occidentale - et d'autant plus payée que la catégorie de salaires est basse.

Nous avons cherché cet équilibre et nous déplorons - alors clairement - qu'il n'ait pas été suivi par la commission des finances, parce qu'alors il prend un caractère un peu vexatoire. Et j'ai entendu des débats que je ne souhaitais pas de nouveau entendre sur la fonction publique, notamment des attaques sur le travail. Mesdames et Messieurs, vous savez tous que la fonction d'enseignant au cycle d'orientation et à l'école primaire est devenue autrement difficile aujourd'hui que quand j'ai eu le privilège de l'exercer, il y une trentaine d'années, pendant quelques années ! Vous savez bien que le respect de l'Etat en général est beaucoup plus faible ! Vous savez bien - et c'est pour cela que nous sommes quand même entrés en matière aussi sur la question des aides-soignantes - que le travail dans une société très vieillissante est plus difficile ! Il y a plus d'efforts physiques ! Vous savez encore que, dans tous les services d'autorité, la contestation est systématique et l'injure, facile. Vous savez aussi, et nous l'assumons totalement, que nous avons voulu, dans certains services administratifs en particulier, une intensification du travail ! Et nous avons également voulu améliorer les processus et l'informatique. Dans ces conditions-là, nous trouvons très injuste que, d'abord, on déverse un certain nombre d'acrimonies qui me semblaient avoir été un peu oubliées ces temps - un petit retour sur les années nonante - et que, d'autre part, alors qu'on aurait pu faire avec la demi-annuité, on ne le fasse pas.

C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous avons demandé en introduction d'inscrire à votre ordre du jour, en urgence et avec effet immédiat, le projet non fiscal, parce que l'on ne peut pas mettre dans un budget quelque chose qui est soumis obligatoirement au peuple, celui de la commission qui est versée aux employeurs, pouvant être, selon le droit fédéral pour l'impôt à la source, de 2% à 4%; il est de 3% à Genève. Cela représente 11 millions.

Nous avons une deuxième microrecette, c'est ce que nous pouvions vous proposer. C'est lourd, mais je ne suis justement pas David Copperfield, et je ne sors pas, à 4h du matin, des recettes qui n'existaient pas dix minutes auparavant. Les estimations fiscales, je les ai fait recalculer pour le mois de novembre, elles ne sont pas en augmentation. Les intérêts que nous devrons verser ne seront pas en baisse. Et nous n'entendions pas - je pense que vous le comprendrez facilement - refaire un tour d'économie pour payer la demi-annuité qui avait été coupée.

Avec cela, Mesdames et Messieurs, si vous acceptez la solution du Conseil d'Etat, vous aurez un budget à 350 millions, puisqu'il semble impossible de faire autrement - ce n'est pas la position initiale du Conseil d'Etat, je vous le rappelle - et vous aurez aussi une demi-annuité. C'est ce que nous vous demandons de voter. C'est quelque chose qui nous permet de maintenir le partenariat social.

A ce propos, Monsieur Dandrès, l'ensemble du Cartel - ils étaient près de quarante - a été convié à un exposé qui avait lieu une demi-heure après celui destiné aux médias, pour faire une présentation complète du plan des mesures liées à la planification quadriennale. Cette séance a duré pratiquement deux heures; j'ai répondu à trente-cinq questions. Il n'y a pas un endroit en Suisse où de telles séances existent ! Il n'y a pas un endroit en Suisse où le Conseil d'Etat réunit tous les mois l'ensemble des organisations syndicales. En même temps, je ne peux pas demander aux organisations syndicales de me dire «bravo» si j'enlève une demi-annuité ! Il n'y a donc pas grand-chose à discuter. Ils ont compris ce que nous voulions faire, ils ont vu l'ensemble. Ils ont le droit de s'y opposer par les moyens qui sont les leurs.

A partir de là, Mesdames et Messieurs, si vous voulez maintenir six ans de dialogue social - assez intense, tout de même - si vous voulez maintenir la possibilité de solutions négociées, si vous ne voulez pas encourager ceux qui confondent un peu la défense des intérêts et l'utilisation néo-trotskiste ou néo-révolutionnaire de luttes pour se renforcer - sans obtenir beaucoup de résultats - alors, Mesdames et Messieurs, je vous invite à soutenir la position du Conseil d'Etat. Nous en assumons la responsabilité, c'est nous qui serons attaqués là-dessus, c'est notre boulot. Mais je pense que si nous avons choisi la demi-annuité, et pas la suppression de l'annuité, c'est que nous avons quelques raisons de le faire. Nous pensons que, du point de vue de l'équilibre des sacrifices - dont personne ne saura rien avant que les projets de lois que le Conseil d'Etat a déposés en matière fiscale aient été votés - nous sommes là dans quelque chose qui est correct. Voilà la raison pour laquelle nous vous demandons: un, d'entrer en matière; deux, de voter l'amendement du Conseil d'Etat. (Applaudissements.)

Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous nous prononçons sur l'entrée en matière du projet de loi 10892.

Des voix. Vote nominal ! (Exclamations. Brouhaha.) Etes-vous suivis ? (Appuyé.) Oui.

Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10892 est adopté en premier débat par 58 oui contre 21 non et 2 abstentions.

Appel nominal

Le président. Nous poursuivrons avec le deuxième débat demain.

Deuxième débat et troisième débat: Session 03 (décembre 2011) - Séance 14 du 16.12.2011