République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 10248-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat approuvant le compte administratif de l'Etat de Genève et de la gestion du Conseil d'Etat pour l'année 2007
PL 10235-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat présentant le bouclement de diverses lois d'investissements
PL 10251-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant au Conseil d'Etat divers crédits supplémentaires, complémentaires et extraordinaire pour l'exercice 2007

Premier débat

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, c'est un moment important et il y a toujours une tentation dans un tel moment: la tentation de la vanité ! Oui, les comptes sont bons. Oui, le Conseil d'Etat a bien travaillé ! Toutefois, avant d'entrer dans le vif du sujet, permettez-moi d'adresser mes remerciements aux membres de la commission des finances, aux collaboratrices et collaborateurs des départements auditionnés, aux collaboratrices et collaborateurs du secrétariat général du Grand Conseil et, bien évidemment, aux conseillers d'Etat qui se sont toujours rendus disponibles. Ils ont travaillé avec la commission des finances en toute transparence, dans un nouveau climat et avec un état d'esprit positif: on dit ce que l'on fait et l'on fait ce que l'on dit !

Bien sûr, il y a un boni. Bien sûr, le projet de loi 10248 a été accepté à une très large majorité, sans opposition et avec seulement deux abstentions. Au moment du vote final, la commission a certes aussi réfléchi à la question de la séparation de la gestion et des comptes.

Ce projet de loi approuvant le compte administratif de l'Etat de Genève s'inscrit dans un processus et ponctue une des étapes du marathon quadriennal des finances de l'Etat de Genève.

Lors de l'examen des comptes, la commission des finances, dans sa grande sagesse, s'est posé la question du sens d'un examen détaillé de toutes les rubriques, dans la mesure où les experts de l'Inspection cantonale des finances, l'ICF, en proposaient l'acceptation. C'est pour cela que je parlais de vanité tout à l'heure, Madame la présidente. Le rituel veut que les commissaires aux finances travaillent en plénière puis se mobilisent en duo pour explorer les points stratégiques de chaque département; ils font ensuite leur rapport en plénière pour arriver à peu près aux mêmes conclusions que l'ICF. Clairement, tout ce processus multiplie les procédures, alors que, si l'examen des comptes pouvait s'effectuer après la reddition du rapport de l'ICF, on pourrait certainement gagner en temps et en efficience.

En parlant des recommandations de l'ICF, les points importants relevés par la commission sont les suivants: il n'y a pas de grandes irrégularités dans les départements, mais des améliorations notoires sont demandées à trois d'entre eux et le contrôle interne reste impérativement à améliorer; des recommandations spécifiques ont été émises, notamment dans le domaine des amortissements et des transferts d'actifs et par rapport à l'absence de comptes consolidés; le problème de la thésaurisation des subventions subsiste et des améliorations sont également demandées au niveau des imputations internes.

Madame la présidente, l'analyse du résultat des comptes met en exergue un bon résultat global, grâce aux recettes fiscales exceptionnelles et grâce, notamment, à l'excellente santé de l'économie genevoise. L'analyse de ce résultat permet de constater le respect de la cible, avec des nuances autour de la maîtrise des charges, bien évidemment. La gestion des risques est meilleure, mais il reste à développer une politique des investissements.

La dette, qui est toujours de plus de 12 milliards de francs, est en nette diminution, mais il est quand même important de relever que des intérêts à payer de 355 millions de francs par an, c'est-à-dire 974 246 F par jour, restent un poids insupportable pour Genève !

Au cours de l'étude de ces comptes, je reviendrai avec des commentaires sur certains départements, mais permettez-moi d'insister sur des points qui ont émergé des questions transversales.

Dans le domaine de l'informatique, un supplément de rigueur est demandé dans le cadre du retour sur investissement; la commission est particulièrement exigeante sur ce point.

Dans le domaine de la gestion du personnel et de la paix du travail - je crois qu'il est important de lier les deux aspects - on a relevé les point importants que sont la formation, la valorisation professionnelle et la part des femmes à des postes de cadres dans l'administration.

Une autre question transversale très importante concerne le «bilan carbone» et l'étude des plans de mesures du Conseil d'Etat sur l'année 2007.

Evidemment, au moment du vote final, certains groupes politiques sont toujours tentés de se demander si accepter les comptes revient à donner un chèque en blanc au Conseil d'Etat. Pour d'autres sensibilités politiques, il est important de relever le travail qui a été accompli. Comme je le disais, c'est un processus, une étape dans un marathon, qui pourra être encore plus précis l'année prochaine.

Je disais que la commission a évoqué la possibilité d'un vote séparé sur les comptes et sur la gestion du Conseil d'Etat, mais une majorité d'abstentions en deuxième débat sur l'article 5 relatif à l'approbation de la gestion a permis de faire voter en troisième débat et les comptes 2007 et la gestion du Conseil d'Etat. (Brouhaha.)

Il est important de relever que la majorité des départements n'a donc pas fait l'objet de discussions particulières. Nous avons insisté sur le travail de qualité fourni par le Conseil d'Etat et par certains départements qui ont été tout à fait exemplaires; d'autres départements ont encore besoin de développer cette exemplarité.

En conclusion, la commission a approuvé le projet de loi 10248 sans opposition et avec deux abstentions seulement. Je reprendrai la parole régulièrement, au fur et à mesure de l'avancement des débats.

M. Edouard Cuendet (L). Avant de me lancer dans une longue diatribe, je voulais savoir combien de temps nous avons à disposition ? (Remarque.)

La présidente. Il s'agit d'un débat libre. Le temps de parole est donc de trois fois sept minutes par député. (Commentaires. Rires.)

M. Edouard Cuendet. Tout comme la rapporteure de l'excellent rapport de la commission, je me réjouis évidemment de l'excédent de revenu de 786 millions de francs pour 2007. Etant précisé que le budget prévoyait un déficit de 191 millions de francs, l'écart est donc proche du milliard. Plus exactement, il est de 977 millions de francs.

Cela m'amène à ouvrir une première parenthèse sur les méthodes d'évaluation du département des finances. L'évaluation est évidemment un art difficile, mais une erreur à cette échelle devrait pousser à une réforme des méthodes d'évaluation.

Ce résultat exceptionnel est évidemment dû à une conjoncture qui est tout aussi exceptionnelle. Il faut ici remercier vivement l'économie genevoise et les contribuables qui ont assuré à eux seuls l'immense majorité de cet excédent de revenu. En effet, face à ce boom de l'économie et des recettes fiscales, les efforts concédés par le gouvernement et l'administration pour endiguer les dépenses paraissent bien modestes. Les charges de personnel sont en effet plus ou moins maîtrisées, mais à un niveau extrêmement élevé, ce qu'il ne faut pas manquer de rappeler. Cela s'explique notamment par le fait que le Conseil d'Etat n'a pas respecté ses engagements concernant la réduction de 5% des effectifs dans l'administration ! Il me faut là être plus précis: les départements des institutions et de l'instruction publique sont restés largement en dehors de la cible, portant ainsi ombrage à l'ensemble du Conseil d'Etat, alors même que le département de l'économie et de la santé, le département des constructions et des technologies de l'information et le département des finances ont atteint les objectifs d'économies. Ils les ont même largement dépassés pour certains.

C'est tout à l'honneur du Conseil d'Etat, dans un esprit de collégialité, de ne pas montrer du doigt certains des collègues du gouvernement. En revanche, il appartient clairement à notre Grand Conseil de faire la différence entre les départements qui respectent la cible et ceux qui ont pris leurs distances par rapport aux objectifs fixés.

Cette deuxième petite parenthèse étant fermée, je reviendrai aux données chiffrées, et plus précisément aux plans de mesures d'économies P1 et P2. Il ressort de l'excellent rapport de Mme Von Arx-Vernon - que je n'aurai de cesse de complimenter tout au long de mon exposé - que le non-dépensé pour les mesures P1 et P2 atteint péniblement 80 millions de francs et que les objectifs du plan P2 ne sont atteints pour l'année 2007 qu'à 57%, ce qui est évidemment très modeste. (Brouhaha.)

Il existe quand même un véritable sujet de satisfaction, et là le Conseil d'Etat doit être vivement félicité pour avoir obtenu une réduction spectaculaire des dépenses générales, en baisse de 8,84% par rapport au budget 2007 et de 0,1% par rapport aux comptes 2006. Donc, si l'on cherche des mesures à prendre, on en trouve ! Il faut en féliciter les départements.

Quant aux subventions, elles dépassent pour la première fois la barre des 3 milliards de francs, progressant de 2% par rapport à 2006. Cela constitue un réel motif d'inquiétude, au moment où le Grand Conseil s'apprête à se prononcer sur les renouvellements des contrats de prestations.

Pour l'heure, on n'entrevoit aucune volonté de remettre en cause les montants versés ou de restructurer la myriade des entités qui reçoivent des subventions. On constate surtout, contrairement à ce qui se passe dans certains départements exemplaires, que ces innombrables organismes ne sont pas prêts à rationaliser leurs dépenses administratives, au nom de leur sacro-sainte indépendance. Pourtant, ce principe d'indépendance peut quand même être quelque peu mis entre parenthèses lorsque l'on parle d'entités qui sont subventionnées à 100% par l'Etat !

Le bilan qui précède démontre que, face à une économie genevoise encore florissante - je dis bien «encore» parce que certains signes inquiétants pourraient bien indiquer l'arrivée de nuages sur les rentrées fiscales de l'avenir - et grande pourvoyeuse de recettes par le biais des impôts, le petit Etat et le grand Etat peinent encore à se réformer. Ce phénomène explique pourquoi la différence est si grande entre les causes conjoncturelles et les causes structurelles du gigantesque excédent 2007. (Brouhaha.)

La leçon d'histoire est donc la suivante. Face à des recettes conjoncturelles extraordinaires, l'Etat s'apprête plutôt à augmenter les dépenses structurelles, notamment par le biais de l'accord avec la fonction publique pour l'introduction du treizième salaire qui coûtera la bagatelle de 87 millions de francs par an, soit autant voire plus que les plans P1 et P2 pour l'année 2006 !

Mais revenons à nos moutons, ou plutôt au troupeau des créanciers du canton. Fin 2007, la dette atteignait encore le montant stratosphérique de 12,2 milliards de francs. On saluera tout de même une diminution de près d'un milliard de francs par rapport à la fin 2006. On ne répétera jamais assez combien les collaborateurs du département des finances ont su gérer cet endettement colossal avec compétence, prudence et discernement. Ils ont déjà été remerciés en commission des finances, mais je réitère ici ces remerciements.

On rappellera au passage qu'une partie de cette diminution est imputable aux transferts d'actifs de l'Etat aux SIG et aux TPG, transferts qui se sont élevés à près de 200 millions. On relèvera aussi que le service de la dette augmente de 4,6% par rapport au budget 2007 et ne diminue que de 0,89% par rapport aux comptes 2006. Ainsi, alors que le montant de la dette a diminué d'un milliard de francs, soit 6,9%, la charge d'intérêts n'a diminué que de 0,89% entre les exercices 2006 et 2007. Ce constat inquiétant - très inquiétant même ! - démontre que la hausse inéluctable des taux d'intérêts obligera le canton à accélérer le rythme du remboursement de sa dette, faute de quoi la charge des intérêts deviendra absolument insupportable avec le temps ! Pourtant, à l'heure actuelle, l'objectif de l'exécutif ne porte que sur le long terme. Sa volonté est de réduire cette dette d'un milliard par législature, pour parvenir à la ramener à un montant acceptable d'environ 6 milliards de francs. Vous faites vite le calcul, cela prendra la bagatelle de vingt-quatre années, puisque il faudra six législatures pour en arriver là. (Remarque.) Oui, on y sera encore...

La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député. Vous pourrez reprendre la parole tout à l'heure. Je vous l'ai dit: vous disposez de trois fois sept minutes.

M. Edouard Cuendet. Je vais vite finir sur ce point. Je ne suis pas certain que les agences de notation et les créanciers du canton soient aussi patients et qu'ils attendront vingt-quatre ans ! Et ils risquent de marquer leur impatience par une hausse des taux d'intérêts !

Tout ça pour dire que le groupe libéral acceptera les comptes, évidemment, parce que le rapport de l'ICF n'a pas relevé de lacunes majeures dans la menée de ces derniers. En revanche, le groupe libéral est très réservé sur le rapport de gestion, compte tenu de la non-atteinte des cibles. Nous reviendrons sur ce sujet au cours des débats.

M. Gabriel Barrillier (R). Je serai plus bref que mon préopinant. Notre groupe se réjouit évidemment du bon résultat des comptes 2007 qui se traduit, comme cela a été rappelé, par une réduction de la dette d'un milliard de francs. Toutefois, à 12 milliards de francs, cette dette demeure la dette la plus élevée de Suisse ! Tout le monde est conscient qu'on ne peut pas transmettre aux générations futures un fardeau aussi monstrueux. La hausse des taux d'intérêts qui se profile est d'ailleurs là pour nous rappeler que la charge de cette dette deviendra rapidement insupportable.

Au début de la législature, le groupe radical avait accueilli favorablement les objectifs que s'était fixés le Conseil d'Etat pour maîtriser les dépenses, notamment par la réorganisation en profondeur de l'Etat. Aux trois quarts de la législature, ces objectifs sont partiellement atteints, certains mieux que d'autres. La commission des finances a regretté que les charges de l'Etat augmentent encore «malgré le signal donné par les députés», je cite Mme la rapporteure. Pour les charges de personnel, les objectifs - réduction de 5% des postes - n'étaient pas encore atteints, certains départements ayant pris quelque retard.

La modernisation de l'appareil de l'Etat n'est - de loin - pas finie, même si l'on peut souligner la volonté collégiale d'aller de l'avant, en obtenant une amélioration notable des performances de l'administration. La lecture des rapports sectoriels - ça, c'est important - montre que l'absentéisme à l'Etat est toutefois encore beaucoup trop élevé. Et cela m'a frappé, à la lecture des rapports sectoriels. Des mesures n'ont pas encore été vraiment prises pour corriger un dysfonctionnement qui coûte très cher, en comparaison avec ce qui se passe dans l'économie privée. (Brouhaha. La présidente agite sa cloche.)

Dès lors, c'est bien grâce à la croissance de l'économie et des recettes fiscales que l'année 2007 s'est soldée par un si bon résultat. Car, Mesdames et Messieurs les députés, il en va des gouvernements comme des équipes de football: il ne suffit pas qu'elles soient offensives pour gagner, encore faut-il qu'elles aient de la chance ! Et cette chance, notre équipe gouvernementale l'a eue grâce à trois années successives d'une croissance que la Suisse et Genève n'avaient plus connue depuis très longtemps, avec des taux de croissance à la japonaise - des années 60, pour ceux qui étaient déjà nés à cette époque ! (Rires.) Genève attire, Genève crée de l'emploi, Genève a bénéficié des accords bilatéraux et du régime de la libre circulation des personnes.

Toutefois, Genève reste très sensible à la conjoncture européenne et mondiale. Et 2008 et 2009 seront marquées par une décrue des recettes fiscales, chers collègues ! Ne jouons pas les oiseaux de mauvais augure, mais des nuages assez menaçants se profilent derrière le Salève et le Jura ! J'en ai dénombré cinq. Premièrement, les conséquences de la crise financière mondiale: quelles seront-elles sur la place financière genevoise, qui occupe une place très - trop ? - importante dans le revenu cantonal, et, en particulier, quels seront les dommages collatéraux provenant des difficultés actuelles de l'UBS ? Deuxièmement, le reflux de la croissance économique: la BNS vient de publier une prévision de croissance de l'ordre de 1,5 à 2% pour 2008. Troisièmement, il y a le danger de l'inflation, estimée à 2,7% pour 2008. Quatrièmement, une hausse du prix de l'argent alourdira, on l'a vu, la charge de la dette. Et, enfin, il y a la hausse du prix du pétrole et des matières premières. Ce sont cinq éléments importants !

Face à ces menaces et incertitudes, le groupe radical ne peut qu'encourager le Conseil d'Etat à poursuivre avec détermination la modernisation de l'administration, à passer au crible les subventions et à rationaliser partout où cela est possible, de façon à dégager, c'est là son plan, les moyens nécessaires au financement des infrastructures qui détermineront le degré d'attractivité de Genève et de sa région. Car notre canton a pris du retard en matière d'investissements, il ne maîtrise pas de façon satisfaisante son développement et sa croissance ! Nous songeons en particulier à la mobilité, à l'entretien et au renouvellement d'équipements indispensables à notre population; les commissaires aux travaux constatent mardi après mardi ces retards et la vétusté de certains de nos équipements. Dès lors, il faut absolument passer à la vitesse supérieure.

Les radicaux, je le rappelle, sont partisans d'un Etat solide: rien de plus, rien de moins ! Pour assurer les fondements de cette solidité, il serait suicidaire de n'attendre le salut que d'une hausse aléatoire des recettes fiscales. Le fonctionnement de l'Etat doit être revu de fond en comble !

Enfin, Mesdames et Messieurs les députés, le moment est aussi venu d'alléger la charge fiscale, singulièrement pour la classe moyenne, les familles et les petites et moyennes entreprises, formatrices et créatrices d'emplois. En effet, le pouvoir d'achat d'une large frange de la population est déjà touché par les hausses du coût des matières premières. Nous sommes bien conscients que la marge de manoeuvre est extrêmement étroite, mais la partie est jouable, si l'on se montre raisonnable ! C'est donc avec ces injonctions que le groupe radical votera les comptes 2007. (Applaudissements.)

M. Guy Mettan (PDC). Tout d'abord, permettez-moi de vous souhaiter une belle journée, Madame la présidente, car elle promet d'être longue et chaude, surtout après la victoire de l'Espagne hier soir - malheureusement contre la Russie ! Je reconnais toutefois que l'équipe espagnole était excellente !

Chers collègues, permettez-moi de faire la déclaration probablement la plus laconique de cette journée: le compte 2007 de l'Etat de Genève est bon, je dirai même qu'il est excellent ! Dans ces conditions, le parti démocrate-chrétien vous recommande de l'accepter et vous en remercie. (Exclamations. Applaudissements.)

Mme Anne Emery-Torracinta (S). M. Mettan a été très bref et très synthétique. Je crois qu'il a raison, mais il y a quand même quelques points à relever.

Certes, les comptes de l'Etat sont très bons. Certes, l'excédent est de plus de 700 millions de francs, avec des correctifs de l'ordre de 400 millions de francs. Certes aussi, nous avons bénéficié d'une conjoncture exceptionnelle, avec des recettes fiscales en hausse. Toutefois, je crois que la haute conjoncture ne fait pas tout, et le Conseil d'Etat fait bien de le dire dans le livre jaune qui nous a été remis.

Comme le fera le groupe socialiste, je crois qu'on peut se féliciter de la gestion du Conseil d'Etat lors de cette législature et de ce que, également, nous sommes en train d'arriver à un retour à l'équilibre, et - comme le dit le Conseil d'Etat - un retour à l'équilibre qui reprend un tour structurel.

M. Cuendet nous a dit tout à l'heure que l'évaluation est un art difficile... Effectivement. Je me suis amusée à retrouver un éditorial de Pierre Weiss d'il y a tout juste une année dans l'hebdomadaire «Entreprise romande» où il nous disait ceci: «Des données sur l'évolution de la dette manquent, même si l'on sait désormais qu'elle va continuer d'augmenter au moins jusqu'en 2011.» Eh bien non ! Mesdames et Messieurs les députés, ce que je sais et ce que constate le groupe socialiste, c'est que, pour la première fois depuis le début de ce millénaire, la dette est en diminution.

Et ce que nous, groupe socialiste, constatons aussi, c'est que ce que le précédent gouvernement, pourtant à majorité de droite, n'a pas su réaliser, eh bien, c'est un gouvernement à majorité de l'Alternative qui le réussit ! Ne vous en déplaise, Mesdames et Messieurs... (Brouhaha.) ... des bancs d'en face: la gauche sait gérer un Etat ! (Commentaires.)

Il y a quelques bémols toutefois, quand on examine de plus près les comptes. On constate que, malgré les promesses du gouvernement, faites lors du discours de Saint-Pierre notamment, il y a parfois eu des baisses de prestations et des baisses de subventions, notamment dans le domaine social. Je ne prendrai que deux exemples, que nous aurons l'occasion de développer tout à l'heure.

Si vous examinez le livre jaune des comptes, vous constatez par exemple qu'il y a un non-dépensé de 1,3 million de francs dans les subventions versées aux institutions privées, notamment en raison de l'application de la LIAF et du blocage des subventions au motif de la thésaurisation. Puis, quand on regarde ces chiffres de plus près, on s'aperçoit que ce sont souvent des toutes petites sommes, de quelques dizaines de milliers de francs, qui, additionnées, donnent ce montant de 1,3 million de francs. Il s'agit toutefois de sommes qui n'ont pas été versées à des associations qui oeuvrent souvent en faveur des plus démunis ou des personnes handicapées.

On constate aussi, un peu plus loin dans ce livre jaune, un non-dépensé de 4,7 millions en ce qui concerne le SCARPA pour l'avance des pensions alimentaires. Rappelez-vous, depuis une année, les avances sur les pensions alimentaires sont limitées à une durée de trois ans.

Le groupe socialiste reviendra sur ces exemples tout à l'heure, car il est extrêmement soucieux de voir que, malgré les promesses du début de la législature, il y a vraiment des baisses de subventions dans le domaine social !

En conclusion, si les socialistes se réjouissent du bilan global et des comptes qui sont positifs, ils pensent quand même qu'il faut être extrêmement attentif et ne pas vouloir profiter d'une haute conjoncture qui pourrait bien - M. Barrillier l'a rappelé - ne pas durer très longtemps. Il ne faudrait donc pas profiter de la haute conjoncture pour baisser volontairement les recettes fiscales de l'Etat. A ce propos, je vous rappelle qu'un projet de loi de l'Entente est pendant à la commission fiscale: s'il était accepté, il en résulterait pour l'Etat un manque à gagner d'un milliard de francs par année. Ce projet de loi nous montre donc qui sont dans cette république les apprentis sorciers et les bons gestionnaires ! (Applaudissements.)

M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous vous en doutez, les Verts sont satisfaits des comptes de l'Etat de cette année. Nous remarquons un retour à l'équilibre, comme annoncé dans le discours de Saint-Pierre, mais cela avec une année d'avance.

Effectivement, la conjoncture a été favorable. Cela fait plusieurs fois dans l'histoire de cette république que nous vivons une conjoncture favorable et, généralement, on ne garde pas la tête froide: soit on baisse les impôts, soit on augmente les dépenses. Cela a pu être évité. Ce qui nous réjouit particulièrement, c'est de voir le maintien de la maîtrise des charges et que nous avons une discipline budgétaire qui fonctionne. C'est surtout une méthode de travail qui a été appliquée et nous a permis d'obtenir ce résultat très intéressant au niveau des charges. Des négociations avec la fonction publique ont été menées à bien - ce que tout le monde considérait comme impossible - sans que cela ne fasse plus de vagues que ça, au niveau des rapports avec la fonction publique.

Je tiens aussi à remercier très vivement les fonctionnaires dans tous les services: ils ont fait des efforts considérables et ne sont pas arrivés avec en tête la volonté de garder un maximum d'argent pour eux, ils sont vraiment entrés dans une logique d'économie.

Le secteur subventionné enregistre certes une légère hausse des subventions, mais je vous rappelle néanmoins que le blocage des subventions sur quatre ans aboutit, en francs constants, à une baisse des subventions parce que l'inflation n'est plus absorbée.

Les subventions aux personnes physiques posent toujours quelques difficultés, mais nous voyons que des gros efforts ont été faits par le Conseil d'Etat sur le plan du chômage. Espérons que la situation va s'améliorer car, en ce qui concerne les subventions aux personnes physiques, il faut aussi se rappeler qu'il s'agit de gens dans des situations difficiles, de souffrance. Et il vaut mieux voir cet indicateur baisser, cela signifie aussi que ces personnes sont dans des situations plus confortables !

Au moment des questions transversales, les Verts avaient posé des questions autour du «bilan carbone», l'évaluation des émissions de carbone. Aujourd'hui, cela nous fait penser au déficit énergétique de notre canton. En réalité, nous sommes en train de constituer une dette énergétique et il faut que nous prenions dès aujourd'hui les mesures qui s'imposent vis-à-vis des générations futures. Il va falloir que nous isolions les bâtiments; il va falloir que nous trouvions différentes solutions qui vont donner du travail à l'économie locale, très clairement. C'est une démarche positive, qui est enthousiasmante, mais nous pensons que la méthode appliquée dans ce canton en matière financière doit l'être de toute urgence en matière énergétique: il va falloir renoncer pour innover ! Au niveau énergétique, il va falloir reprendre des méthodes que nous avions pu voir appliquées de manière consensuelle au niveau financier. Ce sont, je pense, les prochains défis qui nous attendent dans ce canton.

Il va falloir que nous soyons capables de faire des «bilans carbone». Il va falloir que nous soyons capables de faire des bilans énergétiques, que nous soyons capables de faire une comptabilité et de mesurer nos dépendances énergétiques pour revenir à une société à 2000 watts, ce que les Verts appellent de leurs voeux ! (Applaudissements.)

M. Claude Jeanneret (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, évidemment, il est agréable de parler de comptes lorsque le résultat est positif, c'est quand même plus facile d'envisager de les accepter. Je ne vais pas faire un discours sur la politique générale du canton. On va se limiter aux comptes. Aujourd'hui, ils sont bons, oui, mais il y a quand même une chose qu'il faut réaliser: l'excellent résultat qu'on a connu peut être conjoncturel, il résulte néanmoins des mesures de contraction de l'évolution des frais de l'Etat, ce qui fait que nous avons maintenant, par les mesures prises, une certaine confiance en l'avenir. Pour autant que certains objectifs soient maintenus !

Or, comme l'a rappelé un de mes collègues, il est clair que la seule chose que l'on puisse véritablement vérifier, c'est la diminution réelle du personnel de l'Etat de 5%. Cette diminution, à terme, définit une économie de budget certaine, mais pas en reportant à plus tard les réajustements de salaire, les indexations de salaire. Cela nous a permis de conforter notre résultat, ce qui est bien, mais c'est par des mesures stables et pérennes que l'équilibre financier de l'Etat pourra être assuré.

Il y a autre chose qui m'ennuie un tout petit peu aujourd'hui, quand on annonce des bons résultats... Je ne sais pas si l'on peut parler d'un chant des sirènes pour certains mais pas pour d'autres. On a la droite qui parle déjà de réductions d'impôts; on a la gauche qui demande des augmentations de prestations; et avant qu'on ait remboursé la dette, on pense déjà à dilapider l'éventuel gain de ces prochaines années ! Ça, je dois dire que c'est assez surprenant et même un peu décourageant. J'aimerais rappeler qu'un résultat comme celui d'aujourd'hui provient d'une collaboration de tout l'Etat, des fonctionnaires et du gouvernement. Ce résultat a été rendu possible parce que tout le monde a tiré à la même corde. Et si, au moment où l'on obtient un résultat, on décourage les gens d'emblée en prenant des dispositions contraires ou qui rendent les efforts fournis totalement inutiles, la bonne volonté des gens n'ira pas au-delà d'une certaine crédibilité. Je pense qu'il ne faut pas en demander trop aux gens !

Dès lors, je souhaite dire qu'au MCG nous n'avons pas changé de ligne: notre souhait est que cette dette importante diminue. Il ne sert à rien aujourd'hui de parler d'éventuelles variations des taux d'intérêts, on sait qu'ils sont à la hausse aujourd'hui mais on ne sait pas ce qu'il en sera demain. Le coût de la dette est une inconnue, mais elle est extrêmement bien gérée: il y a des engagements à long terme et des engagements à moyen terme. Je crois que la gestion de la dette par le département des finances est remarquable, on peut le dire. Cette gestion permet de ne pas subir de plein fouet une éventuelle variation des taux d'intérêts sur la dette. Toutefois, ce n'est pas pour ça qu'il faut attendre et encore attendre pour la rembourser ! Il faut que cette dette revienne à un niveau acceptable et, à ce moment-là, son coût ne sera plus un souci fondamental.

Donc, aujourd'hui, je demande une chose. Les comptes sont bons, même si certaines choses dans ceux-ci ne sont peut-être pas exactement ce qu'elles devraient être, nous en parlerons département par département, mais une chose est certaine: nous sommes, il me semble, dans la bonne direction, avec une stabilisation de l'évolution des frais de fonctionnement. J'aimerais simplement rappeler que, malgré ce frein, nous avons quand même octroyé des possibilités d'investissements importants, en informatique particulièrement, où des dizaines de millions de francs d'investissements en projets ont été votés. Hier soir, nous avons déjà voté l'administration en ligne, mais il y a d'autres possibilités.

Nous voyons, par exemple au niveau de la récupération des dettes fiscales, qu'il y a un travail remarquable fait par le département des finances. On peut dire que le recouvrement, cette année, des anciennes dettes est aussi à l'origine de l'amélioration de la dette de l'Etat. Ces liquidités qui rentrent maintenant, il faut y penser, c'est grâce à un bon travail ! Si ma mémoire est bonne, nous avons à peu près 20 000 ou 25 000 poursuites par année pour les cas courants. Mais grâce à l'informatisation actuelle du département, on arrive à en produire 45 0000 ! Cela veut dire qu'on a un rattrapage de 20 000 cas par années sur les anciennes dettes, comme l'expliquait très bien hier le conseiller d'Etat.

Donc, on peut quand même voir d'un bon oeil l'avenir de l'administration de notre canton. Les investissements nécessaires à son bon fonctionnement ont été votés, il s'agit maintenant de les mettre en place, mais on peut réduire les dépenses tout en maintenant les investissements nécessaires au bon fonctionnement.

M. Eric Bertinat (UDC). Certes, à la lecture des comptes, on peut être satisfait d'une certaine maîtrise dans les dépenses et de la volonté du Conseil d'Etat de parvenir à rester dans la cible qu'il s'est fixée lui-même en début de législature. Toutefois, si nous considérons l'ensemble des comptes, c'est-à-dire non seulement les dépenses, mais aussi tout ce que la fiscalité nous rapporte, il me semble que nous sommes quand même quelque part dans une forme d'équilibrisme comptable. Je veux bien m'expliquer. Si des charges du personnel et des dépenses générales sont dans la cible, les charges avec imputation interne et subventions redistribuées représentent quant à elles un écart de 672 millions de francs par rapport au budget 2007. Ces 672 millions de francs ne nous ont évidemment pas spécialement gênés parce que nous avons reçu pour près de 754 millions de francs d'impôts de plus que prévu ! Cela fait que nous avons aujourd'hui des comptes à peu près équilibré et que sur l'ensemble des dépenses, dans les charges, dans les subventions, on peut constater un effort qui est plus que sensible. L'ensemble fait que ces comptes restent quand même tributaires de la très bonne santé de l'économie, une bonne santé dont on sait qu'elle ne sera peut-être pas aussi florissantes les prochaines années et que les prochaines années, l'Etat va au-devant de nouvelles dépenses qui vont alourdir le bateau.

Autre remarque sur la dette: certes, elle a un tout petit peu diminué, mais elle reste totalement inquiétante ! Elle est tellement inquiétante qu'il est dit dans le rapport de gestion que l'Etat ne peut plus recourir à l'emprunt pour financer des investissements pour les prochaines années ! Là aussi, il y a évidemment des efforts importants à faire.

Encore une remarque, l'UDC insiste pour que des efforts conséquents soient entrepris pour corriger les dysfonctionnements relevés par l'ICF - je ne reviendrai pas sur les deux départements évoqués en début de séance par mon préopinant libéral.

Mesdames et Messieurs les députés, le train que mène l'Etat reste encore trop élevé et l'Etat aurait dû mieux profiter de la bonne santé de l'économie pour diminuer ses engagements. C'est pourquoi l'UDC votera les comptes, mais pas la gestion.

M. Renaud Gautier (L). L'excellent député libéral de la commission des finances surnommé «le taliban du bilan» a dit tout ce qui était sérieux par rapport à ces comptes. On va juste le répéter, ces comptes sont bons, inutile de cacher notre joie ! Si vous le permettez, Je m'en vais passer un instant sur quelques chemins de traverses par rapport à ces comptes.

Je voudrais dire encore une fois que, dans le monde réel, il n'existe pas cette tendance que l'on a ici à vouloir faire adopter tout en même temps les comptes et le rapport de gestion. Généralement, on adopte les comptes puis, séparément, on fait une décharge à l'administrateur.

Puisque l'on parle des «administrateurs», je crois qu'il faut clairement dire - et c'est un «adversaire» qui le dit - que la commission des finances est très privilégiée dans les rapports qu'elle entretient avec ceux-ci. David Hiler - qui a ses idées, nous les nôtres - a au moins cette grande capacité, que je lui reconnais, de savoir écouter et discuter des positions des uns et des autres. Je reste intimement persuadé que cette attitude, qu'on ne peut pas forcément dupliquer sept fois, est l'un des éléments qui permet, je crois, de dire que les travaux de la commission des finances se passent bien, même s'ils ne vont pas toujours très vite.

On doit évidemment associer à ces remerciements les collaborateurs du département des finances. Leurs qualités leur permettent de répondre à toutes les questions les plus sottes des députés avec une promptitude souvent étonnante, ce qui permet de faciliter la formation du jugement de ceux-ci. Dans le cadre de la LIAF, puisqu'on l'a citée tout à l'heure, j'en veux pour preuve qu'il faut tirer un immense coup de chapeau à une ancienne collaboratrice de M. Hiler, qui se trouve maintenant être la nouvelle secrétaire générale du département de l'instruction publique. Dans un bras de fer pas toujours facile qui oppose l'entité de contrôle, le Conseil d'Etat et la commission des finances, cette collaboratrice a réussi à mettre tout le monde d'accord sur un projet, il me semble, tout à fait nécessaire.

Si j'insiste un peu lourdement sur les félicitations qui sont dues à ce département, c'est que je voudrais peut-être actionner une petite sonnette d'alarme pour rendre attentif ce parlement aux différences sensibles qui sont en train d'apparaître dans la manière dont les départements, premièrement, perçoivent, deuxièmement, effectuent le travail nécessaire de la gestion des moyens financiers qui leur sont donnés. J'ai, en ce qui me concerne, de grandes inquiétudes à voir cette disparité s'aggraver. Cela amène dans certains endroits des attitudes qui sont difficilement acceptables, voire des originalités comptables qui, en d'autres lieux, amèneraient leurs auteurs à passer quelque temps dans la campagne genevoise...

On ne peut donc pas, comme le faisait tout à l'heure Mme la candidate socialiste au Conseil d'Etat, dire d'un coup, d'un seul, que c'est parce que la gauche est là que tout va bien. On peut, par contre, dire que, si l'on est attentif à la qualité des fonctionnaires dans les départements, on obtient alors effectivement des résultats intéressants.

Donc, oui, des félicitations pour toutes celles et ceux qui ont fait ces comptes, mais avec une solide note de prudence par rapport aux départements qui ne jouent pas le jeu, que ce soit par rapport au discours de Saint-Pierre ou que ce soit même dans leur approche comptable ou financière des montants qui sont mis à leur disposition. Je le dis d'autant plus volontiers que je trouve qu'il y a quelque chose de remarquable au rapport de gestion du Conseil d'Etat. C'est que le Conseil d'Etat joue très solidairement la carte de la solidarité alors que, très objectivement, un certain nombre de départements mériterait d'être mis, pour le moins pendant une année comptable, au fond de la classe avec un bonnet d'âne.

Madame la présidente, ne gâchons pas notre plaisir. J'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure, ne perdons pas non plus notre temps maintenant sur des comptes qui sont effectivement bons, les causes en ont été largement expliquées tout à l'heure. Reconnaissons-le, ce résultat a été possible entre autres en raison de la qualité non seulement du magistrat, mais aussi de celles d'un certain nombre de hauts fonctionnaires qui font un travail tout à fait remarquable.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai écouté attentivement vos interventions. Sur un point, je crois que nous pouvons tomber d'accord, bien qu'au fond le fait puisse être considéré comme étant nouveau, si l'on s'en tient aux événements. Il est normal qu'avec le potentiel économique qui est le sien depuis 1998 un canton comme Genève ait d'excellents résultats lorsque la conjoncture est forte. C'est normal, parce que l'économie de l'arc lémanique, pas seulement celle de Genève, est une des plus dynamiques, non seulement en Suisse, mais en Europe de l'Ouest. Genève a un niveau d'imposition comparable à celui de cantons qui sont moins riches sur le plan économique. Je pense donc aux cantons voisins. Il y a une certaine logique qu'avec une fiscalité de ce type on ait d'excellents résultats !

Enfin, Genève partage aujourd'hui le coût des infrastructures - ose-t-on dire métropolitaines, en tout cas de ville centre - avec plus de 50 000 contribuables qui sont en France voisine. Cela nous assure une assiette fiscale qui nous permet d'avoir des ambitions importantes.

Evidemment, c'est toujours la même chose: lorsqu'il y a de l'argent, tout le monde se demande ce qu'on va faire dans le futur. J'ai entendu pratiquement chacun d'entre vous... (Brouhaha. Un martinet est entré par une fenêtre et volette dans la salle du Grand Conseil.) Qu'est ce qui arrive à ce petit oiseau ?

La présidente. Excusez-moi, Monsieur le conseiller d'Etat. Cet oiseau est affolé, Mesdames et Messieurs, il faut ouvrir les fenêtres pour qu'il puisse sortir... (Rires.)

Une voix. Il est affolé par les comptes de l'Etat !

La présidente. Peut-être faut-il éteindre les lumières quelques instants pour lui permettre de sortir.

M. David Hiler. Mais que fait la police ? (Rires.)

Une voix. Comme quoi, une hirondelle ne fait pas le budget !

M. David Hiler. Pauvre petit oiseau... Ah ! La maréchaussée entre en jeu ! (Commentaires.)

La présidente. Il est parti ? Où est-il ? Nous avons un petit problème... (Quelques instants s'écoulent. Un policier et un journaliste attrapent le martinet.) Bravo ! (Applaudissements.) Monsieur le policier et Monsieur le journaliste, merci beaucoup ! Maintenant, que la lumière soit ! Monsieur le conseiller d'Etat, vous pouvez poursuivre.

M. David Hiler. Mesdames et Messieurs les députés, reprenons avec un fait un peu plus triste: la dette. La dette était effectivement en baisse à fin 2007, par rapport à 2006 et aux années précédentes; la décrue a continué pendant ce premier semestre; nous sommes aujourd'hui à 11 milliards de francs de dette. Donc largement au-delà d'un milliard de francs de réduction par législature. Toutefois, de façon générale, lorsqu'on exprime des objectifs financiers, je crois qu'il faut rester modeste pour l'exacte raison qui a été développée par les uns et par les autres: c'est que ça dépend beaucoup de la conjoncture. Aujourd'hui, on peut raisonnablement penser qu'au moins un des objectifs que nous avons fixés en cours de législature sera atteint à la fin de cette dernière. Ce sera ce milliard de francs de dette en moins ! Si ce sont deux milliards, très bien ! Le plus vite sera le mieux !

Maintenant, je dois quand même vous rappeler que pour ne pas augmenter la dette avec 450 millions de francs d'investissements, il faut faire 150 millions de francs de résultat. Nous savons qu'il faudra investir plus, certes, mais combien ? Si, par hypothèse, on augmentait le niveau des investissements à 600 millions pour rattraper le retard accumulé, il faudrait donc obtenir 300 millions de francs de résultat pour ne pas augmenter la dette ! Cela veut dire que, dans ce parlement et au-delà, il faut avoir la capacité et la discipline de vivre avec 300 millions de résultat en période ordinaire, sans voter précipitamment des baisses d'impôts ou des augmentations de charges diverses et variées !

A propos des augmentations de charges, il ne faut pas considérer les subventions à redistribuer dans votre calcul quand vous comparez le budget et les comptes, parce qu'en fait les subventions ne sont pas à proprement parler budgétée.

En réalité, vous savez tous ce que veut dire aujourd'hui une augmentation de subventions. Sur l'exercice 2007, ce sont des augmentations pour les subsides de l'assurance-maladie et les prestations complémentaires AVS-AI. C'est de ça qu'il s'agit ! Il s'agit des allocations à des tiers puisqu'enfin les dépenses d'assistance proprement dites sont stabilisées, ce qui est une bonne nouvelle, pas tellement sur le plan financier, mais sur la réalité sociale que cela dévoile. C'est-à-dire qu'enfin l'activité économique permet de réduire le chômage - ça, c'est l'évidence - mais elle permet aussi de redonner à certains des opportunités de travailler, opportunités qu'ils avaient perdues depuis longtemps.

Le Conseil d'Etat et moi avons reçu avec intérêt tous les conseils poussant à la sagesse... Maintenant, je ne peux faire que le miroir. Si, après avoir réussi à limiter la dette sur 1,5 ou 2 milliards durant une législature, il s'agit de faire un geste pour les classes moyennes, on peut aller jusqu'à 300 000 F par année pour un couple. S'il est question de rétablir une justice pour les couples mariés, c'est aussi possible, oui, par le splitting. S'il est question de faciliter la vie de ceux qui ont des enfants, oui, c'est encore possible. Par contre, ce qui n'est pas possible, c'est de résoudre d'un seul coup la question du niveau de la fiscalité genevoise, qui reste relativement élevé, parce que ça, ça coûterait tout de suite des centaines et des centaines de millions de francs !

Si vous vous écartez d'un objectif qui est limité dans sa portée, fixé par le Conseil d'Etat à 150 millions de francs pour les personnes physiques, vous reviendrez immanquablement à une augmentation de la dette: pas en 2008, mais en 2009 ou en 2010 !

Maintenant, Mesdames et Messieurs les députés, ce à quoi nous nous attendons, ce n'est pas à une récession, c'est à un ralentissement de la croissance. C'est une bonne nouvelle ! Dans les taux retenus par le Groupe de perspectives économiques pour les prévisions fiscales, nous avons effectivement pris la fourchette de la BNS, 1,5 à 2%, pour ne pas être surpris. En revanche, nous voyons bien que pour 2009, même si on est encore à 1,2%, pour les pessimistes il se pourrait qu'on passe à moins de 1%. Toutefois, c'est toujours de la croissance, ce n'est pas encore une crise majeure, avec un arrêt de la croissance ! Il n'y a donc aucune raison de sombrer au premier écueil.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous sais gré de vos remerciements répétés, expression de l'appréciation positive que vous avez portée sur les responsables opérationnels du département des finances et l'effort qu'ils ont fourni, ainsi que pour les autres départements, en termes de préparation des dossiers pour votre commission, de transparence plus grande. Souvent, si nous pouvons vous donner des meilleures informations, c'est que nous-mêmes, conseillers d'Etat, mais aussi les directeurs généraux et les secrétaires généraux, avons plus facilement accès à l'information. Cela permet de diriger les départements de façon optimale.

En revanche, il y a un bémol important, et je suis pleinement d'accord avec M. Cuendet. Je suis le premier à être catastrophé par les écarts sur les prévisions fiscales, d'autant plus que si l'on avait prévu cet écart, on aurait pu éviter de retarder le paiement de certaines annuités du remboursement de la dette pour en anticiper sur 2009 et 2010. Nous avons déjà pris des mesures, je crois que c'est important que vous le sachiez. Même si les comptes 2007 ne sont toujours qu'une évaluation, ils sont vraisemblablement plus proches de la réalité que ne l'étaient les comptes précédents. Nous avons fait des corrections sur l'impôt à la source qui sont sûres et certaines, puisque nous connaissons maintenant le résultat annuel - «online», littéralement !

Maintenant, la grande interrogation pour 2008, c'est de savoir quels seront les résultats concernant les personnes morales, à savoir le secteur bancaire: de quelle ampleur sera la décrue des bénéfices ? Nous nous tenons informés, mais, oui, il y aura décrue dans ce secteur. En revanche, je n'imagine pas une seule seconde qu'il y ait globalement une décrue des recettes fiscales en 2008. Nous aurons encore une bonne année.

Maintenant, rappelez-vous que le schéma des crises est à peu près toujours le suivant: une crise financière survient, elle ne touche pas le secteur bancaire genevois - ou très faiblement, puisqu'en ce qui concerne l'UBS, qui a été mentionnée, cela figure déjà dans les comptes 2007, et c'est l'absence de bénéfices: vous vous en doutez, il n'y en avait pas ! Mais, après la crise financière s'opère généralement un passage à l'économie réelle, que nous subirons un peu plus tard, vraisemblablement à la fin de l'hiver. Puis, généralement, avec un temps de retard, c'est l'Etat qui constate une stagnation de ses recettes fiscales, mais une augmentation de ses charges, tout simplement parce que le marché de l'emploi redevient moins dynamique.

A cela s'ajoute en arrière-fond un trend contre lequel nul ne pourra rien faire: des dépenses qui seront en constante hausse, pour les prestations complémentaires AVS, AI et les EMS, pour ces vingt prochaines années ! Il faudra vivre avec l'augmentation des dépenses sociales ! C'est une raison de plus pour que ceux qui sont en âge de travailler et qui ont un potentiel de travail puissent effectivement trouver un emploi. Et, de ce point de vue, nous nous félicitons des résultats obtenus. Nous reviendrons sur les différents aspects que vous avez soulevés au cours du passage en revue des départements et je remercie la commission des finances pour le bon esprit dans lequel se sont déroulés ces travaux.

Pour terminer, Mesdames et Messieurs les députés, je vous répète que nous avons entendu l'appel à la sagesse, des uns, des autres. Nous essaierons de garder cet appel en mémoire et vous invitons à suivre vous-mêmes les conseils que vous nous donnez !

Mis aux voix, le projet de loi 10248 est adopté en premier débat par 65 oui (unanimité des votants).

Mis aux voix, le projet de loi 10235 est adopté en premier débat par 62 oui et une abstention.

Mis aux voix, le projet de loi 10251 est adopté en premier débat par 61 oui (unanimité des votants).

La présidente. Vous avez tous reçu le document ayant trait à la procédure concernant les débats sur les comptes 2007: nous passons maintenant au deuxième débat pour les projets de lois 10235 et 10251. La parole n'étant pas demandée, nous pouvons procéder aux votes.

Je vous soumets donc en deuxième débat le projet de loi 10235.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1.

Le projet de loi 10235 est donc adopté en deuxième débat.

La présidente. Nous passons au projet de loi 10251, également en deuxième débat.

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 et 2.

Le projet de loi 10251 est donc adopté en deuxième débat.

Troisième débat (PL 10235-A et PL 10251-A): Session 10 (juin 2008) - Séance 56 du 27.06.2008

La présidente. Nous prenons maintenant notre livre jaune...

Des voix. Ah !

La présidente. Monsieur Gautier, vous avez demandé la parole: je vous la donne.

Deuxième débat (livre jaune)

Comptes de fonctionnement

M. Renaud Gautier (L). Nous l'avons déjà dit tout à l'heure à titre préalable, ces comptes ne suscitent pas d'opposition de quelque manière que ce soit et je voudrais, par le biais d'une motion d'ordre, vous proposer la procédure suivante.

La loi portant règlement du Grand Conseil, dans son article 138, indique précisément que lors des deuxième et troisième débats sur différentes parties du projet de budget et des comptes, chaque section est appelée. Ce terme de «section» devrait attirer votre attention, dans la mesure où il prouve que la rédaction de ces articles date ! Nous ne connaissons plus aujourd'hui de «section», ni dans les comptes, ni dans le budget. Nous parlons maintenant de «centre de responsabilité» ! On aurait donc déjà pu se poser la question de savoir comment on est passé du terme de «section» à celui de centre de responsabilité».

Je vous propose, Madame la présidente, d'essayer de faire aujourd'hui un travail constructif. Plutôt que d'aller de bas en haut, des «sections», qui sont maintenant des «centres de responsabilités», jusqu'au département, prenons le problème à l'inverse ! Appelez dans le cadre de ces comptes chacun des départements, cela laissera la liberté à chacun des députés de ce Conseil d'intervenir sur le ou les points qui lui posent problème, que ce soit pour féliciter ou poser des questions.

Ce faisant, je cherche deux choses. D'abord, de nous permettre d'avoir une vue d'ensemble, que nous puissions traiter chacun des départements comme un ensemble, sans pour autant empêcher chaque député d'intervenir là où il l'entend, de quelque manière que ce soit.

Nous sommes en fait confrontés à un problème de méthode, puisque l'Inspection cantonale des finances valide les comptes de l'Etat. Plusieurs préopinants l'ont dit tout à l'heure, lors de l'examen lors du point antérieur...

La présidente. Monsieur le député, il n'y a pas de débat ! Vous avez fait votre proposition, je vais la soumettre au vote.

M. Renaud Gautier. Je voulais l'expliciter, mais si tout le monde a compris...

La présidente. Tout à fait ! Je crois que tout le monde a parfaitement compris ! Je suis désolée, mais il y a des prises de parole... Une fois qu'une proposition est faite, on ne peut pas ouvrir de débat, la proposition est mise aux voix. Je rappelle que la majorité des deux tiers est requise pour qu'une motion d'ordre soit acceptée. Je la mets aux voix... (Commentaires.) Il n'y a pas de débat, Monsieur Velasco !

Nous allons nous prononcer sur la motion d'ordre de M. Gautier: procéder uniquement par département et non par rubrique. Si cette proposition est acceptée, je demanderai aux personnes qui ont des demandes concernant des rubriques spécifiques de bien vouloir être précises en m'indiquant la rubrique concernée et la page à laquelle elle figure. Sinon, le temps gagné d'un côté sera perdu de l'autre. Soyez donc précis lors de vos interventions, c'est important, le but de cette motion d'ordre étant de nous faire gagner du temps !

Mise aux voix, cette motion d'ordre est adoptée par 52 oui contre 11 non.

La présidente. Conformément à ce que nous venons de voter, je vais aborder les départements. Je vous demande de prendre le livre jaune à la page 142. Le premier département est la chancellerie. S'il y a des questions sur la chancellerie, j'ouvre le débat.

CHAPITRE 1: CHANCELLERIE

M. Alberto Velasco (S). Puisque vous m'obligez à parler de la chancellerie, je vais quand même faire une petite digression. Il me semble qu'à force de banaliser nos actes - et ce Grand Conseil en a fait, des banalisations... Limitation du temps de parole, interventions sur les projets de lois, etc. A force de banaliser le travail de notre parlement, je ne sais pas où on arrivera ! Il est logique, cher Monsieur Gautier, que dans le cadre de la commission des finances... (Commentaires.) S'il vous plaît, pouvez-vous me laisser parler ? (Commentaires. La présidente agite sa cloche.) ...il est normal que les députés de la commission des finances décident que, finalement, après y avoir travaillé durant trois mois, qu'ils voteront les comptes en gros, par département, sans passer en revue les rubriques... Mais on est ici en plénière, Madame la présidente, et l'ensemble des députés n'a pas suivi les travaux ! Donc, il est logique, c'est d'ailleurs la tradition - certaines traditions, il faut les conserver, parce qu'on ne sait jamais à quoi on peut aboutir... Or aujourd'hui, on a fait un grand saut en éliminant une tradition qui voulait qu'on passe en revue les départements, rubrique par rubrique, ce qui permettait aux députés d'intervenir ! Que sera donc la prochaine étape ?! On votera directement le livre jaune, Monsieur Gautier ?! Ce sera plus simple et plus rapide ?! Et vous pourrez rentrer chez vous ou aller à votre bureau plus tôt, parce que vous avez d'autres choses à faire... Mais d'autres députés, ici, même s'il s'agit d'une minorité, montrent leur intérêt à un examen détaillé ! Si elle veut maintenir cette tradition, vous devez respecter cette minorité ! Je tiens à dire ici, Madame la présidente, que la façon dont cette majorité interprète la loi n'est pas correcte: comme ces députés ont la majorité, ils font ce qu'ils veulent ! Et, durant ces quatre années de législature, il y a eu un irrespect constant envers la minorité ! (Commentaires.) Aujourd'hui, vous venez de le démontrer de manière concrète ! Alors qu'il devrait suffire qu'une minorité du parlement ne veuille pas suivre votre décision pour qu'il faille respecter cette minorité. (Applaudissements.)

La présidente. Deux réponses à ce que vous venez de dire. Tout d'abord, le résultat du vote est très net: 52 voix contre 11. La majorité a parlé. Deuxièmement, cela n'empêche absolument pas que les députés posent des questions. Je l'ai dit tout à l'heure, toutes les questions restent possibles, y compris sur les rubriques. La seule chose que je vous demande, pour gagner du temps, c'est d'indiquer la page et la rubrique. La démocratie n'est pas du tout entamée ! (Exclamations. Applaudissements.) Vous pouvez poser toutes les questions que vous voulez, il n'y a aucun souci, je vais laisser parler tout le monde !

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse. Je crois que vous venez de faire la démonstration de ce que nous pouvons utiliser comme méthode. C'est ce qui a été évoqué en commission des finances: on peut travailler encore mieux, en simplifiant encore plus la façon de revendiquer la parole. Je parlais de vanité, et lorsque l'on évoque une manière de travailler beaucoup plus rigoureuse et efficiente, c'est pour éviter de tomber dans les travers où il faut absolument prendre la parole, même si on n'a rien à dire. On a aussi l'impression que certains pourraient se sentir frustrés d'exprimer les choses plus simplement qu'ils ne le font... Je crois qu'on est là dans un épiphénomène de vanité, qui risque de devenir extrêmement bloquant.

Maintenant, nous en étions à l'examen des comptes de la chancellerie d'Etat, n'est ce pas, Madame la présidente ? Ce qui est intéressant à relever, c'est que, dans le cadre des plans P1 et P2, sur quatre ans, il y a déjà 7 millions de francs d'économies qui ont été réalisées et que la commission a pu constater l'excellente gestion du chancelier.

Mme Esther Alder (Ve). Je profite qu'on en soit au chapitre consacré à la chancellerie pour poser une question générale concernant la politique de subventionnement du Conseil d'Etat à ce niveau. Nous avons mené l'an passé une discussion importante, au cours de laquelle je m'étais élevée contre la réorganisation projetée par le département de la solidarité et de l'emploi en matière de subventions et leurs répartitions entre la Ville et le canton. Le Grand Conseil s'était mis d'accord pour que l'on supprime les doublons en matière de subventions. Il s'agissait d'obtenir plus d'efficience. C'est le discours que nous avions alors entendu. Le subventionnement de certaines associations a donc été transféré à la Ville de Genève, d'autres subventions sont restées de la compétence du canton. Je ne veux pas rediscuter des répartitions opérées alors, mais je suis étonnée aujourd'hui de voir que tous les départements n'ont pas du tout suivi le même principe.

Je trouve qu'il y a une incohérence en matière de subventions et j'aimerais entendre le Conseil d'Etat sur la suite qu'il entend donner dans ce domaine. Je ne vois pas pourquoi la discussion ayant eu lieu dans le domaine social en resterait là et pourquoi il n'y aurait pas de changements au cours des prochaines années. En matière de subventions, je ne considère pas qu'une entité soit plus compétente que l'autre. Je crois qu'il y a des choses qu'il faut gérer ensemble. Mais, puisqu'il ne semble pas que cela soit la volonté du département de la solidarité et de l'emploi, en tout cas, où en est-on avec les autres départements ?

M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Vous l'avez rappelé, Madame la députée: sur proposition du Conseil d'Etat, votre parlement a effectué en début de législature une opération importante, qui visait à remettre à plat toutes les subventions, non seulement dans le domaine du social mais aussi dans celui de la santé. Mon collègue Pierre-François Unger était donc également concerné par cette opération.

Il s'agissait de faire en sorte qu'il n'y ait plus de doublons dans les subventions octroyées par la Ville et l'Etat, de manière à simplifier les règles de contrôles, de tutelle et de surveillance, sans que cela nuise au subventionnement des associations concernées. Vous vous en souvenez, sur proposition du Conseil d'Etat, vous avez voté une disposition pour faire en sorte que chacune des structures subventionnées se retrouve aujourd'hui avec la somme des subventions qu'elle recevait séparément auparavant de l'Etat et de la Ville, cela indépendamment de la reprise du subventionnement de l'association par la Ville ou par l'Etat. Nous avions établi une répartition Ville-canton selon des critères qui vous sont connus: les activités de nature communautaire seraient subventionnées par la Ville, les activités de nature individuelle et les grands champs de politique publique par l'Etat.

Votre question portait sur la possibilité de l'extension de ce mouvement et si le Conseil d'Etat projetait une extension. Il est vrai que les dysfonctionnements de cette logique de double subventionnement étaient particulièrement criants dans les domaines du social et de la santé, et nous nous félicitons d'y avoir mis fin. Dans d'autres domaines, ces dysfonctionnements ne sont jamais apparus. Plusieurs départements ne sont pas concernés par la problématique des doublons dans le champ de la politique publique.

La seule exception à ce constat est le domaine culturel. Je parle ici aussi en suppléance de M. Charles Beer, excusé ce matin. Dans le domaine culturel, des discussions sont en cours avec le département des affaires culturelles de la Ville de Genève. Les discussions sont complexes, délicates et problématiques aussi. Ces discussions seront poursuivies, et si des propositions doivent être faites par le Conseil d'Etat, elles seront évidemment discutées dans cette enceinte, comme cela a été longuement le cas au sujet de la santé et du social. Ces discussions auront certainement également lieu au Conseil municipal de la Ville de Genève.

Mme Esther Alder (Ve). Je remercie le conseiller Longchamp pour ses explications. Je suis un peu surprise quand j'entends dire que le social est en proie à des dysfonctionnements criants. Je crois que l'on ne peut pas généraliser !

Ce qui me surprend aujourd'hui, c'est que nous avons eu à traiter dans diverses commissions des subventions en matière de solidarité internationale. Il arrive même qu'il y ait jusqu'à deux départements subventionneurs pour certaines actions ! Je ne mets pas en cause les associations demanderesses, je mets simplement en cause le mode de fonctionnement du subventionnement ! Et si l'on veut être cohérent, j'estime que la cohérence doit s'appliquer à tout le monde ! Je ne peux pas me satisfaire de la réponse faite en ce qui concerne le volet social. J'estime qu'une politique doit être conçue pour un ensemble. Au nom des Verts, j'invite le Conseil d'Etat à poursuive la réflexion. Si ce qui a été amorcé en matière sociale ne s'avère pas approprié, qu'on revienne en arrière ! Sinon, qu'on applique la même stratégie aux autres départements !

La présidente. Je rappelle que nous en sommes à l'examen des comptes de fonctionnement de la chancellerie. S'il n'y a pas d'autres questions de votre part, Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter ce chapitre. (Quelques instants s'écoulent. Commentaires.) Il y a une panne technique, nous allons procéder à mains levées.

Mis aux voix, les comptes de fonctionnement de la chancellerie d'Etat sont adoptés.

La présidente. Nous sommes à la page 159, avec les comptes de fonctionnement du département des finances. Y a-t-il des questions ?

CHAPITRE 2: FINANCES

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse. Même si cela a été dit, je crois qu'il est important de relever, très brièvement, qu'en termes de formation un travail très important a été fait au sein de ce département. Le but est de valoriser les métiers en place et de pouvoir contrer un problème qui est une préoccupation pour tous les groupes, c'est-à-dire l'absentéisme. Il me semble donc nécessaire de relever combien d'éléments de formation et de valorisation du personnel ont été mis en place par le département. Il s'agit d'actions absolument indispensables pour les réorganisations que nous attendons.

La présidente. Merci. La parole est demandée par M. Alberto Velasco.

Des voix. Ah !

M. Alberto Velasco (S). Merci, Madame la présidente... Enfin, seulement si l'on peut parler ! (Remarque.) Ou alors, on parle à la fin ? (Rires.) Où est M. Gautier ? (Rires. Commentaires.) Je ne sais pas, parce que les procédures changent en fonction des majorités, ici ! C'est comme ça que semble fonctionner la loi !

Je tenais à intervenir, parce que vous avez rappelé que le taux d'absentéisme était, de manière générale, relativement élevé. Dans la vie, il ne suffit pas de relever des faits: l'important est de les comprendre. Or je constate, année après année, qu'un certain nombre de personnes, notamment de la majorité, relèvent la question de l'absentéisme. Toutefois, à un moment donné, l'absentéisme est provoqué par des situations de stress trop importantes dans le cadre de l'activité professionnelle. Ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les spécialistes en ressources humaines, pas ceux de l'Etat. Soit les employés sont «surbookés», comme on dit en anglais; soit on leur attribue des tâches qui dépassent peut-être leurs capacités; soit le nombre d'employés affectés à une tâche précise est insuffisant.

Ce qu'il m'intéresserait de savoir, c'est si l'absentéisme est dû au fait que les employés sont, disons, passéistes, ou si c'est le résultat de la politique de réduction constante des effectifs, alors même que l'Etat doit accomplir de plus en plus de tâches et remplir de plus en plus de fonctions. Alors, je me demande s'il y a là un lien de cause à un effet.

Je n'ai personnellement pas fait d'étude à ce propos, j'ai eu quelques contacts avec des fonctionnaires qui ont évoqué ce sujet avec moi. Je considère que les relations humaines sont très importantes et constate qu'il y a peut-être aujourd'hui un problème à ce niveau. On devrait peut-être se poser des questions ! Est-ce que, à vouloir trop pressuriser l'administration, on n'augmente pas l'absentéisme ? Et ce qu'on gagne d'un côté, on le perd peut-être de l'autre !

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse. Je voudrais juste rappeler, et peut-être pas seulement à M. Velasco - mais tout de même, puisqu'il siège comme moi à la commission des finances - que, lors de la présentation que je venais de faire, je ne parlais pas que de l'absentéisme. Je parlais de la formation continue et de l'énorme travail effectué au sein de ce département pour, justement, valoriser le personnel et apporter des éléments de formation qui ne sont pas encore suffisamment pris en compte. Il était important de signaler que toutes nos inquiétudes avaient pu être exprimées et que nous avions pu en connaître les sources afin de trouver des solutions.

Peut-être est-il important de ne pas répéter ici ce que nous savons déjà, or je crois plutôt qu'il est essentiel de relever ce qui est mis en oeuvre, et pas seulement ce qui ne va pas !

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Je voudrais d'abord vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que, si on prend le chiffre global, au niveau de l'Etat, par rapport à ce qu'on peut observer dans le secteur privé, les chiffres ne sont pas si mauvais. Une récente enquête de «l'Hebdo» en faisait le constat appuyé.

De manière finalement assez peu surprenante, il y a une corrélation entre l'intérêt que les gens peuvent trouver à leur travail, en particulier dans la durée, et le taux d'absentéisme. Je relève par exemple que le taux d'absentéisme du corps enseignant est plus bas que celui des autres professions. Ce qui mine ces statistiques, ce ne sont pas les absences du vendredi ou du lundi, si je puis m'exprimer ainsi. Ce sont effectivement des absences de très longues durées, le plus souvent dues à des maladies graves. Et là, il y a une insuffisance de l'Etat employeur dans la préparation du retour au travail des personnes concernées, parfois après six mois de radiothérapie ou de chimiothérapie. Il est évident que la personne qui revient au travail après une absence de ce genre ne revient pas pareille à ce qu'elle était quand elle est partie. Et peut-être ne sommes-nous, de ce point de vue, pas encore un suffisamment bon employeur pour préparer ces retours. C'est là que la formation est un élément important.

Il y a toutefois autre chose, Monsieur Velasco. Cela concerne l'administration fiscale, pour être tout à fait précis. Il y a le syndrome du poinçonneur des Lilas, si je puis m'exprimer ainsi. Certaines personnes font un travail ingrat: un taxateur standard effectue quarante taxations par jour, tous les jours, et tous les jours ! Il est donc assez facilement concevable qu'au bout d'un certain nombre d'années la motivation soit défaillante et qu'un certain mal-être apparaisse... Une partie des taxateurs que nous formons vont voir ailleurs, de l'autre côté de la barrière, du côté des fiduciaires, ne serait-ce que parce qu'ils recherchent un travail avec plus de contacts humains.

Comment pouvons-nous éviter cela ? De deux manières - et je remercie Mme von Arx-Vernon d'avoir mis ce débat sur la table. D'abord, il faut vous rappeler que l'environnement de la taxation a énormément changé, notamment sur le plan informatique. Certains d'entre vous, les plus anciens, se souviennent encore du désastre de la fin des années 1990 et de la remise en place du début des années 2000. Nous arrivons maintenant au bout de ce processus, mais tous les collaborateurs ne s'y sont pas également adaptés. Et, surtout, une partie du travail qui est demandée à des humains pourrait être effectuée par des machines. Il s'agit de la taxation automatique pour un certain nombre de contribuables; ce sont les éléments de détection et la taxation semi-automatique où l'humain n'intervient que s'il y a difficultés. Or pour ce faire, il faut élever le niveau d'expertise des employés de façon relativement spectaculaire. Peut-être pourrons-nous ainsi freiner la croissance de l'absentéisme et revenir à des chiffres d'absentéisme plus normaux.

Enfin, concernant le personnel de l'administration fiscale cantonale, j'aimerais que vous soyez conscients que les conditions que vous avez connues dans ce local, hier soir, pour siéger correspondent à peu près aux conditions de travail de tous mes collaborateurs, pendant tout l'été !

M. Renaud Gautier (L). Madame la présidente, je présente une requête. Nous avons eu l'occasion, cette année, de lire un excellent rapport de l'ICF, qui nous est malheureusement parvenu à peu près aux deux tiers de notre travail sur le rapport des comptes d'Etat.

Ne pourrait-on pas essayer de trouver une solution pour faire en sorte que la commission des finances reçoive tout ou partie du rapport de l'ICF lorsqu'elle commence à examiner les comptes ? Je suis convaincu que, d'une part, cela permettrait de nous épargner les problèmes que nous avons connus au pouvoir judiciaire - et dont je parlerai tout à l'heure - et, d'autre part, cela ne peut être que profitable aux députés que d'avoir déjà avec eux le rapport de l'ICF lorsqu'ils doivent aller visiter les départements.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. Oui, c'est possible ! D'abord, l'année prochaine, nous appliquerons les normes IPSAS. Donc, l'opinion d'audits figurera dans les comptes au 31 mars. Ce qui sera peut-être difficile, c'est d'avoir tous le fatras avec, or vous pourrez au moins avoir les remarques principales. Nous avons décidé, avec le directeur de l'ICF, M. Pict, d'essayer de régler ce problème, parce que les recommandations étaient de toute manière prêtes avant le 15 avril. C'est plutôt tout le travail de mise en place et de transmission qui a retardé un peu bêtement d'un mois votre prise de dossier.

Moi je recommande simplement à votre commission d'agender assez tôt la planification des travaux. Vous savez qu'un délai fixé par la commission des finances accélère généralement un tout petit peu le processus. Pour l'année prochaine, il devrait déjà y avoir une amélioration notable.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous arrivons à la fin du chapitre relatif au département des finances, que je vais mettre aux voix. Je vous informe que le vote électronique fonctionne à nouveau.

Mis aux voix, les comptes de fonctionnement du département des finances sont adoptés par 48 oui (unanimité des votants).

CHAPITRE 3: INSTRUCTION PUBLIQUE

La présidente. Nous sommes à la page 186 du livre jaune: département de l'instruction publique. Vous pouvez poser vos questions: j'ouvre le débat.

Mme Anne-Marie Arx-Vernon von (PDC), rapporteuse. J'aimerais faire un bref commentaire. Il était important que la commission prenne acte de ce que le département de l'instruction publique a réduit ses dépenses générales. La création de postes supplémentaires nécessaires à la rentrée scolaire ne lui permet toutefois pas encore d'atteindre la cible fixée par le Conseil d'Etat: réduire le personnel de 5%.

Néanmoins, vous le savez, le discours de Saint-Pierre a été évoqué lors des discussions de la commission, afin de rappeler que l'instruction publique est une priorité fondamentale.

Mme Janine Hagmann (L). J'aurais voulu faire deux remarques et poser deux questions à M. Charles Beer, mais je comprends tout à fait son absence, puisqu'il assiste aux promotions - c'est une grande journée pour l'enseignement ! Je vais respectueusement demander au conseiller d'Etat François Longchamp, son remplaçant, de lui transmettre mes remarques et mes questions. Je serai tout à fait satisfaite si nous obtenons une réponse en commission de l'enseignement, en septembre. Du reste, il s'agit plutôt de formuler des remarques que des questions importantes.

Ma première remarque concerne l'enseignement primaire, le point 302, Madame la présidente, puisque vous nous avez demandé d'être précis. Nous avons appris à la commission de l'enseignement, par M. Beer, qu'il y avait eu sur deux ans une diminution de 600 élèves à l'école primaire. Nous savons qu'un élève à l'école primaire coûte grosso modo, en arrondissant, 10 à 12 000 F. Si mon calcul est juste - 600 élèves multipliés par 10 000 - on devrait aboutir à une diminution des charges de 6 millions de francs. Or dans la synthèse de M. Pierre Weiss et Mme Mariane Grobet-Wellner, figurant dans le rapport PL 10248-A de Mme Anne-Marie von Arx-Vernon, page 50, il est écrit: «Il est observé les augmentations de charges au primaire, notamment de personnel...»

Il y a donc pour moi une nette contradiction entre cette diminution de 600 élèves et le fait que M. Weiss et Mme Grobet-Wellner constatent une augmentation des charges dans le primaire, notamment les charges de personnel. Et il est ensuite écrit: «[...] les effectifs d'enseignants sont stables...». Cela voudrait dire que l'augmentation des charges concerne le back office et non pas l'enseignement, ce qui est tout de même dommage !

Ma deuxième remarque/question concerne un point du rapport de gestion, mais je crois que nous pouvons aussi nous en servir aujourd'hui. En page 14 de ce rapport, je lis sous «Enseignement primaire»: «L'accord conclu en 2006 avec les partenaires pour la mise en place de directeurs d'établissements et de conseils d'établissements dans les écoles primaires, afin de remplacer les inspecteurs, les responsables d'école et les maîtres principaux...». Et qu'apprenons-nous cette année ? Que M. Beer a procédé à la nomination d'une centaine de directeurs d'école, ce que le groupe libéral a accepté depuis le début, estimant que des directeurs d'école permettraient une gestion tout à fait «managériale» de l'école.

Ces directeurs d'école sont maintenant au nombre de 91, alors qu'il y avait auparavant 60 inspecteurs d'école. Et, tandis que ces derniers avaient sous leur responsabilité de 60 à 100 classes, les directeurs d'école vont en avoir de 16 à 20 maintenant. Enfin, si les inspecteurs d'école étaient en classe salariale 22, les directeurs d'école seront en classe 24.

Tout cela, nous pouvons l'accepter, cela fait partie de la réorganisation initiée par le département. Nous avons donc lu dans le rapport de gestion que ces postes de directeurs devaient être créés pour remplacer les inspecteurs, les responsables d'école et les maîtres principaux. Or qu'apprenons-nous ? Que, cédant aux sirènes de la SPG - le syndicat des enseignants du primaire - le chef du département renomme des maîtres adjoints pour chaque école du canton de Genève, en les appelant autrement. Cela signifie qu'il existe à nouveau des maîtres principaux dans les écoles !

Alors là, Mesdames et Messieurs, nous nous posons tout de même des questions, car nous avons été trompés ! Nous avions accepté la création des postes de directeur d'école, qui sont chargés de beaucoup moins de classes que les inspecteurs. Rendez-vous compte: ces derniers, qui avaient sous leur responsabilité 100 classes, ne pouvaient pas vraiment surveiller chacune des classes; mais les directeurs d'école, qui ont maintenant entre 16 et 20 classes à diriger, peuvent tout à fait être proches des enseignants et des élèves ! Mais non, la SPG, voulant que le back office soit complété, a insisté et dit que, si ces maîtres adjoints n'étaient pas nommés, ils feraient grève. Nous avons reçu un courrier de la SPG à la commission de l'enseignement à ce sujet !

Eh bien, je trouve un peu fou d'avoir cédé aux sirènes de la SPG et nous ne manquerons pas de surveiller ce que cela va coûter lors de l'établissement du budget. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat, de transmettre ces remarques à M. Beer !

Mme Esther Alder (Ve). Les Verts rejoignent tout à fait Mme Hagmann dans son constat. Je pense également que, là, il y a quelque chose qui ne joue pas ! En plus, parler de moyenne de classe ne convient pas en matière d'enseignement primaire. En effet, certaines écoles ont parfois des classes de 24 ou 26 élèves, ce qui ne devrait pas être le cas ! On doit donc voir ce qu'il en est école par école et classe par classe. C'est facile de parler de moyenne générale au niveau cantonal, mais on nous berne en nous disant que l'opération est nulle sur le plan comptable !

D'autre part, j'aimerais formuler une remarque concernant le domaine de la protection des mineurs - et j'espère que cela sera transmis à M. le conseiller d'Etat Beer - parce qu'il y a quand même un certain nombre de choses qui ne vont pas ! Le service de protection des mineurs est en charge des problèmes liés à l'enfance. Or aujourd'hui, si vous téléphonez en dehors des heures d'ouverture de bureau, on vous prie gentiment d'appeler la police ! Je trouve que c'est scandaleux et ne comprends pas qu'on accepte cela.

En effet, ce n'est pas la même chose, lorsqu'on a un problème avec un enfant, d'appeler la police ou le service de protection des mineurs, où c'est un assistant social, en principe, qui vous répond ! Vu le nombre d'employés à disposition, je trouve quand même incroyable qu'il n'y ait pas une permanence physique, où le simple citoyen en difficulté avec un enfant - ou l'enfant lui-même - puisse se rendre, trouver porte ouverte et être accueilli, quel que soit le moment de la journée. C'était ma première remarque.

Le second point qui m'a interloquée concerne l'application du nouveau code pénal des mineurs. En effet, on apprend aujourd'hui que c'est la Fondation pour l'animation socioculturelle - dont je salue le travail - qui sera en charge du suivi pénal des mineurs... Il s'agit encore d'une délégation de compétences que je trouve totalement incohérente, et je ne comprends pas que le département de M. Beer aille dans ce sens ! Je pense qu'il faut une unité d'intervention au niveau de l'enfance, que ce soit pour les enfants en difficulté, délinquants ou autres, et il n'y a aucune raison, en termes de lisibilité, qu'on délègue ces compétences une fois à la police, une fois aux animateurs socioculturels et une autre fois à je ne sais qui !

J'aimerais qu'on recentre les missions des uns et des autres, et que ceux qui sont en charge de la protection de l'enfance s'occupent avec professionnalisme de ce domaine qui est le leur.

M. Claude Jeanneret (MCG). Le département de l'instruction publique nous a présenté des comptes qui sont un peu en dehors des objectifs qu'on souhaitait obtenir dans différents départements.

Concernant le personnel, comme l'a dit Mme Hagmann, on constate qu'il y a par endroits une diminution du nombre d'élèves, mais on n'en voit pas la répercussion sur le nombre d'employés, ce qui est un peu dommage. En outre, il ne semble pas que le département soit véritablement motivé par l'obtention d'une réduction du personnel, puisqu'il nous propose cette année déjà d'engager 150 directeurs d'école. Et ce qu'on oublie de nous dire, c'est qu'on vote la création de 150 postes de directeurs d'école, ce qui est déjà important, mais que ces gens ne sont pas nécessairement des enseignants ! On engage même des personnes qui ne sont pas de Genève et qui ne connaissent par conséquent même pas l'instruction publique. On doit donc leur donner en plus un conseiller pédagogique, ce qui fait qu'on va doubler le nombre initialement prévu de 150 postes. Cela fait donc déjà 300 personnes supplémentaires !

Et puis, tout ce petit monde a quand même besoin de quelqu'un qui s'occupe du secrétariat, alors je vous laisse imaginer ce que cela peut représenter en tout comme personnel supplémentaire !

On va arriver en fin de législature, et le département de l'instruction publique n'aura pas du tout fait l'effort nécessaire pour diminuer le personnel, bien au contraire ! En termes clairs, cela rappelle le bon vieux dicton paysan: «Celui qui veut trouve une solution, et celui qui ne veut pas trouve une excuse.»

Pour en revenir à la question du département, je crois que l'instruction primaire est importante, mais ce qui m'inquiète davantage, c'est que, pour des raisons qui sont difficilement compréhensibles, on laisse dans la rue un millier - je dis bien un millier ! - de jeunes entre 15 et 18 ans, qui n'ont pas obtenu dans l'enseignement postobligatoire les moyennes pour pouvoir continuer l'école ou faire un apprentissage. Et lorsque les parents d'un enfant de 15 ans demandent qu'il puisse refaire sa dernière année de cycle, afin d'obtenir des moyennes suffisantes pour continuer, on le leur refuse et on rejette l'enfant dans la rue. Cela signifie que, si ses parents n'ont pas les moyens de lui offrir une école privée, ce gamin ne fait plus rien !

On entend maintenant parler de prise en charge de la délinquance juvénile... Au lieu de cela, prenons d'abord en charge ce millier de jeunes qu'on laisse dans la rue ! Donnons-leur une occupation, formons-les, et la délinquance faiblira d'elle-même ! Parce qu'être inactif incite évidemment à faire des conneries... Et cela ne vaut pas que pour les jeunes, mais pour tout le monde.

Je trouve assez lamentable de déplacer les problèmes là où il ne faut pas et engager, précipitamment et pour d'égoïstes raisons, des gens dans des domaines où la situation peut encore se maintenir éventuellement une année ou deux, alors que le vrai problème au niveau du département de l'instruction publique, à savoir l'encadrement des jeunes, n'est pas du tout résolu ! On rédige des gros rapports, on fait de la «colloquite» aiguë, on prévoit des actions, mais, pendant ce temps, il ne faut pas oublier que des jeunes - un millier - traînent dans la rue ! C'est bien plus important que de savoir si les actions prévues vont être bonnes ou non ! La seule bonne action qu'on ait à entreprendre maintenant, c'est de s'occuper de ces jeunes !

Je ne vois pas pourquoi il est malséant de dire qu'on peut refaire une année du cycle ! Sous prétexte que quelqu'un a décidé qu'on ne doublait pas au cycle, on laisse les enfants dans la rue ?! Eh bien non ! On prend des mesures simples, efficaces et humaines, et on pense d'abord à l'enfant, ensuite aux grandes théories et pratiques intellectuelles, qui ne nous mènent à rien.

Je suis un peu frustré que, dans le rapport de gestion, on ne relève pas tous ces points, qui sont importants ! Quant à la gestion du DIP, je le dis bien: il n'y a manifestement aucune volonté de réduire le personnel.

Mme Virginie Keller (S). Pour répondre à mon préopinant et reprendre les paroles de Mme Hagmann, je crois que le Grand Conseil dans son entier - et le Conseil d'Etat certainement - ont réaffirmé à plusieurs reprises que l'éducation était une priorité absolue pour notre société. Je crois donc qu'avoir aujourd'hui comme objectif de réduire le nombre d'enseignants à l'école n'est pas intelligent.

Sur la question des postes, soulevée par Mme Hagmann, on a effectivement pu constater qu'il y avait actuellement à l'école primaire, sur deux ans, une diminution de 600 élèves. Toutefois, il faut savoir qu'une pression terriblement forte a pesé sur les postes d'enseignement ces dernières années, puisqu'on a cessé de procéder à des engagements, alors même que les besoins étaient croissants. On est donc finalement en train de retrouver tranquillement un équilibre.

Concernant les maître adjoints dans les écoles, c'est vrai qu'ils nous ont été annoncés extrêmement tard, après la décision relative aux directeurs et directrices d'école. Nous avons, nous aussi, été étonnés par cette demande; or, après avoir étudié les revendications qui se trouvent derrière, lesquelles sont souvent très concrètes et basiques, nous pensons qu'il est utile et sensé que chacune des écoles dispose simplement d'un référent, d'une personne responsable, pour les cas où le directeur se trouve dans un autre établissement. Par exemple, ce sera utile si un directeur ou une directrice d'école qui doit gérer plusieurs établissements, ce qui est le cas pour nombre d'entre eux, se trouve dans une école en train de travailler avec son équipe et que quelque chose d'important survient dans une autre école, comme un accident, nécessitant une prise de décision rapide.

Concernant cet aspect des choses, nous pouvons tout à fait entrer en matière sur le rôle que doivent jouer les maîtres adjoints dans ces établissements, simplement pour assurer que les décisions prises à un certain niveau soient appliquées partout de la même manière.

D'autre part, ce que Mme Hagmann a oublié de mentionner dans son intervention, c'est toute la réforme sur les REP - les réseaux d'enseignement prioritaire. On ne peut pas dire que les augmentations de postes sont seulement imputables à la question des maîtres adjoints... Ce n'est pas vrai, Madame Hagmann ! Il y a les directions d'établissement, c'est vrai - et vous les avez votées - mais aussi les moyens supplémentaires mis à disposition de certains établissements qui en ont besoin, et vous étiez d'accord avec cela. Vous avez reconnu tout au long des travaux la question de l'adéquation entre les moyens des postes d'enseignants et ce que vous appelez le «back office», et les maîtres adjoints ne font pas partie du back office, ce sont des gens qui sont dans les classes. Venir aujourd'hui remettre en question cette adéquation me paraît donc tout à fait surprenant.

M. Christian Brunier (S). Je crois qu'on ne peut pas laisser M. Jeanneret tenir de tels propos. Il fait une analyse qui est financière, puisqu'il siège à la commission des finances, mais il connaît très mal le monde de l'enseignement. J'aimerais donc lui dire deux ou trois choses.

Premièrement, quand vous affirmez qu'il n'y a pas de soutien pour les jeunes en rupture sociale, je vous rappelle qu'il y a eu dernièrement une motion - émanant, je crois, de l'UDC - dans laquelle il était écrit que le département n'en faisait pas assez. La commission de l'enseignement a décidé de traiter ce sujet avec sérénité, parce que c'est vrai qu'on n'en fait peut-être jamais assez pour les jeunes en rupture, or les remèdes ne sont pas simples à trouver. On a donc établi l'inventaire des mesures actuellement en cours, et je peux vous dire qu'il est impressionnant ! Le DIP travaille pour essayer de diminuer le nombre de jeunes en rupture sociale ou qui sont dans la rue - il fait vraiment le maximum. Et ce n'est pas en criant au parlement qu'il n'en fait pas assez que vous allez régler les problèmes ! Si vous voulez les résoudre, il faut allouer des budgets un peu plus larges, au lieu de couper dedans - comme vous le faites parfois un peu facilement !

Deuxièmement, vous déclarez qu'il existe aujourd'hui au DIP des postes occupés par des frontaliers ou des frontalières... Eh oui, mais pourquoi ? Parce qu'on ne trouve pas de main-d'oeuvre dans certaines spécialisations du domaine de l'enseignement ! (Brouhaha.) Alors, si vous disposez de remèdes miracles, c'est bien, mais mieux vaut placer un frontalier à un poste d'enseignement que de ne pas avoir du tout d'enseignant ! D'autant plus que, je vous le rappelle, la plupart ne sont pas des frontaliers, comme vous le dites, mais des Genevois qui n'ont pas trouvé de logement à Genève et qui habitent donc de l'autre côté de la frontière.

Troisièmement, concernant les maîtres spécialisés et les directeurs d'école, je vous demande de regarder les chiffres. Vous avez parlé de 150 directeurs, mais je vous rappelle qu'il y a 91 postes de direction.

Une voix. Nonante-trois !

M. Christian Brunier. Nonante-trois postes, excusez-moi ! On est quand même loin des 150 mentionnés !

En plus, vous avez essayé d'exagérer le phénomène en disant que chaque directeur allait avoir une sorte d'adjoint. Mais regardez ce qui se passe dans les faits ! Ce n'est pas cela ! D'abord, il est assez normal - et c'est pour cela qu'il faut soutenir les directions d'école - qu'une école désigne une personne responsable ! Jusqu'à présent, on ne savait pas qui était responsable, il y avait des inspecteurs qui n'avaient pas de pouvoir hiérarchique et le DIP avait une multitude de directions... Eh bien, je crois que Charles Beer est en train d'instaurer une bonne gouvernance dans la gestion du DIP et d'établir des vraies responsabilités. C'est une bonne chose: pour que la responsabilité de l'école soit assumée; parce qu'il est important que les parents puissent s'adresser à un répondant; et aussi pour que les profs aient une sorte de patron d'école.

En ce qui concerne les maîtres spécialisés, reprenez les chiffres... Il n'y a pas un maître spécialisé comme adjoint de chaque directeur ! Je prends un exemple: dans une école de la région de Vernier, qui connaît des difficultés sociales et qui compte 360 élèves - c'est la moitié d'un gros cycle d'orientation - il y a aujourd'hui un poste de directeur et un poste de secrétariat à 35%: savez-vous combien de temps le maître adjoint sera là ? Deux heures ! Deux heures de maître adjoint par semaine ! Vous pensez que c'est excessif ?! Pour 360 élèves dans un quartier très difficile, celui des Libellules ?! Vous venez de dire qu'il n'y avait pas assez de soutien aux élèves en difficulté, et lorsqu'on apporte deux heures de soutien supplémentaires vous condamnez Charles Beer ?! Mais vous n'êtes pas cohérents dans votre politique: vous avez dit tout et son contraire dans la même phrase !

Quant aux autres soutiens par des maîtres spécialisés, je vous rappelle que, pour les écoles de 25 classes, c'est un poste supplémentaire à 25%. Pour les écoles de 30 classes, c'est un 50% de plus. Donc, l'effort est relativement normal.

Enfin, vous affirmez qu'il n'y a pas de volonté au DIP de réduire le nombre de postes... Mais avez-vous vu le bilan de la politique de ces dix dernières années ? Pour un nombre constant d'élèves, en termes de budget et d'engagements par élève, on a coupé 25% du budget de l'enseignement à Genève ! Et c'est le seul chiffre qui est important - parce que certains disent que le budget a augmenté... Bien sûr, puisqu'il y a beaucoup plus d'élèves ! Toutefois, par élève, le budget en argent constant a diminué de 25% en dix ans ! Pensez-vous vraiment qu'ils n'ont pas fait d'effort ?

Si l'école s'est dégradée pendant cette période, à quoi croyez-vous que c'est dû ? Il n'y a pas toujours de corrélation entre les moyens et le résultat, mais, lorsqu'on coupe un quart des moyens - qu'il s'agisse d'une entreprise, d'une institution, d'une école privée ou publique - on ne peut pas garantir les mêmes prestations !

Les socialistes condamnent la politique que vous souhaitez voir mise en place et ils seront toujours là pour barrer la route au MCG, qui veut couper dans les moyens donnés à l'école ! (Applaudissements.)

La présidente. Etant donné l'heure et le nombre de personnes encore inscrites, je vous propose de faire une pause. Nous reprendrons à 10h05 précises ! A tout de suite !

Suite du deuxième débat (livre jaune - PL 10248-A): Session 10 (juin 2008) - Séance 55 du 27.06.2008