République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 23 juin 2011 à 17h
57e législature - 2e année - 10e session - 55e séance
PL 10762-A
Premier débat
M. Olivier Jornot (L), rapporteur. Nous vous avons beaucoup dit, lors du vote du projet de loi dit «balai», le PL 10761, que c'était le dernier. En réalité, c'est comme certains chanteurs: après la dernière saison, il y en a toujours encore une. C'est en effet cette fois-ci le vrai dernier projet de loi issu de la cuisine Justice 2011, le projet de loi qui porte sur la revalorisation du traitement des magistrats.
Je voudrais simplement - outre souligner, évidemment, que la commission a voté à l'unanimité ce projet après l'avoir étudié très attentivement - apporter une précision. En effet, lorsque nous avons voté dans cette salle le projet de loi «balai», le PL 10761, nous avons déjà, en fait, revalorisé la rémunération de certains postes par le biais de la modification que nous avons apportée à l'article 4 de la loi, sur lequel nous revenons dans ce projet de loi ci. Nous avons à l'époque, en modifiant l'article 4, fait en sorte que le président et le vice-président du Tribunal des prud'hommes reçoivent désormais des indemnités comme les autres présidents et vice-présidents de juridiction. Nous en avons fait de même pour le vice-président du Tribunal administratif de première instance. Et nous en avons fait de même pour le procureur général, en tant que président de sa juridiction, le ministère public... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...qui n'est d'ailleurs pas une juridiction mineure, puisque c'est au contraire la plus grande du pouvoir judiciaire.
Ici, il s'agit, comme vous avez pu le constater dans le rapport, de traiter désormais la question de la classe de rémunération dans le cadre de ce projet, qui a fait l'objet de discussions pendant des années et des années; elles ont enfin abouti, ce dont on peut se réjouir. Je vous invite donc à voter ce texte.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste ne votera pas ce projet de loi. Il considère que c'est exagéré de mettre tous les magistrats du pouvoir judiciaire en classe 32 et que l'autorité ne passe pas par des salaires surfaits. C'est la position du groupe socialiste, mais ce n'est pas la mienne, puisque - je l'ai dit en commission - sur cet objet, j'étais opposé à mon groupe, et je vais expliquer pourquoi.
Ce projet de loi, Mesdames et Messieurs les députés, vise à mettre en place le principe d'équité et d'égalité de traitement. Car, aujourd'hui, il y a effectivement déséquilibre entre les magistrats du pouvoir judiciaire et les secrétaires généraux des départements. Ce déséquilibre est tout aussi significatif avec les magistrats de la Cour des comptes; lorsqu'ils ont été nommés, en 2006 ou 2007, ces magistrats ont été tout de suite mis au bénéfice de la classe 32 sans que personne ici n'ait rien à redire.
J'aimerais aussi rappeler la promesse que le Conseil d'Etat avait faite en 1994, puis réitérée en 2001, selon laquelle il prévoyait justement cette revalorisation maintes fois reportée. Naturellement, le pouvoir législatif n'est pas tenu par les promesses du pouvoir exécutif. Néanmoins, nous avons considéré que, effectivement, les magistrats du pouvoir judiciaire assument de lourdes responsabilités. Ils doivent pouvoir être rémunérés en fonction des compétences qu'un tel niveau de responsabilité requiert.
Il faut savoir aussi qu'il y a eu la fusion des deux caisses, CIA et CEH, qui a fait que la cotisation de ces magistrats est passée de 6,5% à 7,2%. Autrement dit, ils ont une perte du pouvoir d'achat.
Enfin - cela a été dit durant les auditions - il faut améliorer l'attractivité de la fonction. Mesdames et Messieurs les députés, pour avoir des gens compétents, il faut vraiment que ces gens-là soient payés en conséquence et qu'ils aient envie d'entrer dans la magistrature. D'ailleurs, l'arrivée du nouveau code, dont on a beaucoup parlé ici, a beaucoup complexifié la tâche, et l'investissement demandé aux magistrats est aujourd'hui beaucoup plus conséquent, raison pour laquelle il faut effectivement des gens qui puissent répondre à ces exigences-là. Je mettrai simplement un petit bémol en disant que, effectivement, la commission interpartis - qui est le garde-fou - lorsqu'elle choisit les candidats, doit aussi le faire en conséquence, je veux dire vraiment choisir des candidats de qualité. Je crois que c'est le cas. Mais je crois aussi savoir qu'il y eu un ou deux petits problèmes à l'époque.
Pour terminer, j'aimerais aussi - je l'ai relevé en commission - m'adresser à Mme la conseillère d'Etat et dire que l'on ne peut pas augmenter les magistrats sans penser aux juges assesseurs, aux juges suppléants et aux juges prud'hommes. Aujourd'hui, avec Justice 2011, on demande énormément à ces gens. On leur demande d'être compétents dans certains domaines. Et j'avais dit déjà à la cheffe du département qu'il faut également que ces juges soient augmentés aussi d'une manière conséquente. Naturellement, nous n'avons pas la compétence, puisque c'est un règlement du Conseil d'Etat. Mais j'appelle de mes voeux - et je crois que la commission était unanime sur ce point - que l'on n'oublie pas ces personnes qui font un travail remarquable.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, je vous l'ai dit en préambule, le groupe socialiste refusera ce projet de loi. Personnellement, je le soutiens, comme je l'ai soutenu en commission.
M. François Lefort (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, dernière manifestation de feu la commission ad hoc Justice 2011, porte sur le traitement et la retraite des magistrats du pouvoir judiciaire. Le projet initial du Conseil d'Etat proposait une légitime augmentation des traitements de ces magistrats. Effectivement, comme l'ont dit le rapporteur de majorité et Mme Bolay, nous avons besoin de magistrats compétents et motivés, et donc justement rétribués. Une majorité de la commission a ensuite voulu différencier les traitements entre les magistrats de première instance et les magistrats de la Cour de justice.
Les Verts, tout en étant favorables à cette légitime revalorisation des traitements des juges, ne l'étaient pas en ce qui concerne la différenciation; ils estiment qu'elle n'est pas justifiée. Nous sommes restés minoritaires sur ce point en commission. Cette querelle de chiffres a somme toute un surcoût raisonnable, d'environ 300 000 F. Pour ce surcoût raisonnable, nous ne remettrons pas en cause la revalorisation. Donc le groupe Vert ne manifestera pas sa mauvaise humeur sur ce point. Il votera ce projet de loi et vous invite à faire de même.
Des voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant pas demandée, nous procédons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 10762 (nouvel intitulé) est adopté en premier débat par 54 oui contre 8 non et 2 abstentions.
La loi 10762 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10762 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 55 oui contre 9 non et 1 abstention.