République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 15 octobre 2010 à 20h30
57e législature - 1re année - 12e session - 65e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Renaud Gautier, premier vice-président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Mark Muller, Pierre-François Unger et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, David Hiler et Isabel Rochat, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Céline Amaudruz, Claude Aubert, Eric Bertinat, Marcel Borloz, Beatriz de Candolle, Fabiano Forte, Vincent Maitre, Mauro Poggia et Francis Walpen, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. Je donne la parole à Mme Schneider Hausser.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Le groupe socialiste réitère sa demande de tout à l'heure, soit le traitement en urgence du point 29, motion 1902. (Commentaires.)
Le président. Je rappelle qu'il faut une majorité des deux tiers pour que cette demande soit acceptée.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 1902 est rejeté par 23 non contre 33 oui.
Le président. La demande d'urgence est rejetée de peu, la majorité des deux tiers étant de 38 voix.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Nous poursuivons donc nos travaux en reprenant notre discussion sur le projet de loi 10635, point 23 de l'ordre du jour.
Suite du deuxième débat
Le président. La parole est à M. Deneys... qui n'est pas là. (M. Roger Deneys arrive et prend place.)
M. Roger Deneys (hors micro). Oui, je suis là, bien sûr !
Le président. M. Deneys est là. M. Deneys prend la parole - et la rendra gentiment tout à l'heure.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que vous avez passé une excellente pause et que vous pouvez reprendre ce débat là où nous l'avons laissé, c'est-à-dire à cette proposition d'amendement assez particulière des députés UDC et MCG, proposition suggérée avec une finesse toute relative par un député libéral, habitué du genre, qui peut resservir ici ses idées dogmatiques sur la propriété privée.
Cette proposition pose de graves problèmes, car l'amendement en question vise à remplacer la zone de développement 3 de ce déclassement par de la zone ordinaire, la zone 2.
J'aimerais d'abord dire aux rapporteurs de minorité qui nous ont bassinés pendant une heure et demie sur le respect des volontés communales et sur celui des habitants concernés que ni la commune ni les habitants ne souhaitent un déclassement en zone ordinaire ! Donc, ici, vous faites fi de la volonté de la commune et vous faites fi de la volonté des habitants ! D'autre part, l'idée de déclasser des zones villas en zones ordinaires pourrait éventuellement être étudiée, et c'est là qu'il ne faudrait pas être dogmatique sur l'idée d'un déclassement en zone ordinaire de certaines parties de la zone villas.
Je vous rappelle que Genève est un canton dans lequel il est extrêmement difficile de réaliser quoi que ce soit en matière d'aménagement et que, pour arriver à certains résultats, des accords doivent être conclus entre les diverses parties intéressées par des objectifs différents: les libéraux et leurs amis banquiers cherchent évidemment à attirer des riches; et les socialistes se préoccupent, eux, du sort des classes moyennes et des classes défavorisées, qui ont aussi besoin de logements.
Alors, il est très clair que la réalisation de logements à Genève, ce n'est pas la réalisation de logements pour les riches seulement, c'est surtout et essentiellement la réalisation de logements pour les classes moyennes et défavorisées, qui paient des loyers exorbitants aujourd'hui. On propose aujourd'hui le déclassement de la zone agricole en zone de développement pour permettre la réalisation de logements sociaux et le déclassement de la zone villas en zone ordinaire... Mais cela revient à dire que les éventuels déclassements de zone villas se feront pour construire des logements pour les riches ! Et ça, c'est tout simplement inacceptable pour les socialistes si ça ne fait pas l'objet d'un accord conclu pour atteindre un certain équilibre ! La loi sur les LUP permet justement d'atteindre une certaine vision d'ensemble du développement du parc immobilier genevois pour répondre à tous les besoins de la population. Or, là, on casse complètement cette logique !
C'est en plus particulièrement pervers, et c'est là qu'on peut aussi voir les intentions réelles du parti libéral: cet amendement aura pour résultat de rendre le projet de loi caduc, parce que l'enquête publique devra être effectuée à nouveau - ça a été dit en commission. Le simple fait de déclasser en zone de développement 2 oblige à redéposer un autre projet de loi. (Commentaires.) Ça cassera donc des années de travail de l'administration, une dizaine d'années, alors même qu'on n'a déjà pas toujours l'impression qu'elle avance très vite. (Brouhaha.)
Pour cette simple raison, Mesdames et Messieurs les députés, il est particulièrement cocasse de demander un déclassement en zone de développement 2 pour des habitants qui ne l'ont pas demandé ! Chez les habitants, personne n'a demandé de la zone de développement 2 ! Si vous lisez la page 85 du rapport, vous avez les arguments des habitants contre le déclassement: mauvaise opportunité, bruit, protection efficace pour deux niveaux au-delà des normes dépassées, quartier habité, impact minime sur le nombre de logements, préservation de la diversité architecturale, sociale et biologique, habitants nombreux déterminés et bien organisés, injustice, forme d'expropriation... C'est indiqué: forme d'expropriation ! N'empêche, rien n'indique que les propriétaires de ce périmètre subiront une perte financière lors d'un déclassement en zone de développement 3. Comme cela est rappelé, les habitants sont attachés à la qualité de vie de leur périmètre - pourtant déjà fort relative à mon avis, vu la proximité du Bachet, de la route de Saint-Julien et de la Praille. La qualité de vie dans ce quartier est déjà assez péjorée, à mon avis... Il n'empêche, les habitants sont attachés à ce périmètre. Et venir dire aujourd'hui, dix ans plus tard, qu'il faut déclasser de la zone ordinaire en zone 2, c'est tout simplement scandaleux et ça s'apparente à une déclaration de guerre, en rupture avec tous les accords conclus pour développer le logement à Genève !
Libre à vous de prendre cette responsabilité, mais il ne faudra pas vous étonner après que des référendums contre les déclassements de la zone agricole aboutissent, et qu'ils aboutissent également en votation populaire !
Chacun doit prendre ses responsabilités: si l'hypothèse de la zone ordinaire doit être évoquée, pourquoi pas ? Mais alors pour d'autres périmètres ! Nous attendons volontiers M. Muller pour qu'il vienne... Mais il n'écoute pas, comme d'habitude ! Nous attendons volontiers M. Muller...
Une voix. Il est là !
M. Roger Deneys. Il est là, c'est déjà pas mal, c'est vrai. On n'a pas l'habitude ! Qu'il vienne nous proposer d'autres déclassements de zone villas en zone ordinaire ! Si cela fait l'objet d'un accord pour d'autres déclassements, pourquoi pas ? Ne soyons pas dogmatiques sur cet objet, mais ne revenons pas sur ce qui a été conclu dix ans plus tôt et qui fait partie d'un accord plus global sur le développement du logement à Genève.
Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de refuser catégoriquement cet amendement qui met complètement en péril l'avenir du développement du logement à Genève !
Le président. Merci, Monsieur Deneys. La parole est à M. Amsler.
M. David Amsler (L). Effectivement, l'amendement déposé par le groupe UDC et le groupe MCG émane en grande partie de nos rangs. Nous remercions ces deux groupes d'avoir repris cet amendement à leur compte. Même, il a été jugé excellent par les deux rapporteurs de minorités !
Alors, le but de cet amendement était effectivement d'inciter les propriétaires privés à mettre en valeur leurs parcelles et, par cela, contribuer également à résoudre la crise du logement que nous connaissons. Aujourd'hui, un propriétaire privé qui veut s'engager dans un projet immobilier doit vraiment avoir la foi. En plus des procédures longues que l'on connaît avec les déclassements, les plans localisés de quartier, les autorisations de construire, il y a un contrôle drastique de l'Office cantonal du logement qui impose des rendements excessivement sévères ! Pour un projet non subventionné, on parle de 3,5% de rendement brut. Donc, pour quelqu'un qui veut construire une centaine de logements, il suffit que trois de ces cent logements restent vacants pour que le rendement brut de l'opération soit ramené à néant et que le rendement net, après déduction des intérêts et après déduction des amortissements, soit négatif et que l'opération ne soit financièrement pas rentable.
Vous voyez que pour lancer aujourd'hui un projet immobilier en zone de développement, il faut vraiment un gros engagement des propriétaires privés, et le but de ce déclassement en zone ordinaire est de permettre d'éviter, dans des petites zones, cette longue procédure et inciter des propriétaires privés à mettre leur parcelle en valeur.
Alors, qui dit petit périmètre dit que, dans ce périmètre-là, nous ne portons pas une atteinte majeure à l'accord sur le logement qui a été passé il y a maintenant plusieurs années. En effet, dans ce périmètre-là, l'Etat est propriétaire d'environ un quart voire un tiers des parcelles. Nous suggérons donc qu'en cas de déclassement en zone ordinaire l'Etat réalise sur ses parcelles la portion de 25% de logements d'utilité publique qui est imposée dans le cadre de la loi sur le logement.
Maintenant, pourquoi des zones de développement 2 ou des zones de développement 3 ? C'est une question de gabarits. La zone de développement 2 permet la réalisation de deux étages de plus que la zone 3. Ensuite, la zone 2 donne lieu somme toute à des gabarits moins élevés que les Tours de Carouge. Nous pensons donc que dans un périmètre aussi proche des infrastructures, il est important de ne pas gaspiller le territoire et de permettre des constructions de grande hauteur.
On a encore réfléchi à la taxe d'équipement, parce qu'effectivement, en zone ordinaire, les communes ne perçoivent plus la taxe d'équipement. Quand on est dans un quartier qui est complètement construit, comme c'est aujourd'hui le cas de ce quartier de villas, où toutes les infrastructures - les routes, les services, les canalisations et les écoles - existent, nous sommes plutôt partisans du fait qu'il n'est pas impératif pour la commune de percevoir les 40 F par surface brute de plancher au titre de la taxe d'équipement.
Pour conclure, par rapport à ce que vient de dire M. Deneys, nous avons aussi réfléchi à la meilleure procédure qu'il faudrait mettre en place pour que cet amendement ne provoque pas de trop longs décalages dans le traitement et dans le déclassement de ce périmètre. Donc l'idée que nous avons évoquée, c'est qu'en cas d'acceptation de cet amendement nous allions jusqu'à la fin du deuxième débat, que nous retenions le troisième débat et que nous renvoyions ce projet de loi au Conseil d'Etat, qui devra effectivement refaire l'enquête publique par rapport à cette nouvelle zone.
Nous pensons que le jeu en vaut la chandelle, et je vous rappelle que l'année qu'on perdra peut-être dans cette procédure supplémentaire d'enquête publique, on va la regagner ensuite, puisqu'il ne sera plus nécessaire de faire un plan localisé de quartier mais qu'on pourra alors directement déposer les autorisations de construire.
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, les quelques arguments qui nous ont conduits à rédiger cet amendement en commission dans un premier temps et, ensuite, à le défendre aujourd'hui devant vous. On vous recommande donc de le soutenir. (Applaudissements.)
Le président. Merci. La parole est à M. Del Busco.
Des voix. «Dal» ! «Dal» ! Dal Busco !
Le président. Je recommence: la parole est à M. Dal Busco !
M. Serge Dal Busco (PDC). Merci beaucoup, Monsieur le président !
Le président. Je vous en prie !
M. Serge Dal Busco. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, lorsque le groupe libéral a fait cette proposition en commission, j'ai pensé d'emblée que ça pouvait être une proposition intéressante. En tout cas, une proposition qui pouvait être analysée en dehors des débats stériles qui, malheureusement, animent ces questions du logement, hélas.
Donc, c'est ce qu'on a fait, c'est que nous avons fait au sein du groupe démocrate-chrétien. Nous avons analysé la question avec sérieux, avec intérêt, parce qu'effectivement, c'est une proposition apparemment iconoclaste, mais pourquoi ne pas envisager de l'appliquer à un secteur pour voir ce que cela donne ? Toutefois, à l'analyse, la proposition ne résiste pas vraiment, parce que, dans le fond, les avantages sont hypothétiques - imaginer que des ventes déclencheraient des constructions - alors que les inconvénients de ladite proposition sont avérés. Alors le choix est évidemment assez vite fait, parce qu'on n'est pas au casino et qu'on ne joue pas à la roulette pour voir si ça va marcher en espérant que ça marche ! On est là pour essayer de faire avancer le dossier du logement, et les inconvénients de la proposition en question sont avérés.
M. Girardet a laissé entendre que ma position était, dans le fond, contraire à la position des communes... Ce n'est pas vrai ! Je vais vous démontrer que, s'agissant des communes, le vote de cet amendement serait un gros désavantage ! Et je saisis encore l'occasion d'avoir la parole pour répondre à mon excellent successeur, M. Jean-Marc Mermoud, qui a évoqué le fait qu'un développement d'une zone dans un périmètre où les infrastructures sont inexistantes serait inapproprié. Je vous le concède, les communes seraient extrêmement réticentes à développer des zones peu desservies en infrastructures ! Mais, dans le cas présent, force est de constater que c'est exactement le contraire: les infrastructures sont très présentes, elles sont parfaites et, de ce point de vue-là, il n'y a pas de soucis.
Alors, les inconvénients avérés, mais quels sont-ils ? Pour les communes, il n'y a pas de possibilités de percevoir la taxe d'équipement si l'on déclasse en zone ordinaire, et M. le conseiller d'Etat l'a dit en commission, il y aurait donc des frais supplémentaires pour les communes. Il n'y aurait plus, non plus, de possibilités pour les communes d'obtenir des cessions gratuites du domaine public. Et, si elles ne sont pas gratuites, ce serait un inconvénient pour les communes.
Enfin, c'est très important, les communes ne bénéficieraient plus du droit de préemption conféré par le classement en zone de développement, ce qui anéantirait la possibilité pour les communes, finalement, de mener une politique active du logement, par le biais des acquisitions, par le biais de l'octroi de droits de superficie à qui elles l'entendent, même s'il s'agit de leurs propres établissements, si elles ont des fondations ou des coopératives, par exemple. Donc, on le voit: il n'y a que des inconvénients !
Pour les avantages hypothétiques, on avance une prétendue facilitation des ventes: oui, peut-être ! Mais des ventes à des personnes qui voudront peut-être conserver en l'état la villa achetée. Il n'y aurait aucune possibilité, lors d'une telle opération, d'empêcher que les ventes se fassent simplement parce que les gens veulent conserver les villas. On l'a aussi entendu dire par les personnes qui ont pris la parole, la question du prix ne semble pas être l'élément primordial pour les gens qui habitent là, les propriétaires. Ce n'est pas ça, c'est autre chose: un attachement à l'endroit, la volonté de vivre à cet endroit dans sa villa, et le gain sur le prix n'a que peu d'influence sur la volonté de vendre ou non.
Pour toutes ces raisons, le groupe démocrate-chrétien votera contre cet amendement et vous encourage à en faire de même. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Weiss: Pierre Weiss ! (Rires.)
M. Pierre Weiss (L). Merci, Monsieur Gautier - Renaud Gautier ! Mesdames et Messieurs les députés, à l'évidence, le projet de loi 10635 est non seulement intéressant, mais il correspond en plus à la vision de l'intérêt global que peut développer le parti libéral. L'amendement qui a été déposé correspond, lui, à un intérêt local. Et si l'on peut ajouter l'intérêt global à l'intérêt local, alors évidemment l'on passe du bien au mieux ! Et passer du bien au mieux, c'est ce à quoi vous engagent les libéraux ce soir et c'est ce que j'aimerais vous convaincre de faire.
J'ai bien entendu ce qu'a dit M. Dal - Dal ! - Busco. Malgré son plaidoyer tout à fait intéressant, je le trouve pour le moins en contradiction avec ce qu'il déclarait aujourd'hui même dans la «Tribune de Genève», lorsqu'il disait qu'il fallait des incitations et récompenser les communes. C'est récompenser les communes que de consentir à un déclassement tel que proposé par l'amendement qui nous est soumis ! Pourquoi ? Parce que, précisément, ça favorise l'arrivée dans la commune de Lancy d'un certain nombre de contribuables qui vont permettre à celle-ci d'augmenter ses rentrées fiscales ! J'ai de la peine à comprendre qu'un conseiller administratif d'une commune qui projette d'importants déclassements sur son territoire ne soit pas sensible aux possibilités d'apports fiscaux pour sa commune. C'est la raison pour laquelle il nous semble, au parti libéral, qu'il est nécessaire de soutenir cet amendement qui, comme je le disais, correspond à l'intérêt local. Il correspond aussi à l'intérêt local des propriétaires. Certes, avec le projet de loi actuel, ceux-ci ne sont pas obligés de vendre leur maison, mais avec la possibilité de déclassement qu'introduit cet amendement ils auront une incitation supplémentaire à vendre leur bien.
Au passage, cela démontre, s'il en était encore besoin, combien le maître de lecture n'est pas un maître de calcul au sein du MCG, puisque tout à l'heure il ne voyait pas de contradiction entre le fait de ne pas vouloir davantage de logements et de ne pas vouloir davantage de frontaliers ! Si les habitants des villas déménagent, ils ne sont que quelques-uns; si des habitants d'immeubles arrivent, ils sont nombreux. Le bilan écologique d'un déclassement est ultrapositif pour le canton, comme il est ultrapositif pour la commune de Lancy ! Raison pour laquelle je suggère au maître de lecture de se replonger dans les tables de multiplications !
M. Christian Dandrès (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce soir nous assistons à la réconciliation - écoeurante - de la Chambre genevoise immobilière et de l'association Pic-Vert, par l'intermédiaire de leurs secrétaires généraux respectifs. J'ai parlé tout à l'heure du courrier que M. Muller avait adressé aux propriétaires de villas, et l'on avait pu croire que ces deux associations étaient fâchées à cause de cette lettre. Mesdames et Messieurs les députés, ces retrouvailles ont un prix. Un prix que ces personnes veulent faire payer aux locataires de notre canton, ainsi qu'aux communes concernées !
Avec cet amendement, Mesdames et Messieurs les députés, le parti libéral, l'UDC et le MCG donnent un blanc-seing aux spéculateurs qui gangrènent le marché immobilier ! Mesdames et Messieurs les députés, si vous acceptez de déclasser ce soir ces parcelles en zone ordinaire, si l'Etat accepte d'accorder une faveur aux propriétaires de la route de la Chapelle, dites-moi comment vous allez expliquer aux propriétaires de villas des autres périmètres qu'ils devront, eux, limiter leurs appétits à ce qui est prévu par la zone de développement ? Pensez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, qu'ils accepteront de vendre leurs villas aux prix autorisés par l'office du logement ?
Pensez-vous également que les propriétaires de terrains en zones agricoles - on a parlé des Cherpines - vont accepter de se soumettre bien sagement aux règles de la zone de développement alors qu'on fait des fleurs à leurs voisins propriétaires des villas ?
Mesdames et Messieurs les députés, mon collègue Dal Busco l'a indiqué, tous les choix importants qui concernent la politique d'aménagement ont été inscrits dans la LGZD - loi générale sur les zones de développement. Je l'ai dit et je pense qu'il faut le répéter: s'il n'y a pas de zone de développement, il n'y a pas de plans localisés de quartier. Il n'y a donc pas d'équipements publics, pas d'écoles, pas de crèches. Il n'y a pas non plus de densification, parce qu'il suffirait - et le Grand Conseil va être saisi prochainement de projets de cette nature - que les propriétaires de villas accordent des servitudes croisées mutuelles pour bloquer tous les projets de construction. L'Etat ne pourrait alors pas lever ces servitudes, puisqu'il n'y aurait pas de zone de développement ! Sans zone de développement, il n'y aurait pas non plus de LUP et, donc, pas de nouvelle politique du logement !
Enfin, et j'insiste pour les rapporteurs de minorité. Sans zone de développement, il n'y aurait pas de taxe d'équipement, Monsieur Golay. Pas de taxe d'équipement pour les communes ! Alors, je me réjouis d'entendre comment vous allez expliquer à votre municipalité qu'elle va devoir accueillir des personnes supplémentaires, scolariser leurs enfants... (Brouhaha.) Veuillez avoir la décence de quitter les lieux, Monsieur Stauffer, s'il vous plaît ! Je reprends. Il faudra expliquer à votre municipalité qu'elle devra faire tout cela sans percevoir de taxes !
Mesdames et Messieurs les députés, ce soir nous jouons l'avenir de la politique du logement. Je vous engage donc à rejeter massivement cet amendement. Et je réitère mon invite à M. le conseiller d'Etat pour qu'il rappelle ses troupes à un certain bon sens, pour qu'elles soutiennent sa politique et refusent ce projet d'amendement. (Applaudissements.)
M. Claude Jeanneret (MCG). C'est vrai qu'on entend ce soir plein de choses intéressantes, quand même. Depuis de nombreuses années, la politique du logement à Genève est un fiasco total. On a eu pendant des années des magistrats socialistes qui n'ont rien fait; on a un magistrat libéral dont on attendait beaucoup, qui n'a pas fait beaucoup pour le moment, mais on espère que cela s'améliorera. Il faut quand même voir une chose, c'est que nous avons des problèmes fondamentaux à Genève, c'est qu'on a plein de terrains déclassés et que les gens qui sont propriétaires n'ont pas envie de vendre parce qu'ils n'ont pas la possibilité de vendre au prix qu'ils souhaitent !
Là, on a une expérience intéressante qui est à tenter. Car, quand on parle de spéculateurs, mon cher préopinant, il y a deux types de spéculateurs qui sont malsains à Genève ! Il y a ceux qui conservent les terrains. Mais ce sont des institutions comme l'ASLOCA... (Commentaires.) Mais bien sûr ! Des institutions qui paralysent et qui mettent en prison des gens parce que la gauche empêche de construire ! Alors, évidemment que c'est facile: ça se goberge, ça prend beaucoup d'ampleur, ça gagne beaucoup d'argent sur les pauvres, mais ce n'est pas comme ça qu'on va arriver à quelque chose !
Il faut que l'on trouve une solution ! Et je pense que l'amendement de ce soir est une solution... (Remarque.) Merci, Monsieur Weiss ! C'est une solution intéressante, parce que si des gens, comme dans certains quartiers, ont des villas et que le prix du mètre carré passe de 450 F ou 650 F à 1000 F maintenant - ou pourquoi pas à 1500 F dans quelques années - ils ne vont pas vendre ! A partir du moment où l'on a un prix du marché et que ce prix du marché correspond aux coûts de la construction que l'on doit faire, à ce moment-là tout le monde est content ! Et tout le monde va vendre ! Parce que celui qui vend sa villa à ce moment-là peut en retrouver une autre, parce que c'est le prix du marché et qu'un échange est possible. Et s'il ne veut pas de villa et préfère un appartement, il aura les moyens de pouvoir faire un échange grâce à l'incitation à vendre.
Alors, quant à savoir si, comme on l'entend, quelqu'un achètera une villa sans vouloir construire à la place... Quand on sait que, pour certains plans de quartier, on doit attendre que des gens vendent leur maison, je ne vois pas quelqu'un racheter une vieille maison pour bloquer un projet. Ce n'est pas décent, ce n'est pas raisonnable. Mais, du moment qu'on obtient un prix intéressant, je pense qu'on arrivera à avancer.
Alors le problème qu'on a ce soir, c'est qu'on reste sur des idées figées, des idées anciennes, des idées dont l'échec est patent: on a plein de terrains qui ne sont pas vendus ! Ils ne sont pas vendus parce que les gens ne veulent pas vendre, ils n'y sont pas incités ! Là, on arrête de se bloquer sur ce passage et on dit: vous pourrez vendre et, ainsi, on pourra construire. Donc, j'en déduis qu'il n'y a qu'une chose à faire: essayons ! Acceptons cet amendement, et c'est peut-être la solution pour l'avenir !
M. Michel Ducret (R). Si j'en crois certains préopinants, je pense que je ne suis pas très intelligent. Je ne suis qu'un modeste architecte et je prie cette assemblée de m'en excuser, puisque certains trouvent bon de me le reprocher. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Toutefois, dans ma bêtise ou à cause de mon ignorance, je n'arrive pas à comprendre les positions que certains défendent... On nous dit d'abord qu'il faut garder un quartier de villas, qu'il faut respecter la volonté communale et ne pas déclasser; maintenant, on nous explique gentiment combien il est nécessaire de déclasser en zone 2 pour que ce quartier de villas se transforme urgemment, avec des buildings, en un centre-ville. Je veux bien ! J'ai bien entendu M. Jeanneret et j'ai bien entendu M. Amsler exprimer leurs positions. Je comprends mieux la position de M. Dal Busco, qui a mis les choses à la portée de ma modeste intelligence, ce qui m'a permis de comprendre ce qu'il disait, lui, au moins ! Pour les autres, cherchez l'erreur: je n'arrive pas à comprendre comment on peut vouloir défendre la volonté d'une commune, heureuse dans son petit village, qui veut garder un quartier de villas et, en même temps, prôner un déclassement en zone 2 pour faire des buildings comme au centre-ville ! J'ai un peu de peine, c'est un peu difficile pour moi !
Alors, je ne comprends peut-être pas tout, mais le résultat de tout ça est assez amusant parce qu'en fin de compte, si le quartier reste avec des villas, les gens qui chercheront des logements devront aller se loger à 40km de Genève parce qu'ils ne trouveront pas de logements dans le canton, à cause des refus de déclassement ! Et si l'on construit des buildings très chers, ces personnes vont aussi devoir aller se loger à 40km de Genève, parce qu'elles ne pourront pas payer les loyers qui seront demandés dans les buildings en question !
Les deux propositions qui sont déjà contradictoires en elles-mêmes le sont encore plus, me semble-t-il - si je suis assez intelligent pour le comprendre, car les gens s'offusquent du fait que leurs villages de villas soient envahis par les frontaliers automobilistes qui passent à travers leur village et osent même s'y garer ! Imaginez-donc ! Ils s'en plaignent et disent qu'il faut que ça cesse ! (Rires.) Mesdames et Messieurs, partageons cette envie, il faut que ça cesse ! Je suis d'accord, mais donnons-nous les moyens pour que ça cesse ! Or, si j'ai bien compris, il faudrait juste faire tout le contraire de ce qu'ils vous disent pour que ça cesse enfin ?!
Mesdames et Messieurs, vous avez compris, il suffirait de faire exactement le contraire de ce que prônent le MCG et l'UDC pour parvenir éventuellement à obtenir les résultats souhaités, mais ils font exactement ce qu'il faut pour que ça n'arrive pas ! (Rires.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La liste des orateurs inscrits est terminée, nous allons passer à l'audition des rapporteurs. Monsieur Golay, vous avez la parole.
M. Roger Golay (MCG), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, non, ce n'est pas contradictoire de soutenir cet amendement. Il part d'une bonne intention et propose un compromis qui pourrait advenir entre toutes les différentes parties. A savoir que, comme l'ont proposé les libéraux, si l'on vote cet amendement et qu'on renvoie ensuite ce projet de loi au gouvernement, cela permettrait éventuellement de rediscuter avec les autorités municipales de Lancy et les propriétaires. Je vous rappelle que lorsque nous avons reçu les autorités de Lancy et les représentants des propriétaires, il n'avait pas été question de cet amendement.
Aujourd'hui, on parle donc de quelque chose qui pourrait certainement satisfaire toutes les parties et je pense que cela vaut la peine de trouver cette forme de compromis afin qu'on puisse avancer. Pour cela, je considère que voter cet amendement et rediscuter avec les propriétaires ainsi qu'avec la commune serait une bonne chose.
Maintenant, par rapport à ce que j'ai entendu dire par les socialistes, notamment par la voix de M. Deneys, me fait sourire, particulièrement quand il prétend que refuser ce déclassement met en péril l'avenir de Genève et du logement de notre canton. Lorsqu'on sait qu'il a refusé la construction de 3000 logements aux Cherpines-Charrotons... En effet, il a refusé, lui tout seul, par rapport à son parti, duquel il s'est isolé en faisant un rapport de minorité. Alors je ne comprends pas, si ce n'est que les Cherpines se trouvent juste à côté de sa magnifique maison à Plan-les-Ouates. Je présume qu'il voulait ainsi protéger son petit coin de terre. (Brouhaha. Applaudissements.)
Maintenant, par rapport à cet amendement, il est clair qu'on pourrait partir plus rapidement dans la construction d'immeubles. Il est certain qu'avec un déclassement en zone ordinaire il n'y a plus de taxe d'équipement. Je tiens encore une fois à rassurer les représentants du parti socialiste: s'ils écoutaient leurs collègues de Lancy, ils comprendraient que la construction d'une école est actuellement débattue à Lancy et à Plan-les-Ouates - c'est justement cette grande école intercommunale destinée au quartier de la Chapelle-Les Sciers, école qui pourra accueillir plus tard les enfants de la Chapelle-Nord. Ceci n'est donc pas un souci pour les autorités de la commune, mais c'est clair qu'il y a tout le reste des équipements à prévoir, or je pense que la commune de Lancy, sans vouloir parler en son nom, pourra très bien trouver des solutions, peut-être avec le Conseil d'Etat.
Maintenant, concernant l'attractivité qu'un développement en zone ordinaire pourrait induire, on a pu lire l'autre jour que l'attractivité de Genève est mise en danger, cela a fait la manchette de la «Tribune de Genève». La Genève internationale ne peut plus se développer, les multinationales ne peuvent plus s'implanter à Genève, simplement parce qu'il manque des logements pour cette catégorie de population. Il est prévu que les prix en zone ordinaire soient plus élevés pour la construction d'habitations, et l'on pourrait très bien envisager, justement, de pouvoir fournir du logement aussi à cette catégorie importante de Genève que sont les fonctionnaires internationaux et les employés des multinationales. Là-dessus, je pense que c'est aussi un bon compromis, c'est une solution qu'on pourrait apporter pour cette catégorie intéressante de la population étrangère qui vient s'établir à Genève. Non, il ne s'agit pas de frontaliers, mais je pense qu'il s'agit de gens qui apportent beaucoup à notre canton.
Je tiens à rassurer le PDC. Avec tout le respect que j'ai pour mon collègue Dal Busco - quand il dit qu'on suit la ligne politique de nos conseillers municipaux de Lancy - je tiens simplement à relever ceci: lorsque la proposition de déclasser le périmètre de la Chapelle-Les Sciers a été faite, l'une des conditions du PDC était d'obtenir une convention et un accord avec le Conseil d'Etat, stipulant qu'on ne développerait pas le quartier de la Chapelle-Nord avant 2017. Toutefois, quelques années plus tard, quand il a fallu confirmer cet accord, ils ne s'en sont plus souvenus et n'ont pas accepté la résolution. Revenez donc à vos sources, et l'on ne vous tiendra pas rigueur d'une nouvelle volte-face ! Vous avez parfaitement raison de parler de vision globale, Monsieur le conseiller d'Etat, mais je vous rappelle la parole donnée aux autorités de Lancy, c'est-à-dire de laisser souffler la commune de Lancy jusqu'en 2017 ! C'est là-dessus que les autorités de Lancy sont un peu fâchées, car la parole donnée n'a pas été tenue.
Donc, aujourd'hui, on va peut-être pouvoir débloquer la situation avec cet amendement que je vous invite à voter. C'est un bon compromis qui permettra de reprendre le dialogue avec toutes les parties, et je pense qu'on trouvera peut-être une solution par le biais de cette proposition.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Comme l'a dit le député M. Amsler, la proposition de déclassement de la zone 2 se veut une solution incitative qui pourra non seulement faire avancer ce dossier, mais aussi permettre la levée des oppositions.
Si rien n'indique dans mon rapport que l'association du quartier de la Chapelle est favorable à la zone 2, c'est uniquement en raison de ce que la réaudition de cette association au sujet de cet amendement a été refusée par la majorité de la commission. C'est pour cela qu'il n'en est fait mention nulle part.
Par ailleurs - vous transmettrez, Monsieur le président, à M. Dal Busco: j'espère qu'il tiendra exactement le même discours, mot pour mot, quand il s'agira d'accueillir le Bureau des automobiles dans sa commune ! (Applaudissements.) N'est-ce pas ? J'espère que vous tiendrez le même discours !
Déclasser en zone 2 ne remet pas du tout en question la construction de LUP, puisque, comme je l'ai indiqué, l'Etat est propriétaire de plusieurs parcelles dans cette zone. Et qu'il appartient à l'Etat de faire de la construction sur ses terrains. C'est pour ces raisons que je vous enjoins de voter cet amendement et de faire avancer la construction dans le canton.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Haldemann.
M. François Haldemann (R), rapporteur de majorité. On se retrouve avec cet amendement, déposé à l'origine en commission où il avait été refusé par la majorité. Il réapparaît maintenant en plénière, mettant en péril non seulement le projet de loi 10635 qui nous est soumis ce soir, mais aussi tous les périmètres qui nous seront soumis ultérieurement.
La zone de développement a l'avantage de prévoir un certain nombre d'instruments, comme la taxe d'équipement dont on a parlé, qui pourrait ne pas être forcément utile dans ce périmètre, mais serait certainement diablement utile dans d'autres périmètres ! Parmi ces instruments, il y a aussi les cessions gratuites au domaine public, qui permettent de réaliser un certain nombre de constructions qui sont d'utilité publique. Il y a aussi le droit de préemption, qui peut être utilisé soit par la commune, soit par l'Etat.
On parle aussi de prix. Effectivement, la zone de développement implique le contrôle de l'Etat et les plans financiers ne peuvent faire apparaître que la valeur de 1000 F par mètre carré, mais on observe que, dans les zones villas où l'on a déclassé en zone de développement 3, la réduction des marges au niveau de la promotion permet des transactions qui s'effectuent jusqu'à 2000 F le mètre carré, ce qui, vous l'admettrez, est déjà un prix relativement élevé, tout simplement !
Alors quel est le vrai problème, si nous acceptons cet amendement ? C'est que nous créons un précédent, évident, et ce précédent est dangereux ! Même expérimental, il est évident qu'il devient la norme, de facto ! Parce qu'il sera revendiqué, demandé systématiquement. Et nous pouvons être certains que les objectifs de mixité sociale ne seront pas atteints dans les périmètres qui sont appelés à être déclassés dans tout le canton, et c'est pourquoi je vous demande de refuser cet amendement.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que le régime de la zone de développement, tel qu'il est pratiqué aujourd'hui, induit un certain nombre de lourdeurs, un certain nombre de difficultés, des procédures qui sont longues, notamment avec l'obligation de passer par l'adoption d'un plan localisé de quartier, un contrôle des prix et des loyers extrêmement contraignants. Toutefois, ce régime comporte plusieurs avantages qui ont été rappelés ce soir: la possibilité pour la commune de percevoir une taxe d'équipement, la possibilité d'intervenir sur l'aménagement précis du périmètre, et surtout, je dirai, la possibilité de garantir qu'à terme la zone déclassée fera l'objet d'une urbanisation cohérente, en conformité avec des objectifs globaux fixés par le canton. Ce constat, cet état de la situation, c'est-à-dire une appréciation mitigée du fonctionnement actuel en zone de développement, doit nous amener à réfléchir à une évolution de ce régime.
Cependant, excusez-moi de vous le dire, Mesdames et Messieurs les auteurs de l'amendement, ça n'est pas à l'occasion du déclassement d'un périmètre, particulièrement sensible qui plus est, que l'on doit avoir ce débat. Le Conseil d'Etat considère qu'il ne convient pas de déclasser ce périmètre en zone ordinaire. Il convient de déclasser ce périmètre en zone de développement, de manière à poursuivre son urbanisation de façon sereine, dans un cadre connu, cadre général qui doit faire l'objet d'une réflexion et d'une réforme ces prochains temps, mais de façon concertée, de façon globale et d'une manière qui nous permette de l'appliquer dans l'ensemble de notre canton.
Le président. Nous sommes en procédure de vote sur l'amendement déposé préconisant la création d'une zone 2, lequel prévoit la modification des articles 1 et 2. Je propose que nous votions en une seule fois la modification de ces deux articles. J'ai cru comprendre que certains demandaient le vote nominal: êtes-vous soutenu, Monsieur Deneys ? (Appuyé.)
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 51 non contre 38 oui.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 4.
Troisième débat
M. Roger Golay (MCG), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je pense qu'il a été indiqué à plusieurs reprises, en particulier à mon collègue Florey et à moi-même, qu'on ne devait pas développer ici une politique municipale. On veut bien, mais, tout de même, nous avons aussi agi pour respecter la parole donnée à nos électeurs de Lancy, citoyens de Genève. (Commentaires.) Et je pense que les socialistes, les Verts et les radicaux sont, eux, en parfaite contradiction avec leurs conseillers municipaux de Lancy. Donc, je me demande où est l'intérêt des Lancéens et des habitants des autres communes de voter pour ces conseillers municipaux s'ils se font désavouer à chaque fois par les autorités cantonales ! Je pense qu'on doit avoir une politique cohérente et je pense aussi qu'il est tout à fait respectable que les gens élus dans une commune défendent les intérêts de leurs citoyens quand ils ont donné leur parole à ces derniers ! Alors, s'il y a bien certains membres de ce parlement qui ne respectent pas du tout les autorités communales et balaient chacune de leurs décisions, il y a aussi le côté des opportunistes ! Et, ce côté des opportunistes, je l'ai trouvé dans la brochure de Pic-Vert. (Exclamations.) Juste avant les élections, certains candidats s'étaient engagés auprès de cette association, et M. le président ne va pas me contredire, puisqu'il est membre du comité de Pic-Vert ! Je citerai simplement quelques noms, pardonnez-moi de prendre encore un peu de temps pour cela. Par exemple, pour le PDC, on a: M. Barazzone, M. Forte, M. Gillet, M. Maitre - Vincent - M. Guy Mettan, M. Schaller, Mme von Arx... (Commentaires. Huées.) Toutes ces personnes se sont engagées auprès de Pic-Vert à défendre les intérêts des propriétaires ! Je ne parle pas du parti radical, parce que ses membres ont fait comprendre, malgré toutes les promesses qu'ils font aussi, qu'ils considéraient désormais les propriétaires de villas comme de vulgaires squatteurs qui devaient laisser la place aux bétonneurs et aux architectes ! (Brouhaha.)
Les gens dans ce parlement ne tiennent pas parole, mais nous, au MCG, nous tenons parole et respectons les citoyens. On ne s'engage pas dans le vide, comme le font beaucoup d'entre vous ! (Exclamations. Applaudissements.)
Présidence de M. Guy Mettan, président
Le président. Je remercie M. le rapporteur pour sa minute de publicité ! Nous allons maintenant pouvoir passer au vote en troisième débat.
La loi 10635 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10635 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui contre 22 non.
Débat
M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, chers collègues, après ce débat-fleuve et passionné, nous revenons sur terre ! Alors, le Conseil d'Etat nous rend un rapport; c'est le deuxième rapport sur la politique de soumission et d'adjudication conduite par les autorités. Si le premier rapport avait été considéré comme insuffisant, notablement insuffisant, je dois ici attester que la copie est acceptable. Sans entrer trop dans le détail, car je pense que nous n'avons pas tous la patience de rediscuter de problématiques relativement compliquées, je constate simplement que le rapport est complet. D'une part, il donne un inventaire bien fait des aspects juridiques et économiques de la politique de soumission et d'adjudication des travaux. Cela concerne des centaines de millions de francs par année, c'est donc quelque chose d'important.
Seconde observation, ceci est nouveau et je le dis en présence du chef du département: il y a des engagements, notamment en ce qui concerne la prise en compte des critères de la formation professionnelle - la règle des 5%; il y a les critères du développement durable, les critères de l'application des conditions sociales de rémunération. Sur ce dernier point, je dois dire que, depuis plusieurs années, le contrôle des conditions salariales, des conditions sociales en matière d'adjudications, sont effectivement appliquées. Et pourquoi sont-elles effectivement appliquées ? C'est parce que l'Etat n'est pas tout seul ! C'est parce que les partenaires sociaux font ce travail. Donc, sur ce plan-là, nous sommes satisfaits.
Le rapport rappelle également le rôle de la jurisprudence en matière d'AIMP. Evidemment, il y a des arrêts des tribunaux et la jurisprudence qui indiquent qu'il est clairement interdit de prendre uniquement en considération le prix pour l'attribution des marchés. Et ça, c'est vraiment fondamental, puisque les AIMP et les accords OMC prévoient qu'on donne la préférence à l'offre économiquement la plus avantageuse ! Et l'offre «la plus avantageuse», ça ne veut pas dire la moins chère ! L'offre la plus avantageuse, c'est celle qui tient compte d'un certain nombre de critères, à côté du prix - critère le plus important - critères que j'ai évoqués tout à l'heure, comme la formation professionnelle, et ceux liés au développement durable.
J'ajoute que l'Agenda 21, qui a été renouvelé et a fait l'objet d'un rapport examiné par la commission de l'économie, a mis le doigt sur cette problématique du respect de critères tels que les transports et la protection de l'environnement. En un mot comme en cent, j'aimerais vous dire, encore une fois, que ce rapport est positif et que sa conclusion est dynamique. Il fallait bien que je termine par un point un peu plus intéressant, pour dire qu'on souhaiterait que les crayons fournis pour nos séances de commissions soient, si possible, originaires du canton. Vous connaissez tous la marque...
Des voix. Caran d'Ache !
M. Gabriel Barrillier. Caran d'Ache, effectivement ! Ça tombait bien ou mal, mais, lorsque nous avons examiné le rapport sur le développement durable en commission de l'économie, nous avons pu voir que les crayons mis à disposition viennent de je ne sais où - il paraît qu'ils viennent de Chine ! Sur ce point, la centrale d'achats a des progrès à faire ! (Commentaires.) Je le dis ici, et ça n'a rien à voir avec le libre échange, il est inadmissible d'aller chercher des fournitures je ne sais où lorsqu'on a, à Genève, une fabrique de crayons qui est presque centenaire et mondialement connue ! (Applaudissements.) C'est vraiment une erreur qui a été faite !
Une voix. Ecologiste !
M. Gabriel Barrillier. Donc, le groupe radical va prendre acte de votre rapport, en souhaitant que vous appliquiez véritablement ses conclusions, qui sont, encore une fois, très positives.
Le président. Merci, je passe la parole à M. Bertrand Buchs.
M. Bertrand Buchs (PDC). Merci, Monsieur le président. Le groupe démocrate-chrétien va prendre acte de ce rapport. Nous avons fait très attention à la première invite de la motion, sur la formation professionnelle et continue qui était pour nous essentielle. En lisant le rapport, la réponse au troisième point nous satisfait puisque la règle des 5% est introduite, ce qui est très important, et les entreprises qui vont former des jeunes pourront ainsi obtenir un avantage au niveau du marché. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Hiltpold.
M. Serge Hiltpold (L). Mesdames et Messieurs les députés, après un déclassement, un projet naît et il y a les adjudications de marché. Déposé il y a plus de trois ans, ce projet de motion s'inquiétant des conditions de soumission et d'adjudication qui constituent toujours un enjeu majeur pour les entreprises et les citoyens de notre canton, tant en termes d'emploi que sur les plans économique et de la formation professionnelle pour nos jeunes, est toujours d'actualité.
Les organismes et la clientèle privés ont la parfaite liberté de pratiquer leurs adjudications comme ils l'entendent, notamment en se basant sur les critères de compétence, de qualité, de formation professionnelle et d'application de mesures environnementales et une certaine proximité. Le privé place le curseur et prend ses responsabilités: c'est le libre arbitre dont je suis un fidèle défenseur.
Pour les collectivités publiques et s'agissant du contenu du rapport, il y a des éléments que j'aimerais clarifier et préciser. Dans les attestations de soumission, s'il est à mon avis important de prendre en compte la main-d'oeuvre, il faut considérer tout le personnel d'exploitation, et non le seul personnel administratif: il y a un tout dans une entreprise.
Actuellement, le coefficient de formation professionnelle admis est de 5%, et c'est ici que l'effort devrait être soutenu pour la formation. Premièrement, pour valoriser l'apprentissage à Genève, ce qui me semble être la volonté de la majeure partie de ce parlement, les entreprises ont besoin de travail pour honorer leur rôle formateur. Deuxièmement, concernant les matériaux, je pense qu'il est également nécessaire de soutenir certaines filières, notamment pour la mise en valeur de déchets, tels que le béton recyclé, par exemple, pour les infrastructures de travaux de tram et autres grosses infrastructures. Il y a d'ailleurs un projet, ECOMAT, qui a été soutenu par une motion récemment.
Finalement, et comme toile de fond, nous nous interrogeons sans cesse sur la traçabilité des produits, avec les labels «bio», sur le développement durable et sur l'impact environnemental. Transposons cela dans le concret en nous posant la bonne question et plaçons le curseur au bon endroit ! Qu'en est-il des prestations durables ? Il n'existe rien, et c'est peut-être là que la politique et «les politiques» ont leur carte à jouer avec des entreprises citoyennes, sans tomber dans un mercantilisme mal éclairé.
Mesdames et Messieurs les députés, nous prenons acte de ce rapport en appelant une politique volontariste et responsable. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Serdaly Morgan.
Mme Christine Serdaly Morgan (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en trois ans, la motion 1712 B a fait du chemin, l'Etat également, et c'est tant mieux ! Les critères et les instruments de l'Etat, dans sa politique de soumission et dadjudication, sont aujourd'hui bien heureusement plus précis pour des adjudications qui ne sont plus basées uniquement sur le prix le plus bas.
Les efforts consentis par l'Etat sont importants et personne ne conteste qu'il reste toujours du chemin à faire. Etre convaincu et produire les outils nécessaires est évidemment essentiel. Toutefois, diffuser cette pratique et, surtout, influencer et inciter les communes, les partenaires de l'Etat et les entreprises en général, reste un défi. Adapter l'ensemble de ses propres pratiques également.
Cette motion, qui permet deffectuer un bilan intermédiaire, concret, avant une prochaine discussion sur l'Agenda 21 et sa loi, donne ainsi une image plutôt réjouissante. Nous ne pouvons aussi que nous réjouir que la durabilité ne relève plus uniquement de critères environnementaux. De même, si la formation professionnelle, qui ne constitue pas encore un critère à part entière au regard des règles fédérales, ne sert encore qu'à départager des offres, elle pondère au moins la seule prévalence du prix. Mais, de la poule et de luf L'important est que la question du prix soit mise en regard d'un tel critère qui contribue à une responsabilité sociale des entreprises à l'égard de la vie locale.
On peut aussi espérer que la réalité des pratiques cantonales permettra à terme de changer la loi sur le marché intérieur de 1995 et d'adapter celle-ci aux nouvelles exigences de notre société en matière de durabilité, mais aussi à lévolution du fonctionnement du marché avec sa globalisation accrue. En tous les cas, on peut saluer la détermination du Conseil d'Etat avant que la LMI névolue !
On peut toutefois relever que c'est surtout dans le domaine de la construction et dans les pratiques de la centrale d'achats de l'Etat que les résultats sont au rendez-vous. Le secteur des services, les mandats concernant d'autres secteurs devront aussi suivre et s'adapter, et nous attendons du Conseil d'Etat qu'il uvre, dans ces domaines, avec autant de succès et en une collaboration aussi active avec les secteurs concernés, à l'instar de ce qu'il a entrepris pour la construction. Dans cette perspective, le groupe socialiste, acceptera ce rapport.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Gauthier.
Mme Morgane Gauthier (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Le groupe des Verts fait une lecture bien plus mitigée de ce rapport émis par le Conseil d'Etat. Bien que les Verts aient largement soutenu cette motion issue des rangs libéraux et radicaux, nous attendions en effet autre chose du Conseil d'Etat. Nous attendions des critères précis et une modification du règlement d'application. Et là, nous sommes très déçus parce que nous ne voyons rien !
Nous avons écouté avec beaucoup d'attention les préopinants, qui ont dit que l'Etat avait bien fait du chemin ces trois dernières années, cela sous l'impulsion de ce Grand Conseil, c'est vrai, grâce à la loi sur l'Agenda 21, c'est vrai aussi, et grâce à une multitude de nouvelles normes mises en place pour la protection de l'environnement. Effectivement, le critère de formation professionnelle est représenté dans les critères d'adjudication.
Les critères environnementaux, en revanche, ne le sont pas. Ils sont considérés comme de la paperasse administrative, un surplus de travail pour les entreprises, alors que pour nous, bien évidemment, c'est le contraire. C'est un gage de qualité, une plus-value pour le canton, une plus-value lors de l'adjudication !
Ce soir, nous sommes tous d'accords sur le fait que le prix ne doit pas être le seul élément ou l'élément déterminant pour l'attribution d'un marché public, mais d'autres éléments doivent le pondérer. Or, malheureusement, les critères ne sont pas définis. Nous n'avons vu aucune modification des règlements d'application des AIMP, et c'est bien là que le bât blesse ! C'est pour cette raison que les Verts refuseront d'adopter ce rapport du Conseil d'Etat. (Brouhaha.) Nous estimons qu'il ne répond pas aux trois invites que vous avez formulées, Messieurs ! Je relis votre invite: «à mener dorénavant une politique d'adjudication des marchés publics [...] en fixant des critères d'adjudication [...]» ! Aujourd'hui, les critères d'adjudication au niveau environnemental ne sont pas fixés !
Voilà les raisons pour lesquelles nous refuserons ce rapport du Conseil d'Etat et nous vous proposons de lui renvoyer la copie, pour qu'il nous propose une modification du règlement d'application des AIMP. Je tiens à vous dire encore une chose, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que d'autres cantons, en Suisse alémanique, sont bien plus exigeants que le nôtre en ces domaines-là. Je parle de Zurich, je parle des Grisons. Bien sûr, tout est plus compliqué et tout est plus difficile à Genève, mais ces cantons ont réussi à faire inclure et appliquer des critères environnementaux plus rigoureux, plus précis qu'ailleurs. Alors qu'à Genève on nous dit que ce n'est pas possible, à Zurich et dans le canton des Grisons, c'est possible !
Alors là, nous nous interrogeons et proposons au Conseil d'Etat d'aller voir ce qui se passe ailleurs, ce qui se passe dans d'autres cantons, en Suisse allemande notamment, et, pour une fois, de prendre exemple sur ce qui se passe de l'autre côté de la Sarine. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames, Messieurs, chers collègues, vous avez joué aux apprentis sorciers, vous avez joué avec la boîte d'allumettes, et aujourd'hui vous avez mis le feu ! Cette motion est bien la preuve de votre impuissance, de votre inefficacité, par rapport à vos slogans habituels ! Mesdames et Messieurs les libéraux, Mesdames et Messieurs les radicaux, et de temps en temps les PDC, oui, vous prônez à longueur d'année l'ouverture des frontières, la libre concurrence. Maintenant, vous dites qu'il faut considérer les performances en termes d'emplois, en termes de salaires, pour toutes ces PME qui doivent gagner de l'argent. Et puis, oups, les marchés publics vous passent sous le nez ! Et pourquoi ? Parce que vous n'êtes pas concurrentiels par rapport aux entreprises européennes ! Vous savez, celles que vous chérissez à chaque élection - «Vive l'Europe !», «La Suisse doit entrer dans l'Europe !», n'est-ce pas, Mesdames et Messieurs les libéraux et radicaux ?! L'économie... Eh bien, aujourd'hui, vous n'êtes pas armés pour lutter contre ces sociétés et vous vous inventez une motion pour demander des critères plus «citoyens». J'ai entendu ce mot venant d'un libéral ! Excusez-moi, pour le Mouvement Citoyens Genevois, c'est ici que ça se passe ! Il faut des critères plus genevois. Il faut des critères pour la formation. Tout ça pour quoi ? Pour bloquer les entreprises européennes, qui sont plus performantes que vous ! Alors, à force de jouer les apprentis sorciers, cette fois, le boomerang, vous vous l'êtes pris en pleine figure !
Finalement, les citoyens constateront que la politique du MCG n'est pas si à côté de la plaque que cela quand elle veut préserver l'emploi local face à la «surconcurrence» européenne, lorsqu'il s'agit de favoriser les citoyens genevois, envers et contre tout, dans l'octroi des emplois ! C'est quand même magique, il nous a fallu cinq ans pour vous prendre la main dans le sac, en train de venir pleurer avec cette motion et de demander des critères plus genevois pour nos entreprises ! N'est-ce pas, Monsieur Barrillier, président du syndicat de la construction ou de je ne sais plus quelle association...
Le président. Monsieur Stauffer, vous vous adressez à la présidence !
M. Eric Stauffer. Oui, Monsieur le président, je m'adresse aussi un petit peu à l'assemblée, mais enfin, profitez, je crois que c'est votre dernière séance pour fustiger le MCG...
Le président. L'avant-dernière !
M. Eric Stauffer. ...ou pour fustiger le modeste député que je suis ! Alors, Mesdames et Messieurs, qu'est ce qui se passe ? Sous le sapin de Noël, on n'a plus mis votre petit cadeau: quelques attributions de marchés publics ? Oui, c'est ça ! Eh bien, nous allons suivre les Verts, c'est la deuxième fois en vingt-quatre heures... (Exclamations.)
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je vais conclure, Monsieur le président ! Et nous n'allons pas prendre acte de ce rapport. Mieux, Mesdames et Messieurs: nous demandons le renvoi en commission pour l'étudier plus à fond encore.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Desbaillets. (Commentaires.) C'est déjà demandé ! Monsieur Desbaillets, vous avez la parole.
M. René Desbaillets (L). Je pense que vous vous êtes étonnés de voir que 25% des signataires de cette motion sont des paysans. Qu'est-ce que des paysans viennent se mêler d'AIMP et d'adjudications ? Eh bien, au moment du dépôt de cette motion, mon collègue Luc Barthassat - qui était encore sur ces bancs avant de passer au Conseil national - et moi-même avons décidé de montrer que nous soutenions l'industrie genevoises et les entreprises genevoises, pour que des critères plus éthiques, environnementaux, et des critères liés à la formation professionnelle notamment soient pris en compte dans les constructions, car nous sommes confrontés perpétuellement au problème de la proximité et de la qualité, avec la concurrence de produits qui viennent du monde entier.
C'est pour cela que, Monsieur le président, vous avez parmi les signataires de cette motion des agriculteurs, et nous voulons, comme les entreprises, ne plus voir l'Hôpital cantonal chercher et acheter du lait à Saint-Gall parce qu'il est un centime moins cher...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. René Desbaillets. ...ou voir la Ville de Genève servir du vin espagnol sur un stand genevois ! C'est un scandale, et nous soutiendrons donc cette motion !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Meissner. (Commentaires.) D'accord, Madame !
Mme Christina Meissner (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC sourit, car ce sont les mêmes, qui hier réclamaient ardemment l'ouverture des frontières et des marchés, qui s'offusquent aujourd'hui lorsque leurs entreprises ne sont pas choisies. L'UDC pourrait rire et dire que, ma foi, ces offusqués mangent leur pain noir... Mais l'UDC se soucie de la Suisse, des Suisses et des entreprises suisses. Aussi, nous nous réjouissons des efforts faits par l'Etat dans sa politique en matière d'adjudications et de soumissions.
Mais malheureusement, comme cela a déjà été dit, l'Etat promet ! Or, en matière de critères, on n'a pas vu grand-chose venir. Les critères environnementaux n'ont pas été déterminés. Et c'est regrettable. Parce qu'ils existent ailleurs et qu'il suffirait de s'en inspirer ! Quant à la sous-traitance, le rapport de la Cour des comptes à ce sujet est éloquent: on est loin des pratiques vertueuses en ce qui concerne la main-d'oeuvre employée par ces entreprises adjudicatrices.
Ainsi, pour ces deux raisons, environnementales et sociales, l'UDC vous propose également de renvoyer ce rapport au Conseil d'Etat.
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à Mme Bolay, à qui il reste quarante secondes.
Mme Loly Bolay (S). Merci, Monsieur le président ! Attendez, j'ai un problème avec mon fauteuil... (Mme Loly Bolay tente de dégager sa veste coincée dans le siège.) C'est M. Tornare ?
M. Manuel Tornare. Ah non, ce n'est pas moi ! (Rires. Commentaires.)
Le président. Monsieur Tornare... (Brouhaha.)
Mme Loly Bolay. Voilà ! Merci, Monsieur le président !
Le président. Je vous en prie !
Mme Loly Bolay. Moi, j'adore le MCG lorsque M. Stauffer nous donne des leçons de morale ! J'aimerais quand même faire une remarque à M. Stauffer au sujet de son «bulletin paroissial», le journal du MCG: vous l'imprimez où, votre bulletin, Monsieur Stauffer ?
Une voix. Dans le canton de Vaud !
Mme Loly Bolay. «Dans le canton de Vaud !»... Pourquoi ? (Commentaires.) Parce que c'est bien meilleur marché ! (Commentaires.)
M. Eric Stauffer. Edipresse. Chez Edipresse ! (Brouhaha.)
Mme Loly Bolay. Alors arrêtez ! Arrêtez de donner des leçons de morale ! Vous l'imprimez dans le canton de Vaud parce que vous y obtenez des prix ! Voilà, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Edipresse Genève ! (Brouhaha.)
Le président. Merci, Madame la députée. Pour conclure, je passe la parole à M. Barrillier. (Brouhaha.)
Des voix. Hou ! Dans le canton de Vaud ! (Le président agite la cloche.)
M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, chers collègues... (Brouhaha. Commentaires.)
Le président. Allez-y, Monsieur Barrillier ! Monsieur Stauffer, c'est M. Barrillier qui a la parole !
M. Gabriel Barrillier. Loin de nous de penser que ce thème allait enflammer cette enceinte ! Pourtant, c'est la seconde fois que ce rapport est soumis à notre assemblée. J'aimerais juste rappeler que notre parti, en tout cas sur le plan national, n'est pas favorable à l'adhésion à l'Union européenne. Nous sommes favorables à la poursuite des relations bilatérales, qui ont été prônées par l'UDC en 1992. (Commentaires.) Celles-ci sont plutôt oubliées pour le moment. Ça, c'est la première chose.
La deuxième chose, c'est que cet AIMP est un accord qui vise d'abord et en premier lieu à assurer l'égalité de traitement à l'intérieur de la Suisse. On a parlé d'imprimeries situées dans le canton de Vaud, entre autres. Il s'agit en fait d'avoir une politique d'égalité de traitement pour les entreprises et pour les travailleurs en Suisse.
Troisièmement, en ce qui concerne les conditions de travail et les conditions de concurrence - je précise en passant que je suis à la retraite depuis deux mois, je ne suis donc plus président, secrétaire général, etc. (Commentaires.) Toutefois, je puis vous assurer que, à performances égales, les entreprises que je connais le mieux, nos entreprises, sont parfaitement capables d'être concurrentielles. Effectivement, nous avons à Genève des conventions collectives d'avant-garde qui font que le coût du travail est légèrement plus élevé. Dès lors, je puis assurer ici qu'en tout cas sur ce plan-là, sur ce critère-là, les contrôles nous permettent de garantir cette égalité de traitement. D'ailleurs, on va peut-être en parler avec la motion suivante.
C'est vrai que pour les critères environnementaux, de transports, pour les critères de développement durable, il y a un effort à faire. Je l'ai dit en prenant comme exemple les crayons; c'était un peu facile, mais enfin, il faut quand même le dire ! Là, il faut que les responsables dans les départements, qui préparent les documents de soumission et d'adjudication - et la centrale d'achats, pour d'autres produits - prennent conscience de cette dimension ! Parce que ça ne sert à rien de voter des lois sur le développement durable si on ne les applique pas !
Donc, je l'ai dit tout à l'heure dans ma prise de position, ce deuxième rapport est une copie acceptable et il manifeste les bonnes volontés du gouvernement; toutefois, maintenant, on l'attend au contour !
Une voix. Faut l'imprimer à Genève ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Est-ce qu'il reste encore des temps de parole... Pour Mme Engelberts, qui l'a demandée ? (Remarque.) Non, c'est fini. Pour Mme Gauthier, c'est fini aussi. Pour M. Stauffer aussi. C'est parfait ! (Remarque de M. Eric Stauffer.) Non, pas du tout ! On passe la parole à M. Muller.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Ce n'est pas fini pour moi ?
Le président. Non, vous pouvez commencer ! (Rires.)
M. Mark Muller. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, quelques mots sur cette politique d'adjudication de l'Etat de Genève. Tout d'abord, j'ai trouvé les propos de Mme Gauthier sévères à l'égard du Conseil d'Etat - et même à l'égard du Grand Conseil, dirais-je. D'une part, le Conseil d'Etat a modifié le règlement de la centrale commune d'achats par l'article 9, alinéa 2, qui dit ceci: «La centrale adopte une politique d'achat conforme aux critères du développement durable, en favorisant notamment l'utilisation économe et rationnelle des ressources naturelles». Mais ça n'est pas tout ! Votre Grand Conseil a modifié la loi sur l'action publique en vue d'un développement durable - la loi sur l'Agenda 21 - pour exiger de l'Etat qu'il respecte les principes du développement durable dans le cadre de sa politique publique d'investissements. Les textes légaux et réglementaires applicables ont donc bel et bien été modifiés pour orienter notre politique de marchés publics dans le sens que vous souhaitiez.
Maintenant, quelques éléments pour évoquer le dossier des crayons qui, effectivement, parle à tout citoyen genevois parce que nous avons une entreprise éminemment connue et extrêmement bien implantée dans notre économie, entreprise qui produit des crayons, des stylos et autres plumes. Le problème est que les entreprises qui souhaitent soumissionner pour nous vendre des produits - qu'il s'agisse de crayons, qu'il s'agisse d'imprimantes, qu'il s'agisse d'oeufs de Pâques ou autres denrées - doivent remplir un certain nombre d'attestations, doivent fournir un certain nombre de pièces attestant que les denrées en question sont en conformité avec les conventions collectives et un certain nombre de normes en matière d'assurances sociales. Il se trouve que certaines entreprises ne souhaitent pas remplir ces formulaires, refusent de le faire, considérant ne pas avoir à se soumettre à ce type d'exigences qui sont prévues par nos lois et règlements. Cette attitude réfractaire, malheureusement, les exclut de nos procédures de marchés publics, ce que personnellement je regrette beaucoup. Mais nous ne désespérons pas de reprendre le dialogue avec ces entreprises, pour qu'elles puissent à nouveau soumissionner. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc voter d'abord sur la demande de renvoi au Conseil d'Etat. Si cette demande est acceptée, la motion sera renvoyée au Conseil d'Etat. Sinon, nous prendrons acte de ce rapport.
Mis aux voix, le renvoi au Conseil d'Etat de son rapport sur la motion 1712 est rejeté par 42 non contre 40 oui et 2 abstentions.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1712.
Débat
M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. On reste un peu dans le même sujet et je crois qu'il est important de prendre cette motion 1856 dans son contexte général. Elle fait partie d'un bouquet de trois motions déposées par des députés de gauche, dont notre ancien collègue et ami Didier Bonny. Ce bouquet a déjà perdu un de ses pétales, soit la motion 1858 - d'ailleurs, le rapporteur de minorité porte une cravate avec des marguerites, ce qui convient bien à la notion de bouquet ! (Commentaires.) Donc, ce bouquet a perdu l'un de ses pétales car la motion 1858 a été retirée, les motionnaires s'étant rendu compte de son côté inepte puisque le Conseil d'Etat avait déjà répondu à la demande formulée.
Restent donc les motions 1856 et 1857 qui ne sont malheureusement pas traitées ensemble, ce qui fait qu'elles le sont hors contexte, ce que je regrette. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à la motion 1856 que l'on pourrait qualifier de «monde à l'envers». En effet, j'ai été mis, en tant que rapporteur de majorité, dans une situation assez étrange. J'ai dû me battre très vigoureusement pour protéger la fonction publique contre les attaques perfides de la gauche et ses critiques extrêmement virulentes contre la politique d'achats et d'adjudications du Conseil d'Etat. C'est intéressant, parce qu'on a vu durant les débats que la politique du Conseil d'Etat était beaucoup moins critiquable que ne voulaient le faire croire les motionnaires, et cela a pu être démontré durant les auditions. Nous avons notamment auditionné la responsable de la centrale d'achats, et M. Muller vient de citer les règlements et les normes très strictes existant au sein de l'administration pour les adjudications et les achats. On voit que les critères environnementaux, sociaux et économiques - heureusement d'ailleurs - sont pris en compte de manière tout à fait satisfaisante dans les règlements. Et, contrairement à ce que laisse entendre cette motion, l'Etat ne se comporte pas du tout de manière sauvage, mais tout à fait responsable en matière sociale et environnementale.
Alors, dans leur grande sagesse, les motionnaires nous ont amené une seule personne à auditionner, un représentant de l'Oeuvre suisse d'entraide ouvrière, qui a reconnu expressément qu'il ne connaissait pas le dossier genevois, qu'il ne connaissait pas la pratique genevoise et qu'il n'avait pas d'exemple concret à donner établissant que le canton violait les règles de l'OIT ou avait un comportement cavalier en la matière. Il s'est borné à répéter plusieurs fois que des cantons et villes suisses avaient renoncé à acheter des pavés sur le marché asiatique. Cette référence répétée aux pavés avait un côté assez inquiétant: peut-être s'agissait-il d'une réminiscence de l'année 68.
Cette motion n'était au fond qu'un procès d'intention contre la politique du Conseil d'Etat et l'on peut dire qu'on pouvait ressentir du côté de l'administration une certaine frustration de voir ses alliés objectifs et traditionnels l'attaquer de manière aussi virulente durant les travaux. Voilà pourquoi je vous invite à rejeter cette motion.
On nous a déposé un amendement, et je pense que la signature du PDC s'explique par le fait que la motion initiale était aussi signée par un PDC de gauche ! (Commentaires.) Oui, un PDC de gauche ! Je pense que c'est la raison pour laquelle ils ont voulu essayer de sauver cette motion par un amendement...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Edouard Cuendet. ...mais n'oublions jamais qu'un amendement sur une invite ne change rien à l'état d'esprit d'une motion et ne change rien au fait que celle-ci fait partie d'un bouquet de motions qui est absolument inacceptable. Je vous invite donc à refuser tant la motion que l'amendement !
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole à M. Deneys.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, il faut bien voir de quoi nous parlons ici. Il s'agit de nous assurer que l'Etat, lorsqu'il attribue des marchés, se préoccupe des conditions sociales dans lesquelles les entreprises exercent leur activité en exigeant d'elles qu'elles respectent les conventions de l'Organisation internationale du travail, notamment les points précis concernant le travail des enfants, le droit à un salaire décent, les horaires de travail, l'interdiction du travail forcé, la liberté d'association, le droit à la négociation collective et le droit à des mesures de protection pour la santé et la sécurité au travail. En fait, c'est bien de cela que nous parlons.
Certes, aujourd'hui, l'Etat se préoccupe des conditions sociales et environnementales, lorsqu'il attribue des marchés. Il n'empêche que cette préoccupation reste lacunaire. Et cette motion n'est pas une attaque contre l'administration publique, elle est simplement le reflet de notre société qui se préoccupe de temps en temps de ce qui se passe ailleurs sur terre. D'ailleurs, ça me rappelle les propos tenus hier par Elie Wiesel, parce que je pense que le principal souci est, comme il l'a évoqué, cette question de l'indifférence. Dans notre monde surinformé et extrêmement riche, dans lequel nous consommons à longueur de journée, dans ce monde où nous passons nos journées sur Internet, sur Facebook ou au téléphone, à acheter ci ou à acheter ça, nous nous préoccupons rarement de ce qui se passe plus loin, ailleurs, là où les produits que nous consommons sont réalisés. Eh bien, nous pourrions nous poser la question suivante: est-ce que nous pouvons avoir des certitudes que les conditions exprimées par le Conseil d'Etat, le gouvernement, la République ou les communes sont suffisantes pour que les normes de l'OIT soient respectées par les fournisseurs ? N'ayons pas d'aprioris ! Peut-être que c'est le cas pour certains marchés, peut-être que ce n'est pas le cas pour d'autres. Alors, soyons pragmatiques et regardons ce que les associations actives dans tel ou tel domaine ont à nous dire sur tel ou tel produit.
Je vais évoquer trois campagnes qui sont d'actualité et qui ne sont pas menées par des organisations spécialement gauchistes ou cryptocommunistes. La première, c'est la campagne de Pain pour le prochain et d'Action de carême: elle concerne les conditions de production des ordinateurs. Aujourd'hui, ces conditions de production sont extrêmement problématiques, parce que les salaires des ouvriers s'élèvent à moins de 50 centimes de l'heure et que leurs journées de travail durent plus de douze heures, cela sept jours sur sept, parce qu'on ne va tout de même pas ralentir les cadences pour un jour de congé ! C'est une réalité qu'Action de carême et Pain pour le prochain évoquent dans un communiqué de presse daté du 12 octobre 2010. Ils relèvent par exemple les promesses non tenues par Foxconn, un fournisseur et sous-traitant d'Apple qui exploite ses ouvriers de façon particulièrement dramatique, au point d'avoir provoqué une vague de suicides au sein de l'entreprise ! Je ne pense pas que nous puissions rester indifférents aux conditions de production des ordinateurs aujourd'hui. Alors, de nouveau, n'ayons pas d'aprioris ! Est-ce que l'Etat de Genève semble remplir les conditions exprimées par ces associations qui se préoccupent du sort de ces travailleurs lointains ?
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Roger Deneys. Malheureusement, la réponse est non, parce que le canton de Genève ne figure pas dans la liste des communes et cantons suisses qui remplissent ces conditions ! Manifestement, le problème subsiste.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je passe la parole à Mme Engelberts.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). N'ayant pas pu prendre la parole tout à l'heure, je pense être un peu hors sujet, mais je voudrais quand même donner une précision, car Mme Loly Bolay nous a habitués, au MCG, à sortir un scoop à chaque séance. Alors j'ai compris la stratégie, c'est intéressant, parfois c'est drôle. Je voulais donc seulement donner l'information suivante à Mme Bolay, si elle souhaite l'entendre, pour lui dire que le «Journal du MCG» est édité au 11, rue des Rois par Edipresse, qui, jusqu'à présent, édite des journaux comme la «Tribune de Genève» et «Le Matin». J'en profite pour souhaiter une bonne et fructueuse lecture de notre journal à Mme Bolay !
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Stauffer, à qui il reste trois minutes. (Brouhaha.) Monsieur Stauffer ?
M. Eric Stauffer (MCG). Combien ?
Le président. Trois minutes vingt ! (Brouhaha.)
M. Eric Stauffer. Deux minutes vingt ? Trois minutes vingt ! Vous savez, il y a un peu de bruit ! Mais on a pris l'habitude, quand on cause...
Le président. Je vous en prie, Monsieur le député, veuillez parler, votre temps de parole s'écoule.
M. Eric Stauffer. Mais vous savez, ce n'est qu'un détail, le temps ! D'abord, qu'est-ce que le temps ? Ça change tout le temps ! Alors finalement, ce n'est pas bien grave...
Mesdames et Messieurs, deuxième motion sur les offres de marchés publics - une fois encore - mais cette fois l'estocade vient du parti socialiste. Eh bien, pour attribuer des marchés publics, il vous faudra respecter telle règle, telle règle et telle règle... Vous ne savez plus quoi inventer pour faire en sorte que les marchés n'échappent pas aux entreprises genevoises. Mais il fallait vous poser la question avant, Mesdames et Messieurs ! Quand vous veniez prôner l'ouverture à l'Europe, quand vous veniez dire que c'est scandaleux, ce parti, qui en a toujours après les frontaliers ! Nous, on n'en a pas après les frontaliers: on veut juste préserver la qualité de vie des résidents genevois ! Vous allez finir par l'imprimer, cela fait cinq ans qu'on vous le répète !
Finalement, par des moyens détournés, vous essayez de faire la politique du MCG ! Ce qui est bien, et l'on vous soutiendra ! Mais, en l'occurrence, cette motion ne sert strictement à rien, puisqu'il y a des dispositions fédérales et internationales dans le cadre des accords que la Suisse a signés avec d'autres pays, dont l'Union européenne. Vous ne faites qu'enfoncer une porte ouverte ! Puisque, dans le cadre d'un marché public, on ne pourrait pas octroyer d'adjudication à une entreprise qui exploiterait, par exemple, de la main-d'oeuvre enfantine, ne respectant ainsi pas les minima légaux. Finalement, votre motion ne sert strictement à rien, comme la plupart des choses que vous avez proposées ce soir.
Ce qui en revanche aurait été intelligent, sur le texte d'avant qui concernait aussi les AIMP, ç'aurait été de soutenir vos cousins germains les Verts, pour des AIMP avec une fibre écologique. Mais il est vrai que, finalement, vous n'êtes plus la vraie gauche: vous êtes cette gauche caviar embourgeoisée, et les problèmes écologiques ne vous intéressent plus, si ce n'est pour brasser du vent et faire de l'électoralisme avant les élections !
Le groupe MCG s'opposera donc à votre texte, puisqu'il ne sert à rien et qu'il encombre l'ordre du jour du parlement.
Mme Christine Serdaly Morgan (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette motion n'est évidemment pas sans lien avec la précédente - M 1712-B - et son rapport. Et les réponses du Conseil d'Etat mettent en évidence une évolution récente - rapide aussi - des pratiques autour des lignes tracées par l'Agenda 21.
Que demande alors cette motion de plus ou de différent ? Le respect de huit normes fondatrices de l'Organisation internationale du travail, l'OIT. Et que sont ces normes internationales ? Un ensemble de lignes directrices qui promeuvent notamment un travail décent, soit la liberté d'association, la négociation collective, l'abolition du travail forcé et du travail des enfants, la protection des enfants et des adolescents en matière de santé et de sécurité au travail.
Que manque-t-il alors aux pratiques actuelles ? Heureusement, de ce point de vue, rien sur notre marché local ! Mais au travers des politiques publiques d'achat, il s'agit de rappeler et de promouvoir l'application de l'ensemble de ces huit normes, en particulier la protection des enfants et des adolescents, et les règles de base autour du droit du travail. Briques, crayons chinois, vélos, ordinateurs produits à létranger, invitons à nous assurer où et comment ils auront été produits !
En acceptant cette motion, c'est le soutien à la poursuite de la voie choisie par notre canton que nous souhaitons; c'est accentuer encore nos politiques locales et régionales d'achat; c'est soutenir notre économie locale, régionale, et européenne oui, Monsieur le député Stauffer ! - en ne la soumettant pas à des prix concurrentiels obtenus par des pratiques limites du point de vue des conditions de travail; c'est, enfin, contribuer à faire évoluer la démocratie dans un monde globalisé.
Parce que nous sommes bien, déjà ici, dans la voie promue par l'OIT, et parce qu'une politique d'encouragement incitative a plus de chances que toute contrainte, nous vous présentons un amendement modifiant l'invite au Conseil d'Etat de la manière suivante: «à promouvoir auprès des entreprises, fournisseurs et prestataires de services, le respect des conventions de l'OIT dans lexécution du mandat qui leur est adjugé dans une procédure de marché public». Nous vous remercions, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, de faire bon accueil à l'amendement proposé par le groupe socialiste et de le soutenir. (Applaudissements.)
Mme Jacqueline Roiz (Ve). Je voudrais revenir sur les propos du rapporteur de majorité. Je ne considère pas que cette motion soit un texte de droite ou de gauche. C'est une motion qui fait appel aux conventions de l'OIT. Je rappelle que l'Organisation internationale du travail est un organisme tripartite qui prend en compte le gouvernement, les employeurs et les employés. De plus, cette motion se base aussi sur l'idée que la paix - la paix universelle - est aussi fondée sur la paix du travail. Voilà, ça c'était pour l'aspect gauche-droite.
Ensuite, cette motion demande que ces conventions soient prises en compte et que l'on attribue de manière plus exigeante un marché public à un fournisseur ou à un prestataire de services. Lorsque l'Etat achète divers matériaux ou services, on doit s'assurer au mieux qu'il n'y a pas eu de travail d'enfants dans le processus de production, qu'il n'y a pas eu de discriminations ou de travail forcé - et j'en passe, les critères ayant déjà été évoqués - et qu'il y ait la liberté syndicale ou le respect de la réglementation sur les horaires de travail.
Certes, Genève est membre de la Communauté d'intérêt écologie et marchés suisses - CIEM - et du Partenariat des achats informatiques romands - PAIR. La procédure d'appel d'offres de l'AIMP permet d'imposer certaines exigences sur le plan social, mais on n'en a aucune certitude. Je prends pour exemple la directive d'achat en matière de développement durable. En informatique, lorsqu'on parle de l'exigence de la certification SA 8000 ou de la norme OHSAS 18001, ces certificats constituent une norme qualité qui indiquent simplement qu'il existe un système de gestion permettant d'avoir un contrôle sur les mesures décidées. Dans le cas de la norme OHSAS 18001, il s'agit d'avoir l'assurance que les mesures décidées en termes de sécurité et de santé au travail sont contrôlées par l'entreprise productrice. En Suisse, il y a une réglementation étendue dans ce domaine, avec les directives de la Commission fédérale de coordination pour la sécurité au travail - CFST - et la loi sur le travail.
Par contre, en ce qui concerne les produits informatiques, on les achète à l'étranger, loin d'ici, et là on ne peut pas du tout être sûr que les normes de sécurité et de santé au travail soient vraiment respectées; ce n'est donc pas un gage suffisant. C'est la même chose pour le mobilier, avec la norme ISO 14001. C'est la même norme qualité qui exige aussi un système de contrôle des mesures en termes d'environnement, mais ce n'est pas un gage suffisant que les mesures environnementales soient vraiment respectées - il ne s'agit que de mesures de réglementation dans le pays concerné.
Donc, le commerce équitable n'est pas suffisamment pris en compte, en tout cas pas de manière certaine, notamment pour le textile et les aliments. Des commissaires ont exprimé des doutes ou rejeté cette motion en disant que l'Etat en faisait assez et que le contrôle ne pouvait pas être effectué à tous les stades de la production... Effectivement, le contrôle ne peut être total, pourtant il y a quand même une marge de progression. Le poids d'un mandat d'achat par la collectivité publique est très important: nous avons donc un moyen de négocier beaucoup plus ce genre de normes, mais l'Etat peut encore progresser...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Jacqueline Roiz. Alors, je dois... Je dois aller vite, là ! (Rires.)
Le président. Il vous faut donner votre conclusion, tout simplement !
Mme Jacqueline Roiz. Voilà ! Le groupe des Verts est attaché... (L'oratrice accélère le rythme de son intervention.) ...à l'économie durable et respectueuse de l'humain, aussi de l'environnement, comme vous le savez, et la Genève internationale a une vocation humanitaire. Elle doit donc s'efforcer d'appliquer au plus près les critères de l'OIT dans l'attribution des marchés publics. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Zaugg.
M. Daniel Zaugg (L). Merci, Monsieur le président. De mon côté, ce débat m'inspire une histoire.
Une voix. Ah !
M. Daniel Zaugg. J'aimerais vous raconter la mésaventure d'un ami, entrepreneur du bâtiment à Fribourg. Cet entrepreneur avait créé une entreprise tout à fait exemplaire, une entreprise dans laquelle il a réussi à insuffler une culture de l'excellence. C'était une entreprise orientée vers la qualité: les salaires des collaborateurs y étaient au-dessus de la moyenne, les collaborateurs y étaient motivés. L'entreprise elle-même était «éco-consciente», une politique de gestion des déchets avait été instaurée. Un beau jour, le patron s'est dit que, puisque cette entreprise était tellement performante, il fallait la certifier. Alors il s'est lancé dans la certification qualité, ISO 9000; puis dans la certification environnementale, ISO 14000. Il a donc multiplié les contrôles internes. Mais la crise est arrivée en l'an 2009. Où retrouve-t-on alors cette entreprise ? On la retrouve au bord de la faillite. Parce qu'on y avait multiplié les couches de contrôles ! Des couches finalement inutiles, étant donné que l'entreprise faisait déjà bien les choses avant. Mais mon histoire finit bien !
Des voix. Ah !
M. Daniel Zaugg. Elle finit bien, car mon ami s'est rendu compte assez rapidement qu'il avait perdu de vue sa mission de base et ce que demandent ses clients. Ses clients veulent des installations de qualité à un bon prix, ils ne veulent pas des certifications !
Alors, pour moi, cette motion, c'est un peu la même chose. A Genève, arrêtez avec les conventions de l'OIT ! Le travail des enfants, il n'y en a pas ! La liberté syndicale, elle existe, à Genève ! Oui, bien sûr, on peut étendre les choses ! Les auditions à la commission de l'économie nous ont montré qu'on avait déjà une directive d'achat pour le développement durable. Et, dans le rapport de minorité, de quoi nous parle-t-on ? On nous parle des conditions de travail des travailleuses chinoises. C'est un vrai combat, c'est très important, mais moi je vous demande une chose: est-ce le rôle du parlement genevois ?
Des voix. Oui !
M. Daniel Zaugg. Est-ce la mission que nous ont donnée nos électeurs, de faire ce développement durable-là ? (Commentaires.) Pour moi, le développement durable, c'est le développement durable régional ! (Commentaires.) Vous avez vos réponses à ces questions: nous avons les nôtres ! Je ne pense pas que ce soit notre rôle de résoudre tous les problèmes de la planète. Nous avons à être exemplaires au niveau régional. Le développement durable, oui, mais, au niveau planétaire, ce n'est pas notre rôle !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Barrillier.
M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, chers collègues, pas grand-chose à rajouter à la belle histoire que nous a contée Daniel Zaugg, qui est d'ailleurs patron d'une entreprise et sait de quoi il parle. Effectivement, si on lit stricto sensu cette motion, les conventions de l'OIT y sont citées. Toutes ces conventions, comme l'a rappelé ma préopinante, ont été ratifiées par la Suisse. Et, effectivement, quand la Suisse ratifie les conventions de l'OIT, en tout cas en ce qui concerne l'intérieur, on les applique. Parce que vous savez qu'à l'OIT un certain nombre de conventions ont été ratifiées par 150 ou 180 pays, mais, dans certains de ces pays, il n'y a même pas d'autorités compétentes pour faire appliquer ces conventions.
Lorsque la Suisse ratifie des conventions, elle les applique ! Maintenant, a-t-elle la possibilité de les faire appliquer à l'extérieur ? Non ! On ne peut pas envoyer des inspecteurs en Chine, en Inde ou en Amérique du Sud ! Alors, il y a des réseaux, il y a des labels, notamment pour toute une série de productions, mais est-ce que ces réseaux sont suffisants pour nous assurer que ce que nous achetons tous les jours n'a pas été produit par des enfants, comme les crayons de tout à l'heure ? Qui peut le prouver ? Et vous-mêmes, chers collègues Verts, lorsque vous achetez un produit, vous considérez quoi ? Vous regardez quoi ? Le prix !
Des voix. La provenance !
M. Gabriel Barrillier. Les 80% d'entre nous regardent le prix ! Alors, il y a eu une prise de conscience, un effort a été fait, mais la grande majorité de la population ne regarde que le prix !
Une voix. Malheureusement ! (Brouhaha.)
M. Gabriel Barrillier. Alors, cette motion, dans son état actuel, notre groupe la refuse ! Elle ne sert à rien ! Maintenant, un amendement est annoncé; on verra et on se prononcera là-dessus. Je vous remercie de votre attention.
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste rappeler à M. le rapporteur de majorité qu'il n'y a pas de PDC de gauche ou de PDC de droite ! (Commentaires.) Il y a un parti, qui défend ardemment la prospérité économique de ce canton, mais qui assume sa responsabilité environnementale et sa responsabilité sociale. Cela dit, évidemment, notre groupe, notre parti, ne pourra pas soutenir une motion qui va, je dirai, tellement loin dans son texte, au point qu'elle n'est plus en phase avec les accords AIMP que nous défendons à la lettre.
Evidemment, on ne peut pas obliger légalement et contractuellement toutes les entreprises qui travaillent avec l'Etat à respecter les normes de l'OIT. Cela dit, nous sommes convaincus qu'il y a des produits provenant d'autres continents, dont la production implique du travail des enfants ou des conditions de vies - et de travail - qui sont effectivement inacceptables.
Donc, nous ne pourrons pas accepter la motion telle qu'elle est rédigée ce soir. Par contre, nous sommes prêts à soutenir l'amendement proposé et signé par notre chef de groupe ce soir. Si cet amendement est refusé, nous refuserons également la motion.
M. Patrick Lussi (UDC). Le plus difficile, quand on traite ce que l'on pense être deux motions similaires, c'est d'essayer d'être cohérent et de ne pas être dissonant. J'ai quand même l'impression que nous ne sommes pas du tout dans le même sujet que pour la précédente motion. Je me l'explique en ce sens. Comme le disent les motionnaires, on parle des normes de l'OIT. Or, que peut faire la Suisse pour aller contrôler en Chine, au Pakistan, en Inde ou je ne sais où, si les normes OIT sont réellement respectées ?
Il est clair que dans la base - et ce n'est peut-être pas un UDC qui parle - que vous préconisez, nous devons avoir confiance. Vous savez ce que dit le boa dans le «Livre de la jungle»: «Aie confiance !»... Eh bien, dans un cas comme ça, est-ce aux gouvernements ou aux adjudicataires de ne pas faire confiance ? Je crois en l'occurrence que c'est très difficile.
Ensuite, il est vrai qu'il y a peut-être une impossibilité, parce que, quand on parle des «Chinois du textile»... J'allais faire un mauvais jeu de mots. Vous vous souvenez que, dernièrement, une chanteuse pop s'est présentée à New York, vêtue de cuir - enfin, de peaux ! Parce que dans le textile, Mesdames... (Brouhaha.) ...il n'y a plus grand-chose qui se fait ici. Sans cette production, nous serions presque tout nus ou vêtus de peau ! Nous n'aurions plus de lumière non plus, puisque j'ai appris récemment que, pour les ampoules, il n'y avait plus de fabriques en Europe et que les ampoules étaient toutes fabriquées ailleurs. Il y a donc un réel problème, oui !
Mais est-ce par le biais de cette motion et par l'action du gouvernement qu'on peut résoudre la situation ? Fondamentalement, et sans être incohérent, le groupe UDC ne pourra pas soutenir cette motion et se joindra à ceux qui la rejettent.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Jeanneret, à qui il reste une minute.
M. Claude Jeanneret (MCG). Merci, Monsieur le président. Chers collègues, voilà une motion qui, à première vue, est idéaliste. C'est bien, mais elle ne tient pas très bien la route vis-à-vis de ce que l'on institue ici pour les achats. Ils sont déjà réglementés par les normes AIMP, on a une centrale d'achats constituée justement pour tenter d'améliorer les choix, simplifier le travail et rationaliser les commandes... Or, que veut cette motion ? A la place de rationaliser les commandes, on veut commencer par faire une enquête totale sur chaque objet que l'on veut acheter ! Mais j'aimerais vous dire une chose: pour une chemise faite en Europe, je ne peux pas dire si le fil utilisé vient de chez nous ou d'ailleurs ! On ne le sait pas ! Parce que si l'on considère ne serait-ce que la confection, même dans les capitales européennes de la mode, les 90% du travail sont effectués dans des usines à l'étranger, et l'on ne fait revenir la chemise chez le grand couturier que quand il reste les boutons à coudre. On fait du «made in France» en ayant seulement cousu les boutons sur une chemise ! Si l'on voulait mener une enquête totale à ce sujet, les résultats seraient aberrants !
Alors, on a des normes, la Suisse a reconnu les normes OIT, Genève aussi. On doit donc avoir une certaine confiance, on ne peut pas mettre des enquêteurs derrière tous les objets ! C'est impossible ! Et je crois qu'il y a une priorité dans nos achats: c'est le développement durable de notre région ! Alors, que l'on fasse véritablement de notre centrale d'achats une centrale qui s'approvisionne - au maximum - avec nos produits régionaux, notre production nationale, voire une production européenne ! Mais on ne pourra pas éviter, dans certains cas, de passer des commandes ailleurs, là où l'on sera en mesure de nous fournir !
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur Jeanneret.
M. Claude Jeanneret. Oui, Monsieur le président. C'est donc une motion qui est totalement irréaliste, qui n'est pas applicable du tout, et nous avons actuellement à l'Etat des gens qui font bien leur travail, donc nous refuserons cette motion !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Schneider Hausser, à qui il reste une minute également.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). J'aimerais vous dire que l'amendement déposé va justement dans le sens d'une modification de la motion, tout en gardant l'intention de fond de ce texte. La réaction suscitée par cet objet est significative du climat actuel à Genève face à la planète: chacun pour soi ! Bien sûr, le parti socialiste ne reproche pas à l'administration genevoise et à sa centrale d'achats de ne pas faire comme il faut le travail qu'on lui demande, mais le désir de cette motion et de l'amendement c'est d'aller dans un sens et de changer la pratique actuelle en l'améliorant.
La majorité réagit un peu comme une personne en état de choc. C'est comme si l'on se trouvait dans une voiture tombée dans une rivière, et que l'on reste dans l'habitacle...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Lydia Schneider Hausser. Oui, je conclus ! ...que l'on reste dans l'habitacle de la voiture qui en train de couler, cela en continuant d'écouter de la musique sur notre iPod, puisque ce dernier fonctionne encore ! Je vous demande donc de penser un peu plus «global».
Le président. Madame Gauthier, je suis désolé, votre temps de parole est écoulé. Je passe la parole à M. Cuendet et à Deneys. Chacun dispose d'une minute.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Une minute ! Mesdames et Messieurs les députés, ce qui est essentiel ici, c'est la vision globale. Nous ne pouvons pas nous cantonner dans l'idée que nous n'avons rien à faire de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Affirmer que nous sommes attentifs aux conditions de production des ordinateurs ou d'autres produits est fondamental ! Et c'est la base du changement sur le reste de la planète pour que les pratiques s'améliorent aussi ailleurs !
Ici, à l'Etat de Genève, il y a une autre campagne qui me choque particulièrement, qui concerne Nestlé. Nestlé est une multinationale qui se trouve en Suisse, qui a des machines à café implantées partout dans le canton de Genève, notamment à l'Etat de Genève, or Nestlé brime les libertés syndicales, en Indonésie par exemple ! Et une campagne internationale a été lancée contre le comportement de Nestlé. Eh bien, il y a simplement d'autres fournisseurs de café et de machines à café qui sont excellents - comme la «Semeuse», à la Chaux-de-Fonds, que je vous recommande !
Mais on n'est pas obligé de prendre des produits qui ne respectent pas les travailleurs ! Il y a des choix que nous pouvons faire facilement et qui ne coûtent pas cher. Il y a encore du travail !
Le président. Merci, je passe la parole à M. Cuendet.
M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Je ne participerai pas à la campagne publicitaire de M. Deneys, mais je m'intéresserai surtout à un mot qui est souvent utilisé dans la discussion: le label, la certification. Comme si c'était le sésame absolu qui garantissait une provenance absolument pure ! D'ailleurs, le représentant de l'Oeuvre d'entraide ouvrière qu'on a entendu ne jurait que par les labels Xertifix, Fair Stone, SA 8000, standard IMAP, FLO ou Max Havelaar... Il y a une immense liste de certifications, longue comme le bras ou un jour sans pain - plutôt comme un jour sans pain ! Au fond, c'était intéressant, parce que dans le cas de la discussion à la commission de l'économie, c'est tombé au même moment que plusieurs articles de presse qui ont démontré que, par exemple, le label «bio» utilisé notamment à l'étranger était absolument utilisé à tort et que le miel «bio» venait d'abeilles qui avaient butiné à Tchernobyl, à peu près. (Commentaires.) Donc, ça montrait la limite de l'exercice, et l'un de mes excellents collègues libéraux a souligné les limites, aussi, de ces certifications qui constituent un business comme un autre, avec ses abus et ses dérives. Avoir une foi absolue en ces certifications et labels est une absurdité !
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je vais donc faire voter d'abord l'amendement qui nous a été soumis et, ensuite, la motion elle-même. Voici l'amendement, il s'agit de l'invite (nouvelle teneur): «à promouvoir auprès des entreprises, fournisseurs et prestataires de services, le respect des conventions de lOrganisation internationale du travail (OIT) dans lexécution du mandat qui leur est adjugé dans une procédure de marché public.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 43 oui contre 34 non.
Mise aux voix, la motion 1856 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 42 oui contre 41 non et 2 abstentions. (Applaudissements.)
Débat
M. Christophe Aumeunier (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, une précision technique tout d'abord, si vous me le permettez. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Une précision technique... (Remarque. Rires.)
Le président. S'il vous plaît, Monsieur Bavarel ! (Le président agite la cloche.)
M. Christophe Aumeunier. Merci, Monsieur le président ! Il s'agit d'une motion qui n'est pas contraignante pour le Conseil d'Etat puisque, vous le savez, en matière d'aménagement du territoire, la seule possibilité que nous ayons est de déposer des motions qui soient contraignantes. Celle-ci ne l'est pas, celle-ci ne fait que demander au Conseil d'Etat d'étudier une possibilité de déclassement. Il me semble important de le préciser. Il s'agit donc de demander au Conseil d'Etat d'étudier une possibilité de déclassement d'une zone agricole en zone industrielle au lieu-dit «le Prâlay», à Colovrex.
Cette motion apporte une réponse au besoin de zones industrielles à Genève, car le rapport divers 685 du Conseil d'Etat nous apprend que nous manquons cruellement de telles zones. Seuls 2% des zones industrielles de la FTI - Fondation pour les terrains industriels de Genève - sont disponibles, nous dit-on, et cela ne permet pas d'accueillir de nouvelles industries et de nouvelles entreprises à Genève. Nous avons en outre besoin d'imaginer des relocalisations pour les entreprises qui se situent dans le périmètre Praille-Acacias-Vernets, et cela est essentiel pour que les entreprises qui génèrent des nuisances puissent quitter ledit périmètre et permettre ainsi la construction de 9000 logements au centre-ville. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Merci, Monsieur le président ! Il s'agit donc de favoriser la mutation urbaine pour laquelle 9000 logements sont en jeu et, ainsi, contribuer à réduire la pénurie de logements dont nous savons tous qu'elle est un grave problème à Genève.
La zone industrielle proposée a une localisation tout à fait particulière. Il s'agit de s'ouvrir vers la Suisse, puisque 85% des échanges commerciaux et marchands se font avec la Suisse; il s'agit, lors de ces échanges commerciaux, d'éviter de faire traverser l'ensemble du canton de Genève aux marchandises, respectivement qu'elles aillent jusqu'à Bernex - ou zone industrielle prévue à Bernex - et retour; il s'agit d'envisager, et c'est important, une boucle ferroviaire qui lierait l'aéroport à Coppet et desservirait la zone industrielle. Cette boucle ferroviaire pourrait être imaginée en fonction de la valorisation foncière liée au déclassement. Il s'agit également de créer un lien avec l'autoroute dans cette localisation tout à fait spéciale.
La proximité avec l'aéroport est un argument supplémentaire en faveur du déclassement. Ce serait une chance de lier les zones de bruit. Imaginer que l'on puisse déplacer des entreprises bruyantes dans la zone de bruit aéroportuaire fait particulièrement sens pour une utilisation rationnelle du territoire. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, nous vous invitons à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Norer.
M. Olivier Norer (Ve). Les Verts sont pour le moins sceptiques, par rapport à cette proposition. Cette motion n'est certes pas contraignante. Néanmoins, elle est loin d'être sans danger.
Premièrement, rappelons-le, cette motion est intervenue dans le cadre des débats pour les dernières élections et elle a donc certains relents de période électorale.
Seconde chose, on nous dit qu'on a besoin de zones industrielles. Mais a-t-on besoin de zones industrielles réalisées à l'identique de ce qui se fait actuellement, c'est-à-dire un vaste étalement urbain avec une très faible valorisation du foncier, du territoire et des industries localisées ? N'aurait-on pas besoin de mieux gérer les zones industrielles ? A l'heure actuelle, les zones industrielles sont loin d'être bien gérées ! On constate par exemple d'énormes surfaces dévolues au parcage, d'énormes surfaces dévolues à l'embellissement des entreprises situées sur ces emplacements, avec des petites fioritures, etc. On est loin d'aller vers une densification des zones industrielles ! Si l'on commençait par là, peut-être arriverait-on à débloquer beaucoup des surfaces industrielles nécessaires à notre canton. Travaillons donc plutôt sur cette piste-là !
Ensuite, quand j'entends parler de mutations urbaines, j'ai l'impression de rêver ! Non, là, il s'agit plutôt d'étalement urbain ! En l'occurrence, un étalement urbain dans une zone qui ne s'y prête absolument pas ! Colovrex n'est pas une zone bonne à bâtir des zones industrielles ! Ceux qui connaissent ce territoire sauront que c'est un territoire fortement marqué par des pentes. Donc, construire des zones industrielles sur un terrain vallonné est loin d'être propice.
On nous parle encore d'infrastructures, mais où sont-elles, les infrastructures ? Jusqu'à présent, il n'y a rien à Colovrex, si ce n'est les avions qui passent dans le ciel. En l'occurrence, il faudrait construire une ligne ferroviaire. On nous parle d'une jonction en direction du canton de Vaud, mais cette jonction aurait lieu sous terre ! Va-t-on créer des parkings souterrains et des liaisons ferroviaires souterraines ? Tout cela coûterait excessivement cher ! Je ne pense pas que l'on puisse aller dans cette direction.
On nous parle aussi d'infrastructures routières, par exemple. L'autoroute passe certes à côté, mais il n'y a pas de jonction ! (Brouhaha.) Créer une jonction à cet endroit-là nécessitera de perturber l'ensemble des flux sur l'autoroute... (Exclamations. Commentaires.) Car c'est l'endroit de l'autoroute le moins adéquat pour ça ! Le groupe des Verts n'a pas pour vocation d'augmenter le trafic ni de le perturber. Nous avons pour vocation de bien gérer le territoire, et une construction industrielle dans la zone de Colovrex serait tout à fait inadéquate !
Il y a un point sur lequel le groupe des Verts est tout à fait cohérent avec sa politique: si nous voulons déclasser des zones agricoles, nous le faisons dans des cas spécifiques, en fonction des besoins, de l'implantation et pour du logement ! Là, on n'a rien de tout cela ! Déclasser des zones agricoles à Colovrex, c'est faire fi du développement de l'agriculture à cet endroit, notamment l'élevage de bisons !
Une voix. N'importe quoi !
M. Olivier Norer. Les bisons de Colovrex contribuent notamment au bien-être et à la notoriété des communes avoisinantes. C'est un produit pour lequel les Genevois se déplacent volontiers à l'Auberge de Collex-Bossy pour en manger. (Brouhaha.)
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Olivier Norer. Toutes ces raisons font que cette motion n'a pas lieu d'être, ni d'être votée telle quelle ! (Applaudissements. Commentaires.)
Une voix. Bisons... Cardons...
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Forni.
M. Michel Forni (PDC). Pour le PDC, Genève a besoin de synergies gagnantes ! Et cette motion demande une étude au Conseil d'Etat, comme cela a été dit, pour permettre, peut-être, la réalisation d'une nouvelle zone industrielle et d'y associer une infrastructure routière et ferroviaire et, surtout, de permettre le développement de nouveaux pôles d'habitation.
Alors, ces synergies gagnantes, elles doivent bien sûr se faire, pour permettre à notre tissu économique d'évoluer. Il faut utiliser au mieux le petit territoire que nous avons, en jouant sur la complémentarité, qui va des entreprises à l'Université, mais il faut aussi une politique foncière qui s'adapte à des secteurs d'avenir et qui compensent les secteurs en déclin.
Nous avons aussi besoin d'une communauté urbaine, et elle a besoin de pôles d'habitation, de logements - encore du logement et toujours du logement, pour ceux qui l'ont oublié ce soir ! Et nous avons besoin d'un développement durable, d'une architecture nouvelle et d'un programme de lutte contre la pénurie de logements, mais sans créer des fractures sociales ou spatiales.
C'est donc dans cette volonté de concilier d'une part la réalisation d'environ 9000 logements, soit dans le secteur la Praille-Acacias-Vernets, que nous avons besoin de disposer de zones de remplacement, de substitution, pour permettre le transfert de certaines zones industrielles, pour les relocaliser et permettre aux entreprises de poursuivre leur développement.
Voilà simplement les deux buts essentiels qui sont derrière ce projet qui doit aboutir, c'est vrai, à une nouvelle densification de la région de Cointrin, avec vraisemblablement des problèmes, mais quand il y a des problèmes il y a également des solutions.
Ceci doit d'une part contribuer au développement de l'économie genevoise et, encore une fois, d'avoir du logement pour environ 9000 personnes. C'est la raison pour laquelle, au nom du groupe PDC, je vous propose de continuer à soutenir ce projet et de le renvoyer au Conseil d'Etat.
M. Eric Leyvraz (UDC). Cette motion se préoccupe du sort des entreprises qui devront être déplacées du secteur PAV pour permettre le développement de ce projet d'une grande importance pour l'avenir de Genève. Bien entendu, ce déclassement nécessite une fois de plus une demande de changement de zone pour la zone agricole, qui est vraiment une réserve d'indiens - ce qui va bien avec les bisons ! - une réserve d'indiens qui est toujours là pour résoudre le problème !
Ce qu'aimerait l'UDC, c'est connaître l'avis des paysans touchés par ce déclassement, car les terres de la zone «le Prâlay» sont de bonne qualité. Veulent-ils rester paysans et, si oui, ont-ils la possibilité d'obtenir des compensations en terrains ? Ne doit-on pas aussi équilibrer le développement de l'agglomération franco-genevoise, avec des créations d'entreprises qui doivent aussi se faire dans la région, de l'autre côté de la frontière ? Avec des logements et des entreprises bien réparties sur le territoire, on s'épargne des problèmes de pendulaires. N'oublions pas qu'en termes de terres agricoles Genève va perdre 600 hectares juste pour la construction de logements, cela dans les dix prochaines années, c'est quand même beaucoup ! Et l'UDC défend l'agriculture de proximité.
Cependant, nous comprenons bien le besoin de déplacer des entreprises et d'en créer de nouvelles, mais si nous sommes prêts à accepter le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat, motion demandant une étude de déclassement, nous resterons très attentifs à la réponse de ce Conseil d'Etat et à sa volonté d'utiliser de la façon la plus parcimonieuse qui soit ce terrain rare et limité que nous aurions bien raison de laisser libre pour permettre à l'agriculture de remplir son rôle fondamental, c'est-à-dire nourrir la population qui, quoi qu'il se passe et quel que soit le développement de ce canton, devra bien se nourrir tous les jours. Sans tomber sous la contrainte de l'article 24, j'aimerais ajouter que cette population doit aussi pouvoir s'abreuver avec des produits de qualité ! (Applaudissements.)
M. Jean-Louis Fazio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste soutiendra le renvoi de cette motion à la commission d'aménagement. Non pas que nous soyons d'accord sur le fond, mais nous saisissons l'occasion de la discussion sur le futur aménagement du PAV pour réfléchir à l'avenir des zones industrielles, à leur implantation, à une meilleure utilisation et rationalisation des espaces occupés.
Dans notre réflexion, même si la rive droite est bien desservie en accès routiers, ferroviaires et aéroportuaires, et bien que la création de zones d'activités puisse y paraître logique, nous pensons qu'il manque cruellement un pôle de développement pour la zone industrielle sur la rive gauche du canton. En effet, celle-ci est toujours épargnée... (Brouhaha.) ...dans les plans de développement et laisse la part belle aux zones villas ! (Brouhaha.) Et nous voyons là une opportunité de procéder à un rééquilibrage en matière d'aménagement du territoire ! C'est pour cela que nous proposons le renvoi de cette motion, pour discussion, à la commission d'aménagement, et non pas au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
M. Jacques Jeannerat (R). La création d'une nouvelle zone d'activités économiques répond à deux besoins. D'abord, et cela a déjà été dit, il y a un lien direct avec le PAV. Si l'on veut développer ce quartier et y mettre le plus possible de logements, eh bien, il faut une alternative crédible pour loger les entreprises. Je pense notamment à tous ces garages et vendeurs de voitures qui se trouvent dans le secteur Praille-Acacias, il faut pouvoir les mettre à l'extérieur de la ville... (Brouhaha.) ...et là, c'est une zone importante pour réaliser cela. (Applaudissements.) Tout ne se fera pas en un seul jour, ni la construction du PAV, ni cette nouvelle zone d'activités économiques. Il est donc nécessaire d'anticiper.
Le deuxième besoin est relatif au manque de surfaces, d'une part pour l'implantation de nouvelles entreprises, mais aussi pour le développement d'entreprises déjà existantes à Genève. On sait que dans le domaine de l'horlogerie, à l'avenir, on va devoir construire de nouvelles usines; on a donc besoin de surfaces, c'est indiscutable. La carence est déjà là, puisqu'il y a quelques semaines le directeur de la promotion économique, M. Löffler, articulait des chiffres dans la presse. Il disait qu'en cinq ans nous n'avons pas pu accueillir environ 10 000 emplois à Genève, à cause du manque de surfaces pour les nouvelles entreprises.
Je suis d'accord avec mon préopinant Vert, il faut parallèlement revoir le régime de ces zones, il faut prévoir la mixité dans ces zones d'activités économiques et les densifier. Dans la ZIPLO ou la ZIMEYSA, on a peut-être trop de constructions d'un ou deux étages sur rez. En zone industrielle, il faudrait prévoir des bâtiments de quatre ou cinq étages sur rez, avec une mixité: l'industrie au rez-de-chaussée et au premier étage, et des bureaux ou des entreprises de services dans les étages supérieurs. (Commentaires.) On peut également, bien sûr, intégrer des activités culturelles, telles que des discothèques, dans une nouvelle zone industrielle en modifiant la loi. Il n'y a pas de problème ! (Commentaires.)
Deux mots sur cette zone de Colovrex. Effectivement, elle est proche de l'aéroport, comme l'a dit M. Aumeunier. Elle n'est surtout pas propice au logement: il y a à la fois l'autoroute et l'aéroport. Quant à la proximité de l'autoroute, cher Monsieur, l'Office fédéral des routes a, depuis plus de vingt ans, un projet de sortie dans cette zone. Ce n'est donc pas très compliqué, le projet existe dans les tiroirs, à Berne.
On a parlé également du branchement avec la liaison CFF: pas de souci. Surtout, il y a une ouverture directe sur la Suisse, sans avoir besoin d'une nouvelle zone industrielle, sur la rive gauche, par exemple, qui viendrait perturber la circulation dans le canton.
Des voix. Oh !
M. Jacques Jeannerat. Et puis, parlons de ce terrain ! Il faut savoir que la majeure partie de ce terrain... Enfin, c'est un ancien vallon. Dans les années 1960, il a été en partie comblé par des remblais. Le propriétaire de l'époque, c'étaient les PTT, ils avaient installé des pylônes pour faire des relais téléphoniques. Depuis, les PTT se sont transformés en Swisscom; depuis aussi, il n'y a plus besoin de ces pylônes puisque ce sont les satellites qui font office de relais. Donc, la terre en question est de qualité relativement moyenne, Monsieur Leyvraz, car c'est de la terre de remblai. Ce n'est pas de la toute première qualité !
Nous avons bien travaillé ce dossier, nous avons pris contact avec les propriétaires, et ceux-ci sont très intéressés de vendre ces terrains pour réinvestir dans leur exploitation agricole, afin d'améliorer leur outil de travail, notamment l'élevage de bisons, plus au nord, dans la région de Collex-Bossy.
Le président. Merci, Monsieur le député. Le temps de parole radical est désormais épuisé, Monsieur Ducret. Je passe la parole à M. Golay.
M. Roger Golay (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG trouve l'idée tout à fait intéressante. Simplement, avant de lancer la grosse machine avec un projet de loi modifiant les limites de zones, lequel pourrait causer des remous dans la région concernée, nous souhaiterions, comme les Verts - ou les socialistes, je ne me souviens plus - un renvoi à la commission d'aménagement, pour avoir encore quelques compléments d'information sur la faisabilité de ce projet. Nous soutiendrons donc le renvoi à ladite commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Meissner, à qui il reste une minute.
Une voix. Elle n'est pas là !
Le président. Elle n'est pas là, parfait ! La parole est alors à Mme Hiltpold... Pardon, à M. Hiltpold !
M. Serge Hiltpold (L). C'est «Monsieur», en effet. Je n'ai pas encore subi d'opération ! Mesdames et Messieurs les députés, nous avons parlé ce soir de concertation, de dialogue avec les communes, de construction, et je crois que la première chose dans un projet, c'est de ne pas le tuer à la base. Il faut le faire naître, le faire évoluer. Donc, première chose, c'est qu'il ne faut pas tuer les arguments avant qu'ils naissent. Deuxième point: si vous menez de grandes réflexions sur le développement et le développement durable, vous constaterez que, la réalité, c'est 0,2% de taux de vacance dans les zones industrielles. Lorsque vous voulez monter une entreprise, qu'elle soit artisanale ou industrielle, il faut déjà avoir des locaux. Donc, la réalité économique - et ce n'est pas forcément une réalité uniquement industrielle, cela concerne aussi les PME - c'est que nous avons besoin de locaux. Pourquoi ? Pour travailler ! Alors, il est irresponsable de refuser une étude.
Ensuite, la localisation. Pour moi, il apparaît évident que les choses doivent se réaliser sur la rive droite, à l'entrée du canton de Genève, parce que les flux dans le canton, c'est principalement avec la Confédération, avec le canton de Vaud, et je rappelle qu'on ne fait pas entrer des semi-remorques dans le centre-ville. Ainsi, là, pour le lieu concerné, il n'y a pas d'arguments contre, puisqu'il se situe à l'entrée du canton. Et vous n'allez pas, dans la même localisation, construire des immeubles dans une zone bruyante. Lorsque vous avez une entreprise artisanale, vous faites du bruit; or, à l'endroit envisagé, cela ne dérangerait strictement personne.
Je tiens encore à rassurer ceux qui s'inquiètent pour les propriétaires: la famille Girardet est tout à fait favorable au projet. Alors je pense que l'argument n'est pas d'opposer l'agriculture à l'industrie et à l'artisanat: il faut considérer tous les partenaires. Lorsque les propriétaires sont d'accord, il faut avoir un dialogue, et ce dernier passe par un renvoi au Conseil d'Etat, qui doit réfléchir et apporter une étude. Suite à cela, il y a un projet de loi qui est renvoyé en commission pour examen. Je vous remercie donc de suivre mes indications.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Stauffer, à qui il reste deux minutes trente.
M. Eric Stauffer (MCG). Il me reste combien de temps ? Deux minutes trente ? J'ai mal entendu, car vous n'avez pas parlé dans le micro.
Mesdames et Messieurs les députés, je suis toujours effaré quand j'entends le parti libéral venir donner là une leçon et dire qu'il serait irresponsable de s'opposer à ce texte pour le développement. Mais, Mesdames et Messieurs les libéraux, ce qui est irresponsable, c'est de continuer à créer des milliers de places de travail sans construire les infrastructures qui vont avec ! Les logements, les écoles, les routes, et tout ce qui va avec ! (Exclamations. Commentaires.) Le CEVA ? Faites-nous rigoler avec le CEVA ! D'abord, est-ce qu'il va aller dans cette zone industrielle ? Bien entendu que non ! En plus, vous savez très bien que les frontaliers vont bouder le CEVA. Ils préféreront toujours le transport individuel, en lieu et place des transports collectifs, mais ça on en reparlera dans quelques années !
Ce que je veux demander, c'est qu'en fin de compte vous créez quoi en augmentant le nombre de places de travail à Genève ? Vous créez des pendulaires de plus ! Vous créez des frontaliers de plus ! Et vous êtes en train, avec votre politique globale, d'étouffer les citoyens genevois !
Alors le renvoi en commission se justifie d'autant plus, pour aller prendre le problème dans sa globalité. Cessez de jouer les apprentis sorciers et ne venez pas ici en vous tirant les bretelles et en disant: «Voyez, on a créé 10 000 emplois !» Car vous n'avez pas réalisé les logements nécessaires ! Vous en faites à peine 1500 par année alors qu'il en faudrait 4000 ! Vous ne créez pas de crèches en nombre suffisant, vous ne créez pas assez d'écoles ! Genève est en retard partout ! Genève est une ville éventrée par rapport aux routes, parce qu'en plus - enfin, ce n'est pas toujours de votre faute - vous réduisez la mobilité ! Vous étouffez notre canton, et cette politique globale doit cesser ! Le citoyen doit mettre un terme à cette politique irresponsable de développement.
Une voix. Très bien !
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Deneys à qui il reste deux minutes.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président, c'est beaucoup trop ! Le renvoi en commission est nécessaire. J'aimerais simplement rappeler à notre donneur de leçon principal dans ce Grand Conseil que, récemment, il a voté le déclassement SOVALP, lequel crée 4000 emplois sur la commune de Lancy, et que, ce soir, il a refusé un projet de loi qui visait à construire du logement sur la commune de Lancy ! (Brouhaha.) L'incohérence est donc en face de moi ! Et, ici, la moindre des choses, c'est d'étudier un tel projet en commission. Je pense qu'on peut effectivement créer de nouvelles zones industrielles, elles sont nécessaires à Genève, mais l'incohérence du MCG dépasse les bornes ! Il fait des cadeaux aux promoteurs et des cadeaux aux entreprises qui importent de la main-d'oeuvre ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Stauffer, à qui il reste trente secondes.
M. Eric Stauffer (MCG). Largement assez ! Evidemment, M. Deneys écoute mais ne sait pas entendre ! Lorsqu'il dit que le MCG est contre le développement et les logements, c'est faux ! Ce que nous ne voulons pas, c'est surdensifier ! Il faut déclasser des zones pour faire du logement, et c'est tout ! SOVALP, c'est une zone qui est déjà destinée à une zone industrielle, ce n'est pas tout à fait pareil. Encore une fois, c'est vrai que vous ne représentez plus que la gauche caviar embourgeoisée et que vous avez perdu vos valeurs citoyennes ! (Brouhaha.) Néanmoins, nous soutiendrons le renvoi de ce texte en commission. (Commentaires.)
Le président. Merci, Messieurs les députés. Nous allons passer la parole au Conseil d'Etat. Je donne la parole à M. Muller.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat accueille avec bienveillance cette motion, que vous pouvez lui adresser immédiatement ou renvoyer en commission pour obtenir des informations supplémentaires.
Deux éléments. Le premier, c'est qu'effectivement, pour réaliser rapidement le quartier la Praille-Acacias-Vernets, nous nous préoccupons de la relocalisation d'un certain nombre d'entreprises et de la disponibilité des zones industrielles, qui aujourd'hui sont largement occupées, et de la possibilité, le cas échéant, d'en créer de nouvelles. Nous devons également penser à l'établissement de nouvelles entreprises pour créer des emplois, dont nous avons cruellement besoin dans le canton. Je vous rappelle que nous avons plus de 15 000 chômeurs à Genève. Pour réduire ce taux de chômage, certes, c'est bien qu'il y ait des mesures d'organisation de l'Office cantonal de l'emploi, mais la création d'emplois, c'est mieux !
Deuxième élément. Nous travaillons, comme vous le savez, à la préparation du plan directeur cantonal, et il est évident que dans ce contexte nous ne saurions pas ignorer une proposition telle que celle-là. Nous devons l'étudier ! Il serait purement et simplement irresponsable de ne pas l'étudier, par principe. Donc, ces études sont aujourd'hui en cours et nous pourrons vous en présenter les résultats prochainement.
Le président. La parole n'étant plus demandée, nous allons nous prononcer d'abord sur le renvoi de cette proposition de motion à la commission d'aménagement. Si ce dernier est refusé, nous voterons sur le renvoi au Conseil d'Etat.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1863 à la commission d'aménagement du canton est adopté par 67 oui et 16 abstentions.
Le président. Je vois, Mesdames et Messieurs les députés, que vous vous sentez d'attaque pour passer à la prochaine motion.
Des voix. Oui !
Le président. Très bien ! Dans ce cas, je vais passer la parole à mon vice-président. (Rires. Brouhaha.)
Présidence de M. Renaud Gautier, premier vice-président
Débat
Le président. Nous avons donc à traiter la motion pour la compensation des surfaces déclassées dans la zone villas.
Des voix. Ah !
Le président. Je dois encore vous signifier ici que Mme Emery-Torracinta comme M. Chevrolet ne sont pas signataires de cette motion. La parole est donnée à M. Mettan.
M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. La motion qui nous est proposée ici demande effectivement la compensation des surfaces déclassées dans la zone villas. Pourquoi ? Parce qu'on a beaucoup discuté, et à juste titre, de la nécessité de densifier les zones, de construire des immeubles, notamment près des villes. Toute la discussion qu'on a eue aujourd'hui consistait justement à essayer de créer des logements, à créer de des places de travail... (Brouhaha.) ...particulièrement dans les zones industrielles pour, par exemple, aménager la zone la Praille-Acacias-Vernets. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il faut toutefois pour cela préserver un habitat mixte. (Brouhaha. Commentaires.) Vous avez voulu traiter cette motion ! (Exclamations.) On vous l'a demandé !
Des voix. C'est le président qui a voulu, ce n'est pas nous ! (Brouhaha.)
M. Guy Mettan. Je vous ai demandé si vous vouliez la traiter ! (Commentaires.) Pour moi, il n'y a pas de problème... (Brouhaha.)
Le président. Veuillez, je vous prie, laisser M. Mettan terminer son intervention !
M. Guy Mettan. Cela peut être traité très rapidement ! (Protestations.) Bon, c'est vrai... Il n'y a pas de problème. De toute façon, il faut qu'on puisse examiner cela tranquillement. Je vous propose donc d'arrêter ici, on reprendra la prochaine fois. Monsieur le président, il n'y a pas de souci. (Exclamations. Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Je crois comprendre que M. Mettan a levé la séance ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Dans ces conditions, la séance est close. Je vous souhaite une agréable et paisible fin de soirée. (Commentaires. Brouhaha.)
Fin du débat: Session 11 (septembre 2011) - Séance 67 du 22.09.2011
La séance est levée à 22h55.