République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1788-B
Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. François Thion, Antonio Hodgers, Anne Emery-Torracinta, Mariane Grobet-Wellner, Françoise Schenk-Gottret, Roger Deneys, Laurence Fehlmann Rielle, Virginie Keller, Alain Etienne, Catherine Baud, Christian Brunier, Mathilde Captyn, Alain Charbonnier, Beatriz de Candolle, Emilie Flamand, Hugues Hiltpold, Michèle Künzler, Jean Rossiaud, Lydia Schneider Hausser, Ariane Blum Brunier, Pierre Losio, François Gillet : Solidarité internationale : 7 bonnes raisons d'atteindre le 0,7 à Genève en 7 ans

Débat

M. Antoine Droin (S). Sur la solidarité internationale, Mesdames et Messieurs les députés, il y a forcément un petit mot à dire. Cette motion, déposée par notre groupe et notamment les Verts, faisait état dans une invite d'une progression de l'aide à la coopération. J'aimerais relever ici que si l'on reprend les débats du vote de la loi en octobre 2001, on constate qu'un amendement déposé par le député radical John Dupraz et sollicitant justement un échelonnement du 0,7% dans le temps avait été refusé. En réalité, on a donc été mis devant un fait accompli tout au long de ces années, pour considérer que l'on a une augmentation entre 2003 et 2010 de 5 millions seulement, ce qui nous amène à une participation de l'Etat non pas de 0,7%, mais de 0,2%. Alors on ne peut pas dire que la progression a été fulgurante tout au long de ces années, surtout face à la décision du parlement de ne justement pas faire cette progression. Par conséquent, non seulement on ne fait pas comme le parlement en avait décidé à l'époque, mais en plus on agit d'une manière très frileuse, ce qui à mon avis n'est pas la meilleure des choses, et l'on s'est déjà prononcé à de multiples reprises sur le sujet.

Deux ou trois mots sur le fond: il est clair qu'un certain nombre d'habitants de cette planète vivent avec très peu d'argent - un dollar par jour - c'est un tiers de l'humanité; donc, lui consacrer quelques millions dans un pays aussi riche que le nôtre, c'est la moindre des choses. Il convient aussi de rappeler que la valeur de ce 0,7% représente à l'heure actuelle, en fonction de notre budget, environ 45 à 50 millions. Nous en sommes encore loin avec les 15 millions que l'on accorde, d'autant plus que dans ces 15 millions il n'y a pas que la collaboration avec les pays du Sud: il y a aussi des actions financées ici dans notre canton, qui vont certes dans la direction du développement et de la coopération, mais ce n'est pas de l'argent qui va directement auprès des personnes qui en ont le plus besoin.

Puisque nous en avons l'occasion au travers de cette motion et de la réponse du Conseil d'Etat, je dirai ici que notre voeu est de renouveler notre demande une fois de plus, qu'il y ait un effort concret et considérable supplémentaire, fût-il un peu échelonné, mais il faut que cet échelonnement soit restreint dans le temps et que l'on puisse vraiment parvenir au 0,7% tel que l'a voulu notre parlement.

M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai que nous devons aider les pays les plus pauvres de la planète. Là-dessus, il n'y a pas à discuter. En effet, nous sommes un pays riche et nous devons venir en aide aux pays les plus faibles ou les plus pauvres. En revanche, ce qui nous a toujours posé problème, c'est lorsque l'on finance des pays qui sont riches. Par exemple, parmi les aides internationales que nous octroyons, il en existe en faveur du Venezuela, or celui-ci est le troisième pays producteur de pétrole au monde ! Alors ça me fait toujours un peu sourire quand on finance ce genre de pays. Et j'ai un autre problème que j'aimerais aussi vous soumettre, c'est lorsqu'on finance des pays où le taux de corruption est tel que n'importe quel ministre possède la dernière Mercedes à un demi-million de dollars. Voilà ce qui me pose aussi problème.

Ce n'est en tout cas pas au niveau du parlement cantonal que nous allons pouvoir régler ce genre de problèmes. Nous n'allons pas faire obstruction sur cette motion, parce qu'encore une fois il va falloir que l'on puisse aider les pays qui en ont vraiment besoin, mais cette réflexion mériterait à tout le moins de percuter le Conseil d'Etat pour qu'elle soit relayée aux instances fédérales. On parle bien là d'une politique extérieure à la Suisse, qui est évidemment du ressort du Conseil fédéral.

Voilà les points sur lesquels je voulais attirer votre attention. Alors oui, il faut aider, mais pas n'importe comment, pas n'importe qui. Et, surtout, il faudrait contraindre les pays où la corruption est devenue légion à aider leur peuple et à ne pas attendre la solidarité internationale alors qu'ils ont des comptes en millions, qui parfois sont aussi déposés en Suisse, ce qui n'est pas normal.

M. Christian Bavarel (Ve). Je ne vais pas répéter ce qu'a dit M. le député Droin: je suis d'accord avec lui, et mon groupe aussi. Par ailleurs, j'aimerais indiquer très clairement à M. Stauffer que l'on ne soutient pas des pays ou des Etats, mais des populations, des gens. Il ne s'agit pas du soutien d'un Etat à un autre, ce n'est pas ce que nous faisons ici. Je lui rappelle en outre - mais il siège à la commission des finances, il a donc une part de responsabilité avec nous au sein de cette commission - qu'il y a aujourd'hui des contrats de prestations qui vont être demandés; on va suivre et l'on suit de plus en plus strictement toute cette partie-là de l'aide qui est donnée. Je pense donc que le trend général est bon; ce que nous, nous souhaiterions en tant que Verts, c'est qu'on respecte la loi et qu'on soit au moins à 0,7.

Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Le parti démocrate-chrétien remercie le Conseil d'Etat de prendre en considération cette demande. Nous étions cosignataires de la première loi avec les Verts, les socialistes, les radicaux et les libéraux, et nous tenons beaucoup à ce que le processus enclenché continue, d'autant plus que l'argent est donné aux ONG, qui sont contrôlées et supervisées avec la plus grande rigueur de la part de l'Etat de Genève et de son département de la solidarité internationale qui est dans l'excellent service des droits humains. Nous tenons beaucoup à soutenir le Conseil d'Etat dans tout ce qui pourra être mis en oeuvre pour développer l'aide et la solidarité internationale, parce que tout ce qui peut donner la possibilité aux gens de se sentir bien chez eux leur permet d'y rester, et de ce fait on peut éviter les dérapages xénophobes auxquels nous sommes parfois confrontés. Par conséquent, faisons tout pour que les gens puissent rester dans les meilleures conditions dans leur pays d'origine.

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Effectivement, le Conseil d'Etat s'engage à augmenter ce taux. C'est vrai que cela a été très très progressif; on peut regretter que ce soit vraiment si faiblement progressif, et je le déplore aussi. Malheureusement, voilà, ce sont nos comptes qui, bon an mal an, augmentent, mais le trend est là. Il faut vraiment continuer et aller vers ce 0,7. Je rappelle aussi que les actions sont contrôlées: on travaille avec des associations locales, que ce soit ici ou là-bas, et ce sont ces personnes-là qui agissent; on n'aide donc pas directement des Etats, mais des associations et des groupes qui ont des programmes précis et qui sont contrôlés. Du reste, vous aurez tout loisir d'appuyer cette demande au moment du vote du budget, parce que c'est là que cela va véritablement se jouer.

Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1788.